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Annales de pathologie (2008) 28, 166—168

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Des bagues à chaton bien trompeuses. . .


Misleading signet-ring cells. . .

Véronique Secq ∗, Bruno Chetaille, Myriam Marcy,


Geneviève Monges, Luc Xerri

Service d’anatomie et cytologie pathologiques, département de biopathologie, institut


Paoli-Calmettes, 232, boulevard Sainte-Marguerite, 13273 Marseille cedex 9, France

Accepté pour publication le 5 septembre 2007


Disponible sur Internet le 2 juillet 2008

Observation
Un homme de 72 ans consultait au cours de l’année 2006 devant l’apparition de ganglions
cervicaux et sus-claviculaires. Il n’avait pas d’antécédents connus. La tomodensitométrie
révélait de nombreux ganglions médiastinaux et abdominaux profonds sans hépatospléno-
mégalie associée. Les examens biologiques étaient normaux.
Une exérèse chirurgicale d’un ganglion sus-claviculaire était réalisée. Histologique-
ment, l’architecture ganglionnaire était totalement détruite. Près de 90 % du parenchyme
ganglionnaire était remplacé par un infiltrat diffus de cellules tumorales dont le cyto-
plasme contenait une vacuole optiquement vide, comprimant le noyau en un croissant
périphérique (Fig. 1A et B). Les colorations spéciales (PAS et bleu alcian) étaient néga-
tives sur ces vacuoles. Quelques rares follicules étaient observés en périphérie (Fig. 1C).
Ils étaient constitués d’une population cellulaire monomorphe de petites cellules clivées
associées à de plus rares centroblastes (Fig. 1D). L’étude immunohistochimique (Fig. 2)
ne montrait aucune positivité pour les antigènes épithéliaux, incluant cytokératines (KL1,
Dako), CK 7 (OV—TL12/30, Dako) et CK 20 (Ks20,8, Dako), ni pour la protéine S100 (polyclo-
nal, Beckman). Les cellules vacuolisées comme les cellules intrafolliculaires exprimaient
CD20 (L26, Dako), CD10 (56C6, Novocastra) et Bcl2 (124, Dako). L’immunomarquage par
le CD5 (4C7, Novocastra) se révélait négatif. Aucune positivité pour les chaînes légères
kappa (polyclonal, Dako) et lambda (polyclonal, Dako) n’était retrouvée, en particulier à
l’intérieur des vacuoles.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : veronique.secq@gmail.com (V. Secq).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.09.002
Lymphome folliculaire avec contingent de cellules en bague à chaton 167

Figure 1. Aspects histologiques de la prolifération. A (HES × 25) et B (HES × 100) : plages diffuses de cellules en bague à chaton ; C
(HES × 25) : un follicule au sein d’une zone diffuse de cellules en bague à chaton ; D (HES × 200) : population intrafolliculaire.
Histological aspects of the proliferation. A (HES × 25) and B (HES × 100): diffuse areas of signet-ring cells; C (HES × 25): one follicle
surrounded by signet-ring cells; D (HES × 200): intrafollicular population.

Figure 2. Immunomarquage de la population cellulaire en bague à chaton ( × 100). Positivité pour CD20, Bcl2, CD10. Le CD5 ne marque
que quelques lymphocytes T réactionnels.
Immunostaining within the signet-ring cells ( × 100). Positive staining for CD20, Bcl2, CD10. CD5 stains for a few reactive lymphocytes.

Quel est votre diagnostic ?


168 V. Secq et al.

Diagnostic : lymphome B folliculaire avec géant [2,4]. Les corps multivésiculaires sont des structures
cellulaires impliquées dans la voie endosomale, en parti-
contingent de cellules en bague à chaton
culier dans l’internalisation de protéines de surface dans
Le lymphome folliculaire est une prolifération des vésicules d’endocytose et leur dégradation ultérieure.
d’architecture nodulaire constituée de petites cellules Ils sont impliqués dans les phénomènes de recyclage mem-
centrocytiques associées à une proportion variable de branaire.
cellules centroblastiques. Les cellules tumorales expriment Ce sont les données de la microscopie électronique qui
CD20, CD10 et Bcl2. L’existence d’un contingent de cellules ont étayé cette hypothèse : les vacuoles sont limitées par
en bague à chaton représente une forme morphologique une membrane et sont remplies de petites vésicules, aspect
rare. À noter que dans notre cas, malgré la présence de très proche de celui des corps multivésiculaires [2,4]. Cette
plages diffuses, la chromatine des cellules en bague à ultrastructure est retrouvée à la fois dans les lymphomes B
chaton était toujours condensée, mature, ne permettant et les lymphomes T avec contingent de cellules en bague à
pas de conclure en une transformation en un lymphome chaton [2,4]. Le principal diagnostic différentiel devant des
agressif à grandes cellules. cellules en bague à chaton dans un ganglion sus-claviculaire
Les premiers cas de lymphomes avec contingent de cel- est bien sûr celui d’une métastase par un adénocarcinome,
lules en bague à chaton ont été rapportés en 1978 [1]. Il notamment gastrique. La négativité des marqueurs épithé-
s’agit le plus souvent de lymphomes B folliculaires [1,2], liaux l’élimine facilement. Une tumeur adipeuse est écartée
mais également de lymphomes B diffus à grandes cellules par l’absence de lipoblaste caractéristique et la négativité
[3] et de lymphomes T [4]. de la PS100. Des cellules en bague à chaton peuvent se
La littérature est quelque peu déconcertante concernant rencontrer dans d’autres carcinomes : d’origine mammaire,
le terme de « cellule en bague à chaton » et trois types de pulmonaire, cutané ou pancréatique, ainsi que dans certains
vacuoles peuvent être distingués : mélanomes.
• les vacuoles de mucosécrétion des adénocarcinomes, les La nature lymphomateuse d’une prolifération à cellules
plus fréquentes ; en bague à chaton est donc une éventualité rare mais qu’il
• les inclusions cytoplasmiques d’immunoglobulines, faut garder à l’esprit car pouvant représenter un piège diag-
encore appelées corps de Russel, essentiellement nostique particulièrement redoutable.
retrouvées dans les proliférations plasmocytaires et
lymphoplasmocytaires de type myélome ou maladie de
Waldenström ; Références
• les vacuoles optiquement vides, retrouvées de façon rare
dans certains lymphomes similaires au cas que nous rap- [1] Kim H, Dorfman RF, Rappaport H. Signet ring cell lymphoma. A
portons ici. rare morphologic and functional expression of nodular (follicu-
lar) lymphoma. Am J Surg Pathol 1978;2:119—32.
L’origine de ce dernier type de vacuole est débattue. [2] Harris M, Eyden B, Read G. Signet ring cell lymphoma: a rare
Plusieurs hypothèses ont été soulevées, en particu- variant of follicular lymphoma. J Clin Pathol 1981;34:884—91.
lier l’accumulation d’immunoglobulines [1]. Cependant, [3] McCluggage WG, Bharucha H, El-Agnaf M, Toner PG. B cell
l’absence de détection d’immunoglobulines en immunohis- signet-ring cell lymphoma of bone marrow. J Clin Pathol
tochimie [2], puis la description de cas de lymphomes T [4] 1995;48:275—8.
ont fait suggérer un autre mécanisme : la formation de la [4] Cross PA, Eyden BP, Harris M. Signet ring cell lymphoma of T cell
vacuole cytoplasmique à partir d’un corps multivésiculaire type. J Clin Pathol 1989;42:239—45.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 331-332

Des cellules monstrueuses Cas


pour diagnostic
dans un liquide de lavage alvéolaire
Monster cells in a bronchoalveolar lavage fluid

Suzanne Jozan (1), Jacqueline Aziza (1), Nassim Kamar (2), Laetitia Collin (1),
Monique Courtade-Saïdi (1)

(1) Service d’Anatomie Pathologique et d’Histologie-Cytologie,


(2) Service de Néphrologie-Hypertension Artérielle-Dialyse-Transplantation, CHU Toulouse Rangueil,
1 avenue J. Poulhès TSA 50032, 31059 Toulouse Cedex 9.

Jozan S, Aziza J, Kamar N, Collin L, Courtade-Saïdi M. Des cellules monstrueuses dans un liquide de lavage
alvéolaire Ann Pathol 2007 ; 27 : 331-332.

Observation

Un homme de 27 ans, transplanté


hépatique depuis 4 ans, était hospita-
lisé pour toux et fébricule. Le traitement
immunosuppresseur était constitué par
du Tacrolimus (8 mg/jour) et de la Pred-
nisone (30 mg/jour). Il avait présenté
un an auparavant un mélanome
cutané de la face antérieure du tho-
rax traité par chimiothérapie et radio-
thérapie. La radiographie pulmonaire FIG. 1. — Aspect cytologique du LBA en vue d’ensemble.
montrait une opacité du lobe supé- Noter les atypies cellulaires au sein de cellules géantes mul-
tinucléées (MGG × 400).
rieur droit. Un lavage bronchoalvéolaire FIG. 1. — General view of the BAL showing numerous
(LBA) était pratiqué. L’examen cytologi- multinucleated cells with nuclear atypia. (MGG×400).
que du LBA mettait en évidence une
alvéolite à 900 cellules/mm 3 et mon-
trait une population hétérogène mon-
trant d’assez nombreuses cellules
géantes multinucléées (figure 1) avec
des noyaux volumineux, nucléolés,
plus ou moins bien séparés les uns
des autres, et souvent des images de
dégénérescence ou des micro-
noyaux. Il existait également des cel-
lules de grande taille au noyau
périphérique avec de volumineux
nucléoles. Le cytoplasme était le plus FIG. 2. — Présence de cellules atypiques de grande taille
souvent basophile avec parfois un au noyau fortement nucléolé et au cytoplasme basophile. Accepté pour publication
aspect « en flamme » en regard de Noter l’aspect « en flamme » au niveau de l’appareil de le 20 mars 2007.
Golgi qui apparaît sous la forme d’une zone éosinophile
l’appareil de Golgi (figure 2). Les péri-nucléaire (flèches) (MGG × 1 000). Tirés à part :
bilans virologique et bactériologique FIG. 2. — Enlarged atypical cells with basophilic cytoplasm M. Courtade-Saïdi,
pratiqués étaient négatifs. Compte and prominent nucleoli. The Golgi apparatus appears as a voir adresse
tenu de l’absence d’amélioration cli- perinuclear eosinophilic zone (arrows) (MGG×1,000).
en début d’article.
nique, un scanner thoracique était e-mail :
pratiqué. Il mettait en évidence un Quel est votre diagnostic ? courtade.m@chu-
lâcher de ballons pulmonaires. toulouse.fr

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Suzanne Jozan et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 331-332

Diagnostic : métastases que connue. Dans notre cas, la dépression


pulmonaires d’un mélanome de l’immunité cellulaire induite par le traite-
ment a peut être représenté un facteur
favorisant le développement de cet aspect
L’examen immunocytochimique pratiqué tumoral.
sur le LBA a mis en évidence une positivité En dehors d’un contexte de mélanome,
des cellules atypiques pour la PS100 et le l’aspect cytologique aurait pu faire évoquer
HMB45, une négativité vis à vis du CD68, un carcinome à cellules géantes du poumon
confirmant ainsi le diagnostic de métastase ou une métastase de sarcome. Ces diagnos-
pulmonaire de mélanome. tics ont été éliminés par l’examen immuno-
L’aspect cytologique le plus marquant du cytochimique.
LBA était représenté par la présence de La survenue et l’évolution de la pathologie
nombreuses cellules géantes multinucléées tumorale chez ce patient a très certainement
bien différentes des cellules géantes d’origine été liée au traitement anti-rejet de la trans-
macrophagique. La présence cellules géantes plantation. Au niveau cutané, le risque de
macrophagiques dans le LBA n’est pas un fait survenue de carcinome est beaucoup plus
inhabituel puisqu’elle est retrouvée dans élevé que celui de mélanome, mais ce der-
environ 10 % des cas, ceci préférentiellement nier n’est pas à méconnaître [4]. Le patient,
au cours de pathologies interstitielles chroni- originaire d’Afrique du Nord, n’avait pour-
ques [1]. Il s’y associait également des cellules tant pas un phototype cutané particulière-
mononucléées atypiques, parfois monstrueu- ment à risque.
ses. Compte tenu de l’âge du patient, du Des aspects cytologiques inhabituels, comme
contexte de transplantation et des modifica- la survenue de cellules géantes manifestement
tions nucléaires observées, une origine virale non macrophagiques, doit orienter vers
devait être éliminée, d’autant que nous l’hypothèse néoplasique compte tenu du
n’avions obtenu que secondairement la risque accru de survenue de pathologies
notion d’antécédent de mélanome. Cepen- cancéreuses chez des patients transplantés
dant, les atypies ne correspondaient pas aux [5], ceci quel que soit leur âge. ■
critères cytologiques d’une infection herpé-
tique, à cytomégalovirus, à adénovirus ou à
Key words: melanoma, bronchoalveolar lavage.
virus respiratoire syncitial. D’ailleurs le bilan
virologique s’est révélé négatif. Le diagnos- Mots-clés : mélanome, lavage broncho-alvéolaire.
tic s’orientait donc préférentiellement vers
la métastase du mélanome connu, comme
cela a été confirmé par l’examen immunocy-
tochimique et l’aspect du scanner. Références
L’aspect cytologique était cependant inhabi-
tuel pour un mélanome d’autant qu’aucune
cellule atypique ne renfermait de pigment [1] Kern I, Kecelj P, Kosnik M, Mermolja M. Multinuclea-
mélanique. L’examen anatomopathologique ted giant cells in bronchoalveolar lavage. Acta Cytol
pratiqué sur l’évidemment ganglionnaire 2003 ; 47 : 426-30.
un an auparavant avait mis en évidence un [2] Boyd AS, Wu H, Shyr Y. Monster cells in malignant
mélanome achromique avec quelques mons- melanoma. Am J Dermatopathol 2005 ; 27 : 208-10.
truosités et cellules géantes. La présence
[3] Al-Brahim N, Salama S. Malignant melanoma with
de telles atypies au sein des mélanomes
osteoclast-like giant cells: an unusual host-response:
n’a que rarement été rapportée. Il faut dif-
immunohistochemical and ultrastructurral study of
férencier les monstruosités cellulaires avec
three cases and literature review. Am J Dermatopa-
ou sans multinucléation [2] des cellules géan-
thol 2005 ; 27 : 126-9.
tes d’aspect ostéoclastique, souvent positi-
ves avec l’anti-CD68, qui sont d’origine [4] Hollenbeak CS, Todd MM, Billingsley EM, Harper
monocytaire et apparaissent réactionnelles G, Dyer AM, Lengerich EJ. Increased incidence of
à la tumeur traduisant une réaction de l’hôte melanoma in renal transplantation recipients. Cancer
[3]. La genèse de telles atypies au sein de 2005 ; 104 : 1962-7.
tumeurs pourrait être expliquée par des [5] Baccarani U, Adani GL, Montanaro D, Risaliti A,
phénomènes d’endomitoses [2]. Ce pléo- Lorenzin D, Avellini C et al. De novo malignancies
morphisme cellulaire au sein des mélanomes, after kidney and liver transplantation: experience on
compte tenu de la rareté de son observation, 582 consecutive cases. Transplant Proc 2006 ; 38 :
n’a pas à ce jour de signification pronosti- 1135-7.

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Annales de pathologie (2008) 28, 62—64

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Deux nodules « solitaires » du visage !


Two ‘‘solitary” nodules of the face!

Leïla Njim ∗, Adnène Moussa,


Thouraya Achach, Néjib Ben Yahia,
Houda Mahmoudi, Abdelfettah Zakhama

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques,


hôpital Fattouma-Bourguiba,
avenue du 1er -Juin, 5000 Monastir, Tunisie

Accepté pour publication le 21 mars 2007


Disponible sur Internet le 16 mai 2008

Observation
Femme de 70 ans, consultait pour deux tuméfactions nodulaires, l’une frontale et l’autre
palpébrale gauche qui étaient indolores, de consistance ferme évoluant depuis deux mois.
La patiente avait été opérée deux ans auparavant d’un carcinome basocellulaire qui avait
la même localisation palpébrale. Le reste de l’examen somatique était normal. Le diagnos-
tic clinique était celui d’une probable récidive palpébrale avec une seconde localisation
frontale du carcinome basocellulaire.
La biopsie-exérèse a ramené deux fuseaux cutanés comportant chacun un nodule bien
limité, blanchâtre de 0,6 cm de grand axe.
Histologiquement, une des deux lésions correspondait à un nodule unique ; la seconde
lésion était constituée de micronodules à disposition plexiforme. Ces deux lésions pré-
sentaient des aspects microscopiques similaires. Chacun des nodules lésionnels était
entouré d’une capsule fine et formé sur un fond fibrillaire par des faisceaux de cel-
lules fusiformes à noyau allongé, ne présentant ni atypies ni mitoses. Ces faisceaux
étaient parallèles ou entrelacés et séparés les uns des autres par des petits espaces clairs
(Fig. 1).
L’étude immunohistochimique (Fig. 2) montrait que les cellules fusiformes exprimaient
fortement la protéine S100. Les cellules formant la capsule exprimaient l’EMA. Au sein de
cette prolifération de rares fibres étaient marquées par le neurofilament.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : njiml@yahoo.fr (L. Njim).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.03.004
Deux nodules « solitaires » du visage ! 63

Figure 2. A : immunomarquage des cellules fusiformes formant


la capsule avec L’EMA ; B : immunomarquage diffus et intense des
Figure 1. Cellules fusiformes, agencées en faisceaux entrecroi-
cellules avec la protéine S100.
sés séparés par des fentes claires (HE × 200).
A: the cells within the capsule stain positively for epithelial mem-
Spindle cells arranged in sweeping fascicles separated by clear
brane antigen; B: the spindle cells stain intensely for S100 protein.
clefts (HE × 200).

Quel est votre diagnostic ?


64 L. Njim et al.

Diagnostic : double localisation frontale et se distingue du NSC par la présence de zones d’Antony A et
B, de nodules de Verocay et d’une hyalinisation des parois
palpébrale d’un névrome solitaire
des vaisseaux et ne comporte pas d’axones. Le neurofibrome
circonscrit plexiforme est une tumeur le plus souvent sous-cutanée,
non encapsulée, formée par plusieurs nodules intéressant
Le névrome solitaire circonscrit (NSC) ou névrome palis- des troncs nerveux ou un plexus et formés par des cellules
sadique encapsulé a été initialement décrit par Reed et aux noyaux incurvés qui sont agencées en faisceaux dans un
al. en 1972 [1]. C’est une lésion peu fréquente, observée fond myxoïde. Le NSC est également différent du névrome
de façon égale dans les deux sexes, chez l’adulte d’âge d’amputation qui, outre son caractère douloureux, est
moyen [1—5]. Le NSC siège habituellement au niveau du formé par des filets nerveux et de cellules de Schwann dispo-
visage, plus particulièrement dans les régions péribuccale, sés plus ou moins parallèlement au sein d’un tissu fibreux et
périnasale et périorbitaire. D’autres localisations sont pos- par sa capsule qui est faite par des trousseaux fibreux épais.
sibles : tronc, membres, pénis, plus rarement muqueuse À l’inverse des autres tumeurs nerveuses bénignes, le
buccale ou nasale [1—5]. Son aspect clinique n’est pas NSC n’a jamais été décrit en association avec une neu-
spécifique, il se manifeste par une papule ou un nodule rofibromatose ou un syndrome de néoplasie endocrinienne
solitaire cutané ou sous-cutané de taille infracentimétrique multiple [3,4]. Le NSC ne récidive pas après exérèse même
dont le revêtement de surface est d’aspect normal ou incomplète [4]. Cet argument a laissé certains auteurs croire
peu modifié [2]. Le diagnostic clinique de kyste épider- à la nature réactionnelle plutôt que néoplasique de cette
mique ou sébacé, de nævus ou de carcinome basocellulaire lésion.
est souvent posé [1—3]. Macroscopiquement, la lésion se
présente comme un nodule bien limité, de consistance
ferme et de couleur blanc-grisâtre. Histologiquement, ce Références
nodule est intradermique partiellement encapsulé fait par
des longs faisceaux entrelacés et séparés par des espaces [1] Reed RJ, Fine RM, Meltzer HD. Palisaded, encapsulated neuro-
clairs très caractéristiques. Les cellules formant ces fais- mas of the skin. Arch Dermatol 1972;106(6):865—70.
ceaux sont monomorphes et ont un cytoplasme éosinophile [2] Dubovy SR, Clark BJ. Palisaded encapsulated neuroma (soli-
mal limité et un noyau régulier hyperchromatique [3]. La tary circumscribed neuroma of skin) of the eyelid: report
forme multinodulaire et la forme plexiforme, comme dans of two cases and review of the literature. Br J Ophthalmol
notre cas, constituent deux variantes histologiques rares. 2001;85(8):949—51.
Les études immunohistochimiques montrent que les cellules [3] Fletcher CD. Solitary circumscribed neuroma of the skin
qui forment les faisceaux ont une différenciation schwan- (so-called palisaded, encapsulated neuroma). A clinicopa-
thologic and immunohistochemical study. Am J Surg Pathol
nienne nette avec une forte expression de la PS100. Entre
1989;13(7):574—80.
les faisceaux on peut observer un nombre variable d’axones [4] Lombardi T, Samson J, Kuffer R. Solitary circumscribed neuroma
exprimant le neurofilament. La capsule est formée par une (palisaded encapsulated neuroma) of the oral. Ann Dermatol
fine couche incomplète de cellules fusiformes d’origine péri- Venereol 2002;129(2):229—32.
neurale comme le témoigne leur positivité à l’EMA [3]. [5] Golod O, Soriano T, Craft N. Palisaded encapsulated neuroma: a
Cette tumeur doit être différenciée histologiquement des classic presentation of a commonly misdiagnosed neural tumor.
autres tumeurs d’origine nerveuse [1—4]. Le schwannome J Drugs Dermatol 2005;4(1):92—4.
Annales de pathologie (2008) 28, 238—240

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Macrodactylie d’étiologie inhabituelle


An unusual etiology of macrodactyly

Naourez Gouiaa ∗, Imen Chtourou, Ines Fakhfakh,


Ibticem Bahri, Lobna Ayadi, Chiraz Chaari,
Saloua Makni, Tahia Sellami Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib Bourguiba,


route El Ain Km 0.5, 3029 Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 17 septembre 2007


Disponible sur Internet le 24 juillet 2008

Observation
Une patiente, âgée de 20 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, a consulté pour
tuméfaction progressive du médius gauche évoluant depuis le jeune âge et devenant de
plus en plus douloureuse. L’examen clinique a révélé un volumineux doigt sans caractère
pulsatile ni compressible ; la peau en regard était lisse ; l’examen neurologique a montré
un déficit moteur significatif avec une légère réduction locale de la sensibilité ; il n’y avait
ni adénopathie satellite ni signes en faveur du syndrome du canal carpien ; l’imagerie
par résonance magnétique a objectivé un élargissement fusiforme de la partie distale
du nerf médian avec hyposignal en T1 et T2 ; les os des phalanges étaient normaux. En
peropératoire, le nerf médian gauche était tuméfié ; une dissection interfasciculaire et une
biopsie ont été réalisées. Le fragment reçu mesurait 2 cm × 1,5 cm × 1,5 cm. Il était formé
de tissu nerveux et périnerveux, infiltré par des lobules d’adipocytes matures et des bandes
fibreuses disséquantes (Fig. 1), engainant les filets nerveux (Fig. 2) ; la densité cellulaire
était faible et il n’y avait ni atypie cytonucléaire, ni mitose ; l’évolution postopératoire a
été marquée par l’aggravation du déficit sensitivomoteur.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : naourezgouiaa@yahoo.fr (N. Gouiaa).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.06.009
Macrodactylie d’étiologie inhabituelle 239

Figure 1. Infiltration nerveuse par un tissu fibro-adipeux disso- Figure 2. Fibrose concentrique autour des filets nerveux
ciant les filets nerveux (HE × 200). (HE × 400).
Epineural infiltration of fibroadipose tissue separating nerve Concentric perineural fibrosis (HE × 400).
bundles (HE × 200).

Quel est votre diagnostic ?


240 N. Gouiaa et al.

Diagnostic : fibrolipomatose du nerf avec souvent une extension au tissu périnerveux [1,3] ;
les filets nerveux engainés peuvent présenter des images
médian gauche
d’enroulement en bulbe d’oignon caractéristique mimant le
La fibrolipomatose nerveuse est une lésion rare de nature périneuriome [1,4]. Des foyers d’ossification métaplasique
hamartomateuse et d’étiologie inconnue [1,2] ; elle apparaît ont été également rapportés [5]. La lipofibromatose ner-
habituellement à la naissance ou chez le petit enfant [1,3] ; veuse est une lésion bénigne mais sans traitement efficace :
il n’a pas été décrit de cas familiaux, ni d’association à des la résection du nerf endommagé cause souvent un déficit
syndromes particuliers. Le nerf médian et ses branches digi- neurologique significatif ; la dissection interfasciculaire et
tales sont les plus fréquemment touchés [1,2,4]. L’atteinte la résection du tissu fibro-adipeux sont également à éviter
du nerf cubital, du plexus brachial, des nerfs crâniens et du [3].
nerf sciatique ont été également rapportés dans la littéra-
ture [1,2,5]. Elle se manifeste cliniquement par un nodule
asymptomatique ou associé à un déficit sensitivomoteur [1] ; Références
la macrodactylie est inconstante [1,3] ; elle peut être symé-
trique ou asymétrique ; le syndrome du canal carpien est la [1] World Health Organization classification of tumours.Fletcher
complication majeure de cette lésion [2,3]. CDM, Unni KK, Mertens F, editors. Pathology and genetics of
L’aspect à l’imagerie par résonance magnétique, très tumours of soft tissue and bone. Lyon: IARC Press; 2002. p. 24—5.
[2] Marom EM, Helms CA. Fibrolipomatous hamartoma: pathogno-
pathognomonique, est caractérisé par un épaississement
monic on MR imaging. Skeletal Radiol 1999;28:260—4.
nerveux serpigineux avec hypersignal en T1 et T2 [2,3]. [3] Nagarajan G, Deshpande A, Supe A. Progressive macrodactyly
Le diagnostic de certitude est basé sur l’étude anatomo- due to nerve territory-oriented lipofibromatosis: a case report.
pathologique ; il peut être suspecté macroscopiquement Surgery 2002;131:468—9.
en remarquant un élargissement fusiforme et segmen- [4] Aymard B, Boman-Ferrand F, Vernhes L, Floquet A, Floquet J,
taire du nerf par un tissu blanc jaunâtre [4] ; du point Morel O, et al. Hamartome lipofibromateux des nerfs périphé-
de vue histopathologique, la fibrolipomatose nerveuse est riques. Étude anatomoclinique de cinq cas dont deux avec étude
caractérisée par une infiltration nerveuse par des adipo- ultrastructurale. Ann Pathol 1987;7:320—4.
cytes matures et par une fibrose peu cellulaire dissociant [5] Drut R. Ossififying fibrolipomatous hamartoma of the ulnar
et engainant de façon concentrique les filets nerveux nerve. Pediatr Pathol 1988;8:179—84.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 383-384

Masse de la cuisse d’évolution rapide Cas


pour diagnostic
chez un petit garçon
A young boy with a thigh mass of rapid growth

Naourez Gouiaa, Ines Samet Fakhfakh, Lobna Ayadi, Ibticem Bahri, Sameh Hammami,
Abdelmajid Khabir, Saloua Makni, Tahia Sellami Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib Bourguiba, 3029 Sfax (Tunisie).

Gouiaa N, Samet Fakhfakh I, Ayadi L, Bahri I, Hammami S, Khabir A. Masse de la cuisse d’évolution ra-
pide chez un petit garçon. Ann Pathol 2007 ; 27 : 383-384.

Observation elle était assez bien limitée, et bordée


par places d’une languette de tissu
fibro-adipeux ; l’exérèse chirurgicale a
Un nourrisson de sexe masculin, âgé de été complète. Le complément d’étude
2 ans, a consulté pour une tuméfaction immunohistochimique a montré une
de la cuisse droite découverte par sa positivité diffuse pour la vimentine, une
mère il y 6 mois ; elle a été initialement positivité limitée à la composante trabé-
de petite taille, puis elle a augmenté culaire pour l’actine muscle lisse et une
rapidement de volume durant les deux négativité pour la desmine.
mois précédents. À l’examen physique,
la tuméfaction intéressait la face antéro-
externe de la cuisse droite ; elle était
superficielle, mobile par rapport au plan
profond, légèrement douloureuse à la
palpation et faisant 5 cm de grand axe.
Une exérèse chirurgicale a été prati-
quée. La pièce opératoire mesurait
6 × 5 × 2 cm ; elle était vaguement lobu-
lée par des cloisons blanchâtres. À l’his-
tologie, elle était formée par trois
composantes intriquées (figure 1) : la
première composante était trabécu- FIG. 1. — Architecture organoïde composée de travées de
laire, faite de bandes fibreuses incluant tissu fibrocollagène avec îlots de cellules mésenchymateuses
des cellules fusiformes, à noyau allongé ; d’apparence immature et lobules d’adipocytes matures
la deuxième composante était minori- (HE × 400). Accepté pour publication
le 06 mars 2007
taire, caractérisée par des cellules à FIG. 1. — Organoid pattern composed of trabeculae fibro-
noyau étoilé et par une matrice collagenous tissue, with islands of immature appearing
mesenchymal cells and mature fat cells (HE×400). Tirés à part :
myxoïde ; la troisième composante était Naourez Gouiaa,
formée de lobules d’adipocytes matures ; voir adresse
il n’y avait ni atypie cytonucléaire ni en début d’article.
mitose anormale. La lésion occupait la Quel est votre diagnostic ? e-mail :
presque totalité de la pièce opératoire ; naourezgouiaa@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 383


Naourez Gouiaa et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 383-384

Diagnostic proposé : hamartome L’étude immunohistochimique n’est pas


fibreux infantile de la cuisse indispensable pour le diagnostic ; les cellules
fibroblastiques matures co-expriment la
vimentine et l’actine muscle lisse ; celles
d’apparence immature n’expriment que la
L’hamartome fibreux infantile (HFI) est une vimentine. Le diagnostic différentiel se pose
tumeur bénigne très rare [1] ; elle repré- avec d’autres proliférations fibreuses infan-
sente environ 0,02 % de toutes les tumeurs tiles telles que la myofibromatose infantile
bénignes des tissus mous [2] ; elle a été de siège habituellement plus profond sans
décrite pour la première fois par Reye en architecture organoïde [1, 6] et le fibrome
1956 comme tumeur fibromateuse sous-der- aponévrotique calcifiant qui survient exclu-
mique [3] ; neuf ans plus tard, Enzinger, en sivement au niveau des mains et pieds et
revoyant 30 cas similaires, avait proposé plu- touche l’enfant plus âgé [2, 6]. Deux types
tôt le terme d’hamartome fibreux de l’enfant d’anomalies génétiques ont été rapportés :
[4]. Elle apparaît habituellement durant les ce sont les translocations t (2 ; 3) (q31 ; q21)
deux premières années de la vie avec une et (6 ; 12 ; 8) (q25 ; q 24.3 ; q13) [5]. Le traite-
prédominance masculine [3] ; pour cette ment de choix est l’exérèse chirurgicale ; le
tranche d’âge, elle représente une des taux de récidive locale est très faible avec un
tumeurs relativement fréquentes des tissus excellent pronostic [3, 4]. ■
mous [5] ; la lésion est congénitale dans 15
à 20 % des cas [3, 6] ; il n’a pas été décrit de
cas familiaux ni d’association à des malfor- Key words: fibrous hamartoma, superficial soft tissue, child.
mations ni à d’autres hamartomes [6]. Sa Mots-clés : hamartome fibreux, tissu mou superficiel, enfant.
présentation clinique courante est celle
d’un nodule sous-cutané, unique, non dou-
loureux, de croissance initiale rapide et de
taille inférieure à 5 cm [2, 4] ; occasionnelle- Références
ment, le nodule peut être fixe, multiple ou
volumineux de plus de 15 cm [6]. Le princi-
pal site est la région axillaire suivie par le [1] Coffin CM, Dehner LP. Fibroblastic-myofibroblastic
membre supérieur, la région inguinale, tumors in children and adolescents: a clinicopathlogic
l’épaule, la cuisse, le dos et les organes géni- study of 108 examples in 103 patients. Pediatr Pathol
taux externes [2, 4, 6] ; la localisation au 1991 ; 11 : 569-88.
niveau des mains et pieds est exceptionnelle [2] Fletcher CDM, Unni KK, Mertens F. World Health
[2]. L’hamartome fibreux infantile est une Organization; Classification of tumours. Pathology
lésion volontiers superficielle, à développe- and Genetics of Tumours of Soft Tissue and Bone.
ment sous-cutané ou dermique profond [3, IARC Press: Lyon 2002.
5, 6] ; l’infiltration du plan musculo-aponé-
[3] Carretto E, Dall’Igna P, Alaggio R, Siracusa F, Gra-
vrotique sous-jacent est rare [2]. Son archi-
nata C, Ferrari A. Fibrous hamartoma of infancy: an
tecture organoïde est caractéristique et
italian multi-institutional experience. J Am Acad Der-
présente la clef du diagnostic [2, 3] ; en effet,
matol 2006 ; 54 : 800-3.
cette tumeur est formée par trois compo-
santes intimement intriquées : la première [4] Dickey GE, Sotelo-Avila C. Fibrous Hamartoma of
composante est mature, trabéculaire, faite Infancy: Current Review. Pediatr Dev Pathol 1999 ;
de bandes fibrohyalines incluant des cellules 2 : 236-43.
fusiformes à noyau allongé ; la deuxième [5] Rougemont AL, Fetni R, Murthy S, Fournet JC. A
composante est d’apparence immature carac- complex translocation (6 ; 12 ; 8)(q25 ; q24.3 ; q13) in
térisée par une matrice myxoïde et par des a fibrous hamartoma of infancy. Cancer Genet Cyto-
cellules mésenchymateuses à noyau rond genet 2006 ; 17 : 115-8.
ou étoilé, régulier ; la troisième composante [6] Franz M. Enzinger, Sharon W. Weiss. Soft tissue
est mature, faite de lobules d’adipocytes tumors, Second edition, Fibrous proliferations of
bien différenciés. infancy and childhood, 164.

384
Annales de pathologie (2008) 28, 242—244

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Placards érythémato-vésiculeux des plis inguinaux


Erythematous and vesicular patches of the groins

Nadia Kerkeni a, Rym Benmously Mlika a,∗, Sawsen


Deghaïs a, Samy Fenniche a, Achraf Debbiche b,
Mohamed Ben Ayed b, Insaf Mokhtar a

a
Service de dermatologie, hôpital Habib-Thameur, 8, rue Ali-Ben-Ayed, Montfleury,
1008 Tunis, Tunisie
b
Service d’anatomie et de cytologie pathologique, hôpital Habib-Thameur,
1008 Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 18 septembre 2007


Disponible sur Internet le 21 juillet 2008

Observation
Une femme, âgée de 81 ans, consultait pour des lésions prurigineuses des plis ingui-
naux, secondairement étendues au pli interfessier et à la région périnéale. Ces lésions
évoluaient par poussées depuis une cinquantaine d’années. Elles étaient exacerbées par
l’hypersudation et les microtraumatismes et s’accompagnaient quelques fois de douleurs
et/ou de mauvaises odeurs. L’interrogatoire révèle par ailleurs la notion d’atteinte cutanée
similaire chez ses deux fils, ses deux sœurs et ses trois neveux.
L’examen clinique mettait en évidence des placards érythémato-vésiculeux avec des
érosions linéaires en rhagades parallèles aux plis inguinaux (Fig. 1) et de la muqueuse
vulvaire. Les phanères étaient indemnes, l’examen somatique était par ailleurs normal.
Une vésicule était prélevée en vue d’un examen histologique. Un examen en immuno-
fluorescence directe était réalisé en peau périlésionnelle.
L’examen anatomopathologique mettait en évidence un épiderme acanthosique et
papillomateux, surmonté d’une hyperkératose parakératosique. Le corps muqueux de Mal-
pighi était le siège d’une acantholyse suprabasale, s’étendant par endroits sur toute la
hauteur de l’épiderme, réalisant de larges fentes. L’assise basale était respectée et il
n’existait pas de dyskératose. Au sein du derme, on notait un dense infiltrat inflamma-
toire polymorphe à prédominance lymphocytaire et à disposition péricapillaire (Fig. 2).
L’examen en immunofluorescence directe était négatif.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : rym.benmously@rns.tn (R. Benmously Mlika).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.06.010
Placards érythémato-vésiculeux des plis inguinaux 243

Figure 1. Placards érythémato-vésiculeux avec des rhagades Figure 2. Hyperplasie épidermique faite d’une hyperkératose,
parallèles aux plis inguinaux. d’une acanthose avec papillomatose ; acantholyse réalisant un
Erythematous and vesicular patches of the groins with fissures. aspect de « mur de briques délabré ».
Epidermal hyperplasia with hyperkeratosis, acanthosis and papil-
lomatosis; incomplete acantholysis with ‘‘dilapidated brick wall’’.

Quel est votre diagnostic ?


244 N. Kerkeni et al.

Diagnostic : maladie de Hailey-Hailey immunofluorescence directe est un complément indispen-


sable à l’histologie. Sa négativité permet d’éliminer un
La maladie de Hailey-Hailey est une génodermatose faisant pemphigus vulgaire. D’autres dermatoses des plis à type
partie des troubles héréditaires de la kératinisation épider- d’eczéma ou de psoriasis peuvent être cliniquement évo-
mique. Son incidence est très difficile à évaluer en raison de quées. Le caractère chronique, récurrent et parfois familial
sa rareté. Une étude multicentrique tunisienne a permis de doit conduire, au moindre doute, à la pratique d’une biopsie
recenser une série de 20 patients appartenant à huit familles cutanée qui redressera le diagnostic. Enfin, l’aspect histo-
non apparentées et a estimé la fréquence de cette affection logique peut poser le problème du diagnostic différentiel
à 1,9 pour 100 000 nouveaux consultants [1]. Sa transmission avec les autres dermatoses acantholytiques avec formation
est autosomique dominante avec pénétrance variable. Les de corps ronds, d’origine génétique telles que la maladie
deux sexes sont atteints, avec une prédominance masculine de Darier. La prédominance de la dyskératose permet de la
[2,3]. Elle est due à des mutations du gène ATP2C1 codant distinguer de la maladie de Hailey-Hailey.
pour une ATPase calcique située dans l’appareil de Golgi. Les moyens thérapeutiques disponibles demeurent symp-
La maladie de Hailey-Hailey se manifeste habituellement tomatiques, suspensifs et préventifs. Le traitement des
à l’adolescence ou à l’âge adulte entre la deuxième et la poussées repose sur les mesures d’hygiène, les soins locaux,
quatrième décennie [2]. Néanmoins, le diagnostic peut être les dermocorticoïdes de niveau modéré et le traitement
tardif [2,3] lorsque les signes cliniques initiaux sont discrets d’une éventuelle surinfection [2]. Les thérapeutiques phy-
ou trompeurs. siques (excision chirurgicale, dermabrasion chirurgicale ou
Cliniquement, le maître symptôme de cette dermatose par laser) sont consacrées aux formes étendues résistantes
est le prurit, qui précède parfois l’éruption cutanée. Comme au traitement médical.
chez notre patiente, l’atteinte cutanée est caractérisée
par des lésions vésiculobulleuses confluant en placards bien
limités. Ces lésions laissent place à des érosions humides Références
et suintantes particulièrement douloureuses [4], secon-
dairement recouvertes de croutelles méllicériques, et se [1] Deghaïs S. La maladie de Hailey-Hailey : étude multicentrique,
disposent de façon linéaire, en rhagades, dans les grands épidémiologique et génétique de 8 familles. Thèse de médecine
plis. Le signe de Nikolsky est souvent positif en peau 2006. Faculté de médecine de Tunis.
périlésionnelle. L’atteinte muqueuse est rare. Chez notre [2] Burge SM. Hailey-Hailey disease: the clinical features, response
patiente, elle a concerné la muqueuse génitale, localisa- to treatment and prognosis. Br J Dermatol 1992;126:275—82.
tion la plus fréquemment décrite dans la littérature [5,6]. [3] Galimberti RL, Kowalczuk AM, Bianchi O, Bonino MV, Garcia
La macération et la colonisation bactérienne peuvent être Garcia A. Chronic benign familial pemphigus. Int J Dermatol
1988;27:495—500.
responsables d’une émission de mauvaises odeurs.
[4] Harris A, Burge SM, Dykes PJ, Finlay AY. Handicap in
Sur le plan anatomopathologique, l’acantholyse supra-
Darier’s disease and Hailey-Hailey disease. Br J Dermatol
basale en « mur de briques délabré » est l’anomalie la 1996;135:959—63.
plus caractéristique. Les fentes ainsi formées sont larges, [5] Cooper PH. Acantholytic dermatosis localized to the vulvocrural
mal limitées latéralement et respectent les annexes. Elles area. J Cutan Pathol 1989;16:49—81.
sont bordées de kératinocytes polygonaux, parfois dyské- [6] Krishnan RS, Ledbetter LS, Reed JA, Hsu S. Acantholytic derma-
ratosiques, sans formation de corps ronds. L’examen en tosis of the vulvocrural area. Cutis 2001;67:217—9.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 253-4

Plaques infiltrées des jambes Cas


pour diagnostic

Infiltrated patches of the legs

Rym Benmously Mlika (1), Samy Fenniche (1), Asma Dhaoui (1), Golsom Ben Amor (2),
Fatma Denguezli(1), Achraf Debbiche(3), Mohamed Ben Ayed(3), Lilia Rokbani(2), Inçaf Mokhtar(1)

(1) Service de Dermatologie, Hôpital Habib Thameur de Tunis.


(2) Service de Médecine interne, Hôpital Habib Thameur de Tunis.
(3) Service d’Anatomie pathologique, Hôpital Habib Thameur de Tunis.

Benmously Mlika R, Fenniche S, Dhaoui A, Ben Amor G, Denguezli F, Debbiche A et al. Plaques infil-
trées des jambes. Ann Pathol 2007 ; 27 : 253-4

Observation

Un patient âgé de 36 ans, présentant


depuis deux ans une maladie de Basedow
traitée par antithyroïdiens de synthèse,
a consulté devant l’apparition depuis une
année de plaques indurées symétriques
des jambes.
L’examen cutané notait la présence de
deux grandes plaques bien limitées,
infiltrées, à surface bosselée, en peau
d’orange et de consistance ferme. Ces
lésions faisaient 10 × 3 cm de dimensions
et siégeaient à la face antérieure des
jambes (figure 1). L’examen des muqueu-
ses et des phanères était sans anomalie. FIG. 1. — Plaque infiltrée de la face antérieure de la jambe.
Le reste de l’examen clinique notait la FIG. 1. — Infiltrated patch of the anterior region of the leg.
présence d’une exophtalmie bilatérale.
L’examen histologique au niveau de
la lésion de la jambe droite montrait
l’aspect illustré sur la figure 2.

Accepté pour publication


le 14 août 2006
FIG. 2. — Dépôt dermique de mucine coloré en bleu par le
bleu Alcian (Bleu Alcian × 20). Tirés à part :
R. Benmously Mlika,
FIG. 2. — Deposition of mucin in the dermis that stains
with Alcian blue (Alcian blue ×20). 55 Rue Mohamed Rached
Béji, Résidence Meriem,
Appartement B8,
Quel est votre diagnostic ? Cité Ennasr II — 2037 —
Ariana, Tunis, Tunisie.

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 253


Rym Benmously Mlika et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 253-4

Diagnostic : éosine (HE). Ce matériel granuleux est coloré


Myxoedème prétibial en bleu, par le bleu Alcian, du fait d’une
accumulation de mucopolysacharides. L’aspect
de plaque infiltrée des jambes peut faire
La biopsie cutanée a montré des dépôts de porter le diagnostic d’une dermatose de sur-
mucine importants dans le derme profond charge notamment une amylose nodulaire.
séparant les faisceaux de collagène au sein Cependant, l’absence de prurit, de manifes-
d’un derme épaissi. Ces dépôts étaient mis tations systémiques associées ainsi que la
en évidence par le bleu Alcian. Le diagnostic mise en évidence de dépôts de mucine à
ainsi retenu était celui de myxoedème pré- l’examen anatomo-pathologique permettent
tibial (MP) ou dermopathie basedowienne. d’écarter cette affection.
Cette manifestation cutanée caractéristique La pathogénie actuellement discutée est
des états d’hyperthyroïdie est plutôt associée commune au myxoedème prétibial et à
à la maladie de Basedow [1]. En effet, le MP l’orbitopathie basedowienne. Celle-ci est
est observé chez 1 à 4 % des patients ayant argumentée par la présence d’une expression
une maladie de Basedow, en particulier ceux fibroblastique du récepteur de la TSH [4].
présentant comme dans notre observation Le traitement du myxoedème est décevant.
une exophtalmie. La présence supplémentaire Les glucocorticoïdes systémiques, par voie
d’une acropathie thyroïdienne qui consiste intralésionnelle ou sous occlusion, la pentoxy-
en une déformation hippocratique des doigts filline ainsi que les doses élevées d’immuno-
accompagne les formes exubérantes de globulines intraveineuses sont parfois efficaces
myxoedème prétibial et constitue la triade [5]. ■
de Diamond. Le MP peut également se voir
chez des patients ayant une maladie de
Key words: mucinosis, Graves disease, hyperthyroidism.
Basedow non thyrotoxique ou s’associer à
des thyroïdites auto-immunes. Mots-clés : mucinose, maladie de Basedow, hyperthyroïdie.
Le MP survient généralement plusieurs mois
ou années après la découverte de l’hyper-
thyroïdie [2]. Les lésions de MP sont en
général symétriques. Elles se développent Références
insidieusement aux tiers moyens et inférieurs
des jambes et réalisent l’aspect de plaque
bien limitée, circonscrite avec une surface [1] Fatourechi V, Pajouhi M, Fransway AF. Dermopathy
en peau d’orange à la face antérieure du tibia. of Graves’ disease (pretibial myxedema). Review of
Cependant, des formes touchant le dos, les 150 cases. Medicine 1994 ; 73 : 1-7.
épaules, la face, le cou, les oreilles, les avant- [2] Georgala S, Katoulis AC, Georgala C, Katoulis EC,
bras ou les mains sont également rapportées. Hatziolou E, Stavrianeas NG. Pretibial myxedema as
De même, le MP peut siéger au niveau de the initial manifestation of Graves’ disease. J Eur Acad
lésions cicatricielles. En effet, l’infiltration Dermatol Venereol 2002 ; 16 : 380-3.
d’anciennes cicatrices ainsi que la survenue
[3] Tong DW, Ho KK. Pretibial myxedema presenting as
de lésions de myxoedème sur les sites de
a scar infiltrate localized to scar tissue. Australas J
prises de greffes ont été décrites [3]. Plusieurs
Dermatol 1998 ; 39 : 255-7.
formes cliniques sont rapportées au cours
du MP. [4] Stadlmayr W, Spitzweg C, Bichlmair AM, Heufel-
À côté des aspects en plaques, les formes der AE. TSH receptor transcripts and TSH receptor-
nodulaires, diffuses, inflammatoires ou élé- like immunoreactivity in orbital and pretibial fibro-
phantiasiques sont plus rares. Dans tous les blasts of patients with Graves’ ophtalmopathy and
cas, l’aspect histologique est caractéristique pretibial myxedema. Thyroid 1997 ; 7 : 3-12.
montrant des remaniements myxoedéma- [5] Antonelli A, Navarranne A, Palla R, Alberti B, Sara-
teux du derme réticulaire avec des dépôts cino A, Mestre C et al. Pretibial myxedema and high-
abondants interstitiels de mucine, légèrement dose intravenous immunoglobulin treatment. Thyroid
basophiles à la coloration d’hématoxyline et 1994 ; 4 : 399-408.

254
Ann Pathol 2007 ; 27 : 251-2

Un diagnostic brillant Cas


pour diagnostic

A dazzling image

Anne-Flore Albertini, Jean-François Fléjou, Dominique Wendum

Service d’Anatomie et Cytologie Pathologiques, AP-HP, Hôpital Saint-Antoine, 184 rue du Faubourg Saint-
Antoine, 75571 Paris cedex 12.

Albertini AF, Fléjou JF, Wendum D. Un diagnostic brillant. Ann Pathol 2007 ; 27 : 251-2.

Observation

Il s’agissait d’un patient âgé de 52 ans,


qui avait été hémodialysé depuis l’enfance
jusqu’à l’âge de 30 ans, en raison d’une
malformation rénale congénitale. Le
patient avait été infecté par le virus de
l’hépatite C (VHC) par transfusion san-
guine au cours de la transplantation
rénale. Une ponction biopsique hépa-
tique était réalisée pour évaluation
histologique de l’activité de l’hépatite FIG. 1. — Granulome avec des cellules géantes contenant
chronique C et de la fibrose. Le bilan un matériel translucide (Hématéine-éosine, × 400).
biologique hépatique (transaminases, FIG. 1. — Multinucleated giant cell containig nonstaining
phosphatases alcalines, bilirubinémie), material (Hematein-eosin, ×400).
la numération formule sanguine et le
taux de prothrombine étaient normaux. dans quelques espaces portes et au
La virémie VHC était positive depuis contact des veines centro-lobulaires
2 ans (3 660 000 UI/ml). Sur la biopsie, contenant un matériel translucide et Accepté pour publication
on observait des lésions d’hépatite chro- réfringent (figure 1). le 14 août 2006
nique d’activité minime avec fibrose
Tirés à part : D. Wendum,
portale sans septa. Par ailleurs, on obser-
vait des cellules géantes regroupées
Quel est votre diagnostic ? voir adresse en début
d’article.

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 251


Anne-Flore Albertini et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 251-2

Diagnostic : réaction à corps et la présence de prothèses mammaires en


étranger autour des particules silicone. Nous n’avons trouvé aucun cas publié
d’une pathologie auto-immune induite par le
de silicone (diméthylpolysiloxane) silicone chez les insuffisants rénaux. Des
granulomes hépatiques à l’aluminium ont
également été rapporté dans la littérature
Il s’agit d’une réaction à corps étranger autour chez des patients hémodialysés [4].
de particules de silicone (diméthylpolysi- Les corps étrangers les plus souvent obser-
loxane). Bien que l’identification certaine vés dans le foie sont les microcristaux de talc
du silicone intracellulaire nécessite une ana- (silicate de magnésium) que l’on trouve dans
lyse spectroscopique, l’aspect histologique les espaces portes ou au contact des veines
typique associé aux antécédents de dialyse centrolobulaires. Ces dépôts, associés à une
prolongée permettent dans notre cas de faire toxicomanie intraveineuse, apparaissent sous
ce diagnostic. En effet, le silicone apparaît forme de microcristaux noirâtres, intramacro-
sous forme de particules non colorables et phagiques, réfringents en lumière polarisée
réfringentes, après technique histologique
(figure 2). L’aspect histologique est cependant
habituelle et induit des réactions à corps
différent de celui du silicone. La présence
étranger [1, 2]. De plus, il a été démontré que
de microcristaux de talc dans le foie est très
le silicone des tubulures utilisées en dialyse
spécifique et permet quasiment d’affirmer
dans les années 1980 pouvait être libéré suite
le diagnostic de toxicomanie intraveineuse
aux contraintes mécaniques exercées par la
présente ou ancienne [5].
pompe. Les particules de silicone ainsi libérées
constituent alors des micro-emboles et peu- En conclusion, bien que rares, on peut observer
vent être retrouvées dans différents organes des réactions à corps étranger autour des
(ganglions, rate, poumons, moelle osseuse) particules de silicone dans le foie. Ces dépôts
ainsi que dans le foie. Il a été suggéré que les ne doivent pas être confondus avec des micro-
particules de silicone puissent être respon- cristaux de talc associé à une toxicomanie
sables d’une fibrose hépatique car dans une intraveineuse. ■
étude, il existait une association entre la
quantité de silicone intra-hépatique déposé Key words: liver biopsy, foreign body reaction, silicone.
et le degré de fibrose [3]. Cependant, cette Mots-clés : biopsie hépatique, granulome à corps étranger,
étude ayant été faite avant l’identification du silicone.
VHC, la responsabilité du silicone dans l’éta-
blissement de la fibrose hépatique ne peut
être affirmée. Ces constatations ont conduit
à l’arrêt de l’utilisation de tubulures en silicone Références
pour la dialyse. Il a été suggéré une association
entre la survenue de maladies auto-immunes
[1] Leong AS, Disney AP, Gove DW. Spallation and
migration of silicone from blood-pump tubing in patients
on hemodialysis. N Engl J Med 1982 ; 306 : 135-40.
[2] Katzin WE, Centeno JA, Feng LJ, Kiley M, Mullick FG.
Pathology of lymph nodes from patients with breast
implants. A histologic and spectroscopic evaluation.
Am J Surg Pathol 2005 ; 29 : 506-11.
[3] Hunt J, Farthing MJ, Baker LR, Crocker PR, Levi-
son DA. Silicone in the liver: possible late effects. Gut
1989 ; 30 : 239-42.
[4] Kurumaya H, Kono N, Nakanuma Y, Tomoda F, Taka-
zakura E. Hepatic granulomata in long-term hemodialysis
patients with hyperaluminunemia. Arch Pathol Lab Med
FIG. 2. — Accumulation intra-macrophagique d’un pigment noirâtre
1989 ; 113 : 1132-34.
(Hématéine-éosine, × 400). [5] Sherman KE, Lewey SM, Goodman ZD. Talc in the
FIG. 2. — Intra macrophagic dark microcrystals (Hematein-eosin, liver of patients with chronic hepatitis C infection. Am
×400). J Gastrol 1995 ; 90 : 2164-66.

252
Annales de pathologie (2009) 29, 40—42

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un épanchement pleural déconcertant


A disconcerting pleural effusion

Jean-François Côté a,∗, Marie-Luce Auriault b,


Jean-François Boivin b, Jeanine Igual c,
Felicia David-Ouaknine d, Cécile Badoual a,
Diane Damotte a,e

a
Service d’anatomie pathologique, hôpital européen Georges-Pompidou, AP—HP, 20—40,
rue Leblanc, 75908 Paris cedex 15, France
b
Service d’anatomie pathologique, centre hospitalier Lagny-Marne-la-Vallée, 31,
avenue du Général-Leclerc, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France
c
Service de pneumologie, centre hospitalier Lagny-Marne-la-Vallée, 31, avenue du
Général-Leclerc, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France
d
Service d’infectiologie, centre hospitalier Lagny-Marne-la-Vallée, 31, avenue du
Général-Leclerc, 77405 Lagny-sur-Marne cedex, France
e
Inserm U872, centre de recherche des cordeliers, université Descartes Paris-5,
université Pierre-et-Marie-Curie-VI, 15, rue de l’École-de-Médecine, 75006 Paris, France

Accepté pour publication le 11 février 2008


Disponible sur Internet le 29 janvier 2009

Observation
Un homme de 66 ans VIH+ était hospitalisé pour une altération de l’état général avec
une dyspnée, une anorexie, un amaigrissement et une anémie. La quadrithérapie anti-
rétrovirale, débutée trois mois auparavant, avait permis une diminution de la charge
virale. Un épanchement pleural bilatéral était trouvé à l’examen clinique confirmé
par la radiographie pulmonaire. Il n’était pas noté d’adénopathie, ni de lésion cuta-
née. Il existait un syndrome inflammatoire biologique, une élévation du taux des
lactate déshydrogénase (LDH) et une thrombopénie. L’anémie était d’origine multi-
factorielle. Le myélogramme montrait une moelle riche, sans cellule anormale. Le
bilan infectieux était négatif. La première ponction pleurale réalisée à gauche avait
ramené un liquide de type exsudatif très riche en lymphocytes d’aspect polymorphe.
La pleuroscopie, réalisée dans un second temps, montrait à gauche une plèvre grani-
tée, sans nodule. L’examen histologique correspondait à une pachypleurite chronique
non spécifique avec de rares nodules lymphoïdes en profondeur, sans aspect tumo-
ral (Fig. 1). Un traitement antituberculeux d’épreuve était instauré, mais devant la

∗ Auteur correspondant. Service d’anatomie pathologique, CHU Ambroise-Paré, 9, avenue Charles-de-Gaulle, 92104 Boulogne cedex,

France.
Adresse e-mail : jean-francois.cote@apr.aphp.fr (J.-F. Côté).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.02.001
Lymphome primitif des séreuses 41

dégradation rapide de l’état général et la majoration de


l’épanchement pleural à droite, une nouvelle ponction
pleurale était réalisée. Il s’agissait, cette fois-ci, d’un
épanchement néoplasique, contenant de grandes cellules
d’aspect lymphoïde, à noyaux volumineux, pléomorphes,
multilobés, souvent en mitoses (Fig. 2). Les cellules
tumorales étaient CD20+ (discret marquage membranaire),
CD30− et virus d’Epstein Barr (EBV)-(LMP-1). Le patient
décédait en 48 heures dans un tableau de dyspnée aiguë
avec arrêt cardiorespiratoire. L’immunophénotypage avec
l’anticorps anti-HHV-8 était réalisé rétrospectivement sur
le culot d’inclusion de la pleurésie droite et sur le prélève-
ment histologique de la plèvre gauche (Fig. 1, encadré) afin
de confirmer le diagnostic suspecté.

Figure 2. Cytocentrifugation du liquide pleural : nombreuses


cellules tumorales de grande taille aux nucléoles proéminents.
Une mitose anormale dans l’encadré (May Grünwald Giemsa
[MGG] 40 × ).
Pleural effusion cytospin: numerous large tumor cells with pro-
minent nucleoli. Inset show abnormal mitosis (MGG 40 × ).

Figure 1. Biopsie pleurale : présence de remaniements inflam-


matoires polymorphes avec deux nodules lymphoïdes. Absence
d’infiltration tumorale évidente (hématoxyline-éosine-safran
[HES] 20 ×). Immunomarquage l’anti-HHV-8 dans l’encadré : pré-
sence d’une positivité nucléaire révélant les cellules tumorales,
non visualisées à l’HES, essentiellement dans l’exsudat inflamma-
toire à la surface de la plèvre (HHV-8 40 ×).
Pleural biopsy: polymorphous inflammatory reaction with two
lymphoid follicles. No obvious tumoral invasion (HES 20 ×). Insert
shows anti-HHV-8 immunostaining: nuclear positivity of tumor
cells which were not identified with standard coloration in
inflammatory exsudate (HHV-8 40 ×). Quel est votre diagnostic ?
42 J.-F. Côté et al.

