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Résumé
Une tradition, qui ne remonte pas au delà du IVe s. ap. J.-C, veut qu'une inscription ait été placée à l'Académie de Platon, disant
: « Nul ne doit entrer ici, s'il n'est géomètre. » Les témoins de cette tradition sont : le scholiaste d'Aelius Aristide, l'empereur
Julien, Jean Philopon, Olympiodore, Elias, David et Tzetzès. Bien que la formule exprime une idée platonicienne et qu'une telle
inscription soit conforme aux usages de la vie religieuse grecque, il doit s'agir d'un lieu commun littéraire, datant de la période
hellénistique, puisque la même tradition existe aussi pour le Péripatos et le Jardin d' Epicure.
Saffrey Henri-Dominique. Ἀγεωμέτρητος μηδεὶς εἰσίτω. Une inscription légendaire. In: Revue des Études Grecques, tome 81,
fascicule 384-385, Janvier-juin 1968. pp. 67-87;
doi : 10.3406/reg.1968.1013
http://www.persee.fr/doc/reg_0035-2039_1968_num_81_384_1013
(5) Cf. H. Cherniss, The Riddle of the Early Academy, Berkeley and Los
Angeles 1945, pp. 66-68 et 82; H. Herter, Platons Akademie, 2. Aufl., Bonn
1952, p. 11 et les notes p. 31 ; P. Friedlânder, Plato, vol. I (trad. angl. :
Bollingen Series LIX), New York 1958, pp. 92 ss.
(6) Cf. Aristoxène, Harm. II 30, p. 122. 25-27 Macran : ... οτε δέ φανείησαν
οι λόγοι περί μαθημάτων και αριθμών καΐ γεωμετρίας και αστρολογίας και
το πέρας δτι τάγαθόν έστιν εν. Sur ce texte, voir I. During, Aristotle in the
ancient biographical Tradition, Goteborg 1957, pp. 357-361 ; et Κ. Gaiser,
Platons ungeschriebene Lehre, Stuttgart 1963, p. 452 (test. 7).
(7) Éditions : Ed. Hiller, Leipzig 1878, et J. Dupuis, Paris 1892, et cf.
Κ. von Fritz, apud Pauly-Wissowa, s.v. Theon (14), Bd. V A 2, col. 2067,
14 ss., en particulier col. 2070. 41-48.
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nous rapporte dans ses Propos de table que ses amis et lui, le jour
anniversaire de la naissance de Platon, discutaient sur le thème :
Πώς Πλάτων έλεγε τον θεον άεί γεωμετρεΐν(8). Nous apprenons ainsi
que cette question était disputée dans l'école, et Plutarque se fait
le porte-parole de son maître Ammonius (9), probablement diadoque
de Platon à l'Académie, tandis que son ami Tyndarès de Sparte
interprète ce mot prêté à Platon par la nécessité d'étudier la
géométrie avant de se livrer à la théologie (10). Il apparaît alors que ces
deux maximes : ό θεός άεί γεωμετρεΐ et άγεωμέτρητος μηδείς είσίτω
pourraient être corrélatives (11) ; ne trahiraient-elles pas une
réaction de santé, dans la ligne du platonisme traditionnel, à l'égard de
ce «déclin du rationalisme» (12) qui caractérise cette période ?
Voilà pour le fond. Pour la forme, cette inscription rappelle
celles que l'on pouvait effectivement lire à l'entrée de temples en
Grèce depuis les temps les plus reculés. En Grèce, les lieux de
culte ont toujours été considérés comme la résidence des dieux et
ils n'étaient pas nécessairement ouverts à tout le monde. Certaines
catégories de personnes pouvaient en être exclues, comme les
étrangers ou les esclaves, ou bien l'accès des sanctuaires pouvait
être interdit soit aux hommes soit aux femmes. On plaçait alors à
l'entrée du temple une inscription comme celle-ci, retrouvée à
Milet : θεός Ιπεν γυναίκας ες τώρακ[λέος μη είσίεναι, c'est-à-dire :
« le dieu dit que les femmes ne doivent pas entrer dans le sanctuaire
d'Héraklès » (13). Or, précisément au début du IIe siècle, nous voyons
Giessen 1910, pp. 118-134 : exclusion des étrangers, pp. 118-123 ; exclusion des
esclaves, pp. 123-125 ; exclusion des femmes, pp. 125-129 ; exclusion des hommes,
pp. 130-134. Voir aussi M. P. Nilsson, Griechische Religionsgeschichte*, Bd. I,
Miinchen 1955, p. 75.
