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Imprimé sur papier sans acide, composé de tissus cellulaires blanchis sans chlore. TCF
Imprimé en Allemagne
ISBN: 978-3-7643-7713-7
987654321
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NATURES INTERMÉDIAIRES
L E S PAY S A G E S D E M I C H E L D E S V I G N E
BIRKHÄUSER
BASEL • BOSTON • BERLIN
SOMMAIRE
INTRODUCTION 11
Michel Desvigne
GRANDS PAYSAGES 15
Infrastructures Naturelles des Villes
BIESBOSCH STAD, ROTTERDAM, PAYS-BAS, 2005 21
PLAINE DU VAR, NICE, FRANCE, 2006-2007 27
LOWER LEA VALLEY, LONDRES, GRANDE-BRETAGNE, 2004 32
BURGOS, ESPAGNE, 2006-2011 33
PAYSAGES EN COULISSES 61
Une Articulation Paysagère de l’Étalement Urbain
ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN, FRANCE, 2005 67
CERGY-PONTOISE, FRANCE, 2006-2008 77
GARE TGV, AVIGNON, FRANCE, 1994-2002 86
PARC DE LA THÉOLS, ISSOUDUN, FRANCE, 1993-1994 87
CHAMPS URBAINS 89
Sens d’un Parc dans la Ville
SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK, USA, 2007 95
CITÉ NATURE, ARRAS, FRANCE, 2001-2005 106
EXTENSION DU PARC DE SCULPTURES DU MIDDELHEIM, ANVERS, BELGIQUE, 1998-2000 107
TRANSPOSITIONS 109
Un Système d’Emboîtements et d’Échos
DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS, USA, 2004-2009 115
RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN, BOULOGNE-BILLANCOURT, FRANCE, 2000-2007 125
RECONVERSION DU VIEUX PORT DE L’EILANDJE, ANVERS, BELGIQUE, 2001-2004 132
KATTENDIJKDOK, ANVERS, BELGIQUE, 2006-2008 132
AUBERVILLIERS CAMPUS, AUBERVILLIERS, FRANCE, 2006-2007 133
ALMERE, PAYS-BAS, 2000-2005 134
KALÉIDOSCOPE 181
Paysages en Gestation
Liste des Projets 195
Liste des Collaborateurs 198
Crédits Photographiques 199
AGRICULTURE, TEXTURE ET SENS DE L’INACHEVÉ
JAMES CORNER
7
aspects du travail s’inscrivent dans un savoir-faire technique : amélioration du sol,
techniques de plantation et de transplantation, gestion des terres et autres pratiques
(chacune souvent éminemment propre à son environnement local) sont autant de
procédés qui guident la stratégie créatrice.
Plutôt que de se préoccuper d’une composition formelle ou d’un style esthétique,
Desvigne réussit à insuffler à ses paysages une capacité de croissance, de
transformation et d’adaptation au temps, laissant ainsi la place à une plus grande
souplesse au lieu d’un régime excessivement déterministe. Son concept de substitution
est particulièrement pertinent à cet égard : Desvigne adapte ses espaces en substituant
un matériau à un autre tout en retenant sa disposition cartographique d’origine –
l’organisation et le tracé restent les mêmes mais la substitution matérielle ouvre le champ
à toute une série d’alternatives et de possibilités nouvelles. Ces champs de possibilités
relèvent moins du formalisme ou de l’esthétisme qu’ils agissent en procédant réellement
à une transformation comme dans une sorte d’agent viral ou de force vitale. Les pratiques
d’organisation du processus et les catalyseurs de transformation font appel à des
facultés d’orchestration, de chorégraphie, de gestion et de culture, pratiques pérennes
différant d’un mode de composition typiquement statique et formel.
Cet accent porté sur le processus permet à Desvigne de dépasser l’engouement
habituel de l’architecture paysagère pour le style comme mode de composition formelle
et contenu représentatif. Si Le Nôtre, par exemple, a concentré toute son attention sur
la création d’ensembles paysagers dans l’intention de produire des espaces, des
formes et des effets remarquables, tous porteurs d’un sens symbolique et métaphorique,
Desvigne croit à la dissolution de la lisibilité spatiale et référentielle, probablement pour
éviter l’élitisme de la « grande culture » que l’on associe au « design » et pour développer
une approche du terrain plus pragmatique, plus franche.
AGRICULTURE, TEXTURE ET SENS DE L’INACHEVÉ
Plus à l’aise avec des haies ou des fourrés qu’avec des allées d’arbres ou des
parterres de fleurs, les réalisations paysagères de Desvigne s’ingénient à immerger le
visiteur dans un foisonnement de textures. Arbres ondoyants, feuillages étincelants,
herbes flottantes, taches de lumière et d’ombres sont autant d’éléments contribuant
à une expérience tactile, donnant à sentir le rugueux et le doux, le proche et l’éloigné
– paysages sans limites ni frontières, sans définition ni forme claire. Comme chez Monet
ou Van Gogh ou, dans un autre registre, chez Andreas Gursky, la propension à produire
des textures de terrains complexes à partir d’une multiplicité d’éléments se détache
radicalement des notions classiques et modernes d’une dualité figure-fond ou d’une
composition spatiale hiérarchisée. En revanche les paysages de Desvigne, libérés des
contraintes rigides d’une géométrie parfaitement objectivée, donnent lieu à une matrice
plus souple, plus ouverte et plus perméable. Ici, effacement et création de vides
constituent des pratiques tout aussi valables que remplissage et addition, puisque
Desvigne défendrait que le vide peut susciter un sens accru de la lisibilité et des
possibilités – une « texture », si l’on veut, du dégagement du terrain.
Ce qu’il y a sans doute de plus frappant dans le travail de Desvigne à cet égard,
c’est sa fascination pour l’inachevé. Il ne semble pas du tout se soucier de l’apparence
crue, jeune, « en herbe » d’un projet paysager. Au départ, il y a un certain attrait
esthétique évident dans les paysages inachevés, suivi d’un sentiment d’anticipation
devant les choses à venir, plus particulièrement dans les jeunes paysages où la
sensation de croissance et de transformation se manifeste surtout sur des périodes
relativement courtes. Mais après tout, Desvigne ne semble pas croire qu’un paysage
– aussi façonné et achevé soit-il – puisse jamais être accompli. Comme l’artiste de land
art Robert Smithson, Desvigne considère l’architecture paysagère comme un travail
en progression continue qui n’atteint jamais un état idéal, quel que soit le moment,
9
mais qui dépasse toujours les attentes, une fois amorcé et considéré comme
palimpseste actif, accumulant avec le temps des propriétés, des qualités et des
potentiels nouveaux. Sa notion du paysage comme infrastructure active pourrait
conduire à de nouveaux critères d’évaluation pour les investissements dans les
interventions paysagères en milieu urbain, ces infrastructures vivantes étant
susceptibles de devenir les catalyseurs pour de nouvelles formes de réaménagement
et de nouveaux modes de vie, et même offrir de nouveaux supports pour la croissance
et l’évolution de formes d’urbanisme plus complexes.
Il est certain que l’œuvre même de Desvigne est encore en devenir. Elle se
présente plutôt sous forme de textes, d’images et d’idées que comme importante
œuvre réalisée. La plupart des revendications énoncées ici se concentrent sur les
enjeux majeurs et les aspects essentiels en vue des réalisations dans les années à
venir. On ne peut toutefois ignorer l’influence profonde des idées de Desvigne sur la
jeune génération de paysagistes dans le monde entier qui ont mis en avant les
problèmes de territoire, de géographie, d’agriculture, de culture, de gestion et de
développement futur. La difficulté à mettre en œuvre une telle démarche réside dans
la nécessité de convaincre la société qu’il existe des alternatives très réelles au bucolique
statique et au vaguement pittoresque, dans lesquelles le paysage agit plutôt comme
un instrument (récupération des eaux de pluie, amélioration de la qualité de l’air et de
l’eau, favorisation de la biodiversité des espèces, développement d’écosystèmes plus
complexes, mise à disposition d’espaces en vue de nouveaux usages et programmes
publics, introduction de formes durables de développement urbain et autres initiatives
– autant de critères de performance technique, modulés par une touche artistique qui
joue sur la lisibilité du site et les différents contenus culturels) et non comme peinture
d’un décor complaisant qui, même si elle relève d’une certaine beauté, sera
inévitablement passive dans son impact.
INTRODUCTION
MICHEL DESVIGNE
Parvenu à mi-parcours professionnel, comme l’a écrit à mon sujet une critique
d’architecture, j’ai le sentiment de n’avoir rien à montrer. Tout du moins rien qui
ressemble aux images séduisantes des livres d’architecture, rien qui évoque les
modèles photogéniques, rien non plus que l’on pourrait comparer aux paradisiaques
images de synthèses qui encombrent les publications. Mon travail fait appel à peu
d’objet et idéalement à aucun ; à des matériaux ordinaires. Il ne comporte pas
d’héroïque mise en œuvre, ne relève d’aucun luxe. Il est donc marqué par une certaine
pauvreté. Il n’y a pas là le désir volontaire d’une « architettura povera », mais le choix
d’une rusticité. C’est une rigueur qui s’impose à moi. Une jeunesse structurellement
ingrate. Je n’en ressens pas de frustration. Cela n’a pas toujours été le cas, et j’ai pu
parfois recourir à quelques ajouts susceptibles de donner le statut d’œuvre
d’architecture à mes tentatives : employer des tracés, des objets connus. Cela ne m’a
que très provisoirement rassuré. Les architectes exigeants avec lesquels je travaille
absorbent une partie conséquente de mes budgets, m’obligeant à cette pauvreté dont
je parle, ce dont je leur suis étrangement reconnaissant.
