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RÉSUMÉ
La lampe à incandescence est souvent utilisée pour visualiser en classe entière le
retard à l’instauration du courant dans une branche inductive. En y associant un capteur
optique, nous montrerons que la luminosité de la lampe n’est pas l’image de l’intensité du
courant en régime transitoire. Un modèle cohérent nécessite de coupler la dynamique des
phénomènes thermiques et électriques au niveau du filament, ce qui rend son interpréta-
tion beaucoup plus délicate. Une simulation numérique de cette expérience permet de vali-
der complètement ce modèle pour le réinvestir dans l’association condensateur - lampe.
(1) Remarque : mais l’absence de luminosité ne signifie pas absence de courant électrique dans la branche de
la lampe. Pour s’en convaincre il suffit de brancher deux lampes de point de fonctionnement nominal
(2,5 V ; 0,1 A et 3,5 V ; 0,3 A) en série sur une pile de 4,5 V. L’observation est sans appel, l’une brille,
l’autre pas.
tance du filament.
Comme le montrent les enregistrements des intensités via les tensions aux bornes
des résistances placées en série, le pic de courant dans la lampe A n’est pas effacé par la
présence de la bobine.
Une étude systématique, réalisée avec une autre ampoule, montre qu’une augmen-
tation de L se traduit par une diminution de la hauteur du pic assortie d’un décalage dans
le temps. Ce dernier est moins haut, mais il apparaît plus tard (cf. figure 4a ci-après).
Ceci est qualitativement évident car deux phénomènes évoluant en sens inverses
sont à l’œuvre durant ce régime transitoire. La montée en température se traduit par une
augmentation de la résistance, donc tend à une diminution de l’intensité. Le phénomène
d’auto-induction se caractérise, au contraire, par une tendance à une augmentation pro-
gressive de l’intensité du courant.
Ces deux phénomènes coexistent, si les temps caractéristiques associés sont du
même ordre de grandeur. En imposant l’intensité initiale, l’effet inductif est prépondérant
au début de l’expérience, mais c’est probablement l’effet thermique qui régit la fin du
régime transitoire si le temps caractéristique de l’effet thermique est assez long.
Inductance L en H 0,14 0,2 0,3 0,4 0,5 0,6 0,7 0,8 0,9 1
L
x= en ms 6 9 13,6 18 23 27 32 36 41 46
rL + rS + Ro
∆tsom en ms 14 19,5 25 26,9 30 34 36 37 39 41
Tableau 1
2.1.1. Photodiode
Le capteur optique est une photodiode BPW34 sensible dans le visible. Le temps de
réponse de ce composant est de l’ordre de 100 ns au maximum. Ce capteur est donc beau-
coup plus rapide que le phénomène que l’on se propose d’étudier.
On sait que le temps caractéristique de variation de Plum avec T est négligeable ; alors
les sens comparés des variations de Plum avec T sont les mêmes à tout instant.
Ainsi on voit clairement sur les graphes que l’échauffement du filament intervient
alors que le courant a déjà pratiquement atteint sa valeur limite.
L’introduction d’une bobine en série avec la lampe modifie fortement à la fois l’évo-
lution de l’intensité et la puissance lumineuse émise par la lampe.
Lorsque l’inductance L augmente, les deux courbes affichent un retard plus important.
En aucun cas on ne peut dire que le début du phénomène optique coïncide avec
l’instauration de l’intensité dans le circuit.
La présence d’une bobine de forte inductance fait nettement diminuer le temps de
montée ∆t10 - 90 de Plum.
Bien qu’ayant démarré plus tard, la luminosité de la lampe en série avec L rattrape
celle de la lampe en série avec la résistance non-inductive.
Figure 12 : Intensité dans la lampe pour diverses valeurs de x elec : prévision théorique.
Figure 13a : Température du filament pour diverses valeurs de x elec, prévision théorique.
Figure 13b : Puissance lumineuse émise par le filament (" T 4) pour diverses valeurs de x elec,
prévision théorique à comparer à la figure 10b.
300 r + Ro
Les conditions initiales sont xo , = 0,125 et yo = (cf. figures 14a et 14b
2400 r + RA
ci-contre).
La simulation confirme les prévisions qualitatives ; il faut choisir C assez grand
pour que le filament ait le temps de s’échauffer. La décroissance ultérieure de T traduit
la charge progressive du condensateur et la baisse d’intensité qui en résulte (cf. figure 14c
ci-contre).
x’elec t
Figure 14a : Luminosité prévue pour ! 7 2 ; 14 A et ! 7 0 ; 10 A.
xther xther
x’elec t
Figure 14b : Puissance lumineuse émise prévue (" T 4) pour ! 7 2 ; 14 A et ! 7 0 ; 10 A.
xther xther
x’elec t
Figure 14c : Intensité prévue pour ! 7 2 ; 14 A et ! 7 0 ; 10 A.
xther xther
Les essais ont été réalisés sur une lampe (6 V ; 0,45 A) et deux condensateurs de
90.103 µF et de 10.103 µF.
Lorsque x’elec est élevé, on voit apparaître la décroissance affine de l’intensité assor-
tie d’un flash lumineux de durée voisine de la seconde.
Par contre pour des valeurs plus faibles de C (tout est relatif !), l’émission lumi-
neuse est beaucoup plus courte mais reste visible (cf. figure 17 ci-contre).
5. ET LE RETARD À L’EXTINCTION
5.1. L’usage d’un interrupteur empêche de voir le retard à l’extinction
Le protocole expérimental habituellement utilisé (cf. figure 2) ne permet pas de
mettre en évidence le retard à l’extinction. Lors de l’ouverture de l’interrupteur, l’inten-
sité du courant dans la branche comportant la bobine est continue, mais le courant dans
l’autre branche s’inverse. Lors de ce régime transitoire, les deux lampes sont en série.
Les luminosités varient dans le temps, mais restent égales à chaque instant (pour deux
lampes identiques).
CONCLUSION
Le retard à l’allumage en présence d’une bobine est une expérience simple à mon-
ter, tellement visuelle que l’on peut se passer d’explications quant au rôle du filament.
Sous cette simplicité apparente se cache une réelle complexité. Rétrospectivement, c’est
par un heureux hasard que cette expérience réussit si bien. Faut-il pour autant l’envoyer
aux oubliettes de la pédagogie ? Chacun est seul juge en la matière. Pour notre part, la
compréhension des phénomènes physiques qui la régissent la rend, au contraire, encore
plus attrayante… à condition qu’aucun de nos élèves ne devienne trop curieux.
BIBLIOGRAPHIE
[1] DEIBER André, KEMPF Olivier et Groupe GRESEP. Lampe à incandescence, corps
noir, loi de Stefan et filtre passe-bas thermique. Bull. Un. Phys., octobre 2000,
vol. 94, n° 827, p. 1595-1624.