Diagnostic : lymphome B primitif des Les autres lymphomes, en particulier le lymphome B diffus
à grandes cellules et le lymphome anaplasique, sont parfois
séreuses (primary effusion lymphoma plus difficiles à différencier des PEL, surtout ceux qui sont
[PEL]) associés à un pyothorax [1]. Enfin, certains carcinomes
anaplasiques, mésothéliomes ou tumeurs indifférenciées
Ce lymphome est défini selon la classification de doivent être discutées. L’absence de masse tumorale est un
l’organisation mondiale de la santé de 2001 [1] comme un élément important d’orientation pour un PEL. Néanmoins,
lymphome B à grandes cellules associé à l’herpès, virus seule l’étude immunohistochimique permet d’affirmer le
humain de type 8 (HHV-8). Il est très rarement de phénotype diagnostic de PEL. Les cellules tumorales sont habituelle-
T [2]. La description initiale a été faite par Knowles et al. ment positives pour l’anti-CD45, mais elles sont souvent
[3] qui décrivait un lymphome B à grandes cellules dans négatives pour les marqueurs pan-B (anti-CD20, anti-CD19
une série de patients VIH+. Il s’agissait d’épanchements et anti-CD79a). Rarement, il existe une expression de
intracavitaires (pleural, péricardique ou péritonéal) sans marqueurs de différenciation plasmocytaire comme l’anti-
masse tumorale détectable. Ces lymphomes ont été associés CD138. Le marqueur d’activation cellulaire (anti-CD30)
secondairement au virus HHV-8 ou à l’herpès virus du sar- peut être exprimé. Une expression aberrante de l’anti-CD3
come de Kaposi (KSHV) [1]. Le terme PEL a été proposé par a très rarement été observée. Le diagnostic de PEL s’appuie
Cesarman et al. [4] pour éviter la confusion avec des lym- sur l’expression intranucléaire de l’anti-HHV-8 dans les
phomes systémiques qui peuvent atteindre secondairement cellules tumorales.
les cavités séreuses. Le PEL est une tumeur rare, qui atteint Le PEL est un lymphome agressif, de mauvais pronostic
majoritairement des patients jeunes ou d’âge moyen, de car réfractaire à tous les traitements, et donc d’issue fatale.
sexe masculin, homosexuels et VIH+ [1,4]. Il est souvent La médiane de survie est inférieure à six mois avec ou sans
noté une co-infection VIH—EBV. Inversement les patients traitement [1].
VIH négatifs sont également EBV négatifs [5]. De rares
cas de PEL ont été décrits chez des patients VIH négatifs
notamment dans un contexte d’immunosuppression induite Remerciements
par la greffe d’organe [5] ou chez des patients âgés vivant
dans des régions de forte prévalence de l’HHV-8/KSHV À Mme A. Breton, service d’anatomie pathologique du
[1,5]. La présentation clinique est typique : épanchement centre hospitalier de Meaux et au Dr V. Verkarre, ser-
d’une des cavités séreuses (pleurale, péricardique ou péri- vice d’anatomie pathologique de l’hôpital Necker pour
tonéale), sans lymphadénopathie ou organomégalie. Des les études immunohistochimiques complémentaires dirigées
localisations extra ganglionnaires (tractus gastro-intestinal, contre HHV-8.
tissus mous, etc.) ont été exceptionnellement rapportées
[1]. D’autres pathologies liées au virus HHV-8, telles le
sarcome de Kaposi ou la maladie de Castleman multicen- Références
trique sont parfois associées [1]. L’examen cytologique de
l’épanchement, après cytocentrifugation, est essentiel au [1] Banks PM, Warnke RA. Primary effusion lymphoma. In: Jaffe
diagnostic. Les cellules tumorales sont de grande taille, ES, Harris NL, Stein H, Vardiman JW, editors. WHO clas-
sification of tumours. Pathology and genetics of tumours
d’aspect immunoblastique ou plasmoblastique [1,4]. Les
of haematopoietic and lymphoid tissues. Lyon: IARC Press;
noyaux sont grands, ovalaires, parfois irréguliers, avec un
2001.
ou plusieurs nucléoles hypertrophiés. Le cytoplasme, par- [2] Coupland SE, Charlotte F, Mansour G, Maloum K, Hummel M,
fois abondant, est vacuolisé, amphophile ou très basophile Stein H. HHV-8-associated T-cell lymphoma in a lymph node with
en coloration de MGG. Certaines cellules présentent une concurrent peritoneal effusion in an HIV-positive man. Am J Surg
différenciation plasmocytaire, d’autres sont binucléées Pathol 2005;29:647—52.
(Reed-Sternberg-like). Les mitoses sont nombreuses et de [3] Knowles DM, Inghirami G, Ubriaco A, Dalla-Favera R. Mole-
forme anormale. Si l’examen cytologique est le plus souvent cular genetic analysis of three AIDS-associated neoplasms of
contributif, en revanche l’examen histologique est fausse- uncertain lineage demonstrates their B-cell derivation and the
ment rassurant. En effet, les cellules tumorales sont parfois possible pathogenetic role of the Epstein-Barr virus. Blood
1989;73:792—9.
peu nombreuses dans les prélèvements histologiques. Elles
[4] Cesarman E, Chang Y, Moore PS, Said JW, Knowles DM.
sont adhérentes à la surface pleurale, souvent mêlées à
Kaposi’s sarcoma-associated herpesvirus-like DNA sequences
du matériel fibrino-leucocytaire et apparaissent uniformes in AIDS-related body-cavity-based lymphomas. N Engl J Med
[1]. Rarement, les cellules tumorales peuvent envahir la 1995;332:1186—91.
plèvre. Elles sont fréquemment identifiées uniquement [5] Jones D, Ballestas ME, Kaye KM, Gulizia JM, Winters GL, Flet-
par l’anti-HHV-8. Le diagnostic différentiel est rarement cher J, et al. Primary-effusion lymphoma and Kaposi’s sarcoma
une lymphocytose réactionnelle en raison du caractère in a cardiac-transplant recipient. N Engl J Med 1998;339:
monstrueux des cellules lymphomateuses malignes du PEL. 444—9.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 329-330

Un étonnant ganglion abdominal… Cas


pour diagnostic
A surprising abdominal node…

Maxime Battistella (1), Olivier Verola (1), Delphine Kerob (2), Céleste Lebbé (2), Anne Janin (1)

(1) Service d’Anatomie Pathologique, AP-HP, CHU Hôpital Saint Louis, Paris.
(2) Service de Dermatologie, AP-HP, CHU Hôpital Saint Louis, 1 avenue Claude Vellefaux, 75010 Paris.

Battistella M, Verola O, Kerob D, Lebbé C, Janin A. Un étonnant ganglion abdominal… Ann Pathol 2007 ;
27 : 329-330.

Observation Enfin, la population tumorale exprimait


largement la NSE, la chromogranine A
et la synaptophysine.
Une femme de 69 ans était hospitalisée
en dermatologie pour prise en charge
d’un mélanome desmoplastique du cuir
chevelu de niveau V et de 7 mm d’épais-
seur. On pouvait noter dans ses antécé-
dents un adénocarcinome mammaire de
stade pT1N0 en 1994 sans récidive locale
ni métastase.
Le scanner corps entier retrouvait un
nodule pré-cave isolé de 25 mm évo-
quant une adénopathie, fixant à la
tomographie par émission de positons.
On procédait alors à l’exérèse chirurgi-
cale de ce nodule suspect, adressé à la
recherche d’une métastase ganglion- FIG. 1. — Cordons de cellules tumorales accompagnés d’un
naire du mélanome connu. stroma fibreux comprenant quelques cellules fusiformes et
La pièce d’exérèse consistait en un des vaisseaux capillaires (HES × 100, cartouche HES × 400).
nodule homogène, rond, de 2,5 cm de FIG. 1. — Strands of tumoral cells in a fibrous stroma contai-
diamètre, de couleur brun-chamois avec ning spindle cells and capillaries (HES × 100, box HES × 400).
des plages hémorragiques. L’examen
microscopique retrouvait une prolifé-
ration tumorale dense faite de cordons
et de travées de cellules au cytoplasme
éosinophile abondant, aux limites cyto-
plasmiques parfois peu nettes. Les
noyaux étaient ronds ou ovoïdes, quel-
quefois nucléolés, avec une anisocaryose
importante mais sans mitose. Ces cor-
dons et travées étaient soutenus par de
fines cloisons fibreuses contenant
quelques petites cellules fusiformes et
d’assez nombreux vaisseaux capillaires
(figure 1). La tumeur était bien limitée FIG. 2. — Immunohistochimie pour la PS-100 (Dako). Accepté pour publication
par un tissu fibreux. Cellules fusiformes du stroma positives, autour des cellules le 19 octobre 2006
tumorales (× 1000).
L’étude immunohistochimique montrait Tirés à part :
FIG. 2. — Immunohistochemistry for PS-100 (Dako). Posi-
que la population tumorale n’exprimait tive spindle cells of the stroma around tumoral cells (× 1000). M. Battistella,
ni l’EMA, ni les cytokératines 7 et 20, ni voir adresse
la PS-100, ni l’HMB 45, ni le PLN 2. On en début d’article.
retrouvait en revanche un marquage e-mail :
PS-100 + au niveau des cellules fusifor- Quel est votre diagnostic ? maximebattistella@hotmail
mes du stroma (figure 2). .com

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 329


M. Battistella et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 329-330

Diagnostic : Vasoactive Intestinal Peptide le plus sou-


paragangliome rétropéritonéal vent) contre deux pour les lésions malignes
[2]. Une positivité intratumorale du Ki-67
supérieure à 3 % évoque le diagnostic de
malignité avec une sensibilité de 50 % et une
Le paragangliome rétropéritonéal est une
spécificité de 100 % [3].
tumeur développée à partir du système
paraganglionnaire rétropéritonéal extra-sur- 30 % des phéochromocytomes et paragan-
rénalien. Le système paraganglionnaire est gliomes sont familiaux ou syndromiques
constitué de la médullo-surrénale et d’amas (Néoplasie Endocrinienne Multiple de type
de cellules neuroendocrines étagés : para- II, maladie de Von Hippel Lindau, neurofi-
ganglions branchiomériques autour des artè- bromatose de type I, syndrome des para-
res et nerfs crâniens, intravagaux le long du gangliomes héréditaires dû à des mutations
nerf vague et aorticosympathiques le long germinales des gènes SDHB, SDHC, SDHD
de l’aorte abdominale [1]. codant pour les sous-unités de la Succinate
Les tumeurs du système paraganglionnaire Déshydrogénase). 12 à 24 % des paraganglio-
sont appelées phéochromocytomes dans mes apparemment sporadiques sont asso-
la surrénale et paragangliomes ailleurs. Les ciés à des mutations germinales des gènes
paragangliomes les plus fréquents, bien que RET, SDHD, SDHB ou VHL [4, 5]. Les mutations
peu communs, sont les paragangliomes caro- sur ces 2 derniers gènes sont fortement cor-
tidiens et jugulaires. La localisation rétropé- rélées à la localisation extra-surrénalienne
ritonéale est rare. Les paragangliomes sont et à la malignité [4]. Un conseil génétique
des tumeurs bien limitées, de 1 à 6 cm de avec recherche de mutation germinale de
diamètre, composées de cellules neuroen- SDHB et VHL est donc justifié pour tout
docrines aux contours indistincts, organi- paragangliome apparemment sporadique, la
sées en nids ou en cordons au sein d’un présence d’une mutation étant un facteur
stroma fibrovasculaire de soutien (classique pronostique de récidive et de malignité [4].
aspect « zellballen ») [1]. La cytologie est La surveillance clinique et radiologique régu-
habituellement régulière, avec des noyaux lière est nécessaire pour toutes les tumeurs
ronds à ovoïdes, sans mitose, et un cyto- qui manquent de critères de malignité fia-
plasme abondant éosinophile. La présence bles histologiques et immunohistochimiques.
de mitoses, d’atypies nucléaires et d’une Cette surveillance doit être rapprochée pour
anisocaryose est possible, sans valeur de les paragangliomes apparemment sporadi-
malignité [2]. Le stroma tumoral contient un ques en cas de mutation germinale de SDHB
contingent de cellules sustentaculaires. Leur ou de VHL, facteur de mauvais pronostic. ■
positivité en immunohistochimie pour la
PS-100 donne une image caractéristique de Key words: retroperitoneal paraganglioma.
réseau soutenant les cellules neuroendocri- Mots-clés : paragangliome rétropéritonéal.
nes (figure 2), présent dans 95 % des cas.
Les cellules neuroendocrines sont positives
pour la NSE, la chromogranine A et la synap- Références
tophysine le plus souvent. On peut retrouver
une positivité pour certains neuropeptides.
Les principaux diagnostics différentiels dans [1] Weiss S, Goldblum J. Enzinger and Weiss’s Soft Tissue
notre cas étaient une métastase d’un carci- Tumours Fourth Edition. St Louis: Mosby, 2001.
nome hépatocellulaire ou rénal, d’un corti-
[2] Linnoila RI, Keiser HR, Steinberg SM, Lack EE. His-
cosurrénalome, et surtout la métastase
topathology of benign versus malignant sympathoa-
d’une tumeur neuro-endocrine ou d’un
drenal paragangliomas: clinicopathologic study of 120
phéochromocytome (hypothèse éliminée
cases including unusual histologic features. Hum
par l’imagerie).
Pathol 1990 ; 21 : 1168-80.
Les critères de malignité des paraganglio-
mes sont controversés. Le seul critère objec- [3] Clarke MR, Weyant RJ, Watson CG, Carty SE. Pro-
tif de malignité reste la présence d’une maladie gnostic markers in pheochromocytoma. Hum Pathol
métastatique. Linnoila et al. [2] considèrent que 1998 ; 29 : 522-6.
la localisation extrasurrénalienne, des plages de [4] Gimenez-Roqueplo AP, Favier J, Rustin P, Rieubland C,
nécrose intratumorale, l’absence de globule Crespin M, Nau V et al. Mutations in the SDHB gene
hyalin et l’aspect lobulé de la tumeur sont are associated with extra-adrenal and/or malignant
des arguments en faveur de la malignité. Ils pheochromocytomas. Cancer Res 2003 ; 63 : 5615-21.
ont noté que les lésions bénignes expriment [5] Neumann HP, Bausch B, McWhinney SR, Bender BU,
en moyenne au moins cinq neuropeptides Gimm O, Franke G et al. Germ-line mutations in non-
(NSE, [Leu5]enkephaline, [Met5]enkepha- syndromic pheochromocytoma. N Engl J Med 2002 ;
line, somatostatine, Pancreatic Polypeptide, 346 : 1459-66.

330
Annales de pathologie (2008) 28, 526—528

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un galactocèle géant chez une femme allaitante


Giant galactocele in a lactating woman

Corinne Engohan-Aloghe a,∗, Dario Bucella b,


Rachel Boutemy b, Jean-Christophe Noël a

a
Service d’anatomie pathologique, université Libre de Bruxelles (ULB),
hôpital universitaire Erasme,
CP 610, route de Lennik-808, 1070 Bruxelles, Belgique
b
Unité de gynécopathologie et de sénologie, université Libre de Bruxelles (ULB),
hôpital Erasme, Bruxelles, Belgique

Accepté pour publication le 15 janvier 2008


Disponible sur Internet le 18 novembre 2008

Observation
Une jeune femme, âgée de 20 ans, allaitante, consultait après l’apparition de douleurs
localisées au niveau du sein droit et irradiant dans le creux axillaire. Cette patiente,
d’origine maghrébine, sans antécédents particuliers et immunocompétente, n’avait pas
de notion de contage tuberculeux. La patiente était subfébrile et à l’examen physique, on
retrouvait au niveau du quadrant supéroexterne du sein droit une tuméfaction douloureuse
et des signes de lymphangite.
L’échographie et la mammographie démontraient une volumineuse masse kystique hété-
rogène mesurant 8 × 5 cm au contour bien circonscrit au niveau du quadrant supéroexterne,
ainsi que deux adénopathies axillaires de 3 cm de plus grand axe. Les vidanges échoguidées
ont ramené un liquide lactescent avec des résultats bactériologiques négatifs. La cytologie
était peu contributive, ramenant uniquement quelques cellules macrophagiques.
Face à ce tableau, le diagnostic de galactocèle a été posé et une antibiothérapie fut
instaurée pendant 21 jours.
Devant l’échec de cette antibiothérapie et la persistance de cette masse douloureuse,
une exérèse de cette dernière et des deux ganglions axillaires est décidée. Macroscopi-
quement, la formation tumorale kystique mesurait 8 cm de grand axe et était entourée
d’un tissu fibreux et les ganglions présentaient un aspect nécrotique et blanchâtre
(Fig. 1).
L’examen histologique retrouvait des granulomes nécrotiques gigantocellulaires, tant
au niveau de la paroi de la formation tumorale kystique qu’au niveau des ganglions lym-
phatiques (Fig. 2).

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : corinenken@yahoo.fr (C. Engohan-Aloghe).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.01.006
Un galactocèle géant chez une femme allaitante 527

Figure 2. Granulomes nécrotiques épithélioïdes et gigantocellu-


laire (HES × 200).
Necrotic giant-cell granuloma (HES × 200).

Figure 1. Formation tumorale kystique du sein et ganglions axil-


laires présentant un aspect caséeux.
Breast-cystic tumor and ‘‘caseous’’ axillary lymph nodes. Quel est votre diagnostic ?
528 C. Engohan-Aloghe et al.

Diagnostic : mastite tuberculeuse de certitude est toutefois posé par la mise en évidence du
bacille acido-alcoolo-résistant, soit à l’examen direct, soit
La tuberculose mammaire (TM) est une forme rare de tuber- par la mise en culture du prélèvement (lesquels sont souvent
culose extrapulmonaire. Elle représente 0,1 % de l’ensemble négatifs) et/ou par la mise en évidence de lésions histolo-
de la pathologie mammaire alors qu’elle atteint 3 % des giques spécifiques, telle la nécrose caséeuse [4]. La méthode
pathologies mammaires chirurgicalement traitées dans les d’amplification génique par polymerase chain reaction ou
pays en voie de développement [1]. Elle fut décrite la pre- PCR peut constituer une aide hautement spécifique et sen-
mière fois en 1829 par Sir Astley Cooper. Elle touche dans 83 sible pour le diagnostic de TM (tout particulièrement, dans
à 95 % des cas la jeune femme (entre 20 et 40 ans), bien que, les formes paucibacillaires) et être utile au diagnostic dif-
ces dernières années, une élévation du nombre de cas chez férentiel avec d’autres formes de mastite granulomateuse,
la femme plus âgée est constatée. Les facteurs de risque comme la mastite chronique à plasmocytes, la tularé-
sont la multiparité, la grossesse, les traumatismes mam- mie, l’histoplasmose, la blastomycose, la cryptococcose,
maires et la mastite chronique, l’allaitement (en effet, 30 % l’actinomycose, l’infection à Corynebacterium, la mastite
des femmes présentant une TM sont allaitantes) [1]. sur corps étrangers, la maladie de Wegener, la sarcoïdose et,
Il est classiquement décrit une forme primaire (ino- enfin, l’entité dénommée mastite granulomateuse idiopa-
culation directe du bacille de Koch à travers les canaux thique [1,2,5]. Le pronostic est excellent sous réserve d’une
galactophores ou une peau lésée) et une forme secondaire prise en charge adéquate des autres localisations tuber-
(principalement, par voie lymphatique ou, plus rarement, culeuses. Le traitement consiste en une chirurgie limitée
par contiguïté) [2]. (d’intérêt afin d’éliminer une éventuelle néoplasie) associée
La présentation clinique la plus commune de TM est une à un traitement médical antibacillaire.
masse ferme, unilatérale du quadrant supéroexterne, dou-
loureuse avec ou sans cavité suggérant un carcinome du
sein ou un abcès. Dans 60 % des cas, les ganglions axillaires Références
homolatéraux sont atteints [2].
Trois types principaux de TM sont décrits : la forme nodu- [1] Khanna R, Prasanna GV, Gupta P, Kumar M, Khanna AK. Mam-
locaséeuse simulant un carcinome ; la forme abcédée et, mary tuberculosis: report on 52 cases. Postgrad Med J 2002;78:
enfin, la forme disséminée évoluant souvent vers la forma- 422—4.
tion d’une cavité et de caséum [3], comme ce fut le cas chez [2] Tewari M, Shukla HS. Breast tuberculosis: diagnosis, clinical fea-
notre patiente. tures and management. Indian J Med Res 2005;122:103—10.
La cytologie d’une ponction oriente le diagnostic [3] Bani-Hani KE, Yaghan RJ, Matalka II, Mazahreh TS. Tuberculous
mastitis: a disease not to be forgotten. Int J Tuberc Lung Dis
lorsqu’on retrouve des cellules histiocytaires d’aspect
2005;9:920—5.
épithélioïde, des cellules géantes de Langhans, mais la pré- [4] Ben Hassouna J, Gamoudi A, Bouzaiene H, Dhiab T, Khomsi F,
valence de bacilles dans les frottis restent faible, variant de Chargui R, et al. Mammary tuberculosis: a retrospective study
0 à 38,6 % [4]. of 65 cases. Gynecol Obstet Fertil 2005;33:870—6.
L’examen histologique met en évidence des granulomes [5] Diesing D, Axt-Fliedner R, Hornung D, Weiss JM, Dietrich K,
nécrotiques épithélio-gigantocellulaires tendant à être asso- Friedrich M. Granulomatous mastitis. Arch Gynecol Obstet
ciés plus avec les canaux qu’avec les lobules. Le diagnostic 2004;269:233—6.
Annales de pathologie (2009) 29, 48—50

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un nodule cervical de découverte fortuite


Fortuitous discovery of a cervical nodule

Issam M’sakni a,∗, Nadia Sabbegh-Znaïdi a,


Fethi Bougrine a, Besma Laabidi a, Sonia Benzarti b,
Kamel Chebbi b, Ammar Bouziani a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Militaire de Tunis,
1008 Monfleury, Tunis, Tunisie
b
Service d’otorhinolaryngologie, hôpital Militaire de Tunis, 1008 Monfleury,
Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 31 janvier 2008


Disponible sur Internet le 3 février 2009

Observation
Une femme âgée de 29 ans, aux antécédents familiaux de goitre, était admise pour explo-
ration d’une tuméfaction basocervicale antérieure évoluant depuis une année. La malade
n’était pas dyspnéique, ni dysphagique, ni dysphonique. Elle n’avait pas de signe cli-
nique de dysthyroïdie. L’examen clinique trouvait un nodule cervical antérieur, latéralisé
à droite, de consistance ferme, indolore, mobile à la déglutition. Il mesurait 5 cm de grand
axe. Il n’y avait pas d’adénopathie cervicale palpable. Le reste de l’examen somatique
était sans particularité. Le bilan hormonal thyroïdien était normal. L’échographie cervi-
cale objectivait un nodule du lobe thyroïdien droit de 4 cm de grand axe. La patiente était
alors proposée pour une lobo-isthmectomie droite. En peropératoire, un nodule allongé,
grisâtre, de consistance élastique, mesurant 1,2 cm de grand axe, évoquant une adénopa-
thie, était réséqué à l’origine du nerf récurent droit. L’exploration de la loge thyroïdienne
montrait l’absence de la parathyroïde inférieure droite et la présence des trois autres
parathyroïdes en situation normale rétrolobaire. L’étude microscopique de la pièce de
lobo-isthmectomie concluait à un adénome macrovésiculaire. La formation réséquée cor-
respondait à un tissu lymphoïde encapsulé comportant un nodule bien limité formé par des
travées de cellules régulières claires et éosinophiles. Le tissu lymphoïde était composé de
petits lymphocytes associés à des cellules épithéliales. Il comportait des corpuscules arron-
dis éosinophiles (Fig. 1 et 2). L’examen tomodensitométrique médiastinal post opératoire
concluait à l’absence de thymus.

∗ Auteur correspondant. 10, rue Kerkena, 2098 Rades Méliane, Tunisie.


Adresse e-mail : msaknissam@yahoo.fr (I. M’sakni).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.01.007
Un nodule cervical de découverte fortuite 49

Figure 1. Tissu lymphoïde et adipeux comportant un nodule bien


limité formé par des travées de cellules claires et éosinophiles (par-
tie inférieure de la figure) (HE × 40).
Lymphoid and fat tissue containing a well limited nodule composed
Figure 2. Le tissu lymphoïde est composé par des petits lym-
by clear and eosinophilic cells (Bottom of the figure) (HE × 40).
phocytes associés à des cellules épithéliales. Il comporte des
corpuscules arrondis éosinophiles. Les cellules du nodule sont régu-
lières et arrondies (HE × 400).
The lymphoïd tissue is composed by small lymphocytes associated
to epithelial cells. It contains round eosinophilic corpuscules. The
cells of the nodule are round and regular (HE × 400).

Quel est votre diagnostic ?


50 I. M’sakni et al.

Diagnostic : thymus cervical ectopique par la proximité de leurs ébauches au cours du dévelop-
pement embryologique. L’ébauche du thymus se détache
avec parathyroïde intrathymique
vers la sixième semaine de la partie ventrale de la troi-
Chez cette malade opérée d’un adénome thyroïdien sième poche endoblastique de l’intestin pharyngien. Elle
macrovésiculaire, le thymus et la parathyroïde ectopiques migre en direction caudale pour former avec son homologue
intrathyroïdiens ont été une découverte fortuite. L’ectopie controlatéral le thymus définitif dans le médiastin supé-
thymique dans la région cervicale est rare. Une centaine de rieur [4]. L’ébauche de la parathyroïde se développe dans
cas est rapportée dans la littérature dont moins de dix cas la partie dorsale de la même poche endoblastique. Elle est
comportant une parathyroïde intrathymique. La plupart des entraînée avec la migration de l’ébauche thymique et vient
cas concernent des enfants de sexe masculin âgés de deux à se placer au pôle inférieur de la thyroïde constituant la
13 ans [1]. La découverte de cette anomalie chez l’adulte parathyroïde inférieure [4]. Une partie de l’ébauche thy-
comme dans la présente observation est exceptionnelle. mique peut arrêter sa migration dans la région cervicale et
Cela s’explique par l’involution thymique physiologique à englober la parathyroïde qui a été entraînée avec elle. En
cet âge. raison d’un risque de cancérisation rapporté chez l’adulte,
Le thymus cervical ectopique est généralement asymp- le thymus ectopique doit être réséqué après vérification de
tomatique. Il peut parfois entraîner une dysphagie, une l’existence d’un thymus médiastinal pour éviter un risque
dyspnée, un stridor ou des épisodes de suffocation dus à la d’immunodéficience, notamment chez l’enfant [5].
compression des organes de voisinage [2]. Il peut augmen-
ter de taille durant la première décade de vie après une Références
infection ou une vaccination [2]. Les examens cliniques et
radiologiques, peu spécifiques, trouvent un nodule kystique [1] Park JJ, Kim JW, Kim JP, Ahn SK, Jeong JH, Jeon SY. Two cases
ou solide sur le trajet de la descente embryologique du thy- of ectopic cervical thymus: case reports and a review of the
mus entre l’angle du maxillaire et le médiastin supérieur [2]. literature. Auris Nasus Larynx 2006;33:101—5.
La cytoponction peut aboutir au diagnostic en ramenant un [2] Loney DA, Bauman NM. Ectopic cervical thymic masses in
mélange de cellules lymphoïdes et épithéliales thymiques infants: a case report and review of the literature. Pediatr Oto-
rhinolaryngol 1998;43:77—84.
[3]. Le diagnostic n’est souvent posé qu’après examen
[3] Millman B, Pransky S, Castillo J, Zipfel TE. Cervical thymic ano-
anatomopathologique de la pièce d’exérèse. Macroscopi-
malies. Int J Pediatr Otorhinolaryngol 1999;47:29—39.
quement, le thymus ectopique se présente sous forme d’un [4] Rabineau D. Précis d’embryologie humaine. Paris: Ellipses; 1989.
nodule kystique dans 90 % des cas et rarement solide comme [5] Ozturk H, Karnak I, Deveci S, Surer I, Cetinkursun S. Multilocular
dans la présente observation [2]. L’existence d’une parathy- cervical thymic cyst: an unusual neck mass in children. Int J
roïde au sein du thymus cervical ectopique est expliquée Pediatr Otorhinolaryngol 2001;61:249—52.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 47-48

Un nodule du doigt chez un enfant Cas


pour diagnostic

A finger nodule in a child

Amel Douggaz (1), Joseph Ziadé (2), Jean-Michel Coindre (1)

(1) Département de Pathologie, Institut Bergonié, 229 cours de l’Argonne, 33076 Bordeaux.
(2) Cabinet médical d’anatomie et cytologie pathologiques, 72 rue Lessard, 76100 Rouen.

Douggaz A, Ziadé J, Coindre JM. Un nodule du doigt chez un enfant. Ann Pathol 2007 ; 27 : 47-48

Observation

Un garçon de 10 ans consulte pour un


nodule indolore du 4e doigt de la main
gauche, évoluant depuis quelques
mois. Une exérèse simple est réalisée.
Macroscopiquement, il s’agit d’un
nodule bien limité, non encapsulé de
consistance ferme, mesurant 10 mm de
grand axe.
À l’histologie, cette lésion est peu cellu-
laire avec un fond richement collagène.
Les cellules sont d’aspect épithélioïde, FIG. 1. — Travées de cellules épithélioïdes dans un stroma
disposées en cordons plus ou moins collagène dense. Grossissement 40.
anastomosés. Leurs noyaux sont ronds FIG. 1. — Epithelioid cell trabeculae within a dense colla-
genous stroma. Magnification 40.
ou ovalaires sans atypies ni activité mito-
tique. Le cytoplasme est d’abondance
moyenne (figure 1).
L’étude immunohistochimique montre
que les cellules tumorales sont forte-
ment positives avec l’anti EMA (figure 2)
tandis qu’elles sont négatives avec les
anticytokératines (KL1), la desmine,
l’actine musculaire lisse alpha, la pro-
teine S100 et le CD34.

FIG. 2. — Les cellules tumorales sont EMA positives. Gros-


sissement 40. Accepté pour publication
FIG. 2. — Tumor cells are EMA (epithelial membrane le 16 novembre 2005
antigen) positive. Magnification 40.
Tirés à part : J.M. Coindre,
voir adresse
en début d’article.
Quel est votre diagnostic ? e-mail :
coindre@bergonie.org

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 47


Amel Douggaz et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 47-48

Diagnostic : périneuriome unique ou multiple dans le cadre du syn-


sclérosant (PNS) drome de Cowden) ; 3) la tumeur ténosyno-
viale à cellules géantes (plus profonde,
comporte des cellules géantes ostéoclaste-
Le périneuriome (PN) est une tumeur d’ori- like, des histiocytes, EMA-) ; 4) la tumeur
gine périneuriale, le plus souvent bénigne. glomique (nodule souvent douloureux, pro-
On distingue classiquement deux entités cli- lifération des cellules épithélioïdes intense-
nico-pathologiques différentes : le PN intra- ment marquées avec l’AML, EMA-) ; 5) la
nerveux et le PN extranerveux ou des tissus tumeur annexielle bénigne sclérosante (pré-
mous [1-3]. Le PNS est une variante de PN sence de formations glandulaires et d’éléments
des tissus mous récemment individualisée myoépithéliaux, marqueurs épithéliaux +).
[1], caractérisée par un stroma collagène D’autres lésions rares peuvent faire discuter
dense et une prédilection pour les mains le diagnostic différentiel : l’hémangioendo-
des adolescents et des adultes jeunes [2, 3]. théliome épithélioïde, le schwannome épi-
Cliniquement, il s’agit souvent d’un petit thélioïde... Une résection complète permet
nodule intradermique ou sous cutané, indo- une bonne évolution sans récidive [1-4]. ■
lore, évoluant durant plusieurs années [4, 5].
Histologiquement, la tumeur est hypocellu- Key words: sclerosing perineurioma, finger tumor.
laire avec un fond collagène abondant com-
Mots-clés : périneuriome sclérosant, tumeur du doigt.
portant des cellules d’aspect épithélioïde ou
fusiformes, organisées en cordons et en tra-
vées avec des phénomènes d’enroulements.
Les noyaux sont peu atypiques avec en géné-
ral un petit nucléole central et rarement des Références
mitoses. Le cytoplasme est pâle aux limites mal
visibles [1, 3, 4]. Le profil immuno-histochimi-
que caractéristique associe une positivité de [1] Fetsch JF, Miettinen M. Sclerosing perineurioma: a
l’EMA et une négativité de la PS100. Un clinicopathologic study of 19 cases of a distinctive soft
immunomarquage a été retrouvé avec le tissue lesion with a predilection for the fingers and
collagène IV membranaire, la laminine, le palms of young adults. Am J Surg Pathol 1997 ; 21 :
transporteur du glucose érythrocytaire 1433-42.
humain (GLUT1) et moins constamment [2] Canales-Ibarra C, Magariños G, Olsoff-Pagovich P,
avec la cytokératine, le CD34, le CD99 et Ortiz-Hidalgo C. Cutaneous sclerosing perineurioma
l’AML [1-3]. L’étude ultra-structurale con- of the digits: an uncommon soft tissue neoplasm.
firme l’origine périneuriale (vésicules de Report of two cases with immunohistochemical ana-
pinocytose, membrane basale discontinue, lysis. J Cutan Pathol 2003 ; 30 : 577-81.
jonctions intercellulaires) [1, 3]. Des lésions [3] Yamaguchi U, Hasegawa T, Hirose T, Fugo K, Mit-
fibreuses d’emblée ou subissant des rema-
suhashi T, Shimizu M et al. Sclerosing perineurioma:
niements fibreux au cours de leur évolution
a clinicopathological study of five cases and diagnostic
peuvent être confondues avec le PNS. Néan-
utility of immunohistochemical staining for GLUT1.
moins, le contexte clinique, l’analyse histo-
Virchows Arch 2003 ; 433 : 159-63.
logique fine et surtout le profil
immunohistochimique permettent de [4] Huang HY, Sung MT. Sclerosing perineuriomas
redresser le diagnostic. On distingue essen- affecting bilateral hands. Br J Dermatol 2002 ; 146 :
tiellement : 1) le fibrome des gaines tendi- 129-33.
neuses (siège profond, associé aux tendons, [5] Sciot R, Dal Cin P, Hagemeijer A, De Smet L, Van
prolifération fibroblastique et myofibroblas- Damme B, Van den Berghe H. Cutaneous sclerosing
tique, EMA-) ; 2) le fibrome sclérosant perineurioma with cryptic NF2 gene deletion. Am J
cutané (prolifération fibroblastique, EMA-, Surg Pathol 1999 ; 23 : 849-53.

48
Annales de pathologie (2008) 28, 162—164

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un nodule du périnée chez une femme


A perineal nodule in a woman

Rachid Kaci a, Patrick Atienza b,


Jean-François Fléjou a,∗

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Saint-Antoine, AP—HP,
faculté de médecine, université Pierre-et-Marie-Curie, 184,
rue du Faubourg-Saint-Antoine, 75571 Paris cedex 12, France
b
Service de proctologie médico-chirurgicale, hôpital des Diaconesses, 18, rue du
Sergent-Bauchat, 75012 Paris, France

Accepté pour publication le 17 août 2007


Disponible sur Internet le 2 juillet 2008

Observation
Une femme de 35 ans présentait une tuméfaction non douloureuse du périnée, appa-
rue dix mois auparavant. L’examen clinique révélait une lésion d’allure bénigne et
kystique, située en regard du noyau fibreux central du périnée, qui faisait évoquer
le diagnostic d’hydrocystome apocrine. L’échographie endo-anorectale décrivait une
lésion bien limitée, à contenu liquidien. Cette lésion était facilement énucléée par le
chirurgien.
Macroscopiquement, la lésion était nodulaire, bien limitée, mesurant 20 mm × 10 mm.
À la coupe, elle était blanchâtre, souple, homogène, sans composante kystique. Histo-
logiquement, elle était monomorphe, relativement cellulaire, faite d’une prolifération
vaguement fasciculée de cellules fusiformes, au noyau ovalaire ou arrondi, régulier, peu
nucléolé, et au cytoplasme peu étendu (Fig. 1). Il existait également une composante
vasculaire abondante, faite de vaisseaux de taille petite à moyenne, à paroi hyalinisée.
On notait la présence de mastocytes, de quelques amas lymphoïdes périvasculaires ainsi
que de rares plasmocytes interstitiels. Il n’était pas noté de contingent adipocytaire. Il
n’y avait pas de nécrose ni d’hémorragie. Il n’était pas observé de mitose. Cette lésion
était bien limitée, non encapsulée. L’exérèse paraissait complète. L’étude immunohisto-
chimique montrait que les cellules fusiformes exprimaient avec une intensité moyenne la
desmine et faiblement le CD34 (Fig. 2A). Il n’y avait pas d’expression de l’actine muscu-
laire lisse ni de la protéine S100. Les nombreux vaisseaux exprimaient le CD34 et l’actine.
Il existait une expression du bcl2 ainsi qu’une forte expression nucléaire des récepteurs
aux estrogènes et à la progestérone (Fig. 2B).

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : jean-francois.flejou@sat.aphp.fr (J.-F. Fléjou).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.08.002
Un nodule du périnée chez une femme 163

Figure 1. Prolifération de cellules fusiformes sans atypies, avec


abondant contingent vasculaire (HE × 20).
Proliferation of spindle cells, with numerous vessels (HE × 20).

Figure 2. A. Les cellules fusiformes et les vaisseaux expriment le


CD34 (× 40). B. Expression nucléaire du récepteur à la progestérone
par les cellules fusiformes (× 40).
A. Spindle cells and vessels are CD34 positive (× 40). B. Nuclear
expression of progesterone receptor by spindle cells.

Quel est votre diagnostic ?


164 R. Kaci et al.

Diagnostic : angiofibrome cellulaire localisation génitale presque exclusive : angiofibroblastome


[1,5] et angiomyxome agressif [1,5]. Le polype stromal fibro-
Notre observation illustre les caractéristiques d’une lésion épithélial est, en outre, souvent cité parmi les diagnostics
rare, de description relativement récente, l’angiofibrome différentiels [1,5].
cellulaire. Cette lésion a été décrite pour la première fois L’histogenèse de l’angiofibrome cellulaire est incer-
en 1997, par Nucci et al. [1,2]. C’est une tumeur mésen- taine. Les similitudes avec l’angiomyxome agressif et
chymateuse bénigne, composée principalement de deux l’angiomyofibroblastome (ces deux lésions expriment typi-
contingents [1] : un contingent de cellules fusiformes et un quement la desmine) ainsi que la positivité nucléaire
contingent vasculaire proéminent. Les lésions siègent habi- des récepteurs aux estrogènes et à la progestérone sug-
tuellement en sous-cutané, dans la sphère génitale, chez la gèrent que ces lésions dériveraient d’une cellule stromale
femme et chez l’homme. De rare cas ont, cependant, été hormonosensible normale de cette région anatomique,
rapportés dans d’autres localisations, telles que le rétropé- qui exprimerait la vimentine, la desmine et les récep-
ritoine et la paroi thoracique. teurs nucléaires aux estrogènes et à la progestérone [1].
Dans une série récente de 51 cas d’angiofibrome cel- Cependant, de rares cas d’angiofibrome cellulaire ont été
lulaire [1], l’âge au moment du diagnostic est de 50 ans rapportés en dehors de la sphère génitale, et l’expression
chez la femme et de 70 ans chez l’homme. Les lésions sont des récepteurs nucléaires aux estrogènes et la progesté-
uniques, non douloureuses, de plus petite taille chez la rone n’est pas spécifique des lésions tumorales de la sphère
femme (moyenne de 2,8 cm) que chez l’homme (moyenne génitale [1]. L’expression plus fréquente du CD34 que de la
7,0 cm). Macroscopiquement, elles sont bien limitées, mais desmine n’est pas non plus en faveur de cette hypothèse [1].
non encapsulées. Des secteurs hémorragiques ont été obser- Le profil immunohistochimique de l’angiofibrome cellulaire
vés dans deux cas et des secteurs de nécrose dans un seul oriente vers une différenciation fibroblastique plutôt que
cas. myofibroblastique, comme l’étude en microscopie électro-
Histologiquement, les tumeurs sont bien limitées, faites nique réalisée dans un cas [3]. La similitude morphologique
d’une prolifération de cellules fusiformes, accompagnées de l’angiofibrome cellulaire et du lipome à cellules fusi-
de fines bandes de collagène et de nombreux vaisseaux de formes rapproche d’avantage ces deux entités [1]. Ce type
taille petite à moyenne, à paroi épaisse. Les lésions sont de lipome présente la même anomalie génétique que le myo-
souvent diffusément cellulaires avec cependant parfois des fibroblastome de type mammaire, anomalie qui consiste en
secteurs à stroma œdémateux ou hyalin, un peu moins cel- un réarrangement spécifique des chromosomes 13 q et 16
lulaires. Des atypies cytologiques modérées, probablement q [1]. L’analyse cytogénétique de l’angiofibrome cellulaire,
de nature réactionnelle, et des figures de mitoses ne sont non encore disponible, pourrait aider à valider ou à réfu-
présentes que dans de rares cas. Les nombreux vaisseaux ter le lien entre angiofibrome cellulaire et lipome à cellules
à paroi épaisse et hyaline ont une lumière arrondie, mais fusiformes.
d’occasionnels vaisseaux à lumière irrégulière, comprimée Le traitement de choix de cette lésion bénigne paraît
ou ectasique sont parfois observés. Un contingent adipocy- être une simple excision chirurgicale, avec marges saines
taire intralésionnel, minoritaire est présent dans 24 % des [1,3,4], habituellement sans risque de récidive locale ou de
cas, sous forme d’adipocytes isolés ou groupés en petits métastase. Cela souligne encore l’importance du diagnostic
amas, de siège périphérique ou ubiquitaire. Des mastocytes différentiel avec des lésions plus agressives, dont la princi-
en nombre variable, des lymphocytes et parfois des agrégats pale est représentée par l’angiomyxome agressif, lésion de
lymphoïdes périvasculaires, sont présents dans tous les cas. même siège, mais dont le pronostic et le traitement sont
Dans une autre série de sept cas [3], des cellules multinu- différents.
cléées dispersées au sein de la lésion ont été notées dans
cinq cas et dans un cas la lésion était limitée par une fine
capsule fibreuse. Références
En immunohistochimie, l’angiofibrome cellulaire
exprime plus fréquemment le CD34 que l’actine musculaire [1] Iwasa Y, Fletcher CDM. Cellular angiofibroma: clinicopathologic
lisse ou la desmine [1]. Il exprime la vimentine ainsi que les and immunohistochemical analysis of 51 cases. Am J Surg Pathol
récepteurs nucléaires aux estrogènes et à la progestérone 2004;28:1426—35.
[1]. Il est rarement EMA+ ou CD 10+ [3]. Il n’y a pas [2] Dufau JP, Soulard R, Gros P. Angiofibrome cellulaire, angio-
d’expression de la protéine S100, de la H-caldesmone ou myofibroblastome et angiomyxome agressif : variantes d’une
des cytokératines AE1/AE3 [3]. L’index de prolifération même tumeur stromale de la sphère génitale ? Ann Pathol
(Ki67) est bas, d’environ 1 % [3]. 2002;22:241—3.
Le diagnostic différentiel doit tenir compte du fait qu’il [3] McCluggage WG, Ganesan R, Hirschowitz L, Rollanson TP. Cellu-
lar angiofibroma and related fibromatous lesions of the vulva:
existe deux catégories de tumeurs des tissus mous de la
report of a series of cases with a morphological spectrum wider
région génitale, chez la femme et chez l’homme [2,4]. La than previously described. Histopathology 2004;45:360—8.
première concerne des tumeurs pour lesquelles cette locali- [4] Colombat M, Liard-Meillon ME, De Saint—Maur P, Sevestre H,
sation est inhabituelle (lipome à cellules fusiformes, tumeur Gontier MF. L’angiofibrome cellulaire, une tumeur vulvaire rare.
fibreuse solitaire, schwannome, léiomyome, périneuriome, À propos d’un cas. Ann Pathol 2001;21:145—8.
glomangiopéricytome, etc.). La seconde comprend des [5] Nucci MR, Fletcher CDM. Vulvovaginal soft tissue tumours:
tumeurs qui sont, comme l’angiofibrome cellulaire, de update and review. Histopathology 2000;36:97—108.
Annales de pathologie (2008) 28, 518—520

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un nodule intrathyroïdien inhabituel


An unusual intrathyroidal nodule

Amina Mekni a,∗, Fathia Maamouri a, Faten Limaiem a,


Ines Chelly a, Selima Kharrat b, Selma Bellil a,
Slim Haouet a, Nidhameddine Kchir a, Samia Sahtout b,
Moncef Zitouna a, Khedija Bellil a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital La-Rabta, 1007 Bab-Saadoun,
Tunis, Tunisie
b
Service d’oto-rhino-laryngologie, hôpital La-Rabta, 1007 Bab-Saadoun, Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 3 décembre 2007


Disponible sur Internet le 18 novembre 2008

Observation
Un homme âgé de 39 ans consultait pour des douleurs osseuses et abdominales diffuses.
Le bilan biologique mettait en évidence une élévation de la parathormone sérique à
1401 pg/ml et une hypercalcémie sévère à 17,3 mg/dl. Un adénome parathyroïdien était
suspecté, mais la scintigraphie parathyroïdienne au MIBI marqué au Technetium 99 m était
négative. L’échographie et l’examen tomodensitométrique de la région cervicale visua-
lisaient un nodule thyroïdien basilobaire gauche. Une lobo-isthmectomie thyroïdienne
gauche a été pratiquée. L’examen macroscopique de la pièce opératoire trouvait que
le nodule était basilobaire, de couleur blanc-jaunâtre entouré par une capsule épaisse
et mesurait 3 cm de diamètre. L’examen extemporané plaidait en faveur de la malignité
devant une prolifération tumorale infiltrant la capsule. L’examen histologique définitif
montrait une tumeur maligne nodulaire encapsulée et enchâssée dans le parenchyme thy-
roïdien. Cette prolifération infiltrait la capsule, le tissu thyroïdien ainsi que le tissu adipeux
périthyroïdien avec présence de nombreux emboles vasculaires tumoraux. Elle s’agençait
en travées, cordons et amas séparés par des bandes fibreuses. Les cellules tumorales
étaient arrondies à polygonales pourvues d’un cytoplasme éosinophile bien limité. Les
noyaux étaient monomorphes, ronds et réguliers au centre du nodule, atypiques ovoïdes et
nuléolés en périphérie et dans les zones d’invasion. L’index mitotique était de deux mitoses
pour dix champs à fort grossissement. L’étude immunohistochimique montrait la positivité
des cellules tumorales avec les anticorps dirigés contre l’antigène carcinoembryonnaire, la
chromogranine, la synaptophysine et leur négativité avec les anticorps antithyroglobuline
et anticalcitonine. (Fig. 1 et 2).

∗ Auteur correspondant. 7, rue Moncef-Bey, Menzeh 7, 2091 Tunis, Tunisie.


Adresse e-mail : aminamekninouira@yahoo.fr (A. Mekni).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.12.003
Un nodule intrathyroïdien inhabituel 519

Figure 1. Les cellules tumorales sont arrondies à noyaux mono- Figure 2. Les cellules tumorales ne sont pas marquées par
morphes (HE × 400). l’anticorps anti-thyroglobuline. Présence d’un embole vasculaire
Round tumor cells with monomorphous nuclei (HE × 400). tumoral dans la thyroïde adjacente.
Tumor cells are not stained by anti-thyroglobulin antibody.
Note the presence of vascular invasion in the adjacent thyroid
parenchyma.

Quel est votre diagnostic ?


520 A. Mekni et al.

Diagnostic : carcinome parathyroïdien la thyroglobuline permet d’éliminer d’emblée le carcinome


vésiculaire. Les cellules tumorales expriment les marqueurs
intrathyroïdien
neuroendocrines (antigène carcinoembryonnaire, synap-
tophysine, chromogranine A), mais devant le contexte
Discussion clinique d’hyperpathyroïdie primaire, la négativité des
cellules tumorales avec l’anticorps antithyrocalcitonine
Le carcinome parathyroïdien est une cause rare
et leur positivité avec l’anticorps antiparathormone, le
d’hypercalcémie parathormone-dépendante. En effet,
diagnostic de carcinome parathyroïdien intrathyroïdien est
il représente moins de 1 % des hyperparathyroïdies pri-
retenu. Le traitement curatif du carcinome parathyroïdien
maires [1], qui sont généralement secondaires à un adénome
repose sur une exérèse en bloc de la tumeur, du lobe
parathyroïdien (85 %) ou à une hyperplasie des parathy-
thyroïdien, des ganglions récurrentiels et jugulocarotidiens
roïdes (5—10 %). Les glandes parathyroïdes peuvent être
homolatéraux et du tissu graisseux prétrachéal. Le curage
ectopiques. Elles siègent alors dans la thyroïde dans 12,5 %
est indiqué lorsque les ganglions sont métastatiques. La
des cas. Seuls trois cas d’hyperparathyroïdie, secondaire
radiothérapie adjuvante pourrait se justifier vu la fréquence
à un carcinome parathyroïdien intrathyroïdien, ont été
des récidives locales. Les suites opératoires sont dominées
rapportés. L’âge de survenue du carcinome parathyroïdien
par l’hypocalcémie qui est d’autant plus sévère que la
se situe à la cinquième décade, de dix ans inférieur à celui
calcémie préopératoire est élevée, mais la préservation
de l’adénome [2]. Son étiologie demeure indéterminée.
des parathyroïdes controlatérales permet d’éviter une
Aucun facteur prédisposant n’est clairement établi. Des cas
hypocalcémie définitive. La chimiothérapie adjuvante n’a
ponctuels sont cependant survenus sur un adénome ou une
pas d’indication. En cas de métastases à distance, des
hyperplasie parathyroïdienne, souvent familiale à transmis-
protocoles variés de polychimiothérapie ont été proposés.
sion autosomique dominante. La symptomatologie clinique
L’évolution du carcinome parathyroïdien est marquée
est en rapport avec la sécrétion excessive de parathormone
par la survenue de récidive au bout d’un délai moyen de
par la tumeur [1]. En effet, les signes d’hypercalcémie
trois ans. La survenue de métastases, essentiellement
dominent souvent le tableau clinique à type de néphrocal-
pulmonaires (40 %) et ganglionnaires (30 %) est tardive.
cinose ou de douleurs osseuses [1]. Une masse cervicale a
La survie à cinq ans varie de 40 à 86 %. La survie globale
été rapportée dans 30 à 70 % des cas [3]. La calcémie est
à dix ans est estimée à 49 % [5]. Notre patient n’a pas
en général très élevée, dépassant 17,3 mg/dl. Le dosage
présenté de récidives ni de métastases et ce après un an de
sérique de la parathormone montre des taux pouvant
suivi.
atteindre 19 fois la normale, beaucoup plus élevés que
ceux observés en cas d’adénome parathyroïdien [1]. Macro-
scopiquement, le carcinome parathyroïdien se présente
généralement comme une masse lobulée, ferme ou indu-
Références
rée, entouré dans 50 % des cas par une capsule épaisse et [1] Hussein WI, El-Maghraby TA, Al-Sanea O. Hyperfunctioning
blanc-grisâtre, adhérente aux tissus adjacents. L’adénome intrathyroidal parathyroid carcinoma. Saudi Med J 2006;27:
est ovalaire ou réniforme, de couleur rouge-brunâtre et 1226—9.
de consistance molle, lorsque la maladie parathyroïdienne [2] Wynne A, van Heerden J, Carney JA, Fitzpatrick LA. Parathy-
est peu évoluée, il devient volumineux, adhérant aux roid carcinoma: clinical and pathological features in 43 patients.
organes de voisinage et peut simuler un carcinome lorsque Medicine 1992;71:197—205.
l’hyperparathyroïdie est ancienne. Histologiquement, les [3] Crescenzo DG, Shabahang M, Gravin D, Evans SR. Intrathyroi-
critères de malignité sont : les atypies cytonucléaires dal parathyroid cancer presenting as a left neck mass. Thyroid
associées aux mitoses, l’invasion de la capsule et des tissus 1998;8:597—9.
[4] Schantz A, Castleman B. Parathyroid carcinoma: a study of
adjacents et les emboles vasculaires tumoraux [4]. Ces
70 cases. Cancer 1973;31:600—5.
critères sont peu spécifiques, et l’infiltration des organes [5] Hundahl SA, Fleming ID, Fremgen AM, Menck HR. Two hundred
de voisinage reste le critère le plus fiable d’agressivité. and eighty-six cases of parathyroid carcinoma treated in the
Le diagnostic différentiel du carcinome parathyroïdien de U.S between 1985—1995: a National Cancer Data Base Report.
siège intrathyroïdien se pose avec le carcinome vésiculaire Cancer 1999;86:538—44.
et le carcinome médullaire de la thyroïde. La négativité de
Ann Pathol 2007 ; 27 : 387-388

Un nodule thyroïdien Cas


pour diagnostic

A thyroid nodule

Maxime Benchetrit (1), Isabelle Birtwisle-Peyrottes (1), François Demard (2), Francette Ettore (1)

(1) Unité d’anatomie et cytologie pathologiques.


(2) Service d’otorhinolaryngologie, Centre Antoine-Lacassagne, 33 avenue de Valombrose, 06189 Nice Cedex 2.

Benchetrit M, Birtwisle-Peyrottes I, Demard F, Ettore F. Un nodule thyroïdien. Ann Pathol 2007 ; 27 :


387-388.

Observation AE3, la thyrocalcitonine (TC) et la thyro-


globuline (TG). En revanche, on consta-
tait une forte positivité des cellules
Une femme âgée de 65 ans se présentait cordonales avec la synaptophysine et la
à la consultation d’O.R.L. pour une masse chromogranine ainsi qu’un marquage de
basicervicale gauche évoluant depuis un certaines cellules avec la PS100 (figure 2).
an. Dans ses antécédents, on retrouvait
une tumeur maligne du sein droit, traitée
par tumorectomie, curage axillaire et
radiochimiothérapie complémentaire
ainsi que des troubles du rythme supra-
ventriculaire. À l’examen clinique, on pal-
pait un nodule thyroïdien gauche de
30 mm, ferme, indolore, non compressif,
sans adénopathie associée. Le bilan bio-
logique était normal. L’échographie cer-
vicale montrait un lobe gauche de 33 mm
de grand axe, siège d’un nodule hypo-
échogène bien limité, vascularisé, de
27 × 16 mm, associé à 3 ganglions
FIG. 1. — Prolifération cordonale ou en nids de cellules de
d’aspect réactionnel. La cytoponction petite taille (HES × 40).
effectuée n’était pas contributive. FIG. 1. — “Zellballen” proliferation of small cells.
L’indication opératoire était posée et
une lobo-isthmectomie gauche réalisée.
L’examen macroscopique retrouvait un
nodule de 20 mm, supérieur et moyen,
rouge sombre, friable. À l’examen
microscopique, on décrivait une proli-
fération bien limitée par une capsule
fibreuse, d’architecture cordonale ou en
nids « Zellballen ». Cette lésion était fine-
ment vascularisée par un réseau capil-
laire endocrinoïde et remaniée par des
nappes hémorragiques (figure 1). Elle Accepté pour publication
était constituée de cellules de taille petite le 10 mars 2007
ou moyenne au noyau rond et au cyto-
FIG. 2. — Marquage avec la PS100 (× 40). Tirés à part :
plasme éosinophile parfois vacuolisé ;
FIG. 2. — PS100 staining. I. Birtwisle-Peyrottes,
certaines étaient anisocaryotiques et
voir adresse
hyperchromatiques. Les mitoses étaient en début d’article.
exceptionnelles. L’immunomarquage du e-mail :
contingent cellulaire était négatif avec les Quel est votre diagnostic ? isabelle.peyrottes@nicefncl
CD31 et CD34 ainsi qu’avec l’EMA, l’AE1- cc.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 387


Maxime Benchetrit et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 387-388

Diagnostic : paragangliome tecture cordonale peut évoquer un carcinome


thyroïdien médullaire ou un adénome trabéculaire hyali-
nisant [4]. La négativité de la thyrocalcitonine
et des marqueurs épithéliaux, le marquage
Cette tumeur exceptionnelle (une vingtaine des cellules sus-tentaculaires par la PS100 per-
de cas décrits) se développe à partir de para- mettent d’éliminer le carcinome médullaire.
ganglions dont la localisation anatomique Les adénomes trabéculaires hyalinisants sont
cervicale classique comporte trois sites : marqués par les anti-épithéliaux et la TG. Les
bifurcation carotidienne, région laryngée autres diagnostics différentiels (carcinome
supérieure et région laryngée inférieure. anaplasique thyroïdien, métastase d’un carci-
Cette tumeur résulterait d’une anomalie de nome ou d’un carcinoïde) sont récusés sur les
migration des cellules neuro-endocrines des données morphologiques et immunohisto-
paraganglions laryngés inférieurs dans le chimiques. ■
parenchyme thyroïdien. Certains auteurs [1]
proposent de regrouper sous le terme de Key words: Thyroïd, paraganglioma, immunochemistry.
paragangliome laryngé inférieur les tumeurs Mots-clés : Thyroïde, paragangliome, immunohistochimie.
de siège sous-glottique, intrathyroïdien et
variantes. Ces localisations partagent un
terrain et une histoire naturelle identiques
(atteinte féminine quasi-exclusive, évolution Références
en règle favorable après traitement) mais des
modes de présentation différents : masse
cervicale asymptomatique évoluant de lon-
[1] Hinojar AG, Prieto JR, Munoz E, Hinojar AA.
gue date dans la localisation thyroïdienne,
Relapsing paraganglioma of the inferior Laryngeal
signes compressifs cervicaux (stridor, dys-
paraganglion: case report and review of the littera-
phonie, dysphagie) dans l’atteinte laryngée
ture. Head & Neck 2002 ; 24 : 95-102.
inférieure.
Les paragangliomes laryngés inférieurs sont [2] Laguette J, Matias-Guiu X, Rosai J. Thyroid para-
généralement des tumeurs bénignes : aucun ganglioma: a clinicopathologic and Immunohistoche-
cas décrit de métastases, seul critère de mali- mical study of three cases. Am J Surg Pathol 1997 ;
gnité reconnu [1, 3, 4]. Le traitement est chirur- 21 : 748-53.
gical, sans récidive si l’exérèse est complète [3] Bizollon MH, Darreye G, Berger N. Paragangliome thy-
[1]. roïdien : à propos d’un cas. Ann Pathol 1997 ; 17 : 416-8.
En raison de sa rareté, le diagnostic est excep- [4] Kronz J, Argani P, Udelsman R, Silverberg L, Wes-
tionnellement évoqué devant un nodule thy- tra W. Paraganglioma of the thyroïd: two cases that
roïdien et peut donc être cause d’erreurs clarify and expand the clinical spectrum. Head & Neck
diagnostiques [2, 3]. Histologiquement, l’archi- 2000 ; 22 : 621-5.