J’aime la « résistance » de nos matériaux aux « effets », comme si un jeune
paysage ne pouvait être « pittoresque », ne pouvait ressembler à aucune image modèle.
Les jeunes arbres n’évoquant rien et cependant recouvrant les sols de leurs feuilles
mortes transforment immédiatement le plus artificiel des matériaux en sous-bois
poussiéreux. La pauvreté oblige à innover, dans le sens d’une architecture qui soit au
minimum visible. Détourner les techniques et les usages agraires rend soudain un
espace lisible. Il n’y a là aucun minimalisme de principe. Plutôt une forme de patience
et de résistance : tenir bon, ne pas céder à la facilité. Ne pas encombrer inutilement,
ne pas donner prématurément une « finition » illusoire, par manque de confiance envers
les « paysages en gestation ». Ne pas déséquilibrer, polluer, désynchroniser ces
processus de maturation. Encore et surtout, ne pas tenter de montrer ce travail au
moyen d’images stéréotypées.
11
Arrivé à mi-parcours, je constate que j’ai observé et analysé des centaines
d’hectares, planté des dizaines de milliers d’arbres, déplacé des petites collines de
terre, contribué à l’implantation de kilomètres de routes, de voies ferrées, de canaux.
Je vois une boulimie de projets. Plus de 40 sites sont en transformation, dont certains
depuis déjà plus de 17 ans. Il faut les considérer avec rigueur et sérénité – patience.
Ce ne sont pas des objets, mais certains sont déjà des lieux, qui se développent, et
échappent dans une certaine mesure à leur concepteur. Ce sont des organismes
vivants. Les végétaux, les milieux bien sûr, mais les architectures et la succession de
leurs états aussi. Il y a dans ma contribution à cette fabrication un plaisir archaïque qui
diffère du plaisir de la construction et qui consiste à interférer, domestiquer, orienter
des mécanismes vivants. Un plaisir bien connu des jardiniers. Constituer avec cela des
territoires, participer en cela à l’organisation des villes peut paraître angélique.
Nous, les paysagistes, avons la conviction que la transformation du paysage
est un précédent, une étape, à l’édification de quartiers. Donner des qualités au site
n’est pas préfigurer le réseau des rues ni les îlots. J’aime cette notion de nature
intermédiaire, de paysage transformé dont les qualités archaïques d’orientation des
espaces, de pente, d’humidité sont les préalables avec lesquels urbanistes et
architectes transformeront la ville. J’aime le temps long des paysages et des villes.
J’aime surtout le jeu avec le temps : la mise en évidence de stades successifs, la mise
en valeur d’états jeunes, la coexistence de différents stades de développement qui
concentrent, miniaturisent en une période courte, des mécanismes aux rythmes
historiques. Plusieurs expériences consistent à inventer de vastes structures végétales
comptant plusieurs dizaines de milliers d’arbres.
Ces « organismes » ont des dimensions qui dépassent celles du dessin des
villes. Ce sont des architectures à l’échelle de sites, de géographies. Les agriculteurs,
les forestiers, manipulent des territoires autrement plus étendus, mais il ne s’agit pas
d’architecture. Ces natures intermédiaires sont des architectures, sommaires,
INTRODUCTION
provisoires, en gestation. Comment montrer cela ? Il est important pour moi de résister
aux clichés, de jouer avec la multitude, avec les successions. Il n’y a pas de « belle »
image, il ne doit pas y en avoir, sinon accidentellement. Chacune d’elles est prise dans
une succession et dans un espace plus vastes.
Nous nous intéressons à la chose publique. Bien plus que d’une déformation
ou d’une spécialisation, il s’agit presque d’une nécessité. Nous contribuons à
l’édification d’un territoire commun. Nous transformons des paysages produits par la
société. Nous sommes inspirés et nourris par les traces de ses activités. Surtout, nous
avons l’ambition d’aider cette société à envisager d’autres manières d’occuper et de
composer le territoire. Je prétends lui donner du sens, tout au moins de la lisibilité.
Rendre intelligible, déchiffrable l’environnement aurait-il un intérêt ?
Je suis fasciné par les personnages qui connaissent parfaitement leur territoire,
qui en maîtrisent avec un plaisir évident la réalité physique précise mais aussi l’histoire
et les mécanismes à l’œuvre. A l’opposé de ceux qui parcourent l’espace abstrait de
la technocratie, de la signalétique ou qui consomment des images. Nulle nostalgie
cependant car ce qui me fascine est surtout leur capacité à transformer.
Je pense alors aux architectes tessinois et à la manière dont ils ont su jouer
avec l’architecture vernaculaire et les pratiques agricoles, pour introduire il y a déjà
50 ans la modernité germanique avec une infinie précision. Voir, rendre lisible, est un
préalable nécessaire mais ne peut se substituer à une sorte de « nécessité intérieure ».
La mise en évidence des traces ne suffit pas. S’en contenter en effet équivaudrait à
faire de la restauration. Mais leur détournement, leur inversion, leur distorsion relève
de l’invention.
J’aime les peupleraies, les vergers, les forêts plantées artificiellement. J’aime
percevoir ces espaces dont l’ordre conventionnel s’oublie pour n’être que densités,
variation de densité. Ni plein ni vide, ces espaces quadrillés sont des sortes de tamis
où paradoxalement la vie s’installe, des pièges pour une nature intermédiaire.
13
GRANDS PAYSAGES
INFRASTRUCTURES NATURELLES DES VILLES
0 5000 10 000 m
Il est des sites qui par leur taille, leur situation, ou parce qu’ils ont perdu leur structure
historique, invitent à se référer à l’échelle géographique. Les formes de quartiers
imaginées ici sont déterminées par des paysages plus larges, eux-mêmes produits de
mécanismes de nature miniaturisés, et transposés. Il ne s’agit pas de recettes
systématiquement applicables au développement des villes, mais d’exemples
singuliers. Dans ces situations particulières, les éléments naturels : la rivière pour la
plaine du Var, un territoire d’inondation deltaïque pour Rotterdam, deviennent des
supports réels et puissants. Ce que ces cas malgré leurs différences peuvent avoir de
commun, c’est l’absence de connotation stéréotypée, et l’ampleur des structures
paysagères proposées. La référence aux systèmes de parcs américains, à ces vastes
continua constituant l’ossature des villes, vaut principalement par la grande dimension
de ces exemples. Au XIXe siècle, ils ont pu présenter des qualités d’écriture et une
pertinence contextuelles remarquables. Les parcs créés par Frederick Law Olmsted
ont, grâce à la finesse de son observation, réussi à fonctionner comme autant de
révélateurs de paysages. Cependant, des parcs conçus à la même époque par des
imitateurs sans talent conduisent à écarter une fascination de principe pour cette
typologie qui, aux États-Unis, a aussi produit des ensembles d’une accablante pauvreté.
Les exemples proposés ici sont liés à des situations spécifiques.
Dans le cas de la plaine du Var, comme dans celui de Rotterdam, les territoires
à transformer s’étendent sur des dizaines de kilomètres. Très souvent, les pratiques
adoptées, dans ce type de configuration, procèdent par accumulations, sans que l’on
se soucie d’une vision d’ensemble. Imaginer des structures physiques qui aient la
dimension des sites considérés relève d’un jeu inhabituel. Le rôle des infrastructures
doit être ici appréhendé avec acuité. Une sorte de prudence paradoxale conduit
aujourd’hui à morceler de gigantesques ouvrages dans l’idée de les ramener à une
17
présupposée « échelle humaine ». Cette attitude nous semble ignorer leurs qualités
spécifiques. La taille d’une autoroute, ou d’une voie ferrée, est réduite si on la compare
à celle d’une vallée. La forme de ces infrastructures présente d’autre part de nombreuses
similitudes avec celle des cours d’eau et des reliefs. Considérer les infrastructures comme
des rivières est cohérent en termes de dimensions et rend possible l’exercice de
transposition né de l’observation des processus naturels. Les formes produites sont
reconnaissables, familières, en ce qu’elles évoquent effectivement pour tous l’échelle
de la géographie et sa pratique physique.
Si la taille de la rivière est importante, celle de la parcelle doit aussi être prise en
compte. Il s’agit bien, dans les exemples exposés ici, de constituer un ensemble à la
dimension de la vallée. Cependant, la matière appréhendée joue forcément avec la
réalité foncière et ses dimensions liées aux traces historiques de la propriété. Ces
traces, longtemps oubliées, négligées ou massacrées, sont devenues, depuis quelques
décennies, l’objet d’une attention tout au moins théorique de la part des paysagistes.
Certains pensent qu’il suffit de s’inscrire dans ces traces, de les sublimer, pour
constituer un projet. Avec cette façon de voir et d’opérer on tombe dans une autre
forme d’académisme. Il me semble, en effet, qu’il faut porter une attention égale à la
nature géologique du site et aux éléments qui en rappellent l’histoire. Dans le cas de
la plaine du Var, le grand paysage imaginé, qui évoque les méandres du fleuve, peut
être constitué à partir d’une petite agriculture jouant avec les traces en place. Si la
hiérarchisation existe, les deux préoccupations cohabitent et ne sont pas opposables.
Quelle que soit l’échelle envisagée, il ne s’agit pas d’imiter des formes de nature.
