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a) BIBLIOTHE QUE : PEDAGUGH aid GHG QUE éléments de linguistique francaise syntaxe BIBLIOGRAPHIE De l'ensemble des livres et des articles consacrés a la grammaire générative et transforma- tionnelle, nous ne donnerons ici que les deux ouvrages fondamentaux qui ont fourni les bases théoriques : N. Chomsky, Syntactic Siructures, La Haye, Mouton, 2¢ éd, 1962 (1° édition 1957), traduit en frangais aux Editions du Seuil 1969. — Aspects of the Theory of Syntax. Cambridge, The M. I. T. Press 1965. On trouvera un exposé méthodologique des premiers états de la grammaire générative dans: N. Ruwer, Introduction dla grammaire générative. Paris, Plon, 1968. Cet ouvrage contient une ample bibliographie qui pourra étre complétée par celles que contiennent les numéros 8 (La phonologie générative, de S.A. SCHANE) et 14 (Nouvelles tendances en syntaxe générative, de N. RUWET) de la revue Langages (Didier - Larousse). On trouvera une application 4 la syntaxe de l'anglais dans : R. A. Jacons et P. S. Rosennaum, English transformational Grammar, Londres, Toronto, ‘Waltham Blaidsdell, 1968. La théorie transformationnelle a inspiré les ouvrages de: J. Dunois, Grammaire structurale du francais, tome Ul, la phrase ét les transformations. Paris, Larousse, 1969. M. Gross, Grammaire transformationnelle du frangais (Syntaxe du verbe). Paris, Larousse, 1968, On trouvera la théorie transformationnelle replacée dans le cadre dela linguistique générale dans: J. L¥oNs, Introduction to theoretical Linguistics. Cambridge University Press 1968, traduc- tion frangaise Larousse 1970 : Linguistique générale, introduction a la linguistique théorique. 10 LA GRAMMAIRE 1, — LA GRAMMAIRE 1.1. Une grammaire est une description des phrases d'une langue. Précisons chacun des termes utilisés dans cette définition : ‘Une Jangue est un ensemble de phrases et celles-ci sont des suites d’éléments (sons ou mots) qui sont liés les uns aux autres. On peut dans une théorie syntaxique représenter la phrase, modéle abstrait et général de ces phrast conerétes et particuliéres, comme une suite d’éiéments discrets enchainés les uns aux autres, Cet enchainement est réalisé par l’opération dite de concaténd» tion, qui est indiquée par le signe +. Cette suite est donc un objet abstrait. Ainsi la phrase Z sera faite de la suite des éléments : Ee Les suites d’éléments de la langue concaténés, appelées séquences (la séqui est une suite ordonnée), qui sont permises dans une langue naturelle appelées des phrases de cette Jangue. Les séquences qui ne sont pas permis dans une langue sont des non-phrases dans cette langue. Ainsi la séquence : (1) Georges regarde Ia télévision. est une phrase de la langue frangaise ; on dit aussi une phrase grat ou une phrase bien formée. En revanche : (2) *La regarde télévision Georges. est un « tas de mots », une non-phrase (on met un asférisque devant phrases). 1.2. Un ensemble de régles définit les séquences permises dans donnée et c'est cet ensemble qui constitue la grammaire do exemple du frangais. Cette grammaire constitue le savoir li parlant le frangais, c’est-A-dire qu’elle définit leur compét Vutilisation particuligre que chaque sujet parlant fait de la situation de communication, 4 un moment donné (en sy performance du locuteur. La performance n’est pas constituée de la seule utilisation du savoir linguis- tique, mais elle dépend de facteurs psychologiques (mémorisation, perception, attention, motivation) ou socio-culturels (appartenance a un groupe social, mode d’enseignement, etc.). Bien que la performance intégre la compétence, ce sont la deux modéles différents. Ce que nous appelons la grammaire du frangais contemporain est la définition de la seule compétence des sujets parlant Je frangais, c’est-a-dire des Jocuteurs natifs du frangais, L’objet de la linguistique en tant que science de la langue est l’établissement du modéle de compétence (la grammaire), Comme étude scientifique, la linguis- tique exige une vérification des régles établies. Cette vérification se fait par le moyen des jugements du locuteur natif sur les phrases formées a l’aide de ces régles. — LA GRAMMATICALITE, 2.1. Les régles de la grammaire frangaise doivent permettre de former et @expliquer toutes les phrases que les locuteurs frangais considérent comme appartenant a leur langue. Chaque sujet parlant porte en effet sur les énoncés produits des jugements de grammaticalité : ces jugements reviennent & considérer qu'un énoncé est grammaticalement admissible ou que, en sens inverse, il est plus ou moins déviant par rapport aux régles de la grammaire. Le jugement de grammaticalité ne se fait pas seulement par rejets ou accepta- tions ; il comporte aussi des