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L’Encéphale (2011) 37, 138—143

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

journal homepage: www.em-consulte.com/produit/ENCEP

PSYCHOPATHOLOGIE

Validation empirique du questionnaire abrégé des


schémas de Young (YSQ-S2) sur une population de
patients présentant un trouble de la personnalité
borderline et de sujets témoins
Empirical validation of the Young Schema Questionnaire-Short Form
(YSQ-S2) in borderline personality disorder and control subjects

P. Mauchand a,∗, K. Lachenal-Chevallet b, J. Cottraux c

a
CRIS, EA 647, 42023 Saint-Étienne, France
b
Service de pédopsychiatrie, CHU de Saint-Étienne, 42055 Saint-Étienne, France
c
Université Lyon 1, CHU de Lyon, 69394 Lyon, France

Reçu le 6 mars 2009 ; accepté le 1er avril 2010


Disponible sur Internet le 3 juillet 2010

MOTS CLÉS Résumé Le questionnaire abrégé des schémas (YSQ-S2) proposé par Young (1998) [13] est
Questionnaire des un instrument bref (75 items) permettant de mesurer 15 schémas précoces inadaptés (SPI).
schémas ; L’objectif de cette étude est de valider empiriquement deux versions du YSQ-S2 (version
Personnalité française initiale et version française modifiée) auprès d’un échantillon de patients présentant
borderline ; un trouble de la personnalité borderline (n = 37) et de sujets témoins (n = 263). Les résultats
Psychométrie ; indiquent que les deux versions de l’instrument distinguent bien les patients borderline des
Schémas précoces sujets témoins. Les comparaisons statistiques montrent des différences significatives entre les
inadaptés deux groupes, les scores au YSQ-S2 étant à chaque fois plus élevés pour le groupe pathologique.
Pour les deux versions, un seuil pathologique est également proposé. La version française (ini-
tiale ou modifiée) du YSQ-S2 apparaît être une mesure valide permettant la mise en évidence
des SPI et une bonne échelle de mesure du trouble de la personnalité borderline.
© L’Encéphale, Paris, 2010.

Summary
KEYWORDS Introduction. — According to Young [11], Early Maladaptive Schemas (EMS) are deep cognitive
Borderline structures constituted by beliefs about the word, oneself, and one’s relationship with others.
personality disorder; Young proposed a first clinical scale to assess EMS: the Young Schema Questionnaire (YSQ-L1). A
later version, the YSQ-L2 (205 items), was developed by Young to measure 16 EMS. The Schema

∗ Auteur correspondant. Département STAPS, université Jean-Monnet, 3, impasse Georges-Clémenceau, 42100 Saint-Étienne, France.
Adresse e-mail : pierre.mauchand@univ-st-etienne.fr (P. Mauchand).

0013-7006/$ — see front matter © L’Encéphale, Paris, 2010.


doi:10.1016/j.encep.2010.04.014
Validation empirique du questionnaire abrégé des schémas de Young (YSQ-S2) 139

