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09/11/2017 Gilbert Durand - La réhabilitation de l'imaginaire

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Gilbert Durand - La réhabilitation de


l'imaginaire
Jérôme Souty
Publié le 12/10/2006

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Gilbert Durand est l’un des précurseurs des


Article issu du numéro
recherches sur l’imaginaire. Il a forgé des outils
pour étudier les configurations d’images
propres à des créateurs individuels, des agents
sociaux ou des catégories culturelles. Son
œuvre sur les mythes et les symboles, qui
convoque de nombreuses disciplines, peut se
lire comme une vaste entreprise de
réhabilitation de l’imaginaire.

« Folle du logis » pour Blaise Pascal, « maîtresse


d’erreur et de fausseté » pour René Descartes…,
>> Consulter le sommaire la liste est longue des anathèmes lancés contre
Mensuel N° 176 - Novembre 2006 l’imagination. Gilbert Durand est parti du constat
Comment devient-on délinquant ? - suivant : depuis ses origines, la civilisation
5€50 occidentale dévalorise l’image. Une longue tradition
philosophique, pédagogique et scientifique s’est
Je commande
voulue iconoclaste (qui « détruit » les images, ou Hors-série (hors abonnement) Gran
le magazine - 5€50
n°2 (octobre-novembre 2017) (septemb
tout au moins s’en méfie). Très tôt, la procédure
Je m'abonne efficace de recherche de la vérité se fonde sur une
(à partir de 6€ / mois) logique binaire : la dialectique (Socrate, Platon puis
Aristote). Ne pouvant se réduire à un argument
« vrai » ou « faux », l’image, au nom de la raison,
>> Voir tous les articles de la rubrique est dévalorisée comme incertaine et ambiguë. La
scolastique médiévale (Thomas d’Aquin), les
débuts de la physique moderne (Galilée, Descartes) et le rationalisme classique,
l’empirisme factuel (David Hume, Isaac Newton), etc. excluent progressivement
l’imaginaire des procédures intellectuelles, pour le confondre avec le fantasme, le rêve,
l’irrationnel ou le délire. Scientisme, positivisme, historicisme dévaluent totalement la
pensée symbolique, le raisonnement par similitude.

Les formes et les lois de l’imaginaire


Parallèlement à cette consolidation d’une « pensée sans images » et à la domination
technique et matérielle de l’Occident, les autres cultures du monde sont considérées
comme « prélogiques », « primitives », « archaïques ». La « part maudite » est
abandonnée au « sauvage », au poète, au mystique ou au fou. Pourtant, il y a bien eu en
Occident des moments forts de résistance de l’imaginaire : l’art byzantin et ses images
saintes, la période gothique, le romantisme, le symbolisme, le surréalisme… Par ailleurs,
depuis le xxe siècle, la psychanalyse freudienne, la psychosociologie religieuse (Mircea
Eliade), la psychologie (école jungienne), le néokantisme (Ernst Cassirer, Martin
Heidegger), la phénoménologie (Edmund Husserl), l’herméneutique, ou encore certains
récents travaux de philosophie et de sciences cognitives revalorisent les représentations
visuelles, les pratiques imaginatives, la métaphore.
Mais notre civilisation, déplore G. Durand, reste empreinte d’un réductionnisme
rationaliste.
Car pour G. Durand, l’imaginaire est le substrat de la vie mentale, une dimension
constitutive de l’humanité. La puissance du rêve, la force du symbole, la maternité de
l’image composent une espèce de « fantastique transcendantale » dont l’homme ne peut
se passer sans se mutiler. Le philosophe grenoblois a insisté sur l’importance des

