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Supplément au numero 100 de A ctes de ia recherche en s
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revue européenne des livres
Huw Be y n o n
roprku k a iz o i E. P. Thompson et Ie socialisme humaniste
a a carfilor revue Peneiope Corfieid
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Entretien avec E. P. Thompson
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Ru d o l f v o n T h a d d e n
i piöXiou ravlsta Pourquoi M itterrana et Kohl ont-ils choisi
. di Hbri európea Ie 2 0 juillet pour renare visite a Ernst
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S ta n le y M itc h e ll
La réception de W alter Benjamin
r auropalsche en Grande-Bretagne
roprica f n iz n i Brieuc-Yves C a d a t e t Oussam a C herribi
Nationalité et citovenneté Ie cas néerlandais
r r carrier revue
D idier Er ib c n
ze mie europeisk L 'humanisme universeIde Georges Dumézil
I Bukkioo revlsta
et la Librairie eurovéenne
er ren europee
r u i rupaaraïKin Liber est pubiié en ailemand dans Liber, europaisches
Büchermagazm, en bulgane dans Liber, eBponencKO criHcaHHe
ss europaisebe 3a KHHm. en hongnens dans EJet Es Irodalom, en suédois dans 1 6
ramie europeisk
Actualité
N ationalité et citoyenneté:
Reflexions autour du cas néerlandais
Brieuc-Yves Cadat et Oussama Cherribi
JD a n s leprolongement des ITOYENNETÉ ET NATIONALITÉ : quels rap- alors déflnie comme communauté distinc-
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Actualité
turnté politique de créer i ’illusion d’une tion pourrait expiiciter une telle intention. Opter p o u r le national, c ’est refuser le
communauté d’intérêts transcendant les II peut ètre, en tout cela, “étranger3 4 la droit de vote des étrangers, ne leur laisser
idenutés (contradictions) ethniques, de n a tio n mais il n en sera pas m oins que le choix de i ’assimiiation. Par consé
sexe et de classe. aiors la non-apparte- citoven ! Résider sur le territoire de i ’État quent, lim iter ie droit de vote au niveau
nance nationale entache d ’illé g itim ité fa it de la personne un citoyen. L’État- local, c’est adopter une attitude ambigue
préaiable toute revendication émanant de nation dépérit au profit de l’État-cité. qui revient 4 céder du terrain aux aspira
ressortissants étrangers. La pretention des tions nationalistes (4).
“non-nationaux" 4 profiter des biens de la La p ro p o s itio n d ’une dissociation
nation est perdue par les “ n a tio n a u x” c o m p lé te de ia n a tio n a iité et de la
Contre la nation, tout contre
comme une atteinte au mythe national. Le citoyenneté ($) prend une qualité particu-
nationaiiste y verra ie déclin de la gran lière en fonction du contexte discursif
deur de l’État ; ie patiiote et le chauvinis- On peut se demanaer pourquoi les déci- considéré. On en fera une revue rapide
te partiront en guerre contre les ennemis deurs néerlandais ont circonscrit la disso en examinant successivement le nationa
du dehors ( l’Europe) et du dedans (les ciation de la nationaiité et de ia citoyen lisme “absoiu", les particularismes natio
immigrés). Accorder ia citoyenneté a un neté au niveau locai ? Au moment oü il naiiste et antinationaiiste, enfin l ’antinatio-
non-national, e est perturber la construc sembie que ia démocratisation de la cité naiisme universaiiste.
tion symboiique nationaiiste, tout particu- se fasse contre ia nation, en réaiité eile se Le discours dans le q u e l la cité se
lièrem ent dans ie dom aine des droits fait “tout contre eile" : les formes adop- confond entièrement avec la nation est
poiitiques stricto sensu (3). Si le nationa tées visent a la protéger dans ie moment incompatible avec la notion de citoyenne
lisme comme confluence idéologique des mème de sa remise en cause. On est en té résidentieile. Un tel discours nationaiis
habitants d ’un tem toire donné apparait présence d ’un découpage de la participa te et universaiiste prone I’assimiiation juri-
comme ia clé de i ’agrégation pacifique tion poiitique entre deux niveaux princi- dique, c’est-4-dire l’entrée dans la nation
des particuiarités sociales, remettre en paux : locai et national. Comment ne pas néeriandaise par la voie de la naturalisa
cause ie lien entre nation et citoyenneté apercevoir un sauvetage du nationalisme tion. Dans ce discours, l ’appartenance
ne revient-il pas a retirer son efficacité a néeriandais derrière l’accord de la seuie nationale est exclusive. II n ’y a de place
l ’id é o lo g ie natio n a iiste et 4 d é c h ire r cito y e n n e té lo ca ie aux résidents n i p o u r la c ito ye n n e té p o iitiq u e de
l’umté nationale ? N’est-ce pas opposer la étrangers ? l’étranger, ni mème pour la reconnaissan
cite a la nation et dormer la primauté 4 la N ’y a-t-il pas la un refus d ’aller au ce du cumul des nationaiités (pluraiité de
première ? N ’est-ce pas ètre antinationaiis- bout de la logique enclenchée ? Pourquoi nationaiités). Reste i ’éventuelle libéralisa-
te ? Sans doute. C’est qu ’il y a rupture. la c ito ye n n e té lié e a la résidence au tion des conditions de la naturalisation.
