Agriculture
Alimentation
Environnement
N°12 - FÉVRIER 2010 magazine
◗ DOSSIER
Pour une agriculture
compétitive plus économe
en pesticides
L
’Inra construit son avenir… avec vous.
d’un questionnement éthique
C’est la première fois qu’un organisme
de recherche français ouvre un blog
06◗ RECHERCHES de consultation sur ses nouvelles priorités
& INNOVATIONS de recherche. Jusqu’à la mi-avril, vous pourrez y
L’étrange génome de M. incognita entendre les trois directeurs scientifiques
Oméga-3 : le régime des Français s’améliore des secteurs Alimentation, Agriculture et
Changement climatique : Environnement s’exprimer sur les sept priorités
rechercher pour s’adapter scientifiques envisagées et vous pourrez donner
Évolution in silico votre avis sur leurs analyses. Les fruits de cette large
Le sol ressemble-t-il à un bioréacteur ? consultation viendront enrichir la construction des
orientations de l’Inra pour la période 2010-2014.
Développer des systèmes de culture compétitifs
tout en préservant l’environnement fait partie
13◗ DOSSIER des priorités de l’Institut depuis plusieurs années.
Le dossier de ce numéro en aborde une facette
en s’interrogeant sur les possibilités de réduction
Pour une des pesticides en agriculture. Un thème
agriculture en résonnance avec celui que l’Institut développe
compétitive au Salon international de l’agriculture, à savoir
plus économe l’exploration des synergies entre agriculture
en pesticides et biodiversité.
La gestion de la biodiversité, c’est la problématique
centrale dans notre grand reportage réalisé
25◗ REPORTAGE en Guyane, au sein d’une équipe mixte associant
Ecofog au cœur de la biodiversité
AgroParisTech, le Cirad, le Cnrs, l’Inra
amazonienne et l’Université Antilles-Guyane. On y apprend
que la forêt amazonienne n’est pas l’espace vierge
31◗ IMPRESSIONS que l’on croit, mais était déjà exploitée par les
peuples amérindiens. Maintenant, son avenir
34◗ REGARD dépendra d’un équilibre à trouver entre les enjeux
écologiques et les besoins d’une population locale
Réinventer la communication scientifique
en extension.
36◗ AGENDA La rédaction
Directrice de la publication : Marion Guillou. Directeur éditorial : Jean-François Launay. Directeur de la rédaction : Antoine Besse. Rédactrice en chef : Pascale Mollier. Rédaction :
Géraud Chabriat, Armelle Favery, Evelyne Lhoste, Laurent Cario, Catherine Donnars, Brigitte Cauvin. Photothèque : Jean-Marie Bossennec, Julien Lanson, Christophe Maître. Couverture :
Claire Scully. Maquette : Patricia Perrot. Conception initiale : Citizen Press - www.citizen-press.fr. Impression : Imprimerie Champagnac. Imprimé sur du papier issu de forêts gérées
durablement. Dépôt légal : février 2010.
Orientations 2010-2014 :
le débat est ouvert
En 2010, l’Inra définit ses priorités de recherche pour les cinq ans à venir.
Initiative inédite en France, l’Institut décide de consulter, au-delà de ses
personnels et partenaires, les citoyens intéressés par les enjeux de recherche
via un blog dédié.
© Micheline Pelletier
de redéfinition de ses orientations
il en était, que les problématiques
scientifiques pour la période
abordées par les recherches en agro- 2010-2014, quelle est votre vision
nomie sont largement partagées par de l’Institut ?
tous. Ce site accueille les contribu- C’est d’abord la vision d’un Institut qui
tions jusqu’à la mi-avril. Celles-ci est - et restera - un grand opérateur
permettront de nourrir la réflexion de recherche dans son champ de compétences. Pour être innovant,
avant de finaliser les orientations l’Inra s’est doté d’outils lourds en biologie comme en observation
2010-2014. de l’environnement et doit en permanence expérimenter sur le terrain,
au bénéfice de tous. Les enjeux, pas seulement nationaux ou
Une consultation interne européens mais désormais mondiaux, sont ceux de la sécurité
alimentaire et du développement durable et la France doit devenir un
en parallèle
acteur majeur dans ces champs.
Le dialogue bat parallèlement son De plus, l’Inra doit s’inscrire dans la stratégie nationale de recherche
plein en interne. Depuis le 11 février, et d’innovation, notamment à travers sa participation aux diverses
la direction générale de l’Institut a alliances. J’y veillerai attentivement. Je pense en particulier à la
lancé un cycle de rencontres avec les dernière et quatrième alliance en date, Allenvi, qui après les alliances
personnels dans les centres Inra, pour la santé (Aviesan), l'énergie (Ancre) et le numérique (Allistene),
partout en France. Ces rencontres se aura pour mission de coordonner l’ensemble des acteurs de recherche
dérouleront jusqu’au mois d’avril sur les problématiques scientifiques liées à l’alimentation, à l’eau,
2010. Le 4 mars 2010, un atelier de au climat et aux territoires.
discussion avec les partenaires socio- L’alliance Allenvi devra aussi porter la parole de la communauté
scientifique française aux niveaux européen et international.
économiques est organisé à l’occa-
Sur la question du développement durable, la demande en matière
sion du Salon international de d’innovation croît d’année en année et je me félicite que l’Inra ait mis
l’agriculture, où seront notamment en place une véritable politique d’innovation et valorisation de son
discutées les contributions déposées savoir-faire et de ses travaux.
sur www.inra2014.info.