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perceptions physiques dans la formation des images mentales. Celles-ci ont deux pôles :
un pôle biologique et un pôle incarné dans une culture, une langue, une civilisation. Le
« trajet anthropologique », c’est le va-et-vient entre ces deux pôles, par lequel l’imaginaire
existe. Il y a de l’imaginaire partout. Dans le rêve, la rêverie, les visions, les hallucinations.
Sous des formes plus abouties dans les mythes, dans les diverses formes de création
artistique. Il est présent dans les situations de la banalité quotidienne, de même que dans
les opérations les plus rationnelles. Car G. Durand estime que toute raison, quelle qu’elle
soit, s’élabore toujours à partir du terreau de l’imaginaire… Il se distingue d’ailleurs ici de
son maître et inspirateur Gaston Bachelard, le « philosophe de la rêverie », pour qui
imaginaire et rationalité sont deux domaines antagonistes. Les images sont « le moule
affectif représentatif des idées », c’est-à-dire qu’elles sont antérieures aux idées et non le
contraire. G. Durand renforce le soupçon de Friedrich Nietzsche sur l’autonomie de la
rationalité. Il conforte aussi l’intuition d’Emmanuel Kant pour qui la racine des activités 336 pages
2
cognitives de la sensibilité et de l’entendement pouvait déjà être nommée imagination 22 €
créatrice. Des travaux n’ont-ils pas montré que l’imaginaire des savants détermine leur
représentation de l’objet d’étude, donc leur méthode et leurs résultats (1) ? Par ailleurs,
les sciences expérimentales, confrontées à de nouveaux objets insaisissables (2), n’ont-
elles pas changé radicalement d’épistémologie, et inventé de nouveaux modèles qui
n’hésitent pas à recourir au symbole, voire à se référer à certaines conceptions
métaphysiques (3)…

Un nouvel esprit anthropologique


Comment donner un tableau objectif de la subjectivité constitutive du Sapiens sapiens ? Il
ne faut pas considérer G. Durand comme un rêveur idéaliste ou romantique, mais bien
comme un scientifique pragmatique, persévérant et ambitieux. Son œuvre consiste en
une tentative systématique d’exploration des données anthropologiques de l’imaginaire
humain. Dès les années 1950, il va chercher à en dégager les formes invariantes. Il va
s’appliquer à démontrer que celui-ci ne constitue pas un ensemble chaotique constitué
d’associations hétéroclites d’images. Ces dernières s’organisent au contraire selon une
logique propre. G. Durand met donc au point une méthodologie qui permet d’observer la
construction de certaines images et de voir comme elles « constellent », c’est-à-dire
comment elles s’agglutinent (selon des principes d’isomorphisme et de polarisation) à
partir d’un noyau organisateur qu’il considère comme « archétypique ». Les Structures
anthropologiques de l’imaginaire (1960), ouvrage fondateur, apparaît comme un véritable
manifeste pour les sciences de l’imaginaire (voir l’encadré ci-dessous).
A partir des années 1970, et c’est le deuxième grand volet de son œuvre, G. Durand va
adopter une perspective beaucoup plus dynamique, diachronique, ouverte sur les
transformations de l’imaginaire dans l’espace et le temps. La « mythocritique », appliquée
aux œuvres artistiques, consistait à cerner le mythe directeur sous-jacent d’une œuvre
(en en recensant décors, thèmes redondants, mythèmes caractéristiques), comme G.
Durand l’a fait lui-même, notamment dans son analyse du roman de Stendahl, La
Chartreuse de Parme (1839). Mais avec la « mythanalyse », l’auteur élargit l’enquête à
l’ensemble des productions culturelles, et brosse le diagramme des figures mythiques
dominantes d’une époque. Une dynamique de pluralisation assure la prégnance du mythe
dans la culture. Et la science du mythe ou « mythodologie » permet de reconstituer sur la
longue durée la rythmique culturelle du mythe (résurgences et désactivations), ses cycles
de transformation, ses « bassins sémantiques » de diversification géoculturelle.
L’œuvre de G. Durand discute la position positiviste et objectivante des sciences
humaines, pour lui préférer un « nouvel esprit anthropologique ». Il n’y a pas une
procédure unique de déduction de la réalité et G. Durand prône un « polythéisme des
valeurs », selon l’expression de Max Weber, rien moins qu’un renouveau de l’humanisme,
une rupture épistémologique. Il a souvent soutenu qu’il n’y a qu’une science de l’homme,
c’est-à-dire que les découpages entre disciplines ne sont que circonstanciels, simples
points de vue sur un objet unique. Il a lui-même mis en pratique une méthode pluri- et
transdisciplinaire. L’imaginaire est précisément ce lieu privilégié de l’« entre-savoirs ».