388
Annales de pathologie (2009) 29, 154—156

CAS POUR DIAGNOSTIC

Un sarcome de la paroi colique exprimant


la desmine
A sarcoma of the colonic wall with desmin expression

Eric Lavoine a,b,∗, Isabelle Valo a,


Véronique Verriele a, Michel Bressolette c,
Gérard Bertrand b

a
Centre Paul-Papin, 2, rue Moll, 49000 Angers, France
b
Centre d’anatomie et de cytologie pathologiques, 2, rue de l’appentis,
BP 40428, 49004 Angers cedex 01, France
c
Clinique de l’espérance, 49000 Angers, France

Accepté pour publication le 25 septembre 2008


Disponible sur Internet le 13 mars 2009

Observation
Une femme de 83 ans était hospitalisée pour bilan de douleurs abdominales avec palpation
d’une tumeur de l’hypochondre droit. L’examen tomodensitométrique mettait en évidence
une tumeur pleine développée au contact de l’angle colique droit. La colonoscopie était
normale.
Une hémicolectomie droite était réalisée révélant une tumeur arrondie de
4,5 × 4 × 4 cm, blanc rosé, homogène à la coupe. Cette tumeur était bien limitée, non
encapsulée et développée dans la paroi colique au dépens de la musculeuse et du méso.
L’examen microscopique montrait une prolifération de cellules fusiformes mêlées à
des cellules pléomorphes, disposées le plus souvent en faisceaux plus ou moins intriqués.
Le fond était discrètement collagène sans inflammation ni nécrose. Les noyaux des cel-
lules tumorales étaient franchement atypiques, fusiformes, chromatiques et nucléolés. Il
existait de nombreuses mitoses (18 mitoses pour dix champs au fort grossissement). Dix
ganglions du mésocôlon étaient réactionnels sans métastase.
L’étude immunohistochimique révélait dans un premier temps une forte positivité iso-
lée de la desmine. La protéine S100, le CD117 (C-kit), le CD34, la h-caldesmone, la
myogénine, et l’actine musculaire lisse alpha n’étaient pas exprimés par les cellules
tumorales.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : elavoine.cacp49@wanadoo.fr (E. Lavoine).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.09.054
sarcome colique exprimant la desmine 155

Figure 1. Prolifération de cellules fusiformes avec des atypies Figure 2. Expression de la desmine (× 200).
cytonucléaires marquées (HES × 200). Desmin expression (× 200).
Proliferation of spindle cells with marked atypia (HES × 200).

Quel est votre diagnostic ?


156 E. Lavoine et al.

Diagnostic : liposarcome (LPS) dédifférenciés. D’autres sarcomes expriment parfois MDM2


ou CDK4 mais rarement (1—6 % des cas selon le type) :
dédifférencié
il peut s’agir de myxofibrosarcome, LMS, MFH, tumeur
Une étude complémentaire montrait une positivité de MDM2 maligne des gaines nerveuses périphériques, RMS embryon-
et CDK4 en immunohistochimie. La technique de PCR- naire et synovialosarcome [4]. Cela souligne l’importance
quantitative pratiquée sur un bloc en paraffine confirmait du contexte clinique et morphologique pour l’interprétation
la présence d’une forte amplification de ces deux gènes. de l’immunohistochimie et de la biologie moléculaire. La
Secondairement, l’examen attentif de la graisse péritumo- recherche d’expression de MDM2 et CDK4 pourrait avoir dans
rale révélait entre les adipocytes, la présence de cellules l’avenir des implications thérapeutiques si des inhibiteurs
atypiques et vacuolisées orientant vers le diagnostic. sélectifs de ces protéines étaient mis au point [4].
Le marquage exclusif d’un marqueur musculaire peut
faire envisager d’autres diagnostics ; en premier lieu, un sar-
come à différenciation musculaire : léiomyosarcome (LMS) Conclusion
ou rhabdomyosarcome (RMS). Cependant, l’expression seule
de la desmine n’est pas spécifique. Le diagnostic de LMS est Devant tout sarcome peu différencié de la cavité abdomi-
éliminé par l’absence d’expression de l’actine musculaire nale, il faut penser au LPS dédifférencié et ne pas être
lisse et surtout de la h-caldesmone, et le RMS par l’absence dérouté par l’expression seule de la desmine qui dans ce
d’expression de la myogénine qui est actuellement le mar- contexte, n’est pas spécifique. L’expression immunohisto-
queur de différenciation musculaire striée le plus spécifique chimique de MDM2 et CDK4 permet le plus souvent de poser
[1]. le diagnostic. Si le problème n’est pas résolu, il est préco-
La localisation tumorale doit faire évoquer une tumeur nisé d’effectuer une étude plus sensible et spécifique par
stromale gastro-intestinale (GIST). Cependant, la desmine FISH ou PCR quantitative.
n’est que rarement positive dans les GIST (moins de 5 %) qui
peuvent toutefois exprimer d’autres marqueurs musculaires
(actine musculaire lisse : 20—30 % ; h-caldesmone : 50—80 %). Remerciements
Elles expriment CD34 (60—70 %) et le CD 117 (C-kit) qui est
le marqueur diagnostique [2]. Les auteurs remercient le Professeur Jean-Michel Coindre
Devant un aspect de sarcome peu différencié, d’his- pour son avis diagnostique.
tiocytofibrome malin (MFH), de fibrosarcome ainsi que de
RMS ou de mésenchymome malin, il faut penser au LPS
dédifférencié. Les LPS dédifférenciés peuvent présenter Références
un contingent hétérologue notamment musculaire qui
peut induire en erreur d’autant plus que le contingent [1] Binh MB, Guillou L, Hostein I, Château MC, Collin F, Aurias
de LPS bien différencié peut manquer ou ne pas être A, et al. Dedifferentiated liposarcomas with divergent myo-
évident (toujours prélever et bien examiner le tissu adipeux sarcomatous differentiati on developed in the internal trunk:
a study of 27 cases and comparison to conventional dediffe-
péritumoral). L’expression de la desmine dans les LPS
rentiated liposarcomas and leiomyosarcomas. Am J Surg Pathol
dédifférenciés est un évènement relativement connu (44 %) 2007;31:1557—66.
[3], et ne doit pas dérouter le pathologiste Fig. 1 et 2. [2] Le Cesne A, Landi B, Bonvalot S, Monges G, Ray-Coquard
Les autres formes histologiques de LPS (myxoïdes et pléo- I, Bui Nguyen B, et al. Recommandations pour la prise en
morphes) sont exceptionnelles dans le tractus digestif et charge des tumeurs stromales gastro-intestinales. Ann Pathol
pour cette localisation, il faut envisager l’hypothèse d’une 2006;26:231—4.
métastase. [3] Hasegawa T, Seki K, Hasegawa F, Matsuno Y, Shimodo T,
Le diagnostic de LPS dédifférencié a été révo- Hirose T, et al. Dedifferentiated liposarcoma of retroperito-
lutionné par la détection immunohistochimique du produit neum and mesentery: varied growth patterns and histological
d’amplification des gènes MDM2 et CDK4. L’amplification de grades - A clinicopathologic study of 32 cases. Hum Pathol
2000;31:717—27.
ces deux gènes, présents sur la région q13-15 du chromo-
[4] Binh MB, Sastre-Garau X, Guillou L, de Pinieux G, Terrier P,
some 12, est très fréquente dans les LPS bien différenciés Lagacé R, et al. MDM2 and CDK4 immunostainings are useful
et dédifférenciés, MDM2 apparaissant plus sensible que CDK4 adjuncts in diagnosing well-differentiated and dedifferenciated
qui lui-même est plus spécifique [4], et peut être confirmée liposarcoma subtypes. A comparative analysis of 559 soft tis-
par des techniques de biologie moléculaire adaptées aux tis- sue neoplasms with genetic data. Am J Surg Pathol 2005;29:
sus fixés et inclus en paraffine comme la FISH ou la PCR 1340—7.
quantitative. Cette détection immunohistochimique permet [5] Sirvent N, Coindre JM, Maire G, Hostein I, Keslair F, Guillou L, et
de différencier les lipomes remaniés ou atypiques des LPS al. Detection of MDM2-CDK4 amplification by fluorescence in situ
bien différenciés, et de reclasser un certain nombre de sar- hybridization in 200 paraffin-embedded tumor samples: utility
comes peu différenciés ou de type MFH en LPS dédifférencié in diagnosing adipocytic lesions and comparison with immuno-
histochemistry and real time PCR. Am J surg Pathol 2007;31:
[4,5]. Cette distinction n’a pas qu’un intérêt académique :
1476—89.
le risque métastatique est en effet moindre pour les LPS
Annales de pathologie (2008) 28, 66—68

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une cause rare d’épanchement pleural


An unusual cause of pleural effusion

Patrick Saint-Blancard a,∗, Charles Soler b,


Joël Guigay c, Robert Le Vagueresse a,1

a
Service d’anatomie et cytologie pathologiques, hôpital d’instruction des armées-Percy,
101, avenue Henri-Barbusse, B.P. 406, 92141 Clamart cedex, France
b
Service de biologie, hôpital d’instruction des armées-Percy, 101, avenue Henri-Barbusse,
B.P. 406, 92141 Clamart cedex, France
c
Service de pneumologie, hôpital d’instruction des armées-Percy, 101, avenue
Henri-Barbusse, B.P. 406, 92141 Clamart cedex, France

Accepté pour publication le 25 novembre 2007


Disponible sur Internet le 19 mai 2008

Observation
Une femme de 68 ans consultait pour des douleurs thoraciques. La radiographie pulmo-
naire mettait en évidence la présence d’un épanchement pleural droit. Celui-ci a été
ponctionné. Les spots recueillis après cytocentrifugation du liquide montraient des cel-
lules rondes, de taille moyenne, au cytoplasme modérément abondant, contenant parfois
un pigment brunâtre pulvérulent de mélanine (coloration de Fontana—Masson positive,
coloration de Perls négative) (Figs. 1 et 2). Leur noyau apparaissait arrondi, excentré,
régulier, à chromatine fine, parfois fortement nucléolé. Un certain degré d’anisocaryose
était observé, de même que la présence d’inclusion cytoplasmique intranucléaire. Il n’y
avait pas de cellules bi- ou multinucléées. L’examen en histologie conventionnelle du
culot de liquide retrouvait ces cellules au cytoplasme éosinophile, parfois pigmenté en
brun foncé. Leur noyau était augmenté de volume, arrondi, parfois aux contours irré-
guliers, nucléolé et à chromatine dispersée, contenant parfois une vacuole optiquement
vide. Quelques mitoses étaient notées. Il existait également des cellules mésothéliales,
ainsi que des macrophages. L’étude immunohistochimique sur coupes paraffinées confir-
mait ce polymorphisme cellulaire avec des éléments atypiques exprimant la vimentine, la
protéine S100 (PS100), l’anticorps anti-HMB45, l’anticorps antimelan A, mais pas la cyto-
kératine (KL1) (Fig. 3). Les cellules mésothéliales étaient repérées par un marquage par la
cytokératine et la vimentine, alors que les macrophages étaient marqués par l’anticorps
anti-CD68.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : psbpercy@yahoo.fr (P. Saint-Blancard).
1 Auteur décédé.

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.11.002
Métastase pleurale d’un mélanome 67

Figure 1. Liquide pleural : cellules malignes mélaniques (colora- Figure 3. Culot de liquide pleural : marquage cytoplasmique par
tion de Papanicolaou, × 400). l’anticorps anti-Melan A (hématoxyline et AEC, × 630).
Pleural effusion: melanin malignant cells (Papanicolaou stain, Pleural effusion in paraffin embedded cellblock material: cytoplas-
× 400). mic stain for anti-Melan A antibody (hematoxylin and AEC, × 630).

Figure 2. Liquide pleural : pigment mélanique dans le cytoplasme


des cellules tumorales (coloration de Fontana, × 400).
Pleural effusion: cytoplasmic melanin pigment cells (Fontana—
Masson stain, × 400).

Quel est votre diagnostic ?


68 P. Saint-Blancard et al.

Diagnostic : métastase pleurale d’un l’immunohistochimie sont alors des aides précieuses dans
les situations difficiles, surtout lorsque le pigment n’est
mélanome malin
pas très abondant et/ou très fin [4]. La coloration de
Il s’agit d’une localisation pleurale d’un mélanome malin. Fontana—Masson permet de mettre en évidence les grains
Notre patiente avait été opérée deux ans auparavant d’un même pulvérulents de mélanine. L’analyse immunohistochi-
mélanome de l’épaule droite. Le potentiel métastatique mique utilisant cytokératine, vimentine, HMB45, PS100 et
du mélanome est très élevé. Tous les organes peuvent CD68 est le panel minimum requis [4]. L’étude immunohis-
être atteints. La présence de cellules mélaniques dans les tochimique est possible sur des spots de cytocentrifugation
séreuses n’échappe pas à cette règle. La localisation aux [2]. Plus récemment de nouveaux anticorps sont apparus sur
séreuses des mélanomes arrive en dixième position des le marché, comme Mart-1 et melan A. Ils ont été utilisés sur
décès par cancer chez l’homme (loin derrière les cancers coupes congelées et sur prélèvements inclus en paraffine
pulmonaires) et en douzième chez la femme (loin derrière [2,5,6]. Leur intérêt paraît très grand dans le diagnostic de
les cancers mammaires) [1]. Elle représente moins d’1 % des métastase de mélanome. Leur sensibilité dans les tumeurs
cas de tumeurs pleurales malignes secondaires [1]. d’origine mélanique paraît établie. Pour certains, leur sen-
Généralement, il peut être assez aisé de reconnaître sibilité est telle qu’ils apparaissent comme des anticorps
une cellule tumorale, car elle présente des atypies cyto- majeurs dans le diagnostic de métastase de mélanome,
nucléaires caractéristiques : surtout lorsque celui-ci est difficile à établir. Le diagnos-
• une anisocytose ; tic différentiel peut parfois être trompeur avec une lésion
• une élévation du rapport nucléocytoplasmique ; mésothéliale bénigne ou maligne (dont l’hyperplasie méso-
• une anisocaryose ; théliale atypique), une métastase d’un adénocarcinome,
• un noyau aux contours anguleux ; voire avec celui très égarant d’histiocytose pleurale nodu-
• une nucléolation, avec des nucléoles irréguliers ; laire.
• une activité mitotique notable et des mitoses anormales. Notre observation rappelle que le diagnostic de méta-
stase pleurale de mélanome est un piège et qu’il est le plus
C’est surtout le regroupement de cellules tumorales qui souvent difficile à évoquer. Il doit être considéré après dis-
attire l’attention. Parfois, c’est la localisation insolite de cussion avec les cliniciens sur les antécédents des patients.
cellules qui permet de poser le diagnostic. L’aspect cytologique peut être déroutant, car les cellules
Cependant, une cellule tumorale peut avoir un tumorales ne sont pas toujours typiques et même difficiles
aspect non inquiétant et même simuler les cellules de à différencier des autres cellules présentes dans le liquide.
l’environnement normal (cellules mésothéliales, macro- Dans ce contexte, il est judicieux d’inclure le culot du
phages) situation rencontrée dans 12,5 % des cas étudiés liquide en paraffine, et de réaliser une étude immunocy-
par Beaty et al. [2]. C’est le cas des cellules tumorales tochimique pouvant grandement aider au diagnostic.
d’origine mélanique qui peuvent prendre un aspect parfois
même plasmocytoïde, et dont le caractère isolé peut être
déroutant. Ainsi, dans le cas des épanchements malins, les Références
principales anomalies cytologiques devant faire évoquer
une origine mélanique sont les suivantes : [1] Adotti F, Bodiguel V, Masset F. Aspect cytomorphologique
• le manque de cohésion cellulaire ; des épanchements des séreuses. Rev Fr Lab 1998;300:
• un grand noyau excentré avec un gros nucléole ; 61—5.
• une multinucléation ; [2] Beaty MW, Fetsch P, Wilder AM, Marincola F, Abati A. Effusion
• une vacuolisation cytoplasmique ; cytology of malignant melanoma. A morphology and immuno-
• une inclusion cytoplasmique intranucléaire ; chemical analysis including application of the MART-1 antibody.
Cancer 1997;81(1):57—63.
• une macrophagie cellulaire ;
[3] Walts AE. Malignant melanoma in effusions: a source of false-
• la présence de pigment mélanique intracytoplasmique.
negative cytodiagnosis. Diagn Cytopathol 1986;2:150—3.
Mais ces anomalies sont le plus souvent retrouvées sur [4] Longatto Filho A, de Carvalho LV, Santos G, da C, Oyafuso MS,
une minorité de cellules [3]. Dans ces cas, le diagnostic Lombardo V, et al. Cytologic diagnosis of melanoma in serous
s’avère particulièrement difficile, le recours à l’étude du effusions. A morphologic and immunocytochemical study. Acta
Cytol 1995;39:481—4.
culot du liquide après centrifugation et inclusion en paraf-
[5] Busam KJ, Chen YT, Old LJ, Stockert E, Iversen K, Coplan KA, et
fine apparaît très utile. En effet, réalisé dans des conditions al. Expression of melan-A (mart-1) in benign melanocytic nevi
idéales, il évite d’avoir des altérations cellulaires, comme and primary cutaneous malignant melanoma. Am J Surg Pathol
on pourrait en rencontrer après une longue conservation 1998;22:976—82.
du liquide et après cytocentrifugation. Surtout, il permet [6] Jungbluth AA, Busam KJ, Gerald WL, Stockert E, Coplan KA, Iver-
de recueillir certainement plus de matériel et de réali- sen K, et al. A 103. An antimelan-A monoclonal antibody for the
ser plus aisément l’étude immunohistochimique sur coupes detection of malignant melanoma in paraffin-embedded tissues.
paraffinées, avec de nombreux anticorps. L’histochimie et Am J Surg Pathol 1998;22:595—602.
Annales de pathologie (2009) 29, 64—66

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une dermatose papuleuse rare


A rare papulous dermatosis

Fadoua Fraoua a, Ahlem Lahmar-Boufaroua b,∗,


Wafa Rekik b, Carole Ben Fadhel b,
Saadia Bouraoui b, Sabeh Mzabi b

a
Service de dermatologie, hôpital régional Khereddine, Tunis, Tunisie
b
Service d’anatomie et de cytologie pathologique, hôpital Mongi-Slim, Sidi Daoued
2046, La Marsa, Tunisie

Accepté pour publication le 17 septembre 2008


Disponible sur Internet le 3 février 2009

Observation
Une jeune fille âgée de 16 ans nous a été adressée pour une dermatose peu prurigineuse des
membres et du tronc. L’éruption était apparue depuis un an, sans cause déclenchante, en
particulier médicamenteuse. Elle était faite de papules en tête d’épingle, de 1 mm de dia-
mètre, translucides, hypopigmentées, organisées en plaques, arrondies, bien limitées, de
taille variant de 4 à 7 cm de grand axe. Cette éruption intéressait les membres supérieurs,
le cou, le tronc et la racine des cuisses. Aux avant-bras, certaines papules commençaient à
s’affaisser laissant place à des macules pigmentées. Le reste de l’examen cutanéomuqueux
et viscéral était normal.
La biopsie d’une papule montrait la présence dans le derme papillaire d’un infiltrat
composé de lymphocytes, d’histiocytes et de cellules épithéloïdes associés à de rares cel-
lules géantes (Fig. 1 et 2). Cet infiltrat s’organisait en nodules bien limités, occupant
quatre à cinq papilles dermiques, encerclés latéralement par deux crêtes épidermiques
allongées. L’épiderme sus-jacent, focalement parakératosique et discrètement papilloma-
teux, était aminci du fait d’une couche granuleuse réduite et comportait une exocytose
modérée essentiellement lymphocytaire.
Devant l’absence de gêne fonctionnelle ou esthétique, aucun traitement n’a été pro-
posé.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : aboufaroua@yahoo.fr (A. Lahmar-Boufaroua).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.09.052
Une dermatose papuleuse rare 65

Figure 1. Infiltrat inflammatoire du derme papillaire occupant Figure 2. L’infiltrat est lymphohistiocytaire, épithéloide et gigan-
trois papilles dermiques et délimité par deux crêtes épidermiques. tocellulaire sans nécrose caséeuse (HEx250).
L’épiderme est atrophique et parakératosique (HEx40). Lymphohistiocytic infiltrate with epitheloid and giant cells without
Parakeratosis and atrophic epidermis overlying a sharply circum- necrosis (HEx250).
scribed infiltrate (HEx40).

Quel est votre diagnostic ?


66 F. Fraoua et al.

Diagnostic : lichen nitidus généralisé une acanthose sont observées, contrairement à la para-
kératose et à l’atrophie épidermique du lichen nitidus.
Le lichen nitidus est une dermatose chronique décrite pour Les histiocytes et les cellules épithélioïdes et géantes
la première fois par Pinkus en 1907. C’est une pathologie sont absentes. Le lichen nitidus, du fait de cet infil-
rare et plus particulièrement dans sa forme généralisée. Son trat tuberculoïde qui le caractérise, doit figurer dans la
étiologie est inconnue. liste étiologique des infiltrats tuberculoïdes dermiques.
Le lichen nitidus généralisé (LNG) atteint préférentiel- L’évolution peut être spontanément résolutive après
lement les enfants et les adultes jeunes sans prédilection quelques années, laissant des cicatrices pigmentées où
raciale [1]. Le tableau clinique est typique. Il consiste en l’examen histologique ne révèle que du pigment mélanique
une éruption faite de petites papules, éparses, plates ou [1,3].
acuminées, le plus souvent blanchâtres et brillantes mais Le LNG est une dermatose sans signe fonctionnel autre
conservant parfois la couleur de la peau normale [2,3]. qu’un prurit inconstant. Compte tenu de la rareté de cette
D’autres formes cliniques plus rares ont été décrites : la affection, de son évolution parfois spontanément favorable
forme vésiculeuse et hémorragique, palmoplantaire, perfo- et de l’absence d’études thérapeutiques de bonne qua-
rante, folliculaire et linéaire ou associée à une atteinte de lité, les traitements proposés ne sont qu’empiriques et
la muqueuse buccale [1,2]. d’efficacité incertaine. La corticothérapie locale ou géné-
Toutes ces formes cliniques ont en commun une image rale, les rétinoïdes et les antihistaminiques sont préconisés.
histologique caractéristique. Elle consiste en un infil- La PUVA et l’UVB thérapie sont indiqués dans les formes très
trat cellulaire du derme papillaire fait de lymphocytes, gênantes [5].
d’histiocytes, de cellules épithélioïdes et de cellules
géantes, réalisant parfois de véritables granulomes tuber-
culoïdes mais sans nécrose caséeuse. Cet infiltrat occupe Références
quatre ou cinq papilles dermiques et adhère à un épiderme
atrophique et parakératosique. Deux crêtes épidermiques [1] Arizaga AT, Gaughan MD, Bang RH. Generalized lichen nitidus.
allongées le délimitent latéralement [2,4]. Clin Exp Dermatol 2002;27:115—7.
L’immunofluorescence directe décèle des dépôts de [2] Thibaudeau A, Maillard H, Croué A, Belperron P, Avenel
fibrine mais sans immunoglobulines. L’étude immunohisto- Audran M, Verret JL. Lichen nitidus palmoplantaire. Une cause
chimique montre un excès de cellules CD4+ par rapport aux rare de kératodermie palmoplantaire. Ann Dermatol Venereol
2004;131:822—4.
cellules CD8+ cytotoxiques. Les cellules de Langerhans sont
[3] Al-Mutairi N, Hassanein A, Nour-Eldin O, Arun J. Generalized
rares [2]. L’étude ultrastructurale montre des anomalies lichen nitidus. Pediatr Dermatol 2005;22:158—60.
essentiellement épidermiques avec un œdème intracellu- [4] Mihara M, Nakayama H, Shimao S. Lichen nitidus: a histo-
laire et une diminution du nombre de desmosomes. La logic and electron microscopic study. J Dermatol 1991;18:
lamina densa peut être interrompue ou dédoublée [4]. 475—80.
Le diagnostic différentiel histologique se pose avec le [5] Kim YC, Shim SD. Two cases of generalized lichen nitidus treated
lichen plan même si les deux pathologies peuvent coexis- successfully with narrow-band UV-B phototherapy. Int J Derma-
ter [3]. Dans le lichen plan, une orthohyperkératose et tol 2006;45:615—7.
Annales de pathologie (2009) 29, 142—144

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une encéphalite fatale


A fatal encephalitis

Naourez Gouiaa a,∗, Rim Kallel a, Ines Samet a,


Ibtissem Bahri a, Fatma Cheikh Rouhou b, Ali Ayadi b,
Saloua Makni a,b, Tahya Sellami Boudawara a

a
Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologique, CHU Habib Bourguiba,
avenue El Ferdaouss, 3029 Sfax, Tunisie
b
Laboratoire de parasitologie, CHU Habib Bourguiba, Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 31 mars 2008


Disponible sur Internet le 13 mars 2009

Observation
Un homme âgé de 45 ans, hypertendu connu, avait présenté 12 heures avant son admis-
sion une hypertension intracrânienne avec céphalées intenses et vomissements ; six heures
après, étaient survenus des troubles de langage avec hémiplégie gauche ; le malade avait
consulté en urgence, un accident vasculaire cérébral hémorragique avait été envisagé
compte tenu de ses antécédents. L’évolution était rapidement progressive marquée par
l’installation d’un coma trois heures après son admission ; l’imagerie cérébrale objectivait
un hématome du lobe frontal droit avec des zones hypodenses du même lobe ; l’hémisphère
gauche comportait également quelques microfoyers hypodenses d’allure nécrotique au
niveau du lobe pariétal (Fig. 1). Une évacuation de l’hématome avec biopsie cérébrale a
été réalisée. Les prélèvements adressés étaient en grande partie hémorragiques avec pré-
sence d’un petit fragment de tissu cérébral nécrosé, comportant des micro-organismes
ronds, à noyau excentré pâle vésiculeux, avec un nucléole proéminent (Fig. 2) ; ces
micro-organismes étaient colorés par le PAS et la coloration de Grocott. L’infiltrat inflam-
matoire était modéré et comportait de rares lymphocytes et polynucléaires neutrophiles.
La radiographie thoracique était normale et il n’y avait pas de lésion cutanée à l’examen
clinique. L’évolution était rapidement défavorable, le malade décédait deux jours après
l’intervention.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : naourezgouiaa@yahoo.fr (N. Gouiaa).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.03.009
Une encéphalite fatale 143

Figure 2. Tissu cérébral nécrosé contenant des microorganismes


à noyau pale vésiculeux muni d’un nucléole proéminent avec pré-
sence de quelques cellules inflammatoires polymorphes (HE × 1000)
Organisms with a pale vesicular nucleus and a prominent nucleolus
are seen in necrotic brain tissue with scattered inflammatory cells
(HE × 1000).

Figure 1. Hématome du lobe frontal droit entouré de foyers hypo-


denses ; microfoyers hypodenses au niveau du lobe pariétal gauche.
Cerebral CT: hematoma in the right frontal lobe surrounded by
hypodense foci; hypodense foci in the left parietal lobe.
Quel est votre diagnostic ?
144 N. Gouiaa et al.

Diagnostic proposé : encéphalite hématogène à partir d’un premier site infectieux cutané
ou pulmonaire [1,5]. Le tableau clinique est d’installation
amibienne
plutôt sub-aiguë et son évolution est chronique. La topo-
graphie lésionnelle est plus focale sans prédominance au
L’encéphalite amibienne est une infection humaine fatale, niveau du cortex antérieur. Les parasites sont plus volumi-
rarement décrite [1]. Sa fréquence est sous estimée car neux et ont typiquement une disposition périvasculaire ; ils
la plupart des cliniciens et pathologistes ne sont pas sont présents sous forme mobile et kystique ; ils peuvent
encore familiarisés avec cette pathologie [2]. Les princi- être confondus avec les macrophages mais le caractère
pales espèces amibiennes neuropathogènes sont Naegleria vésiculeux de leur noyau et la présence d’éventuels pseudo-
fowleri, Acanthamoeba et Balamuthia ; ce sont des para- podes utiles pour leur déplacement sont caractéristiques des
sites thermophiles, à distribution cosmopolite dans l’eau et amibes [3]. Le tissu cérébral infesté est plus inflammatoire
dans le sol ; ils existent sous une forme flagellée mobile ou incluant des cellules essentiellement mononuclées [4].
sous une forme kystique [3]. Dans notre observation, le caractère fulminant rapide-
L’espèce N. fowleri atteint les sujets immunocompétents ment fatal de la maladie, la topographie lésionnelle à
et entraîne la méningo-encéphalite amibienne primaire l’imagerie médicale et l’absence de forme kystique plaide
aiguë, fulminante [4] ; la symptomatologie clinique initiale en faveur de N. fowleri comme agent causal.
comporte un syndrome méningé, de la fièvre, des vomis- Pour le traitement, N. fowleri est sensible à l’ampho-
sements et des céphalées frontales intenses ; l’évolution téricine B. Les autres genres d’amibes sont plutôt sensibles
est typiquement rapide vers le coma puis le décès à la 5-fluorocytosine, au fluconazole et aux macrolides.
[3]. L’imagerie médicale est caractérisée par des lésions Malgré ces nouveaux médicaments, la méningo-
nécrotico-hémorragiques bilatérales prédominant au niveau encéphalite amibienne demeure grave, voire mortelle, du
du cortex antérieur et particulièrement au niveau de la face fait de la difficulté diagnostique et du retard à la mise en
orbitaire des lobes frontaux et olfactifs [4]. Cette topogra- œuvre du traitement adapté [1—3].
phie lésionnelle s’explique par les propriétés du parasite :
en effet, celui-ci pénètre le neuroépithélium olfactif, migre
le long du trajet du nerf olfactif et traverse la lame cri- Références
blée vers le cortex antérieur. Le diagnostic positif repose
sur la présence de trophozoïtes amibiens, ronds ou ovoïdes [1] Alsam S, Sissons J, Jayasekera S, Khan AN. Extracellular protease
de 15—25 ␮m de diamètre, à noyau excentré, pâle et vési- of Acanthamoeba castellanii (encephalitis isolate belonging to
culeux muni d’un nucléole proéminent ; la forme kystique T1 genotype) contribute to increased permeability in an in vitro
est habituellement absente [4]. Dans la plupart des cas, ces model of the human blood-brain barrier. J Infect 2005;51:150—6.
trophozoïtes sont mis en évidence dans des prélèvements [2] Schuster FL, Visvesvara GS. Opportunistic amaebae: challenges
cérébraux autopsiques du fait du caractère rapidement fatal in prophylaxis and treatment. Drug Resist Updat 2004;7:41—51.
de la maladie ; le tissu cérébral infesté est habituelle- [3] Schuster FL, Visvesvara GS. Free-living amoebae as opportunis-
ment nécrosé, peu inflammatoire incluant quelques cellules tic and non-opportunistic pathogens of humans and animals. Int
J Parasitol 2004;34:1001—27.
inflammatoires polymorphes [4].
[4] Turner G, Scaravilli F. Parasitic and fungal diseases, chapter 2.
Les infections par les espèces Acanthamoeba et Bala- In: Graham DI, Lantos PL. Greenfield’s Neuropathology. 7th ed;
muthia surviennent plutôt chez des sujets immunodéprimés 2002, p. 108—9.
et provoquent une encéphalite amibienne granulomateuse. [5] Blaschitz M, Köhsler M, Aspöck H, Walochnik J. Detection of a
Le parasite exprime des protéinases ; il diffuse vers le cer- serine proteinase gene in Acanthamoeba genotype T6 (Amoebo-
veau et éventuellement vers les autres viscères par voie zoa: Lobosea). Exp Parasitol 2006;114:26—33.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 149-51

Une étiologie exceptionnelle de hernie Cas


pour diagnostic
inguinale
An exceptional cause of inguinal hernia

Imen Chtourou, Ibticem Bahri Zouari, Sameh Hammami, Naourez Gouiaa,


Abdelmajid Khabir, Lobna Ayadi, Tahya Sellami Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques du CHU Habib Bourguiba, 3029 Sfax, Tunisie.

Chtourou I, Bahri Zouari I, Hammami S, Gouiaa N, Khabir A, Ayadi L et al. Étiologie tumorale excep-
tionnelle de hernie inguinale. Ann Pathol 2007 ; 27 : 149-51.

Observation

Mme MA âgée de 57 ans consultait pour


une grosse tuméfaction de la région
inguinale gauche évoluant depuis 5 ans
non douloureuse. À l’examen clinique,
la tuméfaction siégeait au pli inguinal
et en partie dans la région périnéale ;
elle était légèrement sensible, mobile
et irréductible. Le diagnostic préopéra-
toire était celui d’une hernie inguinale.
En peropératoire, il s’agissait d’une volu-
mineuse masse d’allure kystique siégeant
dans les tissus mous. Une exérèse chi- FIG. 1. — Tumeur riche en vaisseaux sanguins de tailles
variées (HE × 100).
rurgicale de la masse tumorale était réa-
lisée. À l’étude macroscopique, la tumeur FIG. 1. — Numerous blood vessels with variable size
(HE × 100).
était bien limitée mesurant 15 cm de
grand diamètre ; à la coupe, il s’agissait
d’un kyste multiloculaire à contenu liqui-
dien ; les locules mesuraient 0,3 à 8 cm
de diamètres ; certaines petites cavités
étaient à contenu hémorragique. His-
tologiquement, la tumeur était formée
par une prolifération de densité légère
ou modérée faite de cellules rondes ou
fusiformes à cytoplasme éosinophile mal
délimité et à noyau rond ou oval régu-
lier sans atypies ni mitoses ; ces cellules
étaient mêlées à des cellules géantes mul-
tinucléées éparses ; le stroma était par-
fois collagénisé ou myxoïde ; la tumeur
était richement vascularisée par des vais- FIG. 2. — Prolifération de cellules mononucléées et multi-
seaux sanguins de tailles variées (figure 1) ; nucléées bordant des espaces pseudovasculaires
il existait aussi plusieurs espaces pseudo- (HE × 200).
vasculaires remplis d’une substance FIG. 2. — Proliferation of mononucleated and multinu-
éosinophile amorphe et bordés de cel- cleated cells surrounding pseudovascular spaces
(HE×200). Accepté pour publication
lules mononucléées et multinucléées
le 25 avril 2006
(figure 2) ; l’exérèse chirurgicale était
complète mais économique (0,2 cm). Une vimentine, CD34 et CD99 de façon dif- Tirés à part :
étude immunohistochimique était réa- fuse, irrégulièrement positives pour bcl2 I. Bahri Zouari,
lisée pour les anticorps anti-vimentine, et négatives pour les autres anticorps. voir adresse
CD68, bcl2, CD34, facteur VIII, CD99 et en début d’article.
desmine ; les cellules mononucléées et Quel est votre diagnostic ? e-mail :
multinucléées étaient positives pour la ibticem_bahri@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 149


Imen Chtourou et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 149-51

Diagnostic : limitation de la lésion, la disposition « tour-


Angiofibrome à cellules géantes billonnante » des cellules fusiformes ainsi que
la présence possible de macrophages spu-
de la région inguinale gauche meux, de dépôts d’hémosidérine et de cel-
lules inflammatoires et l’absence d’espaces
pseudo-vasculaires bordés par les cellules
L’angiofibrome à cellules géantes (AFCG) tumorales [6]. Par ailleurs, dans l’AFCG, les
est une tumeur bénigne caractérisée par des cellules multinucléées ont souvent un
aspects morphologiques intermédiaires entre aspect morphologique particulier dit « flo-
le fibroblastome à cellules géantes (FBCG) et ret like » alors que celles de l’histiocytofi-
la tumeur fibreuse solitaire (TFS) ; il consti- brome sont de type Touton ou à corps
tue une entité clinico-pathologique récente étranger [4, 6]. Enfin, l’hyperplasie épider-
initialement décrite dans la région orbitaire mique, presque constante en regard de
en 1995 par Dei Tos et al. [1]. Par la suite, des l’histiocytofibrome, constitue un élément
localisations extra orbitaires de l’AFCG ont important en faveur de son diagnostic. L’étude
été rapportées dans la littérature : dans la immunohistochimique est utile pour résou-
région axillaire, la parotide [2], le retropé- dre les problèmes de diagnostic ; en effet,
ritoine, la vulve [3], inguinale [4], sub man- dans l’AFCG, les cellules mononucléées et
dibulaire, para scapulaire [5]… L’AFCG de multinucléées sont positives de façon carac-
localisation extra-orbitaire se voit chez l’adulte téristique pour la vimentine, CD34, CD99 et
entre 18 et 81 ans (âge moyen : 45 ans) avec moins fréquemment pour bcl2 [1, 5] alors que,
une prédominance féminine [3] ; notre dans l’histiocytofibrome la positivité pour
patiente est âgée de 57 ans. Cliniquement, il se CD34 n’est que rare et focale [6]. À côté de
présente sous forme d’une masse lentement l’histiocytofibrome sous-cutané, le diagnos-
évolutive parfois douloureuse [2] ; dans notre tic différentiel de l’AFCG peut se poser avec
observation, la tumeur évoluait depuis cinq le FBCG et la TFS en raison des similitudes
ans. L’aspect macroscopique est celui d’une histologiques et immunohistochimiques (posi-
tumeur souvent bien limitée mais non encap- tivité pour CD34) entre ces trois tumeurs [4, 7].
sulée [1, 3]. Contrairement à l’AFCG orbitaire Cependant, le FBCG se voit presque exclusi-
qui est toujours de petite taille, ne dépas- vement chez l’enfant ; en plus, il s’agit plutôt
sant pas 3 cm [1], les tumeurs de siège extra- d’une tumeur mal limitée avec une densité
orbitaire tendent à être plus volumineuses cellulaire et une vascularisation typiquement
et peuvent atteindre 10,8 cm de grand diamè- moins importante que celle de l’AFCG [4].
tre [4] ; dans notre observation, la tumeur Quant à la TFS, elle est souvent de localisa-
était volumineuse mesurant 15 cm de grand tion pleurale mais peut siéger en dehors
diamètre. À la coupe, des remaniements de la plèvre ; à l’histologie, contrairement à
hémorragiques et/ou kystiques peuvent se voir l’AFCG, les espaces pseudo-vasculaires et les
donnant l’aspect d’un lymphangiome kystique cellules géantes multinucléées sont absents
[5] comme dans notre observation. À l’histolo- [4, 7]. Le traitement de l’AFCG consiste en
gie, la tumeur est formée par une prolifération l’exérèse chirurgicale, et l’évolution est favora-
de densité cellulaire variable faite de cellu- ble sans récidive locale après un suivi de 7 à
les rondes ou fusiformes dans un stroma 32 mois [2, 3]. Sur le plan histogénétique, il
collagénisé ou myxoïde mêlées à des cellu- a été suggéré que l’AFCG, le FBCG et la TFS
les géantes multinucléées avec présence de auraient une histogénèse commune à partir
nombreux vaisseaux sanguins et d’espaces des cellules dendritiques interstitielles posi-
pseudo-vasculaires ou angiectoïdes souvent tives pour CD34 [4]. Sonobe H et al. ont mis
bordés de cellules mono et multinucléées en évidence une anomalie du chromosome 6
[2, 3]. Le diagnostic différentiel de l’AFCG se dans un cas d’AFCG de l’orbite qui n’a jamais
pose essentiellement avec l’histiocytofi- été rapportée auparavant dans le FBCG et la
brome sous-cutané également formé par TFS ; ils ont alors proposé l’individualisation
une prolifération de cellules plus ou moins
de l’AFCG comme une entité à part [7] ;
fusiformes qui peuvent être mêlées à des cel-
cependant, des études génétiques supplé-
lules géantes multinucléées d’autant plus que
mentaires semblent être nécessaires pour
l’histiocytofibrome, comme l’AFCG, peut être
préciser s’il existe une aberration chromo-
riche en vaisseaux sanguins donnant un
somique vraiment spécifique de l’AFCG. ■
aspect « hémangiopericytoma — like » [6].
Cependant, il existe quelques critères de
distinction favorisant le diagnostic de l’his- Key words: angiofibroma, soft tissue tumors.
tiocytofibrome en particulier la mauvaise Mots-clés : angiofibrome, tumeurs de tissus mous.

150
Une tumeur inguinale rare

Références [4] Sigel JE, Fisher C, Vogt D, Goldblum JR. Giant cell
angiofibroma of the inguinal region. Ann Diagn Pathol
2000 ; 4 : 240-4.
[1] Dei Tos AP, Fletcher CD, Seregard S, Calonje E, [5] Mikami Y, Shimizu M, Hirokawa M, Manabe T.
Chan JK. Giant cell angiofibroma. A distinctive orbital extraorbital giant cell angiofibromas. Mod Pathol
tumor in adults. Am J Surg Pathol 1995; 19 : 1286-93. 1997 ; 10 : 1082-7.
[2] Thomas R, Banerjee SS, Eyden Bl, Shanks JH, Bisset [6] Weyers W, Mentzel T, Kasper RC, Tosti A, Lorizzo
DL, Hunt R et al. A study of four cases of extra-orbital M, Zelger B et al. Fibrous, fibrohistiocystic and histio-
giant cell angiofibroma with documentation of some cystic tumours. Le-boit PE, Burg G, Weedon D,
unusual features. Histopathology 2001 ; 39 : 390-6. Sarasain A (Eds.): World Health Organization Clas-
[3] Guillou L, Gebhard S, Coindre JM. Orbital and extra- sification of Tumours. Pathology and Genetics of Skin
orbital giant cell angiofibroma: a giant cell-rich variant Tumours. Lyon: IARCPress: Lyon 2006.
of solitary fibrous tumor? Clinicopathologic and [7] Sonobe H, Iwata J, Komatsu T, Fukushima A,
immunohistochemical analysis of a series in favor of a Hayashi N, Moriki T et al. A giant cell angiofibroma
unifying concept. Am J Surg Pathol 2000; 24 : 971-9. involving 6q. Cancer Genet Cytogenet 2000 ; 116 : 47-9.

151
Ann Pathol 2007 ; 27 : 327-328

Une exophtalmie d’étiologie Cas


pour diagnostic
inhabituelle chez un sujet âgé
An unusual etiology of exophthalmia in an old man

Ilhem Bettaïeb, Amina Mekni, Khadija Bellil, Khaled Zitouna, Selma Bellil, Slim Haouet,
Nidhameddine Kchir

Service d’Anatomie Pathologique, Hôpital la Rabta. 1007 Bab Saadoun, Tunis, Tunisie.

Bettaïeb I, Mekni A, Bellil K, Zitouna K, Bellil S, Haouet S et al. Une exophtalmie d’étiologie inhabituelle
chez un sujet âgé. Ann Pathol 2007 ; 27 : 327-328.

Observation

Un homme âgé de 75 ans, sans antécé-


dents pathologiques particuliers, consul-
tait pour une exophtalmie unilatérale
droite. L’examen montrait une exoph-
talmie droite irréductible et non dou-
loureuse avec limitation nette des
mouvements oculaires et une acuité
visuelle de 6/10 de l’œil droit sans correc- FIG. 1. — Prolifération tumorale densément cellulaire
tion. L’examen ORL révélait une néofor- occupant le chorion de la muqueuse nasosinusienne. Notez
mation rouge violacée de la fosse nasale la présence de pseudorosettes (HE × 100).
droite. L’examen du fond d’oeil montrait FIG. 1. — Cellular tumour beneath the epithelium of the
un oedème papillaire. Les radiographies nasal cavity with pseudorosettes (HE ×100).
du crâne et des sinus montraient un
comblement de toutes les cavités
éthmoïdo-naso-sinusiennes du côté
droit. L’IRM visualisait un processus
expansif des fosses nasales avec exten-
sion éthmoïdo-orbitaire droite. Une
biopsie de la néoformation au niveau
des fosses nasales était pratiquée. L’exa-
men histologique montrait une prolifé-
ration tumorale densément cellulaire,
occupant le chorion de la muqueuse
nasosinusienne et respectant l’épithé- FIG. 2. — Cellules tumorales pléomorphes (HE × 400).
lium de surface (figure 1). Elle était faite
FIG. 2. — Pleomorphic tumor cells (HE ×400).
de nappes de cellules assez monomor-
phes de taille petite à moyenne, munies
d’un noyau rond souvent hyperchroma- la synaptophysine, le HMB45, la myogé-
tique et d’un cytoplasme peu abondant. nine et la desmine montrait une positi-
Les figures de mitose étaient présentes. vité intense et focale des cellules Accepté pour publication
Parfois, on notait la présence de grandes tumorales à la NSE, à la PS100 et à la chro- le 30 novembre 2006
cellules rondes associées à des pseudo-
mogranine et leur négativité pour les
rosettes (figure 2). L’étude immunohisto- Tirés à part : A. Mekni,
autres anticorps testés.
chimique utilisant un panel d’anticorps 7 Rue Moncef Bey, Men-
dirigés contre la neuron specific enolase zeh 7, 2091 Tunis, Tunisie.
(NSE), la PS100, la chromogranine A, le Quel est votre diagnostic ? e-mail :
CD20, le CD3, le Bcl2, les cytokératines, aminamekninouira@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 327


Ilhem Bettaïeb et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 327-328

Diagnostic : chimique est évocateur : les cellules tumo-


Esthésioneuroblastome olfactif rales expriment la NSE (100 %), la protéine
S100 (80 %), la synaptophysine (85 %), la
chromogranine A (70 %) et les neurofila-
L’esthésioneuroblastome (ENB) est une ments (50 %). Cette positivité est variable
tumeur neuroectodermique maligne rare avec la CK (33 %) et l’EMA (40 %). En effet,
des fosses nasales, développée aux dépens les marqueurs épithéliaux sont exprimés
de l’épithélium olfactif. Elle représente 3 % dans la forme neuroendocrine carcinoma
de l’ensemble des tumeurs malignes de like et sont négatifs dans la forme neuro-
cette région [1]. Depuis sa première des- blastique. La négativité de la GFAP, la myo-
cription par Berger en 1924 sous le terme globine, la desmine, la vimentine et le MIC-
d’esthésioneuroépithéliome olfactif [2], des 2 permet d’écarter les autres diagnostics
séries limitées ont été rapportées dans la lit- [3, 4]. L’aspect ultrastructural caractéristique
térature reflétant les difficultés du diagnos- met en évidence des grains neurosécrétoi-
tic positif. L’ENB touche aussi bien l’homme res, des prolongements neuritiques et des
que la femme et survient de 2 à 90 ans avec microtubules [4]. La cytométrie de flux
un âge moyen de 45 ans et deux pics de fré- révèle une polyploïdie/aneuploïdie dans 66-
quence autour de 20 et de 50 ans [3]. L’ENB 78 % des cas [3]. L’étiopathogénie des ENB
se manifeste dans la plus part des cas par fait discuter leur appartenance à la famille
une symptomatologie rhinologique peu des PNET du fait de la fréquence de la trans-
spécifique. De rares cas de syndromes para- location t (11 ; 22) rapportée dans le sarcome
néoplasiques avec sécrétion inappropriée d’Ewing [3]. Le traitement de l’ENB repose
d’hormone anti-diurétique ont été décrits sur l’association chirurgie-radiothérapie asso-
[4]. Sa révélation par des signes oculaires est ciée à une chimiothérapie première dans les
inhabituelle [4]. L’imagerie par résonance ENB disséminés [1, 4]. Le pronostic est cor-
magnétique évaluent l’importance de l’éten- rélé à l’étendue tumorale. Les récidives
due tumorale et permettent la classification loco-régionales et les métastases sont fré-
de Kadish [5] : stade A : tumeur limitée à quentes [4]. ■
la fosse nasale, stade B : tumeur naso-
sinusienne, stade C : extension régionale Key words: Head and neck tumour, Esthesioneuroblastoma,
aux structures adjacentes et stade D : métas- Nasal cavities, Immunohistochemistry.
tase à distance. L’aspect macroscopique est Mots-clés : Tumeurs ORL, Esthésioneuroblastome, Fosses nasa-
habituellement celui d’un polype hémorra- les, Immunohistochimie.
gique. Le diagnostic de l’ENB repose sur
l’aspect histologique et l’étude immunohis-
tochimique. L’examen histologique montre
une prolifération tumorale peu différenciée Références
faite d’amas et de nappes de petites cellules
rondes respectant longtemps l’intégrité de
l’épithélium. Il existe deux types de rosettes, [1] Martel J, Darrouzet V, Duclos JY, Bebear JP, Stoll D.
Homer-Wright et Flexner-Wintersteiner. Le Olfactory esthesioneuromas. Rev Laryngol Otol Rhinol
grading histologique subdivise l’ENB en bas 2000 ; 121 : 227-36.
grade et haut grade en se basant sur les cri- [2] Berger L, Richard Luc. L’esthésioneuroépithéliome
tères suivant : degré de différentiation, pré- olfactif. Bull Assoc Fr Cancer 1924 ; 13 : 410-21.
sence de signes d’anaplasie cellulaire et
[3] Finkelstein SD, Hirose T, VandenBerg SR. Olfactory
indexe mitotique [3]. Les rosettes neuroblas-
neuroblastoma. In: Kleihues P, Cavenee WK, eds.
tiques de type Homer-Wright observées
surtout chez les sujets jeunes orientent le World Health Organisation Classification of Tumours.
diagnostic [3]. En leur absence, le diagnostic se Pathology and Genetics. Tumours of the Nervous
pose avec un carcinome indifférencié, un lym- System. Lyon: IARCPress, 2000.
phome, un rhabdomyosarcome, un sarcome [4] Kriet M, Laktaoui A, Zrara S, Harmouchi N, Souhail H,
d’Ewing, une tumeur neuroectodermique Chana H et al. Olfactory esthesioneuroblastoma with
périphérique (PNET), un méningiosarcome, an ophtalmological presentation: a case report. J Fr
un mélanome achromique et une métastase Ophtalmol 2002 ; 25 : 632-5.
d’un carcinome neuroendocrine. L’étude [5] Kadish S, Goodman G, Wang SS. Olfactory neuro-
immunohistochimique est alors d’une aide blastoma: a clinical analysis of 17 cases. Cancer 1976 ;
précieuse. En effet, le profil immunohisto- 37 : 1471-576.

328
Ann Pathol 2007 ; 27 : 49-51

Une lésion gastrique rare et trompeuse Cas


pour diagnostic
A rare and misleading gastric lesion
Magali Svrcek (1), Clotilde de Mauroy (2), Jean-François Fléjou (1)

(1) Service d’Anatomie et Cytologie Pathologiques, Hôpital Saint-Antoine, 186 rue du Faubourg Saint-Antoine, 75012 Paris.
(2) Cabinet Médical d’Anatomie et Cytologie Pathologiques, 72 rue de Lessard, 76100 Rouen.

Svrcek M, de Mauroy C, Flejou JF. Une lésion gastrique rare et trompeuse. Ann Pathol 2007 ; 27 : 49-51

Observation le Rouge Congo étaient négatives. Il


n’était pas mis en évidence de cellule
épithéliale indépendante ni sur les colo-
Une femme âgée de 51 ans présentait rations standards ni sur l’étude immu-
depuis plusieurs mois des troubles nohistochimique réalisée à l’aide des
digestifs à type de vomissements dans anticorps anti-cytokératine (KL1) et anti-
un contexte de troubles de la vidange EMA. Quelques cellules fusiformes épar-
gastrique. Il était réalisé, dans un pre- ses exprimaient l’actine musculaire lisse,
mier temps, une cure de hernie hiatale confirmant leur nature myofibroblasti-
sous coelioscopie, puis, cinq semaines que, mais pas le CD34, ni le c-kit (CD117).
après, une antrectomie, en raison d’un
« enraidissement » de la région pré-
pylorique en endoscopie et au transit
oeso-gastro-duodénal. Les biopsies
gastriques n’avaient pas montré de
lésion tumorale. Cette malade n’avait
aucun antécédent médical ou chirurgi-
cal, à l’exception de troubles du com-
portement mal étiquetés.
La pièce d’antrectomie mesurait 13 cm sur
grande courbure. La paroi antrale était
épaissie et rétractée, sur presque toute sa
circonférence et sur 2 cm de hauteur.
Le duodénum était macroscopique-
ment normal. À l’examen histologique, la FIG. 1. — L’essentiel des lésions siège au niveau de la sous-
muqueuse, sous la forme d’un épaississement hyalin (HES × 25).
muqueuse était normale, sans ulcération,
ni inflammation ou atrophie. L’essentiel FIG. 1. — The main pathological feature consists with
severe hyaline thickening of submucosa (HES×25).
des lésions, de siège antral, consistait en
un épaississement considérable de la
musculaire muqueuse et surtout de la
sous-muqueuse ; en effet, il existait à ce
niveau une prolifération lâche de cellules
fusiformes, d’allure fibroblastique, avec
une abondante production de collagène
hyalin (figure 1). Il s’y associait quelques
fibres élastiques mises en évidence sur la
coloration par l’orcéine. Il existait égale-
ment un certain degré d’hyperplasie mus-
culaire, à la fois au niveau de la musculaire
muqueuse et de la couche interne de la
musculeuse. Cet épaississement touchait
également focalement la couche externe FIG. 2. — Sous-muqueuse gastrique, siège d’une abon-
de la musculeuse et la sous-séreuse. Ces dante production de collagène hyalin, de quelques fibro-
zones étaient peu inflammatoires, en blastes épars et de rares plasmocytes et polynucléaires
Accepté pour publication
éosinophiles (HES × 200).
dehors de la présence de quelques plas- le 16 novembre 2005
FIG. 2. — Gastric submucosa with abundant production
mocytes et de polynucléaires éosino- of hyalin collagen, dispersed collagen fibres, occasional
philes (figure 2). Les vaisseaux étaient scattered fibroblasts and a few plasma cells and eosinophils Tirés à part : M. Svrcek,
normaux. Les limites de résection antrale (HES×200). voir adresse
et duodénale étaient saines. Le trichrome en début d’article.
de Masson confirmait la nature collagé- e-mail :
nique des dépôts hyalins de la sous- Quel est votre diagnostic ? magali.svrcek@sat.aphp.fr
muqueuse. Les colorations par le PAS et

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 49


Magali Svrcek et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 49-51

Diagnostic : hyalinisation Dans les cas décrits in vivo, étaient associées


gastrique aux lésions observées dans la description
princeps, une gastrite folliculaire, des
lésions de métaplasie intestinale et pseudo-
pylorique [7] et une hyperplasie fovéolaire
Le terme de « hyalinisation gastrique » a été
[6], en plus des lésions d’ulcère peptique et
introduit pour la première fois en 1965 par
de sténose caustique. Il a également été
Smith et Bolande [1] pour décrire une lésion
trouvé un aspect d’hypertrophie des plexus
inhabituelle de l’estomac observée dans une
myentériques mimant un névrome trauma-
série autopsique de six malades ayant tous
tique, en raison de l’infiltration de la muscu-
reçu un traitement par radiothérapie, chimio-
thérapie ou par l’association des deux. Les leuse et de l’enserrement des filets nerveux
lésions principales consistaient en une indu- par les faisceaux de collagène hyalin [5].
ration et un épaississement diffus (ou plus Dans notre observation, les aspects radiolo-
rarement focal) de la paroi gastrique, attei- giques et macroscopiques évoquaient en
gnant tout particulièrement le cardia et le premier lieu un adénocarcinome infiltrant
pylore. Histologiquement, les auteurs avaient diffus à cellules indépendantes de type
noté la présence d’abondants dépôts de col- linite gastrique. L’examen histologique réa-
lagène hyalin, préférentiellement au niveau lisé sur de nombreux prélèvements a permis
de la sous-muqueuse. Les autres éléments de d’éliminer ce diagnostic, de même que
la description étaient l’absence d’inflamma- toute autre tumeur maligne à type de lym-
tion, une limite nette entre l’estomac normal phome, leucémie ou sarcome. Un épaissis-
et l’estomac pathologique, avec une atrophie sement diffus de la paroi gastrique peut
muqueuse marquée et la négativité des colo- également s’observer plus rarement en cas
rations par le PAS et le Rouge Congo. On de gastrite granulomateuse (maladie de
trouve, dans la littérature, une entité relative- Crohn, sarcoïdose), de gastrite à éosinophi-
ment semblable décrite par Karsner sous le les, de sclérodermie, de gastropathie hyper-
terme de « gastrite chronique fibroplasti- trophique de type maladie de Ménétrier et,
que » [2]. La pathogénie de cette lésion est de façon exceptionnelle, en cas de syphilis.
inconnue. Elle a initialement été considérée Là encore, l’examen microscopique a per-
comme une conséquence de la radiothérapie mis d’éliminer ces diagnostics dans notre
ou de la chimiothérapie. Cependant, l’année observation. Il convient également d’élimi-
suivante, Smith l’a de nouveau décrite dans ner le diagnostic de tumeur stromale par la
une série autopsique de trois malades dont réalisation d’une étude immunohistochimi-
aucun n’avait reçu ce type de traitement [3]. que à l’aide des anticorps anti-c-kit (CD117)
En raison de l’observation de cette entité uni- et anti-CD34. Enfin, si la lésion avait été de
quement dans des séries autopsiques, cer- siège pylorique, l’un des diagnostics à évo-
tains auteurs ont ensuite évoqué la quer aurait été celui d’hypertrophie pylori-
possibilité d’un artefact post mortem lié à que. Cette lésion, bien que plus fréquente
une dénaturation chimique des protéines de chez l’enfant, peut s’observer également
la sous-muqueuse gastrique, probablement chez l’adulte et fait suite à un ulcère pepti-
en rapport avec une rupture de la barrière que ou à une gastrite antrale. Elle est toute-
muqueuse [4]. Toutefois, cette lésion très fois plus fréquente chez l’homme.
rare a également été décrite sur pièce opéra- En conclusion, la hyalinisation gastrique doit
toire de gastrectomie chez un malade atteint être ajoutée à la liste des diagnostics à évo-
d’ulcère peptique [5] et chez une autre ayant quer en cas de gastropathie hypertrophique.
ingéré un agent caustique acide [6]. Dans un L’échoendoscopie peut permettre d’avancer
troisième cas, aucune cause n’a été trouvée dans le diagnostic souvent difficile de ces
[7]. Dans notre observation, bien que cela lésions, de même que les biopsies profon-
n’ait pas été retrouvé à l’interrogatoire, cette des, « en puits » ou à l’anse diathermique,
lésion pourrait être secondaire à l’ingestion dont le but est en particulier d’éliminer un
d’un caustique gastrique, compte tenu de carcinome de type linitique. Ces différentes
l’existence de troubles du comportement. explorations n’avaient pas été pratiquées
La hyalinisation gastrique serait donc plus vrai- dans notre observation. Leur négativité, si
semblablement une lésion histologique non elle ne permet pas d’éliminer une pathologie
spécifique liée à l’accumulation de protéines tumorale, devrait faire évoquer le diagnostic
dénaturées de la matrice extracellulaire sous de hyalinisation gastrique. ■
la forme d’un matériel amorphe associé à des
dépôts de tissu conjonctif dans la sous- Key words: gastric hyalinization, peptic ulcer, caustics, gastric
muqueuse. Ce processus pourrait être associé cancer.
à un mécanisme de fibrogenèse induit par les Key words: hyalinisation gastrique, ulcère peptique, caustique,
dommages cellulaires oxydatifs [6]. cancer gastrique.

