CHRONIQUE
DE L’ARCHÉOLOGIE WALLONNE
CHRONIQUE DE L'ARCHÉOLOGIE WALLONNE
La revue annuelle CHRONIQUE DE L'ARCHÉOLOGIE WALLONNE est une publication du
DÉPARTEMENT DU PATRIMOINE (SPW-Éditions/DGO4).
COMITÉ DE RÉDACTION
Gaëlle Dumont (Département du patrimoine, Direction de l'archéologie) avec la collaboration d'Hélène Remy
COORDINATION ÉDITORIALE
Liliane Henderickx (Département du patrimoine)
ÉDITEUR RESPONSABLE
Pierre Paquet, Inspecteur général f.f. (Département du patrimoine)
VENTE ET DIFFUSION
Institut du Patrimoine wallon – Service Publications
Rue du Lombard, 79 – B-5000 Namur - T. : +32(0)81 23 07 03 – F. : +32(0)81 23 18 90
publication@idpw.be – www.idpw.be
Possibilité également d'acquérir les ouvrages à la boutique de I'IPW : Résidence du Grand Cortil, place des Célestines, 21
(derrière I'hôtel Ibis), B-5000 Namur – ouverture du lundi au vendredi de 9h à 12h.
Pour tout renseignement complémentaire : +32(0)81 65 41 54
IMPRESSION
Bietlot, Gilly
CONCEPTION GRAPHIQUE
Fabien Cornélusse, avec la collaboration de Ken Dethier et Aude Van Driessche (Département du patrimoine, Direction
de l'archéologie)
COUVERTURE
Binche/Buvrinnes : le moteur droit du Messerschmitt Bf 110 G après nettoyage (photo N. Clinaz).
DIRECTION DE L'ARCHÉOLOGIE
Directeur f.f. : Alain Guillot-Pingue
Rue des Brigades d'Irlande, 1
B-5100 Jambes
Secrétariat :
T. : +32(0)81 33 24 75 – F. : +32(0)81 33 24 79
E-mail : darc.dpat.dgo4@spw.wallonie.be
Direction du Hainaut I
Responsable : Martine Soumoy
Place du Béguinage, 16
B-7000 Mons
T. : +32(0)65 32 80 94 – F. : +32(0)65 32 80 22
E-mail : martine.soumoy@spw.wallonie.be
Direction de Liège I
Responsable : Jean-Marc Léotard
Avenue des Tilleuls, 62
B-4000 Liège
T. : +32(0)4 229 97 11 – F. : +32(0)4 229 97 59
E-mail : jeanmarc.leotard@spw.wallonie.be
Direction du Luxembourg
Responsable : Denis Henrotay
Rue des Martyrs, 22
B-6700 Arlon
T. : +32(0)63 23 05 43 – F. : +32(0)63 23 05 45
E-mail : denis.henrotay@spw.wallonie.be
Direction de Namur
Responsable : Christian Frébutte
Route Merveilleuse, 23
B-5000 Namur
T. : +32(0)81 25 02 70 – F. : +32(0)81 25 02 71
E-mail : christian.frebutte@spw.wallonie.be
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FLANDRE BRUXELLES-
CAPITALE
Brabant wallon
WALLONIE
Hainaut
Namur
Liège
Luxembourg
0 50 km
Avant-propos
Chère Lectrice, cher Lecteur,
Comme vous allez le lire, les activités de la Direction de l'archéologie et des Services de
l'archéologie des Directions extérieures de la DGO4 ont été nombreuses et de grand intérêt au
cours de l'année 2015, que ce soit en matière d'archéologie préventive, d'études, de valorisation du
patrimoine archéologique et de publications.
Le nombre et la valeur des articles de cette Chronique de l'Archéologie wallonne, activités de 2015,
témoignent de la qualité de nos chercheurs.
Les partenaires institutionnels et associatifs ont aussi contribué à compléter la recherche, à nourrir
la connaissance, à révéler la diversité et la richesse du patrimoine archéologique de la Wallonie.
Outre les activités scientifiques, développées dans le présent ouvrage, ce sont aussi des
préoccupations administratives et de sensibilisation qui caractérisent l'archéologie au Service
public de Wallonie. Ces trois orientations majeures sont renforcées par un maximum de partenariats
transversaux et d'interdisciplinarité.
Nivelles, vue générale vers l'ouest de la fouille sur le site de l'église Saint-Jacques (photo F. Heller,
Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
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Beauvechain
L'Écluse
Nodebais
Jodoigne
La Hulpe Grez-Doiceau
Waterloo Rixensart
Énines
Bierghes Dion-Valmont Orp-Jauche
Rebecq Tubize Braine-l'Alleud Ottignies Chaumont-Gistoux Jauche
Ottignies-
Louvain-la-Neuve
Nivelles
Villers-la-Ville
Marbais
Carte administrative des communes de la province du Brabant wallon visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée
Éditorial
Qui dit Chronique, dit recueil de faits historiques, rapportés dans l'ordre de leur succession ou ensemble des nouvelles
qui circulent ou encore article […] qui traite régulièrement d'un thème particulier (Le Petit Robert, 1996). En repre-
nant ces trois définitions dans le sens inverse, celle de l'archéologie wallonne concerne effectivement un sujet précis,
celui d'une discipline et de ses résultats dans une sphère géographique déterminée. Quant aux informations qui sont
divulguées, autant qu'elles le soient par les personnes à la source plutôt qu'à travers la presse uniquement. Enfin, si
l'ouvrage est bien un recueil (à conserver jalousement !), il concerne des témoins physiques de l'histoire avant tout
locale, présentés sur base d'une ligne du temps, classés selon les périodes auxquelles ils appartiennent et non… la
succession des actions sur terrain.
Fort heureusement pour les archéologues, et le public de surcroît, si elle privilégie les opérations d'une année en
particulier, la Chronique de l'Archéologie wallonne intègre également des interventions menées antérieurement. Les
raisons en sont multiples mais les deux principales sont le « saute-chantiers » (passage rapide d'une fouille à une
autre) et le temps imparti pour l'exploitation des données dans la foulée de la clôture des opérations. Le Brabant
wallon ne déroge pas à ce constat ; quelques opérations anciennes parfois reléguées dans un tiroir, comme celle de
l'église Saint-Jacques à Nivelles, ou menées dans un autre cadre refont surface au plus grand soulagement de tous,
public, aménageur, communauté scientifique, administration et équipes archéologiques (même si certaines se résu-
ment à un seul individu) bien évidemment.
Nous référant à la première formulation reprise ci-desssus, tout en respectant scrupuleusement la notion de faits
historiques et non de faits, actions, sous-entendu opérations sur terrain, nous constatons que les sujets abordés pour
la province brabançonne dans la présente publication concernent essentiellement des sites occupés dans la durée,
avec ou sans interruption, dans les centres anciens de communes telles que Jodoigne, La Hulpe et Nivelles, mais égale-
ment dans des contextes ruraux comme à Beauvechain, Chaumont-Gistoux, Tubize et Orp-Jauche ou des complexes
abbatiaux, a fortiori dans l'un des sites phares qu'est celui de Villers-la-Ville. Ceux ayant trait à une période unique
sont moins nombreux, citons le champ de bataille entourant la ferme d'Hougoumont à Braine-l'Alleud.
Aussi limitée soit-elle, une intervention peut apporter son lot de surprises ou tout au moins des données complé-
tant assurément celles acquises ou susceptibles d'être exploitées dans le cadre d'un projet ; tel fut le cas au moins à
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Inventaire de pierres suite à l'effondrement des arcades de la pharmacie à l'abbaye de Villers-la-Ville (2013).
Beauvechain/L'Écluse (rue de la Cabourse, avec une occupation protohistorique de même qu'un parcellaire médiéval
et quatre sépultures modernes, trois animales et une autre qui pose question), à Jodoigne (Institut de la Providence,
l'enceinte), La Hulpe (église Saint-Nicolas) et Nivelles (habitation particulière à la rue de Mons, extension de l'Insti-
tut du Sacré-Cœur, mise au jour non seulement de l'église Saint-Jacques mais aussi d'un fossé qui lui est antérieur).
Un rien de terrain est un tout archéologique ; il y a toujours une explication. En effet, si certains suivis et évaluations
se sont révélés négatifs par absence de structures archéologiques, les stratigraphies analysées ont par contre pu appor-
ter des réponses, des confirmations, et/ou procurer des indices pédologiques utiles pour de futures interventions,
comme à Orp-Jauche/Énines (rue Bois des Fossés, proche du site Michelsberg du « Chêne au Raux »), Waterloo
(ancien site du contrôle technique) ou Ottignies – Louvain-la-Neuve (rue de la Baraque).
Signalons que, grâce à une sensibilisation le plus en amont possible, les aménageurs acceptent peu à peu une
implication dans les opérations archéologiques, se traduisant généralement par une prise en charge financière des
terrassements ainsi que par un accès plus aisé et mieux programmé aux parcelles ; tel fut le cas pour un chantier à
Tubize (lotissement au hameau de Stéhou). Certes cette démarche constitue une participation très partielle dans les
coûts des opérations archéologiques mais elle contribue à la mise en place d'un principe d'aménageur-payeur.
Dans le cadre de restaurations ou affectations de biens, comme à Beauvechain (cure de Nodebais), Jodoigne (section
de l'enceinte urbaine à l'Institut de la Providence) et Nivelles (hôtel Rifflart à la rue de Soignies), des échanges antici-
patifs ont été tout aussi profitables.
Il est cependant regrettable que, tout en étant prévenus, certains aménageurs peinent, même in extremis, à avertir les
archéologues ; les terrassements entrepris sur l'ancien site du contrôle technique de Waterloo en sont un triste exemple.
Bien que s'intéressant au passé, l'archéologie ne demeure toutefois pas à la traîne lorsque les nouvelles techniques/
technologies font preuve d'une évidente efficacité. Ainsi, l'usage du scanner 3D fut d'emblée envisagé pour le relevé
des arcades de l'abbaye de Villers-la-Ville, détruites accidentellement, et à Jodoigne où une section de l'enceinte
urbaine fut dégagée suite à des démolitions.
La prospection géophysique est également une alternative à l'évaluation classique, mécanique et intrusive, faisant
usage d'engins de terrassement, pour apprécier un potentiel archéologique. Les enregistrements opérés à Braine-
l'Alleud aux abords de la ferme d'Hougoumont ont ainsi permis à l'équipe internationale, dans laquelle était intégré
le Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4 / Département du patrimoine), de
déterminer au mieux les zones à exploiter, les secteurs dans lesquels des sondages devaient être ouverts. Signalons
qu'une autre option a également été adoptée sur ce site, à savoir l'usage d'un détecteur à métaux, dans les limites
strictes du cadre légal (CWATUP, art. 244).
11
Brabant wallon
Si pour un site militaire comme celui du champ de bataille de Waterloo, la combinaison des divers résultats auto-
rise parfois une révision partielle des faits, parfois contradictoires, relatés dans la littérature, des vérifications peuvent
également être utiles pour d'autres chantiers ou thèmes de recherche. Ainsi, trois fosses observées sur un site proto-
historique mis au jour en 2012-2013 à Grez-Doiceau/Gastuche avaient été interprétées comme des trous d'obus. Or,
l'étude du matériel recueilli lors des fouilles dans d'autres structures sema le doute… Et si ces structures étaient des
témoins d'une extraction de minerai de fer ? Un retour sur chantier s'avéra porteur.
En marge des missions menées par la Direction de l'archéologie, des études du bâti sont parfois réalisées sur demande
de la Direction de la restauration afin de mieux comprendre un bien (son évolution, ses caractéristiques, ses faiblesses…)
et valider des options retenues tant techniques qu'esthétiques ; le château de Merode à Rixensart dont le portique de
l'aile septentrionale fut étudié par une équipe des Musées royaux d'Art et d'Histoire en est un exemple.
Enfin, le scientifique est parfois amené à dépasser largement les résultats bruts de terrain en se posant des ques-
tions finalement élémentaires tels le pourquoi et le comment. Une fois n'est pas coutume d'emprunter ce chemin, ce
champ d'analyses, pour un édifice « inédit » du 12e siècle mis au jour à Villers-la-Ville au début de l'année 2014, sur
la colline surplombant le cœur de l'abbaye. Qu'est-ce qui a motivé, guidé, le choix de son implantation ?
Pour clôturer cet éditorial, je dirais que les publications, comme la Chronique, sont un vecteur non négligeable
pour toucher le public mais d'autres moyens peuvent être mis à profit. Pour preuve, à Tubize (lotissement à Stéhou),
les autorités communales ont souhaité que les acquis scientifiques soient diffusés auprès des riverains et des citoyens
à travers un parcours archéologique (panneaux). Si la presse prend le dessus, souvent lors d'ouvertures de chantiers
majeurs ou de découvertes, jouant sur le sensationnel et l'information de proximité, elle peut parfois engendrer des
incompréhensions ou déclencher des situations délicates. Pour la ferme d'Hougoumont par exemple, les médias ont
largement contribué à une (dés)information relative au corps du soldat, découvert en 2012 au terme d'une évalua-
tion, et à son devenir ; lors de la réception organisée pour l'inauguration du site restauré, tout en manifestant son
intérêt pour les recherches en cours, le prince de Galles fit remarquer en aparté qu'il avait eu écho des débats entou-
rant le squelette et sa présentation controversée au public dans une vitrine du mémorial.
Une fois de plus mes remerciements s'adressent à tous mes collègues, tant en Brabant wallon qu'au sein de la Direc-
tion de l'archéologie et du Département du patrimoine dans son ensemble, de la Direction de la géomatique, ainsi
qu'à tous les prestataires extérieurs, partenaires scientifiques ou bénévoles, professionnels, stagiaires ou passionnés,
administrations régionales et communales, responsables politiques, aménageurs, architectes… qui ont accepté de
nous aider, de collaborer et de prendre nos desiderata en considération, dans un esprit de complémentarité, de
gestion raisonnée des intérêts et de respect mutuel.
Didier Willems
Braine-l'Alleud, ferme d'Hougoumont : visite de la presse sur le chantier ouvert dans le cadre du projet Waterloo Uncovered auquel
participe le Service de l'archéologie de la Direction extérieure du Brabant wallon.
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MOYEN ÂGE
Nivelles/Nivelles : rue de Mons,
ancienne église du Grand Saint-Jacques
Phase 1
sont retrouvées à l'emplacement du mur
3 N
détruit du collatéral nord et dans l'angle
a
sud-ouest du chœur.
F162
Nous avons considéré une tombe
5
F197 F146 (F191) comme fondatrice de par son
F191 emplacement quasiment au centre de
Phase 2
2 l'entrée du chœur et parce qu'elle est
1 creusée dans le limon orange naturel
et non dans le remblai de construc-
tion comme la majorité des inhuma-
4
tions. Le fait qu'elle soit recoupée par
b
d'autres sépultures atteste aussi son
antériorité.
Quelques rares sépultures se trouvent
à l'extérieur, dans la partie méridionale,
Maçonnerie de part et d'autre de l'entrée.
Emplacement de la tour
Contrairement aux idées couramment
Fosse
Sépulture
admises pour les tombes médiévales
Zone d’inhumation c chrétiennes, certains défunts sont, ici,
Fossé reconstitué encore enterrés avec des offrandes : des
Fond du fossé dégagé en fouille 0 10 m monnaies retrouvées autour du corps,
a, b et c Coupes dans le fossé
voire sur une épaule ou encore dans une
probable bourse serrée dans la main
Nivelles, église du Grand Saint-Jacques : plan général.
(sous la fesse gauche).
Toutes les fosses à ossements humains ont été considé- Un large fossé évasé à fond plat, flanqué à l'est d'une
rées comme des tombes, qu'il s'agisse de restes in situ levée de terre (c), a été dégagé sous le mur oriental de
ou clairement rassemblés dans une fosse secondaire. l'église. Il a été reconnu sur une longueur de 45 m et
Ce ne sont pas moins de 184 sépultures à inhumation présente un changement d'orientation : la partie méri-
qui ont été fouillées dans et autour de l'édifice. dionale suit une orientation sud-est à nord-ouest sur
Toutes les sépultures sont orientées selon un axe 25 m et vire ensuite vers le nord pour les 20 m suivants.
parallèle aux murs gouttereaux de l'édifice. Le corps Nous n'avons pu le suivre plus avant car il continue
est placé en décubitus dorsal, la tête à l'ouest, les pieds hors de l'emprise des travaux au nord et sous la rue de
à l'est, les bras le long du corps, voire croisés sur le Mons au sud.
bas-ventre ou encore repliés croisés sur la poitrine, les Son profil présente une pente d'équilibre, ce qui
mains sur les épaules. Seules deux sépultures à l'exté- permet d'éviter qu'il ne se comble naturellement. Sa
rieur de l'église présentent une orientation différente : largeur, pour sa partie la plus profonde située à l'est, est
sud-ouest/nord-est, tête vers le sud-ouest. de 7,80 m pour une profondeur maximum conservée
Le défunt est inhumé soit en pleine terre soit dans de 2,14 m ; sa largeur totale avoisine les 9,80 m si l'on
un cercueil. Dans le premier cas, il est enveloppé dans prend en compte une partie moins profonde située sur
un linceul, comme l'indique l'emplacement d'épingles son flanc occidental.
en alliage cuivreux retrouvées sur et autour du corps. Les dimensions du fossé le situent plus dans
Dans le second cas, seuls sont conservés les clous en la catégorie d'un fossé défensif que d'un simple
fer d'assemblage du cercueil et parfois des restes de fossé de limite d'emprise. Ceci étant, comme nous
bois. n'avons reconnu qu'une longueur équivalente à
Les sépultures sont concentrées principalement quatre fois sa largeur, il est prématuré de vouloir
dans la nef centrale et dans le chœur. Celles qui le relier au complexe de l'abbaye Sainte-Gertrude.
recoupent les murs disparus ou qui occupent les Tout au plus pouvons-nous dire qu'il a ici un axe
nouveaux espaces montrent une continuité dans les quasiment nord/sud et se dirige vers la Thisnes qui
inhumations au gré des transformations de l'église. coule en contrebas au nord. En outre, le parcellaire
Cependant, aucune ne se trouve dans l'extension en semble en avoir partiellement fossilisé le tracé vers
abside du chœur. Deux tombes d'individus juvéniles le nord.
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ouest est
1m
a b c d e f g
Profil du fossé restitué à partir des coupes : a. Sol en place ; b. Couches d'humus ; c. Levée de terre ; d. Comblement du fossé original ;
e. Dépôts laminés attestant la présence d'eau ; f. Comblement du fossé secondaire ; g. Interfaces de creusement.
Deux creusements (g) sont visibles dans les coupes provenant d'échantillons à courte durée de vie telles les
du grand fossé : le premier, large et évasé, entaille le graines de sureau, il est plus probable que ce dernier
limon orange en place (a) ; le deuxième, plus étroit, le remplissage, mis en place alors que le fossé est encore
recoupe après une phase de dépôts de ruissellement utilisé, date d'entre 992 et 1156.
(e). Enfin, une couche d'humus épaisse (b) vient sceller L'église quant à elle est construite après le nivel-
l'ensemble. Toute cette séquence est ensuite recoupée lement du fossé défensif. Son chœur recoupe une
par le mur sud de fondation de la tour d'angle de l'église fosse (F162) contenant des tessons de céramique du
du Grand Saint-Jacques et par son mur pignon ouest. 11e siècle, et recouvre une fosse (F146) contenant de
la céramique des 12e-13e siècles. Enfin, sous la nef se
Les datations trouve une dernière fosse contenant des vases globu-
laires du 13e siècle.
La couche de fond du fossé (d) a livré deux tessons En ce qui concerne les sépultures, deux d'entre elles
de céramique : un de faïence bleue (probablement ont été choisies pour une datation au 14C. Elles ont été
intrusif) et un autre de bouteille en céramique grise sélectionnées par rapport à leur emplacement et/ou
à fond épais et lèvre de Huy, datée de la transition recoupement et déterminées comme étant parmi les
Mérovingien-Carolingien (7e-8e siècles de notre ère ; sépultures les plus anciennes de l'église.
communication personnelle de Sylvie de Longueville). La tombe F197, située au nord dans la nef, à l'entrée
S'il est évident que ce tesson, rejeté dans un fossé après du chœur, a été datée d'entre 1273 et 1397 AD (cali-
son utilisation, ne donne au mieux qu'un terminus post brée, 95,4 % de probabilité). La sépulture F191, placée
quem pour la datation de celui-ci au 8e siècle, il est clair dans l'entrée du chœur, au centre, remonte entre 1257
également que l'on ne peut dater un remplissage sur et 1394 AD (calibrée, à 95,4 % de probabilité) avec un
base d'un seul tesson. pic à 1257-1324 AD (calibrée, à 62,9 % de probabilité),
La première couche de remplissage du recreuse- ce qui renforce l'hypothèse d'une tombe fondatrice.
ment du fossé (f) a fait l'objet de deux prélèvements,
effectués dans le fond au centre de celui-ci. Les prélè- Conclusion
vements ont été tamisés et deux échantillons choisis
pour datation au 14C : il s'agit de graines de sureau Les fouilles de sauvetage effectuées sur le site de la rue
(NIV8RMONSF250-prel #1b) et d'un os de faune de Mons ont permis de mettre au jour une des églises
(NIVRMONSF250-prel #1). disparues de Nivelles, celle dédiée à saint Jacques le
Les graines de sureau donnent une fourchette de Majeur, saint patron de Compostelle. Étape wallonne
992-1156 AD (calibrée, 95,4 % de probabilité) tandis sur la Via Gallia Belgica du pèlerinage de Saint-
que la datation faite sur os de faune dans cette même Jacques-de-Compostelle, attestée dès le 13e siècle, elle
couche et au même niveau donne, elle, 896-1138 AD avait complètement disparu au début du 19e siècle, sauf
(calibrée, 95,4 % de probabilité) mais surtout pour une dernière chapelle qui fut détruite au début du
940-1138 AD (calibrée, 87,8 % de probabilité). En siècle dernier. Elle était le cœur de la paroisse du même
conclusion, comme nous favorisons les datations nom et une des onze églises de Nivelles.
16
La cave, vestige d'un bâtiment érigé vers le milieu du 12e siècle sur la colline de la ferme. Au second plan, le pignon sud du réfectoire
de l'abbaye Villers III (1197-1796). Vue vers le nord.
à mars 2014 durant les travaux d'aménagement d'un la conservation de nombreux produits. D'une manière
chemin piétonnier dans le flanc oriental de la colline générale on peut dire que la présence d'une cave fait
de la ferme (De Waele et al., 2015a). Une cave orien- suite à un choix, planifié en fonction de besoins spéci-
tée en long nord/sud, dotée au nord d'une imposante fiques.
descente de cave en hors-œuvre, a pu être partielle- En forme de rectangle très allongé (cave tunnel), la
ment fouillée. L'examen du remblai de comblement cave de la colline de la ferme offrait une superficie
indique que la cave est restée ouverte un certain temps intérieure de 35 m2 (8,95 m × 3,95 m). Le sol était
après son abandon et qu'elle a servi de dépotoir. en terre battue. Aucun aménagement intérieur parti-
On ne soupçonnait pas la présence d'un bâtiment en culier n'a été observé, si ce n'est un muret d'empat-
cet endroit car cette localisation ne s'inscrit pas dans le tement au pied du long mur oriental, non liaisonné
paysage bâti de l'abbaye Villers III (1197-1796) dont les avec celui-ci, qui servait peut-être au rangement de
ruines se visitent aujourd'hui. certaines marchandises. Aucune trace de mobilier en
place – grands pots à provision par exemple – n'a été
Au-delà du fait archéologique : relevée.
l'interprétation du bâtiment qui s'élevait Un mur, supportant le plancher du rez-de-
au-dessus de la cave chaussée, divisait la cave dans sa longueur en deux
espaces inégaux ; son extrémité nord, distante de
La fonction, le rôle et l'utilisation du bâtiment qui s'éle- 1,40 m de la marche inférieure de la descente de
vait au-dessus de la cave peuvent se déduire à partir cave, ménageait un couloir de distribution à l'en-
de la descente de cave, de la chronologie haute et de la trée et sa position décentrée, davantage proche du
localisation du bâtiment. mur ouest de la cave (distance : 1,10 m), facilitait la
manutention de produits encombrants vers l'espace
La cave : présence, caractères et aménagements oriental.
Pour conclure, il apparaît bien que les constructeurs
Comme espace d'entreposage souterrain, une cave jugèrent indispensable de pouvoir disposer d'une cave,
garantit de bonnes conditions de fraîcheur, d'hygromé- et ce malgré le surcroît des travaux et le surcoût des
trie et de température, voire d'obscurité, nécessaires à matériaux.
18
La descente de cave : élément signifiant de la cave l'abbaye définitive Villers III (1197-1796). C'est l'abbé
Charles (1197-1209) qui planifia le développement de
La descente de cave est sans doute l'un des éléments les Villers II en Villers III et mit en chantier la construc-
plus signifiants qui permettent de cerner au mieux la tion de plusieurs bâtiments de la future grande abbaye
fonction voire l'importance de la cave. Presque monu- (Coomans, 2000, p. 42, 59, 61-62, 100-103, 216, 292,
mentale, entièrement construite en hors-œuvre, possé- 382, 545, 548-549 et 583).
dant des marches confortables et débouchant sur une
porte large et haute, elle nous renseigne sur l'utilisation La localisation stratégique du bâtiment : un choix
de la cave mais aussi – en partie du moins – sur celle du
bâtiment. En effet, elle permettait une communication La localisation est le quatrième et dernier des facteurs
aisée avec l'extérieur, un va-et-vient direct sans passer que nous avons distingués en vue d'interpréter le
par l'intérieur du bâtiment, une utilisation fréquente et bâtiment. En effet, le choix délibéré de son emplace-
régulière, ainsi que la manutention de marchandises de ment sur la colline de la ferme contribue largement à
grand gabarit. déterminer quels furent sa fonction, son utilisation et
Située à l'extérieur du bâtiment, cette descente de surtout son rôle dans le contexte géopolitique local à
cave conférait à la cave une destination bien entendu l'époque de Villers II.
différente de celle d'une cave desservie par un esca- Il est manifeste que le bâtiment bénéficiait d'une
lier intérieur. En relation directe et spécifique avec implantation éminemment stratégique : se trouvant
des activités extérieures, la cave de notre bâtiment hors zones inondables, il était situé en bas de versant
constituait une unité architecturale à part entière. On d'un promontoire terminant une avancée de plateau,
peut donc supposer que sa fonction de stockage devait ce qui permettait à ses occupants d'être rapidement
participer d'une économie plus large que
celle du simple cadre domestique. En
d'autres termes, les marchandises entre-
posées n'étaient sans doute pas réser-
vées à l'usage exclusif des occupants du
bâtiment, mais ceux-ci en assuraient très
probablement la garde et la gestion. En
outre, il est vraisemblable que d'autres
locaux du bâtiment étaient destinés au
stockage.