(14) Exp. rerum. math..., p. 14. 18-16. 2 Hiller et comp. Plutarque, Quaest.
conv. VIII 2 (= Mor. 718 D) : ... επί την νοητήν καί άίδιον φύσιν ή*ς θέα τέλος
έστι φιλοσοφίας οίον εποπτεία τελετής ; Porphyre, ad Marc. 8, p. 279. 7-8
Nauck : εις φιλοσοφίαν την δρθήν παρά των θείων έτελέσθης λόγων.
(15) R. Hercher, Episiolographi graeci, Paris 1873, pp. 249-251. Il s'agit
de la lettre XXXVI.
(16) Cf. K. von Fritz, Quellen-Untersuchungen zu Leben und Philosophie des
Diogenes von Sinope {Philologus, Suppl. Bd. XVIII 2), Leipzig 1926, pp. 63-71.
(17) Ed. Norden, Agnoslos Theos, Leipzig 1913, p. 50.
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Diogène, étonné, engage la discussion avec un passant sur cette
inscription qu'il propose ironiquement de modifier tour à tour en :
Πενία ένθάδε κατοικεί, μηδέν είσίτω κακόν,
(la Pauvreté habite céans, nul mal ne doit entrer ici)
ou :
Δικαιοσύνη ένθάδε κατοικεί, μηδέν είσίτω κακόν
(la Justice habite céans, nul mal ne doit entrer ici.)
A propos de ce roman amusant, il convient de faire deux
observations importantes. La première, c'est la fortune de ce lieu commun
littéraire indéfiniment recopié. Otto Weinreich (18) l'a étudié et a
cité les emprunts qu'en ont faits Diogène Laërce (VI 39 et VI 50),
Clément d'Alexandrie (Stromates VII 4, 26), Théodoret (Graec.
affecl. cur. VI 20), la littérature latine, et enfin les chrétiens sur le
portail même de Sainte-Sophie de Constantinople :
ό ά(γιο)ς θ(εο)ς ένθάδε κατοικεί, μηδει[ς βέβηλος είσίτω
(Le Dieu Saint réside ici, aucun profane ne doit entrer).
La seconde observation nous amène à constater que cette histoire
n'est pas une fiction pure et simple, car on a découvert dans les
fouilles de telles inscriptions sur des linteaux de porte. C'est
principalement en Syrie qu'on les a retrouvées, et récemment
M. Louis Robert (19) a rassemblé tous les exemples connus dans
l'une de ses précieuses notices des Hellenica.
Il résulte de ce que nous venons de dire que la formule de cette
prétendue inscription de Platon au fronton de l'Académie est bien,
dans son fond, d'inspiration platonicienne et, dans sa forme, peut
se situer facilement dans le contexte de certaines habitudes de vie
grecques. Si donc l'absence totale de tout témoignage ancien nous
interdit absolument de croire à la réalité historique d'une inscription
placée par Platon lui-même, nous devons admettre que nous sommes
en présence d'une fiction littéraire tout à fait commune à la
rhétorique hellénistique, qui a d'ailleurs imaginé des légendes parallèles,
nous le verrons, pour le Péripatos d'Aristote et le Jardin d'Épicure !
(18) O. Weinreich, art. cit. dans Archiv fiir Heligionswiss. 18, 1915, 8-18.
(19) L. Robert, Échec au Mal, dans Hellenica, vol. XIII, Paris 1965, pp. 265-
271, surtout p. 266, nn. 1 et 2. Voir aussi Bulletin Épigrûphique dans Rev.
El. grecques, 1946-1947, n° 227.
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Peut-être même, eu égard à la forme lapidaire de la maxime
platonicienne, n'est-il pas tout à fait invraisemblable d'imaginer qu'à
l'occasion d'une restauration de bâtiment sur le site de l'Académie,
quelque diadoque zélé ou un mécène généreux ait fait graver au
11e ou me siècle de notre ère sur le linteau de quelque porte
l'inscription programmatique :
άγεωμέτρητος μηδείς είσίτω.