50
Une lésion gastrique rare et trompeuse

Références [4] Neil WA, Smith JC. The artefact of gastric hyalini-
zation. Arch Pathol Lab Med 1968 ; 86 : 525-7.
[5] McGregor DH, Haque AU. Gastric hyalinization
associated with peptic ulceration. Arch Pathol Lab
[1] Smith JC, Bolande RP. Radiation and drug induced Med 1982 ; 106 : 472-5.
hyalinization of the stomach. Arch Pathol Lab Med [6] Kazsuba A, Vitez A, Gall J, Mathe L, Ludmany E,
1965 ; 79 : 310-6. Krasznai G. Gastric hyalinization as a possible conse-
[2] Karsner HT (ed). Human Pathology. Philadelphia, quence of corrosive injury. Endoscopy 2000 ; 32 : 356-8.
JW Lippincott Co, 1949 : 562. [7] Parrott NR, Sunter JP, Taylor RMR, Johnston IDA.
[3] Smith JC. Gastric hyalinization without irradiation. Gastric hyalinization presenting in life and mimicking
Arch Pathol Lab Med 1966 ; 81 : 42-6. gastric cancer. Arch Pathol Lab Med 1986 ; 110 : 155-6.

51
Ann Pathol 2007 ; 27 : 59-60

Une lésion oculaire kystique congénitale Cas


pour diagnostic
exceptionnelle
An exceptional congenital cystic ocular lesion
Marie-Laure Ranty (1), Sophie Le Guellec (1), Solange Moalic (2), Annick Sevely (3),
Janick Selves (4), Marie-Bernadette Delisle (1)
(1) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques, Hôpital de Rangueil, 1 avenue Jean Poulhes TSA 50032 31403
Toulouse.
(2) Service d’Ophtalmologie, Hôpital de Purpan,
(3) Service de Neuro-radiologie, Hôpital de Purpan.
(4) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques, Hôpital de Purpan Place du Dr Baylac, TSA 40031
31059 Toulouse Cedex 9.

Ranty ML, Le Guellec S, Moalic S, Sevely A, Selves J, Delisle MB. Une lésion oculaire kystique congénitale
exceptionnelle. Ann Pathol 2007 ; 27 : 59-60

Observation

Une masse intra-orbitaire gauche a été


découverte en période néonatale chez
une fille. Elle refoulait la paupière supé-
rieure sans l’infiltrer. Il n’existait pas
d’anomalie palpébrale ou de dysmorphie
faciale. Cette enfant était née à terme,
avec des mensurations normales et il
n’existait pas d’antécédents néoplasiques
familiaux. La tomodensitométrie mettait
en évidence une masse orbitaire solide et
kystique, sans calcification, sans lyse
osseuse. Le scanner cérébral était normal.
Une résection chirurgicale de cette masse FIG. 1. — Fragments de rétine dysplasique, avec aspects de
a été effectuée au 7e jour de vie. Elle pré- pseudo-rosettes, mêlés au tissu neuroglial ou disposés à sa
sentait un contenu hématique et des adhé- périphérie.
rences périphériques qui ont conduit à sa FIG. 1. — Neuroglial tissue mixed with or lined by dys-
fragmentation. Il n’existait pas de globe plastic retina fragments with rosette-like structures.
oculaire identifiable dans l’orbite.
À l’examen microscopique, le matériel
d’exérèse était essentiellement constitué par
un tissu neuroglial. Sur un fond fibrillaire
comportant d’assez nombreuses sections
vasculaires, étaient dispersés des éléments
astrocytaires, avec un noyau régulier, sans
atypie et quelques neurones. L’anticorps
anti-neurofilament marquait des prolonge-
ments axonaux observés dans les plages
fibrillaires. Mêlés au tissu neuroglial ou
disposés à sa périphérie, s’associaient des
éléments de type rétinien (figure 1). On
observait également des structures épi-
théliales d’architecture papillaire, incons-
tamment marquées par l’anticorps anti-
cytokératine AE1-AE3 et évocatrices de corps FIG. 2. — Structures d’architecture papillaire, évocatrices
de fragments de corps ciliaire, bordées par un épithélium
ciliaire (figure 2). L’anticorps Mib1 (Ki67) ne cubique, associé focalement en profondeur à des cellules
marquait que quelques noyaux épars dans la fortement pigmentées.
prolifération neurogliale. Des territoires FIG. 2. — Papillary, ciliary body like structures lined by Accepté pour publication
fibreux collagènes ainsi que quelques calci- cuboidal epithelium with pigmented cells beneath. le 01 février 2006
fications dystrophiques étaient présents.
À 7 mois, l’enfant était en excellent état mise en place avec un résultat esthéti- Tirés à part : M.L. Ranty,
général avec une très bonne adaptation que satisfaisant. voir adresse
à la vision monoculaire. Son développe- en début d’article.
ment psychomoteur était strictement Quel est votre diagnostic ? e-mail :
normal. Une prothèse ophtalmique fut quintyn.ml@chu-toulouse.fr

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Marie-Laure Ranty et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 59-60

Diagnostic : Œil kystique excroissance kystique d’une ectasie sclérale,


congénital qui communique avec l’intérieur de l’œil [3].
Cliniquement, le kyste colobomateux
repousse la paupière inférieure du fait de la
croissance du kyste en dessous du globe
L’œil kystique congénital (« anophtalmie
oculaire. Un globe oculaire même rudimen-
avec kyste ») est une malformation oculaire
taire est toujours présent [4]. Histologique-
rare, avec moins de 30 cas décrits [1, 2].
ment, la paroi interne du kyste est formée
Il représente une anomalie majeure du
par un tissu neurorétinien et la couche
développement précoce de l’œil. Le déve-
externe est en continuité avec la sclère. Du
loppement de l’œil commence en effet au
tissu glial peut être présent [4].
18e jour embryonnaire. Après la fermeture
du tube neural, on observe deux évagina- Les autres lésions oculaires kystiques néona-
tions du cerveau antérieur, les vésicules tales comprennent les tératomes avec des
optiques. Ces vésicules s’invaginent dans remaniements kystiques, les encéphalocèles
les régions de la placode cristallinienne et orbitaires et le rhabdomyosarcome congénital
de la fente colobomique [3]. Cette fente per- [2].
mettra la pénétration de l’artère hyaloïde, Bien que le diagnostic de certitude de kyste
future artère centrale de la rétine. L’organo- oculaire congénital soit anatomopathologi-
genèse oculaire est terminée à la huitième que, les critères radio-cliniques sont fonda-
semaine. mentaux pour faire la distinction avec un
Dans le cas d’un œil kystique congénital, il kyste colobomateux, notamment la localisa-
existe un arrêt dans le développement ocu- tion dans l’orbite et l’existence éventuelle
laire et l’œil reste au stade embryonnaire de la d’un globe oculaire, même très petit. ■
vésicule optique [1, 3]. L’action tératogène se
situe autour de la 4e semaine. On observe ainsi Remerciements
à la naissance une masse molle bleutée rétro- Nous remercions le Professeur Bremond (Hôpital
palpébrale, le plus souvent placée au centre Robert Debré), le Professeur Hénin (Hôpital Bichat),
de l’orbite [2]. L’aspect histologique est varia- le Docteur Bertozzi (Hôpital Purpan), le Docteur Sas-
ble d’un cas à l’autre. Le kyste est générale- tre (Institut Curie) et le Docteur Doz (Institut Curie)
pour la discussion diagnostique.
ment limité par un tissu conjonctif fibreux
dense, ressemblant à la sclère, auquel les tis- Key words: orbital cyst, neuroglial tissue, anophthalmia, ocular
malformation, congenital cystic eye.
sus musculaire et adipeux sont liés. L’intérieur
Mots-clés : kyste orbitaire, tissu neuroglial, anophtalmie, malfor-
du kyste est bordé par du tissu rétinien imma- mation oculaire, oeil kystique congénital.
ture. La lumière du kyste est généralement
comblée par du tissu neuroglial [4]. Le cristal-
lin est absent en raison de l’absence de déve-
loppement de la placode cristallinienne [4]. Il
est nécessaire de rechercher un reliquat ocu-
Références
laire par des coupes sériées. L’œil kystique
congénital est le plus souvent unilatéral ; son
étiologie est inconnue, en particulier il [1] Gilbert-Barness E. Potter’s pathology of the fetus and
n’existe pas de caractère héréditaire [2]. infant. St Louis: Mosby, 1997.
Devant cette lésion kystique comportant du [2] Hayashi N, Repka MX, Ueno H, Iliff NT, Green
tissu nerveux, le diagnostic de kyste colobo- WR. Congenital cystic eye: report of two cases and
mateux (« microphtalmie avec kyste ») a été review of the literature. Surv Ophthalmol 1999 ; 44 :
discuté. Il s’agit d’une forme sévère de 173-9.
défaut de fermeture de la fente embryon- [3] Eagle RC. Eagle RC, Eye pathology: an atlas and
naire optique [3]. Cette lésion représente basic text. Philadelphia: Saunders, 1999.
une évagination du feuillet interne de la [4] Shields JA, Shields CL. Orbital cysts of childhood-
cupule optique à travers une persistance de classification, clinical features and management. Surv
la fente fœtale. Elle est caractérisée par une Ophthalmol 2004 ; 49 : 281-99.

60
Annales de pathologie (2008) 28, 250—252

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une lésion rare agressive de l’os temporal


A rare aggressive lesion of the temporal bone

Slim Charfi a, Saloua Krichen Makni a,∗,


Sameh Ellouze a, Rim kallel a, Morched Dhouib b,
Lobna Ayadi a, Naourez Gouiaa a,
Mohamed Abdelmoula b, Tahya Sellami Boudawara a

a
Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib Bourguiba,
route El Ain, 3029 Sfax, Tunisie
b
Service de chirurgie maxillofaciale, CHU Habib Bourguiba, Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 21 novembre 2007


Disponible sur Internet le 22 juillet 2008

Observation
Un patient âgé de 45 ans consultait pour un bourdonnement d’oreille avec hypoacousie
gauche évoluant depuis trois ans. Le conduit auditif externe était déformé par une masse
qui s’extériosait à ce niveau. Le tympan ne présentait pas d’anomalie. L’audiogramme
montrait une surdité mixte gauche. La tomodensitométrie révélait un processus ostéo-
lytique multiloculaire mesurant 5 cm au niveau de l’os temporal gauche, envahissant
partiellement la grande aile du sphénoïde et la fosse infratemporale. En IRM, ce processus
était hétérogène en T1 et en hyposignal marqué en T2. Une biopsie de la masse a été réali-
sée à travers le conduit auditif externe. À l’examen histologique, la tumeur était constituée
d’une prolifération de nappes de cellules fusiformes ou polygonales, mal délimitées. Le
noyau était ovale ou rond, à chromatine fine, parfois muni d’un petit nucléole. Il existait
de nombreuses cellules géantes multinucléées de type ostéoclastique (Fig. 1). Les mitoses
étaient absentes. Cette prolifération était dissociée par de larges suffusions hémorra-
giques avec d’abondants dépôts d’hémosidérine. Il existait par places quelques foyers
d’ostéogenèse réactionnelle (Fig. 2). En immunohistochimie, les cellules multinucléées et
mononucléées exprimaient la vimentine et le CD68 ; 5 à 10 % des cellules mononucléées
exprimaient le Ki-67 ; l’immunomarquage pour la protéine S100 était négatif. Un bilan
phosphocalcique ainsi qu’un dosage sérique de la parathormone étaient normaux. Une
exérèse chirurgicale de la lésion était réalisée. La lésion s’étendait en bas à la région
ptérygoïdienne et en haut à la dure-mère du lobe temporal auquel elle adhérait. Après un
an de suivi, il n’y avait pas de signes cliniques ou radiologiques de récidive lésionnelle.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : smkrichen@yahoo.fr (S. Krichen Makni).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.06.007
Lésion inhabituelle de l’os temporal 251

Figure 1. Lésion constituée d’une double composante cellulaire


mono- et multinucléées irrégulièrement réparties au sein d’un Figure 2. Prolifération de cellules fusiformes mononucléées avec
stroma fibreux et hémorragique (HE × 100). présence d’un foyer d’ostéogenèse réactionnelle (HE × 200).
Lesion constituted of two components, mononuclear and mul- Spindle-shaped mononuclear cells proliferation with a focal area
tinucleated giant cells irregularly dispersed in fibrous stromal of reactive osteogenesis (HE × 200).
background with hemorrhage (HE × 100).

Quel est votre diagnostic ?


252 S. Charfi et al.

Diagnostic : granulome réparateur à et récurrent. La présence d’un fond lésionnel fibreux, de


remaniements hémorragiques, de dépôts d’hémosidérine
cellules géantes de l’os temporal
et de travées ostéoïdes est inhabituelle dans la TCG ; par
Le granulome réparateur à cellules géantes (GRCG) de l’os ailleurs, les cellules géantes au niveau de la TCG sont régu-
temporal a été décrit pour la première fois en 1974 par Hir- lièrement réparties et sont de plus grande taille et plus
schl et Katz [1,2]. Il s’agit d’une localisation extrêmement chargées en noyaux que celles retrouvées au niveau du
rare, en effet seule une vingtaine de cas a été rappor- granulome réparateur à cellules géantes (GRCG) [1—4]. Le
tée dans la littérature [1—4]. Son étiopathogénie n’est diagnostic différentiel se pose également avec le chondro-
pas élucidée, une origine traumatique associée à des phé- blastome où la présentation au niveau de l’os temporal
nomènes hémorragiques a été initialement évoquée, une est particulière avec une inflexion épithélioïde des chon-
origine infectieuse et inflammatoire chronique ont aussi été droblastes dont le noyau est d’aspect rainuré. La présence
suggérées [1,3]. Le GRCG de l’os temporal touche essen- d’importants remaniements hémorragiques, d’abondants
tiellement l’homme dont l’âge moyen est de 30 ans, avec dépôts d’hémosidérine, d’une matrice cartilagineuse, de
des extrêmes allant de quatre mois à 72 ans [1]. La sympto- nombreuses cellules géantes mêlées à des cellules fusi-
matologie clinique est pauvre et non spécifique ; il s’agit formes et d’une positivité à l’immunohistochimie pour la
le plus souvent d’une hypoacousie, plus rarement d’une protéine S100 sont des arguments en faveur du chondro-
douleur périauriculaire, d’acouphènes ou de paresthésies blastome [5]. La dysplasie fibreuse, le kyste anévrismal, le
[1]. Radiologiquement, ces lésions sont habituellement bien chérubisme, ainsi que l’extension d’une synovite villonodu-
limitées, ostéolytiques souvent multiloculaires, pouvant laire issue de l’articulation temporomandibulaire, posent
s’accompagner d’une rupture de la corticale osseuse [1,3,4]. également un problème de diagnostic différentiel avec le
À l’IRM, un hyposignal intense en T2, qui était présent dans GRCG [1,3,4]. Le traitement de choix consiste en une exé-
notre cas, est évocateur du GRCG [4]. Les formes agressives, rèse chirurgicale complète, elle s’avère parfois difficile, en
extensives localement, comme celle que nous rapportons rapport avec la complexité des structures anatomiques vas-
sont rares [1]. Histologiquement, le GRCG est formé par culonerveuses de la région temporale [1]. La radiothérapie
une prolifération sur un fond fibrovasculaire de cellules peut être discutée dans les formes non opérables ou dans
mononucléées, allongées ou ovales, régulières, mêlées à les formes localement très agressives, dont l’exérèse chi-
des cellules géantes multinucléées de type ostéoclastique. rurgicale complète est impossible du fait du risque élevé de
Ces dernières ont tendance à se grouper en amas, parti- récidive [1,3,4].
culièrement autour de foyers hémorragiques et de dépôts
d’hémosidérine ; il s’y associe fréquemment des travées
ostéoïdes régulières et une infiltration lymphocytaire [1—4].
Références
En immunohistochimie, les cellules géantes et certaines [1] Dimitakopoulos I, Lazaridis N, Sakellariou P, Asimaki A. Giant-
cellules mononucléées expriment le CD68, suggérant leur cell granuloma in the temporal bone: a case report and review
différenciation histiocytaire [2,4]. L’immunomarquage par of the literature. J Oral Maxillofac Surg 2006;64:531—6.
le Ki-67 est limité aux cellules mononucléées. Il est évalué [2] Tian XF, Li TJ, Yu SF. Giant cell granuloma of the temporal bone:
selon Yoshimura et al. [4] à 7 % environ. Les cellules positives a case report with immunohistochemical, enzyme histochemi-
sont considérées comme étant les éléments prolifératifs, cal, and in vitro studies. Arch Pathol Lab Med 2003;127:1217—20.
responsables de l’activité biologique des GRCG. Il n’a pas été [3] Kim HJ, Lee HK, Suh DC, Choi CG, Kim JK, Lee JH, et al. Giant
établi de critères histologiques ou immunohistochimiques cell reparative granuloma of the temporal bone: MR findings
d’agressivité. Le diagnostic différentiel se pose essen- with pathologic correlation. Am J Neuroradiol 2003;24:1136—8.
[4] Yoshimura J, Onda K, Tanaka R, Takahashi H. Giant cell
tiellement avec une tumeur brune d’hyperparathyroïdie
reparative granuloma of the temporal bone: neuroradiologi-
présentant le même aspect histologique ; de ce fait, il cal and immunohistochemical findings. Neurol Med Chir (Tokyo)
faut s’assurer de la normalité de la calcémie, de la phos- 2002;42:510—5.
phorémie et du taux sérique de la parathormone [1,3]. [5] Ionescu DN, McFadden K, Unni KK, Couce ME. Pathologic quiz
Le GRCG doit être également distingué de la tumeur à case: a 33-year-old woman with a large temporal mass. Chon-
cellules géantes (TCG), du fait de son potentiel agressif droblastoma of the skull. Arch Pathol Lab Med 2005;129:539—40.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 257-9

Une lésion rare du col utérin Cas


pour diagnostic

A rare lesion of the uterine cervix

Delphine Raoux (1), Alix Clémenson (1), Bertrand Felloni (2), Abir Khaddage (1), Brigitte Vaunois (1),
Anne Gentil Perret (1)

(1) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques CHU — 42055 Saint-Étienne.


(2) Service de Gynécologie, CHU — 42055 Saint Étienne.

Raoux D, Clémenson A, Felloni B, Khaddage A, Vaunois B, Gentil Perret A. Une lésion rare du col utérin.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 257-9.

Observation

Une femme de 42 ans, d’origine occi-


dentale, consultait pour des ménomé-
trorragies. Une échographie montrait la
présence d’un fibrome utérin responsable
des saignements, ainsi qu’un kyste de
6 cm développé aux dépens de l’ovaire
gauche. Une hystérectomie totale avec
annexectomie gauche sous coelioscopie
était réalisée. L’ovaire gauche mesurait
8 × 4 cm et présentait un kyste corres-
pondant histologiquement à un cystadé-
nofibrome papillaire séreux. L’utérus FIG. 1. — Foyer mal limité de cellules pigmentées sous
comportait par ailleurs, un léiomyome l’épithélium endocervical (HES, grossissement × 5).
bien limité du myomètre et un ectropion FIG. 1. — Nest of pigmented cells poorly defined in the
superficial endocervical stroma (HES, magnification ×5).
du col utérin. Macroscopiquement, il
n’existait pas d’aspect pigmenté du col
utérin.
La muqueuse endocervicale était le siège
de foyers d’hyperplasie microglandulaire
et micropapillaire dans un contexte inflam-
matoire. Il s’y associait une métaplasie
malpighienne, sans signe d’infestation
virale ni de dysplasie. Au sein du chorion,
sous l’épithélium endocervical, plusieurs
foyers mal limités de cellules le plus sou-
vent fusiformes ou étoilées, comportant
des prolongements dendritiques, étaient
observés (figure 1). Leur cytoplasme
comportait parfois un pigment brunâtre, Accepté pour publication
grossier et diffus, positif pour la colora- le 14 août 2006
tion de Fontana et négatif pour la colora-
Tirés à part : M. Peoc’h,
tion de Perls. Il n’y avait pas de cellules FIG. 2. — Positivité des cellules dendritiques pigmentées Service d’Anatomie et
pigmentées au sein de l’épithélium avec l’anticorps anti-PS 100 (grossissement × 40).
de Cytologie Pathologiques,
endocervical. FIG. 2. — Positivity of dendritic pigmented cells for S-100 CHU Hôpital Bellevue,
L’étude immunohistochimique montrait protein (magnification ×40).
42055 Saint-Étienne
une positivité de ces cellules avec l’anti- cedex 02.
corps anti PS100 (figure 2) et soulignait e-mail :
le caractère disséminé et mal limité de Quel est votre diagnostic ? michel.peoch@chu-st-
ces foyers. etienne.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 257


Delphine Raoux et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 257-9

Diagnostic : Naevus bleu des agrégats de mélanosomes tels qu’on peut


du col utérin ou mélanocytose les observer dans les cellules de Schwann et
les mélanocytes normaux. Un argument his-
stromale du col utérin tologique a été avancé [2] selon lequel les
naevus bleu sont essentiellement observés au
niveau du col utérin, en particulier au niveau
Le naevus bleu du col utérin est une lésion du mur postérieur de l’endocol, région où
mélanocytaire bénigne située dans la les filets nerveux sont en très grand nombre
muqueuse utérine, contrairement au naevus alors que les naevus bleu sont inexistants
bleu commun qui est une lésion mélano- dans le corps utérin, pauvre en filets nerveux.
cytaire dermique. Il correspond à une lésion De plus, comme dans notre observation, des
mal limitée faite de cellules fusiformes ou filets nerveux ont été observés proches des
étoilées dont la charge pigmentaire est foyers de cellules tumorales, formant parfois
variable, parfois accompagnées de mélano- des images d’encerclement. D’autres pensent
phages. Les dendrites peuvent être très que le terme de naevus bleu n’est pas appro-
développés et bien visibles lorsqu’ils sont prié puisqu’il serait la conséquence d’une
pigmentés. La cellularité est faible. Cette anomalie de la migration cellulaire à partir
lésion peut s’observer dans d’autres sites de la crête neurale [5]. Le naevus bleu du col
extra-cutanés comme les ganglions, le vagin, utérin s’observant à l’âge moyen, certains
la prostate et le palais [1]. auteurs évoquent le rôle d’un contrôle hor-
Le naevus bleu du col utérin est une lésion monal qui pourrait favoriser la différenciation
rarement décrite dans les populations occi- mélanocytaire des cellules de Schwann [2].
dentales avec, dans certaines études, une
Le diagnostic différentiel est surtout d’ordre
prévalence de seulement 0,12 % soit 3 cas sur
clinique lorsqu’un examen macroscopique
2 500 pièces d’hystérectomie [1], alors que sa
minutieux retrouve des zones pigmentées
fréquence est plus importante dans la popu-
qui peuvent évoquer une endométriose, fré-
lation féminine japonaise avec une préva-
quente dans cette localisation, un héman-
lence de 8,6 %, soit 42 cas sur 486 pièces
giome, une hémorragie autour des kystes
d’hystérectomie [2]. Dans ces deux études,
de Naboth, ou encore un mélanome malin.
les lésions ont été diagnostiquées par une
Histologiquement, le naevus bleu du col
étude systématique en coupes étagées du
utérin ne pose pas vraiment de problème de
col utérin, en microscopie optique standard,
diagnostic différentiel puisque la coloration
avec colorations spéciales et immunohisto-
de Perls élimine les dépôts d’hémosidérine,
chimie, alors qu’aucune lésion pigmentée
et un mélanome malin se différencie par la
n’avait été observée macroscopiquement.
présence d’une activité jonctionnelle et de
En effet, le naevus bleu du col utérin est pres-
cellules atypiques.
que toujours de découverte fortuite. À notre
connaissance, le seul cas de naevus bleu Enfin, certains auteurs [2] proposent d’employer
cellulaire rapporté dans la littérature était le terme de mélanocytose stromale du col
une lésion de plus grande taille, de plus utérin, par analogie à la mélanocytose der-
d’1 cm, étendu macroscopiquement au vagin mique, qui regroupe les taches mongoliques,
[3]. Son aspect clinique a d’ailleurs été la les naevi de Ito et de Ota, et l’hamartome
source d’une erreur diagnostique avec un neurocristique. Leur argument repose sur la
mélanome malin, d’où l’importance d’infor- définition du naevus bleu cutané comme
mer les cliniciens et les pathologistes des étant une lésion nodulaire solide de couleur
divers aspects de cette lésion bénigne. bleu, opposée à celle de mélanocytose qui
correspond à une lésion non palpable et
L’histogénèse du naevus bleu reste inconnue.
invisible, faites de cellules dendritiques pig-
Plusieurs hypothèses ont été avancées :
mentées sans formation nodulaire. ■
pour certains [1-4], il s’agirait d’une tumeur
d’origine schwanienne, pour d’autres [5], il
s’agirait d’un accident de l’embryogenèse. Key words: blue nevus, melanocytosis, uterine cervix.
L’origine schwanienne avait déjà été proposée Mots-clés : naevus bleu, mélanocytose, col utérin.
par Masson en 1951. Les études en micros-
copie électronique [1, 4] ont retrouvé au sein
des cellules tumorales du naevus bleu, de
nombreuses caractéristiques identiques aux Références
cellules de différenciation schwanienne telles
que des expansions cytoplasmiques allongées,
des jonctions cellulaires desmosome-like, [1] Patel DS, Bhagavan BS. Blue nevus of the uterin cer-
une membrane basale proéminente, ainsi que vix. Hum Pathol 1985 ; 16 : 79-85.

258
Une lésion rare du col utérin

[2] Uehara T, Takayama S, Takemura T, Kasuga T. [4] Kudo M, Nagayama T, Miura M, Fukunaga N. Blue
Foci of stromal melanocytes (so-called blue nevus) of nevus of the uterin cervix. Arch Pathol Lab Med 1983 ;
the uterin cervix in Japanese women. Virchows Arch 107 : 87-90.
A Pathol Anat 1991 ; 418 : 327-31. [5] Martin PC, Pulitzer DR, Reed RJ. Pigmented myo-
[3] Majmudar B, Ross RJ, Gorelkin L. Benign blue nevus of matous neurocristoma of the uterus. Arch Pathol Lab
the uterin cervix. Am J Obstet Gynecol 1979 ; 134 : 600-1. Med 1989 ; 113 : 1291-5.

259
Ann Pathol 2007 ; 27 : 159-61

Une lésion trompeuse du pénis Cas


pour diagnostic

A misleading lesion of the penis

Carole Dagher (1), Julien Luini (1), Raluca Ples (1), Michel Bronstein (2), Thierry Lazure (1),
Sophie Ferlicot (1), Aliette Ladouch-Badre (1)

(1) Service d’Anatomie Pathologique, CHU de Bicêtre, 78 rue du Général Leclerc, 94275 Le Kremlin-Bicêtre Cedex.
(2) Centre Médico-chirurgical Parly II, Le Chesnay.

Dagher C, Luini J, Ples R, Bronstein M, Lazure T, Ferlicot S et al. Une lésion trompeuse du pénis. Ann
Pathol 2007 ; 27 : 1-3

Observation a b

Un homme de 58 ans se présentait à la


consultation d’urologie pour un nodule
douloureux de la verge. Ce nodule de
1 cm était connu depuis deux ans et sa
taille s’était peu modifiée. Il était indo-
lore jusqu’alors et avait été considéré
comme une maladie de Lapeyronie aty-
pique car il était superficiel, en relief et
FIG. 1. — Nappes de cellules épithélioïdes atypiques au
sans déformation axiale de la verge. centre du nodule (HES × 400) (a). En périphérie, vaisseaux
Une exérèse localisée était décidée. La mieux individualisés et bordés par des cellules endothéliales
lésion, bien limitée, noirâtre, tendue, épithélioïdes (HES × 400) (b).
était située sur le raphé médian et elle FIG. 1. — Sheets of atypical epithelioid cells, at the center
était aisément clivée de l’albuginée des of the nodule (HES×400) (a). More well-developed vessels
lined by epithelioid endothelial cells were peripherally loca-
corps caverneux. ted (HES×400) (b).
L’examen histopathologique montrait
un nodule sous-cutané assez bien limité,
sans capsule. Il était constitué au cen-
tre par des lobules compacts de gran-
des cellules épithélioïdes au cytoplasme
éosinophile abondant (figure 1a). Leur
noyau était vésiculeux avec un nucléole
de taille moyenne. À la périphérie du
nodule, ces cellules semblaient s’arran-
ger autour de fentes vasculaires étroites
(figure 1b). Les mitoses étaient rares (2/
10 champs × 40) et il n’y avait pas de
nécrose. Quelques lymphocytes, plas-
FIG. 2. — Cellules myopéricytaires entourant les cellules
mocytes, sidérophages et polynucléaires épithélioïdes (actine muscle lisse × 200).
éosinophiles étaient dispersés entre les FIG. 2. — Myopericytic cells surrounding epithelioid cells
cellules épithélioïdes. Celles-ci étaient (smooth muscle actin ×200).
positives pour CD31 (marquage diffus), Accepté pour publication
facteur VIII (marquage hétérogène) et le 03 juillet 2006
vimentine. Elles n’exprimaient pas CD34, prolifératif (Ki67) était de l’ordre de Tirés à part : T. Lazure,
KL1, protéine S100 et HMB45. L’actine 20 %. voir adresse
muscle lisse mettait en lumière un impor- en début d’article.
tant contingent de cellules allongées, e-mail :
myopéricytaires, disposées autour des Quel est votre diagnostic ? thierry.lazure@bct.ap-
cellules épithélioïdes (figure 2). L’index hop-paris.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 159


Carole Dagher et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 159-61

Diagnostic : et ne doit pas faire exclure ce diagnostic [3].


Hémangiome épithélioïde Le facteur VIII et CD31 sont en revanche for-
tement exprimés [3, 4]. Le diagnostic diffé-
« atypique » du pénis rentiel avec les autres tumeurs vasculaires
épithélioïdes peut être plus difficile. Les cri-
tères de bénignité incluent la taille (< 2 cm),
L’hémangiome épithélioïde est une lésion vas- le siège superficiel (en dehors de l’albugi-
culaire d’histogenèse incertaine et dont la née), des atypies mineures ou modérées,
nature tumorale ou réactionnelle n’est pas une activité mitotique qui n’excède pas 2 à
clairement établie [1]. Il se développe préfé- 3 mitoses/10 champs × 40, un phénomène
rentiellement dans les tissus sous-cutanés de de maturation du centre vers la périphérie
la région céphalique ou à l’extrémité des de la lésion où les lumières vasculaires sont
doigts [2]. Les localisations péniennes sont mieux visibles, la présence (inconstante)
très rares avec moins de 30 cas rapportés d’une artère musculaire au centre de la lésion,
dans la littérature [3, 4]. Il se présente typi- la découverte de nombreux myopéricytes
quement sous la forme d’un petit nodule autour des cellules épithélioïdes avec un
(taille moyenne : 1,2 cm), superficiel, doulou- gradient de concentration croissant du cen-
reux. Il peut siéger n’importe où sur la verge tre vers la périphérie du nodule [3]. Inverse-
mais plus fréquemment sur la face dorsale. ment, une évolution rapide, une localisation
Son évolution est lente, de l’ordre de 4 à profonde dans les corps spongieux ou
5 mois. Le traitement est conservateur. Il caverneux, une grande taille d’emblée, une
consiste en une exérèse localisée de la lésion mauvaise limitation, des atypies marquées,
suivie d’une surveillance clinique pour de nombreuses mitoses, une nécrose con-
détecter d’éventuelles récidives [3, 4]. Dans fluente sont évocateurs d’un angiosarcome
la série de Fetsch et al., il n’a été observé épithélioïde [3]. Un hémangioendothéliome
qu’un seul cas de récidive locale et aucune épithélioïde est écarté devant l’absence de
métastase, avec un suivi moyen de 13 ans et stroma fibro-myxoïde et d’agencement en
demi [3]. cordons des cellules épithélioïdes, le point
La majorité des hémangiomes épithélioïdes commun trompeur entre les deux entités
du pénis ont un aspect histopathologique étant la présence fréquente d’un gros vais-
typique et similaire à celui rencontré dans seau au centre de ces lésions, plutôt une
les autres localisations [3]. Une particularité veine pour l’hémangioendothéliome, une
de ce siège est l’existence, parmi les héman- artère pour l’hémangiome [3].
giomes épithélioïdes, d’un sous-groupe de Les hémangiomes épithélioïdes « atypiques »
lésions « atypiques » (30 %), considérées par ne peuvent être distingués cliniquement
Fetsch comme des formes immatures ou des formes typiques. Ils semblent évoluer
exubérantes [3]. Par leur caractère inquiétant, comme elles avec quelques réserves liées au
elles peuvent s’avérer trompeuses pour le manque de suivi et au très faible nombre de
pathologiste. En effet, les cellules épithé- cas rapportés (6) [3]. La conduite thérapeu-
lioïdes forment un nodule densément cellu- tique conseillée est la même, en veillant à ce
laire, d’architecture compacte où les lumières que l’exérèse soit bien complète. ■
vasculaires sont mal individualisées [3]. Des
atypies cytonucléaires modérées peuvent
être notées ainsi qu’une activité mitotique Remerciements
focale. Le risque de confusion avec un méla- Les auteurs remercient le Dr John Fetsch, Département
nome, un carcinome ou une tumeur vascu- de Pathologie des tissus mous, AFIP, Washington, pour
laire épithélioïde plus agressive (hémangio- avoir confirmé le diagnostic.
endothéliome et angiosarcome) est bien réel Key words: epithelioid hemangioma, penis, immunohisto-
[2-4]. Les deux premières tumeurs sont écar- chemistry.
tées par l’examen immunohistochimique avec Mots-clés : hémangiome épithélioïde, pénis, immunohisto-
un piège à connaître : les cytokératines sont chimie.
souvent exprimées par un faible pourcen-
tage de cellules tumorales dans les héman-
giomes épithélioïdes, contrastant néanmoins
avec la positivité diffuse et intense observée Références
dans la plupart des carcinomes [3]. Autre
écueil : la négativité du CD34, souvent
demandé en première intention en cas de [1] Fetsch JF, Weiss SW. Observations concerning the
suspicion de tumeur vasculaire, est presque pathogenesis of epithelioid hemangioma/angiolym-
constante dans l’hémangiome épithélioïde phoid hyperplasia. Mod Pathol 1991 ; 4 : 449-55.

160
Une lésion du pénis

[2] Tsang WY, Chan JK. The family of epithelioid vas- fused with hemangioendothelioma and epithelioid
cular tumors. Histol Histopathol 1993 ; 8 : 187-212. angiosarcoma. Am J Surg Pathol 2004 ; 28 : 523-33.
[3] Fetsch JF, Sesterhenn I, Miettinen M, Davis C. Epi- [4] Srigley JR, Ayala AG, Ordonez NG, van Nostrand
thelioid hemangioma of the penis: a clinicopathologic AW. Epithelioid hemangioma of the penis: a rare and dis-
and immunohistochemical analysis of 19 cases, with tinctive vascular lesion. Arch Pathol Lab Med 1985 ;
special reference to exuberant examples often con- 109 : 51-4.

161
Annales de pathologie (2008) 28, 158—160

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une masse épididymaire douloureuse


A painful mass of the epidydimis

Sergio Fernández-Aguilar a,c,∗, Patricia Cornut a,


Daniel Naômé b

a
Laboratoire d’anatomie pathologique, CHU de Charleroi — Espace Santé,
1, boulevard Zoé-Drion, 6000 Charleroi, Belgique
b
Service d’urologie, CHU de Charleroi,
Charleroi, Belgique
c
Laboratorio HistoCitoMed, Santiago Rusiñol,
Madrid, Espagne

Accepté pour publication le 11 juillet 2007


Disponible sur Internet le 2 juillet 2008

Observation
Un homme âgé de 42 ans, en bon état général, avec antécédents de vasectomie bila-
térale à l’âge de 38 ans, s’est présenté pour douleur épididymaire droite persistante
depuis quatre mois. L’examen clinique mettait en évidence une masse épididymaire
droite centimétrique douloureuse à la palpation. L’échographie montrait un nodule sous-
cutané droit de 8 mm de diamètre situé au-dessus de la tête de l’épididyme. Les
testicules et les épididymes ne revelaient pas de lésion particulière. Après résection
chirurgicale de la lésion, localisée au niveau du canal déférent droit, l’examen his-
tologique mettait en évidence une paroi déférente normale avec une prolifération de
structures canalaires non atypiques, sans mucosécretion évidente, contenant des sper-
matozoïdes au sein du tissu conjonctif périvasal (Fig. 1). Au voisinage, un infiltrat
inflammatoire discret avec de nombreuses cellules épithélioïdes d’aspect histiocytaire
et des cellules géantes multinuclées était présent (Fig. 2a), accompagné de sper-
matozoïdes. De manière intéressante, des spermatozoïdes étaient observés en grand
nombre au sein des structures vasculaires périphériques à paroi fine, sans structure cana-
laire ni cellule épithéliale évidente (Fig. 2b). Ces données étaient confirmées après
réalisation de techniques immunohistochimiques pour détecter les cytokératines et le
CD34.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : sergiofa75@yahoo.com (S. Fernández-Aguilar).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Publié par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.annpat.2007.07.001
Lésion épididymaire douloureuse 159

Figure 1. Canal déférent droit normal avec structures canalaires


proliférantes en périphérie (HE × 40).
Right vas deferens surrounded by ductal structures (HE × 40).

Figure 2. (a) Réaction granulomateuse à cellules géantes avec


spermatozoïdes (HE × 200) ; (b) Les spermatozoïdes sont nombreux
dans les lumières vasculaires (HE × 200).
(a) Giant cell granuloma with spermatozoids (HE × 200); (b) nume-
rous spermatozoids within vascular lumina (HE × 200).

Quel est votre diagnostic ?


160 S. Fernández-Aguilar et al.

Diagnostic : Vasitis nodosa avec de coupe réalisés, nous n’avons pas mis en évidence de
structure épithéliale intravasculaire accompagnant les sper-
granulomes spermatocytaires matozoïdes.
La vasite noueuse (vasitis nodosa) est considérée actuel- Par ailleurs, des lésions d’invasion périneurale ont été
lement comme une lésion proliférative bénigne de rapportées jusque dans 16 % des cas [2], mais cette éven-
l’épithélium des canaux déférents survenant principalement tualité peut être simplement due à la présence normale
après traumatisme (vasectomie) [1]. Toutefois, elle a été de structures nerveuses relativement nombreuses dans
décrite « de novo » comme une séquelle de processus infec- l’adventice des canaux déférents.
tieux et du traitement chirurgical des hernies inguinales. De plus, les lésions de vasite noueuse peuvent être ren-
Selon les auteurs, ces lésions peuvent compliquer jusque contrées en association avec d’autres pathologies, telles que
50 % des vasectomies [2]. Unilatérale dans la majorité des les granulomes spermatocytaires (65 % des cas, [2]), le sper-
cas, elle se caractérise à l’examen microscopique par la pré- matocèle, la métaplasie mucineuse et les granulomes sur
sence de canaux contenant des spermatozoïdes s’étendant corps étranger (fil chirurgical).
dans le tissu conjonctif adjacent. Ces canaux peuvent être Plus rarement, des neuromes de type traumatique ont
également observés à l’intérieur des vaisseaux et le diagnos- été documentés. Leur origine ne serait toutefois pas
tic différentiel avec une lésion carcinomateuse se pose. La exclusivement mécanique et certains auteurs invoquent la
présence de spermatozoïdes associée à l’absence d’atypies sécrétion de facteurs de croissance par les cellules épithé-
nucléocytoplasmiques facilitent le diagnostic. liales proliférantes.
La présence de granulomes spermatocytaires accompa-
gnant la vasitis nodosa est fréquemment rapportée dans
la littérature et expliquerait la symptomatologie doulou- Références
reuse. L’invasion des structures vasculaires, en particulier
[1] Gaudin PB, Epstein JI. Diseases of the spermatic cord and para-
de type veineux, a été exhaustivement documenté par
testicular tissue. In: Murphy WM, editor. Urological Patholgy.
Balogh et Travis en 1985 [3] et a été comparée à l’infiltration Philadelphia: Saunders; 1997.
vasculaire de l’adénose sclérosante selon les descriptions [2] Hirschowitz L, Rode J, Guillebaud J, Bound W, Moss M. Vasi-
d’Eusebi et Azzopardi [4]. Elle aurait lieu après isole- tis nodosa and associated clinical findings. J Clin Pathol
ment des vaisseaux de la circulation sanguine lors de la 1988;41:419—23.
résection chirurgicale. Des lésions d’élastose avec occlu- [3] Balogh K, Travis WD. Benign vascular invasion in vasitis nodosa.
sion précéderaient ce phénomène et l’oblitération de la Am J Clin Pathol 1985;83:426—30.
lumière expliquerait l’absence de dissémination hémato- [4] Eusebi V, Azzopardi JG. Vascular infiltration in benign breast
gène. Dans notre cas, et malgré les multiples niveaux disease. J Pathol 1976;118:9—16.
Annales de pathologie (2009) 29, 52—54

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une masse pelvienne


A pelvic mass

Samia Hannachi Sassi ∗, Ilhem Bettaieb , Imen Abbes ,


Karima Mrad , Maha Driss , Rim Dhouib ,
Mongia Zitoun , Khaled Ben Romdhane

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, institut Salah Azaiez, Bab saadoun,


1006 Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 31 janvier 2008


Disponible sur Internet le 4 février 2009

Observation
Une femme âgée de 33 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, consultait pour
algies pelviennes évoluant depuis deux ans. Les explorations radiologiques concluaient
à une masse pelvienne envahissant la vessie et le rectum avec engainement de
l’uretère gauche entraînant une hydronéphrose en amont. Une laparotomie était indiquée.
L’examen peropératoire révélait une masse d’origine ovarienne gauche. Une tumorec-
tomie était pratiquée. L’examen macroscopique portait sur des fragments nodulaires
de 1 à 4 cm de grand axe, de consistance ferme et de couleur jaune grisâtre avec
des remaniements nécrotiques à la coupe. L’examen histologique montrait un paren-
chyme ovarien largement dissocié par un infiltrat inflammatoire polymorphe dense
et diffus associant lymphocytes, plasmocytes et polynucléaires neutrophiles réalisant
parfois des foyers abcédés (Fig. 1). Cet infiltrat inflammatoire était particulière-
ment riche en cellules histiocytaires au cytoplasme abondant bien limité et spumeux
avec présence de quelques cellules géantes multinucléées (Fig. 2). Les corps de
Michaelis-Gutmann étaient absents. Les colorations spéciales du PAS et du Gram étaient
négatives.

∗ Auteur correspondant. Villa 7, impasse 3, rue des Mères-de-Tunisie, les jardins d’El Menzah El Manar I 2092, Tunis, Tunisie.
Adresse e-mail : Samia.hannachi@rns.tn (S.H. Sassi).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.01.008
Une masse pelvienne 53

Figure 1. Parenchyme ovarien dissocié par un infiltrat inflamma-


toire polymorphe (HE × 100). Figure 2. Infiltrat inflammatoire riche en histiocytes spumeux
Mixed inflammatory infiltrate of the ovary (HE × 100). (HE × 100).
Abundant foamy histiocytes admixed with inflammatory cells
(HE × 100).

Quel est votre diagnostic ?


54 S.H. Sassi et al.

Diagnostic : pseudotumeur inflammation granulomateuse chronique caractérisée par la


présence d’histiocytes spumeux, riches en fer et en calcium
xanthogranulomateuse inflammatoire de
mis en évidence par les colorations spéciales, et de cor-
l’ovaire puscules arrondis calcifiés intra- et extracellulaires appelés
corps de Michaelis-Gutmann [1,3].
La pseudotumeur xanthogranulomateuse inflammatoire est L’étiopathogénie de cette entité histologique est encore
une forme rare d’inflammation chronique définie par la inconnue. Certains facteurs prédisposants ont été rapportés
présence d’histiocytes spumeux caractéristiques, de lym- dans la littérature : l’infection génitale, l’antibiothérapie
phocytes, de plasmocytes et de polynucléaires neutrophiles. inefficace, les désordres lipidiques, l’endométriose et le
Des cellules géantes de type corps étranger, des fibro- port de dispositif intra-utérin [1,5].
blastes et des foyers de nécrose peuvent se voir. La tumeur Le traitement consiste à faire un prélèvement à visée
se caractérise par son potentiel évolutif agressif vis-à- bactériologique suivi d’une ovariectomie et d’une antibio-
vis des organes atteints. Le rein, la vessie et la vésicule thérapie adaptée ou à large spectre en l’absence d’infection
biliaire sont les lieux privilégiés de cette affection [1]. génitale [1].
La localisation tubo-ovarienne, très souvent méconnue, est En conclusion, nous insistons sur l’aspect pseudotumoral
exceptionnelle avec seulement 17 cas rapportés dans la réalisé par cette affection conduisant le plus souvent à une
littérature sous différentes appellations : salpingiose xan- chirurgie mutilante, comme c’est le cas de notre observa-
thomateuse, xanthomatose tubaire, xanthogranulome de tion, en l’absence d’argument histologique préopératoire.
l’ovaire et pseudotumeur inflammatoire pelvienne [1—3]. La
pseudotumeur xanthogranulomateuse inflammatoire tubo-
ovarienne touche la femme d’âge moyen de 31 ans avec des Références
extrêmes de 23 à 72 ans [1]. Le tableau clinique est souvent
bruyant associant douleurs pelviennes chroniques et masse [1] Gray Y, Libbey NP. Xanthogranulomatous salpingitis and oopho-
abdominale dans un contexte d’altération de l’état géné- ritis: A case report and review of the literature. Arch Pathol Lab
ral. Sur le plan radiologique, une pathologie tumorale est Med 2001;125:260—3.
très souvent évoquée. Jung et al. [4] ont décrit un aspect [2] Naik M, Madiwale C, Vaideeswar P. Xanthogranulomatous oopho-
IRM très évocateur de cette affection : il s’agit d’une paroi ritis — a case report. Indian J Pathol Microbiol 1999;42:89—91.
kystique épaisse, siège de nodules intramuraux avec hyper- [3] Pace EH, Voet RL, Melancon JT. Xanthogranulomatous oophori-
signal en T2, hyposignal en T1 et ne prenant pas le produit tis: An inflammatory pseudotumor of the ovary. Int J Gynecol
de contraste. Pathol 1984;3:398—402.
[4] Jung SE, Lee JM, Lee KY, Han KT, Hahn ST. Xanthogranulomatous
Le diagnostic positif est uniquement anatomopatho-
oophoritis: MR imaging findings with pathologic correlation. Am
logique. Macroscopiquement, l’ovaire est remplacé par J Roentgenol 2002;178:749—51.
une masse solide lobulée jaunâtre assez bien limitée. À [5] Punia RS, Aggarwal R, Amanjit S, Mohan H. Xanthogra-
l’examen histologique, la pseudotumeur xanthogranuloma- nulomatous oophoritis and salpingitis: Late sequelae of
teuse inflammatoire tubo-ovarienne pose le problème du inadequately treated staphylococcal PID. Indian J Pathol Micro-
diagnostic différentiel avec la malakoplasie qui est une biol 2003;46:80—1.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 53-55

Une tumeur atypique Cas


pour diagnostic
chez un très jeune enfant
Atypical desmoplastic small round cell tumor in a very young child

Dominique Berrebi(1), Amal Benkirane(1), Latifa Ferkdadji(1), Pascal de Lagausie(2), Olivier Delattre(3),
Pascale Chomette(2), Gudrun Schleiermacher(3, 4), Jean Michon(4), Michel Peuchmaur(1)
(1) Services d’Anatomie Pathologique et EA3102 Université Paris VII,
(2) Services de Chirurgie Pédiatrique et EA3102 Université Paris VII, Hôpital Robert Debré, 48 Bd Sérurier 75019, Paris.
(3) Laboratoire de Pathologie Moléculaire des Cancers, INSERM, U509,
(4) Service d’Oncologie pédiatrique, Institut Curie, 26 rue d’ULM, 75248, Paris.

Berrebi D, Benkirane A, Ferkdadji L, de Lagausie P, Delattre O, Chomette P et al. Une tumeur atypi-
que chez un très jeune enfant. Ann Pathol 2007 ; 27 : 53-55

Observation (CD99), neuroendocrines ou lymphoïdes.


L’étude par RT-PCR montrait d’un trans-
crit spécifique de la translocation
Il s’agit d’un garçon âgé de 4 ans hospita- t(11,22)(p13, q12)[EWS/WT1].
lisé pour douleurs abdominales. L’écho-
graphie abdominale a montré une masse a
intra-abdominale sous-hépatique. L’ima-
gerie tomodensitométrique était en faveur
d’une origine mésentérique de la masse.
Les marqueurs biologiques (alpha-fœto-
protéine et β−HCG) étaient négatifs.
Après échec d’un traitement antibiotique
et anti-inflammatoire, une cœlioscopie
exploratrice avec exérèse tumorale a été
effectuée. Il s’agissait d’une masse pesant
7 g et mesurant 2,5 cm. La tumeur infiltrait
l’épiploon, paraissait non encapsulée,
était de consistance ferme et de couleur b
blanc nacré. Un fragment a été immédia-
tement mis en culture pour une étude
cytogénétique et un autre a été immé-
diatement congelé. L’étude histologi-
que montrait une prolifération tumorale
à petites cellules rondes totalement
dépourvue différenciation morphologi-
que, avec un cytoplasme mal défini, un
noyau ovoïde à chromatine fine avec un
petit nucléole et de nombreuses mitoses.
Les cellules tumorales s’agençaient en
travées, en cordons et en trabécules déli- FIG. 1. — a) Présence de territoires restreints de travées con-
jonctives conjonctives d’allure desmoplastique (flèche) enser-
mitant des espaces clairs. Dans moins de rant les amas de cellules tumorales. Hématéine-éosine,
5 % des territoires examinées, il existait grandissement × 250. b) Immunohistochimie avec l’anticorps
des travées conjonctives enserrant les anti-WT-1 montrant une forte positivité des noyaux des cel-
amas de cellules tumorales (figure 1a). lules tumorales. Hématéine-éosine, grandissement × 400. Accepté pour publication
L’étude immunohistochimique exhaus- FIG. 1. — A: Some limited desmoplastic areas are obser- le 03 mars 2006
ved (arrow). Hematein-eosine, original magnification
tive montrait une expression par les cel- ×250. B: Immunohistochemistry using anti-WT-1 anti- Tirés à part : D. Berrebi,
lules tumorales de la vimentine et la body showing a strong intra-nuclear expression by the voir adresse
desmine en dot, de WT-1 en intra- tumor cells. Hematein-eosine, original magnification ×400.
en début d’article.
nucléaire (figure 1b) et une absence e-mail :
d’expression de la myogénine, des mar- Quel est votre diagnostic ? dominique.berre-
queurs épithéliaux, neuroectodermiques bi@rdb.ap-hop-paris.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 53


Dominique Berrebi et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 53-55

Diagnostic : d’Ewing est une aide importante au diagnos-


Tumeur desmoplastique tic différentiel entre ces deux tumeurs [4].
Des tumeurs hybrides ont été décrites, com-
à petites cellules rondes. binant un aspect de PNET en microscopie
optique et électronique associé à la pré-
sence d’un transcrit de fusion EWS/FLI-1 de sar-
La tumeur desmoplastique à petites cellules come d’Ewing/PNET, tandis que la topographie
rondes (DSRCT) est une tumeur rare et (cavité péritonéale), le profil immunohistochi-
extrêmement agressive. Son pronostic est mique et l’existence d’une desmoplasie
très sombre avec des récidives fréquentes et étaient en faveur d’une DSRCT [5]. L’exis-
un décès survenant inéluctablement quelques tence de ces formes hybrides a fait soulever
mois à quelques années malgré un traitement l’hypothèse d’une parenté possible entre
agressif. La DSRCT survient préférentielle- ces deux tumeurs. La DSRCT est associée
ment chez le grand enfant et l’adolescent dans plus de 95 % des cas à une transloca-
(moyenne d’âge : 27 ans) avec une nette pré- tion chromosomique réciproque, t(11,22)
dominance masculine [1, 2]. Elle est excep- (p13,q12) entre le gène du sarcome d’Ewing
tionnelle chez l’enfant de moins de 5 ans, (EWS) et le gène de la tumeur de Wilm’s
avec seulement deux cas décrits dans la lit- (WT1) [6]. Des variants de cette t(11;22) ont
térature [3]. Le siège électif de ce type de été démontrés dans quelques cas dont la
tumeur est essentiellement intra-abdominal t(2;21;22)ou la t(11;22;21).
[2], au niveau du péritoine sous forme de Dans sa localisation rénale, la DSRCT doit
masse unique ou multiples. Quelques cas être différenciée d’un néphroblastome pure-
extra péritonéaux ont été décrits, principa- ment blastémateux ou d’une PNET. Dans ces
lement chez le sujet âgé (au niveau para-tes- cas difficiles ou atypiques (localisation, pré-
ticulaire, ovarien, rénal, pulmonaire) ou plus sentation clinique, âge très jeune, variantes
exceptionnellement chez l’enfant (osseux). morphologiques), la présence de desmoplasie
Au point de vue histologique, l’aspect le même focale, le caractère poly-phénotypique
plus habituel est celui d’une prolifération à de la prolifération tumorale co-exprimant
petites cellules rondes, indifférenciées, des marqueurs ectodermiques et mésen-
monomorphes, dispersées dans un stroma chymateux, la positivité de WT-1 et l’étude
desmoplastique généralement abondant [2]. moléculaire, permettent d’aboutir au dia-
D’autres variantes morphologiques sont décri- gnostic définitif de DSRCT. ■
tes, associant des zones rhabdoïdes, claires,
pléomorphes, basaloïdes, glandulaires [2].
Key words: children, desmoplastic small round cell tumor, WT-1.
Ces formes atypiques rendent le diagnostic
Mots-clés : enfant, tumeur desmoplastique à cellules rondes, WT-1.
particulièrement difficile, d’autant que la
desmoplasie peut être focal voire absente
[1]. L’étude immunohistochimique est une aide
importante au diagnostic lorsqu’elle montre
une positivité conjointe des marqueurs épithé- Références
liaux (cytokératine, EMA), conjonctifs (vimen-
tine), musculaire (desmine) et neuro endocrines
(NSE). La positivité de la desmine atteint [1] Gerald WL, Miller HK, Battifora H, Miettinen M,
95 % des cas et réalise un aspect en goutte Silva EG, Rosai J. Intra-abdominal desmoplastic small
paranucléaire, celle des marqueurs épithé- round-cell tumor. Report of 19 cases of a distinctive
liaux et de la vimentine concerne 90 % des type of high-grade polyphenotypic malignancy affec-
cas et la NSE environ 75 % des cas. Le phé- ting young individuals. Am J Surg Pathol 1991 ; 15 :
notype immunohistochimique peut être 499-513.
incomplet rendant le diagnostic particuliè- [2] Ordonez NG, el-Naggar AK, Ro JY, Silva EG, Mac-
rement difficile. Chez l’enfant, la DSRCT kay B. Intra-abdominal desmoplastic small cell tumor:
pose un problème de diagnostic différentiel a light microscopic, immunocytochemical, ultrastruc-
avec quasiment l’ensemble des tumeurs à tural, and flow cytometric study. Hum Pathol 1994 ;
petites cellules rondes de l’enfant et plus 25 : 109-10.
particulièrement avec le sarcome d’Ewing/ [3] Mingo L, Seguel F, Rollan V. Intraabdominal desmo-
tumeur primitive neuro-ectodermique (PNET). plastic small round cell tumour. Pediatr Surg Int 2005 ;
Les aspects morphologiques peuvent être très 5 : 1401-11.
voisins dans ces deux types de tumeurs et [4] Barnoud R, Sabourin JC, Pasquier D, Ranchere D,
l’étude immunohistochimique peut être Bailly C, Terrier-Lacombe MJ, Pasquier B. Immuno-
trompeuse avec une positivité de CD99 ou histochemical expression of WT1 by desmoplastic
FLI-1 dans la DSRCT. La positivité quasi- small round cell tumor: a comparative study with
constante de l’anticorps anti-WT-1 dans les other small round cell tumors. Am J Surg Pathol
DSRCT et sa négativité dans les sarcomes 2000 ; 24 : 830-6.

54
Tumeur desmoplastique à cellules rondes

[5] Katz RL, Quezado M, Senderowicz AM, Villalba L, [6] Rodriguez E, Sreekantaiah C, Gerald W et al. A
Laskin WB, Tsokos M. An intra-abdominal small round recurring translocation t(11;22)(p13;q11.2), charac-
cell neoplasm with features of primitive neuroectoder- terizes intra-abdominal desmoplastic small round-
mal and desmoplastic round cell tumor and a EWS/FLI- cell tumors. Cancer Genet Cytogenet 1993 ; 69 : 17-
1 fusion transcript. Hum Pathol 1997 ; 28 : 502-9. 21.

55
Annales de pathologie (2009) 29, 44—46

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur brachiale rare de l’enfant


A rare tumour of the arm in a child

Nadia Boujelbène a, Aschraf Chadli-Debbiche a,∗,


Khadija Chèrif a, Houda Kilani a, Naceur Labbène a,
Olfa Khayat a, Najib Kaâbar b, Sadok Saied b,
Mohamed Ben Ayed a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Habib Thameur, 8, rue
Ali-ben-Ayed, 1008 Montfleury, Tunis, Tunisie
b
Service de chirurgie pédiatrique, hôpital Habib Thameur, 8, rue Ali ben Ayed,
1008 Montfleury, Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 4 juin 2008


Disponible sur Internet le 24 janvier 2009

Observation
Un garçon de 14 ans, aux antécédents de sinusite chronique, consultait pour une tumé-
faction indolore du bras gauche, apparue spontanément depuis l’âge de sept ans ayant
augmenté lentement de volume. L’examen clinique trouvait une masse bien limitée du tiers
supérieur du bras gauche, arrondie, de consistance dure, peu mobile, non compressive et
non inflammatoire. Le reste de l’examen somatique était normal. L’échographie des parties
molles précisait le siège sous-cutané de cette masse qui mesurait 5 cm × 4,6 cm × 4 cm et
qui refoulait le plan musculaire. Elle était hyperéchogène, contenait de fines calcifications
et était faiblement vascularisée. À l’IRM, cette masse de nature tissulaire se développait
au dépend du muscle brachial gauche, refoulant la graisse sous-cutanée. Une exérèse était
réalisée. L’étude macroscopique portait sur une tumeur oblongue, bien encapsulée (Fig. 1).
À la coupe, elle était d’aspect homogène, de couleur blanchâtre et de consistance ferme
(Fig. 2). Histologiquement, cette tumeur était faite d’une prolifération paucicellulaire fusi-
forme (Fig. 3), d’allure tantôt fibroblastique, tantôt myofibroblastique, formée de cellules
à cytoplasme abondant, éosinophile, dans un abondant tissu collagène (Fig. 4), souvent
hyalinisé et contenant des calcifications dystrophiques. L’étude immuno-histochimique
révélait une expression de la vimentine par les cellules tumorales. Les anticorps anti-actine
muscle lisse, anti-CD34, anti-protéine S100 et anti-CD68 étaient négatifs.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : aschraf.chadlidebbiche@rns.tn (A. Chadli-Debbiche).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Publié par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.annpat.2008.06.039
Une tumeur brachiale rare de l’enfant 45

Figure 1. Tumeur de consistance ferme, d’aspect homogène.