Le fruit de cette concertation per- Quelles leçons tirez- vous de la récente évaluation de l’Inra
mettra de répondre à des questions par l’AERES ?
de recherche structurantes pour L’AERES évalue désormais chaque année plusieurs organismes
l’avenir de l’agronomie. Il est en effet de recherche et de nombreuses universités. Elle sait adapter
essentiel de savoir si les défis d’ordre ses méthodes selon la mission de l’établissement étudié et composer
des comités de visite pertinents.
économique, social, environnemental
Pour l’évaluation de l’Inra, l’AERES a mis en place un comité
et scientifique identifiés par l’Inra international de très haut niveau qui a fait une évaluation sérieuse
dans chacune des priorités mises en et en profondeur de l’établissement. Cette évaluation conforte
débat répondent aux analyses des l’établissement au cœur de ses missions, en tant qu’Institut
acteurs institutionnels et privés. Le de recherche agronomique, mais elle a aussi ouvert de nombreuses
cas échéant, les partenariats et actions pistes d’amélioration, notamment en matière de prospective
envisageables pourront être circons- scientifique. Je me réjouis que la direction de l’Inra ait d’ores et déjà
crits plus efficacement. engagé une réflexion pour mettre en œuvre les recommandations
A l’heure où l’Inra évolue pour rele- de l’AERES.
ver les défis alimentaires, agricoles et
L’Inra a lancé une concertation publique sur ses priorités
environnementaux mondiaux, les
scientifiques 2010-2014. Quel regard portez-vous sur cette
contributions de tous -scientifiques, démarche ?
personnels d’appui, représentants des Je serai très attentive à cette démarche car elle constitue une
collectivités territoriales ou d’asso- première dans notre système de recherche et correspond à une très
ciations, élus, ou partenaires privés- forte demande de la société civile. Dans le champ de la recherche
sont donc essentielles. ● agronomique, les enjeux sont cruciaux, et la question de la sécurité
alimentaire pour tous, dans le cadre d’un développement durable
des modes de production agricole, reste encore totalement ouverte.
Jean-François Launay Ces questions nous concernent tous, chercheurs, décideurs publics,
mais aussi entreprises, ONG, collectivités et bien sûr, tous les
citoyens. Je souhaite que la réflexion lancée par l’Inra se fasse
dans la plus grande transparence et dans un esprit de démocratie
+d’infos scientifique, qui caractérisent une science à l’écoute de la société.
O web :
www.inra2014.info
et de l’innovation (KIC-climat),
associant 16 organismes pour
lutter et s’adapter au change-
ment climatique. L’Inra pilote par
ailleurs dans une programmation
conjointe des recherches
européennes sur « Agriculture,
sécurité alimentaire et change-
ment climatique ».
www.inra.fr/presse/changement_
L ’alimentation n’est pas un bien ronnement ou le partage équitable des connaissances en d’œuvre unique en fonction
du domaine d’application
de consommation comme un sont des exemples. À l’issue d’un long débat pluridiscipli-
des découvertes.
autre. Si elle permet de répon- naire, l’avis du comité a pris la forme de neuf recomman-
www.inra.fr/les_partenariats
dre à des besoins vitaux, et constitue dations qui invitent la communauté des chercheurs à placer
un droit en tant que tel, elle est égale- les questions de sécurité alimentaire et de modèles de ODes microbes pour une
ment source de liens sociaux et consommation dans leurs contextes sociaux, institutionnels aquaculture durable
d’affirmation culturelle. Traiter la et environnementaux. Une recherche agronomique qui L’Ifremer et l’Inra participent
question de la sécurité alimentaire ne vise à assurer une sécurité alimentaire universelle et per- avec six partenaires européens
peut être dissocié d’une analyse des pétuelle et qui s’interroge sur sa légitimité à intervenir sur au programme Promicrobe.
Ce programme cherche à éclairer
comportements et des valeurs des les modèles de consommation alimentaire, voilà le fon-
les relations qui existent dans
sociétés confrontées à ces difficultés. dement des réflexions proposées. À cette occasion, le comi-
l’écosystème aquacole entre
De plus, des tensions très fortes sur té a mis en lumière des domaines de vigilance se rapportant
le poisson, sa flore digestive,
les ressources alimentaires, en eau et aux moyens mobilisés par la recherche, y compris la ques- et les populations microbiennes
en sol renforceront les inégalités d’ac- tion des partenariats et des droits de propriété intellec- de l’environnement afin de
cès et aggraveront les effets négatifs tuelle, les objectifs et les finalités des recherches entreprises, développer de nouveaux modes
sur les écosystèmes. Ces multiples l’utilisation des résultats obtenus, comme leurs impacts à de conduite d’élevage plus
dimensions font de la sécurité ali- plus long terme. respectueux de l’environnement
mentaire un objet de recherche com- Sur la période 2008-2009, le comité d’éthique a eu à trai- et économiquement viables.
plexe qui soulève de nombreuses ter une autre question concernant la valorisation des pro- www.inra.fr/les_partenariats
interrogations d’ordre éthique. ductions agricoles, non plus à des fins alimentaires, mais
OPrix
Les Présidences du Cirad et de l’Inra aussi non alimentaires, notamment le cas des biocarburants
Michel Zitt (Inra Angers-Nantes)
ont proposé à leur comité consultatif et de leurs enjeux. Le comité publiera prochainement son a reçu la médaille Derek de Solla
commun d’éthique de rendre un avis avis sur le sujet. Pour 2010, le comité d’éthique devrait Price 2009 pour ses recherches
afin de guider leur action dans ce instruire deux nouvelles questions posées par les Prési- sur les potentialités et les limites
domaine. Sous l’égide du président dences de l’Inra et du Cirad sur les nanotechnologies et les des indicateurs bibliométriques.