Toutefois, dans l'état actuel de la documentation, cette dernière
hypothèse nous semble très fragile.
(•24) Par lettre du 12. 2. 1967. Les manuscrits contenant cette scholic sont :
M = Marc, grace. 423, R = Vat. gr. 1298, ν = Vat. gr. 76, Ambr. = Ambr.
A 175 sup., L = Laur. LX 9. On reconnaît les manuscrits contenant les plus
anciennes scholies, celles de Sopatros, étudiées par Lenz, dans son ouvrage
cité supra, n. 22, au chap. 3, pp. 29-56.
(25) Arist., Or. XLVI, t. II, p. 168.20-21 Dindorf : ει δέ ή γεωμετρία καλόν
καΐ ή κατ' αυτήν ίσότης.
(26) Cf. Arist. Or., t. III, p. 464.12-15 Dindorf. Le texte est celui de Lenz,
établi sur la base des manuscrits énumérés supra, n. 24.
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justice, qui repose sur l'égalité. Cette raison met en œuvre d'ailleurs
une thèse typiquement platonicienne, selon laquelle sur l'égalité
des rapports de la progression géométrique repose le principe de
la justice distributive et la condition de la φιλία {Gorg. 507 D 6 - 508
A 8 et Lois VI, 757 A 5 - 758 A 2). Dans le Gorgias (508 A 6-7),
Socrate prononce cet éloge : ή ΐσότης ή γεωμετρική και έν θεοΐς και
εν άνθρώποις μέγα δύναται.
Contemporain, ou peut-être même légèrement antérieur à
Sopatros, l'empereur Julien, dans son Discours contre Héracleios,
fait allusion à cette même inscription. « Un jour, vers le début du
printemps de l'année 362, Julien fut invité à entendre dans une salle
de Constantinople une conférence donnée par un cynique du nom de
Héracleios... Le cynique, pour lui faire la leçon sur l'art de gouverner,
glissa ses conseils dans une allégorie où les dieux étaient, aux yeux de
l'empereur, irrévérencieusement mis en scène... Une des nuits
suivantes, il improvisa une riposte dont, à son tour, il donna lecture
en public. » (27).
Le discours est très clairement divisé. Après une introduction
(§1, 204 a 1 - 205 a 7), le plan est annoncé (205 a 7 - c 3) en trois
parties : I, qu'il convient au « Chien » davantage de composer
des discours que des mythes (§§ 2-9, 205 c 4 - 215 a 5) ; II, que la
composition des mythes doit satisfaire certaines règles et lesquelles
(§§ 10-23, 215 a 6 - 236 c 1) ; III et que, envers les dieux, le plus
grand respect est de mise (§§ 24-25, 236 c 2 - 239 c 5). C'est dans
cette troisième et dernière partie que se trouve l'allusion à notre
inscription. Pour illustrer le respect que l'on doit avoir pour les
dieux, Julien utilise l'argument d'autorité, en montrant combien
Pythagore, Platon et Aristote ont tenu en honneur les noms des
dieux : Τις οΰν ή τών Πυθαγορικών ευλάβεια περί τα των θεών
ονόματα ; Τίς δε ή Πλάτωνος ; Ποδαπος δε ήν έν τούτοις
'Αριστοτέλης ; νΑρ' ούκ άξιον αύτο Ίδεΐν ; (236 d 2-4). L'examen de la
piété exemplaire de ces trois fondateurs de l'Hellénisme emplit
entièrement la fin du paragraphe 24. D'abord Pythagore (*H
τον μεν Σάμιον... 236 d 4 - 237 a 5) ; puis Platon ('Αλλα του
(27) Cf. J. Bidez, Vie de Γ Empereur Julien, Paris 1930, p. 250. D'après
G. Rochefort, dans l'Empereur Julien, Œuvres complètes, t. II, 11C partie,
Paris 1963, p. 42, le discours aurait été prononcé « quelques jours avant le
22 mars 362 qui ouvrait la solennité d'Attis ».