La dimension, la matière et la texture des propositions imaginées doivent faire apparaître
l’artifice d’une manière explicite. La prise en compte de la taille de la rivière mais aussi
de celle du parcellaire, permet d’envisager à la fois une vaste ligne d’horizon et le grain
GRANDS PAYSAGES
donné à l’écriture. Dans le cas du projet de Rotterdam, l’objectif est encore une fois
d’atteindre à une dimension de nature : le jeu consistant à jouer avec l’empreinte de
l’eau relève pourtant d’un complet artifice. Les anciennes rivières deviennent des digues,
les digues sont transformées en quartiers d’habitation : l’ensemble dérive de formes
de nature non pas copiées ou reconduites, mais transposées.
En quoi la lecture du grand territoire concerne-t-elle la transformation des villes
contemporaines ? Quel est l’enjeu de cet exercice ? Nos paysages, aujourd’hui, sont
souvent le produit de règles technocratiques. Le remembrement agricole, l’agriculture
extensive, ont entraîné la disparition des éléments physiques (fossés, haies, drains)
qui donnaient au paysage sa lisibilité. Cette indétermination, cette absence de statut,
procurent un sentiment de malaise et d’absurdité. Il est difficile de s’accommoder du
mépris que révèle cette perte de définition de nos territoires, qui s’accompagne d’un
gaspillage généralisé. La compréhension d’un paysage, de sa logique, l’intuition que
l’on peut avoir des mécanismes à l’œuvre, relèvent d’une nécessité. Les propositions
présentées ici participent du désir de donner à des paysages contemporains un
ancrage géographique pour les villes qui s’y installeront.
Il s’agit toutefois, dans les deux cas, de situations exceptionnelles, terriblement
fragiles. Les exemples proposés ne relèvent pas d’un type de commande fréquente.
Mais ces deux études montrent que, dans le cadre d’une réflexion menée très en
amont, il est possible de dépasser le découpage administratif dont le paysage quasi
virtuel évoqué est le produit. Ces grandes cohérences physiques proposées pourraient
déterminer de nombreuses décisions techniques et administratives nécessaires à la
transformation du territoire.
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BIESBOSCH STAD, ROTTERDAM, PAYS-BAS, 2005
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2
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BIESBOSCH STAD, ROTTERDAM
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BIESBOSCH STAD, ROTTERDAM
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1
PLAINE DU VAR, NICE, FRANCE, 2006-2007
27
2 3
PLAINE DU VAR, NICE
3 Les phénomènes déterminants à l’œuvre dans cette vallée ont été les
mouvements du fleuve, les accumulations d’alluvions, les terrasses
alluviales, et la végétation qui les accompagne. Si cette géographie
liée au fleuve est importante, stimulante, le parcellaire, qui corres-
pond à la propriété foncière, est à une autre échelle une donnée
incontournable. Le projet part du principe que des remembrements
sont envisageables : l’agriculture peut muter, se lier davantage à la
ville, tout en préservant la fonction maraîchère. Les espaces de transi-
tion, agricoles, sont figurés ici en vert. Ils forment de grandes conti-
nuités installées dans les traces des anciens méandres.
Le projet prend en compte les formes existantes, naturelles et culti-
vées, laissées en déshérence ou déjà bâties, et intègre les mouve-
ments hydrauliques, la topographie liée aux écoulements des eaux.
29
4
PLAINE DU VAR, NICE
31
LOWER LEA VALLEY, LONDRES, GRANDE-BRETAGNE, 2004
Cette proposition d’aménagement du site des Jeux Olympiques de Londres avec Herzog & de Meuron consistait en l’invention
d’une unité géographique puissante pour ce vaste territoire des faubourgs de Londres, occupés autrefois par l’industrie. Dans
cette hypothèse, les quartiers se développent en archipels, composant ainsi une multitude de « situations de quai ».
BURGOS, ESPAGNE, 2006-2011
La commande consistait à remplacer le faisceau de voies ferrées désaffecté au centre de Burgos par des quartiers organisés
autour d’un boulevard. Herzog & de Meuron ont imaginé des noyaux d’intensité, séparés par des vides, l’ensemble se glissant
dans la ville existante. Le paysage a acquis d’autre part une qualité liée à sa dimension géographique. La structure forestière,
vaste ou miniaturisée, se superpose à divers espaces publics minéraux. 33
TERRITOIRES ET FORMES DU TEMPS
MUTATIONS URBAINES ET PAYSAGES EN CONTREPOINT
0 500 1000 m
La plupart des projets concernant le territoire, à l’heure actuelle, sont à l’évidence des
projets de transformation. Nos villes existent, nos territoires sont occupés. Il s’agit de
les densifier, d’en changer l’affectation, de les embellir. On connaît empiriquement la
durée de ces transformations, qu’elles concernent de grands paysages ou des
morceaux de villes. On sait par expérience qu’il faut une trentaine d’années pour créer
un quartier, et que ces mécanismes relativement longs sont soumis à des corrections
permanentes. La vision de départ doit aussi pouvoir s’adapter à l’évolution des
demandes et aux aléas économiques. D’où la nécessité d’imaginer des instruments,
des méthodes, qui permettent d’intégrer cette notion de durée dans la manière de
transformer les lieux.
Quand la seule représentation du réel en vient à se substituer au réel, on verse
dans le simulacre. Souvent fasciné par la beauté des cartes élaborées au fur et à
mesure, on s’en contente pour produire un projet que l’on croit satisfaisant. Il faut au
contraire garantir, maîtriser, la direction donnée aux propositions afin d’échapper à
une représentation, figée, et donc fausse, du réel, sans céder à un attrait immodéré et
dangereux pour cette accumulation de cartographie.
Il s’agit bien de la transformation de paysages qu’il faut considérer au cas par
cas. Ce qui autorise le jeu avec ces successions d’états est la matière même du projet,
fruit d’un travail pragmatique. Acquérir des terrains, changer la nature de leurs sols,
donner à ces sols une qualité, planter des arbres, contrôler leur développement,
transformer leur densité : il s’agit là d’un ensemble de pratiques physiques appliquées
à une réalité. À Bordeaux, l’entité de boisements imaginée conduit à un jeu avec la
contrainte de la propriété foncière, d’où le grain des plantations et leur densité
spécifiques. Le résultat physique obtenu, donnera l’intuition du temps nécessaire à
cette construction.
37
S’il est une charpente, le paysage donne aussi la possibilité d’une occupation
temporaire de certaines parties de villes en transformation, dans lesquelles subsistent
de nombreuses inconnues. Dans l’attente d’une construction, ces natures intermédiaires
donnent immédiatement de la qualité aux sites. Il s’agit bien sûr d’un artifice : ce paysage
provisoire et valorisant est susceptible d’être un jour détruit pour laisser la place à des
bâtiments. On voit en quoi cette idée diffère de la notion de préverdissement développée
dans les années 1970. Il ne peut être question de produire le négatif d’un plan de masse.
Il s’agit plutôt de donner immédiatement un statut à un territoire, de l’entretenir, et d’en
accepter la transformation. Ceci est de l’ordre de la gestion, de la maintenance, et du
respect, quand bien même tout ne relève que d’une qualité et d’un usage provisoires.
On est loin ici de la notion de flou, qui dans la ville atteste de ce mépris déjà
évoqué. On retrouve dans la fascination romantique pour la friche de centre-ville, l’idée
d’une reconquête de droit « divin » de la nature sur la mauvaise industrie humaine. Il y
a sans doute dans ces mécanismes de recolonisation des phénomènes observables
d’un grand intérêt, mais on se gardera de proposer une image policée du monde. Ces
terrains vagues reflètent aussi l’indétermination, et indiquent une forme de ratage de
l’installation de l’homme dans la ville.
Dans ce chapitre les tentatives et les expériences dont nous faisons état
représentent un investissement variable en temps. Le cas de Lyon représente huit
années d’engagement, qui rendent possible la maîtrise collective de notre territoire.
Ce qui suppose de le considérer comme un bien commun, ce que seul un système
démocratique est en mesure de garantir. Très souvent, l’administration désire se doter
de chartes réglementaires pour contrôler le développement de ses espaces publics à
long terme. Les propositions faites à Bordeaux, Aubervilliers ou Anvers consistent en
de petits projets, qui jouent parfois le rôle de prototypes. Ces études de cas rendent
TERRITOIRES ET FORMES DU TEMPS
possible une vision presque exhaustive des problèmes qui pourraient se poser sur un
territoire. Elles permettent d’imaginer un langage, des matériaux, des modalités qui,
éventuellement vérifiés par des prototypes, peuvent atteindre le niveau de prescriptions
réglementaires. La charte idéale ressemblerait ainsi à une méthode expérimentale, telle
qu’en utilisent les scientifiques. À partir d’une situation donnée, naît l’intuition d’une
transformation possible, transposée dans le réel. Les éléments confirmés deviennent
des prescriptions généralisables à grande échelle et dans le temps.
Concevoir une structure pertinente dans un site donné relève de cette idée
d’une permanence. Circuler facilement, être bien exposé, s’orienter, pouvoir s’abriter du
vent, tout cela répond à des besoins physiques qui ne sont pas voués à se transformer
rapidement. À l’intérieur de ces structures pérennes, différentes situations d’occupation
peuvent être imaginées et se succéder. On peut envisager de définir des éléments
constitutifs inaliénables et permanents, tout comme des éléments mouvants. Il est
impératif, pour que la ville dure, pour qu’elle se développe et qu’on y vive bien, qu’elle ait
une relation avec son sol, avec ses fleuves, avec ses reliefs, et ceci d’une manière perma-
nente. Cette qualité de pratique d’un territoire, avec ses invariants, est une nécessité.