Questionnaire-Short Form (YSQ-S2) was designed to measure 15 EMS [13] and is a shorter ins-
Early maladaptive trument (75 items).
schemas; Aim of the study. — The aim of the present study was to validate the French version of the YSQ-
Psychometric; S2 through a comparison of patients with borderline personality disorder (BPD) with control
Schema questionnaire subjects. We used two French versions of the YSQ-S2 for validation purposes in BPD and control
samples. The first version (initial French version) is identical to the original YSQ-S2 (75 items,
15 EMS) while the second (modified French version) comprises 68 items grouped into 14 factors.
Method. — The control group was composed of 263 non-clinical subjects (82 males, 181 females)
who were mostly university students. The mean age of the sample was 27.92 years (SD = 14.26)
and age ranged from 17 to 67 years. The pathological group was composed of 37 BPD patients
(eight males and 29 females) from the Anxiety Disorder Unit (Neurological Hospital, Lyon) and
the Cognitive Behaviour Therapy Unit (Sainte Marguerite Hospital, Marseille). The majority of
these patients were employees and senior executives. Age ranged from 19 to 53 years, with
an average of 34.45 years (SD = 9.74). A psychiatrist diagnosed the patients with the Diagnostic
Interview for Borderline-Revised [3,17]. All participants filled in the French version of the ori-
ginal 205-item YSQ-L2 [5] from which responses of the 75-item YSQ-S2 were extracted. Control
subjects anonymously completed the YSQ-L2 in groups of 10 to 40 people and patients completed
the YSQ-L2 in a clinical setting.
Results. — For each version of the YSQ-S2, the total score was analyzed with two-ways ANOVA
(Group × Gender) and the sub-scores were analyzed with one-way MANOVA (Group). Our results
showed that the two versions of the YSQ-S2 have good discrimination values between BPD
patients and control subjects. Statistical comparisons indicated significant differences between
the two groups. No difference appeared between males and female’s scores. Results showed
that BPD patients’ total score and sub-scores were significantly higher than those of control
subjects. Moreover, for each version of the YSQ-S2, a threshold level of pathology was obtained
by the analysis of the intervals of total scores for the two groups. In the initial French version of
the YSQ-S2, the scores of 15.59% of the control subjects overlapped with the scores of 94.59% of
the BPD patients with a total score higher than 180. In the modified French version, the scores
of 15.97% of the control subjects overlapped with the scores of 94.59% of the BPD patients with
a total score higher than 160. Therefore, the pathological threshold of BPD could be set at a
score of 181 and 161, respectively for the initial French version and the modified French version
of the YSQ-S2.
Discussion. — In spite of the small size of our pathological sample (N = 37), the French version
(initial or modified) of the YSQ-S2 appears to be a valid measurement allowing the description
of the EMS and a quite effective instrument for measuring BPD symptoms. In addition, our
results suggest that it is possible to reduce the YSQ-S2, given that the suppression of several
items (modified French version of the questionnaire) does not modify the cut-off point and the
differences between the BPD patients and the control subjects.
© L’Encéphale, Paris, 2010.

Introduction développent des comportements spécifiques et inadaptés


qui empêchent de mettre en doute la validité des SPI. Les
Selon Young [11], les schémas précoces inadaptés (SPI) sont individus reproduisent ainsi, à long terme, des comporte-
des croyances inconditionnelles sur le monde, soi-même et ments dysfonctionnels.
sa relation aux autres. Ces croyances ont une valeur prédic- Trois principaux processus de maintien des schémas
tive pour le sujet, qui ne se sent pas capable d’y échapper. ont été postulés par Young : la soumission aux schémas
Les SPI sont rigides, résistants au changements, activés par (par exemple, une personnalité dépendante convaincue de
des stimuli environnementaux, connectés à des émotions sa faiblesse cherchera toute sa vie des protecteurs puis-
de forte intensité, et ont leur origine dans les expériences sants), l’évitement des schémas (par exemple, une personne
interpersonnelles précoces [4,12,14—16]. ayant un schéma d’infériorité s’alcoolisera pour affronter
Les SPI affecteraient plus particulièrement l’image de les situations sociales qui lui font peur) et la compensa-
soi de l’individu, en lui retirant par-là même l’espoir tion des schémas (par exemple, une personne narcissique
d’une amélioration de son état. Les biais de traitement compensera par l’inflation de soi un schéma d’infériorité
de l’information (maximalisation des données allant dans ou de non-valeur et, despotiquement, exigera des autres
le sens des schémas, minimalisation de celles les infirmant) des attentions, de l’admiration et des marques exces-
induits par les SPI tendent à les renforcer et à les pérenniser. sives de respect). D’autres facteurs privilégiés par Young
Young fait l’hypothèse qu’en réponse aux émotions intenses peuvent être en cause, en particulier le renforcement des
et aversives suscitées par l’activation des SPI, les individus schémas par l’entourage qui s’y soumet et l’existence de
140 P. Mauchand et al.