Firm, well limited tumour with homogeneous and whitish appea-
rance on cross section. Figure 3. Prolifération cellulaire fusiforme dans un abondant
tissu collagène (HE × 200).
Spindle cell proliferation in dense collagenous stroma (HE × 200).

Figure 2. Tumeur de couleur blanc grisâtre à la coupe. Figure 4. Cellules d’aspect myofibroblastique (HE × 400).
Whitish tumor on gross section. Myofibroblast-like cells (HE × 400).

Quel est votre diagnostic ?


46 N. Boujelbène et al.

Diagnostic : fibroblastome desmoplastique sées dans une matrice fibromyxoïde avec, comme chef de
file, la tumeur desmoïde (ou fibromatose extra-abdominale)
(FD)
[1,3,5]. Celle-ci est cependant plus cellulaire, plus vascula-
Le FD ou fibrome collagénique est une tumeur bénigne fibro- risée et localement agressive [1,3]. Les autres diagnostics
blastique et/ou myofibroblastique rare des tissus mous, à différentiels sont la fasciite nodulaire, le fibrome des ten-
croissance lente, décrite pour la première fois par Evans dons, le neurofibrome, la tumeur fibreuse solitaire, le
en 1995, à partir d’une série de sept cas [1]. Elle survient sarcome fibromyxoïde de bas grade, le fibrome pléomorphe,
souvent chez l’adulte entre 50 et 60 ans, rarement chez la pseudotumeur fibreuse calcifiante et le myxome [1—3].
l’adolescent comme dans notre observation et montre une Outre les aspects cliniques et les caractéristiques histolo-
prédominance masculine [2,3]. Cliniquement, elle se pré- giques, l’immuno-histochimie aide à redresser le diagnostic.
sente comme une masse sous-cutanée, adhérente parfois Sur le plan cytogénétique, une translocation t(2 ; 11),
au muscle squelettique, isolée, asymptomatique, évoluant déjà rapportée par Sciot et al., a été confirmée par Bernal
depuis plus de six mois [2,3]. et al. pour qui la mise en évidence de la translocation t(2 ;
Décrite initialement au niveau du cou, des bras, des 11) (q31 ; q12) permet à la fois d’établir le diagnostic de FD
épaules, des membres inférieurs et des extrémités, elle et d’écarter celui de tumeur desmoïde [5].
présente, en fait, une distribution anatomique large [1,2]. Le FD pose également un problème nosologique. Selon
À l’examen macroscopique, la taille tumorale varie habi- Evans, il serait plutôt d’origine néoplasique que réaction-
tuellement entre 1 et 4 cm, mais peut atteindre 20 cm. nelle vu l’absence de contexte ou de cause spécifique à cette
La lésion apparaît bien circonscrite, ovale, en forme de prolifération fibreuse réactionnelle [1]. Dans notre cas, la
disque ou parfois d’aspect lobulé. À la coupe, elle est tumeur était de survenue spontanée et le patient ne rappor-
ferme, homogène, d’aspect fibreux, brillant et de cou- tait aucun contexte traumatique antérieur. Le traitement de
leur blanc grisâtre [2,3]. L’aspect histologique, comme dans choix recommandé du FD est l’excision chirurgicale totale
notre observation, montre, au sein d’un stroma modérément avec une évolution, en général, sans récidives [1,2,5].
vascularisé, fibromyxoïde ou riche en bandes collagènes hya-
linisées, une prolifération paucicellulaire de fibroblastes et
de myofibroblastes éparpillés, d’aspect fusiforme ou stel- Références
laire. Les cellules ont un noyau relativement large, ovale
[1] Evans HL. Desmoplastic fibroblastoma. A report of seven cases.
ou allongé avec souvent un nucléole proéminent et un cyto-
Am J Surg Pathol 1995;19:1077—81.
plasme amphophile. Les figures de mitoses sont rares, voire [2] Mesquita RA, Okuda E, Jorge WA, Cavalcanti V, Paulo S. Colla-
absentes. Des cellules binucléées et des cellules géantes genous fibroma (desmoplastic fibroblastoma) of the palate. Oral
multi nucléées sont fréquemment associées à cette prolifé- Surg Oral Med Oral Pathol Oral Radiol Endod 2001;91:80—4.
ration [2,4]. Il n’existe toutefois pas de contingent cellulaire [3] Miettinen M, Fetsch JF. Collagenous fibroma (desmoplastic
inflammatoire en dehors de quelques mastocytes. L’étude fibroblastoma): a clinicopathologic analysis of 63 cases of a dis-
immuno-histochimique montre une expression intense et tinctive soft tissue lesion with stellate-shaped fibroblasts. Hum
diffuse de la vimentine et de façon variable de l’actine Pathol 1998;29:676—82.
muscle lisse et des kératines AE1/AE3 par les cellules tumo- [4] Nishio J, Iwasaki H, Nishijima T, Kikuchi M. Collagenous fibroma
rales. Toutefois, le marquage par les anticorps anti-desmine, (desmoplastic fibroblastoma) of the finger in a child. Pathol Int
2002;52:322—5.
anti-protéine S100 et anti-CD34 est négatif [3].
[5] Bernal K, Nelson M, Neff JR, Nielson SM, Bridge JA. Translocation
Le diagnostic différentiel du FD se pose avec les tumeurs t(2;11)(q31;q12) is recurrent in collagenous fibroma (desmoplas-
des tissus mous bénignes, localement agressives ou de bas tic fibroblastoma). Cancer Genet Cytogenet 2004;149:161—3.
grade de malignité constituées de cellules fusiformes disper-
Annales de pathologie (2008) 28, 170—172

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur cervicale rare


A rare cervical tumor

Emna Chelbi a, Dominique Cazals-Hatem a,∗,


Rodolphe Leroux b, Frédéric Paycha c,
Maggy Grossin d, Pierre Bedossa a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Beaujon, 100, boulevard
Général-Leclerc, 92118 Clichy, France
b
Service de chirurgie orthopédique, hôpital Beaujon, 100, boulevard Général-Leclerc,
92118 Clichy, France
c
Unité de médecine nucléaire, hôpital Louis-Mourier, Colombes, France
d
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Louis-Mourier,
Colombes, France

Accepté pour publication le 17 septembre 2007


Disponible sur Internet le 2 juillet 2008

Observation
Une malade, âgée de 66 ans, sans antécédent particulier, présentait depuis six mois des
névralgies cervicobrachiales, non soulagées par la kinésithérapie, la prise d’AINS et la
corticothérapie. Aucune anomalie osseuse n’était visible sur les radiographies standard du
rachis cervical faites de manière itérative.
Devant la majoration des symptômes douloureux et l’apparition d’une dysphagie,
une tomodensitométrie complémentaire était réalisée : elle révélait des remaniements
plurilacunaires hétérogènes du corps vertébral de C3 avec rupture corticale et images
d’épidurite. À l’IRM, les lésions osseuses étaient hypo-intenses en T1 et hyperintenses
en T2 avec rehaussement modéré du signal après injection au gadolinium. Un diagnos-
tic de tumeur osseuse ostéolytique primitive ou secondaire était évoqué et une biopsie
chirurgicale de C3 était décidée.
L’analyse anatomopathologique identifiait une prolifération tumorale invasive lobu-
lée, faite de cellules indépendantes ou disposées en cordons ou nappes au sein d’une
substance myxoïde bleu alcian négative. Les cellules tumorales avaient un cytoplasme éosi-
nophile abondant souvent vacuolisé et étaient pourvues d’un noyau régulier, faiblement
nucléolé, jamais en mitose. Les lobules étaient soulignés par de fins tractus conjonctifs
(Fig. 1).
L’étude immunohistochimique révélait une expression diffuse et intense des cytokéra-
tines (AE1/AE3, KL1), de la vimentine et la PS100 (Fig. 2). Le CD10 n’était pas exprimé.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : dominique.cazals-hatem@bjn.aphp.fr (D. Cazals-Hatem).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.09.003
Une tumeur cervicale rare 171

Figure 1. Nappe de cellules au cytoplasme éosinophile souvent Figure 2. Expression de la cytokératine par les cellules tumo-
vacuolisé (HE × 250). En cartouche : détail des cellules vacuolisées rales (KL1 × 250). En cartouche : cellules tumorales PS100 positives
(HE × 400). (PS100 × 400).
Sheets of cells with eosinophilic and vacuolated cytoplasm Neoplastic cells expressing cytokeratin (KL1 × 250). Insert: expres-
(HE × 250). Insert: detail of vacuolated cells (HE × 400). sion of PS100 (PS100 × 400).

Quel est votre diagnostic ?


172 E. Chelbi et al.

Diagnostic : chordome La variante chondroïde repose sur l’indentification de


territoires ressemblant à du cartilage myxoïde ou hyalin et
Le chordome est une tumeur de bas grade ou de grade ayant les mêmes caractéristiques immunohistochimiques
intermédiaire développée chez l’adulte à partir de vestiges [1,5]. La variante dédifférenciée ou sarcomatoïde associe
de la notochorde anormalement présents le long de l’axe un aspect de chordome typique avec des images de sarcome
rachidien. Le chordome représente 1 à 4 % de l’ensemble de haut grade [1].
des tumeurs osseuses malignes [1]. La tumeur est rare avant L’immunophénotype du chordome est caractéristique
30 ans, le pic de fréquence se situe entre les cinquième et avec une co-expression des marqueurs épithéliaux (pancyto-
sixième décennies. La prédominance masculine est nette kératine, EMA, CK8 et 19), de la vimentine et de la protéine
(sex-ratio : 2—3/1) [1]. S100 [1,5]. Il permet d’éliminer une métastase d’un
La localisation de cette tumeur est uniquement axiale carcinome rénal à cellules claires, d’un adénocarcinome
avec une prédilection aux deux extrémités du rachis. Selon mucosécrétant, un liposarcome ou un épendymome myxo-
la série de la Mayo Clinic, 47 % des chordomes siègent papillaire. Le problème diagnostique le plus délicat est de
sur le sacrum, 38 % à la base du crâne et 15 % au niveau distinguer le chordome, surtout dans sa forme chondroïde,
du rachis mobile (cervical [7 %], lombaire [7 %] et dorsal du chondrosarcome myxoïde. L’identification de territoires
[1 %]) [2]. À l’étage cervical, l’atteinte est souvent bi- de chondrosarcome conventionnel et la négativité habi-
ou plurivertébrale et affecte préférentiellement C3-C4 ; tuelle des marqueurs épithéliaux résolvent généralement
l’atteinte de C1-C2 n’a été rapportée que ponctuellement. le problème. Selon certaines équipes l’expression de
C’est une néoplasie d’évolution lente dont le diagnostic la protéine-tau, observée dans 75 % des chordomes et
est souvent tardif. Le chordome rachidien est longtemps constamment absente dans les chondrosarcomes, pourrait
asymptomatique avant l’apparition de manifestations aider au diagnostic des chordomes [5].
cliniques non spécifiques à type de rachialgies avec ou L’agressivité du chordome est surtout due à une inva-
sans radiculalgies ; au niveau cervical, il peut simuler une sion locale ; la tumeur est classée dans la classification
hernie discale ou donner des symptômes douloureux de la OMS parmi les tumeurs de faible grade de malignité [1].
sphère ORL. Le délai moyen entre le début d’apparition Cependant, le taux élevé de récidive (28 à 80 %) et les
des symptômes et le diagnostic varie de quelques mois à métastases tumorales observées dans 10 à 30 % des cas
plusieurs années avec une moyenne de 15 mois [1,3]. soulèvent l’opportunité de les classer parmi les tumeurs de
En imagerie, le chordome se traduit par une ostéolyse grade intermédiaire [6].
médiane ou paramédiane avec effet de masse à dévelop- Le traitement curateur relève de la possibilité d’une exé-
pement antérieur ou antérolatéral. La tomodensitométrie rèse chirurgicale la plus complète possible afin d’éviter les
objective une lésion hypodense prenant peu le contraste, récidives locales ; celle-ci peut être obtenue par une tech-
avec une discordance entre l’étendue de la composante nique séparée en deux blocs (corps vertébral d’un côté et
tissulaire extra-osseuse et la zone d’envahissement osseux. arc postérieur de l’autre). De nouveaux espoirs sont appor-
Sur l’IRM, le chordome est caractérisé par un hyposignal ou tés par la radiothérapie aux ions carbone, la radiofréquence
un signal intermédiaire en T1 et un hypersignal en T2. La ou encore l’imatinib (Glivec) suite à la mise en évidence par
discordance entre la négativité de la scintigraphie osseuse RT-PCR d’une expression de PDGFRbêta dans des chordomes
conventionnelle et l’importance de l’atteinte osseuse en avancés avec réponse tumorale satisfaisante [6,7].
imagerie morphologique est un élément pivot dans la
démarche diagnostique [4].
À l’analyse macroscopique, les chordomes sont des Références
tumeurs non encapsulées généralement de grande taille
allant de 5 à 15 cm de diamètre, d’architecture lobulée et
[1] Fletcher C, Unni KK, Mertens F. World Health Organization clas-
d’aspect myxoïde ou gélatineux blanc-grisâtre à la coupe. sification of tumors. Pathology and genetics of tumors of soft
Des remaniements hémorragiques, kystiques et nécrotiques tissue and bone. Lyon: IARC Press; 2002.
sont classiquement observés [1,3]. À l’examen histologique, [2] Unni KK, Dahlin DC.Dahlin’s bone tumors: general aspects and
la prolifération est lobulée par de fins septa fibreux. Les cel- data on 11,087 cases. 5th ed. Philadelphia: Lippincott-Raven;
lules tumorales s’organisent en cordons, travées ou nappes 1996. p. 291—305.
sur un fond myxoïde. Leur cytoplasme est de façon carac- [3] Salisbury JR. Embryologie et pathologie de la notochorde
téristique multivacuolaire sous forme de grandes vacuoles humaine. Ann Pathol 2001;21:479—88.
séparées par de fines cloisons intracytoplasmiques, donnant [4] Murphey M, Andrews CL, Flemming DJ, Temple T, Smith S,
un aspect de cellule dite physaliphore (terme venant du Smirniotopoulos JG. Primary tumors of the spine: Radiologic-
pathologic correlation. Radiographics 1996;16:1131—58.
grec physalis bulle et phero porter). Les cellules tumo-
[5] Gavril C, Bouvier C, Liprandi A, Dufour H, Peragut JC, Zanaret M,
rales peuvent prendre d’autres aspects : éosinophile ou et al. Tumeurs osseuses myxoïdes de la base du crâne : à propos
épithélioïde, « en bague à chaton », étoilé ou fusiforme. Le de neuf cas. Ann Pathol 2002;22:259—66.
diagnostic de chordome est d’autant plus facile que les cel- [6] Riopel C, Michot C. Les chordomes. Ann Pathol 2007;27:6—15.
lules physaliphores sont évidentes (dont l’abondance peut [7] Casali PG, Messina A, Stacchiotti S, Tamborini E, Crippa F,
varier de 1 à 100 % des cellules). Des atypies cytonucléaires Gronchi A, et al. Imatinib mesylate in chordoma. Cancer
sont parfois présentes, sans valeur pronostique [1,3]. 2004;101:2086—97.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 147-8

Une tumeur congénitale du cavum Cas


pour diagnostic
A congenital tumor of the rhinopharynx

Wafa Koubaa (1), Amina Mekni (1), Ines Chelly (1), Khadija Bellil (1), Selma Bellil (1), Slim Haouet (1),
Samia Sahtout (2), Nidhameddine Kchir (1), Moncef Zitouna (1)
(1) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques,
(2) Service d’Oto-Rhino-Laryngologie, Hôpital la Rabta, 1007 Bab Saadoun, Tunis, Tunisie.

Koubaa W, Mekni A, Chelly I, Bellil K, Bellil S, Haouet S et al. Une tumeur congénitale du cavum. Ann
Pathol 2007 ; 27 : 147-8.

Observation

Un nouveau-né de sexe masculin âgé de


30 jours était amené aux urgences pour
une dyspnée laryngée. L’interrogatoire des
parents trouvait la notion d’une obstruc-
tion nasale et d’une gêne respiratoire
depuis trois semaines, prédominant au
cours de l’allaitement. La mère avait accou-
ché sans difficulté par voie basse d’un
nouveau-né pesant 3 100 g à la naissance
et dont le score d’APGAR était respec-
tivement de 8 et 10 à 1 et à 5 minutes. Il ne FIG. 1. — Prolifération tumorale d’architecture nodulaire,
présentait aucune malformation congéni- tapissée en surface par un épithélium malpighien non kéra-
tinisé (HE × 100).
tale. L’examen physique à l’admission trou-
vait un bébé cyanosé, dyspnéique, avec FIG. 1. — Surface squamous epithelium with underlying
epithelial and stromal elements (HE×100).
des signes de lutte à type de battement
des ailes du nez, de tirage sous-costal et
de balancement thoraco-abdominal. La
nasofibroscopie mettait en évidence une
masse rhinopharyngée médiane pédi-
culée, d’aspect tissulaire qui semblait
provenir du cavum et descendait dans
l’oropharynx. L’imagerie par résonance
magnétique montrait une tumeur rhino-
pharyngée évoquant un fibrome naso-
pharyngien ou un angiome. Une exérèse
par voie endoscopique a été réalisée. À
l’examen macroscopique, la tumeur était
ferme, bosselée, à surface lisse, de colo-
ration blanc-jaunâtre mesurant 2,5 cm de FIG. 2. — Nodules denses se composant de cellules stro-
grand axe. L’examen histologique mon- males fusiformes disposées en faisceaux courts et enchevê-
trait une tumeur d’architecture nodu- trés séparés par de petites structures canalaires
laire circonscrite, tapissée en surface par (HE × 400).
un épithélium malpighien non kérati- FIG. 2. — Densely cellular nodules with epithelial and
nisé (figure 1). Cette prolifération était spindle cells (HE×400).
constituée par des nodules cellulaires
denses, en périphérie desquels se trou- fibreux, lâche et de densité variable.
vaient des amas malpighiens et des struc- L’étude immunohistochimique montrait
tures canalaires. Les nodules denses se une expression diffuse des cytokérati-
Accepté pour publication
composaient de cellules fusiformes dis- nes par les structures épithéliales. Les
le 21 mars 2006
posées en faisceaux courts et enchevê- cellules stromales exprimaient la vimen-
trés séparés par de petites structures tine, l’actine muscle lisse et focalement Tirés à part : A. Mekni,
ductiformes (figure 2). Ces cellules stro- les cytokératines. voir adresse
males avaient un noyau arrondi à ova- en début d’article.
laire et présentaient de nombreuses Quel est votre diagnostic ? e-mail :
motoses par endroits. Le stroma était amina.mekninouira@yahoo.fr

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Wafa Koubaa et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 147-8

Diagnostic : Adénome significatif. Elle exprime la vimentine et l’actine


pléomorphe congénital muscle lisse et focalement par la protéine
S100, suggérant sa nature myoépithéliale [1,
du cavum ou tumeur de l’ébauche 5]. Celle-ci est confirmée par l’étude ultras-
des glandes salivaires tructurale qui montre des desmosomes, une
lame basale et des trousseaux de tonofila-
ments dans le cytoplasme [5]. Le diagnostic
La tumeur de l’ébauche des glandes salivaires différentiel se pose cliniquement avec de
est une tumeur rhinopharyngée rarissime, nombreuses lésions fréquentes en période
apparaissant en période néonatale, décrite en néonatale, notamment une atrésie choanale,
1980 sous le terme de lésion proliférative un hémangiome, un tératome, un hamartome
malpighienne du nasopharynx. L’appellation ou un crâniopharyngiome [5]. La localisa-
d’adénome pléomorphe congénital a été uti- tion et l’examen histopathologique permet-
lisée pour la première fois en 1985. Le terme tent de poser le diagnostic sans difficulté. Le
de « tumeur de l’ébauche des glandes salivai- traitement consiste en une exérèse simple, en
res » faisant référence au caractère hamarto- évitant de rompre le pédicule ce qui pour-
mateux de cette lésion a été introduit par rait enclaver la tumeur dans les voies aérien-
Dehner en 1994 [1-3]. Depuis 1980, unique- nes supérieures. L’évolution est favorable,
ment quinze cas de tumeur de l’ébauche sans récidive [4, 5]. ■
des glandes salivaires ont été rapportés.
La présentation de cette tumeur, parfaite-
ment illustrée par notre observation, est Key words: pleiomorphic congenital adenoma, cavum, pediatric
pathology.
relativement stéréotypée. Elle survient chez
le nouveau-né âgé de quelques jours à Mots-clés : adénome pléomorphe congénital, cavum, pédiatrie.
3,5 mois et touche préférentiellement le
sexe masculin [1, 3]. Elle se manifeste habi-
tuellement par une obstruction nasale et des
difficultés respiratoires survenant pendant Références
le sommeil et l’alimentation, plus rarement
par une épistaxis [3, 4]. L’endoscopie montre
une masse polypoïde rhinopharyngée médiane [1] Cohen EG, Yoder M, Thomas RM, Salerno D, Isaac-
rattachée à la muqueuse par un fin pédicule son G. Congenital salivary gland anlage tumor of the
[3]. À l’examen macroscopique, il s’agit d’une nasopharynx. Pediatrics 2003 ; 12 : 66-9.
néoformation ferme, à surface lisse et de cou- [2] Seifert G, Donath K. Juvenile pleomorphic parotid
leur blanc jaunâtre ou jaune brun [1]. L’aspect adenoma of embryonal structure. Pathologe 1998 ;
morphologique suggère une nature hamar- 19 : 286-91.
tomateuse plutôt qu’un véritable néoplasme.
[3] Boccon-Gibod LA, Grangeponte MC, Boucheron S,
En effet, la tumeur de l’ébauche salivaire pré-
Josset PP, Roger G, Berthier-Falissard ML. Salivary
sente des similarités histologiques avec les
gland anlage tumor of the nasopharynx: a clinicopa-
glandes salivaires accessoires normalement
thologic and immunohistochemical study of three
présentes dans le nasopharynx. Elle réalise
cases. Pediatr Pathol Lab Med 1996 ; 16 : 973-83.
des nodules mésenchymateux denses entou-
rés par des amas malpighiens renfermant [4] Michal M, Sokol L, Mukensnabl P. Salivary gland
parfois des globes cornés et des structures anlage tumor. A case with widespread necrosis and
canalaires rappelant l’architecture nodulaire large cyst formation. Pathology 1996 ; 28 : 128-30.
des acini [3, 5]. Les cellules épithéliales expri- [5] Dehner LP, Valbuena L, Perez-Atayde A, Reddick
ment les cytokératines globales et l’EMA. La RL, Askin FB, Rosai J. Salivary gland anlage tumor
composante stromale fusiforme, densément (“congenital pleomorphic adenoma”). A clinicopatho-
cellulaire, peut présenter de nombreuses logic, immunohistochemical and ultrastructural study
mitoses mais sans nécrose ni pléomorphisme of nine cases. Am J Surg Pathol 1994 ; 18 : 25-36.

148
Annales de pathologie (2009) 29, 146—148

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur cutanée particulière


An unusual tumor of the skin

Ines Chelly ∗, Fathia Maamouri ,


Amina Mekni , Khedija Bellil , Slim Haouet ,
Nidhameddine Kchir , Moncef Zitouna

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital la Rabta,


1009 Bab Sadoun ,Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 1er septembre 2008


Disponible sur Internet le 21 mars 2009

Observation
Un homme, âgé de 74 ans, sans antécédent, consultait en dermatologie pour un nodule isolé
de la cuisse évoluant depuis six mois et augmentant progressivement de taille. L’examen
clinique trouvait une lésion isolée, de couleur brune, ferme, arrondie, à surface légère-
ment mamelonnée située sur la face antérieure de la cuisse et mesurant 8 mm de diamètre.
Le patient a bénéficié d’une exérèse totale du nodule. L’examen histologique révélait
une tumeur épidermique superficielle, comme étant posée sur la peau et bien limitée
par rapport à l’épiderme sain (Fig. 1). Cette tumeur se caractérisait par la prolifération
de cellules kératinocytaires monomorphes deux fois plus volumineuses que les kératino-
cytes normaux. Leur cytoplasme était abondant et les noyaux étaient gros et nucléolés
(Fig. 2). La chromatine était fine. Il n’était pas noté de désorganisation architecturale
ni d’atypie cytonucléaire. Quelques mélanocytes étaient observés. Le derme sous-jacent
était fibreux.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : ineschelly@yahoo.fr (I. Chelly).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.09.056
Une tumeur cutanée particulière 147

Figure 1. Tumeur épidermique superficielle bien limitée interca-


lée de façon abrupte dans l’épiderme sain (HE × 100).
Abrupt transition at the edge of the lesion between the normal
epidermis and the acanthotic plaque (HE × 100).

Figure 2. Prolifération de cellules kératinocytaires monomorphes


deux fois plus volumineuses que les kératinocytes normaux
(HE × 400).
Proliferation of monomorphic large squamous cells that have a size
double of that of normal keratinocytes (HE × 400).

Quel est votre diagnostic ?


148 I. Chelly et al.

Diagnostic : acanthome à grandes cellules Une étude comparative entre l’acanthome à grandes cel-
lules (19 cas) et le lentigo sénile a montré que, au-delà de
L’acanthome à grandes cellules est une tumeur bénigne leur ressemblance histologique, ces deux lésions compor-
prenant naissance à partir des kératinocytes épidermiques. taient un nombre élevé de mélanocytes attesté par une
Cette tumeur décrite pour la première fois par Pinkus en forte expression de l’antigène anti-HMB-45, suggérant que
1970 est relativement rare. Son incidence est estimée à l’acanthome à grandes cellules serait en rapport avec un
un cas pour 1000 biopsies cutanées [1]. Elle survient à lentigo sénile remanié [5]. D’autres auteurs pensent qu’il
l’âge adulte et se localise surtout au niveau du tronc et s’agit plutôt d’une variante de la maladie de Bowen devant
des membres. Il existe une légère prédominance fémi- la présence de désorganisation architecturale, de dyskéra-
nine [1]. L’exposition solaire est le principal facteur de tose ainsi que de mitoses suprabasales [1,3]. Enfin, un cas
risque [2]. Cliniquement, la tumeur se présente comme d’acanthome à grandes cellules disséminé lié à une infection
une plaque légèrement pigmentée de 10 mm de diamètre par le papilloma virus HPV6 a été rapporté [6].
en moyenne [3]. Les lésions achromiques sont exception-
nelles [4]. De rares cas d’acanthomes multiples ont été
décrits. L’examen histologique montre une tumeur facile- Références
ment reconnaissable en raison de sa bonne limitation par
rapport à l’épiderme sain [1]. Les cellules tumorales sont [1] Sanchez Yus E, de Diego V, Urrutia S. Large cell acanthoma.
deux fois plus grandes que les kératinocytes normaux. Leur A cytologic variant of Bowen’s disease? Am J Dermatopathol
cytoplasme est abondant et clair et le noyau volumineux et 1988;10:197—208.
régulier sans atypie ni mitose [1]. De nombreux mélanocytes [2] Roewert HJ, Ackerman AB. Large-cell acanthoma is a solar len-
sont souvent observés. Dans une étude de 44 cas, Sanchez tigo. Am J Dermatopathol 1992;14:122—32.
Yus et al. [3] ont distingué trois variétés d’acanthome à [3] Sanchez Yus E, del Rio E, Requena L. Large cell acanthoma is a
distinctive condition. Am J Dermatopathol 1992;14:140—7.
grandes cellules. Le type classique (16 cas) est caractérisé
[4] Ambrojo P, Aguilar A, Requena L, Sanchez Yus E. Achromic ver-
par l’acanthose modérée, l’hyperkératose, les grandes cel- rucous large cell acanthoma. J Cutan Pathol 1990;17:182—4.
lules et l’hyperpigmentation. Le type verruqueux (12 cas) [5] Mehregan DR, Hamzavi F, Brown K. Large cell acanthoma. Int J
comporte un contingent verruqueux avec papillomatose Dermatol 2003;42:36—9.
et hyperkératose. Les 13 derniers cas étaient caractérisés [6] Berger T, Scockfelth E, Meyer T, Kisewetter F, Funk JO. Mul-
par une hyperkératose plane sans papillomatose asso- tiple disseminated large cell acanthoma of the skin associated
ciée. Notre observation correspond à la variante de type with human papilloma virus type 6. J Am Acad Dermatol
classique. 2005;53:335—7.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 325-326

Une tumeur de la fosse postérieure Cas


pour diagnostic

A tumour of the posterior fossa

Selma Bellil, Ilhem Bettaïeb, Khadija Bellil, Braham Emna, Ines Chelly, Slim Haouet,
Nidhameddine Kchir, Moncef Zitouna

Service d’Anatomie Pathologique, Hôpital la Rabta. 1007 Bab Saadoun. Tunis, Tunisie.

Bellil S, Bettaïeb I, Bellil K, Emna B, Chelly I, Haouet S et al. Une tumeur de la fosse postérieure. Ann Pa-
thol 20007 ; 27 : 325-326.

Observation tumorales à la vimentine (figure 2) et


un marquage focal et apical pour
l’EMA. En revanche, elles n’exprimaient
Un homme âgé de 36 ans, consultait pas la cytokératine, la GFAP, la protéine
pour hémiparésie droite, évoluant de S100 et les récepteurs de la progesté-
façon progressive depuis 8 mois, asso- rone. L’indice de prolifération Ki67
ciée à des signes d’hypertension intra- était de 12,5 %.
crânienne. L’examen neurologique
mettait en évidence une marche avec
crochetage, des réflexes ostéotendi-
neux vifs aux membres inférieurs avec
à l’examen des paires crâniennes une
atteinte du IX objectivée par la pré-
sence de troubles de déglutition. Le
reste de l’examen somatique était nor-
mal. Le scanner cérébral ainsi que
l’IRM révélaient un processus tumoral
de la fosse postérieure, développé au
dépend de la face postérieure et laté-
rale droite du tronc cérébral, au niveau
bulbaire. Il mesurait 3 cm de grand axe FIG. 1. — Prolifération tumorale d’architecture papillaire
à double composante kystique et char- (HE × 250).
nue calcifiée prenant fortement le FIG. 1. — Tumour with papillary pattern (HE ×250).
gadolinium. Ce processus était respon-
sable d’une hydrocéphalie par compres-
sion du plancher du 4e ventricule. Une
exérèse macroscopiquement complète
de la tumeur était réalisée. L’examen
histologique avait porté sur un matériel
fragmenté et montrait une proliféra-
tion tumorale d’architecture papillaire.
Les papilles, à axe conjonctivovasculaire,
étaient bordées par des cellules poly-
gonales, au cytoplasme abondant éosi-
nophile bien limité et au noyau atypique,
nucléolé. Les mitoses, nombreuses, Accepté pour publication
étaient estimées à 4 mitoses par 10 FIG. 2. — Les cellules tumorales expriment la vimentine le 30 novembre 2006
(IHC × 100).
champs au fort grossissement (figure 1).
FIG. 2. — Immunohistochemical staining of tumour cells Tirés à part : S. Bellil-Ben
Par ailleurs, on notait la présence de for vimentin (IHC x100 and 200). Haha,
foyers de nécrose ainsi qu’une infiltra- voir adresse
tion du parenchyme cérébral. L’étude en début d’article.
immunohistochimique montrait une Quel est votre diagnostic ? e-mail :
positivité intense et diffuse des cellules www.bellilhela@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 325


Selma Bellil et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 325-326

Diagnostic : Méningiome ristique, met en évidence les complexes de


papillaire de la fosse postérieure jonction cellulaire, les processus interdigi-
tants et les filaments intermédiaires [5]. Sur
le plan cytogénétique, Go et al. [4] ont rap-
Les méningiomes sont des tumeurs dérivées porté un cas de méningiome papillaire avec
des cellules arachnoïdiennes et caractéri- translocation t (1 ; 4) (q44 ; q21) et ont sug-
sées par un polymorphisme histologique géré qu’en dehors de la perte du chromo-
extrême dont les différentes classifications some 22 décrite au cours des méningiomes
rendent compte. Le méningiome papillaire, bénins, la présence d’une anomalie chro-
décrit pour la première fois en 1938, est une mosomique à type de perte et/ou de réar-
variante rare dont une soixantaine de cas rangement de chromosome est prédictive
sont rapportés dans la littérature [1]. Cette du comportement agressif du méningiome.
variante se caractérise par sa survenue rela- L’évolution du méningiome papillaire est
tivement fréquente chez l’enfant et un taux émaillée par des récidives locales dans 55 %
élevé de récidives et de métastases [2, 3]. des cas et des métastases dans 20 % des cas
L’âge moyen, de 36 ans, est inférieur à celui [2]. Ces tumeurs récidivantes présentent
des méningiomes tous types confondus [4, des atypies nucléaires, un index mitotique
5]. Une prédominance féminine est rappor- élevé, un indice de prolifération générale-
tée par la plupart des auteurs avec un sex- ment supérieur à 9 % et une infiltration du
ratio de 2 [5]. Les localisations du ménin- parenchyme cérébral [5]. Cette évolution
giome papillaire sont celles des méningio- agressive ne semble pas être modifiée par
mes habituels avec une prédilection pour la un traitement chirurgical exclusif ou associé
convexité, la base du crâne et la fosse pos- à la radiothérapie et à la chimiothérapie [1,
térieure. L’aspect macroscopique a été rare- 3]. ■
ment rapporté : la tumeur, souvent massive
et kystique, est difficilement clivable du Key words: Neuropathology, Meninged tumours, Meningioma,
parenchyme cérébral. La taille est variable Posterior fossa.
pouvant atteindre 12 cm [1]. Sur le plan Mots-clés : Neuropathologie, Tumeurs méningées, Méningiomes,
histologique, l’architecture tumorale est Fosse postérieure.
représentée par des structures papillaires
comportant un axe fibrovasculaire bordé
par des cellules cubiques ou polygonales,
comme c’est le cas de notre observation [2, Références
5]. Les atypies cytonucléaires, les mitoses,
les foyers de nécrose et/ou un envahisse-
ment du parenchyme cérébral sont notés [1] Buschmann U, Gers B, Hildebrandt G. Uncommon
dans 75 % des cas [2, 3]. Ces différents para- case of a cystic papillary meningioma in an adolescent.
mètres, associés aux aspects papillaires pour Childs Nerv Syst 2005 ; 21 : 322-6.
certains auteurs, rendent compte de l’agres- [2] Louis DN, Scheithauer BW, Budka H, von Deimling A,
sivité biologique du méningiome papillaire Kepes JJ. Meningiomas. In: Kleihues P, Cavenee WK,
et le classement en grade III selon la nou- eds. World Health Organisation Classification of
velle classification de l’OMS [2]. La variante Tumours. Pathology and Genetics. Tumours of the
papillaire du méningiome pose le problème Nervous System. Lyon : IARCPress, 2000, pp 176-
de diagnostic différentiel surtout au cours 84.
de l’examen extemporané avec d’une part
[3] Fukushima T, Tsugu H, Tomonaga M, Shirakusa T.
les tumeurs cérébrales primitives d’aspect
papillaire, tels que les papillomes des plexus Papillary meningioma with pulmonary metastasis:
choroïdes et les épendymomes papillaires, case report. J Neurosurg 1989 ; 70 : 478-82.
et d’autre part avec une métastase céré- [4] Go Y, Ohjimi Y, Iwasaki H, Oka K, Ishiguro M,
brale d’un adénocarcinome papillaire [3, 5]. Kaneko Y et al. A case of papillary meningioma with
L’étude immunohistochimique est indis- a t(1;4)(q44;q21). Cancer Genet Cytogenet 2000 ; 119 :
pensable au diagnostic. Elle montre une 37-41.
expression des cellules tumorales à la [5] Al-Sarraj S, King A, Martin AJ, Jarosz J, Lantos PL.
vimentine et à l’EMA, qui sont par ailleurs Ultrastructural examination is essential for diagnosis
négatives à la cytokératine et à la GFAP. of papillary meningioma. Histopathology 2001 ; 38 :
L’aspect ultrastructural, également caracté- 318-24.

326
Ann Pathol 2007 ; 27 : 381-382

Une tumeur de la paroi thoracique Cas


pour diagnostic
chez un nourisson
Tumor of the chest wall in a new born

Ahlem Ammar (1), Sadok El Hammami (2)

(1) Laboratoire d’analyses cytologiques et anatomopathologiques LACAP. Avenue de Carthage. Le Forum Esc
C. Ariana, 2080 Tunis (Tunisie).
(2) Chirurgie thoracique, Centre RESPIR, IBN ZOHR médical, Cité El Khadhra, Tunis (Tunisie).

Ammar A, El Hammami S. Une tumeur de la paroi thoracique chez un nourisson. Ann Pathol 2007 ; 27 : 381-382.

Observation dénotant un index de prolifération cel-


lulaire faible.
Un nouveau né de sexe féminin est
adressé à la consultation pour une défor-
mation de la paroi thoracique posté-
rieure gauche constatée à la naissance.
Elle ne présentait pas de gène respira-
toire. L’examen physique retrouvait une
masse postéro-latérale gauche de la paroi
thoracique avec une discrète scoliose.
Une radiographie du thorax montrait une
masse ostéolytique partiellement calci-
fiée qui intéressait les 8e, 9e et 10e côtes.
Les côtes concernées étaient soufflées,
distordues et érodées. L’examen tomo-
densitométrique confirmait la pré- FIG. 1. — TDM : lésion ostéolytique partiellement calcifiée
avec extension endothoracique.
sence de cette masse ostéolytique
FIG. 1. — Computed tomograms: Osteolytic mass par-
partiellement calcifiée. Celle-ci mesu- tially calcified with intrathoracic extent.
rait 6 × 5 × 5 cm et présentait une
extension endo-thoracique. Le paren-
chyme pulmonaire sous jacent était
comprimé mais non envahi (figure 1).
La biopsie chirurgicale montrait un tissu
fibreux richement cellulaire. Les cellules
proliférantes étaient fusiformes d’allure
fibroblastique, leur noyau était ovale
et rarement mitotique. Elles étaient
dénuées d’atypie cytonucléaire. Entre
elles, s’immisçait par endroits de la subs-
tance ostéoïde (figure 2). Des lobules de
cartilage hyalin étaient aussi notés.
Les chondrocytes étaient réguliers et
nichés dans des logettes individuelles. FIG. 2. — Tissu fibreux densément cellulaire avec de la
substance ostéoïde (hématoxyline-éosine × 200). Accepté pour publication
Les cellules fusiformes étaient positives le 16 mars 2007
FIG. 2. — Microscopic examination showed areas of
de façon intense et diffuse à la vimen- osteoid intermingled with foci of fibrous tissue (hematoxylin-
tine (Dako) et à l’actine musculaire lisse eosin, ×200). Tirés à part : A. Ammar,
(Dako). Elles étaient négatives aux récep- voir adresse
teurs hormonaux (œstrogène et pro- en début d’article.
gestérone Dako). Moins de 1 % des Quel est votre diagnostic ? e-mail :
noyaux étaient marqués par Ki67 (Dako) lacaptunis@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 381


Ahlem Ammar, Sadok El Hammami Ann Pathol 2007 ; 27 : 381-382

Diagnostic : statut hormonal n’a pas été testé auparavant,


hamartome mésenchymateux il est négatif chez notre jeune patiente. Le
faible immunomarquage au Ki67 (moins de
ou chondromateux costal 1 % des noyaux), confirme bien la nature
bénigne de cette lésion.
Devant la constatation d’une régression
L’hamartome mésenchymateux ou chon- spontanée durant la première année [5], cer-
dromateux de la côte est une prolifération tains auteurs optent pour l’abstention théra-
non tumorale du tissu mésenchymateux peutique avec surveillance afin d’éviter la
qui se développe au cours de la vie intra- mutilation de la paroi thoracique et les
utérine. La découverte se fait à la naissance dégâts statiques qui peuvent en résulter. La
ou juste après, sous la forme d’une masse résection chirurgicale sera réservée aux cas
extrapleurale intéressant la paroi thoraci- avec déformation thoracique majeure ou de
que généralement dans sa portion postéro- détresse respiratoire [5]. De ce fait nous
latérale. avons adopté une attitude d’expectative
Le terme de « mésenchymome » a été utilisé pour notre patiente.
pour la première fois par Stout en 1948 [1] Lors des différents contrôles, la lésion a aug-
pour désigner les tumeurs composées de menté de taille atteignant les dimensions de
multiples contingents tissulaires d’origine 9 × 6 × 6 cm à l’âge de 6 mois. Une excision
mésodermique : cartilagineux, adipeux, en bloc a été alors pratiquée. L’analyse his-
osseux, musculaires… Ces tumeurs peuvent tologique a confirmé le diagnostic porté sur
être malignes ou bénignes. Ces dernières sont la biopsie chirurgicale. La patiente va bien
plus correctement appelées hamartome avec un recul de 5 ans.
mésenchymateux vu leur origine non néo- En conclusion, l’hamartome mésenchyma-
plasique. Elles peuvent siéger dans différen- teux de la côte du nourrisson est rare. C’est
tes localisations sans prédilection pour un une lésion qu’il ne faut pas méconnaître afin
groupe d’age. de ne pas la confondre avec une lésion mali-
L’hamartome mésenchymateux de la paroi gne. Le traitement chirurgical doit être dis-
thoracique de l’enfant est rare, seul une cuté sur des critères d’évolutivité et de
soixantaine de cas sont rapportés dans la retentissement fonctionnel, il doit de toute
littérature [2]. façon être le plus conservateur possible. ■
On décrit classiquement 2 types histologi-
ques. Le type le plus fréquent consiste en un
Key words: hamartoma, chest wall, infant.
tissu fibreux mature et immature qui se
mêle au tissu adipeux. La lésion prendrait Mots-clés : hamartome mésenchymateux, paroi thoracique,
nourrisson.
naissance au niveau des tissus mous et enva-
hit secondairement la côte. Le second type
beaucoup plus rare, prend origine au niveau
de la côte et c’est le cas de notre patiente.
La lésion est habituellement asymptomati- Références
que, cependant la compression extrinsèque
du parenchyme pulmonaire peut être à l’ori-
gine d’une symptomatologie respiratoire [1] Stout AP. mesenchymoma, the mixed tumor of
voire même d’une détresse respiratoire. mesenchymal derivations. Ann Surg 1948 ; 127 :
L’examen physique révèle en général une 278-90.
masse fixe et indurée de la paroi thoracique [2] Kabra NS, Bowen JR, Christie J, Glasson M. Mesen-
associée à une éventuelle scoliose de degré chymal hamartoma of chest wall in a newborn. Indian
variable. Pediatr 2000 ; 37 : 1010-3.
Le diagnostic est évoqué à l’imagerie : radio- [3] Shetty AK, Barkemeyer BM, Smith J, Craver RD.
graphie du thorax et examen tomodensito- Case of the season : Chest wall mesenchymal hamar-
métrique [3], et est confirmé par biopsie. Le toma. Semin Roentgenol 1998 ; 33 : 215-7.
diagnostic peut être porté in utero grâce à [4] Ayala AG, Ro JY, Bolio-Solis A, Hernandez-Batres
un examen tomodensitométrique ou écho- F, Eftekhari F, Edeiken J. Mesenchymal hamartoma
graphique. of the chest wall in infants and children : a clinicopa-
La nature fibroblastique et myofibroblasti- thological study of five patients. Skeletal Radiol 1993 ;
que des cellules proliférantes est suggérée 22 : 569-76.
par le profil immuno-phénotypique, vimen- [5] Cameron D, Ong TH, Borzi P. Conservative mana-
tine et actine musculaire lisse positif, gement of mesenchymal hamartomas of the chest
comme rapporté par certains auteurs [4]. Le wall. J Pediatr Surg 2001 ; 36 : 1346-9.

382
Annales de pathologie (2008) 28, 58—60

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur du doigt faussement inquiétante


Unnecessary misgivings about a finger tumor

Guillaume Granier a,∗, Dominique Blin b,


Bernard Megy c, Sorhia Hacini c,
Christiane Marty-Double a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, groupe hospitalo-universitaire Carémeau,
place du Pr-Robert-Debré, 30029 Nîmes cedex 9, France
b
Département de radiologie, groupe hospitalo-universitaire Carémeau, place du
Pr-Robert-Debré, 30029 Nîmes cedex 9, France
c
Service d’orthopédie, groupe hospitalo-universitaire Carémeau, place du Pr-Robert-Debré,
30029 Nîmes cedex 9, France

Accepté pour publication le 21 mars 2007


Disponible sur Internet le 15 mai 2008

Observation
Une jeune femme de 24 ans sans antécédent est hospitalisée pour l’apparition depuis
quatre semaines d’une tuméfaction dorsopalmaire de l’index droit, devenue spontanément
douloureuse depuis dix jours. L’examen clinique révélait une volumineuse tuméfaction
à point de départ dorsal avec extension palmaire diffuse, associée à un exanthème
cutané. L’examen radiologique du doigt retrouvait une formation bien limitée, de 2 cm
de grand axe, développée au sein des tissus mous au contact de la première phalange
de l’index droit, associée à une discrète érosion osseuse. L’IRM confirmait la présence
d’une lésion agressive, infiltrant le tendon fléchisseur au niveau palmaire, avec épan-
chement intra-articulaire de l’articulation métacarpophalangienne. La tumeur présentait
un signal homogène, comparable à celui observé au sein du muscle adjacent en T1, qui
se rehaussait en T2. Malgré des aspects cliniques en faveur de la bénignité (âge, rapi-
dité d’installation des signes cliniques, localisation distale), les aspects radiologiques très
inquiétants ont fait suspecter un ostéosarcome parostéal ou extrasquelettique. Au cours
de l’intervention, la tumeur était inextirpable. Elle semblait non encapsulée, infiltrant
l’appareil extenseur et fléchisseur de l’index comme le pédicule collatéral ulnaire. Elle
engainait largement le bord radial de la première phalange. Des biopsies multifocales ont
été réalisées en première intention afin de pouvoir discuter l’indication d’une amputation
carcinologique. Histologiquement, les biopsies offraient les mêmes aspects. Il s’agissait
d’une lésion multinodulaire, à cellularité variable d’une zone à l’autre, constituée d’un
mélange de fibroblastes plus ou moins atypiques et d’ostéoblastes. Il existait des lamelles
d’os trabéculaire plus ou moins matures dispersées au sein de la lésion (Fig. 1A). Des figures
de mitose non atypiques étaient fréquentes (Fig. 2). Dans de rares zones, les cellules
fibroblastiques étaient dispersées au sein d’un stroma myxoïde abondant (Fig. 1B).

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : g.granier@tiscali.fr (G. Granier).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.03.001
Une tumeur du doigt faussement inquiétante 59

Figure 1. A : lésion multinodulaire à cellularité variable contenant des zones ostéoïdes et des zones myxoïdes (HES × 10) ; B : lamelles
osseuses entre lesquelles cheminent des fibroblastes irréguliers (HES × 20).
A: multinodular lesion with varied considerably in cellular containing of osteoid areas and myxoid areas (HES × 10); B: bone trabeculae
with scattered irregular fibroblastic cells (HES × 20).

Figure 2. Fibroblastes irréguliers dispersés au sein d’un abondant


stroma myxoïde (HES × 40).
Irregular fibroblast dispersed within a rich myxoid matrix
(HES × 40). Quel est votre diagnostic ?
60 G. Granier et al.

Diagnostic proposé : pseudotumeur niveau des extrémités. Il existe un phénomène de zone asso-
ciant des foyers densément cellulaires à des foyers peu
ostéofibreuse du doigt
cellulaires, myxoïdes [4]. Les cellules fusiformes de type
fibroblastiques ou myofibroblastiques, exprimant la vimen-
Dans notre observation, une surveillance clinique rappro-
tine et/ou l’actine muscle lisse, peuvent présenter quelques
chée, sans exérèse chirurgicale complémentaire, a permis
irrégularités nucléaires. Même si les mitoses sont parfois
d’observer une régression spontanée de la lésion aussi bien
nombreuses, elles ne sont jamais atypiques. La pathogé-
clinique que radiologique en deux mois, avec disparition des
nie exacte de la PTOFD n’est pas clairement établie. Si un
douleurs et récupération totale de la mobilité du doigt. À 14
traumatisme semble jouer un rôle dans son développement,
mois, aucune récidive n’est à déplorer.
il est absent dans deux tiers des observations. Certains
La pseudotumeur ostéofibreuse des doigts (PTOFD) est
auteurs ont avancé une origine inflammatoire plus générale,
une lésion rare (moins de 50 cas), correspondant à une
qu’elle soit réactionnelle, post-traumatique ou infectieuse.
variante de la myosite ossifiante beaucoup moins connue. La
L’exérèse chirurgicale complète est le traitement de choix,
PTOFD se rencontre chez le sujet jeune, entre 20 et 30 ans.
évitant les récidives locales selon les données de la litté-
Sa localisation est distale, atteignant plus spécifiquement
rature [4]. La régression spontanée de la lésion dans notre
les phalanges proximales de l’extrémité supérieure. Les
observation fait s’interroger sur l’indication formelle d’une
femmes semblent plus souvent atteintes que les hommes. La
exérèse complète. En particulier, dans les cas où la chirurgie
présentation clinique, peu spécifique, dépend de la taille de
implique des conséquences fonctionnelles importantes. De
la lésion [1]. Dans un tiers de cas l’interrogatoire retrouve un
surcroît, tous les auteurs s’accordent sur le fait qu’il n’existe
traumatisme même minime [2]. Les examens radiologiques
pas de manière évidente de possibilité de transformation
peuvent présenter des caractères inquiétants d’agressivité.
maligne en un ostéosarcome parostéal ou extrasquelettique.
Il existe toujours une masse nodulaire séparée parfois de
l’os par une réaction périostée [1]. Toutefois, une éro-
sion osseuse est rapportée dans de rares observations. Les Références
calcifications, souvent absentes, apparaissent irrégulière-
ment réparties ou diffuses, sans aspect de condensation [1] Tang JB, Gu YQ, Xia RG. Fibro-osseous pseudotumor that may be
périphérique classiquement observé dans la myosite ossi- mistaken for a malignant tumor in the hand: a case report and
fiante [2]. La présence de calcifications doit faire discuter review of the literature. J Hand Surg [Am] 1996;21:714—6.
d’autres entités, en particulier l’ostéochondrome de Nora, [2] Nishio J, Iwasaki H, Soejima O, Naito M, Kikuchi M. Rapidly
dont l’aspect microscopique diffère de la PTOFD. En effet, growing fibro-osseous pseudotumor of the digits mimicking
la PTOFD apparaît au faible grandissement comme une proli- extraskeletal osteosarcoma. J Orthop Sci 2002;7:410—3.
[3] De Silva MV, Reid R. Myositis ossificans and fibroosseous
fération multinodulaire désordonnée à contours indistincts.
pseudotumor of digits: a clinicopathological review of 64
Cette lésion contient un nombre important de lamelles cases with emphasis on diagnostic pitfalls. Int J Surg Pathol
otéoïdes immatures, bordées d’ostéoblastes non atypiques, 2003;11:187—95.
mais en comparaison de la myosite ossifiante moins de [4] Sleater J, Mullins D, Chun K, Hendricks J. Fibro-osseous pseu-
tissu cartilagineux [3]. Cette importante ossification réac- dotumor of digit: a comparison to myositis ossificans by light
tionnelle pseudomaligne ne doit pas faire porter à tort microscopy and immunohistochemical methods. J Cutan Pathol
le diagnostic de sarcome ostéogénique qui reste rare au 1996;23:373—7.
Annales de pathologie (2008) 28, 150—152

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur gastrique d’aspect inhabituel


A gastric tumor with unusual features

Ines Samet Fakhfakh ∗, Naourez Gouiaa, Lobna Ayadi,


Ibtissem Bahri, Imen Chtourou, Abdelmajid Khabir,
Saloua Makni, Tahia Sellami Boudawara

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib-Bourguiba,


route El Aïn Km 0,5, 3029 Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 17 août 2007


Disponible sur Internet le 2 juillet 2008

Observation
Un homme, âgé de 51 ans, sans antécédent pathologique particulier, avait consulté pour
des épigastralgies postprandiales associées à un amaigrissement récent de 10 kg ; la fibro-
scopie œsogastroduodénale avait montré une perte de substance suspecte à bourrelets
protubérants et à fond nodulaire de l’antre gastrique. La biopsie avait montré une infil-
tration de la muqueuse gastrique antrale par des cellules carcinomateuses indépendantes
de taille moyenne à noyau refoulé par une vacuole de sécrétion alcianophile donnant un
aspect en bague à chaton caractéristique ; une gastrectomie totale avec omentectomie
étaient réalisées et l’examen macroscopique de la pièce opératoire avait montré dans la
région antrale, une ulcération de 3 cm de diamètre et un épaississement pariétal circon-
férentiel avec un aspect translucide de la tranche de section. L’étude histopathologique
avait retrouvé les cellules tumorales mucosecrétantes en bague à chaton ; ces dernières
étaient mêlées à plusieurs cellules géantes multinucléées à noyaux réguliers ; ces cellules
géantes étaient retrouvées même au niveau des images de lymphangite carcinomateuse
(Fig. 1) et au niveau des ganglions métastatiques. Les prélèvements fundiques ne mon-
traient pas d’infiltration tumorale et les limites chirurgicales duodénale et œsophagienne
étaient saines. La tumeur gastrique était classée p T3 N2 M0. À l’examen immunohisto-
chimique, les cellules géantes étaient positives pour le CD68 (Fig. 2) et négatives pour les
cytokératines (clones AE1/AE3).
Les suites opératoires étaient simples ; un traitement adjuvant par chimiothérapie était
entrepris ; le recul actuel est de 15 mois avec un état général conservé sans récidive.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : i.samet@laposte.net (I.S. Fakhfakh).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Publié par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.annpat.2007.08.001
Tumeur gastrique à stroma particulier 151

Figure 1. Prolifération de cellules en bague à chaton mêlées à


des cellules géantes multinucléées à noyaux réguliers et invasion
vasculaire par ces deux types de cellules (HE × 600). Figure 2. Immunomarquage par l’anticorps anti-CD68 positif pour
Neoplastic signet-ring cells mixed with giant cells showing uni- les cellules géantes mais négatif pour les cellules en bague à chaton.
formly nuclei and vascular invasion of these two types of cells An immunohistochemical stain for CD68 shows strong reactivity in
(HE × 600). the giant cells, but a complete lack of reactivity in the adjacent
signet-ring cells.

Quel est votre diagnostic ?


152 I.S. Fakhfakh et al.

Diagnostic proposé : carcinome à cellules lit tumoral et de leurs transformation ultérieure en cel-
lules géantes de type ostéoclastique. Ce phénomène de
indépendantes en bague à chaton avec
lutte contre la prolifération tumorale peut être égale-
cellules géantes de type ostéoclastique ment réalisé par l’apparition d’un stroma tumoral riche
en cellules lymphoïdes polyclonales B et T caractérisant le
Les tumeurs extrasquelettiques avec cellules géantes de carcinome lymphoépithélial [3]. En se basant sur les rares
type ostéoclastique sont rares ; elles sont essentiellement cas publiés, le carcinome à cellules géantes de type ostéo-
décrites au niveau mammaire et pancréatique [1,2]. À notre clastique et le carcinome lymphoépithélial représenteraient
connaissance, uniquement six cas de carcinome gastrique une entité clinicopathologique remarquable par son pronos-
avec cellules géantes de type ostéoclastique ont été publiés tic plus favorable [1,3] ; la publication de nouveaux cas de
[1—3] ; ce type de cellules géantes a été décrit même dans ce type de tumeur permettrait de prouver encore cette
de très rares tumeurs stromales gastriques [4]. À côté du lit meilleure évolution.
tumoral, les cellules géantes de type ostéoclastique peuvent
être observées dans les lymphangites carcinomateuses, les
ganglions métastatiques et dans les éventuelles récidives
[2,4]. Elles peuvent être isolées ou accompagnées de cel-
Références
lules épithélioïdes réalisant de véritable granulome tuber-
[1] Baschinsky DY, Frankel WL, Niemann TH. Gastric carci-
culoïde [5]. Ces cellules géantes sont de grande taille, mul- noma with osteoclast-like giant cells. Am J Gastroenterol
tinucléées, à limites cytoplasmiques irrégulières prenant un 1999;94:1679—81.
aspect de type ostéoclastique ; leur présence peut poser le [2] Stracca-Pansa V, Menegon A, Donisi PM, Bozzola L, Fedeli F,
problème de diagnostic différentiel avec certaines tumeurs Quarto F, et al. Gastric carcinoma with osteoclast-like giant
malignes pléomorphes à cellules géantes [2]. Les cellules cells. Report of four cases. Am J Clin Pathol 1995;103:453—9.
géantes de type ostéoclastique sont d’origine histiocytaire : [3] Willems S, Carneiro F, Geboes K. Gastric carcinoma with
elles expriment le CD68 [2] ; les cellules carcinomateuses osteoclast-like giant cells and lymphoepithelioma-like car-
gastriques sont positives pour les marqueurs épithéliaux ; cinoma of the stomach: two of a kind. Histopathology
leur immunoréactivité pour la protéine membranaire de 2005;47:331—3.
[4] Joseph-Reinette C, Viguier J, Regimbeau C, De Muret A, De Calan
latence de l’Epstein-Barr virus (EBV-LMP1) a été rapportée
L, Dorval E. Gastric stromal tumor with osteoclast-like multinu-
uniquement dans un cas parmi les six publiés [2,3]. cleated giant cells during Lynch II syndrome. Gastroenterol Clin
L’aspect morphologique et le résultat immunohistochi- Biol 2000;24:675—8.
mique prouvent le caractère bénin de ces cellules géantes [5] Bigotti G, Coli A, Magistrelli P, De Ninno M, Antonacci V, Crucitti
qui représenteraient la réponse de l’hôte envers la proliféra- A, et al. Gastric adenocarcinoma associated with granuloma-
tion tumorale [1,3] ; la production d’agents chimiotactiques tous gastritis. Case report and review of litterature. Tumori
serait responsable de la migration des histiocytes vers le 2002;88:163—6.
Annales de pathologie (2008) 28, 330—332

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CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur inhabituelle de la trompe


An unusual tumor of the fallopian tube

Salma Chaâbouni a, Lobna Ayadi a,∗,


Abdelmajid Khabir a, Khaled Trabelsi b,
Naourez Gouiaa a, Rim Kallel a, Ibtissem Bahri a,
Makni Saloua a, Guermazi Mohamed b,
Tahya Sellami Boudawara a

a
Laboratoire d’anatomie et cytologie pathologiques, CHU Habib-Bourguiba,
route El-Ain km 0.5, 3029 Sfax, Tunisie
b
Service de gynécologie, CHU Hédi-Chaker, route El-Ain km 0.5, 3029 Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 21 novembre 2007


Disponible sur Internet le 21 août 2008

Observation
Une femme âgée de 30 ans, nulligeste, consultait pour infertilité. L’examen clinique
révélait une masse latéro-utérine gauche. À l’échographie, la masse était kystique et cloi-
sonnée. La cœlioscopie exploratrice montrait une masse du pavillon de la trompe gauche.
Les deux ovaires et la trompe controlatérale étaient sans lésion. L’ablation chirurgicale
du segment tubaire pathologique était réalisée. À l’examen macroscopique, le segment
tubaire mesurait 3 cm de long. Du côté du pavillon, la paroi tubaire était épaissie ; sa
lumière était dilatée par une formation kystique cloisonnée mesurant 4 cm de grand dia-
mètre et renfermant quelques bourgeons végétants de couleur blanc grisâtre (Fig. 1). Par
ailleurs, la paroi tubaire était épaissie. À l’examen microscopique, les bourgeons étaient
formés par la prolifération de structures papillaires ramifiées ayant un axe tantôt épais
et œdématié, tantôt grêle et sclérosé (Fig. 2a). Elles étaient revêtues par un épithélium
cubocylindrique pseudostratifié à noyau hyperchromatique (Fig. 2b). Des cellules isolées
se détachaient dans la lumière du kyste. La composante conjonctive était peu cellulaire
et sans atypie. Le reste du kyste était tapissé par un épithélium cubique régulier. Il n’y
avait pas de nécrose. L’étude immunohistochimique réalisée sur des prélèvements fixés
et inclus en paraffine montrait une forte positivité pour le CA125 et pour les récepteurs
estrogéniques. Le traitement était complété par une annexectomie gauche. Un contrôle
cœlioscopique, réalisé huit mois après, était normal.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : ayadilobna@yahoo.fr (L. Ayadi).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.11.007
Une tumeur inhabituelle de la trompe 331

Figure 1. Segment tubaire à paroi épaissie et à lumière dilatée


renfermant quelques bourgeons végétants blanc grisâtres( ).
Fallopian tube with thickened wall and dilated lumen containing
some white greyish buds ( ).

