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La civilisation Lao

- Un peuple sans passé est un peuple sans avenir -

- Le futur appartient à celui qui a la plus longue mémoire –

- Que les racines du passé irriguent le présent pour faire fleurir l'avenir -

- Heureux celui qui va son chemin dans la vie, en emportant avec lui le savoir du passé -

- Écouter le passé, vivre le présent, penser le futur -

- Qui contrôle le passé, contrôle le futur ; qui contrôle le présent, contrôle le passé -

- L'histoire est le socle vital à la fondation de toute civilisation -

- Un peuple chanceux n'a pas d'Histoire, mais un peuple malchanceux encourt le plus
grand danger de perdre les écrits et la mémoire de son propre passé -

- Qui ignore l'Histoire est Condamné à la Revivre -

Édité le 11/07/2010
Réalisation et recherches : Frédéric Mariez
A l'occasion de la Rencontre Jeunesse Lao 2010
www.rjlao.com
SOMMAIRE

• Armoiries du royaume du Laos • Les villes du Lan Xang

• Le drapeau du Royaume Lao réunifié – Vientiane

• Avant le Lan Xang • Nâga ou Nak


• Le Patouxai
– Les Kha
• Vat Simuang
– La Plaine des Jarres
• That Luang
– Indianisation et essor du bouddhisme – Luang Prabang
dans l'Asie du S-E
• Le Phra Bang
– L’arrivée du Bouddhisme par l’empereur
Ashoka • Le palais royal
• Vat Xieng Thong
– Phra Lak Phra Lam : théâtre sacré Lao
• Phou Gneu & Gna Gneu
– L'Asie avant le Lan Xang

– L'Asie en 800 après JC.

– L'Asie en 1200 après JC

• Cartes du Lan Xang


SOMMAIRE (suite)

• Les grands rois Lao • La chute du Lan Xang

– Khun Borom ou Khoun Boulom : ancêtre – Drapeaux des royaumes de Luang


des dynasties Lao et Thaï Prabang, Vientiane, et Champassak

– Descente des Lao • Les derniers rois Lao

– Les invasions Mongoles – Oun Kham


– Fa Ngum : fondateur du Lan Xang – Sakharine
– L'art de la guerre Lao – L'Indochine Française
– Setthathirat : « le plus grand roi des rois » • Auguste Pavie
• Bayinnaung : grand empereur • « Guerre » Franco-Siamoise
Birman
• Restauration des monuments
• Le Bouddha d'Emeraude « Lao
Phra Keo »
– Sisavang Vong
• Vat Phra Keo
– Sri Savang Vatthana, le dernier roi du Laos
– Surinyavongsa : « le roi soleil »
• Le drapeau Lao actuel
• Les relations des voyageurs
occidentaux • La famille royale de Luang Prabang en exil
Le drapeau du Royaume Lao réunifié
(1952 - 1975)

Eléphant tricéphale : Erawan ou Airavata, l'éléphant blanc qui porte le dieu Indra (Phra In) dans la religion hindouiste.
C'est pour cela que les éléphants albinos sont considérés comme des trésors divins par les rois d'Asie du Sud-Est. Plus
un souverain en possède, et plus son prestige et sa légitimité céleste sont grands.

Les 3 têtes représentent aussi les 3 principautés de Luang Prabang, Vientiane, Champassak.

Piédestal à 5 marches (5 Sinh) : les 5 préceptes du bouddhisme (ne pas tuer, voler, tromper, mentir, s'intoxiquer).

Parasol blanc à 9 étages : les 9 paradis (savanh), symbole royal céleste d'origine hindoue. Le ciel est une toile de tissus
dont les trous sont les étoiles.
Armoiries du royaume du Laos
- famille royale de Luang Prabang -
(1949 – 1975)

Symboles aux pieds des éléphants:

A droite, le Kendi, cruche rituelle contenant les eaux des fleuves sacrés du royaume, bénite par les dieux et les bonzes. Lors de la cérémonie du couronnement
(sacrement), le roi se lave avec cette eau, symbole de purification.

A gauche, une coupe en forme de bourgeon de lotus. Elle symbolise la beauté de la conduite pure. Elle contient une eau qui a été filtrée à travers les 9
matières primordiales: terre, cendre, farine de blé, de riz, poudre de lotus, de jasmin, poussière d'acier, d'or, et de charbon. Lors de la cérémonie du
couronnement, le roi plonge sa main droite dans cette eau, puis la passe au dessus de sa tête.

Ensuite, le roi est aspergé d'eau bénite par les bonzes, puis sa cour, sous une gouttière en forme de Naga. Cette douche symbolise la bénédiction céleste.