modèles culturels ou familiaux qui les justifient. Ces pro- de traitement de l’anxiété, hôpital neurologique Pierre
cessus seraient reliés à un système d’auto-injection interne Wertheimer) et de Marseille (unité de thérapie comporte-
sous formes de pensées automatiques qui régulent les com- mentale et cognitive, hôpital Sainte-Marguerite) et ont été
portements et les émotions [5]. Le schéma représente donc diagnostiquées souffrant d’un trouble de la personnalité
un trait de personnalité mais, selon Young, il en résulte des borderline par diagnostic interview for borderline-revised
variations émotionnelles qui sont des « modes de schéma » (DIBR) [3,17].
ou des états transitoires du moi qui expriment le schéma
dans la relation avec les autres et créent des difficultés Mesures
interpersonnelles répétitives [1,15].
Young [11] propose une échelle clinique d’évaluation des Le questionnaire YSQ-S2 (75 items) mesure 15 SPI [13] à
SPI : le questionnaire des schémas (YSQ-L1). Une seconde savoir [5] : déprivation émotionnelle (emotional depri-
version de ce questionnaire (YSQ-L2) a été proposée plus vation), abandon (abandonment), défiance/abus (mis-
récemment par l’auteur [12]. Le YSQ-L2 est un outil rela- trust/abuse), isolement social (social isolation), déficience
tivement long (205 items) permettant de mesurer 16 SPI. (defectiveness), échec dans les réalisations (failure),
Plusieurs études attestent de la validité de cet instrument dépendance fonctionnelle et incompétence (dependency
[7,9]. Le questionnaire abrégé des schémas (YSQ-S2) est and incompetence), vulnérabilité à la menace ou à la
un outil plus court (75 items) permettant de mesurer 15 SPI souffrance (vulnerability to harm), fusion et interdé-
[13]. Trois études ont examiné les propriétés psychomé- pendance émotionnelle (enmeshment), assujettissement
triques du YSQ-S2. Dans la première, réalisée par Welburn (subjugation of needs), sacrifice de soi (self-sacrifice),
et al. [10] auprès d’un échantillon de patients inclus dans un inhibition émotionnelle (emotional inhibition), idéaux exi-
programme de traitement de jour, les résultats de l’analyse geants (unrelenting standards), droits personnels exagérés
factorielle ont montré la présence des 15 SPI proposés par (entitlement) et contrôle et auto-discipline insuffisants
Young. Dans la deuxième, conduite par Lachenal-Chevallet (insufficient self-control). Chaque item est évalué sur une
et al. [6] auprès d’un échantillon de sujets témoins, les échelle en six points (1 = cela ne m’a jamais correspondu ;
résultats de l’analyse factorielle ont révélé 14 facteurs 2 = cela a été vrai pour une période de ma vie ; 3 = cela me
interprétables, incluant 13 des 15 SPI proposés par Young. concerne actuellement ; 4 = assez vrai pour moi ; 5 = tout à
Dans la troisième, réalisée par Baranoff et al. [2], les fait vrai pour moi ; 6 = me décrit parfaitement). Plus les
résultats de l’analyse factorielle ont révélé une solution à scores sont élevés, plus ils attestent de la présence du SPI
13 facteurs, à la fois dans un échantillon d’étudiants austra- chez le sujet qui répond au questionnaire.
liens et dans un échantillon d’étudiants coréens. Ces trois
études, réalisées à partir de différentes versions du YSQ-S2 Procédure
(anglaise, française et coréenne), témoignent de la validité
transculturelle de l’instrument. Tous les participants ont complété la version française
L’objectif de la présente étude est de valider empirique- du YSQ-L2 (205 items) [4,8], duquel ont été issues les
ment la version française du YSQ-S2 auprès d’un échantillon réponses du YSQ-S2 (75 items). Les sujets témoins ont
pathologique (patients borderline) et de sujets témoins et, complété anonymement et collectivement (en groupe de dix
subséquemment, de proposer un seuil pathologique. Plus à 40 personnes) le questionnaire. Le temps de réponse était
précisément, deux études ont été réalisées : la première d’environ une heure. Les patients borderline ont complété
porte sur la version française initiale du YSQ-S2 (75 items, le questionnaire sous la direction d’un évaluateur lors d’une
15 SPI) tandis que la seconde porte sur la version française consultation thérapeutique.
modifiée (68 items, 14 SPI) issue de l’étude de Lachenal-
Chevallet et al. [6].
Résultats