Dans le cadre d’études à échelle géographique, comme celles portant sur la plaine
du Var ou Rotterdam, nous avons été amenés à comprimer, en quelques décennies,
des mécanismes qui ont perduré pendant plusieurs millénaires. Dans la situation des
mutations urbaines issues d’un autre contexte, les temps très longs de construction
de nos structures paysagères correspondent paradoxalement à des temps très courts
si on les compare à d’autres périodes historiques d’édification de la ville. Dans les
deux cas, la prise en compte du temps nous amène à le raccourcir, donnant ainsi
étrangement le sentiment d’un lieu ancré dans son histoire et dans son site.
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LYON CONFLUENCE, LYON, FRANCE, 2000-2005
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LYON CONFLUENCE, LYON
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LYON CONFLUENCE, LYON
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LYON CONFLUENCE, LYON
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BORDEAUX RIVE DROITE, BORDEAUX, FRANCE, 2000-2004
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BORDEAUX RIVE DROITE, BORDEAUX
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BORDEAUX RIVE DROITE, BORDEAUX
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BORDEAUX RIVE DROITE, BORDEAUX
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BORDEAUX RIVE DROITE, BORDEAUX
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MILLENNIUM PARK, GREENWICH, LONDRES, GRANDE-BRETAGNE, 1997-2000
Ce parc était destiné à accueillir les événements accompagnant la célébration du millénaire, près du bâtiment conçu par Richard
Rogers. Le site imaginé précède l’installation de futurs quartiers. Immédiatement utilisable, il sera géré comme un paysage fores-
tier créant des situations diverses et évolutives.
PARC MARIANNE, MONTPELLIER, FRANCE, 1998-2002
Le travail a été mené ici sur un espace prédéfini, réservé à l’extension de la ville. Les prés, les herbages, les bois utilisent les tech-
niques agricoles et forestières, sans romantisme ni sophistication. Ce paysage en gestation, dans son état intermédiaire, évoque
la campagne patiemment constituée.
59
PAYSAGES EN COULISSES
UNE ARTICULATION PAYSAGÈRE DE L’ÉTALEMENT URBAIN
0 5000 10 000 m
La catastrophe ordinaire des périphéries de villes s’incarne dans cette ligne terrible qui
sépare le milieu pavillonnaire des vastes terrains, produits par les remembrements
parcellaires de l’agriculture extensive contemporaine. Aujourd’hui, 65 % de l’habitat
construit en France correspond à des pavillons individuels, disséminés dans des
lotissements fonctionnant en zones closes, phénomène connu. Quant aux exploitations
agricoles, leur logique de mécanisation à grande échelle les a transformées en autant
de déserts humains. Ces deux univers – le lotissement, le vaste terrain cultivé –
coexistent dans une ignorance réciproque accablante. Des populations ayant fait le
choix de vivre « à la campagne » en sont de fait totalement coupées. Il est courant que
ces rurbains doivent, pour accéder à un bois voisin, prendre leur voiture. Les lotis-
sements sont souvent dépourvus de toute connexion directe avec leur environnement
naturel, et on connaît l’image désolante du grillage séparant le jardinet du champ vide.
Cette absence de lien, d’espace public, est inacceptable. Certains changements,
dans les pratiques agricoles, peuvent être étudiés, pour apporter d’autres types de
solutions. Mais il s’agit avant tout de créer un lieu de développement de la ville, de lui
constituer une ossature. Donner une qualité aux paysages des périphéries permet de
fabriquer cet espace public, d’inventer une charpente à des morceaux de ville existants.
Les composants géographiques, mais aussi ceux inspirés des pratiques agricoles,
peuvent être transposés, et réutilisés. Mais comment faire pour que ces superpositions
produisent une architecture lisible ? Cela suppose d’effectuer des tris et de procéder
à des hiérarchisations. Le paysage n’est jamais une page blanche d’où il s’agit de faire
surgir l’inattendu. Il est toujours fortement marqué par des pratiques ou des structures
naturelles existantes ou ayant existé : sans nécessairement « recoudre » le passé, il est
possible de composer avec ces différentes strates.
63
Il y a toutefois dans l’observation et la transposition des paysages existants un
caractère qu’on pourrait juger déductif. Le travail de composition qui fait se superposer
toutes ces strates permet d’organiser une architecture voulue, déterminée, et contrôlée
par le dessin. On ne revient pas à un paysage agricole préexistant, et on ne se contente
pas non plus d’étendre un paysage naturel ou urbain. Il s’agit d’un artifice, d’une
invention qui, pour partie, emprunte aux pratiques agricoles, sans se borner à les
restaurer. Ces prés, ces prairies, ces vergers et bosquets dérivés de l’observation
fabriquent déjà un espace urbain possible, qui évoque la campagne, mais qui, gagné
par la ville, prendra un autre sens. Pas plus qu’il n’y a importation d’un modèle de
square stéréotypé, il n’y a reproduction à l’identique de formes issues de l’agriculture :
la transposition, poussée à l’extrême, produit bien des lieux publics nouveaux pour la
ville en développement. Pourquoi vouloir à tout prix échapper aux stéréotypes que
proposent les centres-villes historiques ? Essentiellement parce que ce type de recours
semble indifférent à la ville et à la campagne. Importer dans un paysage dont on ignore
les structures, des éléments sortis de leur contexte d’origine revient à offrir un apparat
qui n’a plus vraiment de signification. Au lieu d’aider à qualifier la périphérie, à articuler
deux mondes en vis-à-vis, cette approche exacerbe le décalage. Une bordure de
trottoir vis-à-vis se perdant entre deux champs, un alignement d’arbres chétifs et parfois
de lampadaires flottants au milieu des cultures, ne sont pas une alternative. De la même
manière, la restauration pure et simple des structures agricoles ne permet pas de créer
à elle seule des espaces publics. On ne peut se satisfaire de cette démarche de
transposition que lorsqu’elle conduit à un certain niveau d’invention.
Il est important de dépasser ce stade de la recherche. À rebours d’une tactique
de la répétition, l’idée est d’inventer des espaces publics dont la forme et la puissance
puissent déterminer des types de quartiers plus riches, par les contraintes physiques
PAYSAGES EN COULISSES
mêmes qu’ils induiraient. Il s’agit de donner un sens à ces espaces qui soit suffisamment
suggestif pour que les situations à venir répondent naturellement à ces indications. La
structure concentrique et rayonnante du parcellaire agricole d’Issoudun n’est plus
lisible, sauf vue d’avion. L’hypothèse est de composer un tissu d’espaces publics en
reprenant les traces de ce parcellaire, pour fabriquer une forme de ville particulière, en
partie héritée de la structure agricole, mais qui la dépasse aussi largement.
Comment trouver un milieu physique commun entre les champs, l’agriculture,
et la ville future ? Les dispositifs proposés ont pour but de se substituer aux ceintures
vertes qui continuent à être souvent programmées par les agences d’urbanisme. L’idée
d’une enceinte n’implique pas de considérer la ville comme un organisme vivant, dont
on ne peut prévoir ni où ni quand il prendra fin. Dans ce paysage de périphérie, on ne
remplit pas mais, bien au contraire, on laisse des lieux ouverts. Il ne s’agit pas de
fabriquer un contenant qu’il suffirait de remplir. Pour éviter les violentes superpositions,
imposées par des logiques technocratiques et cyniquement économiques, on
suggérera différents télescopages possibles. Des urbanistes et des architectes, auront
ensuite de bonnes raisons de bousculer cette trame mais il est souhaitable que le
paysage lui-même induise ces bouleversements en suscitant le cas échéant des
réactions. Dans des lieux « sans enjeux », créer un contexte, avec de fortes contraintes
physiques, est une gageure stimulante.
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ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN, FRANCE, 2005
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ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN
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ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN
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ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN
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ISSOUDUN TERRITOIRE, ISSOUDUN
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CERGY-PONTOISE, FRANCE, 2006-2008
1 Cergy-Pontoise, ville nouvelle créée dans les années 1970, est, tout
comme ses homologues, considérée aujourd’hui avec un certain
dédain. Méprisées, presque taboues, les villes nouvelles correspon-
dent pourtant à un nombre d’habitants important en France surtout.
Leur capacité de développement est très grande. La population
actuelle de Cergy-Pontoise est de 185 000 habitants, et on peut facile-
ment imaginer que, dans un futur relativement proche, ce nombre
avoisinera les 350 000. La ville n’a été que pour partie construite, et
sa faible densité induit un manque de lisibilité, d’où la commande
portant sur un plan directeur de paysage.
Le périmètre de la ville, indiqué par la ligne rouge, est de 53 km ; il
est comparable à celui de la ville de Paris. Mais si l’on prend en
compte la ligne de vis-à-vis entre les constructions actuelles (en gris)
et le territoire agricole (en noir), on obtient un linéaire développé qua-
tre à cinq fois plus important.
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3
4
CERGY-PONTOISE
3 L’attitude que l’on adopte, face à cette ville qui s’est développée en
archipel, avec des noyaux d’intensité mais aussi des vides, liés à un
manque d’opportunités, s’oppose à celle de la plupart des urba-
nistes. On ne cherche pas à remplir ces lacunes pour gagner immé-
diatement en densité. En effet, le tissu généré par ces vides est inté-
ressant. La situation peut être rapprochée des systèmes de parcs
décrits ailleurs : cette ville possède ce que l’on pourrait appeler des
continuités potentielles de paysage sur lesquelles il est possible de
s’appuyer pour constituer une ossature. Il ne s’agit donc pas de com-
bler ce système lacunaire, de le banaliser, mais de donner de la qua-
lité à ses limites, d’intensifier les noyaux existants tout en conservant
au tissu ses vides.
Trois études de cas ont permis d’élaborer une approche générale.