Sur l'éléphant, un reliquaire en or du Bouddha représente le rayonnement spirituel du Bouddhisme.


Avant le Lan Xang

Les Kha : les plus anciens habitants connus du Laos (photo du XIXe s).
La Plaine des Jarres
(500 av .J.-C. à 800 ap. J.-C.)
Province de Xieng Khouang, près de Phonsavanh.

• Une civilisation disparue et inconnue :


– Urnes funéraires?
– Greniers?
– Sculptées par des géants?
• On raconte que l'ancien roi Khun
Cheung (1128 – 1169, tribu
Khammu ?), pour fêter la victoire
d'une longue et terrible bataille,
ordonna la confection des jarres pour
fermenter et contenir un énorme
volume d'alcool de riz.

Ci-contre: Hmongs sur l'une des plus grandes


jarres.
Indianisation et essor du bouddhisme dans l'Asie du Sud-Est
(1ers siècles après JC)

C'est le commerce avec l'Inde qui a apporté la culture indienne et le bouddhisme en Asie du Sud-Est.

drapeau du bouddhisme,
créé au Sri Lanka en 1880, adopté par tous les bouddhistes en 1950

Bleu (Nila): compassion universelle


Jaune (Pita): la voie du milieu
Rouge (Lohita): les bénédictions
Blanc (Odata): pureté et libération
Le royaume Môn de Dvâravatî (VIe - XIe s.) Orange (Manjesta): sagesse

Dvâravatî était une confédération de nombreuses cités-états Môn. Cette civilisation a été l'un des relais commerciaux et culturels
essentiels entre l'Inde et l'Asie du S-E. Les bouddhismes Theravâda et Mahâyâna se répandent dans la péninsule.

Fa Ngum imposera définitivement le Theravâda comme religion d'état lors de la fondation du Lan Xang en 1353. La religion est un
ciment de la cohésion nationale.
L’arrivée du Bouddhisme par l’empereur Ashoka
Grand empereur Indien, empire Maurya (300 av. JC).

Conquérant violent et sanguinaire au début, il a ensuite des remords. Il se convertit alors


au bouddhisme et au végétarisme. Il diffuse sa philosophie de non-violence et de
compassion pour tous les êtres vivants en Chine, Birmanie, Perse, Grèce... (voir la
légende du That Luang). Il ouvre des hôpitaux pour hommes et bêtes.
Son emblème (pilier de 4 lions entourant la roue du Dharma) est le symbole de la
république indienne moderne.
Phra Lak Phra Lam
théâtre sacré Lao

C'est la version Lao du Ramayana (épopée du


dieu Rama). Le Ramayana est une œuvre de
la mythologie Hindouiste, écrite en 400 av.
JC, à partir d'une tradition orale vieille de
plusieurs milliers d'années.

Représentation au palais de Luang Prabang, XIXe siècle.


L'Asie avant le Lan Xang

Chine (dès 3000 av. JC)


• De très nombreux royaumes et cités-états, qui naissent et
disparaissent avec les guerres.

Le Futur Laos :
• Chen-La (Ve – VIIIe siècle)

– Capitale Shresthapura, site du futur Vat Phu


(Champassak), avant les Khmers, par le roi
Shresthavarman.

• Confédération Aï-Lao : Nan-Chao (Ve – IXe siècle),


puis Dali (937 – 1253)

– Dans l'actuel Yunnan (Chine), royaumes


d'origine des dynasties Thaï-Lao.

– NB : les historiens ne savent pas si ces


royaumes étaient de culture Lao

• Muang Sua (698 – 1353)

– Ancêtre de Luang Prabang.

– Muang : cité fortifiée autonome Thaï-Lao,


comme en Gaule celtique ou dans la Grèce
antique.
L'Asie avant le Lan Xang…
Le futur Cambodge
Founan (IIIe-VIIe siècle) : avant les Khmers, apogée au
Ve siècle, commerce maritime avec les
indiens, perses, grecs et romains.
Empire Khmer (802-1462)
• Vat Phu (Champassak, Laos) : temple
hindouiste bâtit par Sūryavarman II (XIIe
s). Cependant, le site lui-même est bien
plus ancien (ex-capitale du Chenla au Ve
siècle).