Figure 2. a : papilles revêtues par un épithélium montrant des touffes avec atypies modérées ; b : notez la pseudostratification nucléaire
et l’aspect en clou de tapissier (HE × 400).
a: papillae lined by an epithelium showing tufting with moderate atypia; b: note stratification of the epithelium and hobnail features
(HE × 400).

Quel est votre diagnostic ?


332 S. Chaâbouni et al.

Diagnostic : tumeur séreuse borderline de ne montre pas d’atypies nucléaires ni de désorganisation de


l’architecture épithéliale ; dans la TSB, l’absence d’invasion
la trompe du stroma permet d’écarter un adénocarcinome séreux. Le
Les tumeurs malignes de la trompe sont rares et sont domi- carcinome in situ et l’hyperplasie épithéliale pseudocarcino-
nées par les adénocarcinomes. Les tumeurs épithéliales mateuse (HEPC) peuvent simuler une TSB : cependant, ces
borderline de la trompe sont exceptionnelles. Elles peuvent deux lésions sont infracliniques et ne se manifestent pas
être de type séreux, mucineux ou endométrioïde [1]. À notre par une masse tumorale. L’HEPC est observée au cours des
connaissance, seulement 11 cas ont été rapportés dans la salpingites aiguës ou chroniques [5]. La TSB doit être distin-
littérature dont sept sont de type séreux [2]. Le premier guée de la tumeur métaplasique de la trompe qui est une
cas de tumeur séreuse borderline (TSB) de la trompe a été lésion papillaire caractérisée par une métaplasie éosinophile
décrit en 1986 par Gatto et al. [3] comme un adénocarci- et mucineuse de la muqueuse tubaire observée pendant la
nome. Le terme de TSB de la trompe a été employé pour grossesse [7]. Le traitement de la TSB est exclusivement
la première fois par Zheng et al. [4]. La TSB tubaire sur- chirurgical. Une salpingectomie unilatérale paraît suffisante
vient chez la femme en période d’activité génitale [5] dont [2].
l’âge varie de 19 à 34 ans (âge moyen : 29 ans) [2]. Elle peut
être de découverte fortuite ou se révéler par une douleur
abdominale. Le taux de CA125 est habituellement normal Références
[2]. Elle se présente généralement comme une formation
kystique unilatérale avec végétations endoluminales ; plus [1] Alvarado-Cabrero I, Navani SS, Young RH, Scully RE. Tumors of
rarement, il s’agit d’une masse solide polypoïde avec un the fimbriated end of the fallopian tube: a clinicopathologic ana-
lysis of 20 cases, including nine carcinomas. Int J Gynecol Patol
aspect en chou-fleur [2]. Sa taille varie de 1,7 à 13 cm.
1997;16:189—96.
Elle peut siéger au niveau du pavillon tubaire (trois cas), [2] Krasevic M, Stankovic T, Petrovic O, Severinski NS. Serous bor-
la région ampullaire (deux cas) ou englober toute la trompe derline tumor of the fallopian tube presented as hematosalpinx:
(un cas). À l’examen microscopique, la tumeur est similaire a case report. BMC Cancer 2005;5:129—32.
à son homologue ovarienne [4,5] : elle est formée par des [3] Gatto V, Selim MA, Lankerani M. Primary carcinoma of the fallo-
structures papillaires revêtues par un épithélium stratifié, pian tube in an adolescent. J Surg Oncol 1986;33:212—4.
avec des noyaux légèrement ou modérément atypiques et [4] Zheng W, Wolf S, Kramer EE, Cox KA, Hoda SA. Borderline
quelques figures de mitose. La TSB paraît naître à partir papillary serous tumor of the fallopian tube. Am J Surg Pathol
de l’épithélium tubaire qui appartient au système mullé- 1996;20:30—5.
rien. En effet, l’immunoréactivité des cellules tumorales [5] Kayaalp E, Heller D, Majmudar B. Serous tumor of low mali-
gnant potential of the fallopian tube. Int J Gynecol Pathol
pour CA125 et pour les récepteurs des estrogènes et de la
2000;19:398—400.
progestérone est en faveur de son origine mullérienne [6]. [6] Alvarado-Cabrero, Chung A, Caduff R. Tumors of the fallopian
Dans notre observation, nous avons noté une positivité pour tube. In: Tavassoli FA, Devilee P, editors. Pathology and genetics
CA125 et pour les récepteurs des estrogènes seulement. La of tumors of the breast and female genital organs. Lyon: IARC
mutation du p53 est corrélée aux stades tardifs de carci- Press; 2003.
nogenèse ; dans notre cas, la négativité du p53 affirme le [7] Saffos RO, Rhatigan RM, Scully RE. Metaplastic papillary tumor
caractère peu agressif de cette tumeur. Le diagnostic diffé- of the fallopian tube — a distinctive lesion of pregnancy. Am J
rentiel se pose avec l’adénofibrome papillaire ; ce dernier Clin Pathol 1980;74:232—6.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 255-6

Une tumeur médiane du cuir chevelu Cas pour


diagnostic
Median tumour of the scalp

Elhem Khelifa (1), Rym Benmously (1), Samy Fenniche (1), Achraf Debbiche (2),
Mohamed Ben Ayed (2), Inçaf Mokhtar (1)

(1) Service de Dermatologie,


(2) Service d’Anatomie pathologique, Hôpital Habib Thameur, Tunis.

Khelifa E, Benmously R, Fenniche S, Debbiche A, Ben Ayed M et al. Une tumeur médiane du cuir cheve-
lu. Ann Pathol 2007 ; 27 : 255-6.

Observation du parenchyme cérébral ni cérébel-


leux mais a noté un défaut de ferme-
ture médiane occipitale associé à un
Un homme de 34 ans, sans antécédent processus expansif sous-cutané, mesu-
pathologique, a consulté pour une rant 1,8 × 3 cm. Cette tuméfaction était
tuméfaction occipitale congénitale et de densité hétérogène.
asymptomatique. L’examen cutané a
noté, au niveau de la région occipitale,
une tumeur unique médiane, bien
limitée, de consistance ferme, adhé-
rente, mesurant 3 cm de diamètre,
recouverte d’une zone alopécique.
Un lipome a été évoqué, mais éliminé
en raison de la découverte néonatale,
la consistance ferme et la zone alopé-
cique en regard.
Un hamartome cutané a été envisagé,
devant l’apparition congénitale, la consis-
tance ferme, l’adhérence, la zone alo- FIG. 1. — Nappes de cellules tumorales de taille moyenne,
pécique en regard et une biopsie de répartition irrégulière, formant des tourbillons (HES
cutanée a été réalisée. Elle a montré un × 200).
derme réticulaire superficiel riche- FIG. 1. — Tumor cells of medium size, with an irregular
ment vascularisé comportant dans sa distribution.
partie profonde de gros troncs vascu-
laires dystrophiques entourés par un
réseau collagène dystrophique forte-
ment hyalinisé et fragmenté. Il est dis-
socié par des nappes cellulaires de
répartition irrégulière et plus ou moins
anastomotiques, à noyau régulier et
non mitotique (figure 1). Ces cellules
sont arrondies, relativement mono-
morphes, avec un cytoplasme éosino-
phile et légèrement granuleux. Elles Accepté pour publication
expriment fortement la Vimentine, la le 29 septembre 2006
NSE (enolase neuronal specific) et la FIG. 2. — Cellules tumorales exprimant fortement la
GFAP (glial fibrillary acid protein) GFAP (× 400). Tirés à part : E. Khelifa,
(figure 2) et faiblement la protéine FIG. 2. — Story expression of GFAP by tumor cells. Résidence Héla.
S 100 et l’antigène de membrane épi- Villa N° 10, 2078
théliale. Une calcosphérite a été notée. Gammarth Supérieur,
L’examen tomodensitométrique céré- Tunisie.
bral, réalisé sans produit de contraste, Quel est votre diagnostic ? e-mail :
n’a pas retrouvé d’anomalie de densité elhem_khelifa@yahoo.com

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 255


Elhem Khelifa et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 255-6

Diagnostic : méningiome cutané à la définition d’un méningiome primitif


type I.
primitif type I Les méningiomes de type II sont acquis et
se localisent au voisinage des organes sen-
soriels, en particulier les zones périauricu-
Les méningiomes peuvent dériver des laires et paranasales ou dans l’orbite.
méninges du cerveau ou de la moelle épi- Le type III, rare, serait une extension (ou
nière. La peau et l’orbite constituent les sites métastase) d’un méningiome intracrânien
les plus fréquemment atteints lors des loca- ou spinal. Le méningiome de type I a un très
lisations extra crâniennes. Le cuir chevelu bon pronostic sans récidive ni métastase
constitue une zone de prédilection et parti- mais il nécessite une exérèse en milieu chi-
culièrement le long des lignes de suture de rurgical en raison du risque de méningite et
la région occipitale [1]. Parmi les 92 cas col- l’existence, possible, de connexions avec le
ligés en 1992 par Shuangshoti et al. [2], 86 % système nerveux central [4].
intéressent la tête ou le cou, dont 40 % le Les méningiomes cutanés primitifs sont des
cuir chevelu. L’âge moyen est de 34 ans. Ces tumeurs bénignes et rares de l’enfant ou de
tumeurs ont un développement comparable l’adulte jeune. Leur localisation cutanée ou
à celui des méningocèles et dérivent de cel- sous cutanée primitive est rare. Ils doivent
lules arachnoïdales ectopiques persistant à être suspectés devant un hamartome congé-
l’extérieur de la cavité crânienne le long des nital médian du cuir chevelu avec une zone
lignes embryonnaires de fusion. A la diffé- alopécique en regard. ■
rence des méningiomes qui sont des
tumeur vraies, les méningocèles sont for- Key words: scalp, meningioma, cutaneous tumors.
mées par la protrusion d’une partie des Mots-clés : scalp, méningiome, tumeurs cutanées.
méninges à travers une fissure congénitale
du crâne ou du canal rachidien sous forme
d’une tumeur sacciforme renfermant du
liquide céphalo-rachidien. Lopez et al. [3] Références
ont proposé une classification des ménin-
giomes cutanés en trois types de pathogénie
et de pronostic différents. [1] Cribier B, Grosshans E. Tumeurs cutanées nerveuses
Le type I correspond aux méningiomes pri- rares. Ann Dermatol Venereol 1997 ; 124 : 280-95.
mitivement cutanés, congénitaux. Ils résul- [2] Shuangshoti S, Boonjunwetwat D, Kaoroptham
tent d’une anomalie de fermeture du tube S. Association of primary intraspinal meningiomas
neural qui se traduit par la présence de tissu and subcutaneous meningioma of the cervical region:
méningé ectopique dans le derme et l’hypo- case report and review of literature. Surg Neurol
derme. Leur aspect clinique est très proche 1992 ; 38 : 129-34.
de celui des méningocèles. L’absence de [3] Lopez DA, Silvers DN, Helwig EB. Cutaneous
tumeur cérébrale sous-jacente est indispen- meningiomas: a clinicopathologic study. Cancer 1974 ;
sable au diagnostic. Notre observation de 34 : 728-44.
méningiome cutané avec un défaut de fer- [4] Le Pelletier F, Dunet E, Estephan H, Vérola O, Fau-
meture des structures sous jacentes, sans cher JN. Méningiome primitif du cuir chevelu. À pro-
autres lésions intra crâniennes répond donc pos d’un cas. Ann Pathol 1997 ; 17 : 75-6.

256
Ann Pathol 2007 ; 27 : 153-5

Une tumeur myxoïde de la jambe Cas


pour diagnostic
A myxoid tumor of leg

Anne Gentil Perret (1), Bruno Labeille (2), Olivier Tiffet (3)

(1) Service d’Anatomie et de Cytologie Pathologiques,


(2) Service de Dermatologie,
(3) Service de Chirurgie Générale, CHU, Hôpital Nord, 42055 Saint-Étienne Cedex 02.

Gentil Perret A, Labeille B, Tiffet O. Une tumeur myxoïde de la jambe. Ann Pathol 2007 ; 27 : 153-5.

Observation

Une femme de 80 ans était hospitalisée


pour une volumineuse tumeur de la
face antérieure de la jambe droite évo-
luant depuis 10 mois. La tumeur mesu-
rait 5 cm et était molle, rosée, non
pigmentée. Il n’y avait pas de nodule
satellite, ni d’adénopathie inguinale.
L’exérèse chirurgicale a mis en évidence
une tumeur bourgeonnante, plurinodu-
laire, ulcérée à son sommet. Cette tumeur
FIG. 1. — Sur un fond myxoïde, présence de nombreux
était molle, par endroits gélatineuse, gri- vaisseaux capillaires arciformes à paroi « ébouriffée » (HES
sâtre et rosée. Elle était mal limitée, non G × 10).
encapsulée, de siège dermohypodermi- FIG. 1. — Myxoid stroma with numerous curvilinear
que, sans nodule satellite. Histologique- thick-walled capillaries (HES×10).
ment, l’aspect était celui d’une tumeur
myxoïde d’architecture vaguement nodu-
laire occupant toute la hauteur du derme
et s’étendant largement à l’hypoderme.
Les contours étaient tantôt bien limités,
tantôt plus infiltrants englobant des adi-
pocytes. La cellularité était variable d’une
plage à l’autre, mais plus de la moitié de
la tumeur était paucicellulaire myxoide.
Le stroma myxoïde était parcouru d’un
fin réseau de capillaires branchés à paroi
fine évoquant l’aspect observé dans les
liposarcomes myxoïdes. On notait éga-
lement des capillaires à paroi plus épaisse,
(figure 1). Les cellules tumorales fusifor- FIG. 2. — Secteur fusocellulaire, plus dense, hypodermi-
mes comportaient un noyau volontiers que avec englobement de cellules adipeuses entrappées
(HES G × 4).
hyperchromatique de taille et de forme
variables. Les mitoses étaient rares. En pro- FIG. 2. — Solid areas of spindled tumor cells surrounding
adipocytic cells (HES×4).
fondeur, il existait des secteurs denses
fusocellulaires, sans aspect storiforme
(figure 2). Accepté pour publication
L’étude immunohistochimique montrait venue rapidement à 2 mois. Après concer-
tation multidisciplinaire, une amputation le 25 avril 2006
que les cellules tumorales exprimaient for-
tement le CD34. Elles étaient négatives a été réalisée, sans traitement complé-
Tirés à part :
pour le CD99, la protéine S100 et le CD68. mentaire chimiothérapique ou radio-
A. Gentil Perret,
Les cellules tumorales n’exprimaient pas thérapique. L’évolution est favorable
voir adresse
MDM2, habituellement amplifiée dans les avec un recul sans récidive de 12 mois.
en début d’article.
liposarcomes. e-mail :
L’exérèse chirurgicale était incomplète Quel est votre diagnostic ? anne.gentil_perret@chu-
en profondeur. Une récidive locale est sur- st-etienne.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 153


Anne Gentil Perret et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 153-5

Diagnostic : Myxofibrosarcome Dans ce cas précis, nous avons discuté le


de grade de malignité dermatofibrosarcome de Darrier-Ferrant dans
sa variante myxoïde en raison de l’expression
intermédiaire du CD34 et du mode d’infiltration. Néan-
moins, l’échantillonnage de la lésion n’a pas
mis en évidence d’agencement storiforme
Le myxofibrosarcome correspond à l’ancien caractéristique et les atypies cytologiques
groupe des histiocytofibromes malins myxoï- étaient trop marquées. Enfin, nous avons
des [1]. Il s’agit d’une tumeur fibroblastique éliminé la possibilité d’une tumeur maligne
maligne caractérisée par un stroma plus ou des nerfs périphériques devant l’absence
moins myxoïde, par des foyers cellulaires d’expression de la protéine S100 et l’absence
pléomorphes et par la présence d’une vas- de palissades, d’enroulements, d’infiltration
cularisation très particulière, formée de vais- péri et intra neuronale.
seaux capillaires peu épais souvent recourbés Selon la définition initiale, le myxofibrosar-
et arciformes autour desquels on observe come comporte au moins pour moitié une
une condensation de cellules tumorales ou composante myxoïde. Pour certains [3], la
d’éléments inflammatoires. C’est un des sar- présence d’au moins 10 % de secteur myxoïde
comes les plus fréquents du sujet âgé. Cin- est suffisante. Dans cette entité, il existe tout
quante pour cent sont localisés au niveau de un spectre de tumeurs (bas grade, grade
la jambe. Environ 2/3 des cas se développent intermédiaire et haut grade) [4] en fonction
dans le derme ou le tissu sous-cutané, les de la cellularité, du pléomorphisme, de l’acti-
formes les plus profondes infiltrant le fascia vité proliférative et de la nécrose. Les formes
ou le muscle squelettique. Macroscopique- de bas grade sont caractérisées par une fai-
ment, il s’agit d’une tumeur multinodulaire, ble densité cellulaire. Les mitoses restent
à la fois myxoïde et fibreuse. rares. Il peut y avoir des pseudolipoblastes
Devant une biopsie cutanée, on peut porter correspondants à des cellules fibroblasti-
à tort le diagnostic de bénignité. En effet, ques avec vacuoles de mucine. Les formes
l’aspect rappelle parfois celui d’un neuro- de haut grade comportent beaucoup de zones
fibrome myxoïde, d’un myxome ou d’un cellulaires avec arrangements fasciculaires,
angiomyxome superficiel. On s’attachera à des atypies marquées, de nombreuses mito-
rechercher des atypies nucléaires et surtout ses, des foyers d’hémorragie ou de nécrose.
la vascularisation particulière. Le neuro- Exceptionnellement, on retrouve quelques
fibrome myxoïde présente parfois des signes cellules géantes multinucléées et/ou d’aspect
de différenciation spécifique (corps de myoïde. Constamment dans ce type de tumeur,
Wagner-Meissner) et exprime la PS100. Le on observe des zones moins cellulaires, plus
myxome comporte peu de vaisseaux et ne myxoïdes.
présente ni atypies, ni mitoses. Dans l’angio- Sur le plan du comportement biologique, le
myxome superficiel, des polynucléaires peu-
myxofibrosarcome peut récidiver surtout si
vent se regrouper autour des vaisseaux mais
son exérèse est insuffisante. Les récidives se
il n’y a jamais de condensation de cellules
font souvent sur un mode plus agressif, de
tumorales autour. Sur le versant malin, le dia-
plus haut grade. Ce sont habituellement ces
gnostic différentiel se discute avec le liposar-
formes de haut grade qui peuvent donner
come myxoïde, dont l’architecture est assez
des métastases. ■
homogène avec des capillaires anastomosés
à paroi fine. Les cellules sont de petite taille,
monomorphes, sans atypies. On recherchera Key words: myxoid tumor, sarcoma, myxoid malignant fibrous
histiocytoma.
de véritables lipoblastes. On éliminera aussi
le fibrosarcome myxoide de bas grade d’Evans Mots-clés : tumeur myxoïde, sarcome, histiocytofibrome malin
myxoïde.
qui touche habituellement des patients plus
jeunes. Il est caractérisé par l’alternance de
zones myxoïdes peu cellulaires et de zones
plus cellulaires ou essentiellement fibreuses.
Les cellules sont très peu atypiques, ressem- Références
blant à des fibroblastes. Elles peuvent pren-
dre une disposition fasciculée ou réaliser
des aspects d’enroulement pseudo-ménin- [1] Pathology & Genetics Tumours of Soft Tissues and
gothélial [2]. L’activité mitotique est faible. Bone. World Health Organization Classification of
Dans les zones myxoïdes, les capillaires pren- Tumours. Edited by Christopher DM Fletcher, K
nent volontiers une disposition curviligne Krishnan Unni, Fredrik Mertens. IARCPress Lyon,
comme dans les myxofibrosarcomes. Cette 2002.
tumeur correctement traitée récidive dans [2] Oda Y, Takahira T, Kawaguchi K, Yamamoto H,
10 % des cas. Tamiya S, Matsuda S et al. Low-grade fibromyxoid

154
Myxofibrosarcome

sarcoma versus low-grade myxofibrosarcoma in the the low-grade variant. Am J Surg Pathol 1996 ; 20 :
extremities and trunk. A comparison of clinicopatho- 391-405.
logical and immunohistochemical features. Histopa- [4] Huang HY, Lal P, Qin J, Brennan MF, Antonescu
thology 2004 ; 45 : 29-38. CR. Low-grade myxofibrosarcoma: a clinicopathologic
[3] Mentzel T, Calonje E, Wadden C, Camplejohn RS, analysis of 49 cases treated at a single institution with
Beham A, Smith MA et al. Myxofibrosarcoma. Clini- simultaneous assessment of the efficacy of 3-tier and
copathologic analysis of 75 cases with emphasis on 4-tier grading systems. Hum Pathol 2004 ; 35 : 612-21.

155
Annales de pathologie (2009) 29, 56—58

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur ovarienne à connaître


An ovarian tumor important to diagnose

Samia Hannachi Sassi ∗, Raoudha Doghri ,


Sana Ben Slama , Imen Abbes , Maha Driss ,
Karima Mrad , Rym Dhouib , Houda Azaiez ,
Khaled Ben Romdhane

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, institut Salah Azaïez, Bab Saadoun,


1006 Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 31 janvier 2008


Disponible sur Internet le 7 février 2009

Observation
Une patiente âgée de 60 ans sans antécédent pathologique notable consultait pour des dou-
leurs abdominales. L’examen clinique trouvait une masse pelvienne latéro-utérine droite.
L’échographie abdominale révélait une tumeur ovarienne droite et une ascite pelvienne
de moyenne abondance associée à des adhérences intestinales. L’échographie pelvienne
objectivait une masse ovarienne droite solide, hétérogène, polylobée et aux contours irré-
guliers. Le CA125 était élevé (273,4 U/ml). L’AFP et les ␤HCG étaient normaux. Le reste
du bilan était normal.
Une annexectomie droite suivie d’une hystérectomie avec annexectomie gauche et
d’une omentectomie étaient réalisées. L’annexe droite comportait un ovaire tumoral de
15 cm × 13 cm × 4 cm. À la coupe, la paroi ovarienne était kystique, hérissée de végéta-
tions papillaires grêles, longues (3 cm) et de couleur grisâtre. Il y avait de nombreux foyers
nécrotico-hémorragiques. L’examen extemporané de la masse ovarienne droite concluait
à un carcinome. La pièce omentectomie comportait de nombreux nodules tumoraux blan-
châtres fermes dont le plus gros mesurait 5 cm dans son plus grand diamètre.
L’analyse histologique définitive de la tumeur ovarienne montrait une prolifération car-
cinomateuse d’architecture papillaire. Les papilles étaient épaisses, aux contours lisses se
projetant dans des espaces vides. Elles étaient tapissées d’un revêtement multistratifié
(Fig. 1). Les cellules tumorales étaient atypiques et montraient une forte activité mito-
tique chiffrée à 8 mitoses par champ au fort grossissement. De plus, de nombreuses fentes
de taille variable, comblées d’un matériel basophile pâle, étaient notées (Fig. 2). Il n’y
avait pas de contingent de tumeur de Brenner bénigne ou à la limite de la malignité.

∗ Auteur correspondant. Villa 7, impasse 3, rue des Mères-de-Tunisie, les jardins d’El Menzah, El Manar I. 2092, Tunis, Tunisie.
Adresse e-mail : Samia.hannachi@rns.tn (S.H. Sassi).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.01.009
Une tumeur ovarienne à connaître 57

Les cellules tumorales étaient diffusément positives pour


la vimentine et pour la cytokératine 7 (Fig. 3). Elles étaient
négatives pour la cytokératine 20.
La pièce d’hystérectomie avec annexectomie gauche
était indemne d’envahissement tumoral. La pièce
d’omentectomie était envahie par la même prolifération
carcinomateuse avec en plus des foyers d’adénocarcinome
séreux bien différencié. Actuellement, la malade est sous
chimiothérapie de type PEC.

Figure 3. Immunomarquage diffus pour la vimentine 3(a) et la


cytokératine 7 3(b).
Diffuse expression of vimentin 3(a) and cytokeratin 7 3(b).

Figure 1. Des projections papillaires aux contours lisses et tapis-


sées d’un revêtement multistratifié se projetant dans des espaces
vides.
Multilayered papilla with smooth luminal borders protruding into
an empty space.

Figure 2. Des fentes intraépithéliales de taille variable, comblées


d’un matériel basophile pâle.
Variable sized intraepithelial microspaces containing basophilic
material. Quel est votre diagnostic ?
58 S.H. Sassi et al.

Tableau 1 Immunohistochimie comparée du CCT de l’ovaire et du carcinome urothélial.


Compared immunohistochimy by the CCT of the ovary and by the urothelial carcinoma.
Vimentine Cytokératine 7 Cytokératine 20 CA125 Thrombomoduline Uroplakine
CCT ovaire + + − + − −
Carcinome urothélial − + + − + +

Une métastase ovarienne d’un CCT des voies urinaires


Diagnostic carcinome ovarien gauche à est éliminée par l’absence d’antécédent de tumeur anté-
cellules transitionnelles de haut grade de rieure ou synchrone des voies urinaires. De plus, son profil
immunohistochimique est différent de celui du CCT ovarien
malignité (grade 3 selon le grade des [3,4].
carcinomes urothéliaux) La tumeur de Brenner maligne est caractérisée par la
présence de foyers typiques de CCT associés à des foyers de
Selon l’OMS [1], les tumeurs ovariennes constituées de cel- tumeur de Brenner bénigne ou borderline, ce qui implique
lules ressemblant aux cellules urothéliales sont regroupées d’avoir un échantillonnage extensif de la tumeur. Des foyers
sous le terme de tumeurs à cellules transitionnelles qui de carcinome malpighien ou d’adénocarcinome mucineux
représentent 1 à 2 % de l’ensemble des tumeurs ovariennes. peuvent également être associés [2,3].
Ces tumeurs comprennent la tumeur de Brenner (bénigne, Le carcinome indifférencié de l’ovaire se distingue du
borderline ou maligne) et le carcinome à cellules transition- CCT ovarien par la présence de pseudopapilles qui sont
nelles. secondaires à des foyers de nécrose tumorale. De plus, les
Le carcinome à cellules transitionnelles (CCT) se défi- petites fentes intraépithéliales à contenu mucineux sont
nit comme une tumeur épithéliale de l’ovaire qui ressemble moins fréquentes dans le carcinome indifférencié de l’ovaire
histologiquement au carcinome urothélial mais qui est [2,3].
dépourvue de contingent de tumeur de Brenner bénigne ou La tumeur de la granulosa de type adulte adulte
borderline [1—4]. Le CCT est souvent unilatéral et rarement d’architecture diffuse se caractérise par la présence de cel-
bilatéral (15 % des cas) [1,2]. Il est diagnostiqué souvent à lules tumorales incisurées et de corps de Call-Exner. Ces
un stade avancé [2]. Il se voit fréquemment chez la femme derniers ont des lumières bien délimitées par des cellules
âgée de 50 à 70 ans et réalise la même symptomatologie tumorales avoisinantes. En outre, le CCT se caractérise par
clinique et le même aspect macroscopique que les autres de nombreuses petites fentes intraépithéliales à contenu
tumeurs épithéliales et stromales de l’ovaire [1]. basophile pâle qui sont de taille variable et souvent plus
Histologiquement, le CCT est constitué exclusivement larges que les corps de Call-Exner. De plus, la tumeur de la
(forme pure) ou majoritairement de cellules transition- granulosa est positive pour l’inhibine ␣ [2,3].
nelles dans 6 % des cas [1]. À l’inverse des tumeurs de Le traitement des CCT de l’ovaire est semblable à celui
Brenner, le CCT est fréquemment associé à d’autres types des autres cancers épithéliaux de l’ovaire. La réponse à la
de carcinome ovarien, habituellement le carcinome séreux chimiothérapie est controversée selon les auteurs. La survie
peu différencié [1—3]. Le CCT réalise souvent des papilles moyenne à cinq ans est de 35 % [1,2]. Cependant, certains
multistratifiées aux contours lisses se projetant dans des auteurs ont montré une sensibilité accrue à la chimiothé-
espaces vides [1,3] et rarement une architecture solide [3]. rapie et une longue survie à cinq ans dans les tumeurs
De nombreuses petites fentes intraépithéliales contenant métastatiques qui sont constituées exclusivement ou majo-
un matériel amphophile sont fréquemment rapportées dans ritairement de cellules transitionnelles [1].
90 % des cas [2,3]. Ces petites fentes peuvent donner parfois Le terme de CCT n’est pas uniformément accepté puisque
un aspect microkystique [3]. Une différenciation glandulaire la fréquente association avec d’autres tumeurs épithéliales
ou malpighienne peut se voir comme dans le carcinome uro- de l’ovaire, particulièrement le carcinome séreux et un pro-
thélial. Les cellules tumorales sont caractérisées par des fil immunohistochimique diamétralement opposé à celui des
atypies marquées et une importante activité mitotique anor- CCT des voies urinaires suggère fortement une origine épi-
male. Les calcosphérites, caractéristiques des tumeurs de théliale de surface [1].
Brenner bénignes ou malignes, sont absentes ou très rares
(4 %) dans le CCT [1,3]. Le grade histologique des CCT de
l’ovaire se fait selon le grade des CCT urothéliaux [1,2]. Références
Dans notre cas, le CCT était dans sa forme pure et de grade
3 selon le grade des carcinomes urothéliaux. [1] Tavassoli FA, Devilee P. World Health Organisation Classification
Le CCT de l’ovaire présente un profil immunohistochi- of tumors. Pathology and genetics of tumors of the breast and
mique qui ressemble à celui des tumeurs épithéliales et female genital organs. IARC Press; 2003.
stromales de l’ovaire mais qui est différent de celui des voies [2] Prat J. Pathology of the ovary. Saunders; 2004.
urinaires [1—4] (Tableau 1). [3] Eichhorn JH, Young RH. Transitional cell carcinoma of the ovary;
Le diagnostic différentiel du CCT ovarien se pose devant A morphologic study of 100 cases with emphasis on differential
une métastase ovarienne d’un CCT des voies urinaires, une diagnosis. Am J Surg Pathol 2004;28:453—63.
[4] Ordóñez NG. Transitional cell carcinomas of the ovary and
tumeur de Brenner maligne, un carcinome ovarien indif-
bladder are immunophenotypically different. Histopathology
férencié et une tumeur de la granulosa de type adulte
2000;36:433—8.
d’architecture diffuse [2,3].
Annales de pathologie (2008) 28, 50—52

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur pancréatique endocrine ?


An endocrine pancreatic tumor?

Carmen Grigoriu a,d,1, Juliette Duclos a,1,


Anne Couvelard b, Jean Cahen c, Wissam Sandid a,
Anne Janin a, Philippe Bertheau a,∗

a
Service de pathologie, AP—HP, hôpital Saint-Louis, 1, avenue Claude-Vellefaux,
75010 Paris, France
b
Service de pathologie, AP—HP, hôpital Beaujon, 100, boulevard Général-Leclerc,
92110 Clichy cedex, France
c
Service de chirurgie générale digestive et endocrinienne, AP—HP, hôpital Saint-Louis,
1, avenue Claude-Vellefaux, 75010 Paris, France
d
Département de pathologie médico-légale, université de médecine et pharmacie, Str.
Universitatii 16, 700115 Iasi, Roumanie

Accepté pour publication le 20 mars 2007


Disponible sur Internet le 15 mai 2008

Observation
Une patiente de 17 ans, sans antécédent, consulte pour des douleurs abdominales. Le
scanner abdominopelvien montre une tumeur solide de la queue du pancréas, mesurant
10 cm de grand axe, avec des calcifications centrales. Il n’y a pas d’adénopathie. Les
marqueurs tumoraux (ACE, NSE, CA 15-3 et CA 19-9) sont normaux.
Une pancréatectomie caudale permet l’exérèse complète d’une tumeur solide, de
10 cm de diamètre, centrée par quelques cavités millimétriques, bien délimitée par une
fine capsule.
L’examen microscopique montre une prolifération de cellules de taille moyenne qui réa-
lisent des plages solides à la périphérie de la tumeur et des structures pseudopapillaires à
sa partie centrale (Fig. 1). Il n’y a pas de nécrose. Les cellules tumorales ont des noyaux
réguliers, parfois clivés, à chromatine fine renfermant un petit nucléole. Les mitoses
sont exceptionnelles. Quelques cellules comportent des inclusions éosinophiles cytoplas-
miques positives à la coloration du PAS. Le stroma est fibrovasculaire, peu abondant, peu
inflammatoire. On note de rares emboles tumoraux dans la capsule. La tumeur refoule
le parenchyme pancréatique adjacent sans l’infiltrer. Les cellules tumorales expriment
la vimentine, le CD10, la NSE, le CD56, la bêta-caténine et l’alpha-1 antichymotrypsine.
Le glucagon est exprimé par 50 % des cellules tumorales (Fig. 2). Il existe une expression
faible et focale de la chromogranine et de la synaptophysine. Les cytokératines ne sont
pas exprimées.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : philippe.bertheau@sls.aphp.fr (P. Bertheau).
1 Ces deux auteurs ont contribué de manière équivalente à ce travail.

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.03.003
Une tumeur pancréatique endocrine ? 51

Figure 1. Cellules tumorales assez monomorphes disposées Figure 2. Immunomarquage avec l’anticorps antiglucagon : mar-
en zones solides et pseudopapillaires (hematoxylin-éosine- quage cytoplasmique dans environ 50 % des cellules tumorales
safran × 100). (× 400).
Solid and pseudopapillary tumor areas (H and E × 100). Immunostaining with antiglucagon antibody: cytoplasmic staining
in 50% tumor cells (× 400).

Quel est votre diagnostic ?


52 C. Grigoriu et al.

Diagnostic : tumeur solide positivité de l’immunomarquage antigalectine-3 dans les


TSPP et sa négativité dans les tumeurs endocrines [5].
pseudopapillaire du pancréas (TSPP)
Contrairement aux autres tumeurs pancréatiques, les
TSPP ne présentent pas de mutations de K-ras ou de p53,
La tumeur solide pseudopapillaire du pancréas est une
mais ont de manière quasi-constante des mutations du
tumeur rare représentant moins de 2 % des tumeurs exo-
gène de la bêta-caténine. Ces mutations empêchent la
crines pancréatiques [1]. Son incidence a augmenté depuis
phosphorylation et la dégradation de la bêta-caténine qui
son individualisation au sein des tumeurs pancréatiques de la
s’accumule et devient détectable par immunohistochimie
classification de l’OMS en 1996. Elle survient le plus souvent
[6].
chez la femme avant 30 ans [1].
L’individualisation des TSPP est importante, car ces
La présentation clinique, peu spécifique, résulte de
tumeurs sont considérées comme des tumeurs de bas grade
la compression des structures adjacentes. On retrouve
de malignité et ont un bon pronostic même quand elles
fréquemment une masse abdominale palpable, mais des
sont volumineuses ou présentent des métastases [1]. Il n’y
tumeurs plus petites sont parfois retrouvées fortuitement
a pas de critère histologique pronostique démontré dans les
lors d’une imagerie abdominale. Il n’y a pas de syndrome
TSPP. Toutefois, la présence d’emboles tumoraux (comme
paranéoplasique ni de marqueurs tumoraux sériques asso-
dans notre observation), d’une invasion des tissus adja-
ciés à cette tumeur.
cents, d’engainements nerveux, d’une nécrose extensive,
Le diagnostic est fait à l’examen microscopique devant
d’un index mitotique élevé ou de zones sarcomatoïdes, sug-
une prolifération de cellules organisées en nappes ou îlots
gèrent un potentiel de malignité [7].
dans les tumeurs les plus petites, tandis que les tumeurs
les plus grandes montrent un mélange d’architecture solide,
kystique et pseudopapillaire. Les cellules tumorales, mono- Références
morphes, ont souvent un cytoplasme éosinophile ou plus
rarement clair et un noyau rond, régulier parfois clivé, à [1] Klimstra DS, Wenig BM, Heffess CS. Solid-pseudopapillary tumor
chromatine fine et à nucléole peu visible. Les atypies et of the pancreas: a typically cystic carcinoma of low malignant
les mitoses sont rares. Les études immunohistochimique potential. Semin Diagn Pathol 2000;17:66—80.
ou en microscopie électronique n’ont pas permis de pré- [2] Notohara K, Hamazaki S, Tsukayama C, Nakamoto S, Kawabata K,
ciser l’origine de cette tumeur. Habituellement les TSPP Mizobuchi K, et al. Solid-pseudopapillary tumor of the pancreas.
expriment la vimentine, la NSE, le CD56, le CD10, l’alpha-1 Immunohistochemical localization of neuroendocrine markers
antitrypsine et l’alpha-1 antichymotrypsine [2], ainsi que le and CD10. Am J Surg Pathol 2000;24:1361—71.
[3] Klöppel G. Solid-pseudopapillary neoplasm. In: Aaltonen, Lauri
récepteur à la progestérone [3]. Dans la majorité des cas,
A, editors. Pathology and Genetics of Tumours of the Digestive
elles n’expriment ni les cytokératines, ni les autres mar-
System. Lyon: IARC Press; 2000.
queurs acinaires [1]. [4] Yagihashi S, Sato I, Kaimori M, Matsumoto J, Nagai K. Papillary
Même si la synaptophysine est souvent faiblement expri- and cystic tumor of the pancreas. Cancer 1988;61:1241—7.
mée par ces tumeurs [2] comme dans notre observation, les [5] Caroline G, Moulin P, Gigot JF, Weynand B, Deprez P, Rahier
autres marqueurs neuroendocrines le sont beaucoup moins J, et al. Solid and pseudopapillary tumor of the pancreas —
souvent. Notre observation est particulière par l’expression review and new insights into pathogenesis. Am J Surg Pathol
focale de la chromogranine et surtout par une expres- 2006;30:1243—9.
sion assez forte du glucagon dans environ 50 % des cellules [6] Abraham SC, Klimstra DS, Wilentz RE, Yeo CJ, Conlon K, Bren-
tumorales. La présence de glucagon n’a été que rarement nan M, et al. Solid-pseudopapillary tumors of the pancreas are
genetically distinct from pancreatic ductal adenocarcinomas
rapportée [4]. La différenciation neuroendocrine dans ces
and almost always harbor beta-catenin mutations. Am J Pathol
tumeurs serait interprétée comme une voie potentielle de
2002;160:1361—9.
différenciation et non comme une origine neuroendocrine. [7] Tang LH, Aydin H, Brennan MF, Klimstra DS. Clinically aggres-
Il est classique de confondre une TSPP avec une tumeur sive solid pseudopapilary tumors of the pancreas. A report of
endocrine pancréatique, mais l’analyse morphologique fine two cases with components of undifferentiated carcinoma and a
et l’immunohistochimie devraient permettre de faire la comparative clinicopathologic analysis of 34 conventional cases.
distinction. Il a, par exemple, été récemment montré la Am J Surg Pathol 2005;29:512—9.
Annales de pathologie (2008) 28, 326—328

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur pancréatique inhabituelle


An unusual pancreatic tumor

Emna Chelbi, Jeanne Tran Van Nhieu ∗

Département de pathologie, hôpital Henri-Mondor, AP—HP, 51,avenue du


Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, 94010 Créteil cedex, France

Accepté pour publication le 29 novembre 2007


Disponible sur Internet le 3 septembre 2008

Observation
Il s’agit d’une tumeur de la tête du pancréas découverte au cours d’un bilan annuel de
surveillance pour exposition à l’amiante chez une femme âgée de 56 ans. La patiente était
asymptomatique et l’examen clinique normal. Les examens biologiques étaient également
normaux, notamment les marqueurs sériques tumoraux ACE et CA19-9.
L’examen tomodensitométrique montrait une masse ovoïde homogène hypodense du
crochet pancréatique. Après l’injection du produit de contraste, la densité de la masse se
rehaussait progressivement mais sans atteindre celle du parenchyme pancréatique adja-
cent. L’IRM confirmait l’existence d’une lésion solide hypo-intense en séquences T1 et T2.
L’examen macroscopique de la duodénopancréatectomie céphalique montrait une tumeur
blanchâtre de 5 cm de grand axe, très ferme à la coupe, non encapsulée, à contours
nets, discrètement polycycliques, semblant refouler le parenchyme pancréatique adja-
cent. Elle était discrètement fasciculée et nodulaire avec des zones myxoïdes entre les
nodules.
L’examen histopathologique montrait une prolifération de cellules fusiformes, à cyto-
plasme peu abondant et à noyau allongé et ondulé, sans atypie ni mitose, disposées en
courts faisceaux non orientés. Il s’y associait un contingent fibreux dense, parfois abon-
dant. Des structures pancréatiques normales étaient englobées, notamment en périphérie
de la tumeur (Fig. 1 et 2).
L’étude immuno-histochimique révélait une expression intense et diffuse de la vimen-
tine, du CD34, du bcl-2 par les cellules tumorales. Celles-ci exprimaient plus faiblement
le CD99. Le marquage était négatif avec les anticorps dirigés contre le CD117 (c-kit),
l’actine alpha-musclaire lisse et la h-caldesmone, la calrétinine, la PS100, l’EMA et les
cytokératines (AE1/AE3) (Fig. 2).

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : jeanne.tran-van-nhieu@hmn.aphp.fr (J. Tran Van Nhieu).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.11.008
Une tumeur pancréatique inhabituelle 327

Figure 1. Tumeur bien limitée englobant des structures pancréa- Figure 2. Cellules fusiformes à noyau allongé, sans atypies, dans
tiques normales (flèches) (HES × 1,25). un stroma collagène abondant. La présence d’acini pancréatiques
Well circumscribed tumor with entrapment of normal pancreatic au sein de la tumeur est notée en bas à droite (HES × 20). Encart :
structures (arrows) (HES × 1.25). expression du CD34 par les cellules tumorales.
Spindle cells without nuclear atypia, associated with numerous col-
lagen fibers and Entrapment of pancreatic acini can be seen at the
lower right corner (HES × 20). Insert: tumoral positivity for CD34.

Quel est votre diagnostic ?


328 E. Chelbi, J. Tran Van Nhieu

Diagnostic : tumeur fibreuse solitaire du l’étude morphologique et immuno-histochimique. Dans les


tumeurs musculaires lisses, il existe une expression mar-
pancréas
quée de l’actine musculaire lisse, de la desmine et de la
Les tumeurs non épithéliales du pancréas sont rares et h-caldesmone, alors que le c-kit et le CD34 ne sont pas expri-
représentent moins de 1 % de l’ensemble des tumeurs pan- més [1,7]. Le diagnostic différentiel inclut également la
créatiques [1]. Parmi ces tumeurs non épithéliales, les tumeur myofibroblastique inflammatoire qui est constituée
léiomyosarcomes et les tumeurs malignes des gaines ner- par une prolifération myofibroblastique fusiforme dans un
veuses périphériques sont les plus fréquemment rapportés stroma collagène contenant une infiltration inflammatoire
[1]. d’abondance variée [1,8]. La tumeur desmoïde mésenté-
La tumeur fibreuse solitaire, d’origine fibro- rique, histologiquement très proche, est habituellement
myofibroblastique, a été initialement décrite au niveau de écartée par l’étude immunophénotypique car elle n’exprime
la plèvre et, secondairement, au niveau de multiples autres ni le c-kit, ni le CD34.
sites extrapleuraux, comme les tissus mous, les poumons, L’évolution de la tumeur fibreuse solitaire est imprévi-
les glandes salivaires, le rein [1]. sible mais est le plus souvent bénigne. Des formes agressives
À notre connaissance, seulement quatre cas ont été sont observées dans 10 à 15 % des cas, plus fréquemment
rapportés dans le pancréas [1—5]. L’observation princeps, dans le médiastin, l’abdomen, le pelvis et le rétropéritoine
comme les plus récentes, était similaire à la nôtre tant [9]. Certains critères morphologiques (marges infiltrées,
sur le plan clinique (découverte fortuite) que sur le plan angio-invasion, index mitotique élevé et nécrose) semblent
morphologique et immunophénotypique, avec une absence corrélés mais de façon non stricte à une évolution défavo-
d’expression de c-kit (CD 117) lorsqu’elle avait pu être rable [9]. Un suivi à long terme est recommandé.
étudiée [1,3—5]. Dans le cas rapporté par Chatti et al.,
la tumeur de 13 cm de grand axe était encapsulée, blan-
châtre, par endroits nécrosés. Histologiquement, elle était Références
composée de cellules fusiformes régulières, sans atypie ni
mitose ; la prolifération était de densité hétérogène et [1] Lüttges J, Mentzel T, Hübner G, Klöppel G. Solitary fibrous
s’accompagnait d’une vascularisation de type hémangiopé- tumour of the pancreas: a new member of the small
group of mesenchymal pancreatic tumours. Virchows Arch
ricytaire. Les cellules tumorales exprimaient fortement la
1999;435:37—42.
vimentine, le CD34 et le Bcl-2 et, focalement, le CD99,
[2] Chatti K, Nouira K, Ben Reguiga M, Bedioui H, Oueslati S, Laabidi
l’actine alpha-muscle lisse et le CD117 [2]. Il n’avait pas B, et al. Tumeur fibreuse solitaire du pancréas. À propos d’un
été effectué d’étude moléculaire. cas. Gastroenterol Clin Biol 2006;30:317—9.
Quelles que soient leurs localisations, pleurales ou [3] Gardini A, Dubini A, Saragoni L, Padovani F, Garcea D. Benign
extrapleurales, les tumeurs fibreuses solitaires expriment solitary fibrous tumor of the pancreas: a rare location of extra-
habituellement le CD34 (90 à 95 % des cas), le CD99 (70 %) pleural fibrous tumor. Single case report and review of the
et variablement le bcl-2, l’EMA et l’actine musculaire lisse literature. Pathologica 2007;99:15—8.
(20 à 30 %). Une expression minime et focale de la protéine [4] Miyamoto H, Molena DA, Schoeniger LO, Haodong X. Solitary
S100, de la desmine et/ou des cytokératines est occasionnel- fibrous tumor of the pancreas: a case report. Int J Surg Pathol
2007;15:311—4.
lement rapportée. L’expression de c-kit, comme cela a été
[5] Srinivasan VD, Wayne JD, Rao MS, Zynger DL, Solitary fibrous
rapporté dans une des cinq observations de la littérature [2],
tumor of the pancreas: case report with cytologic and sur-
est tout à fait inhabituelle et pose le problème de diagnostic gical pathology correlation and review of the literature. JOP
différentiel, qui est le plus problématique, avec celui d’une 2008;10(9):526—30.
tumeur stromale (GIST) de localisation pancréatique (forme [6] Uchida H, Sasaki A, Iwaki K, Tominaga M, Yada K, Iwashita
extradigestive rare) ou duodénale, comprimant le pancréas Y, et al. An extramural gastrointestinal stromal tumor of the
et prise pour une tumeur primitive du pancréas [1,6]. Ce duodenum mimicking a pancreatic head tumor. J Hepatobiliary
diagnostic repose sur la mise en évidence d’une expression Pancreat Surg 2005;12:324—7.
de c-kit. On s’aidera, en cas d’absence d’expression de c-kit, [7] Coindre JM, Emile JF, Monges G, Ranchere-Vince D, Scoazec
d’études moléculaires des altérations des gènes KIT et PDG- JY. Tumeurs stromales gastro-intestinales : définition, caracté-
ristiques histologiques, immunohistochimiques et génétiques,
FRA, et/ou éventuellement de nouveaux marqueurs comme
stratégie diagnostique. Ann Pathol 2005;25:358—85.
la PKC-␪ et la protéine DOG1 [7]. Dans notre observation,
[8] Shaun W, Frank E, Urmila K. Inflammatory myofibroblastic tumor
c-kit n’était pas exprimé et l’étude moléculaire a confirmé of the pancreatobiliary region: morphologic and immunocyto-
l’absence de mutation des gènes KIT (étudiée au niveau des chemical study of three cases. Am J Surg Pathol 1998;22:412—8.
exons 9, 11, 13 et 17) et PDGFRA (exons 12 et 18). [9] Fletcher C, Unni KK, Mertens F. World Health Organization clas-
Parmi les autres diagnostics différentiels, un léiomyome sification of tumours. Pathology and genetics of tumours of soft
ou un léiomyosarcome bien différencié sont éliminés par tissue and bone. Lyon: IARC Press; 2002.
Annales de pathologie (2009) 29, 60—62

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur parotidienne palissadique


A palisading parotid gland tumour

Emna Braham , Selma Ben Haha-Bellil ∗, Ines Chelly ,


Khadija Bellil , Amina Mekni , Slim Haouet ,
Moncef Zitouna , Nidhameddine Kchir

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital la Rabta,


1007 Bab Saadoun, Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 21 novembre 2008


Disponible sur Internet le 5 février 2009

Observation
Un homme âgé de 73 ans, sans antécédents pathologiques particuliers, a été admis pour
exploration d’une tuméfaction latérocervicale droite en regard de la loge parotidienne
évoluant depuis quatre mois et ayant progressivement augmenté de taille. L’examen cli-
nique découvrait une formation ovalaire mobile d’environ deux centimètres de diamètre
de consistance ferme, mobile, indolore et dépourvue de signes inflammatoires locaux.
Les aires ganglionnaires étaient libres et la thyroïde était non palpable. L’échographie
cervicale montrait un nodule de 21 mm du lobe superficiel de la parotide droite à
double composante tissulaire et kystique. Une parotidectomie subtotale a été réali-
sée.
Macroscopiquement, la lésion, mesurant deux centimètres de grand axe, était bien
limitée, de consistance ferme, d’aspect blanc grisâtre et luisant à la coupe. Histologi-
quement, elle était constituée d’amas, de travées et de tubes à contenu éosinophile
entourés par un stroma fin (Fig. 1). Les cellules tumorales monomorphes cubiques ou
cylindriques d’aspect basaloïde, à cytoplasme peu abondant, étaient munies de noyaux
arrondis ou ovoïdes réguliers et adoptaient une disposition palissadique périphérique
(Fig. 2). À l’étude immunohistochimique, les cellules ductulaires exprimaient les cyto-
kératines (Fig. 1), alors que les cellules de la couche basale exprimaient l’actine et la
vimentine.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : bellilhela@yahoo.fr (S.B. Haha-Bellil).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Publié par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.annpat.2008.11.001
Une tumeur parotidienne palissadique 61

Figure 2. Les cellules tumorales monomorphes présentent un


Figure 1. Prolifération tumorale agencée en travées et tubes cen- aspect basaloïde et adoptent une disposition palissadique périphé-
trés par un matériel éosinophile (HE × 250). (Encart) : les cellules rique (HE × 400).
ductulaires expriment les cytokératines (IHC × 100). Tumour cells are monomorphic, with a basaloid aspect, and form
Tumour cells with trabecular pattern and tubular structures with peripheral palisades (HE × 400).
eosinophilic intraluminal material (HE × 250). (Insert) Ductular
cell express cytokeratins ( × 100).

Quel est votre diagnostic ?


62 E. Braham et al.

Diagnostic : adénome à cellules basales de dense avec un aspect palissadique périphérique des cellules.
La variété trabéculaire est faite de travées et cordons par-
la parotide
fois de tubes de cellules basaloïdes séparées par un stroma
L’adénome à cellules basales est une tumeur épithéliale richement vascularisé. Enfin, la variété membranaire est
bénigne rare représentant 1 à 3 % des tumeurs des glandes caractérisée par la présence de bandes hyalines à la périphé-
salivaires [1]. Il siège au niveau de la glande parotide dans rie des cellules basaloïdes [1,2]. Ces aspects peuvent être
environ 75 % des cas, de la glande sous-mandibulaire dans associés. L’étude immunohistochimique permet de montrer
5 % et plus rarement au niveau des glandes salivaires acces- la différenciation myoépithéliale des cellules tumorales par
soires [1—3]. L’adénome à cellules basales a été initialement l’expression des cytokératines, de l’actine musculaire lisse
classé dans le groupe des adénomes monomorphes, entité et de la vimentine [1,5].
initialement définie par Kleinsasser et Klein en 1967 par Le diagnostic différentiel se pose avec l’adénome pléo-
opposition au groupe des adénomes pléomorphes [2]. Cette morphe : le monomorphisme cellulaire et l’absence de
entité a été par la suite reconnue par l’Organisation mon- stroma myxoïde permettent de redresser le diagnostic. Il
diale de la santé en 1991 et définie comme étant une tumeur se pose dans certains cas avec le carcinome à cellules
bénigne composée de cellules d’aspect basaloïde et dépour- basales et le carcinome adénoïde kystique mais la bonne
vue du stroma chondromyxoïde observé dans l’adénome délimitation de la lésion, l’aspect uniforme des cellules et
pléomorphe [1]. l’absence de signes histologiques de malignité, notamment
L’adénome à cellules basales affecte habituellement d’engainement périnerveux, permet d’éliminer ce diagnos-
la femme âgée de plus de 60 ans mais peut survenir à tic [1,2].
tout âge de 32 à 87 ans. Il se présente cliniquement sous Le traitement est basé sur la résection chirurgicale [1,2].
forme d’un nodule unique de croissance lente, mobile et L’adénome à cellules basales est une tumeur habituellement
asymptomatique [1,3,4]. L’aspect radiologique est celui bénigne : cependant, des cas exceptionnels de transforma-
d’une masse tissulaire bien circonscrite à contours régu- tion maligne ont été rapportés [1].
liers siégeant au niveau du lobe superficiel de la parotide,
se rehaussant de façon homogène ou inhomogène après
injection du produit de contraste selon la présence ou Références
l’absence de remaniements hémorragiques et kystiques
[1] Barnes L, Eveson JW, Reichart P, Sidransky D, editors. World
[3].
Health Organization Classification of tumours. Pathology and
Macroscopiquement, la tumeur se présente sous forme genetics of head and neck tumours. Lyon: IARC Press; 2005.
d’un nodule arrondi ou ovalaire bien limité, encapsulé, [2] Jang M, Park D, Lee SR, Hahm CK, Kim Y, Kim Y, et al. Basal
mesurant entre un et trois centimètres de grand axe, cell adenoma in the parotid gland: CT and MR findings. AJNR
d’aspect blanc grisâtre homogène ou kystique à la coupe 2004;25:631—5.
[1,2]. [3] Chawla AJ, Tan TY, Tan GJ. Basal cell adenomas of the parotid
Histologiquement, la lésion se caractérise par une proli- gland: CT scan features. Eur J Radiol 2006;58:260—5.
fération de cellules monomorphes basaloïdes à cytoplasme [4] Jeong AK, Lee HK, Kim SY, Cho KJ. Basal cell adenoma in the
éosinophile et à noyaux arrondis ou ovalaires. Trois variétés parapharyngeal space: MR findings. Clin Imaging 2001;25:392—5.
sont reconnues. La variété solide est constituée de nappes [5] Hemachandran M, Lal A, Vaiphei K. Basal cell adenoma-an unu-
sual presentation. Ann Diagn Pathol 2003;7:292—5.
ou d’îlots de taille variable séparés par un tissu collagène
Annales de pathologie (2009) 29, 150—152

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur pigmentée du cône médullaire


A pigmented tumour of medullary cone

Guillaume Gauchotte a,∗, Béatrice Marie a,


Catherine Pinelli b, Sylvain Foscolo c,
Jean-Michel Vignaud a

a
Service d’anatomie et cytologie pathologiques, CHU de Nancy, hôpital central,
29, avenue du Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, C.O. no 34, 54035 Nancy cedex, France
b
Département de neurochirurgie, CHU de Nancy, hôpital Central, 29, avenue du
Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, C.O. no 34, 54035 Nancy cedex, France
c
Service de neuroradiologie, CHU de Nancy, hôpital Central, 29, avenue du
Maréchal-de-Lattre-de-Tassigny, C.O. no 34, 54035 Nancy cedex, France

Accepté pour publication le 1er septembre 2008


Disponible sur Internet le 13 mars 2009

Observation
Un homme âgé de 20 ans consultait pour d’importantes douleurs rachidiennes et des
troubles sphinctériens d’apparition récente. L’IRM montrait une lésion tumorale du cône
médullaire à hauteur de la vertèbre T12, mesurant 5,8 cm de longueur et 1,6 cm de dia-
mètre, partiellement kystique. La composante tissulaire de la lésion était en hyposignal
hétérogène en T2, en hypersignal franc et homogène en T1, et se rehaussait après injection
de produit de contraste.
L’intervention chirurgicale retrouvait une lésion intradurale noire, mal limitée, accolée
à l’émergence des racines nerveuses.
Macroscopiquement, la tumeur était noire intense, de consistance molle. Histologique-
ment, la lésion se présentait comme une prolifération de cellules pigmentées, formant
des amas cohésifs aux contours parfois rubanés, avec des phénomènes d’enroulement
(Fig. 1). Les cellules étaient monomorphes, à noyaux arrondis, à chromatine finement
dispersée, avec un petit nucléole (encart Fig. 1). Leur cytoplasme contenait une grande
quantité de pigment mélanique. Aucune mitose n’était observée. Entre ces plages de
cellules pigmentées, le tissu glial était le siège d’une gliose réactionnelle modérée.
L’analyse immunohistochimique montrait une expression de Melan-A par la plupart
des cellules tumorales (Fig. 2) et une expression modérée nucléaire de la PS-100. Aucun
marquage n’était observé avec les anticorps anti-glial fibrillar acid protein (GFAP) et anti-
NeuN, ni l’avec anticorps pan cytokératine AE1-AE3. L’anticorps MIB-1 (Ki-67) objectivait
un faible index prolifératif (1 à 2 %).
L’évolution postopératoire était favorable, avec une régression progressive de la symp-
tomatologie clinique.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : g.gauchotte@yahoo.fr (G. Gauchotte).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.09.053
Une tumeur pigmentée du cône médullaire 151

Figure 1. Amas de cellules ovalaires cohésives pigmentées, dessi- Figure 2. Expression par la plupart des cellules tumorales de la
nant des enroulements (HES × 100). Encart : cellules monomorphes, Melan-A (× 400).
avec des noyaux arrondis, à chromatine finement dispersée, conte- Most tumour cells express Melan-A antigen (× 400).
nant un petit nucléole (HES × 1000).
Clusters of oval cohesive pigmented cells forming whorls (HES
× 100). Insert: monomorphous cells with a round nuclei, containing
finely scattered chromatin and a small nucleoli (HES × 1000).