degrés. Les degrés de grammaticalité se définissent par une adéquation ou une non-adéquation a des régles appartenant & des niveaux différents, Un énoncé pourra étre plus ou moins agrammatical selon Ie niveau de Ia régle violée. Ainsi une phrase sera jugée déviante si elle ne comporte qu'une partie de la structure grammaticale décrite par la grammaire : on dira que c’est une semi- phrase (la grammaticalité douteuse est indiquée par un point d’interrogation). Par exemple la semi-phrase : (3) * Enfant aimer chocolat. conserve l’ordre des éléments caractéristique de la phrase frangaise. Les locu- teurs natifs reconnaissent cet ordre et constatent (jugent) dans cette phrase absence de certains éléments: aimer n’a pas de marques de temps ni de personne ; enfant et chocolat ne sont pas précédés d’article. En appliquant les régles de grammaire, on ne forme que des phrases gram- maticales. Aussi dit-on que la grammaire d’une langue (le modéle de compé- tence) doit permettre de générer (d’engendrer, d’expliciter ou de décrire) toutes les phrases grammaticales de cette langue, et rien que celles-ci : la grammaire frangaise décrit de manitre explicite les phrases grammaticales du francais. 2.2, La grammaire est commune & tous les sujets parlant frangais et c’est en ce sens que l’on pourrait dire que le modéle de compétence définit une norme. Cependant on ne doit pas confondre la grammaticalité avec ce que l’on appelle habituellement la norme. Cette derniére se référe souvent & un usage 12 défini de fa langue, limité par les contraintes socio-culturelles. Ainsi la phrase peut étre jugée incorrecte par un groupe particulier de locuteurs dans une situation donnée. Les grammairiens puristes condamnent certaines construc- tions et portent sur elles un jugement de valeur. La grammaire définit certes une norme puisque par définition toute phrase qu’elle ne génére pas est agram- maticale, mais elle est indépendante de tout jugement de valeur. 2.3. La grammaticalité ne se confond pas non plus avec la « vérité» de Yassertion. Une phrase grammaticale peut aller & I’encontre : — de Ja vérité : (4) Lhomme a débarqué sur Mars en 1950. — de l'expérience socio-culturelle de la communauté linguistique : (6) Les gens ont vu un cheval rouge. — des régles de la logique commune : (6) Le feu une fois éteint s*est mis @ briller la maison. De telles phrases seraient plus ou moins refusées au nom de critéres qui ne relévent pas de la grammaire. La grammaticalité est indépendante des traits spécifiques de la situation, prise en son sens large. 2.4, La grammaticalité se distingue aussi de la signification ; celle-ci releve de la compatibilité ou de l’incompatibilité entre les termes du lexique a T’inté- rieur du cadre défini par la régle grammaticale. Ainsi : (1) Pierre élucide le probléme. (8) Le chat boit du lait. sont des phrases sémantiques ; elles sont interprétables sémantiquement. Mais : (9) Le vestibule élucide la course. (10) Le lait boit du courage. sont des phrases asémantiques ; ce sont des phrases dont linterprétation sémantique est impossible ou trés difficile. Pour (9) il est difficile d’interpréter élucider avec un sujet désignant un objet concret comme vestibule ; pour (10) boire est difficile A interpréter, sinon métaphoriquement, avec un sujet non animé comme /ait et un complément abstrait comme courage. Mais ces phrases asémantiques sont des phrases bien formées du point de vue strictement syntaxique. 13 3.— LES PARTIES DE LA GRAMMAIRE. 3.1, La construction d’une grammaire, pour étre systématique et rigou- reuse, doit répondre & certaines exigences formelles. On distingue dans la grammaire trois parties fondamentales : — une syntaxe : ce sont les régles définissant les suites possibles ; — une sémantique : ce sont les régles définissant l’interprétation 4 donner aux suites générées par la syntaxe ; — une phonologie et une phonétique : ce sont les régles qui réalisent en une séquence de sons les suites générées par la syntaxe. Par exemple, si c’est la syntaxe qui définit la phrase comme formée d'un syntagme nominal sujet et d'un syntagme verbal prédicat, c’est la sémantique qui interpréte cette structure syntaxique comme celle d’un théme dont on dit quelque chose (commentaire) (Fig. 1). SYNTAXE ili funaeai cia a PHRASE _Risles dea base Structure profonde ee te Stieture de sutace = pit nee composante Fig Interpretation Inteiprtation sémantique phonétique SEMANTIQUE PHOROLOGIE et PHONETIQUE 3.2, La syntaxe, partie essentielle de la grammaire, est elle-méme formée de deux grandes parties : — la base qui définit les structures fondamentales ; — les transformations dont les régles permettent de passer des structures pro- fondes (définies par la base) aux structures des phrases telles qu’elles se présen- tent dans la langue (structures de surface), A i exemple, /a base définit les régles qui permettent de générer (en simpli- iant) : (11) La mére entend une chose. (12) L’enfant chante. La partie transformationnelle de la syntaxe définit les régles qui permettent d’aboutir a: (13) La mére entend que l'enfant chante. (14) La mere entend enfant chanter. 