Méthode Nous présentons ci-après les résultats des deux études réa-
lisées.
Sujets
Étude 1
Le groupe témoin était composé de 263 sujets (82 hommes et
181 femmes). La moyenne d’âge était de 27,92 ans (écart- Validité empirique
type : 14,26) avec une étendue de 17 à 67 ans. Ce groupe Nous avons comparé le groupe témoin et le groupe patho-
était constitué d’étudiants issus du régime général (72,60 %) logique en prenant comme critères le score total (analyse
et de l’université tous âges (27,40 %). Tous les sujets ont univariée) et les sous-scores au YSQ-S2 (analyse multiva-
été recrutés à l’université de Lyon (Lyon-1 et Lyon-2) et riée). Le Tableau 1 donne, pour chaque groupe, le score total
étaient volontaires pour répondre au questionnaire après moyen et les sous-scores moyens au YSQ-S2.
une réunion informative. Analyse sur les scores totaux. Une 2 × 2 Anova
Le groupe pathologique était constitué de 37 patients (Groupe × Sexe) a été réalisée pour analyser les données
(huit hommes et 29 femmes) présentant un trouble de la per- relatives au score total au YSQ-S2.
sonnalité borderline. La moyenne d’âge était de 34,45 ans L’analyse a montré un effet principal hautement signifi-
(écart-type : 9,74), avec une étendue de 19 à 53 ans. Ce catif du facteur Groupe, F(1, 296) = 89,49, p < 0,001. Comme
groupe était majoritairement constitué de personnes actives on peut le voir dans le Tableau 1, le score total est nettement
(67,50 %). Elles ont été recrutées aux CHU de Lyon (unité plus élevé dans le groupe pathologique que dans le groupe
Validation empirique du questionnaire abrégé des schémas de Young (YSQ-S2) 141

Tableau 1 Validité empirique du YSQ-S2 (version française initiale) : moyennes (et écarts-types) du score total et des sous-scores
pour chaque groupe de sujets.

Sujets témoins Patients borderline Comparaison des


(n = 263) (n = 37) groupes : t(298)a

Total 145,73 (38,52) 231,16 (48,91)


Déprivation émotionnelle 8,51 (4,39) 16,14 (7,23) 9,01 (p < 0,001)
Abandon 11,11 (5,37) 18,78 (5,77) 8,06 (p < 0,001)
Défiance/Abus 8,97 (3,85) 14,73 (6,59) 7,66 (p < 0,001)
Isolement social 10,32 (5,52) 17,62 (7,27) 7,21 (p < 0,001)
Déficience 7,01 (3,65) 13,05 (6,63) 8,35 (p < 0,001)
Échec dans les réalisations 7,27 (3,05) 14,32 (5,90) 11,41 (p < 0,001)
Dépendance fonctionnelle et incompétence 8,27 (4,26) 15,03 (7,77) 7,98 (p < 0,001)
Vulnérabilité à la menace ou à la souffrance 9,84 (4,80) 12,95 (6,30) 3,54 (p < 0,001)
Fusion et interdépendance émotionnelle 7,75 (4,02) 14,30 (7,29) 8,21 (p < 0,001)
Assujettissement 7,86 (3,87) 14,38 (6,40) 8,73 (p < 0,001)
Sacrifice de soi 13,97 (5,38) 19,68 (6,23) 5,92 (p < 0,001)
Inhibition émotionnelle 10,05 (4,83) 14,11 (6,55) 4,55 (p < 0,001)
Idéaux exigeants 14,10 (4,89) 16,86 (5,74) 3,15 (p < 0,002)
Droits personnels exagérés 10,52 (4,75) 14,35 (4,96) 4,57 (p < 0,001)
Contrôle et autodiscipline insuffisants 10,20 (4,42) 14,86 (5,44) 5,83 (p < 0,001)
a p corrigé à 0,003.