NOTES

(1) Par exemple les travaux du physicien Gérard Holton ou du philosophe Georges
Canguilhem.
(2) Phénomènes de relativité, de non-séparabilité, d’impossibilité d’observation, de
transformations aléatoires, théorie des catastrophes…
(3) Voir les travaux de la mécanique ondulatoire ou de la physique quantique.

Gilbert Durand - Philosophe et anthropologue de


l'imaginaire
Né en 1921, Gilbert Durand s’est engagé précocement dans la Résistance lors du
deuxième conflit mondial. Elève et disciple de Gaston Bachelard, agrégé de
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philosophie, il a fait sa carrière universitaire en dehors des cercles parisiens. Il a été
professeur émérite d’anthropologie culturelle et de sociologie à l’université Grenoble-
II. En 1966, avec Léon Cellier et Paul Deschamps, il participe à la création du réseau
des Centres de recherches sur l’imaginaire (Cri), qui compte aujourd’hui une
cinquantaine de laboratoires, dont les trois quarts à l’étranger. Fondateur des Cahiers
internationaux de symbolisme et des Cahiers de l’hermétisme, il a présidé
l’Association internationale de recherche sur l’imaginaire. G. Durand est la figure
fondatrice de l’école de Grenoble, un courant de recherche interdisciplinaire.
L’exercice de la transdisciplinarité s’exercera aussi à travers sa participation assidue
aux Rencontres d’Eranos, un creuset extra-académique fondé par Carl G. Jung, et
notamment aux colloques transdisciplinaires de Cordoue, Washington et Venise. Cet
esprit érudit et curieux, ne détestant pas la polémique, a parfois fait l’objet de vives
critiques en France, l’orthodoxie universitaire le percevant longtemps comme un
trouble-fête, voire un antipositiviste. Son œuvre est par contre largement diffusée et
admirée à l’échelle internationale.