14 Mais il s’agit encore d’une structure abstraite ; c’est seulement aprés l’applica- tion des régles phonologiques et phonétiques que \'on obtiendra les phrases effectivement réalisées. 3.3. La base est, 4 son tour, formée de deux parties : 1, La composante catégorielle, liste de régles qui définissent les relations grammaticales entre les éléments constituant les structures profondes et repré- sentés par les symboles catégoriels. Ainsi la composante catégorielle définit la phrase comme formée de la suite des symboles : SN + SV Ces symboles représentent des éléments constituants, le syntagme nominal et le syntagme verbal. La composante catégorielle définit la relation grammaticale entre les deux symboles : dansla formule ci-dessus, c’est celle de sujet et de prédicat. 2. Le lexique, dictionnaire de la langue ott les termes (morphémes) sont défi- nis par des séries de fraits, caractéristiques catégorielles de divers types. F Ainsi le dictionnaire a entrée lexicale « mére» donne les traits de: nom commun [+commun], animé [-+animé], humain [+humain], etc. La base définit les combinaisons des symboles catégoriels ; les régles lexi- cales remplacent ces symboles catégoriels par les termes appropriés du lexique. Ainsi la base catégorielle va nous donner pour les phrases (11) et (12) la suite des symboles : (11) Art + N + Prés + V + Art + N (12) Art + N + Prés + V selon les régles que nous verrons dans les chapitres suivants (les symboles étant ceux de article, nom, présent, verbe). Les régles lexicales vont par exemple substituer mére & N, entend & V dans la phrase (11), Je & Art et enfant 4 N dans la phrase (12), etc. Une fois appliquées toutes les régles lexicales, nous obtien- drons les structures profondes : (11) La + mére + t + entendre + une + chose. (12) Le + enfant + t + chanter. Soumises aux régles de transformation, ces structures profondes deviennent des structures de surface : La + mére + entendre + t + Je + enfant + chanter. Ce sont les régles phonologiques et phonétiques qui permettront de réaliser cette structure de surface abstraite par : 15 (14) La mére entend enfant chanter. Nous reviendrons sur chacune de ces définitions dans les chapitres suivants, Remarque. La construction de cette grammaire est synchronique. Une fois établis les modéles de compétence d’érars de langue historique- ment distincts, on pourra faire une étude diachronique quiconsisterad définir les modifications intervenues au cours de histoire (de la dia- chronie) dans Ja partie transformationnelle et dans les régles phonéti- ques et phonologiques. Toutefois la construction des grammaires du frangais classique ou de l’ancien frangais se heurte a la difficulté fonda- mentale que les jugements de grammaticalité ne peuvent étre saisis que par l'intermédiaire des jugements des grammairiens de lépoque considérée, 16 Ir LA PHRASE 1, — LA PHRASE, LE NOYAU ET LES SYNTAGMES 1.1. La structure profonde d'une phrase d’une langue et, en particulier, du frangais est constituée de deux éléments : un constituant-de phrase, dont nous étudierons au chapitre XIII les différentes formes, et un noyau. Par exemple, les phrases : (1) Pierre est-il venu ? Q) Pierre n'est pas venu. sont constituées d’un constituant de phrase, qui est « interrogation » pour (1) et «déclaration» + « négation » pour (2), et d’un noyaw quiest, dans les deux cas, Pierre est venu. 1.2. Pour pouvoir formaliser la grammaire et écrire Jes régles par des formules, on représente les différents constituants par des symboles : \a phrase de base, symbole initial, est représentée par le symbole 5, le constituant de phrase est représenté par le symbole Const, et le noyau est représenté par le symbole P (le symbole P a été choisi parce que, dans la premiére étape de. la théorie, le noyau a été considéré comme la phrase de base). On dira donc que la phrase de base £ est composée de Const + P, le signe + (dont on fait parfois l'économie dans certaines descriptions) indique que les deux termes sont réunis par l'opération de concaténation. Ceci constitue Je premier postulat de la grammaire. On peut traduire ce postulat par une formule : 2 > Const + P La fléche est le symbole qui indique que ¥ est écrit par la suite Const + P. On dit que Z, A gauche de la fiéche, se réécrit 4 droite de la fléche sous la forme Const + P. Le symbole X est donc un symbole unique qu’on développe ou qu'on régcrit sous la forme Const + P, qui constitue une suite de symboles, Les régles de ce type sont appelées des régles de réécriture. On peut les considérer comme des instructions qui sont données de réécrire ce qui est situé A gauche de la fléche sous la forme de ce qui est situé A droite de la fiéche et dans 'ordre ott Jes symboles figurent : dans le cas présent on dira que est réécrit Const suivi de P. Comme il s'agit d'une suite ordonnée de symboles, on devrait dire 17 « séquence » ; "habitude a été prise dans 1a terminologie linguistique de parler en ce cas de suite, et c’est ce que nous ferons. 