La première concerne un vallon, la deuxième porte sur la traversée
de la ville par une autoroute, et la dernière concerne la rivière.
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CERGY-PONTOISE
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CERGY-PONTOISE
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CERGY-PONTOISE
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GARE TGV, AVIGNON, FRANCE, 1994-2002
Il s’agissait d’organiser le territoire autour de la gare TGV. Le parcellaire conserve la trace des anciennes haies brise-vent qui sui-
vaient les méandres du Rhône et de la Durance : réinterprétées, à une échelle différente, elles structurent, tout comme les allées
de platanes, le nouveau paysage autour de la gare.
PARC DE LA THÉOLS, ISSOUDUN, FRANCE, 1993-1994
À Issoudun, un ensemble de jardins familiaux délaissés ont servi de prototypes. Pour des raisons pragmatiques, le parcellaire
fertile et son système de pentes et de drainage ont été conservés. Il s’agit d’un travail de substitution, les cultures vivrières se
transformant pour constituer la matrice d’un espace public. Bien que tout ait changé de nature, les habitants se sont immédia-
tement approprié cette petite horticulture en ville.
87
CHAMPS URBAINS
SENS D’UN PARC DANS LA VILLE
0 500 1000 m
Réaliser un parc urbain nécessite un temps long, pour des raisons de croissance
évidentes. Des parcs dignes d’admiration, et qui évoquent une certaine nature – ceux
d’Olmsted notamment – n’étaient à leur début que des décors en fabrication. Les
images conservées révèlent des artifices désuets. Construire en ville amène à se heurter
des quartiers bâtis. Le problème posé est celui de la création d’un jeune parc qui ait
une présence immédiatement familière. Trois petits arbres maigrelets au milieu d’une
Il s’agit de créer en ville des lieux appropriables, beaux, joyeux, d’une manière
rapide. L’ambition est de les rendre utilisables, significatifs, avec peu de moyens et
dans des temps très courts. L’architecture imaginée, organisée à partir de densités
à ces espaces.
Ces parcs sont aussi des lieux d’expérimentations possibles. La ville peut
propres à se diffuser. Les jardins botaniques ont de même cette vocation. Implantés
dans les grandes villes, ils sont les laboratoires ouverts où des spécialistes mettent en
œuvre des techniques observables par tous. À l’origine, ils étaient organisés selon une
91
disposition systématique. À l’image de certaines structures agricoles, ces espaces
au point d’une micro-agriculture. Il ne s’agit pas d’une fascination pour le grand thème
un système de rédemption. Ces « champs urbains » sont les lieux privilégiés de diverses
sation des sols, recyclage, compostage etc. Il existe, du point de vue agricole, de nombreux
parce que les parcs urbains sont accessibles au plus grand nombre, ils sont des lieux
esthétique, puis scientifique. Les espaces urbains produits, constitués à partir de micro-
agricoles et forestières. Utiliser les références agricoles est devenu une pratique de
paysagiste courante. Pourtant, l’expérience fait défaut. Les techniciens du monde des
CHAMPS URBAINS
Alors que dans d’autres domaines, les recherches techniques nourrissent sans cesse
la création, cette dimension fait défaut concernant le paysage, dans ses développements
et applications. Les parcs urbains sont tout désignés pour renouer avec cette tradition
hédoniste et consumériste.
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK, USA, 2007
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK
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SUMMER PARK, GOVERNORS ISLAND, NEW YORK
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CITÉ NATURE, ARRAS, FRANCE, 2001-2005
La reconversion d’une usine en musée de l’agroalimentaire, à Arras, par Jean Nouvel s’est accompagnée de la création d’un
jardin. Un personnel scientifique y réinvente en permanence des expérimentations pédagogiques.
EXTENSION DU PARC DE SCULPTURES DU MIDDELHEIM, ANVERS, BELGIQUE, 1998-2000
Cette extension d’un vaste parc destiné à abriter une collection de sculptures a pris la forme d’un grand verger. Les densités
variées et les situations spatiales contrastées qu’il propose évoquent un paysage familier. Visiteurs et artistes investissent cet
espace en devenir.
107
TRANSPOSITIONS
UN SYSTÈME D’EMBOÎTEMENTS ET D’ÉCHOS
1
2
0 500 1000 m
Les villes contemporaines créent des situations nouvelles où il n’y a pas grand sens à
reconduire des modèles connus. La matière ample qui les compose, au-delà des
centres historiques, juxtapose des formes multiples, les volumes bâtis déterminant
des vides sans définition précise. On pourrait être tenté de donner à ces espaces une
structure référencée, donc rassurante. Souvent pourtant on se contente d’une écriture
contemporaine, qui « fait signe », sans prendre la peine de s’interroger sur la pertinence
de cet effet de mode.
Dans ces situations complexes, parfois surprenantes (différences de niveaux,
de formes, de vis-à-vis), ne pourrait-on pas jouer avec des qualités spatiales,
paysagères, pour inventer un espace public fondé sur les singularités de cet héritage
récent ? Comme dans tout exercice lié au paysage, il s’agit de repérer pour mieux la
mettre en évidence une beauté potentielle dans ce qui existe.
Le terme d’« embellissement », que l’on utilisait au XIXe siècle sans y mettre
d’intention péjorative – en parlant des places et autres lieux urbains – est depuis
longtemps déjà devenu synonyme d’un travestissement de complaisance. Bien des
architectes et des paysagistes transportent des stéréotypes qu’ils appliquent d’un
bout à l’autre de la planète comme autant de « produits » à valeur universelle. Les lieux
sont pourtant rarement entièrement interchangeables : un minimum de sens critique
permet de s’en rendre compte, d’éviter de les grimer et de les galvauder.
L’aménagement de l’espace public relève-t-il de l’art du décorateur ? Sa qualité
ne dépend-elle pas plutôt de l’architecture mais aussi du temps du paysage qui va de
pair avec des notions de pérennité, de puissance et de durabilité ? Idéalement, la
révélation d’un site renverrait à quelque chose de comparable à ces places de villes
en Ombrie, sobrement revêtues de briques (parfois aujourd’hui d’asphalte), et qui sont
mises en situation d’une manière extraordinaire dans leur environnement, grâce à la
111
façon dont elles sont orientées et dont on a ménagé des dénivelés et dessiné les tracés
d’écoulement des eaux.
Tout ceci ne procède pas d’un à priori minimaliste, mais d’un goût pour l’évidence.
L’idée est de restituer à l’espace public son caractère de sol commun, de socle sur lequel
s’est construite la ville. On peut imaginer que sur ces sites élémentaires, non maquillés,
on laisse suivant les modes se poser successivement divers types d’objets. Mais il est
difficile de se satisfaire réellement de cela. Il est souhaitable d’anticiper sur ces accumu-
lations aléatoires en créant d’emblée les conditions essentielles d’usage et d’aména-
gement des lieux.
Les espaces publics contemporains, à l’image de ces sites italiens médiévaux
et renaissants évoqués, prennent une qualité immédiate lorsqu’ils sont mis en relation
avec un contexte géographique plus vaste. La ville classique de Versailles s’est ainsi
constituée, au XVIIe siècle, en référence au jardin imaginé par Le Nôtre, qui lui-même
« intériorisait » l’ancien bois de chasse des rois de France. Certaines visions du XIXe siècle
(les créations d’Olmsted) sont de même profondément enracinées dans un plus vaste
paysage, désormais transformé. Nos espaces publics peuvent aussi jouer avec leurs
qualités physiques immédiates, en lien avec leur environnement.
Il s’agirait ainsi de retrouver une échelle, une logique qui, empruntée à un ample
territoire, permettrait de donner des racines à des espaces plus réduits. La place
d’Almere se lie au monde des parkings souterrains, avec leurs émergences, imaginés
par OMA – Rem Koolhaas, mais, confrontée au lac, elle adopte un profil concave
comme une plage rassurante, depuis laquelle la vue s’étend sur le lointain. Les bosquets
imaginés sur cette place sont par ailleurs une transposition miniaturisée de ceux qu’Alle
Hosper a créés sur l’autre rive. Ce paysage plus vaste, lui-même produit par un artifice,
est à son tour intériorisé, et la relation se tisse naturellement entre les deux espaces.
TRANSPOSITIONS
Cette place, très inspirée de la piazza Beaubourg, est le premier espace public
conçu aux Pays-Bas presque uniquement à partir d’une surface en stabilisé. Ce sable
compacté, tel le sol durci d’un polder, est débarrassé de tout motif décoratif.
L’idée qu’un site ne pourrait faire l’objet que d’un seul type d’aménagement
« légitime » n’a aucun sens. L’utilisation de pentes artificielles, qui à Almere trouve sa
justification dans le fait que la ville est construite sur un polder, relève d’une décision
que l’on peut prendre aussi, toutes choses égales par ailleurs, dans d’autres cas. On
peut ainsi bousculer la topographie sans céder aux stéréotypes mais tout en restant
dans la logique d’une situation nouvellement créée pour rendre plus de visibilité au site
lui-même.
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DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS, USA, 2004-2009
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DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS
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DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS
4 Tout ici étant mobile, au gré des opportunités financières et des désirs
culturels, une composition préétablie de l’espace public imaginé
n’aurait aucun sens. Il était possible non seulement de transposer
l’image physique du quartier, son mode de constitution, mais aussi
de prendre en compte les processus de décision à l’œuvre. Une
maquette-puzzle a été élaborée avec comme base le grand socle
minéral neutre, sur lequel venaient prendre place un certain nombre
de composants, avec la possibilité de débattre de la localisation, de
la proportion et de l’affectation de ces éléments. Ces composants
sont des jardins, jeux de textures végétales ou aquatiques. Ce sont
des surfaces rectangulaires à l’image du jeu de cartes de Charles
Eames. Ces sortes de tapis se superposent à différentes strates du
socle et répondent à des nécessités d’accès, d’organisation des
usages et de contrôle de la lumière.