Trois livres pour explorer l'imagination


• Les Structures anthropologiques de l’imaginaire
1960, rééd. Dunod, 2006.
Publié en 1960, l’ouvrage a été depuis réédité onze fois et traduit en plusieurs
langues. Il s’agit d’un projet ambitieux, alimenté par une grande érudition. La lecture
en est dense et parfois indigeste. L’auteur convoque aussi bien l’ethnologie, l’histoire
des religions ou l’épistémologie que la psychologie, la psychanalyse, l’éthologie ou la
neurophysiologie. Cet ouvrage, qui peut s’apparenter à un répertoire des symboles et
des mythes (l’index est utile à cet égard), vise en fait à modéliser les formes de
l’imaginaire, à étudier la syntaxe des images.
Gilbert Durand enracine d’abord l’imaginaire dans un système de réflexes sensori-
moteurs (une « réflexologie » inspirée notamment des travaux de l’école de
Leningrad). Trois grandes catégories de gestes produisent chacune des
condensations symboliques particulières.
• L’axe postural, lié aux réflexes de redressement et aux réflexes optiques, associe
des éléments de verticalité et d’horizontalité qui produisent des images symboliques
porteuses de contradiction, de séparation, d’autorité, d’ascension, de lumière et de
clarté. En émanent des symboles tels que les armes, le chef, l’œil du père, l’aile, le
soleil, l’azur, le feu…
• L’axe copulatif, dont le modèle de base est l’acte sexuel, regroupe les
mouvements rythmiques, la dimension cyclique, la réversibilité et la fécondité. Il
produit des symboles de répétition, de germination et de mûrissement, avec tous
leurs dérivés : l’arbre, le fruit, la roue, le feu-flamme, etc.
• L’axe digestif, correspondant aux réflexes de succion et de déglutition, engendre
des images symboliques liées à la nutrition, à la chaleur, à l’intimité, au centre, à la
nuit et, par extension, à la mère. Sur ces images viennent « consteller » les liquides,
dont en priorité l’eau, mais aussi la caverne, les calices, ou encore l’œuf, le berceau,
le lait, le miel, l’île, la tombe, etc.
A partir des polarités créées par ces trois éléments de base, G. Durand repère trois
grandes structures de classification isotopique des images, des constellations
génératrices de sens. Elles prédéterminent trois grands types de logiques
conceptuelles.
• La structure héroïque (ou « diaïrétique », aussi qualifiée de « schizomorphe ») est
basée sur les principes de séparation, de purification, d’exclusion, de contradiction.
Images du bestiaire, d’opposition nuit-jour, de chute, d’armes.
• La structure mystique (ou « antiphrasique ») a pour principes fondamentaux
l’analogie, la ressemblance, la fusion. Images d’inversion-emboîtement, image
maternelle ou d’intimité (tombe, coupe).
• Avec la structure dramatique (dite aussi « synthétique » ou « cyclique »), les
contradictions entrent dans une représentation diachronique non linéaire. Le schème
de base est le « lier » ou « relier ». Images de l’éternel retour, du progrès.
Enfin, G. Durand fait une division encore plus large et bipolaire entre un régime
diurne des images, dans lequel entrerait seulement la structure héroïque, et un
régime nocturne qui recouvrirait conjointement les structures mystique et dramatique.
• Le régime diurne est une démarche de la pensée fondée sur l’opposition, les
coupures, les antagonismes et les antithèses. Il se constitue à partir d’images de
lumière, d’ascension, de pureté. La pensée analytique, qui sépare les éléments entre
eux, appartient par exemple à ce régime diurne.
• Le régime nocturne est celui d’une pensée synthétique, qui valorise la
convergence et la fusion en jouant sur les analogies et les euphémisations des
différences. Il exalte, d’une part, la fécondation, le mûrissement, la multiplicité qui
sont à la base de la structure dramatique et, d’autre part, le recueillement, la
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descente, la chute, l’intimité, la cachette, l’ombre, le secret qui fondent la structure
mystique.

• L’Imagination symbolique
1964, rééd. Puf, 2003.
La culmination de la pensée rationnelle scientifique a engendré, selon G. Durand,
des réactions philosophiques diverses entre lesquelles il distingue les
herméneutiques « réductives » et les herméneutiques « instauratives ». Les théories
de Sigmund Freud, de Georges Dumézil et de Claude Lévi-Strauss ont rappelé
l’importance des images symboliques pour la vie mentale (à travers les problèmes
psychologiques dans le cas de S. Freud, à travers l’étude des autres cultures chez
les deux autres auteurs), mais ces herméneutiques sont réductives car elles
redécouvrent l’imagination symbolique pour mieux l’intégrer dans un système
intellectualiste rationalisant et, par conséquent, nier ainsi la polyvalence des
symboles. Leur méthode s’efforce de réduire le symbole au signe.
Par contre, les formes herméneutiques instauratives réintroduisent dans la pensée
occidentale la fonction transcendante des images symboliques. Il s’agit
essentiellement des œuvres de Carl G. Jung et de Gaston Bachelard, auxquelles on
peut d’ailleurs affilier les travaux de G. Durand lui-même, même s’il diverge sur
certains aspects de la pensée de ses prédécesseurs. En effet, s’il reprend à C.G.
Jung la notion d’archétype, c’est surtout à partir de la phénoménologie de G.
Bachelard que G. Durand va construire sa propre méthode. Notons que la pensée
d’Ernst Cassirer fait un lien entre ces deux types herméneutiques. L’auteur conclut
son propos en analysant les fonctions de l’imagination symbolique.