Le futur Vietnam (2879 av. JC)


• Champa (IIe - XVIIe siècles)
• Daï-Viet (dès 938)

Le futur Siam (Thaïlande)


• Dvâravatî (Môns, VIe au XIe siècle)
• Haripunchaï (Môns, 661 – 1292)
• Lan Na « million de rizières »
– Capitale Chiangmai (1292), annexé au
Lan Xang (1551) puis au Siam (1892)
• Sukhothai (1238 – 1378)
• Ayutthaya (1350 – 1767)

Vat Phu, région de Champassak D’autres royaumes : Pagan (Birmanie), royaume Shan,
Srivijaya (Indonésie)...
L'Asie en 800 après JC
L'Asie en 1200 après JC
peu avant la fondation du Lan Xang (1353).
Ci-contre : Asie du S-E en 1745
Vientiane
Vieng Chan: « le rempart de santal »
Selon les légendes, la ville aurait été bâtie en 300 av- JC par un
prince sur les conseils d'un Naga à 7 têtes.

Sri Sattanak, son ancien nom Pâli, est le nom du roi des Nagas
son fondateur. Le Pâli est la langue liturgique (sacrée) indo-
aryenne dans le bouddhisme Theravâda.

Muang Phai Nam « la forteresse de bambous » ou Vieng Kham


«le rempart d'or » :

On raconte que lors de l'unification du royaume, Fa Ngum (1er


roi du Lan Xang) assiégea la ville, et celle-ci était protégée
par une enceinte dense de bambous pointus. Par ruse, il
ordonna de tirer dans ces bambous des milliers de flèches
enduites de feuilles d'or pendant 3 jours, puis sonna la
retraite. Les habitants sortirent alors de la ville pour couper
les bambous et récupérer les précieuses flèches. Le roi
caché en embuscade profita de ce moment de vulnérabilité
pour attaquer et s'emparer de la ville.

Vientiane aurait été une ancienne ville Khmer (XIIIe s.). Il y aurait
eu avant le royaume Môn de Candapuri (XIe s.).

Il y avait 3 enceintes fortifiées: palais (5 km de long), ville (30


km de long), campagne...

Ci-contre : bien que de style Thaï, et sans réalité historique, ces


illustrations montrent à quoi pouvait ressembler la civilisation
Lao des siècles passés.
Nâga ou Nak

Serpents de feu ou race mi-homme mi-serpent de la mythologie indienne. Ils sont les ennemis du dieu-aigle Garuda (Khout), la
monture de Vishnou. Médiateurs entre le ciel et la terre, ils symbolisent aussi le cycle du temps.

Les Nâgas servent d'escalier quand Bouddha descend du ciel. On raconte que le roi des Nâgas se transforma en humain pour suivre
les enseignements du Bouddha. Ce dernier le démasqua, et lui interdit l'accès au temple, car non-humain. Depuis, les Nâgas
gardent les temples, les escaliers et les toitures. Les mâles ont un nombre de têtes impair, et les femelles, un nombre pair.

Esprits des eaux, génies du monde sous-terrain, gardiens des trésors de la Terre, ils peuvent déclencher toutes sortes de
bénédictions (pluie, fertilité, fécondité...) ou de malédictions (épidémie, sécheresse...). Leur royaume sous-terrain de Muang
Badan s'étend sous la province de l'Isan. On y accède par des grottes sacrées le long du Mékong.

Chaque année, près de Nongkhaï, à la fin du Khao Phansa (carême bouddhique), à la pleine lune du 11e mois lunaire (15-25
octobre), se tient le festival des « feux des Nâgas » ou « Bang Faï Paya Nag ». Des eaux du Mékong sortent rapidement et
silencieusement de mystérieuses boules de lumières colorées, qui montent très haut dans le ciel. Ce sont les cadeaux des
Nâgas, pour rendre hommage au Bouddha, et remercier les humains pour leur respect envers le fleuve. Elles retombent sur les
rives sous forme de pierres précieuses, les mystérieux « œil de Nâgas », que l'on peut acheter sur les marchés de Bangkok.
Toute trace ces Nâgas est sacrée. Si un arbre ou une fleur prend la forme d'un Nâga, alors il devient sacré.
Le Patouxai à Vientiane
(1958)

1958 : construit à la mémoire des morts de l'indépendance Lao, d'abord nommé « anousavaly nak
lopkao » (monument des anciens combattants).

1975 : rebaptisé « patouxay » (porte de la victoire).

Son architecture donne un aperçu de ce à quoi ressemblaient les fortifications de Vientiane.


Vat Simuang à Vientiane
(XVe siècle)

C'est le plus vénéré des sanctuaires de Vientiane. Vat Simuang est situé à l'entrée d'une porte de l'ancien
rempart. Ce temple est construit autour de l'ancien pilier de la ville (lât), qui abrite son génie protecteur (phi).
Pour sauver la ville d'une invasion siamoise, une femme enceinte, Nang Si, s'y serait offerte en sacrifice en se
jetant dans un trou lors des travaux.
That Luang à Vientiane
(1560)

1560 : Vientiane devient la capitale du Lan Xang (après Luang Prabang) car plus facile à protéger, et plus proche
de la route vers Ayutthaya. Construction du That Luang par le roi Setthathirat.