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DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS
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DALLAS CENTER FOR THE PERFORMING ARTS, DALLAS
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1
2
RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN, BOULOGNE-BILLANCOURT, FRANCE, 2000-2007
2 L’Île Seguin est une île artificielle sur laquelle était installée l’usine
Renault. Elle est une fondation au sens littéral. L’implantation des
anciennes structures a donné lieu à la construction d’une puissante
terrasse de béton, creusée d’immenses fosses correspondant aux
anciennes presses de l’usine. De cette dernière, il ne reste rien à
l’heure actuelle, aucun vestige, si ce n’est ce soubassement, origi-
nellement posé sur une forêt de poteaux. Obsolète, l’ensemble
nécessite une reconstruction intégrale. On a essayé d’éviter deux
écueils : le romantisme de la reconquête de l’usine par la « bonne »
nature qui viendrait en effacer les traces, et à l’inverse la tentation
néo-archéologique qui consisterait à succomber à une forme de fas-
cination passive pour le passé industriel du site.
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RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN, BOULOGNE-BILLANCOURT
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RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN, BOULOGNE-BILLANCOURT
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RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN, BOULOGNE-BILLANCOURT
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RECONVERSION DU VIEUX PORT DE L’EILANDJE, ANVERS, BELGIQUE, 2001-2004
KATTENDIJKDOK, ANVERS, BELGIQUE, 2006-2008
La volonté était de conserver le caractère spécifique de ces grands quais. Seuls 15 % de la surface sont hypothéqués par l’ap-
port d’une présence végétale, mise en perspective par le biais d’un système de blocs ou de coulisses. L’ensemble conserve la
démesure originelle tout en créant un espace public singulier alternant places et jardins.
AUBERVILLIERS CAMPUS, AUBERVILLIERS, FRANCE, 2006-2007
Cet ancien port fluvial au nord de Paris a permis le développement d’un vocabulaire similaire. Il a été l’occasion d’expérimenter
cette construction singulière de l’espace public. Dès leur plantation, les arbres ont une présence, malgré l’étendue du site, et
déterminent des lieux immédiatement lisibles.
133
ALMERE, PAYS-BAS, 2000-2005
Cet espace public urbain est dans une situation de plage, liée à sa géographie et à sa position face au lac et aux horizons loin-
tains. La proposition, atypique, consiste à installer sur les pentes de cette place de petits jardins qui, paradoxalement, sont les
lieux où sont rassemblées toutes les fonctions.
135
LE VÉGÉTAL COMME MILIEU
MINIATURISER UN MILIEU VIVANT SANS LE RÉDUIRE
0 50 100 m
Certains sites urbains sont presque abstraits, car détachés de leur contexte. Dans des
situations de dalle, de cour, la quête d’un ancrage territorial est parfois vaine et absurde.
L’introduction d’un milieu « vivant », riche, cohérent, spectaculaire, est à même de
donner un sens à de tels isolats. Il s’agit d’un exercice particulier, localisé.
Ici, la forme du paysage s’estompe entièrement au profit de la richesse de sa
matière, de sa texture. Généraliser l’idée d’un recours à ce mode de composition
informel serait bien sûr une aberration. La réponse consistant à utiliser le végétal comme
milieu est une réaction face à un cadre introverti fort, dont il est ainsi possible de gommer
ou d’étendre les limites. Dans le cas du jardin du Ministère, mais aussi dans celui de
la rue de Meaux ou d’Utrecht, les projets imaginés se situent presque « hors du
monde ». Dans ces lieux aux contours extrêmement contenus, contraignants, installer
un milieu naturel répond à des raisons esthétiques et architecturales. Cette exploration
donne accès à une multitude de possibilités plastiques, riches et complexes. Le sens
de notre travail, son apport, porte sur la composition de textures, de transparences,
de lumières, de densités, perméabilités, et ne renvoie à aucune idéologie.
On peut d’ailleurs faire des comparaisons avec ce qui a pu se produire dans le
passé, avec l’introduction puis l’acclimatation par Jussieu, Linné, Buffon, de certains
végétaux. Ceux-ci se sont développés jusqu’à devenir une dominante dans notre
environnement. Les pratiques qui ont découlé de ces apports sont des pratiques de
collectionneur : tels des objets choisis dans un catalogue, on superpose sans état
d’âme cèdres, sapins bleus et magnolias. Mais on aborde rarement la question du
sens donné à ces milieux vivants. Aujourd’hui on peut imaginer l’installation de paysages
susceptibles d’anticiper sur les contraintes futures (les changements climatiques
notamment).
139
On ne peut se satisfaire de la facilité du collage gratuit, dans le domaine du
paysage comme dans celui de l’architecture. L’outil informatique permet de juxtaposer
n’importe quelle image avec une autre, sans qu’elles aient entre elles aucun rapport.
La cohérence des milieux vivants que nous imaginons, leur degré d’élaboration, nous
éloigne de cette gratuité. Le jeu que nous proposons avec le milieu vivant est avant
tout un jeu avec la matière, d’ailleurs réinterprétée, à partir de laquelle nous constituons
une architecture.
La réflexion de divers botanistes, et l’air du temps, ont entraîné d’autre part un
changement du regard porté par les paysagistes et la société sur le monde végétal.
Ce qui, depuis toujours, était considéré comme des mauvaises herbes sans qualité,
peut éventuellement accéder, aujourd’hui, à un statut d’œuvre, dans l’art des jardins.
Il s’agit là d’une grande évolution. On peut toutefois se poser différentes questions
quant à ces pratiques. Un paysage de friche par exemple, possède à grande échelle
des qualités visuelles, plastiques, qu’il est difficile de miniaturiser. L’importation « à
l’identique », tout comme l’hyper-concentration de ces plantes dans un petit espace,
est esthétiquement insupportable. Nous avons tous une connaissance empirique de
la vraie nature, et l’artifice littéral auquel nous sommes alors confrontés, en termes de
proportions, de densité, n’évoque pas le paysage de référence.
Patrick Blanc, avec la grande connaissance du milieu vivant qui est la sienne,
développe dans ses jardins verticaux des inventions magnifiques. Notre collaboration,
dans le cadre du jardin du Ministère de la Culture, s’est nourrie de son savoir de
botaniste. En tant que paysagistes, ce que nous pouvons apporter est un travail de
composition qui puisse faire disparaître divers artifices liés à la juxtaposition de zones,
de « tâches » végétales. En mimant ce qui peut exister dans la nature, en organisant
les strates, les densités, les textures, nous transposons certains volumes, certains
LE VÉGÉTAL COMME MILIEU
espaces qui, miniaturisés par nos moyens plastiques, permettent d’estomper les limites
entre les composants.
À rebours des jardins de Roberto Burle Marx, et même d’Isamu Noguchi, il s’agit
d’escamoter les artifices de composition par la miniaturisation de milieux vivants, en
l’état actuel de nos moyens et perceptions. Il s’agit d’un travail de composition atypique.
141
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MINISTÈRE DE LA CULTURE, PARIS, FRANCE, 2001-2004
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MINISTÈRE DE LA CULTURE, PARIS
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MINISTÈRE DE LA CULTURE, PARIS
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UTRECHT CENTRAAL MUSEUM, UTRECHT, PAYS-BAS, 1998-2000
Le budget très réduit induisait un traitement élémentaire pour ce jardin. La matière se résume à un jeu entre les graminées libres
et le gazon tondu. Cette dialectique minimale suffit à installer une architecture sur cette petite parcelle.
SQUARE DES BOULEAUX, RUE DE MEAUX, PARIS, FRANCE, 1989-1992
De nouveau, l’idée dans cette petite cour parisienne de 24 x 60 m au cœur d’un immeuble conçu par Renzo Piano, est d’instaurer
un jeu entre la matière vivante et l’artifice. 110 bouleaux sont plantés sur un couvre-sol continu. Le végétal est utilisé pour évoquer
un milieu forestier, avec sa matière, ses textures. L’objectif, dans ce projet d’une écologie sommaire, est avant tout esthétique.
149
UN PAYSAGE DIFFÉRÉ
0 50 100 m
GILLES A. TIBERGHIEN
1. Charles Baudelaire, « Le Peintre de la Vie Moderne » Œuvres Complètes, Paris,Gallimard, Pléiade, 1961, p. 1166.
153
Le dessin de paysage est une question importante. Je ne parle pas seulement
du débat qui existe entre les partisans des logiciels informatiques et les tenants du
tracé manuel. Je parle du type de dessin qui en résulte même s’il me semble que sans
mener un combat d’arrière garde et récuser d’utiles avancées technologiques il est
difficile de faire la totale économie de la main. Le dessin a une fonction à la fois
descriptive et analytique – c’est un instrument de visibilité qui permet de comprendre
comment le paysage est fait. Mais il a en même temps une fonction constructive
puisqu’en la dévoilant il crée la chose même qu’il dévoile. À charge au paysagiste de
prolonger son geste vers une zone d’anticipation qu’il n’appartient qu’à lui de
comprendre mais qui, si elle est vraiment rendue visible, finira par s’imposer à tous.