– la configuration paysagère locale comprend une lés d'un châtelet qui contrôlait la route sud/nord déjà
rivière (sous le contrôle du seigneur de Mellery ?), évoquée plus haut et que cet ouvrage fortifié avait
un moulin avec ses bâtiments annexes (appartenant lui-même été bâti sur une route plus ancienne encore
au seigneur de Mellery), ainsi qu'une route de liaison (De Waele, Heller & Van Driessche, 2015). Cela
directe avec Mellery ; signifie que, dès 1147, un tronçon de cette route de
– pour conclure, le fond de vallée (route, moulin vallée fut annexé par les moines et, plus globalement,
et rivière) ne leur appartenant pas encore, les moines que l'abbaye fut implantée en un lieu déjà occupé et
érigent le bâtiment sur la colline pour servir leur aménagé, qui possédait par conséquent sa propre
dessein d'appropriation du site : tout en surveillant de histoire.
près les activités dans la vallée, ils manifestent ainsi
clairement leur intention de s'établir définitivement et Géomorphologie et réseau routier
d'agrandir leur domaine.
L'abbaye se situe en bordure septentrionale des bas-
Économie et géopolitique : les sources archéologiques plateaux de Moyenne Belgique, au début des vallonne-
ments de la Dyle formant la transition vers les plaines
Des fouilles de sauvetage menées en 2003 au pied du de Flandre. On remarquera que le village de Villers, de
pignon nord du grand moulin ont révélé la présence fondation plus ancienne que l'abbaye, est implanté en
de structures plus anciennes, notamment un bâtiment amont de celle-ci, aux premières incisions des vallon-
dont le sol était constitué de dalles de schiste ainsi nements ; il occupe en outre une position intéressante
qu'une aire de circulation extérieure également dallée sur la rivière Thyle puisqu'il s'est développé autour de
(Heller & De Waele, 2004). Rappelons que la construc- deux passages à gué, l'un permettant de franchir la
tion du moulin abbatial remonterait aux années 1197- rivière, l'autre l'un de ses affluents. Rappelons, d'autre
1200 (selon Coomans, 2000, p. 501). part, que Villers se trouvait aux confins de deux terri-
Des fouilles conduites en 2011 et 2012 à la porte toires politiques, dans une enclave du comté de Namur
de la ferme, à moins de 150 m au sud de la cave, en duché de Brabant (Coomans, 2000, p. 64-68 ; Despy,
ont livré les vestiges d'un bâtiment à pans de bois 1957, p. 12-14).
pouvant être identifié avec la porterie
de l'abbaye Villers II (De Waele, Heller
& Van Driessche, 2013 ; De Waele &
Heller, 2014a ; 2014b). Cette porterie
primitive était établie sur le tronçon
d'enceinte qui barrait complètement la
vallée d'est en ouest. Aucune trace de
cette première enceinte n'a été retrou-
vée, mais elle consistait vraisemblable-
ment en une palissade en bois simple-
ment percée d'une porte ; la muraille en
pierre, visible encore aujourd'hui, fut
construite plus tard sur le même tracé.
Il semble bien que le bâtiment de cette
porterie et celui sur cave de la colline
participaient d'un même programme
d'occupation spatiale et d'aménage-
ment du site de Villers II : situés tous
deux sur la rive gauche de la rivière et
en lien direct avec la colline de la ferme,
ils étaient implantés l'un à l'extrémité
sud du site, l'autre à son extrémité
nord. D'autre part, les fouilles à la porte
de la ferme apportèrent la preuve d'une Restitution du croisement de la route est/ouest (Gembloux-Nivelles) avec la
occupation pré-abbatiale du site. Elles route sud/nord de la vallée de la Thyle, avant l'implantation de l'abbaye (fond :
révélèrent en effet que la porterie de Relief de la Wallonie – Modèle numérique de Terrain [MNT] 2013-2014 [http://
l'abbaye Villers II – le bâtiment à pans geoportail.wallonie.be, mise à jour 17 février 2015], infographie A. Van Driessche,
Serv. archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
de bois – fut édifiée sur les restes nive-
22
Les forêts se rencontraient principalement au nord 1153 peut être considéré comme une attestation pour
de Villers, car au sud les terres fertiles des plateaux ainsi dire officielle des « débuts délicats de la nouvelle
limoneux étaient majoritairement défrichées. Un plantation » – pour reprendre les termes de l'acte – qui
massif forestier continu recouvrait vraisemblable- furent sans nul doute engendrés par une vive opposi-
ment les vallonnements de la Dyle, les reliefs accusés tion autochtone.
et les sols sableux étant peu propices aux cultures. Sur le plan de la configuration spatiale de Villers II,
L'abbaye s'est installée à la lisière de ce massif forestier le bâtiment sur cave apporte très opportunément des
dont elle pouvait tirer parti des multiples ressources : informations complémentaires à la découverte de
exploitation du bois de chauffage, de menuiserie et de la porterie de cette abbaye provisoire à la porte de la
construction, apiculture, écobuage, écorçage, panage, ferme. Si la porte, en bord de rivière, sur la route de la
etc. vallée, perçait une palissade en bois au sud et marquait
Deux routes se croisaient sur le site même de la l'entrée dans le domaine abbatial, le bâtiment sur la
future abbaye : la principale reliait Gembloux et colline, quant à lui, correspondait à sa limite extrême
Nivelles suivant un axe est/ouest transversal aux au nord.
vallées, la seconde longeait la Thyle en fond de vallée, Le bâtiment sur la colline de la ferme se trouvait en
participant à la liaison entre les bas-plateaux et les un endroit surprenant par rapport au site abbatial tel
territoires du nord. La route est/ouest franchissait que nous le connaissons aujourd'hui. En fait, plutôt que
primitivement la Thyle à hauteur d'un détour de la de s'y inscrire, il se situe à sa périphérie, en un point
rivière, à l'endroit où celle-ci recevait le ruisseau des élevé, alors que l'abbaye s'est développée dans le fond
Affligés ; c'est l'accumulation des matériaux char- de vallée. À cet égard, il constitue un élément matériel,
riés par le ruisseau en fond de vallée qui a favorisé révélateur sur le terrain, du processus d'appropriation
le passage à gué. L'extension de l'abbaye au nord de progressive du futur site abbatial, qui fut lent mais
la route est/ouest – sous l'abbé Charles (1197-1209) planifié. Les moines ont dû patienter, faire preuve de
comme nous l'avons rappelé plus haut, mais peut-être détermination et recourir à la persuasion divine – dans
déjà vers la fin de la période Villers II (1147-1197) – la charte de 1153, l'évêque de Liège profère des impré-
eut pour résultat qu'un tronçon de la voie passa dans cations à l'encontre de ceux qui s'opposeraient au projet
le domaine abbatial et fut par conséquent soustrait d'installation de l'abbaye – avant de pouvoir s'établir
au réseau viaire régional, ce qui obligea à contourner définitivement et largement. En d'autres termes, il est
l'abbaye par le nord ou par le sud. Quant à la route très vraisemblable que le bâtiment n'aurait pas eu d'uti-
sud/nord, comme nous l'avons précisé ci-dessus, elle lité – et n'aurait donc pas été construit – si, dès 1147,
fut amputée d'un tronçon dès la création de l'abbaye les moines avaient pu d'emblée s'approprier le tronçon
Villers II (De Waele & Heller, 2014b ; De Waele, qu'ils convoitaient de la route est/ouest et développer
Heller & Van Driessche, 2013 ; 2015), ce qui obligea à dès ce moment le domaine abbatial au nord de cet axe
contourner celle-ci par l'ouest ou par l'est. routier.
Ce n'est que 50 ans plus tard, sous l'abbatiat de
Conclusion Charles (1197-1209), que débuteront les travaux d'édi-
fication de Villers III, l'abbaye définitive en pierre,
Le bâtiment inédit sur la colline de la ferme contribue directement au nord de la route est/ouest. Si ce délai
de manière significative à la connaissance de Villers II paraît démesuré – surtout au regard du pouvoir consi-
(1147-1197), abbaye dont rien ne subsiste en élévation dérable dont jouissait Bernard de Clairvaux – c'est que
et dont la localisation même sur le site reste approxi- l'enjeu était un territoire déjà organisé et structuré sur
mative (Coomans, 2000, p. 61-68 ; De Waele, 2014). les plans de l'économie, de la politique et du réseau
Cette abbaye méconnue est dite à tort « de transition » des communications. De ce qui précède, il ressort
car, en réalité, elle est celle-là même qui rendit possible en outre que, contrairement à l'opinion encore trop
l'établissement du monastère sur le site ; c'est elle qui souvent répandue, les moines ne sont pas arrivés au
correspond véritablement à la période de gestation milieu de nulle part en s'établissant à Villers. Il est vrai,
de la future grande abbaye, période durant laquelle se en revanche, que leur institution, novatrice et d'une
joua de manière décisive le destin de celle-ci. redoutable efficacité, contribua notablement au déve-
La durée de 50 ans – inhabituellement longue – loppement et au progrès en général.
qu'on attribue à l'abbaye Villers II évoque ouverte-
ment les difficultés que rencontrèrent les Cisterciens Bibliographie
dans leur projet d'une fondation à Villers. À cet égard, ■■ Coomans T., 2000. L'abbaye de Villers-en-Brabant,
l'acte de confirmation des possessions abbatiales en Bruxelles-Cîteaux (Studia et Documenta, XI).
23
TEMPS MODERNES
Nivelles/Nivelles : rue de Mons, analyse
limitée autour et dans un immeuble du
16e siècle en transformation
À l'intérieur
17e siècle). Par contre, les deux repérés au no 29, De toute évidence, l'édifice « double » a subi des
également sur le soubassement, appartiennent à deux modifications esthétiques, volumétriques et fonction-
ateliers différents : l'un (n 659) n'a pas d'attributaire et
o
nelles à travers le temps, incluant réparations, restaura-
l'autre, localisé sur une pierre en bordure de la maison tions, récupérations et transformations.
voisine, est trop effacé (également Nopère mais moel- Les composants architecturaux majeurs étant préser-
lon renversé ?). vés, une étude a posteriori peut toujours être menée ;
26
seules les faces des murs plafonnés ou recouverts de cement européen FSE/FEDER-Région wallonne. Le
plaques de plâtre, isolantes ou autres empêcheront projet inclut notamment un nouveau cheminement,
toute analyse. débutant non de l'accès originel qu'est la porte de
Faute de pouvoir mobiliser des compétences Bruxelles mais du moulin. Le parcours dirige les visi-
adéquates dans les temps impartis pour ce type d'in- teurs vers le cœur de l'abbaye en les faisant transiter
tervention, il est regrettable que les quelques données par la colline, le jardin dit « des infirmes », la pharma-
collectées n'alimentent que l'Inventaire du patrimoine cie et ce qui fut l'infirmerie.
culturel immobilier de Wallonie (en cours pour Le franchissement de la voirie régionale reliant
Nivelles) et ne participent pas, du moins dans l'immé- Genappe à Gembloux, qui coupe le site, s'effectue doré-
diat, à un approfondissement de la connaissance des navant par une passerelle en bois créée entre les arcades
évolutions des architectures individuelles mais égale- de la pharmacie. En date du 22 octobre 2013, cette
ment des contextes urbanistiques, artistiques et autres dernière n'était pas encore posée ; fort heureusement
dans lesquels elles ont évolué. car un camion heurta les arcades dans l'après-midi
Même si l'intervention ne consista qu'en une visite de (parc. cad. : Villers-la-Ville, 1re Div., non cadastré , voirie
courtoisie et un reportage photographique, le Service N275 ; coord. Lambert : 161335 est/142191 nord).
de l'archéologie tient à remercier M. Steve Marits pour Fallait-il s'en attrister, rester de marbre et se conten-
son accueil, son écoute et surtout pour avoir autorisé ter de tirer les derniers clichés de ce patrimoine ou
la prise de clichés. aller de l'avant et mettre rapidement à profit toutes les
compétences disponibles pour collecter un maximum
Bibliographie de données pouvant assurer une reconstruction à
■■ Froment P., Hanse A. & Liénard J.-C., 1996. La collégiale l'identique ? Les représentants de l'IPW et du Dépar-
Sainte-Gertrude de Nivelles hier et aujourd'hui, Rif tout dju, tement du patrimoine, le Service de l'archéologie de la
383, s.p. Direction extérieure du Brabant wallon en particulier,
■■ R. de Mons, 1974. R. de Mons. Nos 27-29. In : Province de n'ont pas hésité à agir.
Brabant. Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine
monumental de la Belgique, 2), p. 397. Contexte historique
■■ Van Belle J.-L., 1994. Nouveau dictionnaire des signes lapi-
daires – Belgique et Nord de la France, Louvain-la-Neuve, Artel. Comme le précise un cartouche armorié (« Fideliter
■■ Willems D., 2015. Nivelles/Nivelles : déception partielle à et Suaviter Anno 1784 »), apposé en guise de linteau
la rue des Choraux, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, sur la fenêtre centrale de la façade orientale, la phar-
p. 28-29. macie fut érigée durant le dernier quart du 18e siècle,
sous le court abbatiat de Dom Léonard Pirmez (1782-
Sources 1784). De cet édifice ne subsistent que quatre murs en
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879), briques, dont les façades, orientées à l'est et à l'ouest,
plan parcellaire de la commune de Nivelles. chacune percée de trois grandes baies quadrangulaires
■■ Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non daté (peut-être et reposant sur trois arcades en pierre bleue. Elle est le
entre 1810-1815 et 1830) et non signé (Musée archéologique de dernier aménagement majeur sur le site avant l'expul-
Nivelles). sion des moines en décembre 1796.
Contexte de l'incident
Les lieux devant être sécurisés, une mobilisation fut Conséquences et perspectives
rapidement lancée. Pour l'IPW, maître d'ouvrage, les
actes devaient répondre à un triple objectif, à savoir D'emblée, le projet de la passerelle fut modifié en vue
le démontage des parties instables, une dépose suivie d'une sécurisation accrue pour les visiteurs, contraints
d'une numérotation et d'un stockage des pierres de de pénétrer dans le site de l'abbaye par la pharmacie.
même qu'une consolidation des vestiges afin de main- Les résultats de l'intervention archéologique et des
tenir un état sanitaire correct, pré-requis pour une recherches complémentaires obtenus à ce jour consti-
reconstruction éventuelle (Mainil, 2013, p. 3). tuent une base technique solide pouvant appuyer
La Direction de l'archéologie prit part à ces interven- et justifier une réédification à l'identique. Toutefois,
tions de sauvetage. Ainsi, deux jours après l'incident, les si cette option paraît évidente, le doute subsiste, les
relevés des deux façades furent réalisés en recourant à travaux n'ayant toujours pas été entamés. Dans le cas
l'usage d'un scanner 3D, un Trimble TX5 à décalage de où cette tâche était exécutée, elle devrait immanqua-
phase (phaseshift) permettant une précision de mesure blement s'accompagner d'une signalétique routière
moyenne de l'ordre de 1 mm théorique jusqu'à 20 m suffisante, très en amont du bien, et encourager les
et 2 mm environ au-delà. Les résultats furent exploités démarches en vue d'un contournement acceptable
dans la foulée avec des logiciels informatiques spéci- pour le charroi volumineux.
Relevés au scanner de la façade orientale de la pharmacie Relevés au scanner de la façade occidentale de la pharmacie
( J.-N. Anslijn, Dir. archéologie). (J.-N. Anslijn, Dir. archéologie).
28
Remerciements
Sources
■■ Abbaye de Villers-la-Ville, l'ancienne pharmacie, plans et
élévations exécutés en décembre 1975 par photogrammétrie
terrestre par le Ministère des Travaux publics.
■■ Mainil S., 2013. Abbaye de Villers-la-Ville, arcades de la phar-
macie, fiche d'état sanitaire, Institut du Patrimoine wallon.
■■ Pharmacie, s.d. La pharmacie de l'abbaye de Villers-la-Ville,
rapport anonyme.
29
ÉPOQUE CONTEMPORAINE
Braine-l'Alleud/Braine-l'Alleud : fouilles
sur le domaine d'Hougoumont dans le
cadre du projet Waterloo Uncovered
Le domaine d'Hougoumont à la fin du 18e siècle (a) et en 1815 (b). 1. Ferme-château ; 2. Jardin ; 3. Verger ; 4. Potager ; 5. Verger et
potager nord ; 6. Bois ; 7. Jardin extérieur ; 8. Killing zone. Éléments reportés sur : a. Extrait de la carte de Ferraris, Braine la Leud,
pl. 78 (© Bibliothèque royale de Belgique) ; b. Extrait de la carte de Craan (reproduite avec la permission de S. Eve).
5
3
4 1 2
7
8
a b
30
Il n'est pas inutile de rappeler ici que, dans la illustration de ce que l'archéologie peut apporter aux
mesure où il s'agit de relever les traces d'un récits et aux mythes – le mot n'est pas trop fort – qui
évènement ayant duré une journée – fait pour le relatent les combats pour la prise d'Hougoumont.
moins inhabituel en archéologie –, les méthodes
jouent un rôle capital et doivent être en permanence Conclusion et perspectives
adaptées en fonction de ce qui est – ou n'est pas –
découvert. Ont ainsi été vérifiés la nature et l'âge En 14 jours à peine de recherches sur le terrain, les
de plusieurs anomalies caractérisées par une forte objectifs principaux sont atteints : la validité des
susceptibilité magnétique, paramètre qui indique enregistrements géophysiques est confirmée, de
la présence probable d'éléments brûlés et/ou de même que la persistance possible, dans la réparti-
terre cuite, soit autant de bûchers potentiels. Les tion des déchets métalliques issus de la bataille, de
sondages ont révélé des fours à briques et des amas configurations spatiales significatives. À ce jour
de matériaux de construction très probablement liés cependant, aucun charnier n'a encore été mis au jour
à l'édification et à l'entretien du château, sans lien malgré la découverte de grands creusements qui, en
direct avec la bataille. Leur découverte confirme fouille, se sont avérés liés à l'extraction de sable et
néanmoins l'efficacité des méthodes géophysiques, de grès. La mise en évidence des charniers reste un
qui permettent d'ouvrir rapidement des « fenêtres » axe majeur des recherches, de même que la poursuite
sur des structures archéologiques qui, autrement, des prospections métalliques dans la killing zone et le
n'auraient été mises au jour que lors d'une jardin, là où, de façon de plus en plus évidente, s'est
évaluation systématique sur toute la superficie du en grande partie jouée la défaite française à Hougou-
domaine. Par ailleurs, les données enregistrées en mont, épisode majeur de la victoire alliée à Waterloo.
conductivité électrique ont permis de repérer de Plus de détails et le rapport complet des campagnes
façon tout à fait précise le fossé qui formait la limite d'avril et de juillet 2015 sont disponibles sur le site
orientale du verger. Ce fossé, repéré par sondage, est www.waterloouncovered.com.
un élément capital des combats ayant eu lieu dans
et autour du verger. Mentionné dans certains récits, Bibliographie
il ne figure de façon précise sur aucun plan ni carte ■■ Bosquet D., Yernaux G., Fossion A & Vanbrabant Y.,
et il est probable qu'une partie des très nombreuses 2015. Le soldat de Waterloo. Enquête archéologique au cœur du
victimes tombées à cet endroit y aient été ensevelies. conflit, Namur, Service public de Wallonie, 22 p.
Des fouilles approfondies devront y être menées. ■■ Pollard T. (éd.), 2009. Culloden. The History and Archaeology
À ce jour, c'est la détection des métaux qui a donné of the Last Clan Battle, Barnsley, Pen and Sword Military.
les résultats les plus spectaculaires, en particulier ■■ Scott D.D. & McFeaters A.P., 2011. The Archaeology of
lors du suivi systématique des ouvertures de Historic Battlefields: A History and Theoretical Development
tranchées. Il est en effet apparu que, dans la killing in Conflict Archaeology, Journal of Archaeological Research, 19,
zone et dans le jardin en particulier, où la détection p. 103-132.
des métaux avait peu très donné préalablement, ■■ Willems D., 2015. Braine-l'Alleud/Braine-l'Alleud : inves-
une grande quantité de munitions pouvait encore tigations archéologiques à l'emplacement de l'ancien château
être retrouvée, mais après l'enlèvement de la couche d'Hougoumont, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23,
arable sur 10 à 15 cm. À la lecture des coupes réali- p. 32-35.
sées, il semble en effet que ces deux secteurs ont
été soumis à au moins quelques épisodes de labour Sources
après la bataille, perturbations ayant entraîné les ■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
objets originellement dispersés en surface à une Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Braine la Leud, pl. 78.
trentaine de centimètres de profondeur. C'est ainsi ■■ Craan W.B., Plan of the Battle of Waterloo or Mount St. John,
que, pour la première fois et à l'encontre des récits reduced from the large Plan of the same Battle, 1816.
historiques, des balles tirées par les Français ont été ■■ De Smedt P. & Van Meirvenne M., 2014. Geophysical Soil
trouvées dans le jardin, à quelques mètres du pied Survey Waterloo: EMI Survey, rapport inédit, Research group
du mur d'enceinte. Il semble que les assaillants aient soil spatial inventory techniques (ORBit), Department of Soil
eu la possibilité de prendre appui sur le mur pour Management, Ghent University.
faire feu sur les Anglais retranchés à l'intérieur. La
présence d'une balle anglaise tirée dans l'enceinte
permet même d'évoquer un possible franchissement
de ce mur par des soldats français, mais ceci reste à
confirmer. Quoi qu'il en soit, on a ici la meilleure
32
RL Résultats
Bibliographie
■■ Bosquet D., 2014. Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : évaluation
préventive à Gastuche, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, Château de Rixensart : façade côté jardin de l'aile nord,
© MRAH, 2015.
p. 49-51.
■■ Bosquet D., Briers T., De Staercke O., Collette O.,
Goemaere É., Goovaerts T., Hanut F., Leduc T. & Preiss S., site par arrêté du 20 novembre 1972. En 1993, il est
2015. Les arts du feu dans le site La Tène de « Gastuche » reconnu patrimoine exceptionnel de Wallonie.
à Grez-Doiceau (Brabant wallon) : premières analyses et Les éléments construits ont fait l'objet d'un enregis-
interprétations, Lunula. Archaeologica protohistorica, XXIII, trement systématique graphique et photographique.
p. 125-136.
Parallèlement, divers fonds d'archives tels que les
■■ Briers T., Bosquet D., De Staercke O., Collette O., archives du Cadastre du Brabant (Bruxelles), les
Goemaere É., Goovaerts T., Hanut F., Leduc T. & Preiss S.,
archives de la famille de Merode (Rixensart) ou encore
2015. Grez-Doiceau/Grez-Doiceau : le site La Tène de Gastuche,
les archives de la Commission royale des Monuments,
résultats des fouilles et premières analyses, Chronique de l'Ar-
chéologie wallonne, 23, p. 15-21.
Sites et Fouilles (Liège) ont été consultés.
Le château de Rixensart forme un quadrilatère
autour d'une cour plus ou moins trapézoïdale, aux
angles flanqués chacun d'une tourelle octogonale. On
accède à la cour par une tour-porche aménagée au
Rixensart/Rixensart : étude préalable à la centre de l'aile méridionale. Celle-ci est précédée d'une
restauration du portique de l'aile nord du avant-cour partiellement bordée par des communs et,
château à l'ouest, par l'ancienne chapelle castrale, aujourd'hui
paroissiale. D'origine médiévale assurée, le château
est complètement reconstruit au 17e siècle, au profit
Patrice Gautier, Élisabeth Bruyns d'une nouvelle demeure, destinée à la plaisance et
et Antoine Baudry à la chasse (pour plus d'informations sur le château
de Rixensart : Berckmans, 1977 ; Château, 1974 ;
Introduction Zecchinon, 1995). L'aile septentrionale est bâtie en
1631. Ensuite, le château est agrandi, de manière à
En 2015, le portique, logé contre le mur-gouttereau former un quadrilatère (aile ouest millésimée de 1648)
nord de l'aile septentrionale du château de Rixensart
(parc. cad. : Rixensart, 1re Div., Sect. G, no 69 ; coord.
Lambert : 161820 est/156144 nord), a fait l'objet
d'une étude archéologique (Musées royaux d'Art et
d'Histoire) couplée à une étude documentaire et d'un
dépouillement des sources archivistiques (Association
pour l'Étude du Bâti) préalablement à sa restauration
(Gautier, Baudry & Bruyns, 2015). La mission, finan-
cée à 95 % par la Direction de la restauration (DGO4 /
Département du patrimoine), a permis de documenter
la construction et l'évolution du portique – aujourd'hui
en ruine – afin d'orienter le maître d'ouvrage (famille
de Merode) et le maître d'œuvre (Atelier 20) dans les
choix de restauration. Le château a été classé comme Château de Rixensart : portique adossé à l'aile nord,
© MRAH, 2015.
monument par arrêté royal du 15 mai 1964 et comme
34
avec l'ajout de galerie au rez-de-chaussée et couloir à de la structure étaient probablement légèrement plus
l'étage (millésimés de 1660 et 1662) le long des ailes bas lors de sa construction qu'ils ne le sont aujourd'hui.
orientale et méridionale (Marcolungo, 2004, p. 76). Aucun sondage n'a été exécuté pour retrouver ces
niveaux.