L’accès au pouvoir poiitique instrumental niveau municipal reste-t-elle associée a la Le discours aans lequel la cité est dis-
n’est plus déterminé par les critères maté- nationaiité aux niveaux régionai, national sodée de la nation au niveau locai, mais
rieis et symboliques propres a la nation. (et supranational) ? A lire les argumen- reste c o n fo n a u e avec e ile au niveau
Le resident étranger - i ’ailochtone- peut taires juridico-poiitiques précédant ia révi- national, est de 1’ordre du particularisme
bien ètre racialisè par ia société d ’accueil, sion constitutionneüe de 1983, il sembie et présente deux variantes : nationaiiste et
défini comme appartenant a une “race" que i ’on ait affaire a une sorte de crispa- i antinationaiiste. Dans ia variante nationa-
différente ; il peut pratiquer une autre tion nationaiiste autour de la protection j liste particuiariste, ie d ro it de vote est
religion ou parier une autre langue ; il de deux attributs de ia souveraineté natio accordé au niveau lo c a l (considéré
peut n avoir aucun passé commun avec nale : ia poiitique étrangère et la poiitique comme non p o iitiq u e ) mais refusé au
les autochtones m mème ia voionté de de défense. Le ré sid e n t étranger est niveau national. La reconnaissance du
vivre avec eux au sens oü la naturalisa- reconnu comme citoyen au niveau muni droit de vote iocai est ici particuiariste en
cipal -in fra -n a tio n a l- et défini comme ce sens q u ’eile conduit 4 reconnaitre Ia
sujet au niveau na tio n a l, celui oü se présence de groupes intermédiaires entre
3- Les droits poiitiques largo sensu teis nouent les relations internationaies. l’individu et l ’État sur le territoire national.
que les droits d ’association, d ’expression, L’accord du droit de vote au niveau Eile est nationaiiste dans la mesure oü
d’informauon. de publication, d’adhésion 4 local est, a notre sens, l’expression d’un eile définit de fa?on restrictive ie niveau
one organisation sociale, syndicale ou poli compromis entre discours universaiistes p o iitiq u e auquei l ’étranger a accès. Le
tique sont generalement reconnus. a n tin a tio n a iis te et n ationaiiste. Para- groupe des résidents étrangers est recon
doxaiement, ce compromis se présente nu comme tel -porteur de vaieurs poii
4- Après tout, il n est jam ais qu estio n
sous forme particuiariste. Opter pour ie tiques et ethnico-cuiturelles propres- mais
d accorder le droit de vote au niveau natio
citoyen par-dessus ie national, c’est opter ce groupe est, prédsément pour cette rai
nal et pas au niveau local.
pour l ’égalité des individus devant la loi, son, considéré comme étant composé de
5- Accorder ie droit de voter et d ’être élu dans ia cité, et accorder tous les droits citovens entièrement 4 part, de “seconde
iu x étrangers a toutes les elections. poiitiques tant au plan national que local. zone3. De fa^on significative, l ’un des
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Actualité
principaux arguments justifiant l ’exclusion tout k la fois la reconnaissance implicite te antinationaiiste, ie discours favorable
des étrangers du droii de vote parlemen du fait national rendant incompatible le au cum ul de nationaiités tend k mettre
taire repose, aux Pays-Bas, sur ie fait que statut de re sid e n t é tranger avec une l ’accent sur le d ro it des groupes eth-
l ’A ssem blée n a tio n a le est am enée k citoyenneté politique entière (immédiate) niques présents sur ie territoire national k
débattre des affaires étrangères et de la et une approche de l’égaiité devant la ioi la conservation et la protection de leur
politique de defense. Partant de 1k, les privilégiant (au moins dans un premier identité propre.