1.3. Un deuxiéme postulat définit la constitution du noyau, Celui-ci est formé de deux parties qu’on appelle les constituants du noyau, le syntagme nominal dont l'abréviation est SN et le syntagme verbal dont l’abréviation est SV. On dira que P est formé de SN + SV. On pourra done poser la formule : P+SN+S8V Par exemple le noyau P de Ja phrase Pierre est venu est constitué d’un syn- tagme nominal SN Pierre et d'un syntagme verbal SV est vertu. 1.4, Ona donc posé, jusqu’a maintenant, deux postulats traduits par deux régles de réécriture () £- Const + P (I) P+SN+S8V Les régles de réécriture obéissent & un certain nombre de principes : un de ces principes est qu'il ne peut y avoir qu'un symbole & gauche de la fléche ; un autre est qu’un symbole écrit & gauche de Ia fléche ne peut étre réécrit & droite par une suite de symboles dont lui-méme ferait partie, Remarque. Ces affirmations que la structure profonde de toute phrase contient nécessairement un constituant de phrase et un noyau et que tout noyau contient nécessairement un syntagme nominal et un syntagme verbal sont des postulats. Ils ont pour justification essen- tielle qu’ils permettent de décrire de maniére satisfaisante le fonc- tionnement de la langue frangaise. S'il se révélait qu'il n'en est pas ainsi, il faudrait modifier ces postulats et nous verrons plus loin que certaines modifications ont été proposées. Le constituant de phrase, le noyau, le syntagme nominal et le syntagme verbal sont des éléments adstraits, des entités théoriques. Les exemples que nous avons donnés de chacune des régles sont de simples illustrations pédago- giques. 1.5. Certaines phrases réalisées de la langue ne paraissent pas répondre & ces formules. Ainsi les phrases & impératif : (3) Venez demain a cing heures. (4) Allons au cinéma, ne présentent pas la suite SN + SV. En fait, comme toutes les phrases de la langue, ces impératifs ont subi des transformations et impliquent, comme nous le verrons, dans leur structure profonde, la présence d'un SN. 18 De méme les phrases exclamatives ou les interpellations qui ne laissent paraitre que des syntagmes nominaux ; (5) Georges! (6) Quel spectacle | impliquent en fait dans la structure profonde la présence d'un syntagme verbal. 1.6. Pour marquer les limites de chaque constituant, on utilise, entre autres notations, celle de # qui signifie frontiére. Ceci a l'avantage de maintenir Funité d’un constituant enchassé (inséré, introduit) dans une suite de symboles (V. Chap. XXII) ; ce signe peut donc se trouver avec tous les types de consti- tuants, On aura ainsi: AL Ces signes marquent une frontiére de phrase. Par exemple : (2) Lhomme qui est Ia est mon frere. serait représenté par : # Lihomme # qui est 1d # est mon frére # Les frontiéres de phrase isolent qui est la, phrase enchassée dans l'homme est mon frére, phrase elle-méme limitée par deux frontigres de phrase. De méme on trouve # SN #, c’est-d-dire une frontiére de syntagme. Ce concept est particuligrement utile dans Ja transformation affixale ; ailleurs nous en ferons l'économie. 2, — LA REPRESENTATION PAR DES ARBRES 2.1, On dispose de plusieurs moyens pour représenter les structures de phrases, Nous utiliserons la représentation structurelle par des arbres : les régles de réécriture peuvent en effet constituer des régles de formation d'arbre, ‘La régle est représentée par un arbre dont les neuds sont constitués par les symboles de la régle. Ainsi les régles : () Z + Const + P (il) P—+SN+SV sont représentées par l’arbre suivant (Fig. 2). Dans cet arbre, 2, Const, SN et SV sont des meuds, les lignes qui joignent les neeuds sont des branches ; le neeud X domine les noeuds Const et P, et le noeud P domine les nceuds SN et SV. Le symbole & gauche de la fléche dans la régle de réécriture correspondante est le noeud dominant, les symboles 4 droite 19 de fa fléche sont les nceuds dominés. Cet arbre constitue la représentation syntagmatique ou représentation structurelle de X (on dit aussi le marqueur syntagmatique de 5). = Fig? Const si sv 2,2. On doit distinguer plusieurs types de régles de réécriture ; celles que