• Introduction à la mythodologie. Mythes et sociétés


Albin Michel, 1996.
Cet ouvrage, issu d’une série de conférences données par G. Durand, offre une
présentation de plusieurs concepts utilisés par l’auteur. Les mythes dominants se
réactualisent selon un rythme approximatif de trois générations. L’auteur se sert de la
métaphore du fleuve pour décrire les modèles d’évolution d’une mythologie dans le
temps culturel. Le concept de « bassin sémantique » compte ainsi six phases avec,
dans l’ordre chronologique :
• « le ruissellement » : divers courants se forment dans un milieu culturel donné,
souvent issus de résurgences d’un système imaginaire passé ou de conditions
historiques particulières (crises, découvertes) ;
• « le partage des eaux » :
les ruissellements se réunissent en courants, écoles, traditions ;
• « la confluence » : les courants reçoivent l’appui d’autorités en place ou
d’institutions ;
• « le nom du fleuve » : c’est la montée en puissance d’un mythe ;
: correspond à une stabilisation historique ; un personnage, réel ou fictif, incarne le
mythe ;
• « l’épuisement des deltas » : les matériaux sont soumis à une dissémination.
Quant à la notion de « topique socioculturelle de l’imaginaire », elle consiste à situer
en une figure (un diagramme) les éléments complexes d’un système, d’un ensemble
imaginaire couvrant une société à une époque donnée.

À LIRE AUSSI
• Le Décor mythique de La Chartreuse de Parme

1961, rééd. José Corti, 1989.


Dans cette analyse du chef-d’œuvre de Stendhal, point d’application littéraire à son
esthétique structurale, Gilbert Durand relie le romanesque du xixe siècle aux grands
mythes de l’Antiquité classique.

• Science de l’homme et tradition. « Le nouvel esprit anthropologique »


1975, rééd. Albin Michel, 1996.
Défiant les préjugés réductionnistes et scientistes, G. Durand en appelle à
« restaurer le panthéon pluriel de la psyché », et à l’émergence d’une nouvelle
science anthropologique qui ne se placerait plus sous le signe de Prométhée
(paradigme de la pensée « moderne » depuis René Descartes) mais désormais sous
celui d’Hermès (la communication, le sens du langage, l’échange).

• L’Imaginaire. Essai sur les sciences et la philosophie de l’image


Hatier, 1994.
Dans une collection de poche, et sous une forme accessible, ce petit volume a

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l’avantage d’offrir une vision synthétique des « sciences de l’imaginaire », ainsi
qu’une présentation claire des concepts et des idées développés par G. Durand.
• Champs de l’imaginaire

Textes réunis par Danièle Chauvin, Ellug, 1996.


Ce recueil de 14 articles, publiés de 1953 à 1996, illustre notamment l’éclectisme de
l’auteur et la variété de ses champs d’investigation. Il contient également une
bibliographie exhaustive de ses publications ainsi qu’un index.

Une oeuvre en marge


Il n’y a que peu de temps que l’imaginaire fait l’objet d’une interrogation
systématique approfondie. Sur cette question, les sciences humaines (philosophie,
psychanalyse, critique littéraire, anthropologie culturelle, sociologie des médias) ont
proposé des points de vue, des méthodes et des contributions souvent hétéroclites,
partielles, et sans souci de pluridisciplinarité.