Le portique d'origine Les archives n'ont pas livré de mention explicite de
la construction du portique. Toutefois, les mentions
Le portique s'organise en trois travées. Huit piliers suivantes pourraient y faire référence, l'une en 1852,
(UC 05 à UC 12), dont quatre engagés (UC 05 à UC 08) l'autre en 1831 :
contre la façade nord de l'aile nord du bâtiment (millé- – Memoire des ouvrages de marechal fait et livré pour
simée de 1631, UC 33), supportaient trois coupoles le service de Monsieur Compte Felix de Merode reco-
surbaissées, base d'une plateforme de 8,28 m de mancé le 3 9bre 1852 par moi F Pigeolet.15 7bre avoir
longueur pour 2,72 m de largeur. À hauteur du premier mis un neuf resort à cerure de la chambre de balcon et
étage, une baie à croisée de la façade a été transformée racomodé la cerure (archives de la famille de Merode à
en porte, permettant l'accès à cette plateforme domi- Rixensart, caisse contenant des photocopies de docu-
nant les jardins. Chaque travée se compose d'arcades ments d'archives, 1er lot-2e lot, 1re partie).
en plein cintre construites en briques (UC 34, UC – Monsieur Bosquet, en vous écrivant hier pour le
35 et UC 36) entre les piliers et renforcés d'un tirant jet d'eau, j'ai omis de vous marquer la quantité de
métallique. Les piliers sont posés sur une base en grès zinc nécessaire pour la couverture du balcon. […]
ferrugineux et supportent un chapiteau façonné dans Le balcon comprend 300 pieds carrés… (archives de
le même matériau. Les niveaux de circulation au pied la famille de Merode à Rixensart. Lettre du 15 mai
1831, caisse contenant des photocopies
de documents d'archives, 1er lot-2e lot,
Briques
Petit granit 1re partie).
Grès lédiens
Grès ferrugineux Cette mention d'un « balcon » de
Vide
Végétation
Nord 300 pieds carrés de 1831 se réfère-t-elle
au portique de l'aile nord du château ?
L'emprise au sol de la construction
31
(8,28 m de longueur × 2,72 m) présente
16 16 16
un rapport d'environ 1 sur 3. Sans
34 35
36
33 17
16
connaître la référence de la mesure en
24 vigueur à l'époque de sa construction, cet
édifice pourrait donc avoir des dimen-
33
33 sions de 30 pieds de long pour 10 pieds
de large, pour atteindre une superficie
06 05
04 de 300 pieds carrés. Le pied de Bruxelles
12
27
11
33 ou de Nivelles valant respectivement
03
27,575 cm et 27,7 cm, le « balcon » cité en
33
14
Alt : 64 cm
33
1831 mesure d'après ces valeurs 8,27 m
30 13
10 01
09 de longueur × 2,75 m de largeur en pieds
de Bruxelles et 8,31 m de longueur ×
Alt : 0 cm
Élévation nord et plan du portique de l'aile nord. Les chiffres renvoient aux Cet état est illustré notamment par
UC (unités de construction). En médaillon, plan du château (Atelier 20, 2011), la lithographie de J.-B. Jobard – artiste
© MRAH, 2015.
établi à Bruxelles dès 1817 et décédé en
35
0 5m
TOUTES PÉRIODES
Beauvechain/L'Écluse : une opération
archéologique à la rue de la Cabourse
Frédéric Heller et Aude Van Driessche
Le suivi
Nous avons alors fait dévier la tranchée vers l'est des structures isolées ou se recoupant, montrant ici
dans l'espoir que la pose des conduites soit terminée le trois périodes distinctes allant de la Protohistoire
même jour, mais d'autres fosses sont directement appa- aux Temps modernes. Au fond de la structure F03 se
rues, ce qui a motivé l'arrêt du chantier de géothermie. distinguait un trou de poteau. Son niveau d'apparition
Le grutier a ensuite effectué un décapage de 5 m de correspondait en coupe à l'interface entre deux paquets
large sur 30 m de long dans l'axe d'implantation de la de colluvions. Un décapage à ce niveau a permis la
dernière tranchée au niveau d'apparition des struc- mise au jour de la tombe F36, attestant ici d'au moins
tures archéologiques. deux phases d'occupation.
Trente-six structures ont été mises au jour, toutes de type Le site n'a livré que quatre trous de poteaux, à fond
fossoyé (trous de poteau, fossés, fosses et sépultures). plat et d'un diamètre variant entre 0,25 m et 0,32 m,
Le premier décapage sous les colluvions a dégagé profonds de 0,10 m à 0,17 m. Ils ne font pas partie d'une
structure directement identifiable et appartiennent à pelle en fer, pot en grès et autre sabot en caoutchouc.
des horizons stratigraphiques différents. Le contre-quadrant n'a pas été vidé.
Trois fosses sépulcrales (F03, F05 et F07/F22) conte-
Les fossés nant des ossements de faune en connexion anatomique
ont été mises au jour sous le niveau de colluvions le
Deux fossés de dimensions similaires ont été identi- plus récent.
fiés : le fossé F10, large de 0,53 m et profond de 0,30 m, La fosse F03, de petites dimensions, a livré les restes
aligné selon un axe sud-ouest/nord-est ; l'autre, F21, d'un jeune suidé, à savoir la partie gauche de la cage
aligné sud-est/nord-ouest, perpendiculairement à thoracique, les deux humérus et une partie de la
l'axe de F10, venait se perdre dans une structure aux colonne vertébrale. Le squelette était déposé en décu-
contours flous, F16, pouvant correspondre à une série bitus latéral, tête à l'ouest, pattes vers le nord. L'absence
de chablis contigus. Ces deux fossés présentaient un d'autres os tel le pelvis atteste le dépôt d'une carcasse
profil en U et à fond plat et avaient conservé des traces partielle dans la fosse.
de passage d'eau. Il s'agit probablement ici d'un vestige La fosse F05 recelait les restes de deux animaux.
de parcellaire. L'un, un suidé, n'était représenté que par une partie
du bassin, la colonne et quelques côtes. Il était déposé
Les fosses en décubitus latéral, pattes vers le sud et bassin à l'est.
5 à 10 cm en-dessous se trouvait un équidé juvénile
Une première structure, F04, n'a pas livré de maté- complet, déposé en décubitus latéral, tête à l'ouest,
riel ; elle présentait néanmoins une forte précipitation jambes vers le sud, soit dans la même position que le
d'oxydes de fer sous la fosse attestant de la décompo- cochon.
sition de matière organique dans celle-ci. La structure La fosse F07/F22 contenait deux squelettes. Comme
F06, contenant de la vaisselle en tôle émaillée blanche, elle était fortement érodée (il ne restait qu'environ
n'a quant à elle pas été fouillée. 9 cm d'épaisseur), il était impossible de distinguer s'il
Les fosses dont la fonction a pu être identifiée sont s'agissait d'une fosse unique abritant deux corps ou
de trois types : fosse d'extraction de limon, fosse de de deux fosses successives se recoupant l'une l'autre.
rejet et fosse sépulcrale. La structure F07, au nord, comprenait un grand
La grande fosse d'extraction de limon F19 mesurait canidé complet déposé en flexion forcée, tête au nord
6 m de long pour 1,20 m de large sur une profondeur et regardant vers l'est. Les pattes étaient repliées les
de 0,90 m. Sa coupe montrait des traces de piétinement unes sur les autres à l'est. La colonne vertébrale venait
au fond, attestant une probable utilisation secondaire contre le bord de fosse à l'ouest et au sud. La fosse
pour gâcher du torchis. Son comblement en boulettes F22 la jouxtant au sud contenait un suidé juvénile
indiquait un rebouchage anthropique et les effondre- complet déposé en décubitus latéral, tête à l'est, pattes
ments de parois visibles au milieu de celui-ci, un temps vers le nord.
de latence à ciel ouvert avant son comblement défini- La fosse F36 était quant à elle différente de
tif. Cette fosse recoupait le fossé F21. Peu de matériel toutes les inhumations d'animaux. Visible lors du
identifiable y a été trouvé : quelques tessons permettent second décapage comme une trace foncée de forme
néanmoins de la raccrocher aux Temps modernes. trapézoïdale d'une longueur de 1,46 m, elle était large
La fosse F09, d'un diamètre de 2,50 m, était conser- de 0,51 m au nord, de 0,58 m au sud, et profonde de
vée sur une hauteur de 0,45 m. Son remplissage fort 0,20 m. Un liseré de bois partiellement décomposé
chargé en oxydes de manganèse et de fer dans sa partie était clairement visible sur ses côtés oriental et septen-
inférieure indiquait une utilisation comme fosse de trional.
rejet de matières organiques qui est restée ouverte aux La fouille a permis de dégager les restes d'un
intempéries. Elle contenait de la céramique non tour- couvercle en bois de 0,60 m de long pour 0,26 m mini-
née de type protohistorique dont un tesson décoré de mum de large. Il présentait un pendage vers l'intérieur
cannelures. Le fossé F21 la recoupait dans sa partie de l'est vers l'ouest. Si le creusement était visible à l'est
orientale. et à l'ouest, la caisse avait été déposée presque contre
La fosse F35, bien que non fouillée car partiellement les parois nord et sud. De rares côtes peu épaisses,
hors emprise, présentait une apparence similaire en pouvant appartenir à un nouveau-né, ont été retrouvées
surface. dans le remplissage. Rien n'assure néanmoins qu'elles
Une fosse de rejet d'un autre type, F8, mesurait aient fait partie du contenu de la caisse. Un objet en fer
1,10 m de long et 1,20 m de large et était profonde avait été déposé sur la planche de fond de celle-ci dans
de 0,28 m. Elle contenait des restes de couverture en l'angle sud-ouest. Au milieu, posé sur le fond en bois,
ardoise scellant une couche de coquilles de moules, un fragment de tissu à trame simple a été conservé.
40
Sous des allures « classiques » du 18e siècle, le noyau plus profond a été exécuté afin d'accueillir le coffrage
du presbytère actuel de Nodebais aurait donc été érigé de fondation ; la profondeur atteinte par celui-ci était
à la fin du siècle précédent, vers 1695. Selon une date d'environ 1,20 m sous le seuil du passage vers le jardin,
apposée sur une poutre de l'étage, des travaux majeurs, situé au sud-est.
financés par l'abbaye d'Hastière, auraient été entrepris Le dégagement des fondations du chartil n'a été
dès 1772, comme en témoignent les fenêtres du rez- que partiel, sur environ 25 cm ; l'usage de briques
de-chaussée, le rehaussement du niveau supérieur de fragmentaires est indéniable. L'élévation en tant que
la demeure (Nodebais, 1974) ainsi que l'escalier inté- telle de la façade présente des briques de gabarits
rieur. Enfin, près d'un siècle plus tard, une clôture fut différents (22 × 10 × 5/5,5 cm et 23 × 11 × 5,5 cm),
construite pendant la prêtrise d'Emmanuel Wynants incluant quelques exemples plus orangés et d'une taille
(1855-1876) (Streel, s.d.). légèrement supérieure (24 × 12 × 5,5 cm). Bien que ces
Selon la carte de Ferraris, la cure et ses annexes briques aient été disposées en lignes alternées boutisse-
formaient un U ouvert vers le nord-est, en direction panneresse, de nombreux « écarts » ont été observés.
de l'église Sainte-Waudru, légèrement décalée vers le Le vestige le plus ancien est une structure maçon-
nord (au demeurant, rebâtie au 19e siècle suivant une née quadrangulaire, parallèle à la façade du chartil.
orientation nord-ouest/sud-est). Elle fut construite à l'aide de briques de dimensions
Comme en témoignerait le plan cadastral de similaires à celles utilisées pour l'élévation de ce
P.-C. Popp, si aile complète il y eut au sud-est du pres- dernier (de 22 et 23 cm), disposées en boutisse et liées
bytère, elle aurait été démolie au plus tard durant le au mortier de chaux de teinte crème. Ses dimensions
troisième quart du 19e siècle ; il n'en resterait que le internes sont de l'ordre de 1,10 m sur 1,38 m. Les
petit édicule, toujours en élévation actuellement, abri- assises de la face occidentale sont imbriquées dans les
tant un four à pain. parois latérales mais de manière alternée ; en outre,
un débordement équivalent à une largeur de brique
Structures mises au jour
Une fouille réalisée en 2003 avait révélé un bâtiment parc. cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 79d ;
sur solin de fondation en pierre, des structures arti- coord. Lambert 72 : 170232 est/ 154214 nord) a fait
sanales liées à la métallurgie appartenant probable- l'objet d'une évaluation à 38 %, consistant en deux
ment à la pars rustica d'une villa et une mare datant tranchées parallèles, suite à l'introduction d'une
des 2e-3e siècles de notre ère (D. Preud'homme, notes demande de permis d'urbanisme pour la construction
inédites). Un suivi archéologique en 2012 avait révélé d'une habitation sur caves. Situé en bas de versant, le
la présence d'une petite cave construite en petits terrain est recouvert d'un épais dépôt de colluvions
moellons cubiques de grès calcaire ; d'une longueur attestant d'une forte érosion du relief environnant,
de 4,55 m et large de 3,55 m, elle était conservée sur érosion déjà supposée lors de la fouille de la petite cave
0,55 m de haut (Willems & Van Driessche, 2014). située en contre-haut au sud. Aucun vestige archéolo-
Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure gique n'y a été découvert.
du Brabant wallon (DGO4 / Département du patri- Cette série d'investigations ponctuelles, même si de
moine) est intervenu au 25, rue de Brocsous (parc. faible ampleur à chaque fois, donnent des informations
cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 108d4 ; au sujet de l'archéologie du paysage de la villa de
coord. Lambert 72 : 170200 est/154095 nord) du 25 Brocsous : ce sont plusieurs zones de la villa qui
au 31 mars afin d'y effectuer un suivi archéologique peuvent maintenant être considérées comme vides à
suite à la demande de permis d'urbanisme introduite l'époque de son occupation, à savoir la fin du 2e et le
pour la démolition d'une terrasse et la construction début du 3e siècle de notre ère.
d'une véranda.
La parcelle est située sur l'emprise du site de la villa : la Bibliographie
fouille de 2003 a eu lieu sur la parcelle voisine au nord, ■■ Willems D. & Van Driessche A., 2014. Chaumont-Gistoux/
et celle de 2012 sur la colline en contre-haut au sud- Dion-Valmont : renaissance d'une cave romaine à la rue de
ouest (coord. Lambert 72 : 170028 est/154053 nord). Brocsous, à Dion-le-Mont, Chronique de l'Archéologie wallonne,
Le suivi des travaux a permis de déterminer in fine que 21, p. 11-13.
nous étions sur l'extrémité méridionale de la fouille
extensive de 2003.
Lors de prospections pédestres effectuées à l'occasion
du suivi archéologique dans le petit vallon situé en vis- Jodoigne/Jodoigne : voile temporairement
à-vis, en contrebas de la cave, force nous fut de consta- levé sur une section des remparts de la ville
ter la présence d'une piscine à peine construite (surface
± 50 m²) à l'arrière du no 39 de la rue de Brocsous (parc.
cad. : Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 108s3 ; coord. Didier Willems
Lambert 72 : 170046 est/ 153996 nord). Une discussion
cordiale avec les propriétaires s'ensuivit, ceux-ci nous Confronté d'une part à l'accroissement de la fréquen-
assurèrent n'avoir rien vu apparaître lors du creusement. tation scolaire et d'autre part à des installations deve-
On peut dès lors raisonnablement imaginer qu'aucune nant peu à peu vétustes, l'Institut de la Providence,
structure maçonnée ne se trouvait ici. établi au no 23 de la rue du Sergent Sortet, a introduit
Alors que nous nous rendions sur place en octobre une demande de permis pour abattre d'anciennes
2015 pour préparer un chantier dans la rue de annexes et bâtir de nouveaux édifices (parc. cad. :
Louvranges, nous avons constaté qu'une piscine devait Jodoigne, 4e Div., Sect. G, no 11k ; coord. Lambert :
être creusée le jour même sur une parcelle à l'angle 185389 est/157333 nord).
des rues de Brocsous et de Louvranges (parc. cad. : Le site étant positionné sur le tracé de l'enceinte
Chaumont-Gistoux, 4e Div., Sect. C, no 93e2 ; coord. urbaine, le Service de l'archéologie de la Direction
Lambert 72 : 170283 est/ 154209 nord). Nous y avons extérieure du Brabant wallon (DGO4 / Département
effectué le suivi des creusements : une étroite tranchée du patrimoine) a interpellé la direction de l'institution
menant d'une annexe vers l'emplacement de la piscine a afin de pouvoir suivre les travaux de démolition. Très
révélé les vestiges d'un petit appentis moderne disparu ; rapidement, un accord fut établi, des réunions se sont
la fosse pour la piscine, profonde de 1,60 m, n'a livré que enchaînées et l'intervention a pu être menée.
des remblais récents et autres colluvions et ce jusqu'à
10 cm du niveau de fond de coffre (vu l'absence de Contexte historique du site
vestiges, nous avons décidé de ne pas descendre plus bas
afin d'éviter toute déstabilisation de la future piscine). En 1184, Henri Ier, duc de Brabant, prit la terre de
Enfin, une longue parcelle dans le quart nord-est Jodoigne, détenue par le comte Gilles de Duras, et
du site de la villa de Brocsous (rue de Louvranges, 7 ; l'intégra dans ses États (Hanon de Louvet, 1941, p. 73).
44
2 mm environ au-delà. L'assemblage et les traitements hie par la nature (parc. cad. : Jodoigne, 4e Div., Sect. G,
initiaux des données ont pu être exécutés grâce au nos 11k, 4a et 6g) ; elle est également mentionnée dans
logiciel Faro/Trimble Scene (v. 5.1). Pour l'étape du l'Inventaire du patrimoine culturel immobilier (Beau-
maillage, consistant en la transformation du nuage vechain, 2006, p. 250 ; Streel, s.d.). La vigilance y est
de points en surface continue, un second programme également de rigueur afin de ne pas perdre ces témoins.
a été exploité, à savoir Screened Poisson Surface
Reconstruction (v. 8.0). Enfin, pour le traitement des Enseignement de cette expérience
vues orthogonales en nuage de points (vues sur fond
noir), nous avons pu bénéficier du logiciel PointCab. Bien qu'il soit regrettable qu'une étude minutieuse de
Par la suite, le 14 septembre 2015 plus exactement, cette élévation n'ait pu être menée, un enregistrement
une série de clichés photographiques a été prise afin minimal a été assuré grâce à l'apport de la photogra-
de réaliser un assemblage informatique, palliant phie et de l'informatique ; certes, elles ne remplaceront
partiellement à l'impossibilité de mener une pas pleinement l'œil et le raisonnement humains mais
approche minutieuse sur le site. Sachant que ladite elles permettent d'obtenir des résultats satisfaisants
section des remparts n'allait pas être détruite mais et largement fiables quant au rendu et aux données
maintenue en l'état, voire restaurée, mais cachée par métriques.
les nouveaux bâtiments, cet enregistrement fut jugé Indépendamment de cet aspect purement technique,
satisfaisant tout au moins pour constituer d'une les attentions de la direction de l'institution scolaire, de
part une archive et d'autre part un support primaire l'architecte et des autorités communales ont été attirées
d'étude. Le traitement des clichés a été réalisé avec sur ce patrimoine qui ne demande qu'à être préservé
le logiciel VisualSFM. Quant aux maillages, ils ont et valorisé.
également été produits avec Screened Poisson Surface L'intervention, aussi courte fut-elle, a pu bénéficier de
Reconstruction (v. 8.0). l'appui de nos collègues Florence Noirhomme (Direc-
La couverture photographique s'étendit sur une tion de la restauration) et Vincent Léonard (Service des
longueur d'environ 16 m, comprise entre l'édicule Monuments et Sites) ainsi que de la compréhension du
préservé dans le cadre du projet et la « brisure » (angle) pouvoir organisateur de l'institution scolaire, en parti-
observée à quelque 5,30 m de la limite méridionale de culier de sa directrice Madame Véronique Lacroix, et
la propriété, et une hauteur comprise entre environ 3,70 de l'architecte Jean-Christophe Mathen.
et 4,10 m, correspondant à l'élévation telle que dégagée. Avec la collaboration de Jean-Noël Anslijn (Direc-
L'élévation se caractérise par un usage majoritaire de tion de l'archéologie).
moellons en grès et quartzite liés au mortier de chaux
ainsi qu'un registre inférieur présentant un fruit. Ledit Bibliographie
registre a clairement été remanié puisqu'il est partiel- ■■ Beauvechain, 2006. Beauvechain, Incourt et Jodoigne,
lement surmonté d'assises de briques aux gabarits Sprimont, Direction générale de l'Aménagement du territoire,
récents, cimentées. Le point « de rupture », l'angle du Logement et du Patrimoine (Patrimoine architectural et
obtus, clairement lisible dans le cadastre, a subi un territoires de Wallonie), p. 217-255.
renforcement consistant en un contrefort en briques et ■■ De Meester R., 2012-2014. Histoire (http://www.jodoigne.
une réfection partielle du parement, à l'aide du même be/culture/histoire, consulté le 26 août 2016).
matériau. Les multiples remaniements et rejointoie- ■■ Hanon de Louvet R., 1941 [1996]. Histoire de la Ville
ments au mortier de teinte jaunâtre (très sableux ?) de Jodoigne, Beauvechain, Nauwelaerts, 2 vol. (réimpression
ou grisâtre correspondent à des modifications et anastatique).
constructions d'annexes entreprises lors d'extensions ■■ Jodoigne, 1974. Jodoigne. In : Province de Brabant.
de l'établissement scolaire ; à celles-ci appartiennent Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine monumental
indéniablement les cavités témoins de la pose de de la Belgique, 2), p. 228-266.
poutrelles pour des toitures et plateformes. ■■ Meuwissen E., 1999. Jodoigne. Ravalement de façade pour le
Cachée durant de longues décennies, cette face château Ghobert. Rénovation providentielle pour immeuble de
de l'enceinte urbaine sera à nouveau soustraite aux lumière, Le Soir, 19 octobre 1999, p. 22.
regards car les infrastructures modernes s'y adosse- ■■ Streel B., s.d. Jodoigne (Jodoigne). École (Institut des Sœurs
ront ; cela étant, des réfections (à la chaux ?) devraient de la Providence) (http://spw.wallonie.be/dgo4/site_ipic/index.
php/pdf/fiche/25048-INV-0161-02, consulté le 26 août 2016).
être apportées au préalable et des vides devraient être
créés à l'arrière des espaces à construire. ■■ Tarlier J. & Wauters A., 1872. La Belgique ancienne et
Enfin, plus au nord, toujours dans la propriété de moderne. Géographie et histoire des communes belges. Province
de Brabant. Canton de Jodoigne, Bruxelles, A. Decq, p. 1-34.
l'Institut et au-delà, une section des remparts est
conservée sur plus de 60 m mais laissée en l'état, enva-
46
Contexte de l'intervention
Le jeudi 12 novembre, des ossements furent exhu- Si ces ouvertures sont limitées spatialement, elles
més lors du placement d'un des composants du chauf- ont néanmoins permis de révéler plusieurs structures
fage dans une des fosses. construites et multiples couches de remblais, principa-
lement en T1, dans la tranchée reliant T1 à T2 et en T3.
Résultats de l'intervention sur terrain En T1, il s'agit d'une fondation axée est/ouest, réali-
sée à l'aide de moellons en grès calcaire, probablement
Sept fosses ont été creusées dans l'église, à savoir deux récupérés, certains à peine équarris, à peine liés avec un
dans les collatéraux extrêmes, en limite orientale mortier de teinte jaunâtre (très sableux ?) et entre lesquels
(T1 et T3), deux dans les premiers collatéraux (T2 et sont bloqués des fragments de briques. Conservée sur au
T4), deux à l'ouest de la nef centrale (T5 et T6) et la moins 0,50 m de haut et d'une largeur estimée à environ
dernière dans le chœur (T7). Devant accueillir des 0,85 m, elle sert à asseoir un soubassement en matériau
modules de propagation de chaleur, elles présentent similaire, des blocs en pierre mais équarris sur la face
des dimensions oscillant autour des 2,10-2,15 m pour externe, érigés en retrait d'une vingtaine de centimètres.
la longueur, de 1,10 m pour la largeur et de 0,85 m Préservé sur une assise, soit l'équivalent de 0,12 à 0,15 m
pour la profondeur (la surface du béton coulé en chape de haut, et une largeur d'environ 0,70 m, ce dernier
était à -0,82 m par rapport au niveau de circulation soutient manifestement l'alignement des colonnes cylin-
actuel). En outre, elles sont reliées entre elles par des driques séparant les deux collatéraux méridionaux. En
tranchées étroites (environ 0,33 m, équivalant aux bordure septentrionale fut observé un comblement d'en-
dimensions des dalles de pierre constituant la couver- viron 15 cm de large, parallèle aux maçonneries préci-
ture de sol) et peu profondes (également une trentaine tées, contenant notamment du mortier réduit en poudre
de centimètres) ou par des chenaux en briques de l'an- et de petits fragments de briques ; de prime abord, il
cien dispositif dans lesquels seront posés les tuyaux du pourrait correspondre à un rebouchage de la tranchée de
réseau ; deux des chambres de visite (CV1 et CV2) du fondation, creusée elle-même dans un remblai, mélange
système antérieur sont également mises à profit. de limon, sable jaune, nodules de chaux et éclats de
T3
T4
T7
T5
CV2 CV1
T6
T2
T1
0 10 m
La Hulpe, église Saint-Nicolas : plan général avec implantation des fosses (T1-T7) et chambres de visite (CV1-CV2) ainsi que des
limites de structures mises au jour. Seules T7 et CV1 sont positionnées approximativement (infographie A. Van Driessche, Serv.
archéologie, Dir. ext. Brabant wallon).