Louis Schweitzer, les treize membres partenariats dans la recherche. ● Ce prix récompense des contri-
du comité ont d’abord défini un butions à l’analyse quantitative
ensemble de principes et de valeurs Géraud Chabriat des sciences.
sur lesquels fonder leur réflexion www.inra.fr/toute_l_actu/prix_et
éthique. Le respect de la dignité +d’infos _distinctions
O web :
humaine, la préservation de l’envi- www.inra.fr/l_institut/organisation/l_ethique/comite_d_ethique
LARVE DE
M. INCOGNITA ◗
pénétrant une
radicelle de tomate
(X 500). Une fois
à l'intérieur,
la larve provoque
l'apparition d'une
galle où les
nutriments
sont détournés
à son profit.
© USDA / William Wergin and Richard Sayre
L e génome du nématode à
galles Meloidogyne incognita a
livré quelques-uns de ses sec-
rets. Les nématodes sont des ani-
maux capables de coloniser tous les
maraîchères (tomate, piment, melon).
Le séquençage récent de son génome
a été réalisé par un consortium inter-
national de vingt-sept laboratoires,
impliquant le Génoscope et l'UMR
tions développés par les ravageurs
des cultures pour attaquer les plantes.
Le régime français
était déséquilibré
Voilà qui comble un peu le retard
évalué dans les précédentes études.
Les Français sont parmi ceux qui
consomment le moins d'oméga-3 en
Europe. Selon des enquêtes de système nerveux central, où on les sieurs études cliniques ont en effet
consommation datant des années trouve en abondance. C'est pourquoi démontré qu'une consommation
1995-99, les apports nutritionnels en une consommation en oméga-3 pro- adaptée d'oméga-3 (et en particulier
acides gras saturés sont trop élevés et che des apports nutritionnels de DHA) pourrait contribuer à limi-
ceux en acides gras mono-insaturés conseillés est indispensable à une ter, voire à prévenir, les déficits cogni-
trop faibles. Quant aux acides gras bonne santé, notamment chez les tifs liés au vieillissement. Ainsi, la
polyinsaturés, la quantité totale femmes enceintes et allaitantes. En teneur en DHA des hématies et de
consommée est proche des recom- effet, la qualité de ces apports pen- plusieurs zones cérébrales est dimi-
mandations mais déséquilibrée par dant les trois derniers mois de ges- nuée chez des patients atteints de
un apport excessif d'oméga-6 aux tation et jusqu'à l'âge de deux ans est maladie d’Alzheimer. En outre, le
dépens des oméga-3. La quasi-totalité déterminante pour le développement risque d’apparition de cette maladie
de la population française adulte fonctionnel du cerveau. Le rôle spéci- est deux fois plus élevé chez des sujets
(95 %) n’atteignait pas l’apport fique du DHA dans la maturation âgés ne consommant jamais de pois-
recommandé en ALA. Le déséquili- des fonctions visuelles et cérébrales a son que chez ceux qui en consom-
bre entre les proportions oméga- été clairement démontré chez l’ani- ment au moins une fois par semaine.
6/oméga-3 dans l'alimentation des mal et le jeune enfant. Enfin, l’apport quotidien de DHA
français résulterait d'une consom- améliorerait le déficit mnésique chez
mation insuffisante en poissons et Prévention du veillissement des patients atteints par la maladie
en huiles et margarines bien équili- cérébral d'Alzheimer et présentant des symp-
brées (colza) en faveur d'huiles et de Par ailleurs les travaux de l’unité tômes modérés.
matières grasses d'origine animale Nurelice ont montré le rôle du DHA Enfin, les oméga-3 influeraient sur la
riches en oméga-6. La teneur en dans la plasticité cérébrale et dans la fréquence d’apparition ou les symp-
oméga-3 des produits issus des ani- neuroprotection. En particulier, son tômes de nombreuses pathologies
maux (viandes, œufs, produits lai- importance dans les processus de dont les maladies cardiovasculaires
tiers) dépend de leur alimentation. mémorisation diminués au cours du ou de désordres neuropsychiatriques
Ainsi, le fait de substituer les aliments vieillissement, constitue la base des (dépression, schizophrénie…), le dia-
du bétail utilisés dans la filière clas- recherches en cours. Les chercheurs bète et l'obésité. Il est probable qu’une
sique par des aliments plus riches en ont en particulier démontré que, chez alimentation inadéquate, trop riche
ALA et/ou DHA pourrait contribuer le rongeur, le DHA participerait à la en oméga-6 et déficitaire en oméga-3,
à redresser ce déséquilibre. régulation du métabolisme énergé- ait en partie contribué à l’émergence
Les acides gras oméga-3 et oméga-6 tique cérébral, et notamment le de ces pathologies dans les popula-
sont des nutriments indispensables, transport du glucose au niveau de la tions occidentales. ●
constituants fondamentaux des barrière hémato-encéphalique.