Quel est votre diagnostic ?


152 G. Gauchotte et al.

Diagnostic : mélanocytome du cône fort grossissement), et un index prolifératif, évalué par


l’anticorps MIB-1, inférieur ou égal à 2 % [2]. Les mélanomes
médullaire
sont des tumeurs à très forte densité cellulaire, dont les
Le mélanocytome du système nerveux central, également noyaux sont atypiques et volumineux, avec plusieurs gros
appelé mélanocytome méningé, appartient au groupe des nucléoles, et des zones de nécrose ou d’invasion du système
lésions tumorales mélanocytaires primitives du système ner- nerveux central. Leur activité mitotique est de plus de deux
veux central, incluant par ailleurs la mélanocytose diffuse, mitoses pour dix champs à fort grossissement, et l’index
le mélanome malin et la mélanomatose diffuse [1]. Toutes prolifératif est évalué par l’anticorps MIB-1 à plus de 3 %
ces entités se développeraient à partir du mélanocyte lep- [2]. Les lésions ne réunissant pas les critères cytologiques
toméningé [2,3]. Le mélanocytome a été décrit pour la nécessaires pour être classées en mélanome, mais dont
première fois par Limas et Tio [4]. L’étude ultrastructurale l’activité mitotique est supérieure à celle habituellement
a montré la présence de mélanosomes et prémélanosomes observée dans les mélanocytomes (plus d’une pour dix
au sein de leur cytosol et l’absence d’élément évocateur champs à fort grossissement), ou envahissant le système
d’une origine méningothéliale, bien que cette lésion ait été nerveux central, sont classées en tumeurs mélanocytaires
parfois décrite comme un « méningiome mélanotique ». de grade intermédiaire [1,2].
Le mélanocytome est une tumeur rare, son incidence Les deux principaux diagnostics différentiels sont le
étant évaluée à environ un cas pour dix millions d’habitants schwannome mélanotique et le méningiome. Celui-ci est en
par an, pouvant survenir à tout âge, avec un pic de fré- effet d’attache durale, avec histologiquement des enroule-
quence entre 45 et 50 ans [1]. Il siège le plus souvent dans le ments cellulaires, et parfois quelques mélanocytes visibles
compartiment extramédullaire intradural, au niveau cervi- au sein de la tumeur [1,2]. D’autres lésions peuvent
cal ou thoracique. De rares cas ont également été rapportés contenir du pigment mélanique, mais avec un aspect mor-
en fosse postérieure et au niveau supratentoriel, en par- phologique très différent, comme le médulloblastome, le
ticulier au niveau du cavum de Meckel [1,2]. Il peut être paragangliome, certaines tumeurs gliales, et la tumeur
d’implantation durale, ou siéger au niveau des racines ner- neuro-ectodermique mélanotique du nourrisson [1].
veuses [1,4,5]. Le taux de récidive du mélanocytome après traitement
Les symptômes sont liés à la compression des structures chirurgical est faible, survenant le plus souvent lorsqu’une
avoisinantes, avec en fonction du siège de la lésion des exérèse complète ne peut être réalisée [1]. De très rares cas
signes de compression médullaire ou divers déficits neurolo- de transformation maligne en mélanome ont toutefois été
giques. En IRM, le mélanocytome, comme les autres tumeurs décrits [7].
mélaniques, est typiquement en iso- ou hypersignal en T1,
en hyposignal en T2, et se rehausse de façon homogène après
injection de produit de contraste [1,5,6]. Références
Macroscopiquement, le mélanocytome est habituelle-
[1] Brat DJ, Perry A. Melanocytic lesions. In: Barnes L, Eveson JW,
ment une lésion bien limitée, de couleur noire, brun-rouge
Reichart P, Sidransky D, editors. WHO Classification of tumours
ou bleue [1]. Histologiquement, il est composé de cel- of the Central Nervous System. Lyon: IARC Press; 2007.
lules monomorphes à contours épithélioïdes, fusiformes [2] Brat DJ, Giannini C, Scheithauer BW, Burger PC. Primary mela-
ou ovalaires, contenant une quantité variable de méla- nocytic neoplasms of the central nervous systems. Am J Surg
nine, souvent organisées en nappes de taille variable, Pathol 1999;23:745—54.
à forte densité cellulaire [1,2,4,5], avec parfois des [3] Bydon A, Gutierrez JA, Mahmood A. Meningeal melanocy-
enroulements semblables à ceux observés dans les ménin- toma: an aggressive course for a benign tumor. J Neurooncol
giomes [1,2]. Les noyaux sont ovalaires ou réniformes, 2003;64:259—63.
avec un petit nucléole [1,2]. De rares cas de mélano- [4] Limas C, Tio FO. Meningeal melanocytoma ‘‘melanotic menin-
cytomes non pigmentés ont été décrits [1,2]. L’étude gioma’’. Its melanotic origin as revealed by electron microscopy.
Cancer 1972;30:1286—94.
immunohistochimique avec les anticorps anti-HMB45 et anti-
[5] Kawaguchi T, Kawano T, Kazekawa K, Nakashima S, Honma T,
Melan-A (MART-1) est habituellement positive, de même Kaneko Y, et al. Meningeal melanocytoma in the left frontal
que la recherche du facteur de transcription microphtal- region. Brain Tumor Pathol 1998;15:58—62.
mique et de la protéine S100 [1,5,6]. On ne décrit pas [6] Iida M, Llena JF, Suarez MA, Malik S, Weidenheim KM, LaSala P,
d’expression de la GFAP, des neurofilaments, de l’EMA ou des et al. Two cases of spinal meningeal melanocytoma. Brain Tumor
cytokératines [1]. Pathol 2002;19:41—5.
Les mélanocytomes sont considérés comme des tumeurs [7] Uozumi Y, Kawano T, Kawaguchi T, Kaneko Y, Ooasa T, Ogasawara
de bas grade, non invasives, sans atypies cytologiques, S, et al. Malignant transformation of meningeal melanocytoma:
avec de rares mitoses (de zéro à une pour dix champs à a case report. Brain Tumor Pathol 2003;20:21—5.
Annales de pathologie (2008) 28, 54—56

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur pulmonaire inhabituelle


An unusual pulmonary tumor

Emna Braham a,∗, Belhassen Smati b,


Aïda Ayadi-Kaddour a, Olfa Ismaïl a,
Samia Jrad-Hannachi b, Faouzi El Mezni a

a
Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, hôpital Abderrahmen-Mami,
2080 Ariana, Tunisie
b
Service de chirurgie thoracique, hôpital Abderrahmen-Mami, 2080 Ariana, Tunisie

Accepté pour publication le 15 mars 2007


Disponible sur Internet le 16 mai 2008

Un homme de 23 ans était hospitalisé pour survenue, suite à un effort sportif, d’une
gêne respiratoire et d’un emphysème sous-cutané cervical. Le reste de l’examen phy-
sique était normal, en particulier pas d’hypertension artérielle. L’interrogatoire mettait
en évidence la notion d’une toux productive et d’une hémoptysie évoluant depuis cinq
mois. La radiographie du thorax initiale montrait un pneumomédiastin et une opacité pul-
monaire gauche. La fibroscopie bronchique visualisait une lésion bourgeonnante lobaire
inférieure gauche dont la biopsie était négative. La tomodensitométrie thoracique met-
tait en évidence une masse parahilaire postérieure gauche de 4 cm de diamètre, associée
à un décollement de la plèvre médiastinale. L’exploration chirurgicale trouvait, outre
la masse lobaire inférieure gauche, un nodule de la lingula de 1,5 cm, justifiant la
réalisation d’une lobectomie inférieure gauche et d’une résection atypique du nodule
lingulaire. L’examen anatomopathologique de la pièce opératoire montrait la présence à
1 cm de la recoupe bronchique, d’une lésion endo et péribronchique mal limitée, blan-
châtre à la coupe, ulcérant la muqueuse bronchique. Les cellules tumorales, de grande
taille, arrondies ou polygonales à cytoplasme abondant faiblement éosinophile granu-
laire ou microvacuolaire, étaient munies de noyaux arrondis vésiculeux et nucléolés
(Fig. 1). Les figures de mitoses étaient très rares. Ces cellules cernées par place par
des cellules sus-tentaculaires (Fig. 2), adoptaient des agencements trabéculo-cordonnaux
séparés par un riche réseau de capillaires. En immunohistochimie, les cellules tumo-
rales exprimaient la chromogranine A (Fig. 1) et la synaptophysine et n’exprimaient
ni les cytokératines (MNF116) (Fig. 2), ni l’antigène épithélial membranaire (EMA) alors
que les cellules sus-tentaculaires exprimaient la protéine S100. Le nodule de la lin-
gula était identique. Le caractère primitif de la tumeur était retenu sur l’absence de
lésion extrapulmonaire en tomodensitométrie. L’évolution était favorable après 18 mois de
surveillance.

∗ Auteur correspondant. 25, rue d’Oran, cité La-Gazelle, 2083 Ariana, Tunisie.
Adresse e-mail : emnabraham@yahoo.fr (E. Braham).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.03.002
Une tumeur pulmonaire inhabituelle 55

Figure 1. Cellules tumorales, arrondies ou polygonales à cyto-


plasme abondant éosinophile, microvacuolaire, à noyau rond, Figure 2. Les cellules tumorales n’expriment pas les cytoké-
disposées en cordons et travées séparés par un riche réseau de capil- ratines alors que l’épithélium bronchique est nettement marqué
laires (HE × 250). En cartouche : expression de la chromogranine A (IHC × 100).
par les cellules tumorales (IHC × 250). Tumor cells negative for cytokeratins whereas bronchial epithelium
Round or polygonal tumor cells with abundant eosinophilic cyto- is strongly marked (IHC × 100).
plasm and round nuclei, arranged in nests and trabecular pattern
surrounded by a rich capillary network (HE × 250). Insert: expres-
sion of chromogranin A by tumor cells (IHC × 250). Quel est votre diagnostic ?
56 E. Braham et al.

Diagnostic : paragangliome bifocal primitif expectoration purulente ou par une hémoptysie. Le PPP
peut être plurifocal dans environ 20 % des cas [1], comme
du poumon
dans notre observation. Les aspects radiologiques sont
Environ 90 % des paragangliomes surviennent dans les sur- peu spécifiques et la fibroscopie montre dans les formes
rénales et sont appelés phéochromocytomes. Les autres, endobronchiques une masse bourgeonnante polyploïde.
siègent dans l’abdomen, la région de la tête et du cou et le Les biopsies sont peu contributives au diagnostic et sont
thorax. Les paragangliomes thoraciques représentent 12 % rarement pratiquées du fait du risque hémorragique. Le
des paragangliomes extrasurrénaliens et sont essentielle- diagnostic de certitude est anatomopathologique, générale-
ment représentés par les paragangliomes médiastinaux. Les ment porté sur pièce opératoire et les aspects sont similaires
paragangliomes pulmonaires primitifs (PPP) sont exception- à ceux observés chez notre malade [2—4]. Avant de rete-
nels [1]. nir la nature primitive du paragangliome, il faut éliminer
L’existence des PPP fut longtemps controversée. Ces une métastase pulmonaire d’un phéochromocytome ou d’un
tumeurs dériveraient selon la théorie de Blessing et paragangliome d’un autre site [1]. L’excision chirurgicale
Hora de structures paraganglionnaires-like siégeant dans constitue le traitement de choix [3,4]. Les PPP sont des
l’interstitium périvasculaire du poumon du nouveau-né tumeurs généralement bénignes. Les paragangliomes malins
[2,3]. Le premier cas fut décrit en 1958 par Heppleston, sont rares et la malignité est démontrée par la survenue
depuis, moins de 30 observations ont été rapportées [2—4]. de métastases notamment au niveau des ganglions lympha-
Cependant, la majorité de ces cas manquent de descriptions tiques régionaux [3,4].
histologiques précises et de données immunohistochimiques
permettant de les différencier des tumeurs carcinoïdes,
principal diagnostic différentiel [2,3]. Les critères mor- Références
phologiques classiques du diagnostic de paragangliome
sont comme suit : une architecture dite « Zellballen », [1] Sandur S, Dasgupta A, Shapiro JL, Arroliga AC, Mehta AC.
l’absence d’agencement trabéculaire ou pseudoglandulaire Thoracic involvement with pheochromocytma. A review. Chest
observé dans les carcinoïdes, un aspect vacuolaire du 1999;115:511—21.
cytoplasme, la présence de cellules sus-tentaculaires et [2] Aubertine CL, Flieder DB. Primary paraganglioma of the lung.
l’absence d’expression des cytokératines par les cellules Ann Diagn Pathol 2004;8:237—41.
tumorales. Ces critères ne permettent pas toujours une [3] Shibahara J, Goto A, Niki T, Tanaka M, Nakajima J. Pri-
distinction absolue entre paragangliome et tumeur carci- mary pulmonary paraganglioma. Report of functioning case
noïde. En effet, une expression des cytokératines a été with immunohistochemical and ultrastructural study. Am J Surg
rapportée dans de rares cas de PPP [2,3]. Des cellules sus- Pathol 2004;28:825—9.
[4] Skodt V, Jacobsen GK, Helsted M. Primary paraganglioma of
tentaculaires PS100 positives, ont été décrites dans des
lung. Report of two cases and review of the literature. APMIS
tumeurs carcinoïdes bronchiques qui ont été même dénom- 1995;103:597—603.
més « paraganglioïdes » par Barbareschi et al. [5]. [5] Barbareschi M, Frigo B, Mosca L, Carboni N, Arrigoni GP,
Le PPP se présente habituellement sous forme d’une Leonardi E, et al. Bronchial carcinoid with S-100 positive sus-
masse périphérique, asymptomatique et non fonctionnelle tentacular cells. A comparative study with gastrointestinal
du parenchyme pulmonaire. Parfois, la tumeur est endo- carcinoids, pheochromocytoma and paragangliomas. Pathol Res
bronchique se manifestant par une toux ramenant une Pract 1990;186:212—22.
Annales de pathologie (2009) 29, 158—160

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur pulmonaire inhabituelle


An unusual pulmonary tumor

Jérémy Sandrini a,∗, Aurélie Fabre a,


Yannick Leguen b, Thierry Urban b,
Jean-Paul Saint-André a

a
Département de pathologie cellulaire et tissulaire, CHU d’Angers,
4, rue Larrey, 49933 Angers cedex 09, France
b
Service de pneumologie, CHU d’Angers,
4, rue Larrey, 49933 Angers cedex 09, France

Accepté pour publication le 25 septembre 2008


Disponible sur Internet le 20 mars 2009

Observation
Un homme de 48 ans a été hospitalisé pour le bilan d’une masse lobaire supérieure gauche
associée à un gros hile gauche et à une opacité de l’apex droit d’allure suspecte, décou-
verte à la radiographie pulmonaire, réalisée suite à un épisode d’hémoptysie. Dans ses
antécédents, on notait un tabagisme estimé à 20 paquets années sevré depuis sept ans.
Suite à une fibroscopie bronchique qui montrait une infiltration du culmen gauche d’allure
tumorale et dont les biopsies s’étaient avérées non contributives, une ponction scanno-
guidée est réalisée.
À l’examen histologique, il existait une prolifération cellulaire organisée en amas
ou en nids, avec des aspects de rosettes sur un fond nécrotique (Fig. 1a). Les
cellules présentaient une chromatine fine sans nucléole pour la plupart, avec une
importante activité mitotique. La coloration du PAS/BA mettait en évidence de nom-
breuses vacuoles de sécrétions alcianophiles au sein de ces amas tumoraux (Fig. 1b).
L’étude immunohistochimique montrait une positivité des cellules tumorales qui bor-
daient les vacuoles de mucisécrétion pour les anticorps anti-CK7, anti-synaptophysine
(Fig. 2a), anti-CD56 et anti-TTF-1 (Fig. 2b). L’anticorps anti-chromogranine A était
négatif.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : sandrini.jeremy@yahoo.fr (J. Sandrini).

0242-6498/$ — see front matter © 2009 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.09.055
Une tumeur pulmonaire inhabituelle 159

Figure 1. Sur un fond de cellules nécrotiques (flèche), présence


de massifs polyadénoïdes avec un aspect en rosettes (1a) au pour-
tour de mucisécrétion soulignée par la coloration de Pasba (1b, Figure 2. Immunomarquage par l’anticorps antisynaptophysine
étoiles). Les noyaux sont hyperchromatiques, certains sont nucléo- (2a, ×40), en grain, des cytoplasmes des cellules bordant les
lés, la majorité présente une chromatine dense (1a, HES × 20). lumières glandulaires (étoiles) et immunodétection de l’anticorps
On a necrotic background (arrow), there are some cribriform nests anti-TTF-1 (2b, × 20) avec un marquage nucléaire.
of tumour cells, some showing rosette formation around a vacuole ‘‘Dot like’’ immunolabelling with antisynaptophysin antibody (2a,
of mucus secretion (1a), underlined on PASBA staining (1b, stars). × 40), in cells lining mucus vacuoles (stars). The majority of tumour
The nuclei are hyperchromatic; some are with nucleoli, and others cells shows positive nuclear staining with anti-TTF-1 antibody
with a dense chromatin pattern (1a, HES × 20). (2b, × 20).

Quel est votre diagnostic ?


160 J. Sandrini et al.

Diagnostic : tumeur amphicrine peuvent être considérées, d’une part comme précurseurs
d’un adénocarcinome bronchique et d’autre part comme
(exocrine-endocrine) primitive
précurseurs des cancers à petites cellules pulmonaires. Une
pulmonaire cellule souche pluripotente serait à l’origine de ce phéno-
type [4].
L’association du caractère endocrine et exocrine au sein Sur le plan moléculaire, des modèles murins
d’une même cellule fut décrite pour la première fois par d’entérocytes utilisant la thymidine tritiée ont permis
Feyrter en 1938 sous le nom de « système épithélial endo- d’isoler deux protéines de régulation pouvant induire,
crine diffus » [1]. Ce n’est que plus tard, en 1980, que chacune de manière indépendante, l’expression de deux
Ratzenhofer introduisit le terme de cellule « amphicrine » groupes de gènes. Le premier groupe serait impliqué dans
s’appliquant à des cellules où coexistent des granulations la sécrétion endocrine et le second dans la sécrétion
argyrophiles infranucléaires au contact du pôle vasculaire exocrine, qui seraient alors stockés respectivement dans
et des vacuoles de mucosécrétion apicales au contact du des compartiments bien distincts au sein du même clone
pôle luminal de ces cellules [2]. Les tumeurs amphicrines cellulaire tumoral [5].
répondent à cette description et sont bien à distinguer des Le traitement de ces tumeurs demeure non consensuel,
tumeurs composites où le caractère endocrine et exocrine ce qui contribue à leur mauvais pronostic et à leur survie
existe au sein de deux populations cellulaires différentes. limitée.
Les tumeurs amphicrines sont exceptionnelles. Une étude
a décrit huit cancers amphicrines en rapportant leur sur-
vie : deux formes pulmonaires avec une survie de trois ans Références
et demi à six ans, deux formes gastriques avec une survie
de dix à 17 mois, une forme œsophagienne avec une sur- [1] Feyrter F. Uber diffuse endokrine epitheliale organe. Leipzig:
vie à 11 mois, une forme cæcale avec une survie à 18 mois, Johann Ambrosius Barth; 1938.
une forme appendiculaire avec une survie à deux ans et [2] Ratzenhofer M, Aubock L. The amphicrine (endo-exocrine) cells
une forme pancréatique avec une survie inconnue (perdu de in the human gut, with a short reference to amphicrine neopla-
vu) [3]. Les principaux lieux de tumorigénèse sont le côlon, sias. Acta Morphol Acad Sci Hung 1980;28:37—58.
[3] Chejfec G, Capella C, Solcia E, Jao W, Gould VE. Amphicrine
l’appendice, le sein, les muqueuses nasale et laryngée, la
cells, dysplasias, and neoplasias. Cancer 1985;56:2683—90.
prostate, le pancréas, le poumon, le col utérin, la vésicule [4] Muller KM, Fisseler-Eckhoff A. What’s new in lung tumor hete-
biliaire, l’estomac, l’œsophage et la thyroïde [3]. rogeneity? Pathol Res Pract 1988;184:108—15.
L’histopathogénie des tumeurs amphicrines reste encore [5] Bjerknes M, Cheng H. The stem-cell zone of the small intesti-
mal connue : au début de la carcinogenèse bronchique, nal epithelium. III. Evidence from columnar, enteroendocrine,
les cellules tumorales amphicrines sont observées dans and mucous cells in the adult mouse. Am J Anat 1981;160:
l’hyperplasie des cellules caliciformes et basales. Ainsi, elles 77—91.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 333-335

Une tumeur rare de la côte Cas


pour diagnostic
A rare tumor of the rib

Aïda Ayadi-Kaddour(1), Olfa Ismail(1), Leïla Abid(1), Adel Marghli(2), Habiba Djilani(2), Faouzi El Mezni(1)
(1) Service d’Anatomie Pathologique, Hôpital A. Mami de L’Ariana, Tunisie.
(2) Service de Chirurgie Thoracique, Hôpital A. Mami de L’Ariana, Tunisie.

Ayadi-Kaddour A, Ismail O, Abid L, Marghli A, Djilani H, El Mezni F. Une tumeur rare de la côte. Ann
Pathol 2007 ; 27 : 333-335.

Observation

Une femme âgée de 29 ans, asthmati-


que, consultait pour douleur basitho-
racique gauche suivie de l’apparition
d’une tuméfaction sous-axillaire. L’exa-
men clinique trouvait une masse sous-
axillaire gauche de 15 cm de grand axe,
bien limitée, fixe par rapport aux plans
profonds et douloureuse à la palpa-
tion. Le grill costal visualisait une perte
de substance de l’arc postérieur de la FIG. 1. — Ilôts cartilagineux entourés d’une prolifération
8e côte gauche et des arcs moyens des tumorale dense avec une vascularisation de type hémangio-
6e et 7e côtes gauches. Le scanner péricytaire.
objectivait un processus expansif des FIG. 1. — Islands of cartilaginous tissue surrounded by
tissus mous de la région sous axillaire highly cellular proliferation with hemangiopericytoma-like
vasculature (HE×100).
gauche. L’examen per-opératoire met-
tait en évidence une tumeur solide
allant du rachis jusqu’à l’angle antérieur
des côtes, motivant une pariétectomie
emportant les 7e, 8e et 9e côtes (arcs
postéro-latéraux). La tumeur, de couleur
blanc-grisâtre, renfermait des foyers
hémorragiques et de nombreux îlots cal-
cifiés. Il s’agissait d’une prolifération
tumorale dense et diffuse, faite de
nappes de petites cellules rondes
indifférenciées à noyau ovoïde hyper-
chromatique et à cytoplasme baso-
phile, avec une riche vascularisation de
type hémangiopéricytaire (figure 1). Les FIG. 2. — Prolifération tumorale indifférenciée à petites
mitoses étaient estimées à environ 4 par cellules rondes associée à des foyers cartilagineux bien
10 grands champs. Il existait des foyers différenciés.
chondroïdes bien différenciés faits de FIG. 2. — Undifferentiated small and round cells inter-
chondrocytes à noyaux volumineux et mingled with islands of well-differentiated cartilage
(HE×200). Accepté pour publication
irréguliers (figure 2). L’étude immuno-
le 20 mars 2007
histochimique a révélé une expression
du CD99 par le contingent indifféren- chimiothérapie adjuvante, mais elle a Tirés à part :
cié et de la PS100 par les foyers cartila- été perdue de vue après un recul de A. Ayadi-Kaddour,
gineux. Les limites de résection 4 mois. 17 Rue Ali Ben Khélifa —
chirurgicale étaient saines. Les suites El Menzah 9A, 1013 Tunis,
opératoires étaient simples avec une Tunisie.
radiographie du thorax de contrôle Quel est votre diagnostic ? e-mail :
satisfaisante. La patiente a débuté une kaddour1fr@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 333


Aïda Ayadi-Kaddour et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 333-335

Diagnostic : du contingent cartilagineux et focale peu


Chondrosarcome détectable au niveau du contingent indiffé-
rencié qui exprime le CD99 [5]. Le CSM est
mésenchymateux costal en revanche stritement négatif aux anti-
corps anti-actine muscle lisse, cytokératine,
EMA et desmine [5]. Des anomalies chro-
Décrit initialement en 1959 par Lichtenstein mosomiques notamment une translocation
et Bernstein, le chondrosarcome mésenchy- intéressant les chromosomes 13 et 21 sont
mateux (CSM) est une tumeur maligne car- décrites dans les CSM. Le principal diagnos-
tilagineuse rare, variante particulière des
tic différentiel du CSM, lorsque les deux
chondrosarcomes, n’en représentant que 2
composantes sont bien échantillonnées, est
à 8 % de l’ensemble et intéressant aussi bien
le chondrosarcome dédifférencié mais la
les os que les tissus mous [1]. En effet, sur
400 cas de chondrosarcomes osseux et extra- séparation entre les deux contingents de ce
osseux, Huvos et al n’ont colligé que 35 cas dernier est nette et le contingent indifféren-
de CSM dont 30 étaient osseux et seulement cié variable n’est pas fait de petites cellules
2 de siège costal (6 %) [2]. La forme osseuse rondes. Le diagnostic du CSM est ainsi aisé
semble avoir une prédilection pour les os sauf sur un prélèvement biopsique réduit
du crâne et de la face. La localisation costale où l’une des deux composantes peut faire
est peu commune et sa fréquence est varia- défaut. Si seule la composante cartilagineuse
ble selon les séries. est prélevée, le problème d’un chondro-
Dans une série de 111 cas de CSM rapportée sarcome conventionnel peut se poser. Un
par Nakashima et al, 72 étaient d’origine échantillonnage biopsique limité à la compo-
osseuse et 13 d’entre eux étaient de locali- sante tumorale indifférenciée conduit à dis-
sation costale (18 %) [3]. Chong et al et Dahlin cuter les autres entités tumorales à cellules
et al rapportent respectivement 22 % et rondes, en particulier dans le cadre d’une
27 % de CSM costaux dans leur série de 45 tumeur osseuse primitive, un sarcome
et 33 CSM osseux [1]. Le CSM survient chez d’Ewing [2, 3, 5]. Peuvent aussi être discutés
l’adulte jeune entre 15 et 35 ans et une un ostéosarcome à petites cellules, un lym-
légère prédominance féminine est rappor- phome et dans le cas d’une tumeur volumi-
tée [4]. Ceci le distingue du chondrosarcome neuse dont le point de départ osseux ou
conventionnel qui touche surtout l’homme dans les parties molles est difficile à établir,
de 50 ans. Les signes cliniques dépendent un synovialosarcome peu différencié ou
du siège de la tumeur, toutefois la douleur un rhabdomyosarcome. Le diagnostic
et la présence d’une tuméfaction sont les d’hémangiopéricytome malin peut être évo-
symptômes les plus rapportés [2]. La radio- qué mais reste un diagnostic d’élimination.
logie montre habituellement une lésion Le traitement est basé sur la résection chi-
lytique mal limitée qui peut contenir des rurgicale qui doit être aussi large que possi-
calcifications et plus rarement des foyers ble [2, 3]. Elle conditionne le pronostic qui
d’ossification [2, 3]. Elle permet d’évoquer reste cependant mauvais marqué par un
une tumeur de nature maligne mais ne peut taux élevé de récidives locales et de métas-
permettre la distinction entre le CSM, les tases, principalement pulmonaires puis gan-
autres tumeurs cartilagineuses et l’ostéosar- glionnaires [1-4]. Une radiothérapie ou une
come. Macroscopiquement, le CSM se pré-
chimiothérapie peuvent être associées bien
sente comme une néoformation nodulaire,
que leur efficacité ne soit pas démontrée. Le
parfois lobulée, circonscrite et de taille varia-
taux de survie est de 42 à 54 % à 5 ans et de
ble. Sur la tranche de section, le tissu tumo-
ral d’aspect marbré gris-rosâtre est parsemé 28 % à 10 ans [1]. ■
de foyers cartilagineux et osseux d’abon-
dance variable [1]. Le diagnostic est histopa- Key words: Mesenchymal chondrosarcoma, bone neoplasms,
thologique basé sur l’aspect stéréotypé et bi rib.
phasique de cette tumeur qui est de haut Mots-clés : Chondrosarcome mésenchymateux, tumeur osseuse,
grade de malignité. Elle associe un contin- côte.

gent indifférencié fait de petites cellules


mésenchymateuses immatures et un contin-
gent cartilagineux mature ou de bas grade
de malignité parfois calcifié ou ossifié. Les cel- Références
lules mésenchymateuses sont agencées en
plages cellulaires ou autour des vaisseaux réa-
lisant un aspect pseudo-hémangiopéricytaire [1] Aok T, Watanabe M, Takagi K, Tanaka S, Aida S.
[4, 5]. L’étude immunohistochimique mon- Mesenchymal chondrosarcoma of the rib: Report of
tre une positivité à la PS100, diffuse au niveau a case. Jpn J Surg 1996 ; 26 : 1020-3.

334
Une tumeur rare de la côte

[2] Huvos AG, Rosen G, Dabska M, Marcove RC. [4] Dorfman HD, Czerniak B. Malignant cartilage tumors.
Mesenchymal chondrosarcoma: a clinicopathologic In: Dorfman HD, Czerniak B (eds). Bone Tumors. St
analysis of 35 patients with emphasis on treatment. Louis, Mosby, 1998, Inc, 353-440.
Cancer 1983 ; 51 : 1230-7. [5] Dobin SM, Donner LR, Speights VO. Mesenchymal
[3] Nakashima Y, Unni KK, Shives TC, Swee RG, Dahlin chondrosarcoma: a cytogenetic, immunohistochemi-
DC. Mesenchymal chondrosarcoma of bone and soft tis- cal and ultrastructural study. Cancer Genet Cytogenet
sue: a review of 111 cases. Cancer 1986 ; 57 : 2444-53. 1995 ; 83 : 56-62.

335
Ann Pathol 2007 ; 27 : 157-8

Une tumeur rare des tissus mous du pied Cas


pour diagnostic

A rare tumor of soft tissues of the foot

Karima Abbes, Ibticem Bahri Zouari, Salwa Makni, Imen Chtourou, Abdelmajid Khabir,
Nawrez Gouiaa, Lobna Ayadi, Hela Mnif, Tahya Sellami-Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib Bourguiba, 3029 Sfax, Tunisie.

Abbes K, Bahri Zouari I, Makni S, Chtourou I, Khabir A, Gouiaa N et al. Une tumeur rare des tissus mous
du pied. Ann Pathol 2007 ; 27 : 157-8.

Observation neuron specific enolase (NSE), CD34,


actine muscle lisse (AML) et desmine.

Une femme âgée de 32 ans, présentait


une masse cutanée de 7 cm de grand
axe au niveau de la face interne de
l’arrière pied droit, évoluant depuis
3 ans ; cette masse était indolore mais
gênante à la marche. L’examen radiolo-
gique était sans anomalie, en particulier
il n’y avait pas d’atteinte osseuse. Une
exérèse chirurgicale était réalisée, elle
était incomplète en raison d’une exten-
sion tumorale dans les plans profonds.
Macroscopiquement, la tumeur était
adressée fragmentée ; à la coupe, elle
était nodulaire, de consistance ferme
et de couleur blanchâtre d’aspect par- FIG. 1. — Prolifération de cellules fusiformes régulières sur
fois myxoïde. À l’étude histologique, un fond myxoïde ou collagène (HE × 100).
elle était formée par une prolifération FIG. 1. — Proliferation of spindle cells in a myxoïd or col-
lagenous background (HE×100).
fusocellulaire d’architecture nodulaire ;
au niveau des nodules, la prolifération
tumorale était tantôt de faible densité
cellulaire d’aspect myxoïde avec des
cellules prenant parfois un aspect
étoilé, tantôt de densité cellulaire éle-
vée avec des cellules disposées en fais-
ceaux courts entrecroisés délimitant par
place des bandes de collagène ; les
noyaux étaient peu atypiques et les
mitoses étaient exceptionnelles ; la
tumeur était riche en vaisseaux san-
guins d’aspect branchu ou en arcades à
paroi légèrement épaissie hyalinisée
(figures 1 et 2) ; elle infiltrait massive-
Accepté pour publication
ment les aponévroses et le muscle le 29 mai 2006
FIG. 2. — Présence de vaisseaux sanguins curvilignes en
squelettique avoisinant ; il n’y avait pas arcades (HE × 100).
de nécrose ni d’hémorragie. À L’étude Tirés à part :
FIG. 2. — Presence of arcades of curvilinear blood vessels
immunohistochimique, les cellules (HE×100). I. Bahri Zouari,
tumorales étaient positives de façon voir adresse
diffuse uniquement pour l’anticorps en début d’article.
anti-vimentine et négatives pour les Quel est votre diagnostic ? e-mail :
anticorps anti-protéine S100 (PS100), ibticem_bahri@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 157


Karima Abbes et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 157-8

Diagnostic : et les variantes myxoïdes de la tumeur maligne


Sarcome fibromyxoïde des gaines nerveuses périphériques et du der-
matofibrosarcome protubérant peuvent éga-
de bas grade du pied droit lement poser un problème de diagnostic
différentiel [6]. Sur le plan évolutif, dans la
série rapportée par Evans en 1993 [4], les
Le sarcome fibromyxoïde de bas grade SFMBG étaient caractérisés par des taux éle-
(SFMBG) est une entité anatomoclinique vés de récidives locales et de dissémination
rare, décrite par Evans en 1987 [1]. Il survient métastatique, évalués respectivement à 75 %
essentiellement chez des adultes jeunes de et à 58 % malgré l’aspect histologique ano-
sexe masculin avec un âge moyen de 31 à din de la lésion. Récemment dans une étude
45 ans [2, 3]. Il s’agit d’une tumeur des tissus prospective portant sur 73 cas, Folpe et al.
mous profonds dans environ 91 % des cas [7] ont rapporté des taux de récidive et de
[3], il siège essentiellement aux membres et métastase beaucoup plus faibles limités à
au tronc, et moins fréquemment dans la 9 % et à 6 % ; ceci grâce au traitement de ces
région inguinale, le périné, le creux axillaire, tumeurs par une exérèse large et complète
le mésentère ou le cou [3, 4]. Cliniquement, suivie ou non d’une radiothérapie ou chi-
il se présente sous forme d’une masse indo- miothérapie alors qu’auparavant cette tumeur
lore, d’évolution lente (jusqu’à 5 ans dans maligne était le plus souvent faussement
environ 15 % des cas) [5] ; dans notre obser- diagnostiquée comme une tumeur bénigne
vation, la tumeur évoluait depuis 3 ans. et traitée comme telle. ■
Macroscopiquement, la tumeur est assez
bien limitée, ferme avec des zones myxoï- Key words: Myxoid fibrosarcoma, soft tissue tumors, sarcomas.
des ; sa taille moyenne est de 9,5 cm [4] (dans
Mots-clés : Fibrosarcome myxoïde, tumeurs des tissus mous, sar-
notre observation elle était de 7 cm). Histo- comes.
logiquement, le SFMBG est caractérisé par
une alternance de zones myxoïdes et de
zones fibreuses ; les cellules tumorales sont
fusiformes d’allure fibroblastique à noyau Références
régulier, hyperchromatique et à cytoplasme
mal défini ; elles se disposent en faisceaux
courts d’aspect fasciculé ou peuvent réaliser [1] Evans HL. Low grade fibromyxoid sarcoma. A report
des images d’enroulement assez caractéris- of two metastasizing neoplasms having a deceptively
tique [3-6] ; les mitoses sont exceptionnelles benign appearance. Am J Clin Pathol 1987 ; 88 : 615-19.
[4, 5] ; dans les zones myxoïdes, les capillai-
[2] Oda Y, Takahira T, Kawaguchi K, Yamamoto H,
res sanguins prennent volontiers une dispo-
Tamiya S, Matsuda S et al. Low-grade fibromyxoid
sition curviligne [4-6]. Dans de rares cas, des
sarcoma versus low-grade myxofibrosarcoma in the
atypies nucléaires peuvent se voir [4, 7]. Il
extremities and trunk. A comparison of clinicopatho-
existe une variante particulière du SFMBG :
logical and immunohistochemical features. Histopa-
la tumeur à cellules fusiformes hyalinisante
thology 2004 ; 45 : 29-38.
avec rosettes géantes, caractérisée par la pré-
sence de volumineuses rosettes à centre [3] Goodlad JR, Mentzel T, Fletcher CD. Low grade
fibromyxoid sarcoma: clinicopathological analysis of
hyalin bordées par des cellules vaguement
eleven new cases in support of a distinct entity. His-
épithélioïdes réparties dans un fond rappe-
topathology 1995 ; 26 : 229-37.
lant le SFMBG [5, 6]. L’étude immunohisto-
chimique révèle une positivité constante [4] Evans HL. Low-grade fibromyxoid sarcoma. A report
pour la vimentine ; dans certains cas, l’AML, of 12 cases. Am J Surg Pathol 1993 ; 17 : 595-600.
la desmine et la cytokératine peuvent être [5] Folpe A, van den Berg E, Molenaar WM. Low grade
exprimés de façon focale [3]. Le diagnostic fibromyxoid sarcoma. In: Fletcher C, Krishan Unni K,
différentiel peut se poser avec des tumeurs Mertens F. World Health Organization Classification
bénignes en particulier la tumeur desmoïde, of Tumours. Pathology and Genetics of Tumours of
le neurofibrome myxoïde, le périneuriome Soft Tissues and Bone. Lyon: IARCPress, 2002.
et la fasciite nodulaire [6] ; certains sarcomes [6] Genevay M, Coindre JM, Guillou L. Entités récentes
peuvent également simuler un SFMBG en en pathologie tumorale des tissus mous. Ann Pathol
particulier le fibromyxosarcome de bas 2003 ; 23 : 135-48.
grade touchant le sujet âgé et dont la locali- [7] Folpe AL, Lane KL, Paull G, Weiss SW. Low-grade
sation est souvent superficielle, avec pré- fibromyxoid sarcoma and hyalinizing spindle cell
sence à l’examen histologique de vaisseaux tumor with giant rosettes: a clinicopathologic study
curvilignes proéminents, de pseudolipo- of 73 cases supporting their identity and assessing the
blastes et d’une matrice myxoïde plus abon- impact of high-grade areas. Am J Surg Pathol 2000 ;
dante [2]. Le liposarcome à cellules fusiformes 24 : 1353-60.

158
Annales de pathologie (2008) 28, 246—248

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur rare du cœur


A rare tumor of the heart

Imen Chtourou, Ibticem Bahri Zouari ∗, Lobna Ayadi,


Rim Kallel, Naourez Gouiaa, Karima Abbès,
Tahya Sellami Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib-Bourguiba,


route El Ain, 3029 Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 21 novembre 2007


Disponible sur Internet le 22 juillet 2008

Observation
Une patiente, âgée de 31 ans, aux antécédents de pneumonie il y a 15 ans et d’anémie
depuis une année était hospitalisée pour exploration d’une fièvre à 40 ◦ C avec frissons et
douleurs thoraciques. L’examen clinique était sans particularité. Les sérologies virales
et le bilan immunologique étaient normaux. Les explorations radiologiques (échogra-
phie, scanner thoraco-abdominal et imagerie par résonance magnétique) révélaient la
présence d’une masse cardiaque au niveau du ventricule droit appendue à l’apex qui mesu-
rait 24 mm × 13 mm évoquant un thrombus ou éventuellement une tumeur. La patiente
a été mise sous un traitement anticoagulant pendant trois semaines, mais l’évolution
était marquée par la persistance de la masse cardiaque. L’exploration chirurgicale révé-
lait la présence, au niveau du ventricule droit, d’une tumeur gélatineuse de 3 cm × 2 cm
s’étendant aux cordages et arrivant jusqu’au muscle ventriculaire. Une résection chirur-
gicale complète a été réalisée emportant les cordages et le pilier de la valve tricuspide.
À l’examen macroscopique, la tumeur était de consistance peu ferme et de couleur blanc
jaunâtre. À l’examen histologique, elle était formée de cellules fusiformes à cytoplasme
éosinophile et à noyau allongé parfois nucléolé ; ces cellules étaient mêlées à plusieurs
cellules inflammatoires incluant surtout des histiocytes spumeux associés à des lympho-
cytes, des plasmocytes et quelques polynucléaires éosinophiles (Fig. 1). Il existait aussi
plusieurs vaisseaux sanguins à paroi peu épaisse et à endothélium régulier ainsi que des
foyers de remaniement hémorragique. Il n’y avait pas d’infiltration du myocarde. Une
étude immunohistochimique était réalisée avec les anticorps anti-actine musculaire lisse
(AML), anaplastic large cell lymphoma kinase protein (ALK1), vimentine, protéine S100
(PS100), CD68, CD34 et CD1a. Les cellules fusiformes étaient positives pour AML et vimen-
tine et négatives pour les autres anticorps (Fig. 2). Les histiocytes exprimaient le CD68 ;
ils étaient négatifs pour la protéine S100 et CD1a.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : ibticem bahri@yahoo.fr (I.B. Zouari).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2008.06.008
Une tumeur rare du cœur 247

Figure 1. Cellules fusiformes à cytoplasme éosinophile et à Figure 2. Immunomarquage positif pour AML (× 200).
noyau allongé parfois nucléolé mêlées à des cellules inflammatoires Diffuse expression of smooth muscle actin by tumor cells (× 200).
(HE × 200).
Spindle shaped cells with eosinophilic cytoplasm and elongated
bland nuclei accompanied by a variable number of inflammatory
cells (HE × 200).

Quel est votre diagnostic ?


248 I. Chtourou et al.

Diagnostic : pseudotumeur inflammatoire prouvée par l’expression de CD34 alors que l’AML est rare-
ment exprimée [3]. Plus rarement, le diagnostic différentiel
du coeur ou tumeur myofibroblastique
peut se poser avec un fibrome cardiaque qui est de locali-
inflammatoire sation myocardique et non endocavitaire. Il est formé par
une prolifération en faisceaux enchevêtrés faite de cellules
La pseudotumeur inflammatoire (PTI) ou encore tumeur fusiformes à noyau ovale sans nucléole visible au sein d’un
myofibroblastique inflammatoire est une lésion souvent stroma collagène abundant ; ces cellules sont de taille plus
bénigne décrite pour la première fois en 1939, au niveau petite que les cellules fusiformes de la PTI qui sont souvent
du poumon qui en constitue la localisation la plus fréquente à noyau nucléolé. Comme pour la PTI, les cellules expriment
[1]. La localisation cardiaque est extrêmement rare. À notre l’AML et la vimentine et sont négatives pour la desmine, le
connaissance, seulement 14 cas sporadiques ont été rappor- CD34 et PS100. Des myocytes incorporés dans le fibrome sont
tés au niveau du cœur. Selon notre revue de la littérature, marqués par PS100 et la desmine ; ce fait ne s’observe pas
les deux sexes sont touchés à égalité. L’âge des patients dans la PTI [3]. Le traitement est essentiellement chirurgi-
varie de deux mois à 72 ans. Cette tumeur survient essen- cal consistant en une excision complète de la tumeur [2].
tiellement chez les enfants ; en effet, seulement quatre L’évolution est souvent bonne, une régression spontanée de
parmi les cas rapportés sont des adultes ; notre patiente est la tumeur a été notée dans un cas [4]. Seul un cas de réci-
âgée de 31 ans. La taille de la tumeur varie de 1,5 à 6,5 cm. dive a été rapporté [5]. L’évolution peut être fatale en cas de
La localisation au niveau du ventricule droit (comme chez localisation critique telle que la valve mitrale ou les artères
notre patiente) est décrite dans 35,7 % des cas. Les autres coronaires [6]. La pathogénie des PTI est encore obscure ;
localisations sont par ordre décroissant : l’oreillette droite, en effet, la plupart des auteurs considèrent cette lésion
le ventricule gauche, les artères coronaires, l’oreillette comme la conséquence d’une inflammation, une infection
gauche et l’artère pulmonaire. La présentation clinique est ou un traumatisme. Cependant, d’autres auteurs la consi-
variable ; il peut s’agir d’une fièvre, d’anémie, comme pour dèrent comme un fibrosarcome de bas grade qui est riche
notre patiente, de thrombose vasculaire, de vascularite ou en cellules inflammatoires ; cette idée est soutenue par la
de polyarthrite. Les explorations radiologiques (échographie possibilité d’un comportement local agressif de cette lésion,
cardiaque, imagerie par résonance magnétique) permettent sa multifocalité ainsi que la possibilité de métastase à
de préciser la localisation tumorale mais le diagnostic défi- distance [7].
nitif ne peut être qu’histologique [2]. Pour notre patiente,
les explorations radiologiques plaidaient en premier lieu en
faveur d’un thrombus intracardiaque. À l’examen histolo-
gique, la tumeur est formée de cellules fusiformes régulières Références
munies d’un nucléole proéminent. Ces cellules sont
associées en des proportions variables à des cellules inflam- [1] Brunn H. Two interesting benign lung tumors of contradictory
matoires à type de lymphocytes, d’histiocytes et de polynu- histopathology. Remarks on the necessity for maintaining chest
tumor registry. J Thorac Surg 1939;9:119—31.
cléaires éosinophiles [3]. La combinaison de ces différents
[2] Tian JT, Cheng LC, Yung TC. Multiple cardiac inflammatory myo-
types de cellules est à l’origine de la variabilité de l’aspect fibroblastic tumors in the right ventricle in an infant. Ann Thorac
morphologique d’un cas à l’autre. Dans notre observation, Surg 2006;82:1531—5.
les cellules inflammatoires, en particulier les histiocytes [3] Thomas de Montpréville V, Serraf A, Aznag H, Nashashibi
spumeux étaient prédominants. À l’étude immunohistochi- N, Planché C, Dulmet E. Fibroma and inflammatory myo-
mique, l’AML et la vimentine sont fortement exprimées par fibroblastic tumor of the heart. Ann Diagn Pathol 2001;5:
les cellules fusiformes confirmant leur nature fibroblastique 335—42.
et myofibroblastique [3]. Le diagnostic différentiel histolo- [4] Pearson PJ, Smithson WA, Driscoll DJ, Banks PM, Ehman RE.
gique se pose essentiellement avec un myxome cardiaque en Inoperable plasma cell granuloma of the heart: spontaneous
particulier quand la PTI est gélatineuse, comme dans notre decrease in size during an 11-month period. Mayo Clin Proc
1988;63:1022—5.
observation. En effet, il s’agit aussi d’une tumeur endocavi-
[5] Hartyansky IL, Kadar K, Hubay M. Rapid recurrence of an inflam-
taire, souvent associée à un syndrome inflammatoire et qui matory myofibroblastic tumor in the right ventricular outflow
contient de façon non exceptionnelle des cellules inflam- tract. Cardiol Young 2000;10:271—4.
matoires. Cependant, les cellules dans le myxome forment [6] Rose AG, McCormick S, Cooper K, Titus JL. Inflammatory pseu-
souvent des manchons périvasculaires et la tumeur est dotumor (plasma cell granuloma) of the heart. Arch Pathol Lab
recouverte en surface par un revêtement endothélial qu’on Med 1996;120:549—54.
ne trouve pas dans la PTI. À l’étude immunohistochimique, [7] Narla LD, Newman B, Spottswood SS, Narla S, Kolli R. Inflamma-
ces cellules présentent une différenciation endothéliale tory pseudotumor. Radiographics 2003;23:719—29.
Annales de pathologie (2008) 28, 154—156

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur rénale


A renal tumor

Rym Dhouib Sellami ∗, Karima Mrad, Maha Driss,


Samia Hannachi Sassi, Imen Abbess,
Khaled Ben Romdhane

Service d’anatomie et de cytologie pathologiques, institut Salah-Azaïez,


Bab-Saadoun, 1006 Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 5 juillet 2007


Disponible sur Internet le 17 juillet 2008

Observation
Une femme âgée de 62 ans, sans antécédents particuliers, est adressée pour exploration
d’une tumeur rénale droite.
L’histoire de sa maladie remonte à dix mois, marquée par des douleurs du flanc gauche
accompagnées de brûlure mictionnelle et de pollakiurie.
L’examen clinique a trouvé un état général conservé sans douleurs à l’ébranlement
lombaire. Les aires ganglionnaires sont libres.
L’échographie et la tomodensitométrie abdominale ont montré une masse rénale
gauche, polaire, supérieure, solide, mesurant 65 × 36 mm déformant les contours du rein.
Une néphrectomie totale gauche a été réalisée. L’examen macroscopique a trouvé un
nodule bien limité polaire supérieur, de 65 × 60 mm. Ce nodule présente, à la coupe, un
aspect nodulaire, blanc grisâtre et ferme, sans remaniements nécrotiques, hémorragiques
ou kystiques.
L’examen histologique montre une prolifération tumorale densément cellulaire, faite
de petites cellules cubiques, à cytoplasme réduit, basophile, entourant un noyau arrondi
monomorphe, régulier, à chromatine fine. Ces cellules s’agencent en acini ou tubules, au
sein d’un stroma œdémateux acellulaire d’abondance variable (Fig. 1). La tumeur est bien
circonscrite en surface par une fine capsule fibreuse. L’étude immunohistochimique montre
une positivité focale des cellules tumorales pour la cytokératine (CK7) et une négativité
pour l’EMA.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : drrymsellami@yahoo.fr (R.D. Sellami).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.07.002
Une tumeur rénale 155

Figure 1. À gauche : petits tubules arrondis ou allongés séparés d’un fin stroma hyalin. Quelques projections papillaires sont notées
(HE × 200). À droite : prolifération monomorphe de petits tubules allongés et acini au sein d’un stroma œdémateux (HE × 400).
Left : small round, focally elongated tubules separated by scanty hyaline tissue. Papillary projections are noted (HE × 200). Right : uniform
proliferation of small elongated tubule and acini with oedematous stroma (HE × 400).

Quel est votre diagnostic ?


156 R.D. Sellami et al.

Diagnostic : adénome métanéphrique du entre TW et AM [9]. Les deux tumeurs montrent une posi-
tivité nucléaire diffuse avec le WT1. Contrairement à l’AM,
rein la TW n’exprime généralement pas CD57 ni la CK7 (excep-
L’adénome métanéphrique rénal (AM) est une tumeur rare. tion les tubules matures qui sont CD57+, CK7+ et CD56−)
Il a été rapporté sous le terme de néphrome néphrogène [9]. CD56 est positif dans la TW, alors qu’il est négatif
pour la première fois par Paget et Garnier en 1980 [1—3], dans l’AM. Les TW/RN montre une positivité diffuse avec le
faisant suite à la description en 1977, par Stambolis [4] de WT1 et une positivité focale avec la CK7 et CD57. CD56 est
néphroblastome épithélial bénin. Environ une centaine de généralement négatif dans les TW/RN, sauf s’il existe du
cas ont été rapportés dans la littérature, sous de multiples blastème résiduel qui est CD56+, CD57− et CK7−. Devant
dénominations incluant tumeur rénale métanéphroïde, adé- ce profil immunohistochimique, Muir et al. avaient suggéré
nome nephroblastoma-like ou néphrome néphrogène. Cette l’hypothèse d’une intime relation cytogénétique entre l’AM
tumeur survient à tout âge, le plus souvent entre la cin- et TW/RN [9]. La distinction entre l’AM et le CTP peut
quième et la sixième décennie avec nette prédominance être parfois difficile. La basophilie des cellules, la présence
féminine (sex-ratio : 2H/1F) [3—5]. Le tableau clinique d’ébauches gloméruloïdes et l’absence de macrophages spu-
consiste en une douleur du flanc ou de l’abdomen, une meux plaident en faveur de l’AM [5—7]. Alors que la forte
hématurie ou une polyglobulie, mais 50 % des cas ont été positivité à la CK/EMA et la négativité avec CD57 sont en
découverts de façon fortuite [5,6]. L’adénome métané- faveur du CTP [6—8]. Les études cytogénétiques ont une
phrique est une tumeur unilatérale, exceptionnellement valeur considérable pour délimiter ces deux lésions, puisque
multifocale [7]. Macroscopiquement, c’est une tumeur bien l’AM ne présente pas la trisomie 7 et 17 du CTP [5,7,9]. En
circonscrite et non encapsulée. La taille de la tumeur varie conclusion, l’adénome métanéphrique est une entité his-
entre 0,6 [6] et 150 mm [7] avec une moyenne de 55 mm tologique, dont le caractère manifestement bénin autorise
pour Davis et al. [7] et 47 mm pour Jones et al. [6]. La une approche thérapeutique conservatrice, sans traitement
tumeur est homogène à la coupe, de consistance ferme ou complémentaire à la chirurgie étant donné l’absence de
molle et de teinte beige rose à jaunâtre en règle sans rema- récidives et de métastases.
niements hémorragiques, kystiques et nécrotiques [1—6].
Histologiquement, l’AM est une tumeur densément cellu-
laire, faite de petites cellules à noyau hyperchromatique, Références
monomorphe, régulier, entouré d’un cytoplasme pâle ou
éosinophile. Le nucléole est petit et les mitoses sont rares [1] Pages A, Granier M. Le néphrome néphrogène. Arch Anat Cytol
ou absentes. Ces cellules s’organisent en petits acini, en Pathol 1980;28(2):99—103.
îlots ou en papilles [6,7]. Occasionnellement, des corps [2] Molinié V, Cochand-Priollet B, Staroz F, Vieillefond A, Les
psammomateux peuvent être rencontrés [5]. Le stroma est membres du GETUR. Classification des tumeurs primitives du
rein de l’adulte. Ann Pathol 1998;18:29—47.
généralement acellulaire, œdémateux ou hyalinisé [5—8].
[3] Martin L, Justrabo E, Michel F, Billerey C, Yaziji N. L’adénome
Les études immunohistochimiques montrent une forte posi- métanéphrique du rein. Ann Pathol 1998;18:120—4.
tivité nucléaire avec WT1, une positivité diffuse avec CD57 [4] Stambolis C. Benign epithelial nephroblastoma. A contribution
et une positivité focale avec CK7 [7]. L’AM peut poser des to its histogenesis. Virchows Arch (A) 1977;376:267—72.
problèmes de diagnostic différentiel avec la tumeur de [5] Grignon DJ, Eble JN, et al. Papillary and metanephric adenoma
Wilms (TW), mature avec ou sans restes néphrogéniques of the kidney. Semin Diag Pathol 1998;15:41—53.
(TW/RN) et le carcinome tubulopapillaire (CTP) du rein. [6] Jones EC, Pins M, Dckersin GR, Young RH. Metanephric adenoma
Les TW surviennent généralement à un âge précoce (entre of the kidney; A clinicopathological, immunohistochemical, flow
12 et 39 mois), mais des TW adultes ont été décrites dans cytometric, cytogenetic and electron microscopic; Study of
la littérature [9]. Les TW sont généralement plus volumi- seven cases. Am J Pathol 1995;6:615—26.
[7] Davis CJ, Barton JH, Sesterhenn IA, Mostofi FK. Metanephric
neuses, solides et largement nécrotiques. Contrairement à
adenoma; clinicopathological study of fifty patients. Am J Surg
la TW, l’AM présente un aspect monophasique, sans contin- Pathol 1995;19:1101—14.
gent blastémateux ni mésenchymateux. L’hyperchromasie [8] Renshaw AA, Freyer DR, Hammers YA. Metastatic metanephric
nucléaire, la petite taille des cellules et l’absence d’activité adenoma in child. Am J Surg Pathol 2000;24:570—4.
mitotique (moins de deux mitoses par dix champs au fort [9] Muir TE, Cheville JC, Lager DJ. Metanephric adenoma,
grossissement) plaident en faveur de l’AM. L’étude immuno- nephrogenic rests and Wilms tumor; A histologic and immuno-
histochimique permet, dans la plupart des cas, la distinction phenotypic comparison. Am J Pathol 2001;25:1290—6.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 377-379

Une tumeur rétropéritonéale Cas


pour diagnostic
A retroperitoneal tumor

Samia Chatti-Dey (1), Yossra Zidi (1), Mourad Ben Othman (2), Ehsen Ben Brahim (1), Essia Saiji (1),
Mongi Mighri (2)

(1) Service d’anatomie et de cytologie pathologiques,


(2) Service de chirurgie générale, Hôpital M.T. Mâamouri, Route de Mrezka, 8000 Nabeul (Tunisie).

Chatti-Dey S, Zidi Y, Ben Othman M, Ben Brahim E, Saiji E, Mighri M. Une tumeur rétropéritonéale. Ann
Pathol 2007 ; 27 : 377-379.