48
masculins, les dents sont altérées et moyennement usées ; crâne et la mandibule semblent provenir du même
l'hypoplasie n'est pas cotable et il n'y a aucune trace de individu (probablement un homme adulte d'environ
tartre. L'individu a perdu six dents in vivo, probable- 55 ans), la fibula ne semble pas s'articuler avec le tibia
ment d'abord les molaires gauches ensuite les droites ; droit présent. Et, bien qu'il soit tentant d'attribuer à un
– un fragment de coxal gauche (une partie de l'ilion même individu les tibias gauche (le non pathologique)
et du pubis). L'os est très altéré. Sur base des fragments et droit, car ils présentent des empreintes d'enthèses
conservés, il s'agit probablement d'un homme. Consi- (zones d'insertions dans l'os d'un tendon, d'un liga-
dérant la morphologie pré-auriculaire, il devait être âgé ment ou d'une aponévrose musculaire) qui semblent
de plus de 40 ans au décès, et d'après de la morphologie similaires et qu'ils paraissent de même taille, cette
pubienne, il devait avoir entre 27 et 66 ans ; hypothèse doit être testée car lesdits ossements n'ont
– un tibia gauche pour lequel le quart distal du pas les mêmes altérations taphonomiques.
corps est manquant. On peut juste noter que les zones
d'insertions du muscle soléaire et des fibres du liga- Épilogue
ment collatéral tibial (ligament qui sert de tuteur aux
mouvements de flexion et d'extension) sont un peu Limitée, l'intervention au cœur de l'église a néanmoins
développées ; il ne s'agit pas d'une pathologie mais permis de confirmer le maintien de structures
peut-être des séquelles d'une activité physique (impos- anciennes en sous-sol, d'en compléter la connais-
sible à identifier sur un seul os sans pouvoir observer sance, basée exclusivement sur des archives écrites et
le squelette dans son ensemble) ; graphiques, et de dresser un canevas de l'évolution
– un tibia droit complet, taphonomiquement moins spatiale de l'édifice religieux.
altéré que les autres. Il appartenait à un individu dont la
stature devait atteindre environ 170 cm. Comme pour le
gauche décrit ci-dessus, les zones d'insertions du muscle
soléaire et du ligament collatéral sont plus marquées ;
– un fragment de tibia gauche, pour lequel la partie
proximale du corps avec l'articulation proximale est
manquante. Pathologique, il montre une déforma-
tion volumétrique, plus importante au niveau du tiers
distal du corps, et axiale. La déformation axiale semble
témoigner d'une fracture qui a pu s'accompagner d'une
infection. Le cal osseux n'est plus perceptible ;
– une fibula droite quasi complète (l'articulation
proximale est fragmentaire). Elle présente une défor-
mation volumétrique de la moitié inférieure du corps,
déformation qui ne semble pas relever d'une fracture,
mais qui pourrait avoir été causée par une infection ;
– un humérus gauche auquel il manque l'articulation
distale ; pas de pathologie observée, hormis une légère
atteinte arthrosique sur l'articulation présente ;
– un humérus gauche dont il ne reste que le quart
distal du corps avec également une légère atteinte
arthrosique sur l'articulation conservée.
Nivelles, hôtel Rifflart : vue générale de la façade occidentale Escalier conservé dans l'édifice moderne construit entre les
de l'édifice érigé en retrait, dans la propriété. deux bâtiments anciens afin d'y créer une jonction couverte.
sant de surcroît un effet de superposition de registres. sont posés verticalement, leurs aisseliers étant de gaba-
La seconde section, vers le nord, est plus modeste car rits clairement supérieurs à ceux utilisés à l'opposé. La
singularisée par un soubassement moins élevé, un façade orientale de l'édifice se situant bien au-delà, la
usage plus intense de la brique et un seul bandeau, charpente présente une structure « allégée » car partiel-
en petit granit (« pierre bleue »), à travers les fenêtres lement dépouillée d'arbalétriers supérieurs par exemple.
de l'étage. Quant à la porte, son encadrement en petit En raison de la modification de ladite façade, il est
granit présente une taille simple, sans décor sculpté probable que cette anomalie soit le résultat d'un travail
mais offrant un linteau courbe que souligne le tympan en sous-œuvre, d'une adaptation du pan de toiture.
de la porte. Enfin, l'édifice reliant les deux bâtiments, érigé
La démarcation entre les deux sections du bâtiment, tardivement, est doté d'une cheminée à manteau en
de prime abord unitaires et contemporaines, est souli- bois et rideau/tablier en fonte, et d'un escalier en chêne
gnée en extérieur par une cheminée qui marque la tournant droit et à paliers, très particulier et origi-
limite entre la haute charpente en chêne couvrant la nal. Ses balustres à section circulaire rappellent celles
partie méridionale de l'édifice et l'extension récente en de modèles du 18e siècle, mais plus élancés. Aucune
sapin, dotée au demeurant de baies de toiture. recherche n'ayant été engagée à son sujet, il pourrait,
La singularité majeure de l'ancienne charpente est son sans aucune certitude, dater de la fin du 19e siècle.
asymétrie, native ou postérieure, observable entre les
premiers et seconds faux-entraits. Chaque second faux- Perspectives
entrait est fiché dans deux arbalétriers et soutenu par des
aisseliers chevillés ; il sert d'assise au poinçon de fermette Depuis l'acquisition du bien par un privé, vu la richesse
et aux arbalétriers supérieurs qui le bloquent. Les poin- architecturale du site, même si elle se cantonne aux
çons et les liens qui y sont maintenus soutiennent la seules façades et aux escaliers des deux édifices ainsi
faîtière. L'asymétrie se marque en particulier par les qu'à la charpente principale du corps arrière, des
arbalétriers et les aisseliers associés ; à l'ouest, les arba- démarches sont menées avec le bureau d'architecture
létriers suivent la pente de toiture tandis qu'à l'est ils en charge du futur projet, afin d'envisager un maintien
53
maximal mais raisonnable du patrimoine au sein de la temps, cette institution fut dénommée « Maison des
résidence-services qui devrait y être implantée. 12 Apôtres » (1787) et « Maison du Champ retiré »
Une approche plus approfondie, sous forme d'une (19e siècle), dont un porche subsiste toujours rue des
étude du bâti, a été suggérée pour compléter les Brasseurs, identifiable par un cartouche représentant
descriptions collectées à ce jour. le Christ portant sa croix placé au-dessus d'un écu
millésimé de 1738 (Osterrieth, Horbach & Triquet,
Remerciements 2007, p. 53 ; Osterrieth, 2010, p. 29).
Un document daté de 1366 précise que la rue
La requête introduite auprès de la Régie des Bâtiments Coquerne est la ruwelle qui vaut del graigne de le Keri-
a porté ses fruits grâce à M. Laurent Schoder, expert teit en le Kokierne. Ladite graigne (grange) se dressait à
technique, et M. Jacques Van Belle, architecte- gauche en montant la voirie depuis la rue du Wichet.
conseiller, chef du service Wallonie région ouest. Au-delà, mais au 16e siècle, s'élevait une maison
La reconnaissance du Service de l'archéologie détenue par l'abbaye de Floreffe en 1533 (Osterrieth,
s'adresse également à Mmes Bernadette Streel et Horbach & Triquet, 2007, p. 45). En outre, une halle
Caroline d'Ursel, collègues en charge de l'Inventaire aurait été érigée à l'angle des actuelles rues Coquerne
du patrimoine culturel immobilier (Département du et des Brasseurs durant la seconde moitié du 14e siècle
patrimoine, Direction extérieure du Brabant wallon), (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, p. 36 et 43).
de même qu'à M. Olivier Dorchy, membre du bureau De nos jours, quelques façades d'habitations
d'architecture DDV à Nivelles. sises à la rue des Brasseurs témoignent encore d'un
passé brassicole remontant au moins au milieu du
Bibliographie 15e siècle. S'y côtoyaient plusieurs établissements
■■ Chambre provinciale, s.d. Chambre provinciale du Brabant dont la brassine installée dans la cour du keriteit,
wallon. Rapport d'activité 2011, s.l., Commission royale des maison hospital, comme en témoignerait une archive
Monuments, Sites et Fouilles. de 1621 (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007,
■■ de Lalieux É., s.d. (1780-1800). Mémorial de la vie nivelloise, p. 86-88).
2 tomes, Nivelles. Si, selon la carte de Ferraris, des édifices existaient
■■ Stroobant C., 1844. Notice historique et généalogique sur encore durant la seconde moitié du 18e siècle sur la
les seigneurs d'Ittre et de Thibermont, Annales de l'Académie parcelle touchée par le projet urbanistique à l'origine
d'Archéologie de Belgique, II, Anvers, p. 367-409. de l'intervention archéologique, l'espace fut clairement
libéré de toute construction quelques décennies plus
tard comme l'illustre un plan dressé au début du
19e siècle (Cadastre de l'intra-muros de Nivelles, non
Nivelles/Nivelles : vestiges dévoilés par daté).
les travaux d'extension de l'Institut du En 1810, une institution scolaire pour enfants
Sacré-Cœur pauvres fut créée à proximité par une communauté
religieuse, fondée par l'abbé F.-J. Delfosse (Gouy-lez-
Piéton, 1769 – Hoegaarden, 1848). Les bienfaitrices
Didier Willems et Christophe Leduc occupaient trois habitations, dont deux se situaient
près de l'église Saint-Nicolas (Vanderwauwen, s.d.).
Pour répondre à un accroissement de la population Sept années plus tard, la Maison des 12 Apôtres ainsi
scolaire, l'Institut du Sacré-Cœur a envisagé des modi- que les hôpitaux Saint-Nicolas et du Saint-Sépulchre
fications et extensions de ses installations le long de furent regroupés pour devenir l'hôpital général, installé
la rue Coquerne (parc. cad. : Nivelles, 2e Div., Sect. D, dans l'ancien couvent des Récollets jusqu'en 1870 avant
no 932b ; coord. Lambert : 146828 est/142771 nord). un transfert vers le site actuel près du boulevard de la
Comme redouté, ce projet allait révéler des vestiges liés Batterie.
à l'histoire médiévale tardive et moderne du quartier En 1835, la communauté fut reconnue par l'autorité
dit du « petit Saint-Jacques ». ecclésiastique et dénommée Congrégation des Sœurs
de l'Union du Sacré-Cœur. Durant la seconde moitié
Historique du site à travers les sources du 19e siècle, leur implantation, déjà étendue vers la
littéraires et cartographiques rue des Juifs, se développa davantage en accueillant
notamment un internat près de la rue Saint-Jean
Selon les archives consultées à ce jour, en 1225 est (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, p. 67). À cette
attestée la présence d'un keriteit, maison hospital de époque, Charles Demulder (1820-1863), brasseur à
Dieu et de xii apostels condist le Charité. Au fil du Nivelles depuis 1845 et conseiller communal entre
54
1851 et 1857 (Osterrieth, Horbach & Triquet, 2007, La future infrastructure n'étant pas dotée de caves
p. 90), possédait une propriété très vaste s'étendant mais l'importante dénivellation de la voirie devant être
sur approximativement la moitié de la superficie de compensée, des remblais furent maintenus en contre-
l'îlot, compris entre la place Saint-Nicolas et les rues bas et d'autres recoupés en partie haute. Le niveau
des Brasseurs, Saint-Jean, des Juifs ainsi que Coquerne. horizontal défini de la sorte constitua le niveau de fond
Les deux grandes parcelles situées en bordure de cette de coffre supérieur. Une tranchée de fondation fut
dernière étaient manifestement deux jardins. Les également creusée le long de la voirie pour accueillir
édifices formant l'angle avec les rues des Brasseurs et les bases du mur de soutènement et le soubassement
du Wichet furent convertis en habitats, les brasseries de la façade méridionale (côté rue).
ayant fermé leurs portes.
Fin avril 1879, un dénommé Coquelet ou Cognelet, Résultats de l'intervention archéologique
résidant à Villers-la-Ville, racheta les bâtiments de
la Maison du Champ retiré (Osterrieth, Horbach & Descriptions des structures apparues au sol
Triquet, 2007, p. 53-54).
En mars 1913, suite au décès de M. E. Demulder, Les vestiges sont essentiellement des structures
les sœurs signèrent un bail de neuf ans pour bénéfi- construites et des remblais. Abstraction faite des
cier d'un grand jardin bordant la rue Coquerne et perturbations et remaniements récents, il s'agit de
contigu à leur établissement. Son acquisition en avril fondations et soubassements de murs porteurs.
1922 auprès de la fille héritière ainsi que celle d'un Le plus ancien identifié lors de l'intervention serait
second jardin proche et de deux demeures sises à la une fondation, large d'au moins 0,65 m et longue de
rue des Brasseurs permirent aux sœurs d'aménager plus de 0,90 m, située en limite de voirie. Réalisée à
des espaces supplémentaires (Osterrieth, Horbach & l'aide de moellons calcaires liés au mortier de chaux,
Triquet, 2007, p. 68). elle servit d'assise à un soubassement sur lequel dut
En 1931, la Maison du Champ retiré fut démo- reposer une élévation de bâtisse, et assurément dès
lie pour ériger un nouvel édifice et, huit années plus le 19e siècle, le mur de propriété. Axé ouest/est, ledit
tard, les demeures voisines devinrent propriétés des soubassement présente un changement d'orientation
sœurs ; après la Seconde Guerre mondiale, elles éten-
dirent leurs infrastructures vers le nord. En 1953, le
site fut recoupé en surface par la création de l'avenue
Jeuniaux, les deux parties étant jointes par un tunnel
(Vanderwauwen, s.d.).
Le départ des sœurs n'a pas mis un terme à l'établis-
sement, au contraire ; la fréquentation augmentant,
des aménagements furent entrepris sur l'ensemble du
site et ce jusqu'au milieu de l'année 2015.
Contexte de l'intervention
l'objet de trois campagnes de fouilles entre 1994 et à Jauche. Les deux carrières dont il est question ici ont
1996 (Burnez-Lanotte, Lasserre & Van Assche, 1994 ; été découvertes à la suite d'un effondrement de terrain
1995 ; Burnez-Lanotte et al., 1996-1997), mais cette (2015) dans un jardin privé rue de Folx-les-Caves
période de la Préhistoire reste très peu documentée (parc. cad. : Orp-Jauche, 2e Div., Sect. B, no 261 ; coord.
en fouille en Belgique, d'où la nécessité de ne prendre Lambert 72 : 191485 est/152196 nord). Elles ne sont
aucun risque quant à la destruction de vestiges, fût-ce actuellement plus accessibles, la zone effondrée ayant
sur une surface aussi faible que celle des travaux ayant été rebouchée.
fait l'objet de ce suivi. Le trou formé par l'effondrement, dans lequel le
La découverture réalisée a fait apparaître un horizon contenu d'un étang s'est entièrement déversé, présentait
Bt holocène bien conservé et le sondage réalisé pour une section d'environ 3 × 3 m et était profond de 6 m
implanter les citernes montre une épaisseur de lœss jusqu'au sommet du cône d'éboulis. Le réseau de gale-
de 2 m, reposant sur un cailloutis tertiaire criblé de ries accessible correspond à deux carrières différentes
galets de silex, situation classique en Brabant wallon. qui se recoupent (coupe B-B'), chacune étant munie
Le taux d'érosion n'a pas pu être évalué, mais il est très d'un unique puits d'accès. Les deux puits, distants l'un
probablement dans la moyenne de ce qui s'observe sur de l'autre de 15 m, sont colmatés de limons argileux
les terrains agricoles de Hesbaye, soit autour de 60 cm. bruns. Ces marnières ont une profondeur d'exploita-
Du point de vue de la conservation des vestiges, le tion légèrement différente : le sol de la carrière la plus
potentiel archéologique de la zone est donc réel, mais petite, probablement la plus ancienne, est environ 1 m
aucun fait archéologique n'a été mis au jour, ce qui plus bas que celui de la seconde carrière. Les galeries
est peu surprenant vu la faible surface touchée par les de la petite carrière sont également moins hautes et
terrassements. moins larges.
Le puits d'entrée de la carrière 1 fait 1,05 m de
Bibliographie diamètre. Il débouche au milieu d'une galerie longue
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M., Clarys B., d'environ 12 m, orientée nord-ouest/sud-est. Un cône
Van Assche M., Doutrelepont J. & Havard C., 1996-1997. d'éboulis constitué de craie, de blocs de silex et de
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg, limon argileux se trouve à la base du puits. Des plaques
Chronique de l'Archéologie wallonne, 4-5, p. 5-6. de craie se sont détachées du plafond localement. La
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M. & Van Assche M., 1994. galerie principale présente quatre courtes galeries
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg, secondaires, disposées symétriquement de part et
Chronique de l'Archéologie wallonne, 2, p. 6-8. d'autre du puits d'accès. La hauteur des galeries varie
■■ Burnez-Lanotte L., Lasserre M. & Van Assche M., 1995. de 2,5 à 2,7 m et leur largeur de 1,6 à 2 m. La craie a
Orp-Jauche/Énines : « Chêne au Raux », enceinte Michelsberg,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 3, p. 6-7.
Puits d’entrée
carrière 1
marnières
carrière 2
B
A
Olivier Vrielynck, Luc Funcken
et Frédéric Van Dijck Effondrement
2015
A’
Bibliographie
■■ Dudouble A. & Verlut R., 2002. Les marnières, s.l.,
AREHN, éd. Résonnance, 4 p. (www.arehn.asso.fr/publications/ Rebecq/Bierghes : suivi négatif lors de
cpa/cpa22.pdf, consulté le 5 octobre 2015). la création d'une pelouse de dispersion
■■ Préfecture de l'Eure, s.d. Gestion et prévention des risques dans le cimetière paroissial
liés aux cavités souterraines dans l'Eure, s.l. (http://www.eure.
gouv.fr/content/download/2375/15761, consulté le 5 octobre
2015). Didier Willems
■■ Vrielynck O., Delaby S., Funcken L. & Van Dijck F., 2013.
Orp-Jauche/Jauche : la carrière souterraine de « Renau-Fossé », À Rebecq, et plus précisément sur la localité de Bier-
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 40-41. ghes, se dresse le long de la chaussée d'Enghien une
petite église paroissiale dédiée à saint Martin. Les
parcelles la jouxtant au nord accueillent le cimetière et
la morgue (parc. cad. : Rebecq, 2e Div., Sect. B, nos 12,
13b et 14e ; coord. Lambert : 134105 est/154598 nord).
Les incinérations étant de moins en moins marginales,
l'Administration communale prit la décision de démolir la
morgue pour la remplacer par une pelouse de dispersion.
60
Contexte historico-patrimonial d'eau il y avait, elle n'avait pas encore été touchée. De
prime abord, les niveaux atteints suffisaient pour réali-
Bien que l'église soit un ensemble architectural de style ser le projet. Aucun vestige ancien n'a été observé.
classique, érigé en moellons, briques et pierres bleues, Les opérateurs de l'entreprise n'étaient plus sur place
daté assurément du troisième quart du 18e siècle pour fournir de plus amples informations. Pour la
comme la cure qui lui est associée, édifiée elle en 1763 documentation du Service, un petit reportage photo-
selon un millésime (Bierghes, 1974), rien n'exclut une graphique a été effectué dans et autour du cimetière.
antériorité. En effet, l'édifice religieux est doté d'un À travers cette très courte notice, que soient remerciés
portail de style Louis XVI et abrite du mobilier ainsi M. Tony Piron, de l'Administration communale de
que des pierres tombales des 16e-17e siècles. En outre, Rebecq, de même que M. Jean-Pierre Jouret, patron de
il était jadis lié à l'abbaye de Saint-Denis en Brocque- la société B Construct sprl.
roie qui y jouissait d'un droit de collation depuis 1222.
Incluse dans le doyenné de Hal, diocèse de Cambrai, Bibliographie
la paroisse fut rattachée à l'archevêché de Malines ■■ Bierghes, 1974. Bierghes. Égl. paroiss. St-Martin. In : Province
après le Concordat en 1801 (Evrard, 1994, p. 168-169). de Brabant. Arrondissement de Nivelles, Liège (Le Patrimoine
Signalons qu'au 19e siècle, la commune de Bierghes monumental de la Belgique, 2), p. 42-43.
était intégrée au canton de Hal, arrondissement de ■■ Evrard L., 1994. Répertoire des églises du Brabant wallon,
Bruxelles (Recueil, 1823) ; elle n'en fut détachée qu'en Lasne, éd. de l'A.R.C.
1962. Lors de la fusion des communes de 1977, elle fut ■■ Recueil, 1823. Recueil des lois et actes généraux du gouver-
associée à Rebecq. nement, en vigueur dans le Royaume des Pays-Bas, 3e série, 6,
Enfin, pour ne pas confondre ce lieu de culte avec Bruxelles.
celui de Quenast, lui aussi dévolu à saint Martin, il
fut également placé sous le patronage de saint Pierre
(Evrard, 1994, p. 168).
Tubize/Tubize : occupations
L'intervention et son résultat protohistorique, romaine et médiévales à
Stéhou
Un membre de l'équipe du Service de l'archéologie de
la Direction extérieure du Brabant wallon (DGO4 /
Département du patrimoine) s'est rendu sur place le Dominique Bosquet, Olivia De Staercke,
mercredi 7 janvier 2015 en début d'après-midi. La base Véronique Moulaert et Marie-Laure Van Hove
des murs de la morgue avait été maintenue et la dalle
de fond n'avait pas été perturbée. En outre, des tâches Introduction
ponctuelles de maçonnerie avaient été effectuées très
récemment, voire le matin même. Le site a été découvert lors d'une évaluation menée
Selon les informations recueillies au préalable, le par le Service de l'archéologie de la Direction
sous-sol sous et autour de la morgue était déjà perturbé extérieure du Brabant wallon (DGO4 / Département
par la présence d'une citerne à eau de pluie. Si réserve du patrimoine) préalablement à la construction d'un
lotissement de 25 ha par la société Evillas (Bosquet
et al., 2015). Il se situe non loin du hameau de Stéhou,
entre la chaussée de Mons, la rue de Stimbert et la
ligne SNCB 96 Bruxelles-Quévy. Partiellement
financée par l'aménageur, la fouille extensive d'une
zone riche en vestiges est menée en collaboration
avec l'asbl Recherches et Prospections archéologiques
(RPA). Elle a débuté en février 2015 et se terminera
en avril 2016.
Les occupations sont implantées sur le bord oriental
d'une large crête qui domine le ruisseau de Cœurcq
coulant à l'est, tandis que 750 m à l'ouest de la crête
coule la Senne. Le point le plus haut culmine au milieu
de l'emprise à 82,5 m d'altitude et le plus bas corres-
Cimetière paroissial de Bierghes : vue générale de l'ancienne pond au bord oriental du futur lotissement, situé à une
morgue démolie.
altitude de 60 m.
61
F130
F95
Bat. 1
F95
Limite de la fouille
Faits non datés
F95
Fosse La Tène
F 95
Période romaine
13e-14e siècles
Bat. 2
14e-15e siècles
10 m
L'évaluation a couvert 15 ha sur les 25 ha du projet à la chaussée de Mons. Il s'agit de fosses et de trous
immobilier, les 10 ha restants étant occupés par d'im- de poteaux. Pour ces derniers aucun plan ne se
portants impétrants ou n'étant pas menacés de destruc- distingue de façon évidente actuellement. Les coupes
tion. Les faits mis en évidence lors du diagnostic se effectuées montrent des poteaux porteurs assez
concentraient essentiellement sur une zone de 1,5 ha – voire très – imposants, dont certains sont inclinés.
dont 9 000 m² directement menacés de destruction Ces faits présentaient tous d'épaisses lentilles de
par le lotissement. En conséquence, quatre décapages compression et contenaient, pour certains, du matériel
extensifs couvrant 8 467 m² au total ont été réalisés, détritique, notamment de la céramique située entre le
mettant au jour 345 faits anthropiques : fossés, fosses, 1er et le 2e siècle de notre ère (F. Hanut, Direction de
trous de poteau et fondations en pierres d'au moins l'archéologie, communication personnelle). Aucun des
deux bâtiments. Dans l'état actuel d'avancement de la fossés présents sur la frange ouest de la fouille n'a pu
fouille et à l'exception d'une fosse protohistorique, les être daté de façon sûre jusqu'ici, mais il est possible que
vestiges datés concernent les périodes romaine (1er et certains puissent être attribués à la période romaine
2e siècles de notre ère) et médiévale (entre les 13e et également, de même que d'autres fosses.
15e siècles), mais une majorité de structures en creux ne
sont pas encore datées de façon fiable. La chronologie La période médiévale
ne pourra être précisée qu'à l'issue des travaux de post-
fouille, en cours actuellement. La plus grande partie des faits mis au jour peut être
Rappelons enfin qu'aucun site archéologique n'était attribuée à cette période, notamment deux bâtiments
connu à cet endroit (Bosquet et al., 2015). (Bât. 1 et Bât. 2), un chemin dirigé en droite ligne vers
la chaussée de Mons (F130) et un vaste dépôt détri-
La période romaine tique (F95).
Le fait F95, dont le contour est diffus et très sinueux,
À ce stade de l'investigation, les faits romains semblent couvre au minimum 300 m². En coupe, sa profondeur
se concentrer essentiellement sur une bande de 30 à est de 40 cm à 50 cm autour du bâtiment 1 et diminue
40 m de large à l'ouest de la fouille, parallèlement graduellement au fur et à mesure qu'on s'en éloigne.
62
Conclusion
renu
Terv
du lotissement et que le promoteur, la société Evillas, a
e de
Chaussée de Bruxelles
u ssé
accepté de financer.
Ch a
Cou
pe 2
Bibliographie
■ Bosquet D., Delporte L., Van Hove M.-L. & Lozet S., 20 m
2015. Tubize/Tubize : évaluation positive à proximité de Stéhou,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 56-59. Waterloo : emplacement des deux coupes observées par
■ De Brabanter C., 1998. La seigneurie de Renarbus, Tubize rapport à l'emprise du projet immobilier (trait en gras)
reporté sur l'orthophotoplan (2012-2013).
et son passé, 12.
■ Dewert J.-P., Fourny M. & Van Assche M., 1990-1991.
Découverte d'une bouteille en verre gallo-romaine à Braine- lorsque la majeure partie de l'emprise, soit 120 000 m²,
le-Comte au lieu-dit « Favarge » (Ht.), Vie archéologique, 36, avait déjà été terrassée jusqu'à grande profondeur. Il a
p. 44-51. cependant été possible de relever deux coupes visibles
■ Fock H., Remy H., Goffioul C. & Bosquet D., 2008. Les sur les talus nord (coupe 1) et sud (coupe 2) de l'ex-
traverses du temps. Archéologie et TGV. Catalogue d'exposition, cavation. Après un nettoyage rapide, les deux profils
Namur, Service public de Wallonie, 161 p. ont fait l'objet d'un enregistrement photographique et
■ Hoebanx J.J., 1952. L'abbaye de Nivelles des origines au d'une description succincte.
xive siècle, Bruxelles, Académie royale de Belgique (Classe des
Lettres et des Sciences morales et politiques, Mémoires in-8°, La coupe 1
46/4).
Conclusion
Sources
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Braine la Leud, pl. 78.