témoin. L’analyse n’a dégagé ni d’effet principal du facteur personnels exagérés » et « contrôle et autodiscipline insuffi-
Sexe ni d’effet d’interaction entre les deux facteurs. Dans sants » n’émergeaient pas en tant que facteurs indépendants
la mesure où la présente analyse n’a dégagé aucun effet du mais étaient inclus dans un facteur d’ordre supérieur cor-
facteur Sexe, et compte tenu du faible nombre de sujets respondant à un facteur appelé « manque de limites » par
masculins dans le groupe pathologique (n = 8), les analyses Young [12]. Cette analyse a ainsi révélé 14 facteurs inter-
subséquentes ne prennent pas en compte ce facteur. prétables correspondant au modèle théorique de Young.
Analyse sur les sous-scores. Une Manova à un facteur de Dans l’ensemble, 59 des 75 items saturaient exactement
classification (Groupe) a été réalisée pour analyser les don- avec la structure théorique de l’instrument et huit items
nées relatives aux sous-scores du YSQ-S2. présentaient des saturations significatives sur un facteur
L’analyse a montré un effet hautement significatif du d’ordre supérieur (manque de limites). De plus, un item
Groupe, ␭ de Wilks = 0,56, F(15, 284) = 14,66, p < 0,001. présentait une saturation significative sur un facteur inat-
Comme le montre le Tableau 1, le groupe pathologique pré- tendu (« assujettissement » au lieu de « défiance/abus »).
sente des sous-scores plus élevés que le groupe témoin. Par conséquent, la version française modifiée du YSQ-
Spécifiquement, sur chacun de ces sous-scores, une ana- S2 comporte 68 items regroupés en 14 facteurs : isolement
lyse univariée (test t avec niveau alpha corrigé à 0,003) a
montré une différence significative entre les deux groupes
(Tableau 1). Dans l’ensemble, les résultats de ces analyses Tableau 2 Intervalles des scores au YSQ-S2 (version
suggèrent que le YSQ-S2 discrimine bien la psychopathologie française initiale) pour chaque groupe de sujets.
borderline de la « normalité ».
Intervalles Sujets témoins Patients borderline
(n = 263) (n = 37)
Seuil pathologique
Nous avons procédé à une analyse complémentaire afin 60 < x ≤ 80 1 0
d’établir un seuil de pathologie à la version française initiale 80 < x ≤ 100 18 0
du YSQ-S2. 100 < x ≤ 120 56 0
Comme le montre le Tableau 2, nous constatons que, avec 120 < x ≤ 140 54 0
des scores strictement supérieurs à 180, 15,97 % des sujets 140 < x ≤ 160 59 1
témoins (dont le statut clinique n’est pas connu) sont super- 160 < x ≤ 180 33 1
posables à 94,59 % des patients borderline. Par conséquent, 180 < x ≤ 200 16 11
le seuil recommandable à partir duquel le sujet commence- 200 < x ≤ 220 11 7
rait à être considéré comme pathologique se situe à 181. 220 < x ≤ 240 8 3
240 < x ≤ 260 5 4
260 < x ≤ 280 1 5
Étude 2 280 < x ≤ 300 1 1
300 < x ≤ 320 0 1
Cette seconde étude porte sur une version modifiée du 320 < x ≤ 340 0 2
YSQ-S2. En effet, dans une analyse factorielle réalisée 340 < x ≤ 360 0 1
par Lachenal-Chevallet et al. [6], les sous-échelles « droits
142 P. Mauchand et al.

Tableau 3 Validité empirique du YSQ-S2 (version française modifiée) : moyennes (et écarts-types) du score total et des sous-
scores pour chaque groupe de sujets.

Sujets témoins Patients borderline Comparaison des groupes :


(n = 263) (n = 37) t(298)a

Total 132,29 (35,61) 211,73 (45,56)


Isolement social 10,32 (5,52) 17,62 (7,27) 7,21 (p < 0,001)
Vulnérabilité à la menace ou à la souffrance 7,93 (4,25) 10,38 (5,63) 3,14 (p < 0,002)
Dépendance fonctionnelle et incompétence 4,20 (1,86) 8,81 (3,73) 12,09 (p < 0,001)
Sacrifice de soi 13,97 (5,38) 19,68 (6,23) 5,92 (p < 0,001)
Manque de limites 16,46 (6,73) 23,03 (7,23) 5,51 (p < 0,001)
Idéaux exigeants 12,03 (4,47) 14,30 (5,01) 2,84 (p < 0,005)
Inhibition émotionnelle 8,51 (4,42) 11,51 (5,62) 3,73 (p < 0,001)
Abandon 11,11 (5,37) 18,78 (5,77) 8,06 (p < 0,001)
Déficience 7,01 (3,65) 13,05 (6,63) 8,35 (p < 0,001)
Fusion et interdépendance fonctionnelle 7,75 (4,02) 14,30 (7,29) 8,21 (p < 0,001)
Déprivation émotionnelle 8,51 (4,39) 16,14 (7,23) 9,01 (p < 0,001)
Échec dans les réalisations 8,27 (4,26) 15,03 (7,77) 7,98 (p < 0,001)
Assujettissement 9,60 (4,33) 17,73 (7,49) 9,60 (p < 0,001)
Défiance/Abus 6,63 (3,54) 11,38 (4,86) 7,27 (p < 0,001)
a p corrigé à 0,004.