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(28) M. Rochefort, loc. cit., p. 87, n. 1 croit que «la très savante Sirène »
est Jamhlique. mais cette identification est absolument exclue par le plan du
§ 24, annoncé dès le début. Il perpétue ainsi une erreur flagrante de E. Talbot,
Œuvres complètes de V empereur Julien, Paris 1863, p. 205 et n. 1. En réalité, chez
Julien, comme chez les rhéteurs de son temps, ce nom de Sirène désigne n'importe
quelle célébrité antique, p. ex. cf. Or. III (II), 52 d 8 où Homère est appelé :
ή 'Ομηρική Σειρήν, et Zwickeh, apud Pauly-"\Y issowa, s.v. Sirenen, Bd. Ill A 1.
col. 297.42-298.14. Ce sens métaphorique de Sirène est d'ailleurs bien connu,
cf. L.S.J., s.v. Σειρήν II : « the Siren charm of eloquence, persuasion, and
the like. »
(29) Cette même expression est employée pour Démosthène par Aelius
Aristide, Or. XLVI, t. II, p. 398.2 Dindorf.
(30) L'allusion est à Top. I 11, 105 a 3-7. M. Rochefort, ibid., n. 2, en
donnant comme référence Top. I 10, 104 a 4-6 reproduit ce qui doit être une
faute d'impression dans J. Bidez, Vie de V empereur Julien, p. 397, n. 41. Cette
citation deviendra un lieu commun, voir p. ex. Elias, In Cal. prooem. p. 122.22-
24 Busse.
(31) Bien que le mot « péripatos » soit employé communément pour désigner
une école (de philosophie), cf. R. E. Wvgherlev, Peripatos : the Athenian
philosophical Scene, dans Greece and Rome, 2.S., 8, 1961, 152-163 et 9, 1962,
2-21, il s'agit évidemment ici du Péripatos, le Lycée, l'école d'Aristote, cf. I. Dû-
ring, Aristotle in the ancient biographical Tradition. Gôteborg, 1957, pp. 404-411
et K. O. Brink, apud Pauly-Wissowa, s. v. Peripatos, Suppl. Bd. VII, col. 900.40-
904.24. M. Rochefort, loc. cit., p. 88, n'a pas compris le sens et a conservé,
en la modifiant légèrement («à ceux qui avaient accès à la promenade»), la
traduction de Talbot, loc. cit., p. 205 : « aux disciples admis à la promenade » !
(32) Je lis le texte ainsi : Βούλει <8ήτα> το μετά τοϋτο τήν πάνσοφον
υπαγορεύσω Σειρήνα, τον του Λογίου τύπον Έρμου, <τόν τω> Άπόλλωνι και
ταΐς Μούσαις φίλον ; 'Εκείνος άξιοι τους επερωτώντας ή <ζητεΐν> δλως
έπιχειροΰντας ει θεοί είσιν ούχ ώς ανθρώπους άποκρίσεως τυγχάνειν άλλ' ώς τα
θηρία κολάσεως. Ει δε άνεγνώσκεις τον συστατικον αύτοϋ <λόγον δς>, ώσπερ
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Gomme on le voit, Julien dans ce texte compare une inscription (33)
qu'Aristote aurait fait graver sur son école à celle que Platon
avait fait inscrire sur la sienne. Avait-il vraiment vu ces inscriptions
dans le séjour qu'il fit à Athènes en 355, au cours duquel il se fit
initier aux mystères d'Eleusis et rencontra un autre étudiant
qui allait devenir célèbre, Grégoire de Naziance (34), ou bien
brode-t-il sur une tradition littéraire inventée par les rhéteurs, qui
pourrait le dire ? Ce qui du moins est sûr, c'est que, en plein milieu
du ive siècle, Julien lui aussi connaissait cette tradition d'une
inscription au fronton de l'Académie.
Une tradition comme celle-ci une fois établie, avec une formule
si bien frappée, devait être continuellement reproduite. Toutefois,
malgré des recherches patientes, aucune trace n'a pu en être relevée
dans les œuvres des professeurs qui illustrèrent la dernière période
de l'enseignement platonicien à Athènes : Syrianus, Proclus,
Marinus, Damascius. Est-ce le hasard qui a voulu que soient perdus
les textes qui pouvaient faire allusion à cette histoire ? Les
platoniciens d'Athènes savaient-ils qu'il s'agissait d'une tradition tardive
et n'y attachaient-ils pas d'importance, avaient-ils complètement
déserté le site de l'Académie pour ces grandes maisons privées
comportant une salle de cours qui sont connues par les textes et
dont on a retrouvé un exemple au pied de la pente sud de
l'Acropole (35) ?