nous yenons de voir sont des régles de formation d’arbre. D’autres régles, les régles de réécriture lexicale, donnent l’instruction de réécrire un symbole par des « mots », ou suites de mots, empruntés au frangais (ceux-ci sont toujours des objets abstraits, car il faut distinguer le mot, objet abstrait, de ses réalisations en substance phonique ou graphique) ; on aurait alors les régles de réécriture suivantes : SN — Jean SV = lit le journal Si on applique les régles de réécriture de ¥ (traits pleins dans la Fig. 3) et les régles de rééeriture lexicale des syntagmes (traits en pointillé), on obtient la phrase suivante (Fig. 3): (8) Jean lit le journal. Fig.3 Coast {[atiaton] [use] Lite journal] 20 La régle de formation P +SN + SV définit une suite non terminale de symboles. Cette suite SN + SV est dite non terminale puisque les symboles SN et SV vont étre réécrits l’un et l'autre par des « mots » qui, eux, sont des symboles terminaux. II n’y aura plus ensuite de régles qui donneront l’instruc- tion de réécrire ces « mots »; ceux-ci constitueront donc une suite terminale (ces définitions seront par la suite un peu modifiées : V. Chap. XIII, 3). Ces régles de réécriture lexicale, différentes des régles de formation d’arbre, forment avec ces derniéres les régies de la composante de base. Ainsi la séquence de « mots » : Jean + lit le journal est une suite terminale. Supposons, a cette étape de l’exposé, que nous puissions réécrire SN et SV de plusieurs maniéres et que nous ayons, par exemple, les régles de réécriture suivantes : @ 2 + Const + P (1) Const + Affir (abréviation de « Affirmation ») (a) P+SN+SV enfant | (yy sw fren l lit Ie journal ™) Be est heureux ott les accolades indiquent que l'on peut réécrire SN soit "enfant soit Jean et que SV peut étre réécrit au choix lit le journal ou est heureux, Si on applique systématiquement ces régles, on obtient les quatre « phrases » suivantes : (9) L’enfant lit le journal. (10) Jean lit te journal. (1) Lenfant est heureux. (12) Jean est heureux. Remarque 1. Les symboles SN et SV étant formés de deux lettres peuvent paraitre constitués de plusieurs éléments ; dans certains systémes, on a préféré utiliser N et V (que nous réservons ici pour la dénomination des catégories du Nom et du Verbe). Remarque 2, Au lieu de disposer les termes les uns au-dessous des autres et de les réunir par des. accolades, on peut les mettre a la suite les uns des autres en les séparant par des virgules : SN = {Ienfant, Jean } Remarque 3, Les régles de réécriture lexicale wont ici qu'une valeur démonstrative ; elles seront remplacées ultérieurement par les régles "insertion lexicale (V. Chap. VI, 2). 21 2.3. On utilise aussi d'autres représentations structurelles, en particulier celle que l'on appelle la parenthétisation étiquetée. Celle-ci consiste & séparer les constituants par des parenthéses ; constituants de la phrase, puis consti- tuants du noyau, puis constituants des syntagmes. Les parenthéses qui enferment un constituant portent le nom (/'étiquette) du type de constituant (sa catégorie), d'ou le nom de parenthétisation étiquetée donné A cette repré- sentation. Ainsi la formule : PSN + SV qui peut étre réécrite sous la forme L’enfant lit le journal sera représentée de la maniére suivante : r(sy(U'enfant)gy sy(lit le journal)sy )p Cette représentation a les mémes propriétés que larbre, mais son efficacité pédagogique est plus faible. 3.— FONCTIONS ET CATEGORIES 3.1. Les symboles qui entrent dans les régles de formation d’arbre repré- sentent des carégories. La catégorie est une propriété inhérente au symbole. Ainsi SN est la catégorie du syntagme nominal et SV la catégorie du syntagme verbal. En conséquence toutes les réécritures terminales de SN ou de SV appar- tiennent & la catégorie du syntagme nominal ou du syntagme verbal. Dans les phrases précédentes /"enfant et Jean, qui sont la réécriture de SN, appar- tiennent & la catégorie du SN dont ils sont des membres (ce sont des éléments de la classe « syntagme nominal ») ; Jit le journal et est heureux, qui sont Ja réécriture de SV, appartiennent a la catégorie du syntagme verbal SV. Les classes que constituent le syntagme nominal et le syntagme verbal sont done susceptibles de prendre un grand nombre de valeurs différentes, 3.2, Les fonctions définissent les relations que les symboles entretiennent entre eux dans Jes régles de formation d’arbre : ces relations sont dites gramma- ticales patce qu’elles définissent Ja grammaire. Ainsi la régle : PSN + SV représente le fait que SN précéde SV ou que SV suit SN et que tous deux sont dominés par le symbole P, Dans cette régle, SN aura la fonction de sujet et SV aura Ja fonction de prédicat. Les fonctions se définissent par les positions