Lorsque javais six ans jai vu, une fois, une magnifique
image, dans un livre sur la Fort Vierge qui sappelait His-
toires Vcues . a reprsentait un serpent boa qui avalait un
fauve. Voil la copie du dessin.
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Elles mont rpondu : Pourquoi un chapeau ferait-il
peur ?
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Quand jen rencontrais une qui me paraissait un peu lu-
cide, je faisais lexprience sur elle de mon dessin numro 1 que
jai toujours conserv. Je voulais savoir si elle tait vraiment
comprhensive. Mais toujours elle me rpondait : Cest un
chapeau. Alors je ne lui parlais ni de serpents boas, ni de fo-
rts vierges, ni dtoiles. Je me mettais sa porte. Je lui parlais
de bridge, de golf, de politique et de cravates. Et la grande per-
sonne tait bien contente de connatre un homme aussi raison-
nable.
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CHAPITRE II
Jai ainsi vcu seul, sans personne avec qui parler vrita-
blement, jusqu une panne dans le dsert du Sahara, il y a six
ans. Quelque chose stait cass dans mon moteur. Et comme je
navais avec moi ni mcanicien, ni passagers, je me prparai
essayer de russir, tout seul, une rparation difficile. Ctait
pour moi une question de vie ou de mort. Javais peine de
leau boire pour huit jours.
Hein !
Dessine-moi un mouton
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Je regardai donc cette apparition avec des yeux tout ronds
dtonnement. Noubliez pas que je me trouvais mille milles de
toute rgion habite. Or mon petit bonhomme ne me semblait
ni gar, ni mort de fatigue, ni mort de faim, ni mort de soif, ni
mort de peur. Il navait en rien lapparence dun enfant perdu au
milieu du dsert, mille milles de toute rgion habite. Quand
je russis enfin parler, je lui dis :
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Alors jai dessin.
Je dessinai :
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Celui-l est trop vieux. Je veux un mouton qui vive long-
temps.
Et je lanai :
Pourquoi ?
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Voil le meilleur portrait que, plus tard, jai russi faire de lui
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