Hainaut
Monitoring des minières du Silex's (site de « Petit-Spiennes ») par les ingénieurs du SPW (photo
M. Woodbury, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).
67
Mouscron
Enghien Petit-Enghien
Ghislenghien
Ath
Antoing
Soignies
Hollain Maubray Belœil
Brunehaut Quevaucamps
Laplaigne Brye
Lesdain
Saint-Amand
Baudour
Gouy-lez-Piéton
Saint-Ghislain Fleurus
Morlanwelz Courcelles
Montrœul-sur-Haine Saint-Symphorien
Hensies Binche Morlanwelz-Mariemont
Aiseau-
Buvrinnes Presles
Genly
Quévy Presles
Honnelles
Quévy-
Roisin le-Grand
Carte administrative des communes de la province du Hainaut visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée
Éditorial
Comme il est difficile de faire plus avec moins, et même avec encore moins ! Bien sûr l'archéologie est un métier de
passionnés qui ne ménagent pas leurs efforts face aux menaces de destruction de vestiges. Mais pour creuser, dessi-
ner, étudier, il faut des équipes et des moyens en nombre suffisant. Or, on déplore de façon générale une baisse des
effectifs valides. Des chantiers pourtant planifiés ne sont pas réalisés faute de personnel ou sont effectués par trois ou
quatre agents, voire deux. Des choix de dossiers sont faits, la solidarité s'organise entre provinces, des fouilles et des
études sont confiées à des institutions mais le constat est là.
L'archéologie a un coût, c'est le prix de la connaissance de l'histoire de nos sociétés. Nous sommes fiers que la nôtre
puisse encore la financer et nous espérons que cela puisse se poursuivre, mais pour combien de temps et de quelle
manière ? Il semble plus aisé aujourd'hui de justifier la défense de l'environnement, bien que l'on puisse, au moins
partiellement, recréer des biotopes et des espaces de vie, au contraire des vestiges disparus…
Certes, une législation permet théoriquement de protéger le patrimoine archéologique mais là aussi, la vigilance
s'impose puisque le CoDT qui remplacera le défunt CWATUP pourrait laisser moins de marge de manœuvre encore
à l'administration. Le zonage préparé laborieusement doit aider les archéologues mais ces derniers sont toujours
dans l'attente de modalités pratiques pour qu'il soit efficient.
Bref, il importe de rester motivés et inventifs pour affronter l'avenir, d'autant qu'une réorganisation des institutions
de gestion du patrimoine est en gestation.
Malgré ces inquiétudes, il ne manque pas de motifs de se réjouir ; le site de Spiennes accueille enfin un centre d'inter-
prétation après des années d'attente et de préparation. L'administration a largement participé à la réalisation du Silex's
en apportant sa collaboration à la Ville de Mons, tout en poursuivant la fouille du puits contenant les restes humains.
68
Chronique de l'Archéologie
l’Archéologie wallonne
Des chantiers ont fourni d'autres résultats remarquables comme à Ath, Quévy, Soignies ou Aiseau-Presles. Un
vaste village d'environ 1 ha, daté du Néolithique ancien, constitue les vestiges des premiers habitats de la ville d'Ath.
Un peu plus loin, les archéologues ont dégagé des éléments de fortification datant probablement du premier quart
du 18e siècle.
À Soignies, dans la Grande Carrière Wincqz où le Centre des Métiers de la Pierre verra bientôt le jour, le Service
de l'archéologie a assuré la surveillance des travaux et a eu ainsi l'occasion unique de relever scientifiquement les
vestiges d'une industrie. Trois mois de fouille à Quévy ont permis de cerner une occupation rurale continue du 8e au
20e siècle. À Aiseau-Presles, l'exploration exhaustive du site gallo-romain de « La Taille-Marie » s'est enrichie en 2015
d'un atelier lié au travail du fer, sans doute l'atelier de production des socs d'araire.
Autre découverte liée à l'artisanat à Enghien avec une nouvelle charbonnière qui alimente la recherche sur les
structures à combustion, longtemps restées énigmatiques.
Outre celles d'Ath et de Quévy, plusieurs fouilles ont livré des données relatives à l'habitat, comme à Pont-à-Celles/
Luttre, à Mons ou à Mouscron. Enfin, grâce à des chercheurs passionnés, de nombreux artefacts, essentiellement
préhistoriques et gallo-romains pour cette année 2015, ont été récoltés et surtout étudiés.
Pour compléter l'information, on ajoutera les chiffres de l'archéologie préventive en Hainaut, soit 13 suivis,
5 évaluations et 9 fouilles, avec une superficie totale évaluée de 22 ha sur 14 communes.
Au risque de se répéter, il est inconcevable de conclure autrement que par des félicitations et des remerciements à
tous les acteurs et défenseurs du patrimoine archéologique.
Nous souhaitons aussi une heureuse retraite à notre collègue Alain Joly qui nous accompagne avec une efficacité et
une bonne humeur jamais démenties depuis 1993, au début de l'opération TGV.
Hainaut
Comines-Warneton/Warneton : cimetière ;
Courcelles/Gouy-les-Piéton : église Saint-Martin ;
Enghien/Petit-Enghien ;
Fleurus/Brye : chaussée Brunehaut ;
Mons/Mons : rue Cronque ;
Mouscron/Mouscron : château ;
Tournai/Tournai : rue des Maux.
Martine Soumoy
Fouille en cours de la grande scierie de l'ancienne Grande Carrière Wincqz à Soignies (photo N. Authom, Serv. archéologie, Dir. ext.
Hainaut 1).
71
Préhistoire Hainaut
PRÉHISTOIRE
Antoing/Maubray : matériel lithique au
lieu-dit « Polissart »
Marianne Delcourt-Vlaeminck
et Christian Fourmeaux
Hollain : 1. Fragment de poignard en Grand-Pressigny (inv. 17526) ; 2. Fragment de lame (inv. 17529) ; 3. Molette en silex (inv. 17532).
Dessins P. Bastien.
73
Préhistoire Hainaut
12 pièces, la moitié appartient à cette catégorie ; la présence révélés particulièrement riches en pièces originaires de
d'outils de qualité importés du Grand-Pressigny et peut- Touraine.
être du Bassin parisien permet de rapporter ces éléments à Au Néolithique, les ateliers pressigniens ont fabri-
la période comprise entre 2800 et 2400 avant notre ère, soit qué deux sortes de lames selon le type de nucleus
au Néolithique final. Les percuteurs sur haches et nucleus utilisé pour leur obtention. Le modèle le plus ancien
confirment l'existence d'un travail artisanal, la molette (nucleus à crête antéro-latérale), attesté vers 3000
évoquant la mouture. Il est certain que cette partie du site, avant notre ère, a fourni de belles lames, moins
en bordure du plateau surplombant la vallée de l'Escaut, longues toutefois que celles réalisées à partir des
n'a été que peu prospectée depuis plus de cent ans, la célèbres « livres de beurre » que l'on situe entre 2800
majeure partie des recherches ayant surtout eu lieu de part et 2400 av. J.-C.
et d'autre de la route Hollain-Bléharies. Quand on ne dispose que de fragments mésiaux, il
n'est guère facile de savoir à quelle phase les rattacher.
Lorsque, par chance, on découvre des parties proxi-
males intactes, il est possible de déterminer le type de
Brunehaut/Laplaigne : preuve de nucleus de départ.
l'exportation de grandes lames Tel est le cas de la pièce récoltée au lieu-dit
pressigniennes « Baraque » lors de prospections effectuées par
C. Fourmeaux et P. Soleil. Il s'agit d'un fragment
proximal de poignard de section trapézoïdale, ayant
Marianne Delcourt-Vlaeminck, conservé une partie de son talon dièdre piqueté d'ori-
Christian Fourmeaux et Philippe Soleil gine, ce qui permet de le classer dans la catégorie
des longs poignards obtenus à partir d'une « livre de
La présence en Tournaisis de silex du Grand-Pressigny beurre ».
exporté d'Indre-et-Loire (France) au Néolithique est La pièce à l'aspect truité, confectionnée dans un
connue chez nous depuis plus de cent ans et il est certain silex brun orangé (code Munsell 10YR 5/4), présente
que la découverte en Touraine de deux gros dépôts de à sa surface de petits points scintillants (quartz détri-
grandes lames brutes de plus de 30 cm de long aura fait tique). Comme en témoigne la retouche irrégulière
rêver plus d'un prospecteur de notre région. des bords, elle a subi divers réaffûtages qui ont modifié
Ce matériau secondaire de belle qualité, de teinte sa longueur et réduit sa largeur. Dans notre région, ce
le plus souvent « vieux cire », a été exploité à flanc de matériau, sans doute jugé très précieux, a été réamé-
coteaux en Touraine. Une fois mis en forme dans les nagé à outrance, tout comme ce fut le cas des lames
ateliers locaux, il a été diffusé jusque dans le nord des et poignards en silex tertiaire du Bassin parisien,
Pays-Bas et de l'Allemagne sous forme de longues concurrent et contemporain du Grand-Pressigny.
lames et de poignards. Les sites belges et français
du groupe Deûle-Escaut (Néolithique final) se sont
Préhistoire Hainaut
ancien sont surtout identifiables par les nuclei à Obourg Saint-Macaire. Pas de cortex (L. : 23 ; l. : 20 ;
plage corticale en silex de type Hesbaye, tandis que ép. : 9 mm). Inv. B12/2016/1145.
les traces d'un Néolithique récent/final apparaissent 13. Lame épaisse, esquillée accidentellement. Très forte
plus marginales. patine blanc-jaune, silex indéterminé. Traces de rouille
(L. : 42 ; l. : 17 ; ép. : 10 mm). Inv. B12/2016/1158.
Descriptif des objets cités
Bibliographie
1. Armature de flèche sur éclat fin, ailerons et pédon- ■■ Debaille E., 1921. Les Néolithiques sur les rives de la Sambre,
cule peu dégagés. Retouches directes et abruptes. Silex Documents et Rapports de la Société royale paléontologique
de type Spiennes. Pas de cortex (L. : 29 ; l. : 23 ; ép. : et archéologique de l'Arrondissement judiciaire de Charleroi,
5 mm). Inv. B12/2016/1095. XXXVI, p. 83-92, pl. I-IX.
2. Armature de flèche tranchante sur éclat fin. Courtes ■■ Desterbecq D., 2014. Les sites préhistoriques de
retouches directes semi-abruptes sur le bord gauche. Saint-Amand et de Brye (Fleurus, Hainaut). Prospections
Silex de type Spiennes. Cortex conservé à ± 25 % (L. : complémentaires et synthèse, Vie archéologique, 73, p. 5-36.
24 ; l. : 18 ; ép. : 5 mm). Inv. B12/2016/1121. ■■ Desterbecq D., 2015. Occupations préhistoriques au lieu-dit
3. Armature de flèche amygdaloïde sur éclat fin. Silex Trois-Fontaines à Saint-Amand (Fleurus, Hainaut), Vie archéo-
patiné. Pas de cortex (L. : 24 ; l. : 22 ; ép. : 4 mm). logique, 74, p. 9-22.
Inv. B15/2016/1127. ■■ Desterbecq D. & Tromme F., 2010. Nouvelles découvertes
4. Lame fine, talon lisse. Silex de type Spiennes. Pas de préhistoriques de surface, Saint-Amand (Fleurus, Hainaut), Vie
cortex (L. : 47 ; l. : 18 ; ép. : 6 mm). Inv. B12/2016/1087. archéologique, 69, p. 33-49.
5. Lame fine retouchée sur le bord droit, talon puncti-
forme. Une encoche par retouche directe suivie d'une
autre par retouche inverse, puis courtes retouches
continues, inverses et semi- abruptes jusqu'à l'extrémité Mons/Spiennes : conservation préventive
distale. Silex de type Spiennes. Pas de cortex (L. : 65 ; l. : des minières néolithiques en 2014
22 ; ép. : 7 mm). Inv. B15/2015/1129.
6. Grattoir simple, caréné, à enlèvements longs sur
support lamellaire épais. Front esquillé. Retouches Nancy Verstraelen
inverses sur bord gauche formant une encoche large.
Silex de type Spiennes. Cortex conservé à moins En 2014, la dynamique climatique des minières de
de 25 % (L. : 73 ; l. : 32 ; ép. : 19 mm). Inv. B12/2015/1081. « Petit-Spiennes » se définit toujours par un état dit
7. Grattoir simple sur nucleus résiduel à lames. Front « au repos ». La construction de la structure muséale
convexe sur bord gauche. Retouches continues, directes, et les aménagements du site en vue de son accessibi-
abruptes et subparallèles. Grand enlèvement accidentel lité au public se terminent peu à peu. Le monitoring
sur la face inférieure. Silex de type Hesbaye. Pas de installé va permettre d'évaluer l'impact de ces diffé-
cortex (L. : 79 ; l. : 41 ; ép. : 20 mm). Inv. B12/2011/1072. rents aménagements sur le fonctionnement interne de
8. Nucleus pyramidal à éclats, à débitage unipolaire. la minière et leurs répercussions sur la conservation du
Plage corticale réservée. Silex de type Hesbaye. Cortex bien avant son ouverture.
conservé à ± 50 % (L. : 41 ; l. : 55 ; ép. : 44 mm).
Inv. B12/2016/1137. Données thermo-hygrométriques
9. Fragment proximo-mésial de lamelle retouchée, extérieures
talon lisse. Deux encoches par retouches directes sur
le bord droit et une encoche par retouche inverse sur le Le 1er avril 2014, un enregistreur est installé sur la
bord gauche. Silex de type Spiennes. Pas de cortex (L. : superstructure muséale, en façade nord, position
28 ; l. : 10 ; ép. : 5 mm). Inv. B12/2016/1090. idéale pour enregistrer les variations du climat
10. Lamelle fine, talon lisse. Extrémité distale esquillée. extérieur. La période étudiée s'étend d'avril à
Silex à grain fin, brun, translucide de type Obourg. Pas octobre de la même année. L'analyse statistique de
de cortex (L. : 33 ; l. : 10 ; ép. : 6 mm). Inv. B12/2016/1092. ces données ne peut être réalisée faute de données
11. Flanc d'avivage de nucleus à lamelles, à débitage suffisantes. Mais en parallèle, les résultats des relevés
bipolaire. Talon lisse. Silex gris, à grain fin de type effectués par l'IRM à la station d'Uccle démontrent
Obourg. Cortex conservé à ± 50 % (L. : 50 ; l. : 15 ; ép. : que la température annuelle est l'une des plus élevées
9 mm). Inv. B12/2016/1110. depuis 1833. La tendance générale s'oriente égale-
12. Micrograttoir caréné, sur éclat épais. Retouches ment vers une augmentation progressive de la tempé-
directes lamellaires. Front esquillé. Silex gris de type rature annuelle moyenne.
77
Préhistoire Hainaut
Préhistoire Hainaut
des développements biologiques sont à craindre. tion significative des taux en été tandis qu'en hiver une
En journée, la température ambiante du sas est baisse sensible des concentrations est enregistrée grâce
généralement supérieure à celle de l'espace muséal en à la réactivation de la ventilation naturelle. Les mesures
raison des contingences spécifiques de cette structure ponctuelles effectuées au niveau du CO2 dans le courant
destinée à indiquer au loin son emplacement. En effet, de l'année 2014 sont en hausse. Il est dès lors conseillé
l'excroissance architecturale réalisée en polycarbonate d'acquérir un enregistreur pour mesurer en continu les
génère un échauffement thermique en relation avec concentrations afin de s'assurer qu'elles restent sous les
son insolation directe. Peu isolante, et particulière- limites sanitaires définies par les organismes compétents.
ment bien exposée dans un environnement ouvert et
dégagé, la fine paroi transparente accentue donc les Conclusion
effets thermiques solaires. Dès que le soleil se lève,
la température augmente rapidement tandis qu'en La construction de l'infrastructure muséale au droit des
soirée, un phénomène inverse est constaté. L'intensité minières contribue fortement à en modifier le fonction-
du phénomène est supérieure à celui mis en évidence nement. Au-delà des avantages qu'elle présente comme
dans l'espace muséal caractérisé par son inertie supé- la limitation des infiltrations pluviales notamment,
rieure rendue possible par ses dimensions. En effet, un elle réduit le renouvellement de l'air de la minière, la
volume d'air restreint se réchauffe et se refroidit plus ventilation naturelle n'étant possible que lorsque la
rapidement qu'un plus grand volume. Ces premiers température de l'espace muséal est inférieure à celle de
résultats confirment que les conditions d'ambiance la minière. Ce phénomène va avoir des répercussions
ne sont pas appropriées à la préservation de dépôts directes sur les concentrations en radon et en CO2 qui
archéologiques et sédimentaires. Les températures risquent de nécessiter des mesures complémentaires
élevées en association avec une hygrométrie insuffi- comme un renouvellement forcé de l'atmosphère. Il
sante vont générer d'importants phénomènes d'évapo- apparaît néanmoins que la ventilation de la minière, si
ration de l'eau contenue dans les dépôts. Ces derniers elle s'avère nécessaire, doit se faire dans des conditions
vont rapidement s'assécher, se fissurer en entraînant strictes définies par les différents spécialistes. L'air de
une accumulation de sels néfastes en surface qui vont l'espace muséal ne peut en aucun cas être insufflé tel
générer à leur tour des dégradations complémentaires quel. Un traitement préalable doit lui être appliqué afin
comme des amas de cristaux, un voile blanchâtre et de le débarrasser dans un premier temps des impure-
un effritement des couches. De plus, l'ensoleillement tés (spores, pollens, moisissures…) et dans un second
direct de certaines portions du sol va accentuer l'assè- temps, d'atteindre les valeurs thermo-hygrométriques
chement, tandis qu'en parallèle l'apport de lumière va similaires à celles enregistrées en sous-sol.
générer des développements biologiques importants et
problématiques non seulement pour leur nettoyage et/
ou leur éradication mais aussi en raison des dégâts qui
peuvent être causés par les réseaux racinaires. Mons/Spiennes : fouille 2015 du puits
d'extraction de silex ST 6 à « Petit-
Radon et CO2
Spiennes »
De 2011 à 2014, plusieurs campagnes de mesure sont
menées pour assurer la surveillance des concentrations Hélène Collet, Philippe Lavachery,
en radon. Une modification des taux s'observe entre Stéphane Pirson, Michel Toussaint, Lyse Unger
2013 et 2014 que ce soit pour les mesures effectuées au et Michel Woodbury
fond ou pour celles effectuées à l'entrée de la minière.
Les concentrations sont multipliées par un facteur de 4 Introduction
à 5. Cette modification correspond non pas au rempla-
cement des bouchons des différents puits mais bien Le puits ST 6 (parc. cad. : Mons, 19e Div., Sect. B.,
à la pose et à la fermeture de la structure muséale. Il no 393c ; coord. Lambert : 122504,5440 est/
semble qu'avant cette intervention, les phénomènes de 123288,7462 nord) appartient à un ensemble de puits
convection aient été suffisants pour maintenir des taux fouillés dans la zone minière de « Petit-Spiennes »
inférieurs à 3 000 Bq/m³. Le radon s'évacuait par les depuis 1997 grâce à des subventions accordées
interstices laissés autour des différents puits. La mise par le Service public de Wallonie, d'abord à l'asbl
sous cloche des minières a limité les phénomènes de Recherches et Prospections archéologiques, puis à
convection aux périodes froides soit entre novembre l'asbl Société de Recherche préhistorique en Hainaut.
et février-mars. On observe également une augmenta- Ces recherches se sont déroulées sans interruption
80
Les fouilles menées en 2015 n'ont pas encore permis d'at- La Ville de Mons, propriétaire du terrain, a autorisé la
teindre le radier de la minière malgré un sondage prati- poursuite des recherches en 2016, et nous l'en remer-
qué jusqu'à 9 m de profondeur. Son extension maximale cions. Celles-ci se concentreront, en priorité, sur le
81
Préhistoire Hainaut
dégagement des dépôts livrant des ossements humains. forme biconvexe trapézoïdale, ainsi qu'une section
Des sondages destinés à cerner l'extension dans les ovalaire et un talon étroit, se terminant en pointe.
trois dimensions de la minière ST 6 sont également Les bords présentent un méplat. L'outil présente une
programmés. parfaite symétrie bifaciale et bilatérale. Le polissage
de la hache a fait l'objet de beaucoup d'attention et
Bibliographie de soin. L'aspect de ce dernier est doux au toucher,
■■ Collet H., 2003. Mons/Spiennes : fouille dans la parcelle il devait concerner pratiquement toute la surface de
393c de « Petit-Spiennes », Chronique de l'Archéologie wallonne, l'outil. Seules quelques petites plages inférieures à
11, p. 39-40. 1 cm² n'ont pas été polies. Les facettes de polissage
■■ Collet H. & Woodbury M., 2000. Mons/Spiennes : fouille mesurent 10 mm de large dans la partie mésiale et
de puits d'extraction de silex à Petit-Spiennes, Chronique de s'amincissent vers le talon. La fracture en partie
l'Archéologie wallonne, 8, p. 30-31. mésiale est typique d'un accident dû à l'utilisation
■■ Lavachery P., Collet H., Toussaint M. & Woodbury M., de l'outil. L'onde de choc dégagée par le coup qui a
2015. Mons/Spiennes : fouille du puits d'extraction ST 6 à brisé la hache est visible au travers de l'ondulation
« Petit-Spiennes », Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, et des négatifs d'éclats présents en zone mésiale. Un
p. 88-90. enlèvement burinant au niveau du talon est peut-
être également lié à l'utilisation. Le coup à l'origine
de l'éclat a été donné sur la pointe du talon et l'éclat
a suivi le méplat gauche, jusqu'à rebrousser à 80 mm
■■Quévy/Genly : découverte d'un fragment de distance. Il n'est pas impossible qu'il soit une
de hache polie en silex de Spiennes conséquence de la technique d'emmanchement de
la hache. Complète, la pièce devait probablement
atteindre les 200-230 mm de long et présenter une
Philippe Lavachery, Hélène Collet, forme triangulaire (bords rectilignes, base étroite
Amandyne Rosart et Lodewijk De Lens voire pointue associé à une plus grande largeur au
tranchant), une morphologie typique de la produc-
Au cours de l'hiver 2004, l'un de nous (L. De L.) tion des minières de Spiennes.
a découvert un important fragment de hache Cette trouvaille est loin d'être isolée dans la
polie en silex au lieu-dit « Champs des Plognes », région. En effet, depuis des décennies, d'autres
bordant la rue Léonce Spinette à Genly, à 11 km haches en silex ont été ramassées en surface dans les
au sud de Mons et à 7 km au sud-est de Spiennes environs des minières de Spiennes où elles étaient
(localisation approximative : parc. cad. : Quévy, produites en masse au Néolithique moyen, récent
1re Div., Sect. A, no 231b ; coord. Lambert 1972 : et final, entre 4350 et 2200 av. J.-C. (Collet, 2012).
117626 est/118570 nord). La pièce a été trouvée en Ainsi des haches polies, complètes ou fragmen-
surface, lors d'une inspection pédestre, quelques taires, partiellement ou entièrement polies, sont
semaines après avoir drainé le champ sur 1 m de signalées à Hautrage (Dufrasnes, 2006b ; 2006c), à
profondeur. Il n'est pas possible de préciser si elle a Sirault (Dufrasnes, 2009), à Villerot (Dufrasnes,
été remontée lors du drainage ou non, mais l'objet 2011), au Rœulx (Collet, Doumont & Rosart, 2014a),
présente des traces de rouille typiques de contacts à Obourg (Collet, Doumont & Rosart, 2014c), à
répétés avec les engins agricoles qui suggèrent un Harchies (Parent, 1999), à Pommerœul (Dufrasnes
long séjour proche de la surface. La pièce est conser- 1995 ; 2006a). Des haches taillées abandonnées avant
vée dans la collection de l'inventeur. d'être polies ont été découvertes à Gottignies (Collet,
Bien que la hache offre un aspect patiné, on peut Doumont & Rosart, 2014b), à Frameries (De Braeke-
observer qu'elle a été façonnée dans un silex mat, leer & Van Assche, 2001) et à Hautrage (Dufrasnes
moyennement grenu, passant du gris clair en partie & Ballez, 2007). D'autres pièces sont connues mais
mésiale à un gris un peu plus foncé près du talon n'ont pas encore fait l'objet de publications. La
(pouvant correspondre à la transition entre le cœur plupart de ces haches, dont la matière première est
du silex gris clair et la zone sous-corticale plus foncée souvent décrite comme un silex de type Spiennes,
dans le silex de Spiennes). Il s'agit probablement d'un illustrent probablement la diffusion des productions
silex de type Spiennes. des minières dans les environs immédiats mais on
Le fragment découvert consiste en les deux tiers sait qu'elles ont été exportées beaucoup plus loin
basal d'une hache polie. La pièce mesure 155 mm de encore (Bostyn & Collet, 2011).
longueur, 55 mm de largeur et 34 mm d'épaisseur,
pour un poids de 303 g. Le fragment possède une
82
Protohistoire Hainaut
PROTOHISTOIRE
Mons/Saint-Symphorien : signalement d'une
pointe de flèche (Bronze final)
Alain Guillaume
Remerciements
Pointe de flèche du Bronze final découverte à Saint-Symphorien
Nos remerciements vont tout particulièrement (photo K. Welvaarts).
à K. Welvaarts, à I. Jansen, à W. Leclercq et à
E. Warmenbol.
Bibliographie
■■ Warmenbol E., 1995. L'arc bandé et le lit de la Lesse. Les
pointes de flèche en bronze de Han-sur-Lesse, Amphora, 77,
p. 32-64.
■■ Warmenbol E., 2005. Instruments de la mort. Les pointes de
flèche du Bronze final de la grotte de Han (Namur, Belgique).
In : Mordant C. & Depierre G. (dir.), Les pratiques funéraires
à l'âge du Bronze en France. Actes de la Table ronde de Sens-
en-Bourgogne (Yonne), 10-12 juin 1998, Paris (Documents
préhistoriques, 19), p. 119-139.
84
ÉPOQUE ROMAINE
Ath/Ghislenghien : datation
archéomagnétique de deux fours à chaux
Courbes de l'inclinaison et de la déclinaison pour les trois Courbes de l'inclinaison et de la déclinaison pour les trois
derniers millénaires en France (marge d'erreur en gras) derniers millénaires en France (marge d'erreur en gras)
et datation archéomagnétique du four F 666. Densité de et datation archéomagnétique du four F 678. Densité de
probabilité des âges possibles sur base de l'inclinaison I et probabilité des âges possibles sur base de l'inclinaison I et
de la déclinaison D séparément et combinées. de la déclinaison D séparément et combinées.