social, vulnérabilité à la menace ou à la souffrance,


Tableau 4 Intervalles des scores au YSQ-S2 (version
dépendance fonctionnelle et incompétence, sacrifice de
française modifiée) pour chaque groupe de sujets.
soi, manque de limites, idéaux exigeants, inhibition émo-
tionnelle, abandon, déficience, fusion et interdépendance Intervalles Sujets témoins Patients borderline
émotionnelle, déprivation émotionnelle, échec dans les réa- (n = 263) (n = 37)
lisations, assujettissement et défiance/abus.
60 < x ≤ 80 5 0
80 < x ≤ 100 41 0
Validité empirique 100 < x ≤ 120 70 0
Le Tableau 3 présente, pour chaque groupe, le score total 120 < x ≤ 140 53 1
moyen et les sous-scores moyens au YSQ-S2 modifié. Les 140 < x ≤ 160 53 1
analyses statistiques effectuées sont identiques à celles réa- 160 < x ≤ 180 11 7
lisées dans l’étude précédente. 180 < x ≤ 200 13 11
Analyse sur les scores totaux. L’analyse a montré un effet 200 < x ≤ 220 9 6
principal hautement significatif du facteur Groupe, F(1, 220 < x ≤ 240 5 2
296) = 89,19, p < 0,001. La lecture du Tableau 3 montre que le 240 < x ≤ 260 3 3
score total est nettement plus élevé dans le groupe patho- 260 < x ≤ 280 0 2
logique que dans le groupe témoin. L’analyse n’a dégagé 280 < x ≤ 300 0 1
ni d’effet principal du facteur Sexe ni d’effet d’interaction 300 < x ≤ 320 0 1
entre les deux facteurs. 320 < x ≤ 340 0 1
Analyse sur les sous-scores. L’analyse a montré un effet
hautement significatif du Groupe, ␭ de Wilks = 0,55, F(14,
285) = 16,67, p < 0,001. Comme on peut le voir dans le
Tableau 3, le groupe pathologique présente des sous-scores recommandable à partir duquel le sujet commencerait à
plus élevés que le groupe témoin. Spécifiquement, sur être considéré comme pathologique se situe donc à 161.
13 des 14 sous-scores, une analyse univariée (test t avec
niveau alpha corrigé à 0,004) a montré une différence signi- Discussion
ficative entre les deux groupes. En ce qui concerne le
facteur « idéaux exigeants », la différence entre les deux
Le YSQ-S2 différencie bien les sujets témoins des patients
groupes approche le seuil de significativité (Tableau 3). Dans
présentant un trouble de la personnalité borderline, à la fois
l’ensemble, les résultats de ces analyses corroborent les
pour le score total au questionnaire et sous-score par sous-
résultats précédents.
score. Précisément, pour chaque version du YSQ-S2 étudiée
(version française initiale et version française modifiée),
Seuil pathologique les analyses statistiques montrent que le score total et les
La lecture du Tableau 4 montre que, avec des scores stric- scores de chaque sous-dimension sont susceptibles de discri-
tement supérieurs à 160, 15,59 % des sujets témoins sont miner les deux groupes. Il convient également de souligner
superposables à 94,59 % des patients borderline. En ce qui que la clarté des résultats nous permet, pour chaque version
concerne la version française modifiée du YSQ-S2, le seuil de l’instrument, de proposer un seuil pathologique. Le YSQ-
Validation empirique du questionnaire abrégé des schémas de Young (YSQ-S2) 143