Les dessins de Desvigne sont très intéressants de ce point de vue. Ils ont la
sèche beauté des croquis scientifiques, et empruntent beaucoup à l’esthétique
conceptuelle et minimaliste. La géométrie domine, les lignes sont dures, le monde est
saisi dans un treillis de coordonnées qui suivent des axes plus profonds, des nervures
internes au paysage : méridiens horographiques, réseaux viaires, limites de pro-
priétaires, plissement de terrain etc. Ce genre de vues correspond à celles que l’on a
d’avion. Le point de vue sur la terre est celui du ciel mais vu de la terre en quelque sorte
et ce détour que Ptolémée jugeait déjà indispensable au géographe n’est nécessaire
au paysagiste que pour lui permettre de voir en transparence la surface du paysage.
Ce procédé de vitrification virtuelle du sol le guide vers l’essentiel. Il y a bien
longtemps que Desvigne a mis au point cette méthode qui consiste à redimensionner
les formes de nature en jouant avec les échelles. En y injectant des couleurs comme
on le fait pour certaines radiographies, il permet au moyen de ces « traceurs » de rendre
UN PAYSAGE DIFFÉRÉ
visibles des figures paysagères qui resteraient autrement confuses. Il en résulte souvent
des dessins saisissants d’une grande qualité graphique mais dont on sent en même
temps qu’ils ne répondent à aucun souci décoratif – ce dont Desvigne se garde comme
de la peste ! Plus que de dessin on pourrait parler de diagramme au sens où, comme
le dit D’Arcy Thompson, « il nous est possible de déterminer ou de déduire, à partir de
ce diagramme, les forces qui ont agi ou agissent encore sur cette forme. »2
C’est que la forme chez Desvigne ne prime jamais : elle est déduite des
opérations qu’il produit sur le paysage. La forme résulte des contraintes géo-
morphologiques, historiques et techniques auxquelles le paysagiste doit faire face mais
ces contraintes sont aussi un puissant stimulant pour l’élaboration de ce que j’appellerai
une techno – esthétique qui n’est pas sans évoquer le travail de Frederic Law Olmsted
qui, en son temps a su tirer parti du lourd cahier des charges accompagnant le projet
d’assainissement de la Charles River à Boston. De cette intervention est né l’un des
parcs paysagers les plus emblématiques de l’art d’Olmsted, un modèle pour l’Amérique
du nord et une référence constante pour Michel Desvigne qui, lors de son séjour d’un
an à Harvard, a étudié de près cet ecological system design.
Si je devais associer Desvigne à une figure mythologique c’est certainement
Ulysse que je choisirais. Rien de prométhéen dans son travail – à la différence de
certains qui interviennent dans la nature « en soulevant des montagnes ». Desvigne,
lui, œuvre par ruse. Comme le héros homérique il est doué de métis, cette faculté de
saisir les choses au bon endroit et au moment opportun. Son art consiste à mettre en
place des dispositifs pour piéger des mouvements naturels ou des mécanismes
humains. Grâce à un ou plusieurs éléments, si minimes soient-ils, ce paysagiste induit
2. D’Arcy Thompson, Forme et Croissance, trad. fr. Dominique Teyssié, Paris, Seuil, p. 38.
155
soudain un changement bien plus important dans un processus de transformation
aussi bien physique que social. Dans la nature on ne peut tout prévoir et plutôt que de
s’y résigner Michel Desvigne joue avec cet aléa, le prend pleinement en compte pour
en faire l’un des acteurs du projet.
Cette part de hasard toujours affirmée donne aux interventions de Desvigne un
caractère acrobatique, risqué, et toujours en suspens. C’est sans doute ce que James
Corner entend par inachevé lorsqu’il en parle. Disons qu’il s’agit d’un achèvement
toujours différé, comme le paysage lui-même et les villes qui sont en perpétuelle
mutation. Desvigne parle souvent de « transposition » de formes de nature, de modèles
d’organisation, de structures urbaines etc. Mais ces transpositions supposent des
temporalités très différentes et parfois ce qui a mis plusieurs dizaines, voire plusieurs
centaines d’années, est proposé comme modèle évolutif dans un raccourci
chronologique saisissant qui permet ainsi de contracter l’histoire dans la géographie.
Ce qui donne en même temps une sorte de respiration à l’espace qui trouve soudain
là un point de fuite insoupçonné. Ainsi dans le travail sur Issoudun il est question de
rendre à nouveau lisible la structure médiévale rayonnante de la ville. « La proposition
n’est pas de restaurer une réalité disparue, » écrit Desvigne. « Il s’agit de procéder par
substitution » à partir de traces devenues presque illisibles mais qui, ainsi transformées,
produisent un nouveau paysage urbain si bien que « tout demeure en place mais
change de nature ».
Pourquoi est-ce important de redonner une lisibilité au paysage ? Parce qu’il
est notre histoire, notre bien commun. Il nous fait mieux comprendre ce que nous
sommes en nous rappelant ce que nous avons été. Le paysage c’est la sédimentation
UN PAYSAGE DIFFÉRÉ
de gestes collectifs, le témoin d’usages souvent disparus, la mémoire d’un monde qui
a parfois perdu son sens pour ceux qui y vivent et n’y voient plus qu’une collection de
lieux, de places, de morceaux de nature et d’habitats mêlés. Car, comme le dit bien
John Brinckerhoff Jackson, le paysage « n’est pas un élément naturel de l’environ-
nement mais un espace synthétique, un système artificiel d’espaces superposés à la
surface de la terre, fonctionnant, évoluant, non pas selon les lois naturelles mais pour
servir une communauté. »3 Au paysagiste parfois la tâche de redonner sens à cette
communauté : une tâche très modeste mais aussi extrêmement ambitieuse dont
Desvigne a su faire un programme.
2
WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS, USA, 2002-2005
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WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS
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WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS
5 Tout est paysage, dans ce projet : la surface minérale dans ses rap-
ports avec la surface végétale, les boisements dans leurs relations
avec l’herbe, tout est régi par l’équilibre établi entre la grille et la topo-
graphie. Pourtant chaque couche possède une relative indépen-
dance qui génère la complexité et introduit la richesse au cœur de
l’expérience spatiale.
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WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS
7 Le matériau choisi pour la rampe est le béton ; coulé sur place c’est
un élément utilisé couramment pour les sols des villes américaines.
Mais ici, on fait référence aux rochers sur lesquels on marche dans
le nord du Minnesota, et qui, plus ou moins secs ou couverts de
mousse selon leur exposition, sont d’autre part plus ou moins éro-
dés en fonction de la pente. Afin de restituer artificiellement cette
dimension quasi-géologique, on a utilisé la technique déjà employée
par Herzog & de Meuron dans le bâtiment par endroits. Le béton est
littéralement gravé, par l’intermédiaire d’un jet d’eau à haute pres-
sion filtré par des pochoirs, produisant des perforations, qui pren-
nent la forme de topographie fictive.
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WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS
9 Depuis des angles de vue bien précis (telles les grandes ouvertures
vitrées) du bâtiment d’Herzog & de Meuron, on peut voir ce paysage
s’organiser en plans successifs dans une grande fluidité, les jeux de
transparence autorisés par les rideaux d’arbres permettant au regard
de deviner derrière une clairière la présence d’une autre trouée.
La cohérence de l’espace est ainsi tissée par les jeux de parcours, de
vides, de pleins, par la matière du boisement et celle du sol, l’ensem-
ble étant dessiné jusqu’au plus petit détail. Glissant d’une clairière à
l’autre, le visiteur emprunte un chemin qui se fait parfois émergence
de rochers.
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WALKER ART CENTER, MINNEAPOLIS
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KEIO UNIVERSITY, TOKYO, JAPON, 2004-2005
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KEIO UNIVERSITY, TOKYO
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PHOTOS AÉRIENNES
Il faut se garder d’une fascination facile pour les photographies aériennes. Les processus à l’œuvre : érosion, découpage
parcellaire, viabilisation, sont observables, à partir de ces documents, et dans diverses situations, d’une manière presque
caricaturale parce que trop évidente. Des formes peuvent également apparaître, vues du ciel, belles du fait même de leur
étrangeté, et là aussi il y a un écueil à éviter. Toutefois, ces exercices d’observation complètent ce que nous analysons
sur le terrain. Nous avons besoin de nous constituer une culture, d’entraîner notre œil à saisir des mécanismes. Ces
« travaux pratiques », ces « anatomies de paysages en projet », nous permettent de disséquer des situations complexes,
pour arriver à des solutions simples. En cela, ces photographies aériennes sont précieuses.
177
MAQUETTES
Chaque projet, chaque élément de projet, est développé sous la forme de maquettes d’études. Il semble nécessaire
d’alterner les modes de représentation : le dessin acquiert souvent une forme d’autonomie, une beauté indépendante de
son objet. Il y a là un danger de dérive et d’erreur : de ce piège formaliste naît le simulacre. Nous avons besoin de vérifier
les qualités d’espaces, les proportions, les jeux de textures, ce que le dessin seul ne permet pas. Enfin, la maquette est
une alternative forte à l’image de synthèse, qui ne fonctionne pas dans notre discipline. Nos compositions organisent des
jeux de densité, d’espaces complexes, soumis aux aléas de la lumière. Nous devons pouvoir nous projeter physiquement
et même nous déplacer parmi ces organismes riches que nos maquettes miniaturisent, là où les images de synthèse
apparaissent comme de pénibles fantômes.
179
KALÉIDOSCOPE
PAYSAGES EN GESTATION
À l’heure actuelle, l’agence compte plus de 40 chantiers en construction ou en cours
d’achèvement, dispersés dans une vingtaine de pays. Cette multitude suffit à distinguer
le travail du paysagiste de celui de l’architecte. Les chantiers qui nous occupent sont,
techniquement plus simples, et n’engagent pas non plus des sommes considérables.