Selon les archéologues, le That Luang aurait été construit sur le site d'un ancien temple Khmer (XII – XIIIe s.).

300 av. JC : des missionnaires de l'empereur indien Ashoka y apportèrent un cheveu ou le sternum (os de la cage
thoracique) de Bouddha. Un stupa y fut construit pour recevoir la relique.
Luang Prabang
Avant JC, la ville s'appelle Jawa (Java), qui signifie
« entourée d'eau ».

698 : fondation de Muang Sua, ex-territoire Khmer, par le


prince Khun Lo, fils de Khun Borom du royaume de
Nan-Chao.

Cette dynastie (Maharasa) fit régner 22 « rois Naga » sur le


trône de Muang Sua jusqu'à Fa Ngum. Ce règne
dynastique sera entrecoupé par la tutelle de
nombreuses puissances: Nanchao, Khmers...

La ville s'appellera ensuite Muang Xieng Dong Xieng Thong,


« la cité des arbres de feu ».

1128 – 1169 (?) : règne du roi Khun Cheung, de la tribu


Khammu (?, légende de la Plaine Des Jarres).

1353 : le roi Fa Ngum, de la lignée de Khun Borom, en fait la


capitale du Lan Xang.

1478-1486 : invasion, destruction, puis échec des Viet.

1560: transfert de la capitale de Xieng Dong Xieng Thong à


Vientiane, car plus facile à défendre face aux invasions.
La ville est rebaptisée Luang Prabang en l'honneur du
Prabang. Construction du Vat Xieng Thong (temple
royal).

1773 : la ville est pillée par les Birmans.

1874-1887 : pillage par les pirates chinois Ho (Pavillons


Noirs) de Deo Van Tri.

Ci-contre 1: Luang Prabang au XIXe siècle.

Ci-contre 2 : les pirates Ho, fresque du Vat Pa Huak


Le Phra Bang
Bouddha du VIIe siècle de 83 cm, en bronze et or de Ceylan (Sri
Lanka), dans la position de l'apaisement. On raconte que
pour apaiser de grands conflits, les habitants de l'île se
seraient cotisés en fondant leur bijoux. Des historiens
pensent qu'il serait plus récent, et d'origine Khmère.

Le Phra Bang est le trésor protecteur de la nation Lao


(palladium). On raconte que le malheur arrive si le Phra
Bang est déplacé de son temple.

1358: cadeau des Khmers pour répandre le bouddhisme


Theravâda, symbole de légitimité de Fa Ngum et de la
souveraineté du Lan Xang. On raconte que le roi Fa Ngum
emmenait le Phra Bang dans toutes ses batailles pour lui
porter chance.

1560: transféré dans la nouvelle capitale de Vientiane. Xieng


Dong Xieng Thong est rebaptisée Luang Prabang en
l'honneur du bouddha.

1778: les Siamois le volent lors de l'invasion de Vientiane.

Le Phra Bang va et vient suivant les disputes entre Vientiane et


Bangkok. On raconte qu'il était rendu à chaque fois à cause
des malheurs surnaturels qu'il causait au Siam.

1867: les Siamois le rendent définitivement.

Il est toujours visible au Palais de Luang Prabang. La rumeur dit


qu'il s'agit d'une copie, l'original serait précieusement
conservé dans un coffre fort de la banque nationale.

Au 3ème jour du Pimay (nouvel an Lao), une procession amène


le Phra Bang au Vat May, où il reçoit l'eau sacrée de la part
des fidèles.

Au même moment en France, le dimanche de Pentecôte se tient


le Boun (ou Song) Phra Bang.
Le palais royal de Luang Prabang
1904 -1909

Construit par la marine française, dans un style métissé;


ses proportions modestes ne reflètent pas la splendeur et la magnificence des palais du passé,
comme peuvent en témoigner les fondations du palais du roi Anou à Vientiane.
Vat Xieng Thong à Luang Prabang
(1560)

1560 : temple royal fondé par le roi Setthathirat, il est considéré comme le plus élégant du pays.

1887 : les Pavillons Noirs pillent Luang Prabang. Vat Xieng Thong fut l'un des seuls temples
épargnés, car leur chef y avait été bonze dans sa jeunesse.
Phou Gneu & Gna Gneu
Les ancêtres protecteurs de Luang Prabang lors du Pimay (photo du XIXe s.).