S2 semble donc être une mesure valide permettant la mise Form) in Korean and Australian samples. J Affect Disord
en évidence des SPI, ce qui confirme les résultats d’études 2006;93:133—40.
antérieures [2,6,10], et une bonne échelle de mesure du [3] Chaine F, Guelfi JD, Monier C, et al. Diagnostic clinique et
trouble de la personnalité borderline. évaluation standardisée de la personnalité borderline : rapport
préliminaire. Encéphale 1995;21:247—56.
Par ailleurs, nos résultats suggèrent qu’il est possible de
[4] Cottraux J. Les thérapies comportementales et cognitives. 4e
réduire le YSQ-S2, dans la mesure où la suppression de plu-
ed. Paris: Masson; 2004.
sieurs items (version française modifiée du questionnaire) ne [5] Cottraux J, Blackburn IM. Psychothérapies cognitives des
modifie pas l’importance des différences constatées entre troubles de la personnalité. 2e ed. Paris: Masson; 2006.
le groupe pathologique et le groupe témoin. On remar- [6] Lachenal-Chevallet K, Mauchand P, Cottraux J, et al. Factor
quera enfin que le sexe ne semble pas avoir une influence structure of the schema questionnaire-short form in a noncli-
sur les scores (score total et sous-scores) au questionnaire. nical sample. J Cognit Psychother 2005;20:311—8.
Toutefois, le faible nombre de sujets masculins composant [7] Lee CW, Taylor G, Dunn J. Factor structure of the schema
notre échantillon pathologique doit nous amener à relativi- questionnaire in a large clinical sample. Cognit Ther Res
ser cette conclusion. 1999;23:441—51.
[8] Mihaescu G, Séchaud M, Cottraux J, et al. Le questionnaire des
La limite principale de cette étude tient au fait que les
schémas cognitifs de Young : traduction et validation prélimi-
participants ont complété la version française du YSQ-L2
naire. Encéphale 1997;21:194—9.
[4,8], duquel ont été issues les réponses du YSQ-S2. Les [9] Schmidt NB, Joiner TE, Young JE, et al. The schema ques-
sujets n’ont donc pas directement complété les versions (ini- tionnaire: investigation of psychometric properties and the
tiale et modifiée) du YSQ-S2. Cette remarque vaut surtout hierarchical structure of a measure of maladaptive schemas.
pour la version modifiée de l’instrument, les modifications Cognit Ther Res 1995;19:295—321.
apportées par rapport à la version initiale reposant sur une [10] Welburn K, Coristine M, Dagg P, et al. The schema
sélection d’items particuliers (suppression de sept items questionnaire-short form: factor analysis and relationship
par rapport à la version initiale) et le réaménagement de between schemas and symptoms. Cognit Ther Res 2002;26:
certains facteurs (regroupement de deux facteurs sur un 519—30.
[11] Young JE. Cognitive therapy for personality disorders: a schema
facteur d’ordre supérieur).
focused approach. Sarasota, FL: Professional Resource Press;
En dépit de cette limite et du nombre relativement faible
1990.
de patients présentant un trouble de la personnalité border- [12] Young JE. Cognitive therapy for personality disorders: a schema
line composant notre échantillon (avec un faible nombre de focused approach (Revised Edition). Sarasota, FL: Professional
sujets masculins), notre étude représente une première ten- Resource Press; 1994.
tative de validation empirique, mais aussi de réduction du [13] Young JE. Young Schema Questionnaire Short Form. New York,
YSQ-S2. En effet, à notre connaissance, il n’y pas encore eu NJ: Cognitive Therapy Center; 1998.
de validation empirique en anglais ou en américain de ce [14] Young JE, Klosko J. Reinventing your life. New York, NJ: Dutton
questionnaire abrégé. Books; 1993.
[15] Young JE, Klosko J, Weishaar M. La thérapie des schémas. Lou-
vain, Belgique: DeBoeck; 2005.
Références [16] Young JE, Lindemann MD. An integrative schema-focused
model for personality disorders. J Cognit Psychother 1992;6:
[1] Arntz A, Klokman J, Sieswerda S. An experimental test of the 11—23.
schema mode model of borderline personality disorder. J Behav [17] Zanarini MC, Gunderson JG, Frankenburg FR, et al. The
Ther Exp Psychiatry 2005;36:226—39. revised diagnostic interview for borderlines: discriminating
[2] Baranoff J, Oei T, Ho Cho S, et al. Factor structure and inter- BPD from other axis II disorders. J Personal Disord 1989;3:
nal consistency of the Young Schema Questionnaire (Short 10—8.

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