Académique Documents
Professionnel Documents
Culture Documents
d’un cursus commun, ainsi que les interactions entre les acteurs, mais elle s’avère
d’un bien piètre secours pour rendre compte de l’influence exercée par les
« spectateurs », en l’occurrence les enseignants-chercheurs et les étudiants. Tout
comme en matière électorale, les « discrets » et les personnes qui refusent de
répondre exercent une influence d’autant plus grande qu’elle est difficile à cerner, et
tout comme en politique, les mêmes valeurs prises en compte dans le processus
décisionnel peuvent, selon la conjoncture, se combiner de façon différente et résulter
dans des décisions d’allure contradictoire, mais malgré tout cohérentes.
Reste alors la question de la pérennité de l’innovation pédagogique qui traverse
l’ouvrage, avec ses références aux retombées brutales des innovations fracassantes.
Il est clair que l’histoire de C@mpuSciences illustre le passage à l’agenda politique
d’une expérimentation relativement marginale, mais les dernières années de cette
aventure évoquent, avec la perte du financement, le risque d’une sortie de cet
agenda. Faut-il pour autant contraindre l’innovation pédagogique ou assurer un
financement récurrent ? On voit bien les problèmes que poserait la première
approche dans un métier où la tradition d’autonomie est grande; on imagine
également la difficulté à justifier la poursuite du financement quand d’autres besoins
restent à pourvoir. En fait, l’aventure des campus numériques aura probablement
permis de mieux cibler le financement public et de dégager les conditions de réussite
des projets. Dans le cas de C@mpuSciences, le système universitaire s’est maintenu
en l’état malgré l’innovation, dans celui de l’expérimentation en médecine, un
changement de pratiques semble s’implanter. Il reste à en tirer les leçons. La
pérennité repose en effet sur la réponse à des besoins légitimes, que vient soutenir
l’attribution de ressources financières, ainsi que dans le développement d’usages
répondant efficacement à ces besoins.
Quoiqu’il en soit, l’expérience de PCSM/Uel/C@mpuSciences relatée dans cet
ouvrage aura permis, de progresser considérablement dans la compréhension des
conditions de l’innovation pédagogique. Elle souligne notamment le défi que doit
relever une recherche « en » innovation, c’est-à-dire la mise en relation de
l’ensemble des points de vue présents dans le réseau social concerné, c’est-à-dire
aussi bien les innovateurs que les destinataires de l’innovation et les instances de
tutelle, en contrepoint avec l’état des connaissances existantes. De nombreuses pistes
ont été ouvertes, de nombreux constats précieux ont été effectués. En ce sens, nous
pensons que la réflexion proposée ici s’impose comme le prélude à une innovation
pédagogique cessant d’être vouée à la fatalité d’un éternel recommencement.
Patrick GUILLEMET
Télé-université (UQAM)
guillemet.patrick@teluq.uqam.ca