membranes cellulaires. Ils peuvent L'effet préventif du DHA vis-à-vis (1) Recommandations de l’Agence française de sécurité
sanitaire des aliments
être aussi transformés en médiateurs des maladies neurodégénératives s'ex-
impliqués dans de multiples fonc- pliquerait par ses différentes actions
tions, en particulier au niveau du sur le système nerveux central. Plu- Evelyne Lhoste
+d’infos
Oweb : www.jouy.inra.fr/unites/nurelice
Oréférences scientifiques :
Les différentes sources d’oméga-3 - Guesnet P, Combe N, Ailhaud G,
Alessandri JM 2009. La teneur en acides
Les acides gras oméga-3 et oméga-6 sont des acides gras polyinsaturés gras polyinsaturés du lait maternel : un
pour lesquels la première double liaison rencontrée est respectivement marqueur biologique fiable du niveau de
consommation des populations.
en position 3 et 6 de la chaîne carbonée. Tout comme les vitamines, ils sont Oléagineux Corps gras Lipides, 16 : 1-3.
indispensables pour l’homme, qui, incapable de les fabriquer, doit impé- - Boué-Vaysse C, Billeaud C., Guesnet P,
rativement les trouver dans son alimentation. Les précurseurs (acide α- Couëdelo L, Alessandri JM, Putet G,
linolénique -ALA- pour les oméga-3 et acide linoléique pour les oméga-6) Combe N 2009. Teneurs en acides gras
sont présents dans les matières grasses végétales tandis que l’on trou- polyinsaturés essentiels du lait maternel
en France : évolution du contenu en
ve directement les oméga-3 fonctionnels (acide docosahexaénoïque -DHA- acides linoléique et alphalinolénique au
et acide eicosapentaénoique -EPA) dans les poissons gras d’eaux froides cours des 10 dernières années.
(saumon, sardine, hareng), qui consomment du phytoplancton riche en Oléagineux Corps gras Lipides,16 : 4-7.
ALA. Les recommandations nutritionnelles conseillent d’équilibrer autour Ocontacts scientifiques : Philippe
Guesnet, Philippe.Guesnet@jouy.inra.fr
de 5 le rapport oméga-6/oméga-3. Il est actuellement de 12.
Monique Lavialle,
Monique.Lavialle@jouy.inra.fr
U
ne augmentation de 2°C climat, de la génétique aux sciences de proposer des modes de gouvernances
en moyenne d’ici 2100, l’information en passant par la socio- adaptatives des ressources naturelles
c’est le « rail de sécurité » logie ou l’économie, de nombreux et des territoires, réduire les incertitu-
défini par l’Union euro- champs scientifiques ont été sollicités. des sur les modèles d’impacts... Toutes
péenne pour éviter des bouleverse- Cette extrême pluridisciplinarité a per- ces conclusions pourront être utilisées
ments majeurs à long terme liés au mis de construire une large vision pro- pour formuler des propositions à
changement climatique. C’est aussi spective sur les connaissances à l’ANR et aux ministères afin de pro-
une prévision qui apparaît aujourd’hui mobiliser pour répondre au défi de grammer les recherches sur la théma-
comme optimiste puisqu’elle repose l’adaptation. tique de l’adaptation. En effet, il faut
sur l’hypothèse (1) d’une réduction Les travaux de l’ARP ont été structurés agir dès maintenant, y compris pour
nette des émissions mondiales de CO2 en trois sous-ateliers. Une première des résultats sur le très long terme.
dès 2015. Hypothèse rendue impro- approche s’est concentrée sur les ques- D’ailleurs, les travaux de l’ARP
bable par l’absence de mesures tions scientifiques génériques : ADAGE ont déjà favorisé la naissance
contraignantes dans les conclusions comment prendre en compte les inno- d’une initiative de programmation
du dernier sommet sur le climat de vations ou le rôle de la biodiversité, conjointe « Agriculture, sécurité ali-
Copenhague. Au vu de l’enjeu parallèle caractériser l’adaptabilité d’un milieu mentaire et changement climatique »,
que représente la sécurité alimentaire, ou traiter les incertitudes dues à la validée par le Conseil Compétitivité
il apparaît d’ores et déjà incontour- modélisation de phénomènes com- de l’Union européenne le 4 décembre
nable d’adapter l’agriculture à l’évo- plexes ? Une deuxième approche a dernier. Elle permettra à des Etats
lution du climat. Pourtant, ce domaine consisté à identifier les questions liées membres et à des pays associés de
de l’adaptation au changement cli- aux interactions entre écosystèmes, construire conjointement une pro-
matique a été jusqu’à présent peu étu- filières de production et zones géo- grammation de la recherche dans ce
dié en comparaison des efforts fournis graphiques : par exemple, prairie, sava- domaine à forts enjeux.
pour tenter d’atténuer les émissions ne et systèmes d’élevage, forêt tropicale G. C.
de gaz à effet de serre. et filière bois,… Enfin, la dernière (1) Hypothèse correspondant à la moyenne des modè-
approche est centrée sur les implica- les climatiques (Parry et al., Nature, 2007 ; GIEC, 2007
Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution
Une urgence planétaire tions socio-économiques, environ- du climat)
Cette lacune est l’une des premières nementales et territoriales de +d’infos
conclusions de l’ARP ADAGE qui a l’adaptation. Ce sous-atelier est animé www1.clermont.inra.fr/adage
à un
Illustrant la collaboration entre l’Inra et l’Inria (1) pour la modélisation de phénomènes biologiques,
VITELBIO (Virtual telluric bioreactors) vise à modéliser la transformation, par les micro-organismes du sol,
de la matière organique en composés assimilables par les plantes. Le projet réunit une vingtaine
de chercheurs, mathématiciens, informaticiens, microbiologistes, écologues, pédologues et géologues
de plusieurs unités de l’Inra (Montpellier, Rennes, Clermont-Ferrand, Dijon, Narbonne) et de l’Inria.