réciproques dans l’arbre qui est la représentation structurelle de la régle telle qu'on I’a écrite, Tout SN qui, dans cette régle, précéde SV, a la fonction sujet et tout SV qui, dans cette régle, suit SN a la fonction prédicat. Dans d’autres régles, comme nous le verrons, SN peut avoir des fonctions différentes. Etant ainsi définie, la fonction attribue au syntagme nominal précédant le syntagme verbal dans la structure du noyau le trait grammatical sujet, que l’on note par [+sujet], et tout syntagme nominal qui n’est pas sujet dans cette régle se voit attribuer le trait grammatical [—sujet]. (Les sraits sont représentés 22 entre crochets droits par des symboles positifs ou négatifs.) Ce trait grammatical provoquera des transformations différentes selon les langues : en Jatin le trait [+sujet] se transformera en un affixe de nominatif ; en frangais il sera traduit par Ja place du syntagme nominal avant le syntagme verbal dans la phrase réalisée. On doit donc distinguer l’ordre, arbitrairement choisi, des constituants du noyau (cet ordre définit les fonctions) et la place des éléments dans Ja phrase réalisée (cette place réalise la fonction dans les langues ott l’ordre est per tinent), Cette distinction permet de correlier, par une structure profonde analogue, la flexion casuelle du latin et la position des syntagmes en frangais. On représentera ainsi la catégorie et Ja fonction dans P (Fig, 4) : P Fig sn sv Catégorie: SN Catégorie: SV Fonction: [sujet] Fonction [+1édcal) 3.3, Le sujet ne se confond pas avec « la personne ou la chose qui fait action », c'est-a-dire avec la définition sémantique de l’actant, ni le prédicat avec « ce qui exprime l’action ». Ces définitions par la « substance » (la réfé- rence aux objets signifiés) présentent des difficultés, car les syntagmes nomi- naux peuvent indiquer des actions (/a marche des troupes) et les syntagmes verbaux peuvent ne pas indiquer des actions (i/ semble matheureux). Le sujet ne peut pas non plus étre confondu avec le théme, ni le prédicat avec « ce qu'on dit du théme », car on exclut alors les impératifs ou, d’une maniére plus générale, les performatifs, c’est-A-dire les énoncés qui expriment un ordre, une invitation, un engagement, un souhait, comme Viens / Les fonctions de sujet et de prédicat sont définies uniquement par les relations grammaticales telles qu’elles sont données par l’ordre des constituants dans la formule de formation d’arbre : P + SN + SV. Ceci n'implique pas l’absence de rapport entre la structure syntaxique et la structure sémantique ; mais ce rapport reste a définir. 23 UL LES TRANSFORMATIONS ET L’AMBIGUITE 1, — LES TRANSFORMATIONS 1.1, Auchapitre I nous avons vu que toute phrase a une structure profonde et une structure de surface et que les transformations transforment la premiére en la seconde. Les phrases réalisées résultent donc toutes de l'application de transformations : en ce sens, ce sont des phrases transformées. 1.2, Les transformations portent le plus souvent le nom du résultat de lopération. Ainsi la relative, introduite par un pronom relatif comme qui, que, dont, otc., est une phrase transformée et l'ensemble des opérations nécessaires pour obtenir cette relative est appelé transformation relative ou relativisation. Parfois la transformation porte le nom de l’élément constituant sur lequel porte Topération : ainsi la transformation affixale décrit V'opération de déplacement qui affecte les constituants affixes de l’auxiliaire. 1.3, La éransformation est représentée par le symbole T qui porte en expo- sant inférieur Pabréviation du type d’opération impliqué, Dans les exemples donnés en 1.2, la transformation relative sera symbolisée par T,,,, et la trans- formation affixale par Typ. 1.4, On verra par la suite (III, 1.5) qu’il existe plusieurs types de trans- formations, qui tous dépendent de la présence dans la base de certains consti- tuants : les transformations sont done toutes odligatoires, mais le constituant qui déclenche la transformation peut étre lui-méme obligatoire ou facultatif dans la régle de réécriture. Ainsi, comme nous le verrons au chapitre XLV, tout auxiliaire comporte un aflixe : la transformation affixale est done constante dans la génération de toute phrase. En revanche le constituant de phrase (Const) peut étre ou l'inter- rogation, ou la négation, ou l’emphase, etc. :selon le choix effectué, la transfor- mation sera celle de l'interrogation, de la négation, de I’emphase. La transfor- mation interrogative dépend done du choix, effectué dans la base, du consti- tuant interrogatif comme constituant de base. C'est pour cette raison que dans les premieres étapes de la théorie on distinguait les transformations obligatoires (comme la transformation affixale) et les transformations facultatives (comme la transformation interrogative). Mais en fait c'est le choix du constituant qui 24 est facultatif, et non la transformation ; aussi toutes les transformations sont- elles considérées maintenant comme obligatoires puisqu’elles dépendent de la présence dans la phrase de base d’un constituant précis. 