On raconte que du temps de Khun Borom,


une liane géante poussa de la terre vers le ciel,
cachant le soleil et empêchant toute vie.
Personne ne voulait se risquer pour aller la couper.
Seul un couple de personnes âgées accepta de se sacrifier à cette tâche.
Ils demandèrent en échange à ce que leur mémoire soit honorée pour toujours.
Ils coupèrent la liane qui les écrasa.
Depuis ce jour et jusqu'à aujourd'hui, leurs noms sont encore célébrés au nouvel an.
Les grands rois Lao

le roi Fa Ngum
Khun Borom ou Khoun Boulom
(environ VIIIe siècle)
Les Siam et les Lao sont 2 branches du grand groupe ethnique des Thaïs, venus du sud de la Chine. On dit alors thaï-siam
et thaï-lao. En 1939, lors d'un coup d'état militaire, le Siam prend le nom de Thaïlande, le « pays des thaïs », pour sous-
entendre la volonté de la Thaïlande à diriger le Laos.

Roi semi-légendaire, les historiens ne savent pas si Khun Borom était réellement Lao. Il serait un ancien roi de Nan-Chao et
l'ancêtre mythique des lignées royales Lao et Siam.

D'après la légende, le roi du ciel Phaya Thène déchaîna le Grand Déluge pour punir les Hommes de leur cruauté, puis
envoya son fils Khun Borom pour diriger les Thaï-Lao, et leur enseigner la civilisation. Cette nouvelle Humanité naquit
d'un grand Nam Tao (fruit de la famille de la courge, voir photo en bas). C'est de ce fruit que poussa la liane géante que
Phou Gneu et Gna Gneu durent abattre. Khun Borom aurait eut 7 fils (dynastie Maharasa), dont le célèbre Khun Lo
(Muang Sua – Luang Prabang), qui fondèrent de nombreux royaumes Siam et Lao. Ses fils et leurs descendants se
rencontraient une fois par an dans la grotte sacrée de Pak Ou, près de Luang Prabang.
Descente des Lao
(VIIe – XIIIe siècles)
Sous la pression de l'expansion Chinoise, puis grâce la déstabilisation de l'Asie du S-E par les Mongoles, les Lao
descendent progressivement du sud de la Chine (confédération Aï-Lao, royaume de Nan-Chao).

Les invasions Mongoles - XIIIe siècle


Invasions mongoles sous Kubilaï Khan (1215 – 1294),
petit-fils de Gengis Khan (1155 – 1227), empereur de
Chine, fondateur de la dynastie des Yuan.

1253 : Dali (Nan-Chao, royaume d'origine des Thaï-Lao)


déjà en déclin est définitivement rayé de la carte.

Pagan (Birmanie, 1287) et le Champa (1284) sont


ravagés et soumis.

Les Lao (Muang Sua), Thaï (Sukhothaï) et Khmer (1285)


acceptent la suprématie Mongole: leurs rois se
rendent en Chine pour prêter allégeance, et mettre
leurs armées à disposition.

Le Daï-Viet ne sera jamais totalement soumis


(nombreuses batailles de 1257 à 1288) mais payera
de lourds tribus.

1287: après une première alliance avec les Mongols,


l'alliance du Lan Na (roi Meng Raï) et de Sukhothaï
(roi Ram Khamhaeng) permit de repousser les
envahisseurs.

Ci-contre, invasion de la Pologne, bataille de Liegnitz -


1241, cavalerie lourde Mongole contre les Chevaliers
Teutoniques Allemands.
1287: après une première alliance avec les mongoles,
l'alliance du Lan Na (roi Meng Raï, à gauche)
et de Sukhothaï (roi Ram Khamhaeng, à droite)
permit de repousser les envahisseurs mongoles.
Fa Ngum
(1316 - 1374)

Sa famille règne sur le royaume de Muang Sua (capitale


Xieng Dong Xieng Thong, future Luang Prabang).

Fa Ngum enfant, fut chassé du royaume avec son père Phi-


Fa (Khamhiao), car ce dernier avait séduit l'une des
femmes de son propre père Souvanna Khamphong.

Ils s'exilèrent donc à la cour d'Angkor où le petit Fa Ngum


grandit et fut éduqué.

L'empereur Khmer Jayavarman Paramesvara (1327 - 1353)


lui donna sa fille Nang Kaeo, ainsi qu'une armée de
10.000 soldats pour se bâtir un royaume, détrôner son
grand-père, repousser les frontières d'Ayuttaya et du
Viêt-Nam, conquérir et unifier les royaumes Lao le long
du Mékong.

1353 : fondation du Lan Xang, le bouddhisme Theravâda est


imposé comme religion d'état.