Toutefois, cette multitude et cette dispersion de projets reflètent aussi d’autres besoins
et préoccupations. Les temps très longs de gestation de ces ouvrages, liés à des
transformations complexes, permettent, en multipliant les «stations», d’observer
simultanément divers stades de maturation et ainsi d’affiner le regard. La maîtrise
attentive de ces étapes successives nourrit les paysages en construction, les divers
organismes s’« informant » les uns les autres dans des situations différentes. Cet
« échantillonnage » d’une quarantaine de réalisations constitue un corpus suffisant
pour mesurer les avancées des expériences. La diffusion d’une signature n’est
absolument pas le sujet. L’extension des champs d’étude et d’expérimentation
débouche sur un plaisir serein, sans cesse vérifié : contrairement à toutes les peurs
contemporaines, la diversité des lieux et situations de paysages est infinie, de même
que la variété des besoins culturels auxquels elle répond. L’idée est bien de se comporter
en explorateur, non en exportateur.
Cette large population d’organismes, analysés à des stades de croissance
spécifiques, n’induit pas le report d’un savoir-faire éprouvé d’un cas à l’autre. À
contrario, les recettes toutes faites vacillent, et des formules initialement approuvées
peuvent être révisées et orientées différemment. La priorité, pour un paysage projeté,
n’est pas la constitution, prétendument immédiate, d’un objet fini. La lisibilité de la
matière en constitution est bien entendu une donnée importante. Mais installer d’emblée
des éléments de mobilier dans un jeune parc en gestation affuble celui-ci d’un
raffinement prématuré et pénible.
KALÉIDOSCOPE
183
PARC DU LEZ, AVENUE MENDÈS FRANCE, MUSÉE DU PRÉSIDENT
MONTPELLIER, FRANCE MONTPELLIER, FRANCE JACQUES CHIRAC,
SARRAN, FRANCE
JARDINS DE LA LIRONDE, PARKING RIVES DE L’AAR, PARKING RIVES DE L’AAR,
MONTPELLIER, FRANCE STRASBOURG, FRANCE STRASBOURG, FRANCE
185
MAISON DF, GERLING RING, SQUARE JAMES JOYCE,
COURTRAI, BELGIQUE COLOGNE, ALLEMAGNE PARIS, FRANCE
PARLEMENT EUROPÉEN, FLYING BROOK FARM, FLYING BROOK FARM,
STRASBOURG, FRANCE CONNECTICUT, USA CONNECTICUT, USA 187
VACHERON CONSTANTIN, DOCKS DE PARIS (CHANTIER), PARC FLORAL ENTRÉE SUD
GENÈVE, SUISSE PARIS, FRANCE (CHANTIER), BORDEAUX, FRANCE
ZAC MONTSOURIS, TRAMWAY MARÉCHAUX SUD, TRAMWAY MARÉCHAUX SUD,
PARIS, FRANCE PARIS, FRANCE PARIS, FRANCE
189
SQUARE VINET, MEUDON CAMPUS, MEUDON CAMPUS,
BORDEAUX, FRANCE MEUDON, FRANCE MEUDON, FRANCE
ZÉNITH LIMOGES (CHANTIER), PATIO AUBERVILLIERS CAMPUS, PATIO DU PALAIS DE JUSTICE,
LIMOGES, FRANCE AUBERVILLIERS, FRANCE GAND, BELGIQUE
191
PLACE DE LA GARE, PLACE DE LA GARE, RABOTPARK,
STRASBOURG, FRANCE STRASBOURG, FRANCE GAND, BELGIQUE
PARC DRAÏ EECHELEN (CHANTIER), PARC DRAÏ EECHELEN (CHANTIER), ABC DATA BANK (CHANTIER),
LUXEMBOURG LUXEMBOURG SHANGHAÏ, CHINE
193
LISTE DES PROJETS
195
EXTENSION DU PARC DE KATTENDIJKDOK, ANVERS, WALKER ART CENTER,
SCULPTURES DU MIDDELHEIM, BELGIQUE, 2006-2008 MINNEAPOLIS, USA, 2002-2005
ANVERS, BELGIQUE, 1998-2000 Définition des espaces publics MAÎTRE D’OUVRAGE
MAÎTRE D’OUVRAGE MAÎTRE D’OUVRAGE Walker Art Center
Ville d’Anvers, Musée d’Histoire de l’Art P2 PAYSAGISTES
PAYSAGISTES PAYSAGISTES Michel Desvigne, Anne Gaillard, Martin Basdevant,
Michel Desvigne, François Neveux, Iris Dupper Michel Desvigne, Gerwin Gruber, Karolina Samborska, Justine Miething, Ana Marti-Baron, Christina Anllo
ARCHITECTE Elinor Scarth Naveiras, Emanuela Bozin, Adrien Cosnefroy, Karine
Stéphane Beel ARCHITECTES Donati, Lucia Miglio, Catinca Popovici, Claudia Scholz
ELD Architectes, Diener & Diener ARCHITECTES
DALLAS CENTER Herzog & de Meuron
FOR THE PERFORMING ARTS, AUBERVILLIERS CAMPUS, Hammel, Green and Abrahamson, Inc., John Cook
DALLAS, USA, 2004-2009 AUBERVILLIERS, FRANCE,
Définition des espaces publics 2006-2007 KEIO UNIVERSITY, TOKYO,
MAÎTRE D’OUVRAGE Définition des espaces publics JAPON, 2004-2005
Dallas Center for the Performing Arts Foundation MAÎTRE D’OUVRAGE MAÎTRE D’OUVRAGE
PAYSAGISTES ICADE Keio University
Michel Desvigne, Martin Basdevant, Bas Smets, PAYSAGISTES PAYSAGISTES
Justine Miething, Emanuela Bozin, Enrico Ferraris, Michel Desvigne, Marco Rossi, Benjamin Pollet, Paola Vita Michel Desvigne, Justine Miething, Gerwin Gruber
Andrea Forapani, Gerwin Gruber, Elisa Levi-Minzi, ARCHITECTES
Giorgio Marafioti, Anna Medeossi, Catinca Popovici, ALMERE, PAYS-BAS, 2000-2005 Taisei Corporation, Kengo Kuma
Elinor Scarth Définition des espaces publics
ARCHITECTE MAÎTRE D’OUVRAGE PARC DU LEZ, MONTPELLIER,
Foster + Partners, REX / OMA Ville d’Almere FRANCE, 2002
JJR, LLC, Deb Mitchell PAYSAGISTES
CONSULTANTS Michel Desvigne, Iris Dupper, Bas Smets, Marco Rossi, MAÎTRE D’OUVRAGE
TILSTON, lumière - Luxigon, images Gerwin Gruber, Liviu Vasiu Ville de Montpellier
URBANISTE PAYSAGISTES
OMA Rem Koolhaas Michel Desvigne, Christine Dalnoky, François Neveux
RECONVERSION DE L’ÎLE SEGUIN,
BOULOGNE-BILLANCOURT,
FRANCE, 2000-2007 MINISTÈRE DE LA CULTURE, AVENUE MENDÈS FRANCE,
PARIS, FRANCE, 2001-2004 MONTPELLIER, FRANCE, 2002
Définition des espaces publics
MAÎTRE D’OUVRAGE MAÎTRE D’OUVRAGE MAÎTRE D’OUVRAGE
SAEM Val de Seine Aménagement Ministère de la Culture Ville de Montpellier
PAYSAGISTES PAYSAGISTES PAYSAGISTES
Michel Desvigne, Ana Marti-Baron, Alessandro Conti, Michel Desvigne, Sophie Mourthé, Albert Castejon, Michel Desvigne, Christine Dalnoky, François Neveux
Karine Donati, Alice Kieffer, Guillaume Proust Benjamin Deshouilleres
URBANISTE ARCHITECTE MUSÉE DU PRÉSIDENT
François Grether Francis Soler JACQUES CHIRAC, SARRAN,
CONSULTANT FRANCE, 2000
RECONVERSION DU VIEUX PORT Patrick Blanc, botaniste MAÎTRE D’OUVRAGE
DE L’EILANDJE, ANVERS, BELGIQUE, Musée du Président Jacques Chirac
2001-2004 UTRECHT CENTRAAL MUSEUM, PAYSAGISTES
Définition des espaces publics UTRECHT, PAYS-BAS, 1998-2000 Michel Desvigne, Christine Dalnoky, Iris Dupper
MAÎTRE D’OUVRAGE MAÎTRE D’OUVRAGE Architecte
Ville d’Anvers Centraal Museum Jean-Michel Wilmotte
PAYSAGISTES PAYSAGISTES
Michel Desvigne, Bas Smets, Martin Basdevant, Marco Michel Desvigne, Christine Dalnoky, François Neveux, JARDINS DE LA LIRONDE,
Rossi, Gerwin Gruber, Catinca Popovici, Julia Bouvy Iris Dupper MONTPELLIER, FRANCE, 2004
ARCHITECTES ET URBANISTES ARCHITECTE MAÎTRE D’OUVRAGE
Atelier JPLX, Sylvie Laenen et Dirk Jansen, architectes Stéphane Beel Ville de Montpellier
et urbanistes PAYSAGISTES
Rob Cuyvers, architecte SQUARE DES BOULEAUX, Michel Desvigne, Pauline Way
RUE DE MEAUX, PARIS, FRANCE,
1989-1992
MAÎTRE D’OUVRAGE
Régie Immobilière de la Ville de Paris, Mutuelles du Mans
PAYSAGISTES
Michel Desvigne, Christine Dalnoky
ARCHITECTE
Renzo Piano
LISTE DES PROJETS
Exceptées :
199