Alain Rapaport, responsable du projet, relève le défi de nous en expliquer la démarche.
En quoi consiste le projet et de sorties (types et quantités de sub- organismes qui interagissent et dont
VITELBIO ? stances assimilables par les plantes ou certaines sont en compétition pour
Alain Rapaport : Dans le sol se relarguées). Cependant, ils ne reflè- des ressources communes. Ces popu-
déroule une partie importante des tent pas la micro-hétérogénéité du sol, lations occupent des niches écolo-
cycles du carbone, de l’azote et du qui détermine elle-même une distri- giques différentes, et leur localisation
phosphore, dont dépend la vie des bution spatiale hétérogène des micro- dans la structure agrégée du sol comp-
plantes… et la nôtre. Les micro - organismes et de leur biodiversité, te au moins autant que l'accès aux res-
organismes du sol dégradent les matiè- fondamentale pour comprendre leurs sources. Le sol pourrait donc être
res organiques, - débris végétaux et/ou activités. VITELBIO ambitionne de se représenté comme un ensemble de
engrais pour les sols cultivés - libé- centrer sur la modélisation de cette « hot-spots » microbiens, chacun étant
rant de l’azote et du phosphore sous composante microbiologique du sol, modélisé comme un « bioréacteur vir-
forme assimilable par les plantes. Une en postulant qu’elle peut être décrite tuel » interconnecté en réseau. L’ori-
partie du carbone est stockée sous for- par un ensemble de bioréacteurs inter- ginalité de cette représentation repose
me d’humus, tandis que l’autre est connectés. L’idée de base est que l’on donc sur la topologie des connections
libérée dans l’atmosphère sous forme peut décrire le fonctionnement micro- entre bioréacteurs, couplée à la repré-
de gaz carbonique. Voilà un bref biologique du sol par des modèles à la sentation plus classique des transfor-
aperçu des rôles agronomiques et éco- fois plus simples et plus spécifiques mations biologiques et géochimiques
logiques fondamentaux du sol, résul- que les modèles de simulation géo- qui se déroulent au sein de chacun de
tantes d’un comportement complexe chimiques, les deux types de modèles ces bioréacteurs.
que les scientifiques cherchent à étant in fine complémentaires.
décrypter. Il existe déjà des modèles
géochimiques des sols qui reprodui- En quoi le sol ressemble-t-il Comment vérifier la fidélité
sent leur composition chimique cm2 à un bioréacteur et comment de ce modèle ?
par cm2. Ces modèles sont capables le modéliser ? A. R. : Pour être valable, le modèle
de simuler le comportement du sol A. R. : Comme les bioréacteurs uti- VITELBIO doit fournir les mêmes
en terme d’entrées (types et quanti- lisés pour la dépollution, le sol contient « sorties » qu’un vrai sol, à partir des
tés de matières organiques de surface) des populations de milliards de micro- mêmes « entrées ». Les données d’un
« vrai » sol sont obtenues, soit en uti-
lisant des sols reconstitués en labora-
toire, soit en faisant appel aux modèles
de simulation géochimiques men-
entrée entrée
entrée entrée tionnés précédemment, qui sont éta-
blis en fonction de mesures et
d’extrapolations statistiques. La cons-
sorties :
prélèvements truction de VITELBIO a débuté en
sorties
racinaires 2009 et concernera d’abord des grands
types de sols comme la forêt, la prairie
hot-spots cultivée, ou la savane. ●
microbiens
Propos recueillis par
Pascale Mollier
sorties
(1) Institut national de recherche en informatique et en
écoulements automatique.
préférentiels
rapaport@supagro.inra.fr
ANALOGIE ENTRE LE SOL ET UN ENSEMBLE DE BIORÉACTEURS. Les zones de concentration UMR Mathématiques, informatique
bactérienne (hot-spots) sont modélisées sous forme de bioréacteurs interconnectés, de façon et statistique pour l’environnement
à reproduire le plus fidèlement possible le fonctionnement microbiologique du sol. et l’agronomie, centre Inra de Montpellier
D
epuis plusieurs années, la recherche menée à l’Inra vise à inscrire
l’agriculture dans un développement durable. Elle s’est traduite
par une priorité explicite sur la conception de systèmes économes
en pesticides, et a suscité des partenariats renforcés avec les acteurs
du développement. Fin 2006, les pouvoirs publics ont demandé à l’Inra de conduire
une étude pour apprécier les effets et modalités d’une réduction de 50 % de l’usage
des pesticides en agriculture, objectif retenu lors du Grenelle de l’environnement.