Observation riche en histiocytes spumeux, en lym-


phocytes et en plasmocytes (figure 2).
L’étude imunohistochimique a montré
Une femme, âgée de 23 ans, sans anté- que les cellules fusiformes étaient foca-
cédents pathologiques notables, pré- lement positives pour l’anticorps anti-
sentait depuis 5 mois une douleur à actine musculaire lisse alpha tandis
type de pesanteur du flanc gauche qu’elles étaient négatives pour les anticy-
associée à des brûlures mictionnelles. tokératines et type AE1/AE3, l’EMA, la
L’examen clinique a mis en évidence protéine S 100, la desmine et ALK1.
un état subfébrile avec une tempéra-
ture à 37,9°, une sensibilité de l’hypo-
chondre et du flanc gauches et une
douleur à l’ébranlement lombaire.
L’échographie abdomino-pelvienne
montrait la présence d’une collection
hypoéchogène mal limitée de l’hypo-
chondre gauche mesurant 47 × 16 mm.
L’examen tomodensitométrique notait
une masse abomino-pelvienne corres-
pondant à une formation parapyélique
arrondie de 50 mm de diamètre de den-
sité liquidienne, bien limitée, à paroi FIG. 1. — Prolifération de cellules fusiformes disposées en
épaisse. Devant ce tableau clinique, faisceaux intriqués.
l’indication opératoire a été posée. FIG. 1. — Proliferation of spindle shaped cells arranged in
Au cours de l’intervention, était décou- fascicular growth pattern.
verte une masse prenant en bloc la queue
du pancréas, le hile de la rate, la surrénale
gauche et la face antérieure du rein gau-
che. Elle était constituée par un mélange
de tissu tumoral, de nécrose et de pus.
Une résection en bloc de la rate, de la
queue du pancréas et de la surrénale
gauche a été réalisée.
L’étude macroscopique a montré une
formation blanchâtre, ferme, mal limi-
tée, mesurant 5,5 × 4,5 cm et infiltrant le
hile de la rate et la queue du pancréas.
L’examen histologique a mis en évi- FIG. 2. — Cette prolifération fusocellulaire d’aspect myo-
dence une prolifération cellulaire venant fibroblastique est associée à un infiltrat inflammatoire riche Accepté pour publication
au contact du parenchyme pancréatique en plasmocytes. le 18 mars 2007
et splénique. Elle était faite de cellules FIG. 2. — This myofibroblastic proliferation is associated
with a predominantly plasmacytic infiltrate. Tirés à part : Samia Chatti,
fusiformes de type myofibroblastique voir adresse
disposées en faisceaux plus ou moins en début d’article.
intriqués (figure 1) associées à un infiltrat Quel est votre diagnostic ? e-mail :
inflammatoire polymorphe abondant, samia_chatti@yahoo.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 377


Samia Chatti-Dey et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 377-379

Diagnostic : tumeur Des anomalies génétiques ont été mises en


myofibroblastique inflammatoire évidence au niveau de cette tumeur avec
formation d’une protéine chimérique résul-
rétropéritonéale (TMI) tant du remaniement non aléatoire du gène
ALK en 2 p 23 mais également de 2 gènes
partenaires de la famille des gènes de la tro-
Les TMI représentent un groupe de tumeurs pomyosine : TPM4 : situé en 19 p13,1 et TPM
mésenchymateuses solides survenant préfé- 3 : situé en 1 q 22-23 [5].
rentiellement dans les tissus mous et les Cette tumeur pose un problème de diagnos-
organes des adolescents et des adultes jeu- tic différentiel notamment avec l’histiocyto-
nes [1]. Elles se localisent essentiellement au fibrome malin qui se caractérise par des
niveau des poumons. Les tumeurs extrapul- cellules pléiomorphes bizarres associées à
monaires sont rares et surviennent dans 2/3 de nombreuses cellules xanthémateuses et
des cas au niveau de l’abdomen et du pelvis, inflammatoires ainsi qu’avec le léiomyo-
plus rarement au niveau de la région de la sarcome mais cette tumeur présente une
tête et cou, du thorax ou des extrémités [2, 3]. architecture fasciculée, des noyaux en bout
Ces tumeurs se manifestent cliniquement de cigare et un infiltrat inflammatoire peu
par une masse pulmonaire ou abdominale abondant. Il peut se poser également avec
accompagnée de signes cliniques et biologi- la maladie de Hodgkin, en cas de présence
ques. Dans 20 % des cas, cette masse est de cellules multinucléees à noyau proémi-
accompagnée d’une hyperthermie comme nent mais les cellules sont négatives pour
dans notre observation, d’un amaigrissement, les anticorps CD 15 et CD 30, avec la fibrose
de sueurs nocturnes, d’une anémie hypo- rétropéritonéale idiopathique mais celle-ci
chrome microcytaire, d’une thrombocytose, est mal limitée et s’associe fréquemment à
d’une hypergammaglobulinémie polyclo- une sclérose et à une phlébite, et enfin
nale et d’une accélération de la VS [2, 4]. avec d’autres processus fibroinflammatoi-
Macroscopiquement, cette tumeur mesure res comme la maladie d’Erdheim-Chester,
de 5 à 10 cm en moyenne et peut atteindre inflammation xanthogranulomateuse, ou la
15 à 20 cm pour les lésions intra-abdomina- pseudotumeur secondaire à une infection à
les (50 mm dans notre observation). Elle est mycobactérium [5].
unifocale, bien limitée, ferme, blanchâtre et Le traitement consiste en une résection chi-
comporte parfois des foyers de nécrose et rurgicale de la lésion et en une réexcision
d’hémorragie voire des calcifications. des lésions récurrentes.
Trois aspects histologiques, qui peuvent Les facteurs pronostiques sont représentés
coexister au sein de la même tumeur, ont par les atypies nucléaires, la présence de
été individualisés [2]. Le premier prend cellules ganglionnaires like, l’expression de
l’aspect d’une fasciite nodulaire avec présence la protéine P53 et la mise en évidence d’une
de cellules fusiformes mêlées à des cellules aneuploïdie.
inflammatoires polymorphes au sein d’un Le taux de récidive est de 23 à 37 %. 3 cas de
stroma myxoïde plus ou moins œdéma- métastases ou de localisations multiples ont
teux. Le deuxième est celui d’une proliféra- été répertoriés. ■
tion compacte faite de cellules fusiformes
associées à de nombreux plasmocytes. Le Key words: retroperitoneum, myofibroblastic inflammatory tumor.
troisième prend l’aspect d’une fibroma- Mots-clés : rétropéritoine, tumeur myofibroblastique inflamma-
tose profonde ou de tumeur desmoïde avec toire.
cependant une rareté des mitoses et des
cellules inflammatoires au sein d’un fond
collagène.
L’étude immunohistochimique montre une
Références
positivité marquée et diffuse des cellules
tumorales avec l’anticorps antivimentine, plus [1] Sirvent N, Hawkins A, Moeglin D, Coindre JM, Kur-
rarement avec l’anticorps antimuscle lisse. zenne JY, Michiels JF et al. ALK probe rearrangement
Une positivité focale pour les cytokératines in a t(2;11;2)(p23;p15;q31) translocation found in a pre-
se voit dans plus d’un tiers des cas ; l’anti- natal myofibroblastic fibrous lesion. Toward a molecu-
corps CD 68 est positif dans 25 % des cas. lar definition of an inflammatory myofibroblastic tumor
L’anti ALK1(anaplastic lymphoma kinase) est family. Genes Chromosomes Cancer 2001 ; 31 : 85-90.
positif dans 60 % des observations. [2] Coffin CM, Watterson J, Priest JR, Dehner LP.
La microscopie électronique montre une Extrapulmonary inflammatory myofibroblastic tumor
différenciation myofibroblastique avec des (inflammatory pseudo-tumor): a clinicopathologic and
filaments intracytoplasmiques épais et des immunohistochemical study of 84 cases. Am J Surg
corps denses. Pathol 1995 ; 19 : 859-72.

378
Tumeur myofibroblastique inflammatoire

[3] Sastre-Garau X, Couturier J, Derré J, Aurias A, [5] Pettinato G, Manivel JC, DeRosa N, Dehner
Klijanienko J, Lagacé R. Inflammatory myofibro- L. Inflammatory myofibroblastic tumor (plasma cell
blastic tumour (inflammatory pseudotumour) of granuloma). Clinicopathologic study of 20 cases with
the breast. Clinicopathological and genetic analysis immunohistochemical and ultrastructural observa-
of a case with evidence for clonality. J Pathol tions. Am J Clin Pathol 1990 ; 94 : 538-46.
2002 ; 196 : 97-102. [6] Coffin CM, Dehner LP. Fibroblastic-myofibroblastic
[4] Sirvent N, Coindre JM, Pedeutour F. Tumeurs myo- tumors in children and adolescents: a clinicopatholo-
fibroblastiques inflammatoires. Ann Pathol 2002 ; 22 : gic study of 108 examples in 103 patients. Pediatr
453-60. Pathol 1991 ; 11 : 559-88.

379
Annales de pathologie (2008) 28, 334—336

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur sous-cutanée pigmentée du dos


Pigmented subcutaneous tumor on the back

Slim Charfi, Lobna Ayadi ∗, Salwa Makni,


Abdelmajid Khabir, Rim Kallel, Karima Abbes,
Salma Chaabouni, Tahya Sellami Boudawara

Laboratoire d’anatomie et de cytologie pathologiques, CHU Habib-Bourguiba,


route El-Ain km 0.5, 3029 Sfax, Tunisie

Accepté pour publication le 15 décembre 2007


Disponible sur Internet le 23 août 2008

Observation
Une fillette de 14 ans se présentait à la consultation de dermatologie pour une lésion cuta-
née nodulaire du dos, non douloureuse, d’évolution lentement progressive depuis plusieurs
années. À l’examen clinique, il s’agissait d’un nodule sous-cutané du bas du dos mesu-
rant 3,5 cm × 2,5 cm, mobile par rapport au plan cutané et apparemment fixe par rapport
aux plans profonds ; une biopsie a été réalisée. Macroscopiquement, le prélèvement était
formé de tissu adipeux comportant à la coupe des secteurs pigmentés, noirâtres ; il n’y
avait pas de capsule périphérique. À l’examen histologique (Fig. 1), après coloration par
l’hématéine—éosine, on observait des lobules de tissu adipeux mature et bien différen-
cié ; ces lobules étaient séparés par des faisceaux épais de cellules fusiformes de densité
modérée présentant un noyau régulier sans atypie ; quelques cellules étaient chargées
de pigment dont la nature mélanique était confirmée par la coloration de Fontana ; ces
cellules rappelaient les cellules pigmentées observées dans le dermatofibrosarcome protu-
berans (ou tumeur de Bednar). À l’examen immunohistochimique, les cellules fusiformes
étaient positives pour la vimentine et l’actine musculaire lisse (AML) (Fig. 2) ; les cellules
pigmentées étaient positives pour la protéine S100 (PS100) et les antigènes melanA et
HMB45.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : ayadilobna@yahoo.fr (L. Ayadi).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.12.001
Une tumeur sous-cutanée pigmentée du dos 335

Figure 1. a : tissu adipeux abondant associé à des cellules fusiformes qui infiltrent les septa (HE × 100) ; b : faisceaux de cellules fusiformes
traversant le tissu adipeux mature. Notez la présence de cellules pigmentées (HE × 400).
a: abundant adipose tissue with spindle cells infiltrating septa (HE × 100); b: fascicles of spindle cells traversing mature adipose tissue.
Note the pigmented cells (HE × 400).

Figure 2. Immunomarquage positif pour l’actine musculaire lisse


(AML × 200).
Positive immunostaining for smooth muscle actin (SMA × 200). Quel est votre diagnostic ?
336 S. Charfi et al.

Diagnostic : lipofibromatose présentent une cellularité faible au niveau des septa et sont
donc faciles à distinguer des LF [1]. L’examen immunohisto-
La lipofibromatose (LF) est une lésion bénigne rare récem- chimique n’est pas indispensable au diagnostic des LF; les
ment décrite par Fetsch et al. en 2000 [1] et reconnue cellules fusiformes sont souvent focalement positives pour
par l’OMS en 2002 comme une tumeur fibroadipeuse de l’AML, la PS100, le CD34, l’EMA et bcl2, et sont négatives
l’enfant [2]. Cette tumeur a été anciennement classée pour la desmine et les cytokératines [2]. L’exérèse chirur-
comme une variante de fibromatose juvénile ou infantile gicale représente le traitement de choix pour prévenir les
ou d’hamartome fibreux de l’enfant. Elle survient surtout récidives locales. L’étiopathogénie de cette lésion est incer-
dans la première enfance avec une prédilection masculine taine ; plusieurs théories ont été proposées, incluant une
[1]. Elle se localise préférentiellement au niveau des mains dysrégulation de la différenciation des cellules embryon-
et des pieds, plus rarement au niveau de la paroi thora- naires ou fœtales ou peut-être un désordre du système
cique ou abdominale [1] ou au niveau du cou [3]. À notre paracrine [4]. Concernant les cellules pigmentées, il est
connaissance, il s’agit de la première localisation rappor- proposé que ces cellules soient des bystander cells incor-
tée au niveau du dos. La lésion est mal limitée, indolente, porées passivement dans la masse tumorale à cause d’une
d’évolution lentement progressive [1]. À l’examen macro- perturbation de leur trajet de migration par le processus
scopique, il s’agit d’une tumeur jaunâtre ou blanchâtre lipofibromateux [5].
avec une composante adipeuse prédominante ; sa taille varie
habituellement de 1 à 3 cm et dépasse rarement 5 cm [1].
À l’histologie, la composante adipeuse représente plus de Références
70 % de l’ensemble de la tumeur ; des faisceaux de cellules
fibroblastiques régulières traversent les lobules adipeux. La [1] Fetsch JF, Miettinen M, Laskin WB, Michal M, Enzinger FM. A
plupart de ces lésions sont mal limitées avec infiltration clinicopathologic study of 45 pediatric soft tissue tumors with
des tissus avoisinants. L’activité mitotique est habituelle- an admixture of adipose tissue and fibroblastic elements, and a
ment faible. Cet aspect morphologique ressemble à celui de proposal for classification as lipofibromatosis. Am J Surg Pathol
l’hamartome fibreux de l’enfant, mais dans la LF, il n’y pas 2000;24:1491—500.
de cellules ovales primitives dans une matrice myxoïde [2]. [2] Fletcher CDM, Unni KK, Mertens F. WHO classification of tumors.
La LF diffère des autres formes de fibromatoses juvéniles Tumors of soft tissue and bone. Lyon: IARC Press; 2002.
[3] Herrmann BW, Dehner LP, Forsen JW. Lipofibromatosis presen-
par la préservation de l’architecture du tissu adipeux et par
ting as a pediatric neck mass. Int J Pediatr Otorhinolaryngol
l’absence de prolifération fibroblastique solide [2]. Le diag- 2004;68:1545—9.
nostic différentiel peut se poser également avec le fibrome [4] Kousseff BG. The phakomatoses as paracrine growth disorders
calcifiant aponévrotique surtout au stade de début ; ce der- (paracrinopathies). Clin Genet 1990;37:97—105.
nier présente cependant de petits fibroblastes épithélioïdes [5] Fetsch JF, Michal M, Miettinen M. Pigmented (melanotic) neuro-
et ne comporte pas de composante adipeuse bien circons- fibroma: a clinicopathologic and immunohistochemical analysis
crite [1]. La plupart des lipoblastomes et lipoblastomatoses of 19 lesions from 17 patients. Am J Surg Pathol 2000;24:331—43.
Annales de pathologie (2008) 28, 522—524

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur suspecte des extrémités


A suspect acral tumor

Gaëlle Le Boulanger a, Isabelle Valo a,∗,


Eric Lavoine a,b, Bruno Béné c,
Gérard Bertrand b, Véronique Verrièle a

a
Centre Paul-Papin, 2, rue Moll, Angers, France
b
Centre d’anatomie et de cytologie pathologiques, 2, rue de l’Appentis, Angers, France
c
Clinique de Bagneux, Saumur, France

Accepté pour publication le 28 décembre 2007


Disponible sur Internet le 18 novembre 2008

Observation
Une patiente âgée de 49 ans, sans antécédent, a consulté en septembre 2005 pour une
tuméfaction du gros orteil évoluant depuis 20 ans. L’examen clinique mettait en évidence
une formation tumorale de l’extrémité du gros orteil, bourgeonnante, ulcérée et indurée.
Une exérèse chirurgicale a été pratiquée. L’examen macroscopique montrait une lésion
nodulaire, polypoïde et ulcérée, mesurant 2,5 × 1,2 cm de diamètre et reposant sur une
base cutanée de 2,6 × 1,7 cm.
À l’examen histologique, la tumeur formait, au faible grossissement, un nodule rela-
tivement bien limité, non encapsulé, localisé dans le derme et épargnant l’hypoderme.
Le sommet de la lésion était occupé par une ulcération avec un enduit fibrinoleucocytaire
(Fig. 1a et 1b). Au fort grossissement, la tumeur était constituée d’une prolifération de
cellules fusiformes ou stellaires, organisées en plages ou en courts faisceaux, sur un fond
fibromyxoïde finement vascularisé, sans zone de nécrose. Les noyaux oblongs étaient de
contours réguliers, peu anisocaryotiques, à chromatine fine, sans mitoses identifiables. Les
cellules fusiformes étaient intriquées à un infiltrat inflammatoire polymorphe (Fig. 2). Une
étude immunohistochimique a été réalisée. Les cellules exprimaient diffusément le CD34
et très focalement le CD99. Elles étaient négatives pour l’EMA, la protéine S100, l’HMB45,
l’actine musculaire lisse et la desmine.

∗ Auteur correspondant. Laboratoire d’anatomiepathologique, centre Paul-Papin, 2, rue Moll, 49033 Angers cedex 01, France.
Adresse e-mail : i.valo@unimedia.fr (I. Valo).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.12.004
Une tumeur suspecte des extrémités 523

Figure 1a et 1b. Tumeur nodulaire ulcérée constituée d’une prolifération de cellules fusiformes de siège dermique (HES × 25).
Ulcerated nodular tumor composed of spindle cells involving the dermis (HES × 25).

Figure 2. Prolifération de cellules fusiformes associées à un


infiltrat inflammatoire polymorphe dans un stroma fibromyxoïde.
(HES × 200).
Spindle cells proliferation with inflammatory polymorphous infil-
trate in a fibro-myxoïd stroma. (HES × 200). Quel est votre diagnostic ?
524 G. Le Boulanger et al.

Diagnostic : fibromyxome acral superficiel atteint les adultes jeunes (avec une nette prédominance
masculine) ; elle est formée de cellules épithélioïdes au sein
Le fibromyxome superficiel des extrémités est une tumeur d’un stroma collagène dense. Parmi les tumeurs malignes, le
rare, de description récente (2001). Les quelques cas rap- sarcome myxo-inflammatoire fibroblastique a une prédilec-
portés touchent l’adulte d’âge moyen [1]. Il s’agit d’une tion pour les extrémités. C’est une tumeur maligne invasive
tumeur bénigne des tissus mous cutanés, indolore, de crois- (tissus mous profond, synoviale, tendons et ligaments),
sance lente. Cette lésion se développe préférentiellement multinodulaire et mal limitée. Son diagnostic repose sur
au niveau des doigts ou des orteils avec une tendance à l’identification de cellules atypiques globuleuses avec des
l’envahissement de la région unguéale. De taille variable inclusions éosinophiles intranucléaires. Les cellules sont par-
(de 0,5 à 5 cm de grand axe en moyenne), cette tumeur fois focalement marquées par le CD34 et/ou le CD 68 et de
polypoïde, bien circonscrite, est constituée de cellules fusi- façon occasionnelle par l’actine musculaire lisse et les cyto-
formes ou étoilées, disposées de manière anarchique ou kératines. Il faut éliminer de principe le myxofibrosarcome
storiforme dans un abondant stroma myxoïde, collagène ou qui est rare au niveau des extrémités et qui est constitué
mixte. Le stroma comporte habituellement de nombreux d’une prolifération de cellules fusiformes ou stellaires aty-
mastocytes. La vascularisation est constituée d’un fin réseau piques et mitotiques dans un stroma myxoïde avec un réseau
capillaire. Cette tumeur envahit le derme, quelques fois de vaisseaux incurvés à paroi épaisse. Enfin, le dermatofibro-
l’hypoderme, voire le fascia ou le périoste. En immunohis- sarcome de Darrier et Ferrand dans sa forme myxoïde est une
tochimie, les cellules expriment le plus souvent le CD34, le tumeur plus infiltrante qui envahit l’hypoderme et englobe
CD99 et l’EMA [1—3]. les adipocytes et les glandes sudorales. Il est en pratique
Cette tumeur est à distinguer d’autres tumeurs myxoïdes rarissime au niveau des extrémités. Les cellules tumorales
superficielles pouvant intéresser les extrémités. Parmi les expriment le CD34. Cette tumeur est caractérisée par une
tumeurs bénignes, l’angiomyxome superficiel est parfois translocation spécifique (t[17 ;22]COL1A1-PDGFß) [4].
décrit dans une forme acrale. Il est constitué d’un abon- En conclusion, il convient de retenir que le fibromyxome
dant stroma myxoïde avec des lacs mucoïdes acellulaires, superficiel des extrémités est une tumeur rare et de bon
ponctué de cellules fusiformes ou étoilées peu atypiques pronostic, qui peut nécessiter une reprise locale si l’exérèse
et il contient parfois des inclusions épithéliales. Les cel- est incomplète.
lules sont occasionnellement positives pour le CD 34. La
présence de polynucléaires neutrophiles dans le stroma,
en dehors de toute ulcération, est caractéristique de la Remerciements
lésion. La forme myxoïde du neurofibrome circonscrit, qui
intéresse souvent les extrémités, est constitué de courtes Monsieur le Professeur Louis Guillou de l’institut universi-
cellules flexueuses associées à des fibres collagènes épaisses taire de pathologie de Lausanne pour son avis diagnostique.
et sinueuses. Les cellules expriment la protéine S100. Le
myxome des gaines nerveuses (neurothécome myxoïde) pré-
sente une architecture lobulée, caractéristique avec des Références
nodules myxoïdes séparés par des fibres collagènes ; les
cellules tumorales expriment aussi la protéine S100. Néan- [1] Fetsch JF, Laskin WB, Miettinen M. Superficial Acral Fibro-
moins, cette tumeur siège préférentiellement au niveau de myxoma: a clinicopathologic analysis of 37 cases of a distinctive
soft tissue tumor with a predilection for the fingers and toes.
la tête et du cou, des épaules ou des membres supérieurs.
Hum Pathol 2001;32:704—14.
Le périneuriome des tissus mous peut comporter des zones [2] Meyerle JH, Keller RA, Krivda SJ. Superficiel acral fibro-
myxoïdes ; il se développe souvent plus profondément, en myxoma of the index finger. Case report. J Am Acad Dermatol
région sous cutanée ; il est constitué de cellules fusiformes 2004;50:134—6.
allongées, à disposition réticulée, dans un stroma collagène [3] Quaba O, Evans A, Al-Nafussi AA, Nassan A. Superficial acral
dense comportant fréquemment des éléments épithélioïdes. fibromyxoma. Case report. Br J Plast Surg 2005;58:561—4.
Les cellules sont positives pour l’EMA. Une variante sclé- [4] Gentil Perret A, Perrot JL, Dutoit M, Fouilloux B, Peoc’h M, Cam-
rosante du périneuriome, décrite plus récemment, siège bazard F. Angiomyxome superficiel : à propos de quatre cas, dont
préférentiellement au niveau des doigts ou des mains. Elle deux lésions sous-ungéales. Ann Pathol 2005;25:54—7.
Annales de pathologie (2008) 28, 338—340

Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur testiculaire rare


A rare testicular tumor

Andrada Loghin a,∗, Angela Borda a,


Myriam Decaussin-Petrucci b, Nicole Berger b

a
Service d’anatomie pathologique, université de médecine et pharmacie Târgu-Mures,
38, rue Gheorghe-Marinescu, 540142 Târgu-Mures, Roumanie
b
Service d’anatomie pathologique, hospices civils de Lyon, centre hospitalier Lyon-Sud,
université Lyon-1, 69495 Pierre-Bénite, France

Accepté pour publication le 29 novembre 2007


Disponible sur Internet le 23 août 2008

Il s’agit d’un homme de 52 ans, qui consulte pour une tuméfaction douloureuse du testi-
cule droit, constatée depuis trois mois et ayant rapidement augmenté de volume. Cette
tuméfaction était d’apparition spontanée, sans notion de traumatisme. Le bilan clinique
était normal, sans symptomatologie associée. À l’examen sanguin, les marqueurs sériques
étaient négatifs.
Une orchidectomie droite a été décidée. À l’examen macroscopique, le testicule était
le siège d’une tumeur jaunâtre, homogène, bien limitée, de 2 cm de diamètre, intrapa-
renchymateuse.
L’examen histologique, en technique standard, montrait une tumeur formée de nids
(Fig. 1) ou de travées à disposition rubanée, associés à des structures tubulaires ou papil-
laires (Fig. 2). Les cellules avaient un cytoplasme abondant et un noyau arrondi ou ovalaire.
L’anisocaryose était modérée, les mitoses rares. Le stroma était peu abondant, sans
nécrose. Cette tumeur, bien limitée, s’insérait au sein d’un parenchyme testiculaire peu
modifié. L’étude immunohistochimique montrait une positivité avec les anticorps contre
les cytokératines (AE1/AE3), la chromogranine A, la synaptophysine et la sérotonine ; il
n’existait pas de réactivité avec les anticorps contre l’inhibine, la calrétinine, la PLAP,
l’alpha-fœtoprotéine. L’index de prolifération (MIB-1) était inférieur à 2 % et le marquage
avec la protéine p53, négatif.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : andradaloghin@yahoo.com (A. Loghin).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.11.010
Une tumeur testiculaire rare 339

Figure 1. Prolifération tumorale sous forme de nids, séparés par Figure 2. Architecture différente dans la même tumeur : travées
de fines travées conjonctives. à disposition rubanée, formant des structures tubulaires ou papil-
Tumoral proliferation showing solid nests separated by a delicate laires.
stroma. Another growing pattern in the same tumor: trabeculae or cords
forming tubular or papillary structures.

Quel est votre diagnostic ?


340 A. Loghin et al.

Diagnostic : tumeur carcinoïde pure • une tumeur neuroendocrine primitive : c’est le cas de
notre observation puisqu’elle est isolée cliniquement et
primitive du testicule biologiquement. Elle entre dans le cadre défini par la
La tumeur carcinoïde primitive du testicule est rare, récente classification OMS 2004 des tumeurs testiculaires
l’incidence étant inférieure à 1 % de l’ensemble des tumeurs qui l’inclut dans le groupe des tumeurs diverses ; elle
testiculaires. La majorité des publications ne concernent est ainsi séparée des tumeurs germinales tératomateuses
qu’un seul cas, à l’exception de celle de Reyes et al. [1] monodermiques, groupe dans lequel elle se situait aupa-
qui rapporte une série de dix cas. Depuis 1954, 71 cas ont ravant [5].
été rapportés parmi lesquels 62 cas étaient primitifs et neuf
cas métastatiques. L’âge d’apparition est très variable, le L’évolution des tumeurs carcinoïdes primitives pures du
plus souvent entre 40 et 60 ans. La présentation clinique testicule est favorable : dans la littérature, seulement 11 %
est celle d’une masse testiculaire unilatérale, bilatérale de formes avec métastases (ganglions, foie, os) ont été rap-
dans un seul cas [2], parfois douloureuse. Il existe rarement portées, concernant des tumeurs de taille élevée, associées
un syndrome carcinoïde (diarrhée, flush, bronchospasme) dans 50 % des cas à un syndrome carcinoïde clinique et biolo-
survenant presque toujours dans les formes métastatiques. gique. En dehors de ces formes métastatiques, l’évaluation
Macroscopiquement, la tumeur est de coloration homogène du pronostic de ces lésions rares a été établie par différents
brun jaunâtre, assez ferme, mesurant entre 1 et 9,5 cm, auteurs [1], en comparaison avec les classifications pro-
avec une moyenne de 4,6 cm. À l’examen microscopique, nostiques utilisées dans les tumeurs endocrines des autres
elle se caractérise par une prolifération en nids ou en travées organes. En utilisant la classification des tumeurs endocrines
de cellules monomorphes, à noyau rond ou ovale comportant digestives, notre tumeur peut être classée en carcinome
une chromatine finement dispersée. À l’examen immunohis- endocrine de bas grade en raison du faible nombre de
tochimique, les cellules tumorales expriment les marqueurs mitoses, de l’absence de nécrose, d’un index de proliféra-
endocrines et neuroendocrines : chromogranine A, synapto- tion bas (MIB-1 < 2 %) et de la négativité du marquage avec
physine et CD56. La recherche de sérotonine, lorsqu’elle a la p53 [6].
été effectuée [3], était toujours positive, ce qui est le cas Pour conclure, le terme de carcinoïde retenu par
de notre observation. Les cellules tumorales n’expriment l’OMS pourrait être critiqué puisque la tendance géné-
pas en revanche l’inhibine et la calrétinine, marqueurs de rale ne réserve ce terme qu’aux tumeurs à sérotonine
tumeur à cellules de Sertoli avec laquelle le carcinoïde s’accompagnant d’un syndrome carcinoïde clinique, ce qui
peut être confondu dans certaines formes inhabituelles, est rarement le cas pour les tumeurs endocrines primitives
papillaire ou tubulaire et pseudoglandulaire, comme dans du testicule. Il serait plus actuel de dénommer cette entité :
le cas de notre patient. Le carcinoïde pur du testicule ne tumeur neuroendocrine testiculaire (ou endocrine selon la
contient aucun stigmate de tumeur germinale, en particu- nouvelle nomenclature).
lier de tératome, ni de néoplasie germinale intratubulaire :
les marqueurs PLAP, CD117, CD30, AFP et ␤HCG sont
négatifs. Références
Les tumeurs carcinoïdes pures du testicule posent des
[1] Reyes A, Moran CA, Suster S, Michal M, Dominguez H. Neuroen-
problèmes histogénétiques et évolutifs. En ce qui concerne
docrine carcinomas (carcinoid tumor) of the testis. Am J Clin
l’histogénèse de notre cas, trois situations pouvaient être
Pathol 2003;120:182—7.
évoquées : [2] Son HY, Ra SW, Yeong Jo, Koh EH, Lee HI, Koh JM, et al. Primary
• une origine germinale, le carcinoïde correspondant soit carcinoid tumor of the bilateral testis associated with carcinoid
à un tératome monodermique, soit au seul contingent syndrome. Int J Urol 2004;11:1041—3.
tumoral résiduel d’une tumeur germinale de type burnt- [3] Kato N, Motoyama T, Kameda N, Hiruta N, Emura I, Hasegawa G,
out ; en l’absence de tout contingent tératomateux et de et al. Primary carcinoid tumor the testis. Immunohistochemical,
néoplasie germinale intratubulaire dans le parenchyme ultrastructural and FISH analysis with review of the literature.
testiculaire péritumoral, cette hypothèse a été éliminée ; Pathol Int 2003;53:680—5.
• une métastase intratesticulaire d’une tumeur neuroendo- [4] Hayashi T, Iida S, Taguchi J, Miyajima J, Matsuo M, Tomiyasu K,
et al. Primary carcinoid of the testis associated with carcinoid
crine provenant d’une autre localisation, en particulier
syndrome. Int J Urol 2001;8:522—4.
digestive : cette hypothèse a été éliminée chez notre
[5] Eble JN, Sauter G, Ebstein JI, Sesterhenn IA. WHO Classifica-
patient en raison d’un bilan radiologique et biologique tion of tumours. Tumours of the urinary system and male genital
(absence d’élévation de l’acide 5-hydroxy-indol acétique) organs. Lyon: IARC Press; 2004.
négatif et en l’absence de symptomatologie clinique de [6] Rindi G, Couvelard A, Scoazec JY, Bordi C. Recommandations
type syndrome carcinoïde, ce qui est habituel dans les pratiques pour l’évaluation de la malignité dans les tumeurs
formes métastatiques [4] ; endocrines digestives. Ann Pathol 2005;25:487—98.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 145-6

Une tumeur utérine inhabituelle Cas


pour diagnostic

A unusual uterine tumor

Marie-Eve Fondrevelle (1), Delphine Maticot-Baptista (2), Johnny Raffoul (1),


Bernard Zurlinden (2)

(1) Service d’Anatomie Pathologique, Centre Hospitalier de Montbéliard.


(2) Service de Gynécologie Obstétrique, Centre Hospitalier de Montbéliard, 2, rue du docteur Flamand, 25200
Montbéliard cedex.

Fondrevelle M-E, Maticot-Baptista D, Raffoul J, Zurlinde B. Une tumeur utérine inhabituelle. Ann Pathol
2007 ; 27 : 145-6.

Observation

Une femme de 57 ans, ayant comme


antécédent principal un adénocarci-
nome canalaire infiltrant mammaire droit
diagnostiqué en 1992 traité par chi-
rurgie, chimiothérapie et radiothéra-
pie, consulte en juin 2005 pour son
suivi annuel. La patiente, ménopausée,
est en bon état général, ne présente
aucune plainte particulière en dehors
d’une prise de poids de 10 kg en un an.
À l’examen clinique, le toucher vaginal
objective une volumineuse masse
latéro-utérine droite, faisant évoquer FIG. 1. — Tumeur jaunâtre intrapariétale utérine.
une pathologie tumorale ovarienne. FIG. 1. — Yellow intraparietal uterine tumor.
Le scanner abdominopelvien effectué
montre une masse utérine de 9 cm de
grand axe, discrètement hétérogène,
essentiellement hypoéchogène après
injection. Une hystérectomie inter-
annexielle par laparotomie est alors
réalisée.
À l’examen macroscopique, l’utérus
pèse 428 grammes, mesure 10 cm ×
8 cm × 5 cm. À la coupe, on observe
une tumeur intrapariétale de 9,5 cm de
grand axe, jaunâtre, bien limitée mais
non encapsulée, homogène avec quel-
ques travées blanchâtres, sans nécrose
ni hémorragie (figure 1). Microscopi-
quement, la tumeur est composée
d’une prolifération de cellules adi- FIG. 2. — Prolifération d’adipocytes matures (HES × 25). Tirés à part :
peuses matures, sans mitoses ni aty-
FIG. 2. — Proliferation of mature adipocytes (HES ×25). M.E. Fondrevelle,
pies cytonucléaires, séparées par des voir adresse
tractus fibreux denses non inflamma- en début d’article.
toires et par des vaisseaux à paroi Quel est votre diagnostic ? e-mail :
épaisse et de calibre variable (figure 2). marie-eve-f@voila.fr.

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 145


Marie-Eve Fondrevelle et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 145-6

Diagnostic : lipome utérin à éliminer le liposarcome : il est extrême-


ment rare (9 cas trouvés dans la littérature),
présente des lipoblastes, des cellules aux
Les tumeurs graisseuses de l’utérus sont noyaux bizarres, des mitoses mais peu nom-
rares, anecdotiques, représentant environ breuses et des zones de nécrose [3].
0,03 à 0,20 % des pièces d’hystérectomie. Actuellement, même avec l’appui de l’immu-
Elles ont été décrites pour la première fois nohistochimie, la physiopathologie n’est pas
par Lobstein en 1816. Différentes formes encore éclaircie, les cellules adipeuses étant
distinctes peuvent être décrites allant de la normalement absentes du myomètre : pos-
lipomatose diffuse au sein d’un léiomoyme sible métaplasie de cellules musculaires lisses,
(présence d’adipocytes mêlés aux cellules dérives cellulaires à partir de cellules mésen-
musculaires lisses) à la lipomatose cir- chymateuses multipotentes indifférenciées,
conscrite au sein d’un léiomoyme (amas particularité vasculaire comme l’angiomyoli-
d’adipocytes bien individualisé au sein d’un pome rénal ? [4, 5]. Les études de biologie
léiomoyme normal par ailleurs) au lipome moléculaire retrouvent certaines mutations
pur contenant uniquement des cellules adi- identiques entre différents lipomes. La posi-
peuses matures séparées par des travées tivité aux récepteurs œstrogéniques doit-elle
fibreuses plus ou moins épaisses (fibro- faire penser à une hormonodépandance bien
lipome) [1]. Le lipome pur touche la femme que le lipome pur ne soit constaté que chez
ménopausée, souvent dans un contexte de la femme ménauposée ? ■
surcharge pondérale (dans notre cas prise
de dix kg en un an). La présentation clinique
Key words: lipoma, uterine tumors, uterus.
est la même que celle du léiomoyme :
découverte fortuite, syndrome de masse Mots-clés : lipome, tumeurs de l’utérus, utérus.
abdominale, ménorragie... La taille varie de
5 à 10 cm (de quelques mm à 32 cm dans la
littérature), se situe dans 60 % en intraparié-
tal mais aussi de façon plus rare en sous- Références
séreux et en intracervical. Le diagnostic actuel-
lement peut être évoqué par l’imagerie avant
l’intervention [2]. [1] Philippe E, Charpin C. Pathologie gynécologique et
Le diagnostic anatomo-pathologique est aisé, obstétricale. Paris : Masson, 1992.
suggéré dès la macroscopie de la pièce [2] Lau LU, Thoeni MD and RF. Uterine lipoma: advan-
devant l’existence d’une tumeur homogène tage of MRI over ultrasound. British Journal of Radio-
bien limitée de couleur jaune beurre. Au logy 2005 ; 72-74.
niveau microscopique, on observe une pro-
[3] Al-Maghrabi JA, Sait KH. Lingawi SS. Uterine
lifération d’adipocytes matures, associée à
lipoma. Saudi Med 2004 : 25 : 1492-4.
une composante fibreuse plus ou moins
importante, sans atypies ni mitoses. L’étude [4] Gentile R, Zarri M, De Lucchi F, Bellone F, Laper-
immunohistochimique est positive pour la tosa G. Lipoleiomyoma of the uterus. Pathologica
PS100 et la vimentine, négative pour le CD34 1996 ; 88 : 132-4.
(positive pour le lipome à cellules fusifor- [5] Aung T, Goto M, Nomoto M, Kitajima S, Douchi T,
mes). Nous avons également observé une Yoshinaga M et al. Uterine lipoleimyoma: a histo-
positivité nucléaire pour les récepteurs pathological review of 17 cases. Pathol Int 2004 ; 54 :
œstrogéniques. La seule difficulté est donc 751-8.

146
Annales de pathologie (2008) 28, 510—512

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une tumeur vésicale particulière


An unusual bladder tumor

Ines Chelly a,b, Khadija Bellil a,∗,b, Amina Mekni a,b,


Selma Bellil a,b, Mehdi Blah c,b, Ali Horchani c,b,
Slim Haouet a,b, Nidham Kchir a,b, Moncef Zitouna a,b

a
Service d’anatomopathologie, hôpital la Rabta, 1007 Tunis, Tunisie
b
Service de radiologie, hôpital la Rabta, Tunis, Tunisie
c
Service d’urologie, hôpital la Rabta, Tunis, Tunisie

Accepté pour publication le 25 mars 2007


Disponible sur Internet le 20 novembre 2008

Observation
Patiente âgée de 80 ans, ayant comme antécédents une hypertension artérielle bien équi-
librée, présentait depuis un mois des douleurs abdominopelviennes vagues et diffuses sans
irradiation particulière. Elle n’avait, par ailleurs, aucune symptomatologie urinaire mais
l’examen clinique retrouvait un prolapsus urogénital de grade 3. Le reste de l’examen
clinique était sans particularité. L’échographie abdominopelvienne objectivait un épais-
sissement irrégulier et diffus de la paroi vésicale tandis que la cystoscopie montrait
une muqueuse vésicale entièrement congestive et inflammatoire. Il existait de multiples
zones mamelonnées, végétantes, jaunâtres, non nécrotiques à large base d’implantation,
entourées par un halo de muqueuse hyperhémiée. Ces lésions mesuraient de 1 à 3 cm
et intéressaient toute la muqueuse vésicale. Une résection endoscopique biopsique était
pratiquée ; elle ramenait de multiples copeaux de couleur blanchâtre et de consistance
ferme.
L’examen histologique des prélèvements adressés montrait que la muqueuse et la
sous muqueuse vésicale étaient massivement infiltrées par de nombreuses et volu-
mineuses cellules rondes disposées en nappe diffuse (Fig. 1). Elles étaient pourvues
d’un abondant cytoplasme, granuleux, éosinophile renfermant souvent une inclusion
arrondie acidophile (Fig. 2) colorée par la réaction du PAS. Ces éléments cellulaires
exprimaient le CD68 et n’exprimaient pas les cytokératines. La patiente a été mise
sous triple antibiothérapie. Les suites opératoires étaient simples sans complication ni
récidive.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : ineschelly@yahoo.fr (K. Bellil).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Publié par Elsevier Masson SAS.
doi:10.1016/j.annpat.2007.03.005
Une tumeur vésicale particulière 511

Figure 1. Prolifération diffuse d’histiocytes de grande taille à Figure 2. Certaines cellules contiennent des inclusions intracy-
cytoplasme abondant, granuleux et éosinophile (HE × 10). toplasmiques entourées par un halo clair (HE × 10).
Diffuse proliferation of large histiocytes with abundant granular Some cells contain intracytoplasmic inclusions with a clear halo
eosinophilic cytoplasm (HE × 10). around them (HE × 10).

Quel est votre diagnostic ?


512 I. Chelly et al.

Diagnostic : malacoplasie vésicale par la réaction du PAS et prennent la coloration de Perls


et de Von Kossa [2,3]. Selon l’abondance en cellules his-
La malacoplasie est une affection rare, décrite pour la tiocytaires, la malacoplasie pourrait parfois faire discuter
première fois par Michaelis Gutmann en 1902. Elle corres- tantôt une tumeur maligne peu différenciée tantôt une
pond à une inflammation granulomateuse secondaire à un cystite non spécifique à germes banals. Dans tous les
trouble de la fonction bactéricide des macrophages [1]. cas, la présence de cellules chargées en grains PAS (+)
Les lésions sont ubiquitaires et peuvent affecter divers confirme le diagnostic de malacoplasie. En dehors d’une
organes tels que le poumon ou le tube digestif. L’atteinte complication tels un engainement urétéral, une compression
de l’arbre urinaire semble toutefois la plus commune ; elle des organes du pelvis ou une constitution d’une volumi-
se localise au niveau de la vessie dans 75% des cas [2]. neuse collection abcédée, l’attitude thérapeutique se doit
Les formes pseudotumorales sont exceptionnelles et sur- d’être la plus conservatrice possible [1,2]. Son évolution
tout de siège phrénique. La malacoplasie vésicale atteint est en règle favorable sans risque de récidive. Sa patho-
surtout l’adulte aux alentours de la cinquième décade de génie exacte demeure toutefois obscure [5]. Le primum
vie avec une prédominance féminine (sex ratio de 4/1) [3]. movens serait une infection à bactéries Gram négatives
Elle survient plus volontiers dans un contexte de dépression provoquant une réaction inflammatoire autoentretenue par
immunitaire et notamment après transplantation d’organe l’accumulation de débris cellulaires et bactériens secon-
ou parfois en association avec une autre affection, comme daires à un mécanisme d’autolyse. Les corps de Michaelis
une sarcoïdose ou une tumeur vésicale [4]. Elle paraît Gutmann correspondraient à des inclusions constituées
dénuée de toute spécificité radiologique, voire échogra- de débris bactériens et de muccopolysaccharides calcifiés
phique et pourrait mimer aisément une tumeur maligne [1,3]. Le rôle d’un dysfonctionnement lysosomial et d’un
infiltrante en raison de l’épaississement diffus de la paroi défaut de digestion phagocytaire serait ainsi l’un des princi-
vésicale associé à des images d’envahissement de la graisse paux facteurs intrinsèques de l’affection ; les germes les plus
périvésicale [4,5]. Chez notre patiente, l’aspect échogra- fréquemment incriminés sont Escherichia coli et Proteus
phique de la vessie était également trompeur, fortement [2].
suspect de malignité ayant conduit à une résection endo-
scopique [3]. La malacoplasie présente toutefois certains
signes évocateurs en cystoscopie puisqu’elle réalise typique- Références
ment des petites plaques molles lenticulaires de coloration
jaune ou ocre, entourées d’un halo inflammatoire, dissémi- [1] Petriconi R, Viville C. La malacoplasie urinaire : à propos d’une
nées sur toute la muqueuse et mesurant de 0,5 à 4 cm de observation suivie pendant trois ans. J urol 1983;89:325—9.
grand axe. Rarement, la lésion prend un aspect pédiculé [2] Coutant G, Robin J, Saint-maur D, Barrou B, Delcourt A, Beltrey
O. Malacoplasie. à propos d’une observation avec localisation
pseudotumoral ou forme des plaques ombiliquées, nécro-
rétropéritonéale. Rev Med Int 1993;14:117—20.
tiques et ulcérées [3]. Dans tous les cas, seul l’examen [3] Baniel J, Shmueli D, Shapira Z, Sandbank Y, Servadio C. Malaco-
anatomopathologique permet de redresser le diagnostic. plakia presenting as a pseudotumor of the bladder in cadaveric
Histologiquement, la malacoplasie se caractérise en effet renal transplantation. J Urol 1986;137:281—2.
par l’existence d’un granulome inflammatoire comportant [4] Sulman A, Goldman H. Malacoplakia presenting as a large blad-
de nombreux histiocytes encore dénommés « cellules de von der mass. Urology 2002;60:163.
Hansemann » renfermant de multiples granulations intracy- [5] Matter MJ, Gygi C, Gillet M, Gebhard S, Bouzourene H.
toplasmiques éosinophiles ou « corps de Michaelis Gutmann » Malacoplakia simulating organ invasion in a rectosigmoid ade-
dont la taille varie de 10 à 50 ␮m avec un aspect typique nocarcinoma: report of a case. Dis Colon Rectum 2001:
en « œil de hibou ». Ces éléments sont colorés en rouge 1371—5.
Ann Pathol 2007 ; 27 : 57-58

Une ulcération anale inhabituelle Cas


pour diagnostic

A unusual perianal ulcer

Anne-Sophie de Lajarte-Thirouard (1), Olivier Decaux (2), Laurent Siproudhis (3), Bruno Turlin (1)

(1) Département d’Anatomie et Cytologie Pathologiques, Hôpital Pontchaillou, 2, rue Henri Le Guillou, 35033
Rennes cedex 9.
(2) Service de Médecine Interne, Hôpital Sud, 16 bd de Bulgarie, 35203 Rennes cedex 2
(3) Service des Maladies de l’Appareil Digestif, Hôpital Pontchaillou, Rennes

de Lajarte-Thirouard AS, Decaux O, Siproudhis L, Turlin B. Une ulcération anale inhabituelle. Ann Pa-
thol 2007 ; 27 : 57-58

Observation

Chez un homme âgé de 46 ans, sans


antécédent particulier, traité chirurgi-
calement pour un abcès de la marge
anale avec fistule sans cicatrisation, est
apparue une symptomatologie multi-
ple associant des signes ORL (rhinite
croûteuse et lésion ulcérée du pavillon
de l’oreille), urinaires (hématurie macro-
scopique et pollakiurie), rhumatologi- FIG. 1. — Ulcération commissurale postérieure extensive et
ques (arthralgies inflammatoires) puis bourgeonnante intéressant plus de 25 % de la circonférence du
progressivement une altération de canal anal.
l’état général et une fièvre. Lors de FIG. 1. — Extensive budding ulcer of the anal cabal invol-
l’hospitalisation, deux mois après le ving more than 25% of the circumference.
traitement de sa lésion anale, le bilan
biologique mettait en évidence un syn-
drome inflammatoire et des ANCA
(Anti Nuclear and Cytoplasmic Antibo-
dies) positifs, de type C-ANCA, de spécifi-
cité PR3 à 320 RU/ml (N < 20). L’examen
ORL retrouvait une ulcération de la
cloison nasale et les biopsies endona-
sales et bronchiques montraient, sous
des ulcérations nécrosantes, quelques
cellules géantes, mais sans lésion de
vascularite. Les biopsies de l’ulcération
anale (figure 1) montraient un bour-
geon charnu surmonté d’un épais
FIG. 2. — Artériole siège de lésion de vascularite nécro-
enduit fibrinoleucocytaire. Au sein du sante entourée d’une réaction inflammatoire granuloma- Accepté pour publication
bourgeon charnu on observait au teuse avec cellules géantes multinuclées. le 03 mars 2006
niveau des artérioles des lésions de FIG. 2. — Necrosing vacularitis involving arterioles and
nécrose fibrinoïde de la paroi, l’infiltrat surrounded by a granulomatous infiltration of multinu- Tirés à part :
cleate giant cells. A.S. de Lajarte-Thirouard,
inflammatoire au pourtour renfermant
voir adresse
des granulomes épithélioïdes et gigan- en début d’article.
tocellulaires (figure 2). Les colorations e-mail :
spéciales n’ont pas retrouvé d’agent Quel est votre diagnostic ? anne-sophie.thirouard
pathogène. @chu-rennes.fr

© 2007. Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. 57


Anne-Sophie de Lajarte-Thirouard et al. Ann Pathol 2007 ; 27 : 57-58

Diagnostic : vascularite tologique classique (nécrose, vascularite et


nécrosante et granulomatose granulome), dans un contexte clinique évo-
cateur, pour proposer ce diagnostic [5]. ■
rectale révélatrice d’une maladie
de Wegener Key words: perianal ulcer, Wegener’s granulomatosis.
Mots-clés : ulcération anale, granulomatose de Wegener.

La maladie de Wegener (MW) est une vascu-


larite nécrosante et granulomateuse des
artères de petit calibre et artérioles, attei-
gnant préférentiellement l’appareil respira- Références
toire et rénal. Les manifestations cliniques
révélatrices sont insidieuses, simulant sou-
vent un processus infectieux pulmonaire [1]. [1] Kambouchner M, Mouthon L. Vascularites pulmo-
L’atteinte digestive au cours de la MW est naires : le point de vue du pathologiste. Ann Pathol
rare et n’est qu’exceptionnellement révéla- 2000 ; 20 : 588-604.
trice [2]. Un cas d’atteinte anorectale révéla- [2] Pagnoux C, Mahr A, Cohen P, Guillevin L. Presen-
trice a déjà été rapporté par Aymard et al [3]. tation and outcome of gastrointestinal involvement in
L’atteinte digestive est moins fréquente au systemic necrotizing vasculitides: analysis of 62
cours de la MW qu’au cours des autres vas- patients with polyarteritis nodosa, microscopic poly-
cularites [2]. La symptomatologie digestive est angiitis, Wegener granulomatosis, Churg-Strauss
variée, non spécifique, et commune à d’autres syndrome, or rheumatoid arthritis-associated vasculi-
vascularites : ischémie, infarctus intestinal et tis. Medecine 2005 ; 84 : 115-28.
perforations digestives, ulcérations des [3] Aymard B, Bigard MA, Thompson H, Schumutz JL,
muqueuses plus ou moins hémorragiques,
Finet JF, Borrely J. Perianal ulcer: an unusual presen-
rupture anévrismale… Dans la MW, on ren-
tation of Wegener’s granulomatosis. Report of a case.
contre aussi des gastrites, des iléocolites ou des
Dis Colon Rectum 1990 ; 33 : 427-30.
anorectites inflammatoires granulomateuses
pour lesquelles, en l’absence de lésion de [4] Temmesfeld-Wollbrueck B, Heinrichs C, Szalay A,
vascularite nécrosante, le diagnostic diffé- Seeger W. Granulomatous gastritis in Wegener’s
rentiel avec une maladie de Crohn peut être disease : differentiation from Crohn’s disease suppor-
délicat [2, 4]. En cas d’atteinte anorectale iso- ted by a positive test for antineutrophil antibodies. Gut
lée, il conviendra d’éliminer une cause infec- 1997 ; 40 : 550-3.
tieuse (en particulier tuberculose, infection [5] Raynaud P, Garrel R Rigau V, Poizat F, Vic P, Cartier
à Chlamydiae trachomatis et syphilis). Plus C et al. Comment améliorer la rentabilité diagnostique
généralement, il faut penser à une MW devant des biopsies de la sphère oto-rhino-laryngée dans la
une ulcération chronique des muqueuses, maladie de Wegener : analyse anatomo-clinique de
accompagnée de signes généraux, quelque 49 biopsies chez 21 patients. Ann Pathol 2005 ; 25 :
soit son site et ne pas attendre la triade his- 87-93.

58
Annales de pathologie (2008) 28, 514—516

CAS POUR DIAGNOSTIC

Une volumineuse tumeur temporale


A large temporal tumor

Lobna Boussofara a, Najet Ghariani a,


Mohamed Tahar Yacoubi b, Mohamed Denguezli a,∗,
Colandane Belajouza a, Rafia Nouira b

a
Service de dermatologie, faculté de médecine Ibn Jazzar, CHU Farhat-Hached,
4002 Sousse, Tunisie
b
Laboratoire d’anatomopathologie, faculté de médecine Ibn Jazzar,
CHU Farhat-Hached, 4002 Sousse, Tunisie

Accepté pour publication le 3 décembre 2007


Disponible sur Internet le 20 novembre 2008

Observation
Un patient âgé de 70 ans, sans antécédents médicaux particuliers, ni notion de trau-
matisme local ou d’exposition solaire intense, a consulté pour une tumeur de la région
temporale gauche évoluant depuis quatre ans. L’examen clinique mettait en évidence
une tumeur indolente, polylobée, de 6 cm de grand axe, adhérente au plan profond,
recouverte d’une peau non ulcérée (Fig. 1). Les aires ganglionnaires étaient libres ;
il n’y avait pas d’hépatosplénomégalie. Une radiographie de thorax, le dosage des
marqueurs tumoraux, l’échomammographie, des échographies cervicale et abdomino-
pelvienne, la fibroscopie digestive haute et la colorectoscopie se sont révélés sans
anomalies.
L’examen histologique de la biopsie cutanée montrait une prolifération cellulaire de
type épithélial, invasive, de localisation intradermique, agencée en massifs creusés de
fentes glandulaires et flottant dans du mucus, séparés par des septa fibreux renfermant
parfois des vaisseaux très congestifs (Fig. 2). Les cellules tumorales d’aspect monomorphe
étaient très peu atypiques ; leur noyau contenait une chromatine fine et parfois un petit
nucléole ; les mitoses étaient très rares (Fig. 3). À proximité de la tumeur, quelques struc-
tures canalaires étaient le siège d’une hyperplasie simple sans atypie ; il n’y avait pas de
foyer in situ ni de contingent canalaire invasif non mucineux.
Les colorations du PAS et du bleu Alcian étaient positives au niveau des flaques de mucus
et des cellules mucosécrétantes. Les marquages avec les anticorps anti-antigène mem-
branaire épithélial (anti-EMA), anticytokératine 7, antiprotéine S100 (anti-PS100) étaient
positifs dans les cellules tumorales.

∗ Auteur correspondant.
Adresse e-mail : dr.denguezli@topnet.tn (M. Denguezli).

0242-6498/$ — see front matter © 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés.
doi:10.1016/j.annpat.2007.12.002
Une volumineuse tumeur temporale 515

Figure 3. HE × 400 : cellules tumorales assez monomorphes à


Figure 1. Volumineuse tumeur temporale. noyau peu atypique et à chromatine fine, renfermant rarement un
Bulky temporal tumor. petit nucléole.
HE stain × 400: monomorphous cells having rarely atypical nucleus
with scanty chromatin and small nucleoli.

Figure 2. HE × 100 : prolifération dermique faite d’îlots épithé-


liaux flottant dans des flaques de mucus séparés par des septa
fibreux.
HE stain × 100: dermal proliferation with epithelial islands floating
on a pool of mucin compartmentalized by delicate fibrous septa. Quel est votre diagnostic ?
516 L. Boussofara et al.

Diagnostic : carcinome mucineux cutané Le CMPC pose le problème de diagnostic différentiel avec
les métastases cutanées des autres carcinomes mucineux
primitif
(tractus gastro-intestinal, sein, poumon, ovaire et prostate).
Le carcinome mucineux primitif cutané (CMPC), ou adé- La localisation au niveau de la face, et surtout de la région
nocarcinome mucineux eccrine, est une tumeur annexielle périorbitaire, est en faveur d’une origine primitive [1,2].
rare. Depuis sa première description par Lennox en 1952, Plusieurs critères histologiques ont été proposés pour orien-
environ 140 cas ont été publiés [1]. ter le diagnostic vers une origine primitive ou secondaire.
Le CMPC touche l’adulte avec un âge moyen de 63 ans La présence d’un contingent in situ semble être le meilleur
et une prédominance masculine nette (2H/1F) [2]. Cette critère histologique en faveur d’une origine primitive de la
tumeur a une croissance lente et se présente sous forme tumeur. Cependant, son absence n’est pas synonyme d’une
d’un nodule sous-cutané indolore de consistance dure. Elle origine secondaire [1]. Le CMCP doit être également dis-
siège dans 75 % des cas au niveau de l’extrémité céphalique tingué des autres tumeurs sudorales eccrines telles que le
surtout la région péri-oculaire, les joues et le cuir chevelu carcinome adénoïde kystique et le carcinome microkystique
[2—4]. Histologiquement, il s’agit d’une prolifération tumo- [5].
rale dermique faite par des îlots ou des lobules épithéliaux Le traitement du CMCP repose sur une chirurgie large afin
basophiles noyés dans des plages de stroma très clair riches d’éviter les récidives locales qui sont fréquentes, survenant
en flaques de mucine séparées par des fins septa fibreux. dans un tiers des cas. Les métastases sont plus rares (11 %
Une différenciation glandulaire est souvent présente don- des cas) et sont le plus souvent ganglionnaires locales [4].
nant un aspect cribriforme ; des foyers d’hémorragie sont Le grading cellulaire décrit par Kazakov et al. ne semble pas
fréquemment observés. être un facteur pronostique bien démontré [1].
Kazakov et al. [1] ont récemment publié une large série En conclusion, le CMCP est une tumeur eccrine rare. Son
de carcinomes mucineux cutanés et proposent de les clas- diagnostic ne peut être retenu qu’après exclusion par les
ser en deux variantes morphologiques : mixte et mucineuse examens complémentaires d’une métastase cutanée d’un
pure selon la présence ou non d’un contingent canalaire carcinome mucineux extracutané, notamment mammaire ou
invasif non mucineux. Ils considèrent que ces tumeurs pri- digestif.
mitivement cutanées résultent d’une filiation : hyperplasie
simple, hyperplasie atypique, carcinome in situ et carci-
nome invasif et cela par analogie aux carcinomes canalaires
Références
de la glande mammaire. Ces auteurs ont proposé de clas- [1] Kazakov DV, Suster S, LeBoit P, Calonje E, Bisceglia M, Kutzner
ser ces tumeurs en trois grades cytologiques tenant compte H, et al. Mucinous carcinoma of the skin, primary, and secon-
de la taille des cellules, de l’aspect du noyau, de la pré- dary: a clinicopathologic study of 63 cases with emphasis on
sence d’un pléomorphisme cytonucléaire et du nombre de the morphologic spectrum of primary cutaneous forms: homo-
mitose [1]. Les formes pures se manifestent par des lésions logies with mucinous lesions in the breast. Am J Surg Pathol
pseudokystiques alors que les formes mixtes sont plutôt 2005;29:764—82.
des lésions nodulotumorales de taille beaucoup plus impor- [2] Snow SN, Reizner GT. Mucinous eccrine carcinoma of the eyelid.
Cancer 1992;70:2099—104.
tante et sont souvent associées à un haut grade cellulaire
[3] Periole B, Gorguet B, Bazex J. Carcinome eccrine à stroma muci-
[2]. Dans notre observation, il s’agissait d’un CMPC pur de
neux de la face. Ann Dermatol Venereol 1996;123:569—71.
faible grade cytologique, particulier par sa taille impor- [4] Karimipour DJ, Johnson TM, Kang S, Wang TS, Lowe L. Mucinous
tante. L’étude immunohistochimique montre une positivité carcinoma of the skin. J Am Acad Dermatol 1997;36:323—6.
de l’EMA, des cytokératines de bas poids moléculaire, de [5] Cabell CE, Helm KF, Sakol PJ, Billingsley EM. Primary muci-
l’antigène carcino-embryonnaire, de la PS100, et des récep- nous carcinoma in 54-year-old man. J Am Acad Dermatol
teurs de la progestérone et des estrogènes [2—5]. 2003;49:941—3.

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