1.5. On peut distinguer deux types de transformations selon que les opéra- tions effectuées intéressent une ou deux phrases de base : dans le premier cas on parlera de transformations unaires (ou singuliéres), dans le second cas de transformations binaires ou généralisées. La transformation interrogative ou la transformation négative sont des transformations unaires ; la transformation relative, qui intéresse deux phrases de base, est une transformation généralisée. Lorsque, dans une étape ultérieure de la théorie, on a permis A I représentant Ja phrase de base de figurer & droite de la fléche de réécriture, c’est-a-dire d’étre ‘un constituant a l’intérieur d'une phrase de base, comme dans : SN+SV+(2) on a pu faire Péconomie de la différence terminologique entre les deux types de transformations : les transformations (unaires) qui opérent sur des suites ne contenant qu’une occurrence de ne se distinguent plus des transformations (généralisées) qui portent sur les suites contenant plus d’une occurrence de 2. Mais la différence entre les deux types de transformation se maintient quelle que soit la dénomination donnée ou quel que soit le processus envisage. 1.6. Les transformations sont ordonnées en ce sens qu’elles ne peuvent pas se faire dans n'importe quel ordre. Prenons exemple de deux transformations indépendantes : 1) celle de pro arominalisation qui transforme un syntagme nominal en un pronom ; 2) celle dimpératif, qui s’applique lorsqu’on a choisi comme constituant de phrase Je constituant impératif. Si on applique 4 la suite qui sous-tend la phrase : (1) Vous mettez Ia valise dans la voiture. la transformation dite de pronominalisation, on obtient successivement : *Vous mettez la dans la voiture, puis par déplacement : Q) Vous la mettez dans Ia voiture. " La phrase impérative correspondante est : (3) Mettez-la dans Ia voiture ! Cette phrase suppose qu’il y a dans la structure profonde un syntagme nomi- nal sujet qui apparait dans Je cas de ’emphase : (4) Vous, mettez-la dans la voiture ! On posera done, en structure profonde, le noyau : (5) (Vous) mettez Ia valise dans la voiture. 25 3 Les opérations se font dans ordre suivant : d’abord la transformation impérative, c’est-A-dire l’effacement du syntagme nominal sujet : (6) Mettez Ia valise dans votre voiture ! puis la pronominalisation ; (2) Mettez-la dans Ia voiture ! Le déplacement du pronom /a est blogué par effacement du pronom sujet vous, Sila Pronominalisation s’était effectuée avant Ja transformation impérative, on serait entré en ce cas dans la régle générale : (8) *(Vous) metiez la dans la voiture, qui devient : (9) (Vous) la mettez dans la voiture. et leffacement du syntagme nominal sujet donnerait : (10) *Za mertez dans la voiture ! Par conséquent les transformations impérative et pronominale doivent s’effec- tuer dans un certain ordre, Remarque. La phrase (10) est actuellement agrammaticale ; il est 4 souligner qu’elle ne ]’était pas en francais du xvi¢ siécle, ce qui laisse & penser que l’ordre des transformations peut se modifier dans I’évo- lution d'une langue (en diachronic). 2, —LA PROCEDURE TRANSFORMATIONNELLE La procédure transformationnelle définit les operations élémentaires qui sont communes A l’ensemble des transformations, 1) Une de ces opérations est celle du déplacement. Elle consiste & déplacer un constituant de la phrase de base © dans des conditions définies par la trans- formation elle-méme. Par exemple, la transformation pronominale (Deal comme nous venons de le voir, comporte une opération de déplacement du syntagme nominal devant le syntagme verbal et aprés le syntagme nominal ! sujet. Ainsi si on a: (11) Pierre voit le film. la Ty, donne : * Pierre voit le, puis par déplacement : | (12) Pierre Ie voit, 2) Une autre de ces opérations est celle de leffacement. Elle consiste & 26 effacer un constituant présent dans la base dans des conditions définies par la transformation elle-méme, Une des conditions les plus fréquemment rencon- trées est ]a présence dans une phrase transformée de constituants identiques : il y aura ainsi des effacements de syntagmes ‘nominaux identiques dans une méme phrase. Ainsi pour rendre compte de certaines ressemblances de sens entre les deux phrases réalisées : (13) Je désire voir Paul. (14) I désire que je voie Paul. on doit poser que ces deux phrases ont 4 un certain niveau la méme