En revanche, on retrouve l'anecdote de l'inscription
abondamment utilisée dans l'école d'Alexandrie, qui depuis le début du
(38 bis) Sur ces symboles pythagoriciens, cf. H. D. Saffrey, Une collection
méconnue de « symboles » pythagoriciens, dans Revue des Études grecques 80,
1967, 198-201.
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peut-il être plus grand, alors que la ligne droite qui le constitue
n'a reçu ni augmentation ni diminution ? Comment, si ces cercles
sont l'âme (Tim. 36 D-E), à l'intérieur desquels tout le temporel a
été enfermé, ayant été ajustés l'un à l'autre ont-ils été réellement
étendus à partir du centre du monde jusqu'aux extrémités de
l'univers, et l'ont-ils enveloppé réellement de l'extérieur ? Le cercle
ne peut pas faire cela : envelopper une sphère de l'extérieur !
Pour ces raisons donc, et pour beaucoup d'autres, il est clair que
Timée, les Pythagoriciens et Platon (εκείνοι) parlaient à mots
couverts d'autres réalités. En effet, s'il est vrai que les Pythagoriciens
avaient le plus grand souci d'acquérir la connaissance des sciences
mathématiques — et Platon s'est montré pythagoricien, lui qui
avait fait inscrire sur son école : « nul ne doit entrer ici, s'il n'est
géomètre » — et que personne, n'eût-il touché la géométrie que du
bout du doigt, ne pourra accepter de tenir un tel langage, qui sera
assez fou pour penser que Platon parle ici en se limitant au sens
apparent ? Peut-être donc ne sera-t-il pas superflu de faire voir
brièvement dans le cas de quelques uns de ces symboles leur
signification profonde» (p. 116.21-117.30) (39).
Ainsi est introduite une longue dissertation (pp. 117.23-121.9),
dans laquelle Philopon explique la signification réelle de la psycho-
gonie du Timée. On peut noter d'ailleurs que la première partie
de cette explication est tirée du commentaire d'Alexandre
d'Aphrodise (p. 117.34-118.28) (40). Dans ce texte, on voit donc
Philopon citer en passant l'inscription de l'Académie, en la
déformant même quelque peu : άγεωμέτρητος μή είσίτω, pour lui donner
plus de ressemblance avec les maximes pythagoriciennes, citées
supra, p. 116.30-32 : επί μέτρου μή κάθου, εν όδω μή σχίζε ξύλα,
(39) Voici le texte à partir de p. 117.23 : δια τούτων μεν ούν και δια
πλειόνων ετέρων δήλον οτι άλλα τινά ήνίττοντο εκείνοι. ΕΊ γαρ μάλιστα πάντων
της των μαθημάτων γνώσεως έπεμελοΰντο οι Πυθαγόρειοι — Πυθαγόρειος δέ
ό Πλάτων ού και προ της διατριβής έπεγέγραπτο 'άγεωμέτρητος μή είσίτω' —
ουδείς δ* ούδ' άκρω δακτύλω γεωμετρήσας τοιοϋτό τι λέγειν άνέξεται, τίς ούτως
ηλίθιος ώς οϊεσθαι τον Πλάτωνα ταΰτα ούτω κατά τό φαινόμενον λέγειν ; "Ισως
δέ ούκ άκομψον επί ολίγων συντόμως των συμβόλων την διάνοιαν δηλώσαι.
(40) Je pense qu'il s'agit du commentaire d'Alexandre d'Aphrodise sur
le De anima d'Aristote, par opposition avec un traité particulier Περί ψυχής du
même Alexandre, qui est cité par Philopon infra, p. 159.18 : έγραψε δέ και
Περί ψυχής ίδιον βιβλίον ό αύτος οΰτος 'Αλέξανδρος...
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H. D. Saffrey.