86
de 95 %, en se référant aux courbes de référence de la C'est durant la phase d'abandon que l'objet subit le plus
variation séculaire de la direction du champ géomagné- de transformations qui vont profondément modifier
tique dans le passé en France, réduites à un seul endroit ses propriétés en fonction du milieu et non du temps
central, Paris (Gallet, Genevey & Le Goff, 2002). passé. Ces phénomènes sont chimiques mais aussi
Les valeurs de l'inclinaison moyenne (62,25° et mécaniques et modifient la cohésion du matériau. La
62,19°) et celles de la déclinaison moyenne (-0,96° phase culturelle se caractérise par l'épreuve de l'exhu-
et -1,96°) obtenues respectivement pour les fours mation, l'objet devant passer à un milieu atmosphé-
GHIA02 et GHIA03, relocalisées à Paris avec les rique auquel il devra s'acclimater, mais aussi par des
erreurs (lignes horizontales pointillées), sont compa- phases de traitements qui lui feront également subir
rées avec la courbe de référence. Les distributions de la des transformations. Ces phases critiques doivent être
densité de probabilité des âges possibles sont données gérées et accompagnées dès la découverte (Païn, 2015,
pour l'inclinaison et la déclinaison séparément et p. 20-23). L'état de dégradation, les niveaux d'altération
combinées. Les rectangles représentent les intervalles inégaux, la compréhension et parfois l'identification de
d'âges possibles à 95 % de confiance. l'objet, sa finalité, étude ou exposition, sont autant de
problématiques spécifiques à la matière. Même si de
Conclusion grands principes et méthodes peuvent se dégager selon
la nature de l'objet et la période traitée, nous sommes
Les intervalles d'âges possibles obtenus pour les confrontés au côté aléatoire de l'état de conservation
deux fours à chaux GHIA02 et GHIA03 indiquent et jamais à l'abri de bonnes mais surtout de mauvaises
que la dernière cuisson date de l'époque romaine. La surprises. Ce fut malheureusement le cas pour les
similitude des directions des rémanences enregistrées tombes de Ghislenghien III.
dans les fours et les dates archéomagnétiques obtenues Cette fouille réalisée en 2014 sur la future zone
suggèrent que les deux structures examinées étaient d'activité économique (Danese & Hanut, 2014 ; 2015)
probablement contemporaines. a mis au jour deux tombes comprenant un nombre
important d'objets en fer, en alliage de cuivre et de la
Bibliographie céramique. Vu la qualité des tombes et leur caractère
■■ Fisher N.I, Lewis T. & Embleton B.J.J., 1987. Statistical exceptionnel, il a été décidé de traiter ce matériel en
analysis of spherical data, Cambridge, Cambridge University priorité au sein du Service public de Wallonie, cela
Press. afin de limiter autant que possible les dégradations
■■ Gallet Y., Genevey A. & Le Goff M., 2002. Three millennia inévitables survenant après la mise au jour des objets
of directional variations of the Earth's magnetic field in west- et entraînant par conséquent du travail supplémen-
ern Europe as revealed by archaeological artifacts, Physics of the taire, comme ce fut malheureusement le cas pour
Earth and Planetary Interiors, 131, p. 81-89. d'autres anciens dossiers complexes. Vu la quantité
■■ Danese V., Authom N., Deforce K., Hanut F. & Pigière F., de travail, le traitement des pièces n'a pu se faire au
2015. Ath/Ghislenghien : les vestiges romains mis au jour lors sein même du SPW et a dû faire l'objet d'un marché
des évaluations de 2013 et 2014 dans l'extension est de Ghislen- de service pour « étude, dessin et manipulation des
ghien III, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 106-110.
alliages de cuivre », attribué à l'asbl Recherches et
Prospections archéologiques (RPA) et exécuté par
une archéologue-restauratrice. Malgré la mise en
œuvre rapide de toutes les démarches administra-
Ath/Ghislenghien : la problématique de
tives, un inévitable délai d'un an a été nécessaire entre
la conservation-restauration du matériel la fouille et le début de la restauration.
archéologique métallique. Le cas des
alliages de cuivre de deux tombes augusto- L'évaluation et le travail
tibériennes
En présence d'objets en alliage de cuivre d'époque
romaine, on peut s'attendre raisonnablement à du
Muriel Van Buylaere matériel de bonne qualité, relativement bien conservé
et stable. C'est le cas d'objets similaires contemporains
En archéologie, l'approche de la conservation- trouvés notamment en Angleterre et dans le nord-ouest
restauration des biens se pose différemment que dans de la Gaule. Dès la fouille, les objets ont montré leur
les collections muséales. Le mobilier archéologique fragilité. Ils ont nécessité la mise en œuvre de précau-
connaît plusieurs phases au cours de sa vie : « phase tions particulières sur chantier, comme le prélèvement
utile », « phase d'abandon » et « phase culturelle ». en motte systématique avec renfort de bande plâtrée,
87
Principaux objets de la tombe 1 (F650) après restauration. De gauche à droite : patère, œnochoé, bol à filtre, passoire et puisard,
marmite avec couvercle (photo R. Gilles, Dir. archéologie).
ou encore la réalisation de contenants spécifiques. produit en présence d'agents extérieurs, entre autres
Les prélèvements en motte demandent une interven- l'oxygène, l'eau ou des bactéries. C'est pour ralentir,
tion rapide en laboratoire pour éviter leur éclatement voire stopper cette dégradation que des mesures de
au cours du séchage, endommageant les objets. Au conservation préventive doivent être prises pour assu-
moment de l'évaluation du travail, les prélèvements ne rer le maintien de l'objet dans un milieu stable.
présentent qu'un dégagement partiel des objets accom- La maladie du bronze, forme particulière de corro-
pagnés de quelques remarques sur leur état notées sur sion active des alliages de cuivre archéologiques
chantier par les archéologues. Dans ces conditions, le qui peut mener à la disparition de l'objet, a aussi été
diagnostic ne peut être que très superficiel, fondé sur détectée sur l'œnochoé et sur la patère associée. Cette
les quelques éléments apparents, et l'estimation se fait forme de corrosion s'est manifestée surtout sur le
sur base de suppositions et des expériences antérieures, revers de ces objets qui présente un aspect de surface
constituant une prise de risque pour le restaurateur pustuleux. Elle demande des traitements spécifiques,
indépendant. avec notamment l'immersion des pièces dans de
Au fur et à mesure de l'avancement du travail, nous longs bains de déchloruration. À cause de la fragilité
avons constaté un très mauvais état de conservation du matériel due à tous les problèmes évoqués précé-
de tous les objets. En plus d'être très fragmentés, ils demment, le degré de nettoyage initialement demandé
présentaient toutes les étapes de la minéralisation du a été revu avec la réalisation d'un avenant au marché
métal, du cœur métallique à la disparition complète de service initial, et c'est finalement une intervention
de certaines zones. La marmite de la tombe 1 (F650) complète qui a été effectuée : nettoyage approfondi,
les réunissait toutes. Rappelons ici la définition de la remise en place de tous les fragments pour éviter les
corrosion métallique : la corrosion est l'ensemble des pertes et compléter les profils, doublage et comblement
processus physico-chimiques qui s'établissent entre le pour consolider et stabiliser l'objet, indispensable
métal et le milieu à partir de la surface du métal et qui pour assurer la pérennité de ce matériel. Des conte-
provoque le retour du métal à un état minéral, proche nants adaptés ont été directement réalisés au Centre
de celui du minerai, plus stable. La corrosion est un de Conservation et d'Étude (CCE) du SPW à Saint-
phénomène spontané et irréversible (Bertolon & Relier, Servais selon les normes en vigueur et en collaboration
1990, p. 171). Cet état de retour à l'état minéral se avec le personnel du CCE. Une attention particulière a
88
également été portée sur le prélèvement en zones des esquilles osseuses ont été découverts concentrés sous
sédiments, dans le but de mener une campagne d'ana- le couvercle, autant dans le remplissage que sur le fond
lyse et d'identification. de la marmite. Un noyau a également été retrouvé dans
le creux de la carène.
Le matériel La passoire et le puisard (cola), très fins, minéra-
lisés à cœur et imbriqués l'un dans l'autre, n'ont pu
La tombe 1 (F650) renfermait le plus grand nombre être dissociés. Ils présentaient des cassures multiples
d'objets en alliage de cuivre. aux manches. Des racines se sont insinuées dans les
L'œnochoé est la pièce la mieux conservé, elle perforations du filtre de la passoire et dans le puisard,
comporte quelques pertes sur sa panse. Découverte découpant le fond en de multiples petits fragments
couchée, la face non lessivée présente une très belle devant être consolidés et fixés en place. Les perfora-
patine. L'anse est détachée, mais parfaitement reposi- tions du filtre de la passoire forment un décor. Le bord
tionnable grâce aux négatifs de soudure sur la panse et de la passoire a partiellement disparu et les sédiments
à l'ajustement parfait du col et de l'attache de l'anse. Le ont été conservés entre les deux bords restants, faisant
tout conserve encore un cœur métallique. ainsi office de renfort.
La patère ou bassin à manche (trulleum), qui présente La tombe contenait également deux paires de fibules
une très belle patine, a révélé un décor gravé au centre « à queue de paon » ayant perdu l'extrémité de leurs
de la face interne, très bien préservé malgré l'attaque pieds. Minéralisées à cœur, sans plus aucune cohésion,
de surface constatée au revers. Le manche et sa termi- elles n'ont pu être dégagées que grâce à une consolida-
naison en tête de bélier très fragiles sont minéralisés tion intensive et la conservation en place des matières
à cœur avec des risques de pertes de surface. La tête organiques présentes entre les paires de fibules, faisant
comporte encore une matière brune très dure, peut- aussi office de soutien. Elles restent malheureusement
être le reste du noyau de la fonte (Pernot, 1998). extrêmement fines et fragiles, difficilement manipu-
Le bol à filtre (Stainer bowl) présente un filtre décoré, lables.
déchiré et déformé. Sous le couvercle ont été décou- La tombe 1 comportait encore un anneau, deux
verts deux éléments triangulaires en plomb acco- petits boutons, un micro-fragment non identifié, laissé
lés à la paroi au ras du bord. Ce sont sans doute les en motte vu sa grande détérioration, et un élément de
supports du couvercle. Le filtre et le couvercle ont dû charnière.
être redressés et en partie comblés. Le bec verseur en La tombe 2 (F673) a livré trois fibules à ressort et un
forme de tête de canidé est très fragile et présente des disque en alliage cuivreux associé aux ossements inci-
perforations dues à la corrosion. Sur le bol, des traces nérés du défunt, le tout prélevé en motte. En accord
de cuprite accompagnées de pellicules argentées et de avec l'archéologue et l'anthropologue, le dégagement
résidus poussiéreux noirs rappellent des produits de des os a été effectué par la restauratrice, privilégiant
corrosion de l'étain. les objets plutôt que les ossements. Cependant, une
La marmite et son couvercle furent les éléments les attention très particulière a été portée sur le prélève-
plus complexes techniquement. En plus de leur grande ment des fragments osseux. Un relevé spatial et photo-
inégalité de conservation, les deux éléments étaient très graphique couche par couche a été effectué. Le disque
fragmentaires et déformés. Le couvercle se présentait plat de plus ou moins 10 cm de diamètre pourrait
en trois parties de conservation inégale avec des micro- être un miroir sans manche. Une bordure décorative
fragments. Un doublage complet et des comblements est présente sur une face. L'autre face, sans bordure,
ont été nécessaires pour pouvoir le reconstituer. Il était présente une patine bleu-noir. Des ossements étaient
muni d'un anneau de préhension en fer. Le dégagement accolés au disque avec pour conséquence la migration
fin a montré des restes fibreux de part et d'autre de cet des oxydes de cuivre sur les os. Il a été difficile dès lors
anneau. La marmite est écrasée sur un côté, rendant de séparer les éléments, avec comme conséquence la
l'accès à la surface interne difficile, et les nombreuses perte de micro-fragments sur le bord du disque.
cassures et perforations ont nécessité un doublage de
toute la face interne. Le fond de la marmite et le revers Conclusion
du couvercle présentaient une couche exceptionnelle-
ment épaisse d'oxydes de cuivre de ± 5 mm se déli- Dans l'ensemble, le travail fut long et minutieux
tant en plaques et révélant une surface partiellement mais scientifiquement concluant. Le rendu esthé-
patinée. Ce phénomène pose question quant à son tique est malheureusement décevant de par l'état de
origine. Provient-il des conditions d'enfouissement ? conservation des objets. Tout au long du processus de
D'une utilisation particulière ? D'un contenu spécial restauration, un dialogue permanent entretenu entre
lors de l'inhumation ? Des fragments de clous et des la restauratrice, les archéologues et les membres du
89
CCE a permis de répondre à nombre de questions de ■■ Pernot M., 1998. Archéométallurgie de la transformation
part et d'autre, faisant de ce dossier une expérience des alliages à base de cuivre. In : L'innovation technique au
très enrichissante pour chacun. L'expérience d'ar- Moyen Âge. Actes du VIe Congrès international d'archéologie
chéologue associée à celle de la restauration présente médiévale (1-5 octobre 1996, Dijon – Mont Beuvray – Chenôve –
Le Creusot – Montbard), Caen (Actes des congrès de la Société
tout son intérêt car elle implique une compréhension
d'archéologie médiévale, 6), p. 123-133.
des besoins de chacun avec un langage commun.
Une restauratrice extérieure au SPW à participé aux
fouilles, conseillant les archéologues et aidant à la mise
en place de mesures préventives. Malheureusement,
elle n'a pas suivi les objets tout au long du processus Enghien/Petit-Enghien : une structure à
menant à leur restauration complète, ce qui lui aurait combustion du type « charbonnière »
permis une vision globale au gré des différentes phases.
Une intervention rapide est la clé d'un résultat opti-
mal. Même si dans le cadre de cette fouille, tous les Nicolas Authom
moyens ont été mis en œuvre rapidement, le délai d'un
an a tout de même causé des dommages. Ce problème La création d'une station de biométhanisation a été
est aujourd'hui activement pris en compte et le traite- l'occasion d'une surveillance archéologique aux abords
ment prioritaire des tombes de Ghislenghien en est la de la ferme du château de Warelles (parc. cad. : Enghien,
première application. 3e Div., Sect. C, nos 109c et 100a ; coord. Lambert :
L'enjeu dans le futur sera la conservation préventive 128386 est/151910 nord), seigneurie implantée au
de ces objets car même restaurés, il restera toujours 18e siècle sur le territoire de Petit-Enghien (R. Noir
des principes actifs au cœur de la matière tant qu'elle Mouchon, 1997). De nombreux sites, prospectés et/
n'est pas complètement minéralisée. En cas d'absence ou fouillés préalablement aux travaux de la LGV et
de conditions stables la corrosion reprendra que ce mentionnés à l'inventaire du patrimoine archéolo-
soit pour les objets en alliages ou encore plus s'il s'agit gique, ont également motivé cette intervention.
d'objets ferreux. Une surface de plus de 1 000 m2 a été décapée : hormis
Beaucoup de questions restent encore en suspens, un remblai moderne condamnant une dépression
comme les compositions chimiques, l'origine de la naturelle, a été mise au jour, à 0,60 m sous la surface
couche d'oxydes de la marmite… Nous espérons que les actuelle, une fosse à rejet cendreux. Partiellement hors
analyses prévues pourront y répondre. Des recherches emprise, elle est de plan rectangulaire (2,36 m × 0,90 m
peuvent également être entamées quant aux raisons de à 0,96 m) et conservée sur une profondeur de 0,08 m
la détérioration particulière des objets de ce site, tant à 0,26 m. Le fond est plat et recouvert d'une charge de
sur les alliages cuivreux, le fer ou encore la céramique. charbon de bois dont l'épaisseur est irrégulière (0,03 m
à 0,15 m). Celle-ci est surmontée de manière inégale par
Bibliographie un mélange de limon lessivé gris clair, de limon brun-
■■ Bertolon R. & Relier C., 1990. Les métaux archéologiques. jaune et de quelques éléments de terre rubéfiée. L'action
In : Berducou M.-C. (coord.), La conservation en archéologie : du feu n'a pratiquement pas marqué le sol encaissant, à
méthodes et pratique de la conservation-restauration des vestiges l'exception d'un court tronçon (0,60 cm) le long de la
archéologiques, Paris, p. 164-221. paroi sud (épaisseur de rubéfaction max. : 2 cm) et une
■■ Danese V. & Hanut F., 2014. Ath/Ghislenghien : deux petite zone irrégulière dans la moitié nord. Aucun arte-
sépultures privilégiées d'époque augusto-tibérienne au cœur fact n'a été trouvé dans le remplissage supérieur, ni dans
du territoire nervien, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, la couche de charbon de bois dont une grande partie a
p. 110-116. été prélevée en vue d'analyses ultérieures.
■■ Danese V. & Hanut F., 2015. Découverte de deux sépultures Les recherches sur ce type de structures, il y a peu
privilégiées d'époque augusto-tibérienne au cœur du territoire encore énigmatiques (Bosquet & Livingstone Smith,
nervien (Ath/Ghislenghien), Bulletin du Cercle royal d'Histoire
1995 ; Remy & Soumoy, 1996, p. 56) ou parfois abusi-
et d'Archéologie d'Ath et de la Région, 13, 238, p. 109-127.
vement interprétées comme funéraires, ont évolué ces
■■ Païn S., 2015. Manuel de gestion du mobilier archéologique. dernières années. Les fouilles menées entre autres à
Méthodologie et pratiques, Paris (Documents d'archéologie
Ghislenghien (Danese, 2014 ; 2015), Emblem (Deforce,
française, 109).
Marinova & Dalle, 2015, p. 75-79) ou Zoersel (Deforce
et al., 2013) ont permis d'observer de nombreuses
structures aux caractéristiques semblables, interprétées
comme des charbonnières. Le plan de ces dernières
évolue depuis une forme rectangulaire lors de la période
90
■■ R. Noir Mouchon, 1997. R. Noir Mouchon, nos 14-15. La surveillance couvrait un tracé de voirie de
Château de Warelles. In : Province de Hainaut. Arrondissement 2 200 m de long, depuis la ferme Chassart jusqu'au
de Soignies, Liège (Le Patrimoine monumental de la Belgique, lieu-dit « Phillipebourg » ; les sondages étaient implan-
231), p. 352-356. tés à mi-chemin entre l'agglomération de Liberchies
■■ Remy H. & Soumoy M., 1996. Chronologie des occupations (à 8,5 km au sud-ouest) et la bourgade de Baudecet/
et bilan archéologique. In : Remy H. & Soumoy M. (dir.), Sur la Sauvenière (à 13 km au nord-est). La voirie, depuis la
voie de l'histoire. Archéologie et TGV, Namur (Études et Docu- ferme Chassart jusqu'au croisement avec la rue Sart
ments, Fouilles, 2), p. 53-56.
Maletto, est conservée sous la forme d'un chemin
de terre carrossable ; au-delà, et jusqu'au croisement
avec la RN93, toute trace de chemin a disparu sous les
terres agricoles. Enfin, après la nationale, le chemin
Fleurus/Brye et Villers-la-Ville/Marbais : n'est plus carrossable mais son tracé est matérialisé
analyse stratigraphique de la chaussée par un talus de végétation marquant la limite parcel-
romaine Bavay-Cologne laire où subsistent, çà et là, quelques vestiges d'une
voirie moderne comme des panneaux de circulation et
du bitume.
Nicolas Authom et Olivier Collette Deux sondages perpendiculaires à la chaussée ont
particulièrement retenu l'attention : le premier (S1)
La voie antique Bavay-Cologne (sur le sujet, entre pour le bon état de conservation des niveaux anciens
autres : Bailleux & Graff, 1993 ; Brulet, 2008, p. 55-80 ; du chemin et la pédogénèse des sols sur lesquels la voie
Corbiau, 1997 ; 2014, p. 4-10 ; Corbiau & Bausier, 2015 ; a été implantée, le second (S2) pour sa stratigraphie
Deramaix, 2006 ; De Waele & Soumoy-Goffart, 1988, tout à fait différente alors qu'il n'est éloigné que de
p. 114-121 ; Jurion-de Waha, 1984, p. 60-64) marque la 500 m du premier sondage.
frontière des territoires de Brye et de Marbais (Villers-
la-Ville, Brabant wallon). À cet endroit, la pose d'une Sondage S1
conduite d'eau commanditée par la Société wallonne
des Eaux a permis au Service de l'archéologie de la Le sondage est long de 10 m pour une profondeur
Direction extérieure du Hainaut 1 (DGO4 / Dépar- moyenne de 2,20 m sous la surface actuelle, avec un
tement du patrimoine) d'assurer une surveillance des approfondissement ponctuel jusqu'à 3 m au niveau
travaux et de bénéficier du creusement de sondages, de l'ancienne canalisation. Aucune information perti-
réalisés par la société TEGEC, en vue de retrouver une nente n'a pu être dégagée en plan, le sondage, effectué
ancienne conduite d'eau déjà présente sous le chemin en paliers, n'excédant pas plus de 1 m de large. Le profil
actuel. L'opération et certains sondages destinés présente une interruption côté nord (0,80 m de large)
uniquement au volet archéologique étaient intégrés au causée par la pose de l'ancienne conduite d'eau.
cahier des charges de l'entreprise, offrant une collabo- Le sol encaissant est un limon argileux jaune à glosses
ration aisée entre les différents intervenants. de décoloration et fentes de retrait (a) surmonté d'un
niveau brun limoneux (Bdark) (b) ; ces horizons d'élu-
viation ont été recouverts d'un fin dépôt de ruisselle-
ment silteux. Sur celui-ci, un épais remblai limoneux
Coupe de la chaussée au niveau du sondage S1 (infographie C. Tesch, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).
homogène à fins constituants (c) semble avoir été un niveau de circulation cohérent. Une succession de
artificiellement apposé ; son profil rectiligne et plat recharges (ép. : ± 30 cm) ont été apportées au-dessus
suggère une mise à niveau de la surface du sol. Les de ce niveau, composées de limons sableux mêlés à des
dimensions restreintes du sondage ne permettent pas cailloux, des galets et rythmées par de fines couches de
d'identifier ce remblai comme une phase préparatoire sables oxydés (j). Enfin, est apposé un dernier niveau
à l'installation de l'assiette de la voirie. Aucune couche dont la composition est proche des autres recharges
humifère n'a été observée ni de bioturbations typiques mais l'aspect plus hétérogène ne présente pas une
d'un horizon de surface ; le contact très irrégulier avec organisation stratifiée et la charge en galets et pierres
la couche inférieure peut résulter d'un arrachage de est bien moins importante (k). S'y retrouvent encore
surface. Au-dessus de ce remblai se trouve un limon
homogène, gris clair, marqué d'un réseau de fines frac-
tures horizontales, soulignées d'oxydes de fer, et reliées
entre elles par d'autres fractures perpendiculaires (d).
Ce limon lessivé et remanié pourrait avoir été appor-
té par ruissellement durant un laps de temps assez
long, vu son épaisseur (jusqu'à 0,60 m). Après dépôt,
cette couche a subi des compressions nombreuses et
répétées (traces de circulation ?) qui ont provoqué
l'apparition d'une structure « feuilletée ». L'étude de
ces deux strates a fait l'objet d'observations en lames
minces.
Un radier de pierres forme l'assise de la voirie ; il
s'agit d'un mélange de grès, de calcaires, de phyllades
et quartzophyllades, de tailles et formes irrégulières,
liés entre eux par une argile brunâtre (e). Au-dessus,
sont appliquées deux couches successives de sable
limoneux : un sable gris, dense, recouvrant les pierres
(f), surmonté d'un sable jaune, à la texture plus hété-
rogène (g). L'épaisseur de la couche de sable jaune,
plus importante au nord, tend à s'affiner vers le sud où
elle vient buter contre une grosse pierre (h). Celle-ci
marque l'extrémité de l'aménagement et est interprétée
comme une bordure destinée à maintenir le radier et le
sable. Couvrant cette assise, une couche compacte de
cailloux schisteux et schisto-phylladeux est mélangée
à un limon cohérent non carbonaté (i). Des gisements
de ce type de schiste sont connus à Villers-la-Ville. La
bordure est recouverte par cette strate dont la surface Détail de la bordure et des différentes charges formant la
voirie.
plane et légèrement bombée semble correspondre à
93
Chronologie et conclusion
clairement l'époque de construction. ■■ Corbiau M.-H., 2014. Les voies romaines à travers nos
Toutefois, certains indices issus des sondages régions. In : Coquelet C. (dir.), L'archéologie en Wallonie.
témoignent d'aménagements déjà observés, lors de L'époque romaine. Voies de communication, établissements
fouilles plus anciennes, sur d'autres tronçons de la ruraux et agglomérations, Namur (Carnets du Patrimoine, 113),
chaussée ; tronçons qui, eux, sont avérés antiques par p. 4-10.
le matériel archéologique qui y est associé. C'est le cas ■■ Corbiau M.-H. & Bausier K., 2015. Les voies de commu-
du fossé de traçage axial, repéré dans le sondage S2. nications en pays nervien. In : Bausier K. & Beirnaert-
Mary V. (dir.), Rome en pays nervien. Retour sur notre passé
Tout porte à croire qu'il est le prolongement du fossé
antique, Ath – Bavay, p. 88-96.
no 35, fouillé à Villers-Perwin, dont l'analyse stratigra-
phique a confirmé un comblement antérieur au règne ■■ Deramaix I., 2006. Binche, Waudrez. Chaussée romaine,
constructions riveraines et nécropole. Rapport de fouilles menées
de Domitien. Si les remblais supérieurs ne peuvent être
lors d'aménagements modernes, Namur (Études et Documents,
attribués chronologiquement, le fossé de traçage laisse Archéologie, 11).
peu de doute quant à son caractère antique. Il est le
■■ De Waele É. & Soumoy-Goffart M., 1988. Villers-Perwin :
préalable à la construction de la voirie, axe figé dans le
la chaussée romaine Bavay-Cologne. In : Activités 86 à 87 du
paysage à l'époque augustéenne. S.O.S. Fouilles, 5, p. 114-121.
Dans le cas du sondage S1, la mise en œuvre de la
■■ Jurion-de Waha F., 1984. Coupe dans la chaussée Bavai-
voirie correspond au modèle antique : une bordure, un Cologne à Gouy-lez-Piéton. In : Activités 81 à 83 du S.O.S.
radier de pierre, les charges de sable et galets et un revê- Fouilles, 3, p. 60-64.
tement supérieur (Anderson et al., 2003, p. 175-184) ;
bien sûr, les composantes utilisées sont adaptées, selon
la région, aux matières premières disponibles.