Gilbert Durand a ainsi le mérite d’avoir commencé à dégager un point de vue


synthétique sur l’imaginaire, dans le cadre d’une anthropologie générale. Il a montré
la complexité de la texture des images et fourni des clefs pour comprendre leurs
logiques d’organisation. Par ailleurs, il n’a pas hésité à ouvrir son œuvre à bien des
influences et des traditions (ces dernières années, il intègre par exemple l’héritage
extrême-oriental (1)), à confronter et enrichir sa conception de l’imaginaire aux
apports des astrophysiciens, des neurobiologistes ou des éthologues. Franc-tireur et
donc en marge de l’université, G. Durand est à replacer dans la lignée de ces
chercheurs originaux et fructueux que furent Mircea Eliade, Gaston Bachelard, Roger
Bastide ou Henri Corbin.

La plupart des ouvrages de G. Durand sont exigeants, parfois difficiles d’accès.


L’auteur convoque de nombreuses références, développe une pensée foisonnante
qui s’exprime souvent sous la forme d’une prose baroque. On est loin de l’écriture de
G. Bachelard, philosophe à la prose poétique, qui étudie les images en analysant
comment celles-ci s’associent dans sa propre rêverie. G. Durand a été soucieux de
dégager une troisième voie entre le structuralisme rigoriste de Claude Lévi-Strauss et
l’herméneutique de Paul Ricœur. Sa phénoménologie s’annonce soucieuse de
restaurer la primauté du sensible à travers la perception. Mais, issu de la philosophie,
G. Durand privilégie l’érudition et la théorie à la pratique du terrain. Il semble
représentatif en cela d’une certaine tradition anthropologique française.

La mythocritique de l’école de Grenoble, destinée à s’appliquer à l’ensemble des


œuvres artistiques et des productions culturelles, s’est finalement essentiellement
exercée sur des œuvres littéraires. Or cette « captation » de l’œuvre a sans doute
été responsable de certaines lectures superficielles, les littéraires utilisant parfois les
ouvrages de G. Durand comme de simples machines à décoder les textes.

Par ailleurs, ce dernier fait lui-même curieusement très peu référence au cinéma, à
la télévision, à la vidéo qui sont pourtant devenus les formes modernes de
l’imaginaire de masse. Conservatisme ? Méfiance ? Il est significatif que ses grandes
références artistiques s’arrêtent pour la plupart au xixe siècle. Certains de ses
continuateurs ont par contre cherché à enrichir les structures anthropologiques de
l’imaginaire en les appliquant par exemple aux arts plastiques non figuratifs, ou se
sont intéressés aux médias modernes et à l’image technique.

NOTE

(1) G. Durand et C. Sun, Mythes, thèmes et variations, Desclée de Brouwer, 2000.


Jérôme Souty

Mots-clés :

imaginaire rationalité

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COMMENTAIRES

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la dominante réflexe de la gestation


Francine Prévost - le 06/03/2014

Depuis des années, je me dis que si Gilbert Durand avait été une femme, il aurait ajouté une autre
dominante réflexe aux dominantes posturale , digestive et copulative dont il a fait le centre de son livre "Les
structures anthropologiques de l'imaginaire, soit, la dominante réflexe de la gestation. Les hommes ne la
possèdent pas, mais nous sommes tous nés d'une femme, tous issus du processus de la gestation et tous
porteurs des schèmes, ainsi que des images, symboles et structures logiques qui lui sont propres, ne
pensez-vous pas?

merci pour l'article


Beatriz - le 03/07/2013

merci à vous pour nous offrir un très bon outil pour approcher à la difficile et riche oeuvre de M. Durand
b

Réponse
Perrier - le 13/01/2013

La continuation des travaux de G. Durand dans une sociologie du quotidien et de l'imaginaire proposent en
effet des séminaire et des colloques pour l'écriture entre autre du cahiers Européen de l'imaginaire, surtout
à Montpellier, à l'université Paul Valéry. Aussi en Italie, au Portugal et au Brésil.

tradition et imaginaire
alranq - le 28/07/2012

Je salue ces recherches et souhaiterais savoir si des colloques ou séminaires sont programmés pour les
mois à venir.
Merci.

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