1373 : à la mort de sa femme, il devient despote et


décadent, il est destitué et exilé par sa cour. Certains
pensent que c'est un complot de sa dernière femme
thaï.

Lan Xang Hom Khao : « Le Royaume du Million d'Éléphants


et du Parasol Blanc ».

Lan Xang : million d'éléphants  les éléphants de guerre de


son armée.
Setthathirat (1534 – 1571)
« le plus grand Roi des Rois »

1551: du côté de sa mère, il hérite du trône


alors sans héritier de Chiangmai (Lan
Na) et rapporte le Bouddha d'Emeraude
à Luang Prabang, puis Vientiane.
1560: transfert de la capitale de Luang
Prabang à Vientiane car plus facile à
défendre face aux invasions.
1560: construction du Vat Xieng Thong
(temple royal) à Luang Prabang.
1566: construction du That Luang à
Vientiane.
1570: Il repousse les invasions de
l'empereur Birman Bayinnaung.
1571: assassiné à 38 ans lors d'un
complot.
1574: les Birmans dominent le Lan Xang
pendant 18 ans.
Bayinnaung (1551 - 1581)
Grand empereur Birman (dynastie Taungû)
Image tirée du film « King Naresuan » - 2007

Fortifications de Chiang Maï,


au nord de la Thaïlande,
ancienne capitale du Lan Na.
À gauche : sabre de style Lan Na,
époque Ratanakosin - XVIIe siècle,
lame de 79 cm, musée national de Bangkok

Epée de type « prakhan »


Le Bouddha d'Emeraude
« Phra Keo » 

Son histoire est plus ou moins légendaire.

43 av. JC : le Phra Keo est créé en Inde. Il passe ensuite entre de


nombreuses mains: Ceylan (Sri Lanka), Pagan (Birmanie), Empire
Khmer, Siam...

1434 : la foudre éventra un stûpa de Chiang Raï (Lan Na), dans lequel
était caché ce bouddha. Il était recouvert de stuc doré (enduit
coloré) qui s'effrita et laissa apparaître la pierre verte. Le peuple
crut d'abord qu'il était d'émeraude. Il est en réalité en jadéite.

1551 : lors de l'annexion du Lan Na au Lan Xang, le roi Setthathirat


l'emmène à Luang Prabang puis Vientiane au Vat Ho Phra Keo.

1778 : il passe de nouveau aux mains Siamoises (invasion) et demeure


aujourd'hui au palais royal de Bangkok. Le Phra Keo est
désormais le palladium de la dynastie Chakri du Siam.

Phra Keo et Phra Bang sont considérés comme cousins.

Les historiens pensent que le Bouddha d'émeraude date en faite du


XVe siècle, de style Chiang Saeng (école du Nord, Lan Na). La
jadéite proviendrait de Birmanie.

Il mesure 60 cm et possède 3 tenues de saison que le roi seul peut


changer lors de cérémonies.

Il est interdit de le photographier.


Vat Phra Keo
Construit au XVIe siècle par le roi
Setthathirat pour recevoir le Bouddha
d'Emeraude – Phra Kèo,

On raconte que c'est parce que les 2


esprits protecteurs de Phra Bang et
Phra Keo ne pouvaient pas cohabiter
ensemble dans la même ville, qu'on
transféra la capitale de Xieng Dong
Xieng Thong à Vientiane.

1778 : détruit par les Siamois.

1936 : reconstruit par la France d'après


des plans originaux retrouvés par
l'École française d'Extrême-Orient.

Endeuillé à tout jamais, le temple est


aujourd'hui transformé en musée.
Surinyavongsa
(1637-1694)
Contemporain de Louis XIV, il est surnommé « le roi soleil » car son nom signifie « de la lignée solaire ».

Son règne marque l'apogée politique et culturelle du royaume, ainsi qu'une période de paix après de nombreuses
guerres de succession.

Les premiers voyageurs occidentaux visitent le royaume Lao et sont frappés par la magnificence de la capitale
Vientiane.

Les relations des voyageurs occidentaux

Le jésuite italien de Marini et le marchand hollandais Geritt Van Wuysthoff ont visité le royaume de Surinyavongsa entre 1641
et 1647 et nous ont laissé des témoignages de grand intérêt:

De Marini, à Vieng Chan (Vientiane) :

Le Palais Royal dont la structure et la symétrie sont admirables paroist de fort loin. De vray, il est d'une prodigieuse étendue et si
grand qu'on le prendrait pour une ville… L'appartement du Roy, qui est orné d'un fort superbe et magnifique portail, et quantité
de belles chambres, accompagnées d'une grande salle, sont toutes en bois incorruptible, et ornées dehors et dedans de bas-
reliefs exelens… Je ferois un volume entier si j'entreprenais de décrire les autres pièces du Palais...