L'information récoltée quant aux dimensions de la
chaussée est, elle, tronquée et ne peut être comparée Hensies/Hensies : habitat du Haut-Empire
avec d'autres sites étudiés. Dans le cas du sondage S1, à « La Neuville », estampille sur sigillée
des travaux modernes ont détruit une partie des infor- non répertoriée et petit matériel divers
mations et, dans le sondage S2, les vestiges construits
ont été érodés par les passages et les éléments naturels,
avant de laisser la place à un chemin creux, petit à petit Jean Dufrasnes et Éric Leblois
remblayé.
Les futures analyses menées sur les sédiments sous- En 1986, des prospections menées par l'un des auteurs
jacents à la chaussée révèleront l'environnement préa- (J.D.) permirent de repérer les vestiges d'une construc-
lable à la pose de la chaussée et la présence ou pas tion d'époque romaine au lieu-dit « La Neuville »
d'activés humaines antérieures sur ce plateau. (parc. cad. : Hensies, 1re Div., Sect. A, nos 204c et 206g).
Enfin, il est intéressant de signaler que pour ces Connu depuis le milieu du 19e siècle, ce site figure sur
deux sondages, le tracé actuel (soit toujours visible, différentes cartes archéologiques (Van Bastelaer, 1880 ;
soit matérialisé par la végétation) n'a pratiquement pas de Loë & de Munck, 1890).
dévié de son axe au cours des siècles, si ce n'est un élar- Outre quelques petits objets métalliques et un sigle
gissement ponctuel (m) rapidement abandonné sous sur sigillée, trois fragments de meules tournantes en
un remblai et les terres de culture. « arkose » de Macquenoise furent aussi découverts
lors de ces recherches (De Braekeleer, Dufrasnes &
Bibliographie Houbion, 1989, p. 160-163, pl. VI-VIII, photos 12-13.
■■ Anderson T.J., Agustoni C., Duvauchelle A., Serneels V. Détermination du matériau par Paul Picavet). Un
& Castella D., 2003. Des artisans à la campagne. Carrière de sesterce fruste valut au site d'être enregistré au Cabinet
meules, forge et voie gallo-romaines à Châbles (FR), Fribourg des Médailles de Bruxelles sous le numéro 7381001.
(Archéologie fribourgeoise, 19).
■■ Bailleux G. & Graff Y., 1993. Trente ans de fouilles à Liber- Alliage cuivreux
chies, Romana Contact, sans no.
■■ Brulet R. (dir.), 2008. Les Romains en Wallonie, Bruxelles. – Tête d'une fibule à ressort protégé (5). Le raccord
■■ Corbiau M.-H., 1997. La chaussée romaine Bavay- de l'arc à l'étui, courbe, et les cannelures la rattachent
Tongres, un patrimoine monumental remarquable. In : au groupe 4, type 4, variante 1 ou 2 d'Émilie Riha
Corbiau M.-H. (dir.), Le patrimoine archéologique de Wallonie, (1994 : 1er siècle). Dim. : 1,8 × 1,4 x 0,8 cm. Les fibules
Namur, p. 274-276. à ressort protégé ne se rencontrent pratiquement pas
dans cette zone du fond de la vallée de la Haine, les
traces d'occupation datant du 1er siècle sont d'ailleurs
95
Plomb
Pierre
Hensies/Montrœul-sur-Haine : vestiges
gallo-romains du Haut- et du Bas-Empire
recueillis au lieu-dit « La Préelle »
Hensies, « Coron Franoé » : fragment d'une coupe moulée Jean Dufrasnes et Éric Leblois
Drag. 37 en terre sigillée du Sud de la Gaule.
Les petits objets en alliage cuivreux type Tongeren 352 (le plus répandu au 3e siècle ;
Vanvinckeroye, 1991) ;
Deux fragments de fibules à charnière en étui furent – dolia, généralement en pâte septentrionale, mais
découverts. aussi en pâte à dégraissant grossier ;
– Le premier (1) s'intègre au groupe 23d4a de – commune sombre : assiette NerA6 (seconde moitié
Jacques Philippe (2000, no 412 : ca 50-80/90 apr. J.-C.). du 2e siècle à Bavay), marmites NerM1, NerM2 (proches
Ce modèle est connu à Augst dans des contextes plus d'exemplaires mis au jour à Bavay et à Étroeung dans
tardifs (Riha, 1979, no 924 ; 1994, no 2416, p. 114, des contextes de la première moitié du 3e siècle) et
variante 5.7.7). L. : 3,4 cm. À l'échelle régionale, un NerM6, jattes NPicJ4 et NPicJ22b (Blondiau, Clotuche
fragment semblable provient de Tertre (Dufrasnes & Loridant, 2001 ; Collectif céramique-ABG, 2010) ;
& Leblois, 2010) et une fibule appartenant au même – pot à provisions à lèvre plate et horizontale et pot à
groupe fut trouvée sur le site de la villa de Meslin- provisions à lèvre évasée (Brulet, Dewert & Vilvorder, 2001,
l'Évêque (Dufrasnes, 1993, pl. II, no 1). p. 292 : principalement dans des contextes du 3e siècle) ;
– Le second (2) correspond au type Riha 5.5.5 (1979, – fragment de la panse d'un récipient en céramique
no 754, fibule exhumée dans un contexte daté de la modelée.
période 70-250 apr. J.-C.). À Augst toujours, les autres
fibules de ce groupe sont principalement attribuées à Vestiges du Bas-Empire
la seconde moitié du 1er siècle apr. J.-C. (Riha, 1994,
p. 109, tableau typo-chronologique). L. : 3,8 cm. Les monnaies
Mentionnons aussi une fiche de passe-guide présen-
tant une section rectangulaire (3). L. : 4,4 cm. De 1. Constantin II (330-332), Constance II (330-335) ou
tels fragments sont notamment connus à Hensies Constant (334-335).
(Dufrasnes & Leblois, 2009, Hensies I, nos 32-34) et à A. Buste lauré d'un empereur à droite.
Sirault (Dufrasnes, 2005, fig. 2, no 5). R. Deux soldats encadrant deux étendards.
Diam. : 15 mm.
2. Monnaie indéterminée du 4e siècle (peut-être une
imitation ?).
A. Buste d'un empereur à droite (lauré ou perlé ?).
R. Personnage à gauche vêtu d'une tunique courte. Le
bras droit s'appuie sur une lance.
Diam. : 22 mm.
La céramique
Hensies, « La Préelle » : petits objets en alliage cuivreux : 1 et – Deux fragments de récipients en terre sigillée d'Ar-
2. Fragments de fibules ; 3. Fiche de passe-guide ; 4. Languette gonne ornés d'un décor imprimé à la molette. Il s'agit de
indéterminée.
La céramique
deux coupes hémisphériques Chenet 320, la première ■■ De Laet S.J. & Thoen H., 1969. Études sur la céramique de la
associée à la molette U.C. 58, attestée à Avocourt 3 nécropole gallo-romaine de Blicquy. IV. La céramique « à enduit
et aux Allieux, la seconde à une autre molette trop rouge-pompéien », Helinium, IX, p. 28-38.
usée pour être identifiée en toute certitude (peut-être ■■ Deru X., 1996. La céramique belge dans le nord de la Gaule.
U.C. 108, attestée à Avocourt 3, aux Allieux et à Châtel- Caractérisation, chronologie, phénomènes culturels et écono-
Chéhéry, groupe Hübener 5, ca 340-430). miques, Louvain-la-Neuve (Publications d'Histoire de l'Art et
d'Archéologie de l'Université catholique de Louvain, 89).
Honnelles/Roisin : fragments de bronze de la face figurée (ép. de la plaque variable entre 0,1 et
figurant un putto et applique à buste de 0,15 cm). Le second fragment, de taille plus modeste
(2,2 × 1,8 × 0,5 cm), porte la représentation d'une main
Silène
droite refermée sur un objet à l'extrémité circulaire.
Découvert à quelques mètres du premier et présen-
Jean Dufrasnes tant les mêmes caractéristiques, il appartient au même
objet mais, en raison de la taille de la main, pas au
C'est lors de prospections, effectuées par l'auteur le même personnage. L'identité de celui figurant sur le
6 janvier 1990 que furent découverts les bronzes figu- plus grand fragment ne fait aucun doute : il s'agit d'un
rés dont il sera ici question. Ils gisaient en surface putto, omniprésent dans le répertoire des arts décora-
d'un champ jonché de fragments de tegulae au lieu- tifs de l'époque romaine. Il pourrait s'intégrer au décor
dit « Boutinier » ou encore « Trente Saules » (parc. bachique d'un vase, tels ceux découverts ancienne-
cad. : Honnelles, 1re Div., Sect. B, zone sud du no 458w). ment à Bois-et-Borsu I et à Tongres (Faider-Feytmans,
Ces recherches permirent aussi la récolte de douze 1979, I-II, nos 347 et 374. H. respectives : 8,4 et 9,5 cm ;
monnaies, dont la plus ancienne est un Rameau D et den Boesterd, 1956, nos 310 et 311. H. respectives : 6,3
la plus récente un follis Urbs Roma des années 330-335 et 8,7 cm. 2e siècle). Cependant, la hauteur que devait
(van Heesch, 1998, p. 285-286). De fouilles ancien- avoir le personnage (estimée à plus ou moins 7 cm)
nement pratiquées sur le site proviennent également et l'absence apparente de courbure du fragment, tant
deux appliques figurant la tête de Méduse, une poignée dans le plan horizontal que vertical, s'accordent assez
métroaque et une applique au Silène sur laquelle nous mal avec cette hypothèse. D'autre part, la paroi interne
reviendrons ci-après (De Pauw & Hublard, 1903, de ces vases est égale, comme cela a pu être observé
p. 22-24, pl. III, nos 2-5 ; Faider-Feytmans, 1979, I-II, sur ceux précités exposés aux Musées royaux d'Art
nos 166, 170-171 et 185). et d'Histoire de Bruxelles. La découverte d'appliques
1. Fragments de tôle en bronze coulé. Sur le plus à buste de Silène sur le site inciterait à penser qu'il
grand (5,6 × 4,3 × 0,6 cm) apparaît une bonne partie pourrait s'agir d'une plaque décorative de coffret.
d'un corps nu et potelé, légèrement tourné vers la Cependant, les quelques exemplaires rencontrés dans
droite. La tête, le bras et le pied droits ainsi qu'une la littérature consultée sont tous réalisés en mince tôle
partie de la jambe gauche manquent. Les pectoraux de bronze estampée et non coulée (par ex. : Faider-
sont saillants, un sillon légèrement oblique, peut-être Feytmans, 1979, nos 215-216 et 225 ; Fauduet, 1992,
accidentel, se situe à hauteur de l'estomac et le triangle nos 113-119, 121-124 et 130a).
pubien, surmonté par le pli formé par le ventre, s'ex- 2. Cheville à buste de Silène. Deux oreilles de cheval
hibe en relief sans pour autant que soient représentés et de petites cornes encadrent le crâne chauve. Le nez
les organes génitaux. Le bras gauche s'écarte du corps est épaté et une imposante barbe comporte six tresses
et la main, à peine esquissée, tient ou s'appuie sur un étagées sur deux rangs. Le fleuron supportant le buste,
objet indéterminé. La jambe droite, portée en avant, contrairement à d'autres exemplaires, mais comme sur
suggère la marche. Le revers creux épouse les reliefs l'applique au Silène découverte anciennement sur le
site (De Pauw & Hublard, 1903, p. 215, pl. III, no 4 ;
de Loë, 1937, p. 168-169 ; Faider-Feytmans, 1979, I-II,
no 166), se réduit à un bord étroit en relief sur lequel de
simples encoches marquent la séparation des pétales.
Un tenon perforé de section rectangulaire, venu de
coulée, équipe le revers plat. H. : 3,8 cm ; l. : 2,8 cm ;
ép. y compris le tenon : 3 cm (exposé à l'Espace gallo-
romain d'Ath).
Ce type d'applique, à buste enté sur un fleuron à trois
pétales, se rencontre fréquemment en Belgique et dans
le nord de la France (Faider-Feytmans, 1979, I, p. 21).
Dans certains cas, deux rivets à tête discoïde assuraient
leur fixation sur du cuir (par ex. : Doyen, 1987, fig. 4 ;
Dufrasnes, 2004, no 50). Sur une poignée de Taviers,
un robuste tenon, exceptionnellement en fer, remplace
les rivets (Doyen, 1987, fig. 3). En ce qui concerne
Fragments de bronze représentant le corps d'un putto et une l'applique découverte anciennement au « Boutinier »,
main.
Germaine Faider-Feytmans signale simplement un
102
■■ Faider-Feytmans G., 1979. Les bronzes romains de Belgique, observée sur 5 m de longueur. La pièce centrale consiste
II vol., Bruxelles – Mainz am Rhein. en un local de 6 × 11 m intra-muros, occupant toute la
■■ Fauduet I., 1992. Musée d'Évreux. Collections archéologiques. largeur de l'édifice sans subdivision interne.
Bronzes gallo-romains. Instrumentum, Évreux. À l'ouest du diverticule et très proche du secteur J,
■■ van Heesch J., 1998. De muntcirculatie tijdens de Romeinse un puits maçonné a été découvert, fort bien conservé
tijd in het noordwesten van Gallia Belgica. De civitates van de jusqu'à la base de la couche arable. Il est construit en
Nerviërs en de Menapiërs (ca. 50 v.c.-450 n.c.), Brussel (Mono- larges blocs de grès siliceux formant un cylindre de
grafie van nationale archeologie, 11). 1,20 m de diamètre. Il a été vidé jusqu'à 1,50 m sous la
surface du sol. Son remblai de terre brunâtre contenait
Sources peu de matériel.
■■ Manfrini-Aragno I., 1987. Bacchus dans les bronzes De nombreuses fosses comblées ont été découvertes
hellénistiques et romains. Les artisans et leur répertoire, Thèse et explorées dans ces deux tranchées de fouilles. Cinq
présentée à la Faculté des lettres de l'Université de Lausanne d'entre elles s'inscrivent dans l'aire du bâtiment. La
pour obtenir le grade de docteur ès lettres. plus grande de celles-ci, de forme ovoïde de 3 m de
diamètre, était profonde de 1,50 m et contenait de la
céramique du 1er siècle.
Entre le diverticule et le bâtiment, une vaste fosse
Pont-à-Celles/Luttre : campagne de arrondie de 3,50 m de diamètre comblée de débris de
fouilles 2015 de Pro Geminiaco au vicus construction en bois et torchis atteignait la profondeur
des Bons-Villers à Liberchies de 2,15 m. L'abondante céramique qu'elle contenait est
datable de la première moitié du 1er siècle apr. J.-C. Au
sud du bâtiment, trois autres fosses encore ont fourni
Jean-Claude Demanet, Fabienne Vilvorder, de la céramique du 1er siècle apr. J.-C.
Xavier Sollas, Éric Lurquin, Pascal Vergauts Une centaine de petits objets en alliage de cuivre ou
et Willy Bayot en fer ont été récoltés de même que soixante et une
monnaies, dont beaucoup sont mal conservées. Il s'agit
En juillet et août 2015 la campagne de fouilles de Pro de monnaies gauloises et des trois premiers siècles de
Geminiaco à Liberchies a permis d'achever l'explora- notre ère. Parmi la céramique, il faut relever un encrier
tion du secteur L, entamée en 2013 et 2014, jouxtant intact en terre sigillée issue d'un atelier argonnais.
à l'ouest le secteur J publié dans le volume Liber-
chies VI (Demanet & Vilvorder, 2015). Comme les Bibliographie
deux années antérieures, deux tranchées parallèles de ■■ Demanet J.-C., Lurquin É., Bayot W., Sollas X., Clavel P.
5 × 25 m, séparées par une berme de 1 m de large, ont & Vergauts P., 2015. Pont-à-Celles/Luttre : campagne de
été ouvertes à 1 m au sud des tranchées précédentes et fouilles 2014 de Pro Geminiaco au vicus des Bons-Villers à
parallèles à celles-ci, orientées à 45° par rapport à l'axe Liberchies, Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 118-119.
de la voie antique. ■■ Demanet J.-C. & Vilvorder F., 2015. Liberchies VI. Vicus
Un nouveau segment du diverticule qui sépare les gallo-romain. Zone d'habitat dans le quartier ouest. Fouilles de
deux secteurs a été mis au jour dans la partie ouest de Pro Geminiaco (1995-2007), Louvain-la-Neuve (Collection
ces deux tranchées, portant à 40 m la longueur dégagée d'archéologie Joseph Mertens, XVI).
de ce diverticule perpendiculaire à la chaussée antique
et d'une largeur solidement empierrée en moyenne de
5 m.
À l'est du diverticule et à 7 m au sud du bâtiment
découvert les deux années précédentes (bâtiment L ;
Demanet et al., 2015), un nouveau bâtiment à fonda-
tions de pierre a été partiellement dégagé. Il forme un
quadrilatère de 8,50 m de large et de plus de 9 m de long,
dont les fondations sont en général bien conservées.
Divisé en deux parties par un mur de refend, seul le local
ouest a été complètement dégagé : ses mesures internes
sont de 3,60 × 6,70 m. Vers l'est, un second local large de
6,70 m se poursuivait au-delà des tranchées de fouilles.
Passant sous le mur ouest de ce bâtiment, la trace de la
fondation arrachée d'une construction antérieure a été
104
ÉPOQUE CONTEMPORAINE
Binche/Buvrinnes : fouille de la zone de
chute d'un Messerschmitt Bf 110 G
Plan du parc de Mariemont indiquant les différents agrandissements fonciers au cours du 19e siècle (datés) et les tronçons déduits de
l'observation de terrain (A-T). D'après Plan du Parc de Mariemont appartenant à Monsieur R. Warocqué, 1906 (infographie J. Periaux,
Musée royal de Mariemont).
108
Le legs du domaine à l'État belge, à la mort de ce limites de 1840 et de 1870 (tronçon B).
dernier en 1917, a définitivement scellé le tracé du mur Après cette date et en particulier depuis le décès de
d'enceinte. Raoul Warocqué, les limites foncières n'ont plus été
En comparant le Plan du parc de Mariemont appar- modifiées.
tenant à Monsieur R. Warocqué (1906), présentant la Cependant, limite foncière ne signifie pas nécessai-
succession des phases d'agrandissement du domaine, à rement enclavement physique par un mur de clôture.
celui qui résulte de l'observation des portions d'enceinte, Une palissade, qui existait déjà en 1794 d'après les
on obtient une sorte de « patchwork » dont les différents archives du Département de Jemappes, a pu persister
tracés devraient refléter les étapes d'appropriation. durant le premier tiers du 19e siècle et être ensuite
S'appuyant sur ce plan, une première hypothèse remplacée par un mur ou une clôture, à la faveur d'un
s'organise comme suit. premier ou d'un second agrandissement et de l'édifica-
1. Un premier mur de briques aurait pu être érigé tion des conciergeries par exemple.
vers 1830, à l'acquisition de la propriété par Nico- Par ailleurs, il faut aussi compter sur les inévitables
las Warocqué. Cette portion (correspondant aux tron- phases de réparation qu'a dû connaître le mur, dont
çons R, S et T sur le plan) se distribuerait dans la partie certaines sont renseignées, quoique de manière laco-
orientale du parc, partant de l'entrée principale (drève) nique. Les archives de la Direction de la restauration
vers la gauche, face à la grille, et se terminant dans les (DGO4 / Département du patrimoine) conservent une
environs de l'actuel centre pour réfugiés (à l'emplace- demande adressée en 1945 par Germaine Faider, alors
ment des anciens bureaux des charbonnages de Marie- conservatrice du Musée, au Ministère des Travaux
mont, remplacés ensuite en clinique spécialisée dans publics de faire réparer le mur du parc de Mariemont
le traitement des maladies du travail minier, avant de qui s'écroule en trois endroits, entre les bureaux des
connaître son affectation actuelle). Charbonnages et la Drève dite de Mariemont.
2. À la faveur des travaux de construction des pavil- Le traitement des données recueillies sur le terrain
lons d'entrée vers 1840 (la grille ayant été fournie en doit permettre d'évaluer et, le cas échéant, corriger les
1839 et la drève percée en 1843), une partie du mur de cinq étapes théoriquement définies par cette première
clôture aurait été érigée, partant vers la droite de l'en- hypothèse.
trée principale et tournant vers le nord (tronçon A). C'est surtout au niveau de l'appareil, du format et du
3. Une troisième portion (tronçons C-G) aurait été type de briques (moulées main ou mécaniques) qu'ap-
aménagée vers 1870. Elle comprend aujourd'hui une paraissent des indications stratigraphiques.
partie extra-muros très escarpée et des enclavements Un autre élément intéressant à mettre en lumière est
correspondant à des habitations privées, leurs dépen- le système de drainage, les deux types principaux étant
dances et leurs jardins. le cylindrique en terre cuite ou la simple ouverture
4. La partie méridionale du parc était propriété des d'une brique sur champ.
Warocqué dès la deuxième moitié du 19e siècle, en Quant aux couvre-murs, il est délicat de les utiliser
bonne entente avec la Société des charbonnages. Les comme marqueur chronologique. Les portions de mur
parcelles relèvent presque équitablement de l'un et ont manifestement été l'objet de campagnes de recou-
l'autre propriétaire, suivant la technique du damier, vrement indépendantes des élévations, dans le cadre
encore observée de nos jours dans le cas de proprié- d'autres réparations, voire même en-dehors de celles-ci.
tés agricoles par exemple. Si l'un des deux ayants Cela est également valable pour les pieds de mur,
droit décide de modifier une parcelle, l'autre, dont la qui consistent essentiellement en un enduit au ciment,
propriété est contiguë, en est immédiatement averti. dont la liaison avec l'élévation n'est pas assurée : l'enduit
Cette technique permet de verrouiller l'affectation du a pu être appliqué (bien) après l'élévation. Les joints
foncier sans devoir en assumer la totalité des charges. sont également difficiles à interpréter, considérant les
Le dernier descendant, Raoul Warocqué (1870- campagnes de rejointoyage qui ont immanquable-
1917), annexe et enclave cette zone (tronçons H-Q) ment jalonné la vie du mur depuis son élévation. Les
comprenant les ruines du 18e siècle dans le parc privé mortiers de blocage sont généralement difficilement
familial en 1893. Pour ce faire, il détourne deux voiries accessibles, à quelques exceptions près.
communales, l'une nord/sud, montant de la gare de Un découpage par tronçons a été effectué sur plan en
Mariemont vers La Hestre, qui sera remplacée par fonction des caractéristiques les plus pertinentes pour
l'actuelle chaussée de Mariemont, et l'autre est/ouest, les distinguer, puis superposé aux portions historiques
située perpendiculairement à l'axe de la cour d'hon- déduites des recherches préalables. L'interprétation
neur et cheminant derrière l'orangerie du 18e siècle. de cette superposition n'est pas aisée. Elle touche à la
5. La dernière étape d'appropriation du domaine fois aux limites de notre première hypothèse (limite
remonte à 1899 et permet de faire la liaison entre les foncière n'est pas nécessairement limite physique et
109
le lot des inévitables réparations qu'a dû subir le mur ment, dont celles de 1870. Cela n'est pas impossible
depuis sa [ses] création[s]), dont il a déjà été ques- naturellement, mais l'aspect logique de la démarche ne
tion. Cela tient aussi à l'examen certes détaillé mais ne suffit pas à la démontrer.
portant que sur le parement et non sur les fondations Les tronçons O (22 × 6 × 11 cm) et Q (23 × 6 ×
ou le blocage des maçonneries, qui limite l'observation 11 cm) peuvent participer ensemble du même projet,
d'éventuelles connexions stratigraphiques souterraines se situant dans la zone d'extension, donc datée de 1893
ou au sein de la maçonnerie. également.
Malgré ces contraintes, il est néanmoins possible Par ailleurs, on peut émettre sans trop de risque l'hy-
d'établir quelques grands axes d'interprétation. pothèse que la zone datée des agrandissements de 1899
En premier lieu, on peut remarquer l'importance du n'a pas dû être enclavée avant cette date.
tronçon A, homogène, et se distinguant nettement par Par contre, il n'est actuellement pas possible de dater
ses caractéristiques intrinsèques des autres parties. Sa les tronçons R et T. Sont-ils le fruit d'un enclavement
haute taille, le soin apporté à sa construction, la qualité consécutif aux tout premiers investissements privés de
des matériaux mis en œuvre (couvre-mur en pierre 1830 ou de périodes ultérieures ?
bleue, rosaces en fonte à valeur décorative, badigeon ou Pour répondre à ces questions, plusieurs axes de
enduit blanc) correspond bien, dans son programme, recherche pourraient être poursuivis.
au souci manifeste d'ostentation qui a dû présider à D'une part, on peut pointer l'approfondissement des
l'aménagement de la drève, la commande de la grille et recherches dans les archives de la famille Warocqué,
l'élévation des deux pavillons d'entrée encadrant celle- singulièrement les comptes, afin de détecter des
ci. Selon cette interprétation, le tronçon A remonterait dépenses liées à l'élévation ou la réparation de ces
dès lors à 1839 ou aux années qui ont directement maçonneries.
suivi. La confrontation avec la portion « après 1832 » D'autre part, des fouilles menées à la faveur de
du plan de 1906, qui en reprend les mêmes limites, travaux de voirie ou même de campagnes de sondages
conforte cette hypothèse. ponctuels à effectuer sur le tracé du mur, y compris
En second lieu, il faut distinguer les tronçons appareillés à l'intérieur de l'enceinte, pourraient permettre de
en briques mécaniques des tronçons en briques moulées trouver d'autres indices susceptibles d'éclairer les
main. L'utilisation de la brique mécanique est générale- connexions entre tronçons. Ces connexions invisibles
ment associée au 20e siècle, voire à la deuxième moitié de en surface sont peut-être encore perceptibles en sous-
celui-ci. Ce sont donc à des campagnes de réparation qu'il sol ou dans les blocages. Elles pourraient d'ailleurs
faut rapporter les tronçons C, C', D, E, J, M, P et S. être établies ou confirmées via l'étude des matériaux
Il faut aussi exclure le tronçon H, en briques de récu- (appareils et liants).
pération, qui ne semble pas, par sa facture, participer L'état des lieux a permis de sécuriser l'intervention
d'un projet ancien mais bien plutôt d'un aménagement sur le plan patrimonial. Le monument a été précisé-
récent (liant au ciment). ment enregistré dans son état avant restauration.