étrangers que la loya lité nationale lie temps) le groupe par rapport k l ’individu. Le discours dans lequel la Cité est
p rio rita ire m e n t k le u r pays d ’o rig in e Le discours favorable au cumul des natio- entièrem ent dissociée de la nation aux
-ennem i potentie!- ne devraient done pas naiités nous semble relever également niveaux local et national reiève de l ’anti-
pouvoir y exercer d ’influence. Dans ia d ’une c o n c e p tio n p a rtic u la ris te pour racisme universaliste et a pour référence
variante antinationaiiste particulariste, le laqueiie la naturalisation est un moven l ’égaiité individueile devant la loi, basée
droit de vote au niveau local est perpu d ’in té g ra tio n via 1’in se rtio n juridique. sur la résidence. Ce n est plus la nation,
différemmenL 11 représente une avancée Dans sa variante ethnidste, ii se fait tout a mais la cité qui y est ie lieu de réalisation
démocratique k visée émandpatrice. C’est la fois nationaliste par prindpe dans son de l ’in d iv id u . Pour l ’État fondé sur des
un progrès raisonnabie, uk la Condorcet”, affirmation de l ’existence d’un probième principes universalistes, i ’origine nationa
vers l’accord du droit de vote k toutes les de double loyalité nationale et pragma- le -q u ’elle soit autochtone ou allochtone-
elections. V oter au niveau local, c’est tique par sa minimisation : le loyalisme n ’a pas de pertinence sur le plan des
alors faire l ’apprentissage de la participa- envers la nation néeriandaise i ’emporte- droits poiitiques. II n ’exige pas plus ia
tion politique dans ie pays d ’accueii. II y ra it et l ’im p o rta n c e n u m é riq u e des naturalisation qu’il ne reconnait la plurali-
a dans ce discours progressiste sur l ’aboli- groupes concemés serait insignifiante sur té ethnique (cas du consociationaiisme)
tion, par étapes, des inégalités poiitiques, le plan politique national. Dans sa varian sur ie p lan p o litiq u e . L’État est neutre
Dick Pels nieuwe vrijheid (Le fascisme et la nou toute th é o rie des élites suppose un
Het democratisch verschil. Jacques de velle iibené, 1939), inspiré par ie syndi m in im u m n o rm a tif (en raison de la
Kadt en de nieuwe elite (La différence calisme de Georges Sorei et l ’élitisme “solidarité naturelle", dans ce domaine,
dém ocratique. Jacques de Kadt et la socialiste de H enri de Man, de Kadt des faits et des vaieurs). Pels se fait
nouvelle élite) tache de re le v e r le d é fi p o rté aux l ’avocat d ’une démocratie “agonistique”,
Amsterdam, Van Gennep, 1993, 272 p. vieiiles idéologies, libéralisme et socia oü les d iffé re n tia tio n s ho rizo n taies
lisme, par le fascisme, “perversion” d’un (entre différents champs) et verticales
omm ent fa ire une s é le c tio n des “bon noyau”, “le visage, décomposé et (entre masses et élites) seraient plus
C meiileurs, tout en instaurant des
c o n tre p o id s in s titu tio n n e is q u i les
paraivsé iusqu’a la haine, des désirs et
des besoms de notre temps”. De Kadt
complexes et subtiles, mais aussi plus
marquées qu eiles ne ie sont dans nos
empècheront de s enfermer dans ieurs rejoint par la ce que Zeev Sternheii. démocraties pariementaires actueiles.
positions, comme une caste de privilé dans N i d roite n i gauche, appeiie le Cette conception duaiiste de la différen
giés? Comment concilier Ia confiance “révisionisme révolutionnaire”, une tra ce dém ocratique et de sa nécessaire
politique qui rend possible ia iibre for dition hétérodoxe (incamée, en France, ambiguïté favoriserait. par la reconnais
mation des élites avec la méfiance orga- par Marcei Déat), anti-parlementaire. sance e x p iic ite de ia distance et de
nisée qui le u r imposera des limites? anti-bourgeoise, cu itiva n t l ’héroïsme l ’inégaiité inhérentes a toute représenta-
Telle est ia problématique qui domine inteliectuei, et dans laqueiie la révision tion politique, une démocratisation plus
ce livre, combinaison peu orthodoxe du marxisme aiimente une fascination fondamentaie, préaiable nécessaire d’un
d'histoire des idéés, d’élaboration théo- pour, ou même une identification avec, 'socialisme iibéral’ k venir.
rique et de piaidover normatif. Le socio- l’idéologie fasciste naissante. On peut espérer que la “maiédiction
logue Dick Pels y reiance ia discussion Sans complaisance pour ce “flirt avec natale d ’être Hollandais’ , comme disait
sur l ’héritage contesté de Jacques de le fascisme”, Dick Peis soutient néan- Jacques de Kadt - qui n ’a pas pris part
Kadt. théoricien p o litiq u e hollandais m oins que les tra its tro u b ia n ts de au d é b a t de ceux d o n t les idéés
qui, dans i ’entre-deux-guerres, défendit l’oeuvre de de Kadt - sa théorie “nietz- l ’avaient inspiré - ne s abattra pas dans
un socialism e élitiste et in te lie ctu e i, schéenne” des élites, paradoxalement une même mesure sur ceux qui pren-
dont le moteur serait ‘T im p é ria lism e ” ailiée a un individualisme intransigeant nent sa re iè ve en pensant “ avec et
des “ hommes de cu ltu re ” . Dans son - sont ceux-ia mêmes qui lui confèrent contre” lui, comme Dick Peis tente ici
oeuvre maitresse. Het fascism e en de son actualité théorique. Montrant que de le faire. Rokus Hofstede
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D ébat
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