Van Wuysthoff, décrivant les festivités du That Luang :

On nous a fait attendre pendant une heure. Ensuite, le roi, assis sur un éléphant blanc, arriva de la ville et passa devant nos tentes…
c'est un jeune homme d'environ 23 ans. Derrière lui marchaient environ 300 soldats avec des lances et des fusils; derrière lui,
des éléphants avec des hommes armés; suivaient derrière quelques musiciens; après, il y avait encore deux-mille soldats, suivis
de 16 éléphants portant les cinq femmes du roi...

Et à propos des bonzes de Vientiane, plus nombreux que les soldats de l'empereur d'Allemagne :

Nulle part il y avait des églises aussi riches et tant d'hommes saints, comme ils s'appellent eux-même, que chez eux la science est
beaucoup plus développée et qu'à cause de cela, les prêtres du Cambodge et du Siam viennent tous les ans et y restent de dix
à douze ans afin de finir leurs études.
La chute du Lan Xang
(1707)

1694 : par respect scrupuleux de la loi,


Surinyavongsa laisse condamner à mort son fils
unique pour adultère. Sans héritier à sa propre
mort, une guerre de succession éclate.
1707 : le Lan Xang est divisé en 3 royaumes:
Luang Prabang, Vientiane, Champassak.
Cet affaiblissement permis de nombreuses
invasions:
Viets, Birmans, Siamois (1778), pirates Chinois... et
les royaumes Lao entre eux.
La région du Tran Ninh est cédé au royaume
d'Annam (Viêtnam).
Drapeaux des royaumes de Luang Prabang, Vientiane, et Champassak

Ci-contre : Empreintes du sceau du royaume de


Luang-Prabang (papiers Pavie, archives du
Ministère français des Affaires Etrangères)

Le sceau aurait été offert par la dynastie Ming de


Chine (1368 – 1644) pour avoir lutté contre les
Viets.
Les derniers rois Lao

Anouvong, Chao Anou,


ou Saya-Setthathirath III (1767-1835)

Le dernier roi de Vientiane.

1819 – 1824: il fait construire le Vat Sisakhet.

1827: d'abord allié du Siam contre les Birmans, il


tente par 2 fois une révolte contre la domination
Siamoise.

Vientiane est pillée et rasée par le Siam, seul le Vat


Sisakhet est épargné car de style Thaï.

L'élite est déportée au Siam, le roi humilié et torturé


dans une cage à Bangkok.
Oun Kham
(1811 – 1895)
Roi de Luang Prabang
Sakharine
(1840 – 1904)
Roi de Luang Prabang

Luang Prabang est toujours sous domination du Siam.

1874: Sakharine tente de repousser les pirates chinois


Ho (Pavillons Noirs) de Deo Van Tri.

1887: Sakharine se réfugie à Bangkok. Luang Prabang


est pillée et dévastée par les pirates.
L'Indochine Française
(1893 – 1954)

La France cherche à concurrencer la Grande Bretagne


déjà très présente en Chine, au Siam et en Birmanie.
Elle cherche une voie commerciale vers la Chine par le Mékong.
Auguste Pavie
(1847 – 1925)
Explorateur et vice-consul de France à Luang
Prabang.

Il sauve le roi Oun Kham (1811 – 1895) des


attaques pirates.

1893 : le roi Oun Kham lui demande la protection


de la France:

« Si mon fils (Sakharine) y consent, nous nous


offrirons en don à la France, sûrs qu'elle
nous gardera des malheurs futurs ».

Certains pensent que les français ont organisé


les attaques pirates afin d'obtenir la gratitude
de Luang Prabang.

Il négocie les traités entre la France et le Siam.

Ci-contre : drapeau du protectorat de Luang


Prabang - 1893
« Guerre » Franco-Siamoise
(1893-1904)

1893: Luang Prabang accepte le protectorat français.

Démonstration de force de la France (blocus militaire


des côtes Siamoises) pour imposer aux Siamois la
domination française sur la rive gauche du
Mékong.

1899: Luang Prabang intégré dans l'Indochine


Drapeau du Laos Français 1893 - 1952 Française.

1902 – 1904: le Siam est obligé de signer les traités


Franco-Siamois.

La France cède plus de territoires au Siam qu'il n'en


demandait.

1907: le Mékong devient la frontière entre le Siam et


l'Indochine Française

Les traités ne tiennent pas compte des populations Lao


au delà du fleuve. La région de l'Isan (voir carte ci-
contre) reste donc aux mains Siamoises.