Ce dossier présente les résultats de cette étude, et, plus largement, les
conséquences d’une réduction de l’usage des pesticides sur l’ensemble du système
Illustration : Claire Scully
P
rocédure de ré-homologa- usage agricole et prévoit l’interdiction santé publique et les écosystèmes.
tion (1), retrait de molécu- d’une vingtaine de molécules jugées
les. Depuis plus de vingt préoccupantes. En outre, une direc- Une présence assez
ans, les pouvoirs publics tive cadre fixe, pour la première fois, répandue dans les milieux
européens ont régulièrement ren- des règles pour une utilisation naturels
forcé le cadre réglementaire qui régit « durable » des pesticides. Elle obli- Qu’ils soient volatilisés dans l’atmo-
l’usage des pesticides. Symbole de ge les Etats-membres à adopter un sphère, stockés dans les sols, emportés
cette évolution, le « paquet pestici- plan d’action national de réduction par les eaux de ruissellement ou qu’ils
des » a été définitivement adopté, le des risques liés à ces produits. Cette se diffusent vers les nappes phréa-
24 septembre 2009, par le conseil de démarche anticipée par la France, à la tiques, certains produits phytosani-
l’Union européenne. Cet ensemble suite du Grenelle de l’environ - taires se retrouvent dans de nombreux
de textes remplace les précédentes nement, amplifie les initiatives déjà milieux naturels. En l’absence de nor-
directives. Il introduit des critères prises dans le cadre du Plan Inter- me, leur présence dans l’air est obser-
plus stricts pour l’autorisation de ministériel de Réduction des Risques vée mais encore mal évaluée. En
mise sur le marché des pesticides à liés aux Pesticides. revanche, pour les eaux naturelles, les
P
our établir les différents ayant de ce fait été choisie comme Grâce à l’utilisation d’un indicateur
seuils possibles de réduction année de référence. D'autre part, les harmonisé, l’IFT (voir l’encadré), les
des pesticides, l'étude résultats disponibles d'essais réalisés experts ont pu estimer la réduction
Ecophyto R&D a rassemblé ou suivis par les structures de recher- de pesticides correspondant à chaque
l'ensemble des données accessibles sur che et de développement ont été niveau de pratiques. Ainsi, l’engage-
l'utilisation des pesticides en France exploités. En cas d'insuffisance, ment du Grenelle de l’environnement
métropolitaine et sur les performan- notamment sur des systèmes de cul- de réduire les pesticides de moitié cor-
ces des systèmes de culture plus ou tures innovants, ces résultats ont été respondrait, sur une année moyenne
moins économes en produits de trai- complétés à « dire d'experts ». semblable à 2006, aux résultats d’une
tement. Il s'agit, d'une part, des don- L’étude définit des niveaux de pratiques simulation dans laquelle toute l’agri-
nées statistiques du RICA (6) et des dits « intensif », « raisonné », de « pro- culture française passerait en produc-
enquêtes « Pratiques culturales » de tection intégrée », de « production inté- tion intégrée. La réduction de l’IFT
2006 réalisées par le SSP (7) du minis- grée », et « Agriculture biologique », est estimée alors à 50 % en grandes
tère de l'Agriculture, l'année 2006 dont certains se déclinent différem- cultures, à 79 % pour les fourrages,
ment selon les cultures. Le niveau mais à seulement 37 % en viticulture
* Voir la vidéo : www.inra.fr/ intensif est globalement défini com- et 21 % en arboriculture fruitière.
audiovisuel/web_tv/ecophyto me une stratégie de traitements systé- Pourquoi de tels écarts ? Les grandes
OQuelques chiffres : les fruits représentent 0,8% de la SAU française, dont 32 % en pomme, 5 % des dépenses en
pesticides (surtout fongicides et insecticides), avec un IFT moyen de 17,3 en 2006 (34 pour la pomme).
O INTERVIEW
Thierry Ghewy est l’un des huit agriculteurs engagés dans la production intégrée avec
l’Agro-transfert Picardie. En quelques années, il est passé d’un système de niveau raisonné
à la production intégrée dans son exploitation céréalière située en Champagne crayeuse.
Qu’est-ce qui a motivé votre un temps d’attente pour que se mettent en place les
passage en production intégrée ? interactions entre elles. Je ne raisonne donc pas en rentabilité
Thierry Ghewy : Ma motivation à l’année, mais sur la durée d’une rotation.
de départ a été de protéger mes sols
Quel bilan en tirez-vous?
et leur richesse biologique, d’autant plus vitale qu’ils sont
T. G. : Agir en amont en jouant sur les rouages agronomiques
naturellement pauvres en matières organiques. Je constatais
évite beaucoup de soucis en culture. En réduisant l’usage des
une mauvaise évolution autour de moi, avec des sols ravinés
pesticides, on évite de favoriser certains pathogènes ou
ou pris en masse en surface lorsque des orages survenaient
mauvaises herbes en voulant en éliminer d’autres. Il vaut mieux
après le labour. J’ai arrêté d’exporter mes pailles dans les
avoir un peu de chaque maladie que d’en sélectionner
années 1980 pour garder la matière organique et suis passé
certaines qui deviennent difficiles à enrayer. On voit par
au non-labour en 2001. J’ai ensuite décidé d’aller plus loin en
exemple se développer dans la région des vulpins, ray-grass,
limitant l’usage des phytosanitaires et me suis porté volontaire
brome, coquelicots résistants aux herbicides utilisés. Je n’ai
en 2004 pour développer la production intégrée. Là, c’est un
pas de tels problèmes sur mon exploitation. Si des insectes
virage complet vers l’agronomie !