structure de base, la premi&re impliquant alors : (15) "Je désire que je voie Paul. Pour obtenir la phrase (13), il faut poser un effacement du syntagme nominal sujet de ia phrase introduite par gue (V. Chap. XXII), ce syntagme étant iden- tique au syntagme nominal sujet de la premiére phrase (Je désire) ; cet efface- ment entraine l'effacement du temps (personne et nombre) du verbe. De méme on aura l’effacement de syntagmes verbaux identiques. Pour rendre compte des phrases coordonnées comme : (16) Georges lit un livre et Pierre aussi. out les deux phrases reliées par la coordination et ont la méme structure synta« xique profonde, on devra poser qu'il y a un effacement du deuxiéme syntagme verbal identique au premier syntagme verbal : (17) Georges lit un livre et Pierre aussi lit un livre. Les conditions qui entrainent I’effacement de la copule étre sont de nature différente, mais l’opération est la méme. Si l'on compare les deux phrasea réalisées : (18) Je crois étre en retard. (19) Je crois Pierre en retard. et leurs structures profondes : (20) Je crois que je suis en retard. (21) Je crois que Pierre est en retard. on constate que la différence entre (18) et (19) tient A V'effacement de # dans la phrase (19) et que le maintien de ére dans (18) est lié A leflucement du syntagme nominal sujet de la complétive, tandis que l’eflacement de éire dans (19) est lié au maintien du sujet de la complétive (V. Chap. XXII), 3) On peut également envisager deux autres types d’opérations ¢ ? — Ja substitution, qui peut étre analysée comme la combinaison d'un déplae cement et d’un effacement ; — Vaddition : puisque théoriquement les transformations ne modifient pas le sens des structures profondes qui sont interprétées par la composante séman- tique, toute transformation qui ajouterait un élément ne pourrait introduire qu’un élément vide de sens, Pour cette raison (et pour d’autres), nous ne retien- drons pas 'opération d'addition. — SYNONYMIE ET AMBIGUITE 3.1, Scules les structures profondes des phrases sont pertinentes en ce qui concerne le sens ; seules elles sont soumises & Pinterprétation sémantique (V. Chap. 1). Les transformations qui font passer de ces structures profondes aux structures de surface ne modifient pas le sens et n’ajoutent aucun sens. Ainsi la transformation négative est déclenchée quand la structure profonde d’une phrase comporte parmi ses constituants le constituant « négation ». La présence de ce dernier déclenche un ensemble d'opérations définies sous le nom de transformation négative. La différence entre la phrase affirmative et la phrase négative vient de ce que, dans leurs structures profondes, elles ont un constituant de phrase différent, mais elles ont le méme noyau P etleur ressem- Dlance vient de ce qu’elles ne différent que par ce constituant de phrase, Quand les structures profondes de deux phrases réalisées sont les mémes et que la seule différence tient aux transformations effectuées, alors les deux phrases ont le méme sens (synonymie). Par exemple les deux phrases réalisées : (22) Je désire que Pierre vienne. (23) Je désive la venue de Pierre. renvoient A la méme structure profonde qui, sous une forme simplifiée, se présente comme : (24) Pierre viendra, je désire cela, La différence vient de ce que 1a phrase (23) est issue de ta phrase (22) par une transformation dite de nominalisation qui ne modifie pas le sens (V.Chap. XXVI). 3.2, Inversement, certaines phrases réalisées ont plusieurs sens. Ce fait peut tenir au lexique, les mots ayant plusieurs sens (polysémie [ou ambiguité] lexicale), ou a la syntaxe (polysémie [ou ambiguité] syntaxique). Dans le deu- xiéme cas, la méme phrase réalisée doit avoir plusieurs structures profondes susceptibles d’autant d’interprétations. sémantigues ; c’est ce qui permet de dire qu'elle a plusieurs sens. Soit la phrase : (25) Le magistrat juge les enfants coupables. qui a deux représentations structurelles répondant a: (26) Le magistrat juge que les enfants sont coupables, (27) Le magistrat juge les enfants qui sont coupables. 28 i Pou t la Les deux structures profondes sont différentes (d’ot les deux sens) e phrase réalisée représente la convergence d’opérations différentes appliquées & ces deux structures. De méme Ja phrase : (28) Georges aime Marie autant que Jean. répond soit A: (29) Georges aime Marie autant que Jean aime Marie. soit a: (30) Georges aime Marie autant qu'il aime Jean. seri : inal Les structures profondes sont différentes : la fonction du syntagme nominal Jean dans la hee (28) peut étre interprétée de deux fagons différentes : des opérations d’effacement différentes & partir de (29) et (30) ont abouti au méme résultat (28). 29

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