Le Laos existe certes grâce à la France, mais il serait


beaucoup plus grand si elle n’avait pas eut peur de
froisser la Grande Bretagne, alliée du Siam.
Restauration des monuments Lao
1901-1930: le That Luang est restauré par l'Ecole Française d'Extrême-Orient.

• Photo 1 en 1889: après la destruction par les Siamois en 1827


• Photo 2 en 1910: après la 1ère restauration de 1901
• Photo 3 en 1967: après la 2ème restauration de 1930,
d'après les dessins de l'explorateur Louis Delaporte.

Sous le protectorat français, le Laos fut restauré et modernisé:


That Luang, Vat Phra Kèo, villes, routes, écoles...
Sisavang Vong
(1905-1959)
1904: Sisavang Vong couronné roi de Luang Prabang avec
le soutient français.

1904 -1909: construction du palais royal de Luang Prabang.

1940, seconde guerre mondiale: le Laos passe sous


contrôle Japonais.

1945: défaite des Japonais (Hiroshima et Nagasaki). Sous la


pression Japonaise, le roi proclame l'indépendance,
mais les français reviennent et dominent le Laos de
nouveau.

Lao Issara (1945 - 1949): mouvement nationaliste


d'indépendance Lao, anti-français, qui gouverna le
royaume entre la défaite des Japonais et le retour des
Français.

1946: Sisavang Vong couronné roi du Laos unifié.


Autonomie du royaume au sein de l’Union française.

1947: le Laos devient une monarchie constitutionnelle.

1954: indépendance du Laos par les accords de Genève.


Fin de la guerre d'Indochine.

1955: le Laos est admis à l’ONU.

1958: Construction du Patouxai, monument à la mémoire


des morts de l'indépendance Lao.

Ci-contre: sceau du royaume réunifié.


Le roi Sisavang Vong prête serment à la nouvelle constitution de 1947.
Statue du roi devant le palais de Luang Prabang.

C-c: SM Sisavang Vong signe l'indépendance Lao à l'Elysée en 1954.


Les funérailles du roi Sri Savang Vong (1959)
Sri Savang Vatthana (1907 - 1980)
le dernier roi du Laos (1959 – 1975)

1945 : prince, il appelle à lutter contre l'occupation japonaise. Il est alors exilé à Saïgon.

1947 - 1973: hostilités / instabilités / guerre civile / lutte fratricide entre 3 partis : royalistes,
communistes, et centristes-neutralistes.

1962: accord de Genève reconnaissant la neutralité du Laos.

1973: accord entre les partis pour un gouvernement de coalition.

Pathet Lao: « parti populaire révolutionnaire lao ». Parti communiste.

1975: prise de pouvoir du Pathet Lao, le roi devient conseiller du régime communiste.

Le totalitarisme rouge: épuration de la société Lao, collectivisation et travaux forcés.

Réfugiés politiques : 10% de la population fuit le pays.

Le « Prince Rouge » Souphanouvong (1909 – 1995): 1er président de la République


Démocratique Populaire du Laos (1975 – 1991), membre fondateur du Pathet Lao.

1978: le roi, la reine Khamphoui et le prince couronné Vong Savang sont déportés au
« camp numero 1 » de concentration de Vieng Xai (Sam Neua) ou « camp de
séminaire » (samana), dans les grottes de Houaphan (nord).

1980: condamnés aux travaux forcés, maltraités, ils meurent de faim ou sont exécutés.

D'après Kaysone Phomvihane (1920 - 1992), leader du Pathet Lao, le roi serait mort en
1984 à l'âge de 77 ans.

Il ne fut jamais officiellement couronné

2008: les camps de concentration de Vieng Xai existent toujours.


Le drapeau Lao actuel
1975 : avènement de la République Démocratique et
Populaire Lao (dictature communiste). Le
nouveau drapeau est adopté.

Créé par le mouvement indépendantiste nationaliste


Lao Issara, transformé par la suite en Pathet
Lao puis Nèo Lao Hak Xat.

A l’origine :

• Rouge : le pays

• Bleu : le Mékong

• Disque blanc : Vientiane (cité de la Lune)

Autrefois, le Mékong traversait le pays en son centre,


Vientiane. Mais aujourd'hui, le fleuve est
désormais la frontière avec la Thaïlande. Le
drapeau rappelle ainsi que l'Isan est une
province Lao, sous domination Thaï.

Maintenant :

• Rouge : le sang versé pour l'indépendance

• Bleu : la santé du pays

• Disque blanc : l'unité du pays

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