ravageurs apparaissent dans mes parcelles, j’observe l’arrivée
Comment s’est fait la transition ? de la faune auxiliaire, syrphes, chrysopes, coccinelles et je fais
T. G. : Nous avons travaillé en groupe avec les autres des comptages. Je ne traite qu’en cas d’excès. Globalement,
agriculteurs, au cours de réunions régulières avec je n’ai quasiment plus besoin d’utiliser d’insecticides, ni de
des chercheurs, des conseillers d’instituts techniques régulateurs de croissance, et j’ai réduit les fongicides
et de chambres. Nous avons adapté leurs propositions de 60 %. Le temps gagné en supprimant les traitements
à chacune de nos exploitations mais n’avons pas appliqué se transforme en observations au champ. J’ai ainsi constaté
de modèles prédéfinis. Par exemple, j’ai mis au point mon que la dégradation des résidus de paille est très rapide, signe
propre modèle pour l’orge de printemps, pour laquelle de la vitalité du sol. Le prochain axe de travail de notre groupe
le choix de variétés résistantes est limité par les critères est de trouver de nouvelles techniques de désherbage.
de brasserie. En jouant sur les densités de semis et un Pour l’instant, je n’ai diminué les herbicides que de 15 %.
pilotage fin de l’engrais azoté, j’ai considérablement réduit
l’emploi de fongicides et de régulateurs de croissance. Données techniques : 180 ha, huit espèces cultivées : blé, orge de
printemps, betterave, luzerne, escourgeon (orge d’hiver), tournesol, maïs,
J’ai procédé prudemment, d’abord par des essais en bandes oeillette (oléagineux à usage pharmaceutique ou alimentaire). Rendement
comparatives, puis sur des parcelles, et enfin, à l’échelle en 2009 : blé tendre : 93 q/ha ; tournesol : 41 q/ha ; maïs : 102,5 q/ha ;
de l’exploitation. La diversification des cultures implique orge de printemps : 80 q/ha.
O TÉMOIGNAGE DE…
Pierre Mischler, conseiller de la chambre d’agriculture de Picardie. Il anime le réseau des huit fermes et analyse leurs résultats annuels.
« La dynamique du groupe s’est construite progressivement. Au début, les agriculteurs trouvaient les diagnostics environnemen-
taux trop théoriques. Puis, ils ont travaillé en sous-groupes avec les agronomes et ont construit pas à pas les rotations adaptées
à leurs contraintes. Ils ont argumenté leurs choix et ont souvent trouvé eux-mêmes les débouchés pour les cultures qu’ils ont in-
troduites. L’année 2007 n’a pas été bonne car il y a eu des maladies que l’on n’avait pas prévues, sclérotinia sur colza et rouille
brune sur céréales, avec des conséquences pour le rendement. Toutes les exploitations de la région ont été touchées, mais, avant
même que ne paraissent leurs données, les fermes en production intégrée ont été particulièrement critiquées, parce qu’entourées
a priori de scepticisme. Le réconfort du groupe est important pour dépasser ces épisodes de doutes. Et finalement, les agricul-
teurs en production intégrée se disent plus sereins car ils n’ont pas d’impératifs de traitements à réaliser à une date précise.
Ils sont aussi moins dépendants des conseillers, dont la posture évolue vers un rôle plus informatif ».
Ecofog
au cœur de la biodiversité
amazonienne
◗
A
GRENOUILLE vec plus de 200 espèces (Ecofog), associant AgroParisTech, le Comment les uns et les autres utili-
VÉNÉNEUSE d’arbres par hectare, Cirad, le CNRS, l’Université des sent-ils les ressources en lumière, eau,
Dendrobate l’Amazonie compte qua- Antilles-Guyane et l’Inra, lui consac- carbone et éléments minéraux ? Peut-
(Dendrobates
tinctorius). rante fois plus d’espèces re toutes ses compétences. Les cher- on modéliser ce fonctionnement éco-
Les indiens d’arbres en moyenne qu’une forêt cheurs s’attèlent à comprendre les logique pour prédire les conséquences
enduisaient leurs
flèches de son tempérée, et 10 % de la faune connue. mécanismes conduisant au maintien de changements climatiques et des
poison. Elle est, avec les forêts de l’archipel d’une telle diversité. Dans l’incroyable perturbations liées aux activités
indonésien et du Bassin du Congo, enchevêtrement de la forêt tropicale humaines ?
l’une des trois plus grandes réserves de humide, l’écologie, science des inter-
biodiversité mondiale. Le « bouclier faces entre populations et commu- L’espèce, une notion à revoir
forestier des Guyanes », sous-ensem- nautés, entre écosystème vivant et Les chercheurs ont observé en parti-
ble de l’Amazonie, s’étend du Brésil au milieu physique, trouve un terrain culier qu’ au sein d’une même espèce
Venezuela, Suriname et Guyana, cou- d’étude hors pair. En quoi la diversi- d’arbre, la vitesse de croissance et la
vre 90 % de la surface de la Guyane té des espèces d’arbres et celle des capacité photosynthétique des feuilles
française. L’unité mixte de recherche micro-organismes influe-t-elle sur le varient entre bas-fonds et plateaux
« Ecologie des Forêts de Guyane » fonctionnement de l’écosystème ? selon les contraintes hydriques. Ivan
UNE SCIERIE
entre Kourou
◗
et Paracou.
Développer une
filière bois durable
et créatrice
d’emplois est une
priorité dans
la région.
Pourquoi un ouvrage sous la forme complète sur un sujet important ; ils sont, pour
d’un dictionnaire ? la plupart, élaborés par un chercheur dont c'est
Jean-Christophe Bureau : C’est un ouvrage le thème de travail. D'autres sont plus brefs.
original qui peut être lu de « abattoirs » à La multiplicité des approches, la densité
« zoonoses » ou picoré par article, au fil des des textes et la précision de la documentation
questionnements. C comme « café », « carence » chiffrée procurent des sources d’informations
ou « consumérisme », S comme « sans-terre », utiles pour enrichir une réflexion trop souvent
« semences » ou « Sen Amartya », prix Nobel rapide et entachée de biais ou de partis pris.
d’économie ayant travaillé sur les famines. Les articles sont autant de clés pour comprendre
On trouvera des articles sur les principales la mondialisation de l’alimentation, éclairer
cultures mondiales, leur commerce, des les crises ou rappeler que se nourrir n’est pas
organisations internationales ou des entreprises, si simple sur la planète. D’ailleurs, « crises »
des personnalités, des concepts, ainsi que sur et « mondialisation » sont deux mots absents des
les grandes entités géographiques de la planète. entrées de ce dictionnaire... tant ils sont présents
Des cultures secondaires ou des pratiques au fil des textes.
marchandes ne sont pas oubliées quand elles
sont essentielles pour certains pays comme A qui s'adresse-t-il ?
les épices, base d’échanges emblématiques. J.-C. B. : Il intéressera des étudiants,
des lycéens, des enseignants, des journalistes
Ce fut une entreprise colossale ? qui recherchent des références, ou toute
J.-C. B. : Pour obtenir plus de cinq cents entrées personne se posant ces questions : quels
qui balayent l’état des connaissances et enjeux ? Quelles analyses ? Quels points de
envisager des perspectives sur ce sujet complexe vue ? Quels moyens mettre en œuvre ? « Nourrir
mais encore méconnu dans sa réalité, il a fallu les hommes » est un véritable défi pour le XXIe
réunir une quarantaine d’auteurs issus de siècle. Car, malgré l’augmentation régulière
disciplines variées (géographes, économistes, des rendements agricoles et des surfaces
historiens, agronomes...). Sans oublier un éditeur cultivées sur la planète, il y a toujours un milliard
passionné. d’individus qui ont faim, d’autres sont mal nourris,
et certains vivent dans une pléthore alimentaire
La diversité des auteurs de ce dictionnaire dommageable à la santé. Enfin, des populations
est sa richesse, comment avez-vous pu tombent dans la précarité, y compris dans
gérer les points de vue, voire les des pays qui se croyaient à l’abri.
contradictions, sur les visions du monde
des différents spécialistes ?
J.-C. B. : Certaines entrées renvoient à des
textes longs permettant une synthèse assez Propos recueillis par Brigitte Cauvin
A lgue verte des Caraïbes, frelon chinois, chrysomèle du maïs américain… l'Homme joue
un rôle majeur dans le phénomène des invasions biologiques, mettant en contact des
espèces appartenant à des entités biogéographiques de plus en plus éloignées.
Il revient à la société d'en gérer les conséquences. Comment prévenir les invasions
biologiques ? Comment évaluer le risque qu'elles représentent ? Que peut-on faire pour
lutter contre les invasions en cours ? Sensibilisé à cette problématique, le ministère chargé
de l'Ecologie a sollicité une communauté de chercheurs, issus de disciplines variées, afin
d'appréhender ces questions selon des approches biologiques, sociologiques et
économiques. Il n’y a pas de réponse unique à ces problèmes mais cet ouvrage apporte
des avancées indéniables dans la compréhension des mécanismes qui sous-tendent ces
invasions et cela permet d'éclairer les décisions qui seront à prendre par les gestionnaires
de l'environnement. Les scientifiques, enseignants et étudiants y trouveront également des
résultats et réflexions qui enrichiront leurs connaissances.
L e comportement d’un animal forme un flux continu et spontané qu’une étude segmentée détruit
nécessairement. Pourtant, ce sont bien de brèves séquences comportementales isolées au laboratoire
que l’on choisit d’étudier. Mais a-t-on encore affaire à un comportement ? Ne l’a-t-on pas ainsi réduit
à l’un des éléments qui le composent : les mécanismes physiologiques, le programme génétique,
les opérations cognitives, etc. ? À l’opposé de cette perspective réductionniste, le comportement est compris
par les approches phénoménologiques comme l’expression d’une liberté, une relation dialectique avec
le milieu. Celles-ci imposent du même coup des conditions d’observation en milieu naturel. Comment,
dès lors, élaborer une éthologie plus juste, tant du point de vue de la compréhension du comportement
que de celui des besoins, au sens large, des animaux placés sous la domination de l’homme ?
E
ssayiste, rédacteur en chef de la
revue Research.eu et responsable
de l’Unité Communication de la
Direction générale de la Recherche
à la Commission européenne, Michel
Claessens, 52 ans, est un spécialiste de la
communication scientifique. Il a publié en
2009 un livre sur la question aux éditions
Quae et il anime le réseau international
sur la communication publique de la
science et de la technologie.
Ve Congrès International
11/14 avril
TOULOUSE
Goût-Nutrition-Santé
L’Inra participe au comité scientifique et aux communi-
cations orales de ce congrès organisé par le pôle de
Biocatalyse pour les industries
compétitivité Vitagora. Le thème central choisi pour cette
des aliments et des boissons
C’est la quatrième conférence sur ce sujet, organisée
cinquième édition est « aliments, nutriments et bien-être ».
par l’INSA-Université de Toulouse, avec la Section
WWW.gout-nutrition-sante.com
européenne de biocatalyse appliquée (ESAB),
la Fédération européenne de biotechnologie (EFB)
et l’Inra. Elle explore le thème de l’innovation
dans les procédés pour les industries, les biocatalyseurs
25 mars
LE MANS
et les ingrédients.
https://colloque.inra.fr/bfdi