Le cortège des portions présumées du 19e siècle se Comme l'ensemble du domaine, l'aménagement
compose donc comme suit : A, B (partie basse), F, G, du mur correspond à un projet, celui des Warocqué,
I, K, L, O, Q, R et T. Il compte 1 630,75 m et représente qui a évolué au fil du temps et des chefs de famille.
donc 68 % de l'ensemble de l'enceinte. Il est le reflet non seulement de l'extension d'une
Est-ce à dire que près de 70 % du mur de clôture propriété, d'un souci d'appropriation du territoire
se trouve dans sa situation initiale, c'est-à-dire celle raisonné et ostentatoire, mais aussi de la personnalité
élevée sous l'impulsion des différents représentants de de chacun d'eux, surtout, naturellement, de celle de
la famille Warocqué suivant les étapes décrites au sein Raoul Warocqué. C'est grâce à ce dernier que le parc
de notre première hypothèse ? privé devenu public a conquis près de la moitié du
Considérant les différents formats de briques territoire qu'on lui connaît aujourd'hui et ses joyaux
moulées main mis en œuvre, il faut se méfier d'une parmi les plus prestigieux, les vestiges du palais de
interprétation trop rapide allant dans ce sens. Repre- Charles de Lorraine.
nant ces formats, il n'est possible d'assembler théori- Les campagnes de réparation ont permis de mainte-
quement que les tronçons K, L et F (21 × 10 × 6,5 cm). nir le domaine clos en suivant le tracé tel que légué par
Cependant, comme il a déjà été dit, sans connexion Raoul Warocqué. Les restaurations à venir pourront
stratigraphique entre eux, cette version doit être mise continuer dans ce sens. Elles seront d'autant plus fortes et
sous réserve pour le moment. cohérentes qu'elles pourront s'appuyer désormais sur la
Elle reviendrait en effet à dire que la fermeture du reconnaissance de l'enceinte en tant que témoin historique
parc consécutive au remaniement du domaine privé et archéologique de première importance pour la compré-
en 1893 aurait inclus des portions acquises précédem- hension et la conservation du domaine de Mariemont.
110
Bibliographie
■■ Marré-Muls A.-M., Quairiaux Y., Cokelberghs J.-P.
&. Vassart M., 2004. Promenades vertes dans l'entité de
Morlanwelz, Jumet.
■■ Quairiaux Y., Platiau R. &. Bouilliez A., 2005. Marie-
mont côté jardins, Morlanwelz (Monographies du Musée royal
de Mariemont, 13).
■■ Recchia L., 2002. Mariemont au xixe siècle : le jardin
paysager de la famille Warocqué. In : Baudoux-Rousseau L. &
Giry-Deloison C. (dir.), 2002. Le jardin dans les anciens Pays-
Bas, Arras, p. 203-217.
■■ Van den Eynde M., 1989. La vie quotidienne de grands bour-
geois au xixe siècle. Les Warocqué, Morlanwelz.
Soignies : l'intérieur de la grande scierie.
Sources
■■ Lettre de Germaine Faider au Ministère des Travaux publics, à l'initiative des aménageurs, qui permettra de les
Archives MRM DGATLP, Direction de la restauration, Beez, présenter au public lors d'évènements futurs.
200104-13-4-Parc. La dalle de béton a permis une conservation remar-
■■ Plan du parc de Mariemont appartenant à Monsieur R. quable du sous-sol du bâtiment et les vestiges ont été
Warocqué. Plan indiquant les différents agrandissements dressé à dégagés sans trop d'entrave. L'opération archéologique
l'échelle de 1250, 11 juin 1906, architecte O. Dessart, Archives du était appuyée par une source historique détaillée décri-
Musée royal de Mariemont. vant le fonctionnement d'une autre scierie de pierre,
■■ Préfecture du Département de Jemappes, 1793-1814, Archives également propriété de Monsieur P.J. Wincqz, l'usine
de l'État à Mons, BE-A0524 / AEM.10.024. des Trois Planches. Cette source offre des mesures
précises, une description des éléments constitutifs de
la machinerie et de son mode de fonctionnement, ce
qui s'avère être un apport bien utile dans le cas de la
Soignies/Soignies : le Centre des Métiers grande scierie où tous les éléments hors-sol ont prati-
de la Pierre. Sous le béton, les pierres de quement disparu.
la grande scierie Installées dans les angles de la moitié nord de l'édi-
fice, deux paires d'armures de scierie se font face ; il
s'agit de bâtis en fonte qui soutiennent le châssis porte-
Nicolas Authom lames. Leur plan et leur élaboration générale sont iden-
tiques mais chaque armure a connu des évolutions, des
En janvier 2015, une opération archéologique a été réparations et modifications qui traduisent son histoire
menée dans l'ancienne Grande Carrière Wincqz et son adaptation à la matière première à débiter.
(parc. cad. : Soignies, 1re Div., Sect. B, no 801h ; coord. Chacune se compose à ses extrémités de quatre socles
Lambert : 129388 est/139591 nord) où le Centre des de fonte, fixés dans la pierre, sur lesquels s'appuient
Métiers de la Pierre verra bientôt le jour. L'intervention les colonnes formant le bâti. Entre ces colonnes est
était localisée dans la grande scierie qui hébergera le posé un dallage de grandes pierres bleues ; une pente
futur atelier des tailleurs de pierre. Ce bâtiment, millé- est créée afin d'évacuer vers des caniveaux extérieurs
simé de 1843, est doté d'une imposante cheminée qui l'eau et le sable utilisés lors du sciage. De part et d'autre
trahit déjà le recours à la machine à vapeur. du dallage et longeant les socles de fonte se trouve le
La mission a consisté en la surveillance du démon- négatif des rails qui permettaient le déplacement des
tage de la dalle de béton, posée dans le bâtiment au chariots supportant les blocs de pierre : depuis la zone
cours des années 1980, lorsqu'il servait d'entrepôt. d'extraction, les chariots pénètrent dans les armures
S'en est suivi le dégagement des vestiges industriels via les baies en arc qui rythment les pignons du bâti-
conservés sous celle-ci, leur enregistrement et le relevé ment. Il y a trois ouvertures par côté, deux de tailles
complet des structures. Ce travail a également offert identiques vers les armures et une troisième plus large :
aux auteurs de projet les informations nécessaires des négatifs de rails y ont aussi été observés mais pas
quant aux endroits privilégiés pour la pose des futures de trace d'armure à cet endroit. Cette voie servait-elle
gaines techniques avant le recouvrement définitif des à acheminer les matériaux nécessaires au fonctionne-
vestiges et la pose du nouveau béton de sol. Une zone ment de la scierie (sable), ou encore le combustible
de vestiges sera recouverte d'une surface modulable, destiné à la machine à vapeur ?
111
Au centre du bâtiment, entre les armures, l'espace Une autre découverte, qui reste assez énigmatique
est occupé par la machinerie proprement dite mais au moment de la rédaction de ces lignes, occupe
les différents arbres, bielles, poulies et manivelles pratiquement un quart de la surface du bâtiment :
qui se trouvaient hors-sol n'ont pratiquement laissé ce sont deux demi-cylindres parallèles et espacés de
aucun vestige. Par ailleurs, cette zone a été fortement 1,60 m, longs de 10 m pour un diamètre d'ouverture
remaniée, une grande citerne en béton y a été creu- de 1 m, construits en briques sur chant avec des parois
sée, des vannes, des tuyaux et quelques caniveaux élevées en briques réfractaires. Chacun débouche,
ont été installés dans de solides massifs de briques. à la base du pignon est du bâtiment, sur une sorte
Une importante cavité, assez étroite, suggère qu'une de chambre rectangulaire beaucoup plus profonde
roue d'un diamètre important (± 2 m) y était en qui se prolonge hors de la scierie. Des vestiges d'arcs
fonction, sans doute maintenue dans les élévations voûtés, observés dans le pignon, sont sans doute le
en briques qui l'enserrent, où a été observé un témoin de la couverture de ces chambres. À la diffé-
aménagement creux qui devait accueillir un axe de rence des demi-cylindres, l'action du feu se distingue
rotation. Cette roue intrigue et il n'est pas possible clairement sur les briques des deux chambres, ce qui
à l'heure actuelle de savoir si elle fait partie d'un suppose l'emplacement de foyers, peut-être destinés
mécanisme hydraulique antérieur à l'utilisation de à alimenter des chaudières placées dans ces sortes de
la vapeur (on sait que ce type d'énergie a été utilisé berceaux en briques.
dans l'usine des Trois Planches) ou si, activée par Enfin, un puits, se trouvant entre les deux armures
une courroie ou une bielle, elle fait partie du moteur situées côté est, a été exploré par Olivier Vrielynck
à vapeur. (Direction de l'archéologie) et Luc Funcken (Direc-
tion de la Géotechnique). D'une section carrée,
étroite en surface (0,95 m de côté), le conduit du puits
aboutit à 4 m de profondeur sur une voûte en briques
(4,20 m × 3,60 m) qui surmonte une cavité, taillée
dans la roche, profonde de 18,50 m. L'usage de ce puits
est antérieur à la scierie et il faut vraisemblablement
l'associer au front de carrière qui jouxte le bâtiment au
nord-est, servant peut-être à l'exhaure. La construc-
tion des armures de scierie au-dessus de cette cavité,
auxquelles peuvent être associés les vestiges d'une
probable pompe à eau, en connexion par une galerie
avec le puits, suggère que dans un second temps, le
puits a servi de réserve d'eau dont il ne faut rappeler la
nécessité dans le processus de sciage de la pierre.
L'emplacement présumé de la roue avec à l'arrière l'aména- Ces quelques lignes résument bien peu les
gement pour fixer l'axe de rotation.
nombreuses surprises qui ont accompagné la fouille
112
TOUTES PÉRIODES
Aiseau-Presles/Presles : le site
archéologique de « La Taille Marie »,
campagne de fouille 2015
eu égard à l'étendue de la zone de rejets. Les foyers surtout de scories de réduction semble donc impliquer
présentent un plan allongé, légèrement piriforme. Leur une réduction du minerai sur place, l'exploitation en
creusement, à fond plat et parois verticales, mesure en matière première est quant à elle aussi envisageable
moyenne 0,70 sur 0,90 m de large, pour une vingtaine de à l'échelle locale puisque du minerai est largement
centimètres de profondeur. Le gueulard est aménagé en disponible, sous diverses formes, dans la région. On
plan incliné. Les parois des structures sont caractérisées ne peut s'empêcher de mettre en relation cette activité
par le limon en place rubéfié sur quelques centimètres de métallurgie avec la présence au sein de l'aire sacrée
d'épaisseur. Cette rubéfaction ne débute en général de plusieurs centaines de socs d'araire miniatures en
qu'à quelques centimètres du fond de la structure. Le fer et dont la grande majorité a été enfouie aux 2e et
comblement est composé de limon gris-noir fortement 3e siècles. Le caractère unique de ces objets religieux
chargé en fragments de charbon de bois et comportant avait déjà permis de supposer qu'ils étaient fabriqués
quelques fragments de parois rubéfiées. Différents au sein du sanctuaire, voire dans un environnement
indices, comme la présence d'un culot ferreux au sein immédiat. La production d'objets sacrés en métal au
de l'une de structures, nous incitent à associer ces foyers niveau même des sanctuaires demeure exceptionnelle-
à la chaîne opératoire du travail du fer, plus particuliè- ment documentée par l'archéologie.
rement aux étapes de post-réduction, comme l'épura-
tion ou le forgeage. Cette hypothèse est évidemment Les dépôts F64 et F65
renforcée par l'aire de rejet découverte à proximité.
Cette aire de rejet est située à quelques mètres des Deux fosses présentant des similarités ont été décou-
quatre foyers, sur l'autre versant du petit vallon. Il s'agit vertes dans la tranchée d'évaluation L. Elles ont été
d'un niveau de remblai d'une dizaine de centimètres creusées face au temple, à 36 m au sud de cet édifice.
d'épaisseur s'étendant, à ce stade des recherches, sur une La forte érosion du terrain à cet endroit explique que
zone d'une quinzaine de mètres de diamètre, puisque les structures ne sont que faiblement conservées.
lors de l'évaluation, cette couche a encore été repérée Distantes de 2,60 m, elles semblent avoir été creusées
dans la tranchée I, 9 m plus à l'ouest. Ce niveau (US183) selon une logique commune, les côtés s'alignant de
est caractérisé par un sédiment limoneux brun foncé, façon parallèle. La fosse F64 présente un plan carré
compact, riche en scories de fer, fragments de tuiles, bien marqué, de 1,10 m de côté. Le creusement, à fond
tessons de céramique et de verre et a été daté, de façon plat, est conservé sur 12 cm. Le comblement est consti-
préliminaire, des 2e et 3e siècles de notre ère. 1 075 scories tué de limon brun-gris clair mélangé, correspondant
de tous types ont été découvertes : scories de réduction, au sédiment d'origine redéposé. Dans la partie nord-
culots ferreux, culots argilo-sableux, scories internes, ouest de la fosse étaient rassemblés quelques fragments
scories de forge… Quelques battitures ont également été de céramique ainsi qu'un amas de sédiments calcinés
observées. 68 polissoirs, aiguisoirs et pierres à aiguiser de 10 × 20 cm de côté. Le mobilier comprend un
proviennent également de ce secteur. L'association de fond de marmite altéré par le feu, un fond de gobelet
ces polissoirs et aiguisoirs avec les nombreuses scories à dépressions en céramique métallescente d'Argonne
de fer permet de rattacher ces objets au travail du fer ainsi qu'un fond de récipient en pâte rosâtre (cruche ?).
(Paridaens & Darchambeau, 2016). On pensera plus Ces récipients datent cet ensemble du 3e siècle. Étant
précisément aux étapes de polissage et d'abrasion du donné qu'il s'agit exclusivement de fonds de récipients
métal après sa mise en forme par martelage ou encore à et vu l'érosion de la structure, il est possible que les
l'affutage d'outils à tranchants. vases aient été complets lors de leur dépôt.
Sur base du mobilier et des structures découverts en La fosse F65 présente un contour moins net, vague-
2015, différentes phases de production du fer semblent ment quadrangulaire, de 1,10 m de côté. Le fond du
attestées : l'opération de réduction semble avérée par creusement est également plat, conservé sur 8 cm. Le
la présence de très nombreuses scories internes et comblement est constitué de limon brun foncé chargé
externes de réduction bien qu'aucune structure ne de particules végétales calcinées. L'aspect homogène
peut néanmoins, à ce stade de la fouille, être rattachée à ainsi que la présence de petites pierres, fragments de
cette phase. Les opérations de post-réduction (cinglage tuiles et tessons épars de céramique permettent d'in-
ou épuration) sont aussi illustrées, avec quelques culots terpréter ce remblai comme du limon humifère. Un
ferreux et culots argilo-sableux. Les petits foyers piri- dépôt charbonneux de 10 × 30 cm, une passoire et un
formes pourraient, avec prudence, être aussi rattachés poêlon en céramique, encore empilés au moment de
à cette étape. Enfin, les activités de forgeage et de façon- leur découverte, étaient concentrés dans la partie sud
nage sont représentées par quelques battitures et scories de la fosse. Ces deux récipients imitent de la vaisselle
de forge ainsi que par les très nombreux polissoirs et métallique bien connue, généralement en alliage de
aiguisoirs. Si la présence d'un atelier de métallurgie et cuivre. Dans l'Antiquité, la passoire et la casserole en
115
métal, qui s'emboîtaient, constituent deux accessoires terpréter ces structures comme des tombes : fosses
liés à la préparation du vin, l'un pour puiser les breu- carrées à fond plat, amas cendreux, zones vides, pots
vages, l'autre pour filtrer les aromates qu'on y avait fait complets, présence d'un service lié au vin, sont autant
macérer. Nos exemplaires imitent parfaitement leurs de caractéristiques que l'on retrouve dans les tombes
équivalents en métal, types Künzl ND30 et ND31, en à incinération. La présence d'une tombe à proximité,
usage surtout au 3e siècle apr. J.-C. Même si les poêlons bien qu'hypothétique, renforce encore quelque peu
et passoires sont bien attestés en céramique, ce type cette théorie. Toutefois, l'absence de toute esquille
d'imitation semble inédit. On peut penser que ces osseuse est évidemment problématique, bien que des
objets ont été fabriqués à dessein, comme offrande à fosses à cendres, dépourvues de ce type de matériau,
faible coût en vue d'un usage religieux. se rencontrent aussi au sein des nécropoles à inciné-
Lors des sondages menés durant l'hiver 1987-1988 ration. En outre, la présence de tombes à proximité
par Jean Gabriel et l'Office de Recherches archéolo- directe d'un sanctuaire n'est pas attestée ailleurs. En
giques (O.R.A.), une tombe semble avoir été décou- revanche, les dépôts de vaisselle métallique, ici imitée
verte. Les notes de fouilles du 19 décembre 1987 en terre cuite, sont quant à eux omniprésents dans
renseignent un sondage de 1 m² où furent découverts les sanctuaires. D'autres fosses destinées à recevoir
un grand gobelet à dépressions, écrasé et, dans le les restes de cérémonies religieuses ou les offrandes
gobelet, quelques ossements calcinés. D'autres notes réservées aux dieux ont évidemment été découvertes
réfèrent à la nécropole sud. D'après le plan des fouil- au sein du sanctuaire (Paridaens & Darchambeau,
leurs, ce sondage du 19 décembre se situe à proxi- 2014). En définitive, il pourrait s'agir de dépôts votifs
mité directe des fosses F64 et F65 et il s'agit très situés en périphérie du sanctuaire, bien qu'une nature
probablement d'un des cinq sondages repérés lors funéraire ne soit pas complètement à exclure.
de nos recherches, en 2015, quelques mètres à l'est
de ces dernières. Dès lors, comment interpréter cet Conclusion : « La Taille Marie »,
ensemble de découvertes ? Les deux fosses F64 et F65 un sanctuaire de villa
présentent des caractéristiques communes : orienta-
tion, forme, dimensions et comblement. La présence Les fouilles réalisées de 2011 à 2015 ont permis de
de poches cendreuses et de vases complets groupés, circonscrire l'extension générale du sanctuaire de « La
voire empilés, indique que nous sommes en présence Taille Marie », installé de manière judicieuse sur une
de dépôts mais certains indices permettraient d'in- petite proéminence dominant tout le vallon d'Aiseau.
Plan général du site de « La Taille Marie », toutes époques confondues, © CReA-Patrimoine / ULB.
116
Dépourvu de mur d'enceinte, il est toutefois limité Avec la collaboration d'Antoine Darchambeau,
de manière naturelle, à l'est par la rupture de pente Stéphane Genvier, Claude Jacques, Fanny Martin,
marquant la vallée de la Biesme, au nord par un talus Charlotte Van Eetvelde & Olivier Van Eyck.
et à l'ouest par un petit vallon. Si le temple est de taille
moyenne, avec 12,50 m de côté, l'aire sacrée, dont la Remerciements
surface a été aménagée à partir du 2e siècle, s'étend sur
minimum 20 a, avec un bâtiment annexe sur poteaux. L'équipe de fouille, constituée de chercheurs du
Un secteur artisanal s'organise par ailleurs aux 2e et CReA-Patrimoine (A. Darchambeau, F. Martin),
3e siècles dans le vallon occidental, où un atelier lié au de collaborateurs bénévoles (C. Angeli, C. Dawant,
travail du fer a été découvert. Certains indices laissent C. Delaere, S. Genvier, G. Gilbert, S. Guarella, E. Hodeige,
penser qu'il pourrait s'agir de l'atelier de production C. Jacques, R. Nicolas, O. Van Eyck) et d'étudiants de
des socs d'araire votifs découverts dans le sanctuaire. l'ULB (A. Dieu, L. Dikenda, T. Coussement, C. Deprez,
Quoi qu'il en soit, les structures ainsi que le mobilier D. Ebertitan, C. Fortemps, L. Kervyn, A. Lecomte,
qui leur est associé ouvrent d'intéressantes perspec- J. Malvoz, N. Petit, E. Vanderhaeghe, C. Van Eetvelde) ;
tives, tant pour la caractérisation des étapes de produc- la Société royale d'Archéologie de Bruxelles
tion du fer dans nos régions que dans la manufacture (F. Legat) ; les propriétaires et exploitants des parcelles
d'objets religieux. fouillées (C. et J. d'Oultremont, E. de Dorlodot et la
Les niveaux précoces, concentrés à l'emplacement Société de Gestion de la Sambre s.a.) ; J. Plumier,
du temple, mettent aussi en lumière l'organisation d'un A. Guillot- Pingue, M. Soumoy et C. Frébutte (SPW /
site religieux de la cité des Tongres au tout début de DGO4) pour l'octroi des subsides et le suivi de projet ;
l'Empire, soit à une période demeurant mal connue. La J. Pierard et sa famille pour leur aide logistique et leur
reprise programmée des fouilles dès 2016 au niveau de disponibilité ; L. Nonne, C. Dawant et E. Bouyer pour
la villa, dégagée une première fois en 1875, permettra les restaurations de mobilier ; N. Bloch et A. Stoll pour
de mettre en parallèle l'évolution du sanctuaire avec les dessins de mobilier et infographies ; W. Leclercq
cette dernière. pour l'expertise du mobilier protohistorique ; la Ville
En conclusion, les fouilles auront permis de et le Musée archéologique de Namur, dépositaires
dégager de manière exhaustive un sanctuaire de des collections ; l'asbl des Œuvres paroissiales de
villa et donc vraisemblablement de nature privée. Farciennes ainsi que tous les collègues et étudiants
Ce type de lieu de culte, lié à de grands domaines ayant participé aux travaux de post-fouille.
ruraux et parfois qualifié de « rural », demeure
peu connu archéologiquement. Cette interpréta- Bibliographie
tion repose évidemment sur la présence d'une villa ■■ Künzl E. (dir.), 1993. Die Alamannenbeute aus dem Rhein
associée dans les environs proches, alors que, bien bei Neupotz. Plünderungsgut aus dem römischen Gallien, Mainz
souvent, l'emprise des fouilles est limitée soit au (Monographien Römisch-Germanisches Zentralmuseum
sanctuaire, soit à la villa. Dans la cité des Tongres, Mainz. Forschungsintitut für Vor- und Frühgeschichte, 34).
on en connaît par exemple à Matagne-la-Petite, ■■ Paridaens N. & Darchambeau A., 2014. Le sanctuaire
Gemechenne, Anthée mais il devait en exister bien gallo-romain de « La Taille Marie » à Aiseau-Presles (Ht). Troi-
d'autres. Si la gestion de ces chapelles et l'organisa- sième campagne de fouilles (2013), Signa, 3, p. 133-139.
tion des cultes qui s'y pratiquent incombaient aux ■■ Paridaens N. & Darchambeau A., 2016. Le site archéo-
propriétaires du domaine, des sources littéraires logique de « La Taille Marie » à Aiseau-Presles. Rapport des
indiquent que certains de ces sanctuaires étaient fouilles 2015, Signa, 5, p. 115-125.
communautaires et fortement fréquentés. À Aiseau- ■■ Paridaens N., Darchambeau A., Genvier S., Martin F. &
Presles, le nombre d'offrandes, notamment les Venant N., 2015. Le sanctuaire de « La Taille Marie » à Aiseau-
centaines de socs d'araire déposés autour du temple, Presles. Campagne de fouilles 2014, Signa, 4, p. 207-215.
laissent également penser que le culte n'était pas ■■ Paridaens N. & Leclercq W., 2016. Mobilier céramique de
exclusivement réservé aux habitants du domaine. l'âge du Bronze issu d'un paléochenal à Aiseau-Presles – « La
Taille Marie » (Ht., Bel.), Lunula. Archaeologia protohistorica,
La nature originale des offrandes renvoie peut-être
XXIV, p. 97-100.
à une divinité locale, dont les fonctions spécifiques
ont pu attirer des pèlerins, membres d'une famille
ou d'une communauté en lien avec la villa. On
notera encore la longévité de ces rites, que nous
serions évidemment tentés de mettre en lien avec la
fertilité, durant toute l'existence du sanctuaire, du
1er siècle avant notre ère jusqu'au 4e siècle apr. J.-C.
117
Ath/Ath : fouilles préventives sur le site Tous ces murs s'appuient sur un mur plus ancien
de l'ancienne sucrerie dégagé sur une vaste superficie en 2015. Celui-ci est
doté d'une face parementée avec un léger fruit au nord.
Il descend à plus de 3,5 m de profondeur, sans que sa
Isabelle Deramaix, Adrien Dupont base n'ait pu être atteinte. Il pourrait correspondre à la
et Pierre-Philippe Sartieaux limite de l'ancien fossé maintenu ouvert après la démo-
lition des ouvrages externes de la fortification hollan-
En 2009, lors de l'assainissement du site de l'ancienne daise en 1852 (Ducastelle, 1984) avant le creusement
sucrerie d'Ath, un mur imposant a été relevé par le du canal Ath-Blaton entre 1864 et 1865.
Service de l'archéologie de la Direction extérieure Dans le deuxième secteur, au sud-ouest du site,
du Hainaut 1 (DGO4 / Département du patrimoine) un massif quadrangulaire et un mur associé ont été
(Deramaix & Dupont, 2011). Les parcelles (Ath, dégagés. Ces constructions témoignent d'une activité
1re Div., Sect. B, nos 811F102, 811C103, 811B103) se situent industrielle relativement récente mais non identifiée.
dans l'extra-muros de la cité médiévale et ont été occu- Le troisième secteur a livré deux ensembles de
pées de la fin du 17e siècle jusqu'au 19e siècle par des vestiges : d'une part, ceux d'une place d'armes rentrante
ouvrages militaires externes (Deramaix, Dupont & avec réduit et, d'autre part, une construction posté-
Sartieaux, 2015 ; à paraître ; Dugnoille & de Waha, rieure de type industriel, vraisemblablement un silo à
1983). Le projet de construction de sept immeubles betteraves.
à appartements à cet endroit nécessitait donc de La place d'armes semble correspondre à l'emplace-
nouvelles investigations archéologiques. Celles-ci ont ment de celle édifiée sous les dirigeants autrichiens
été entreprises en janvier et février 2015 par le même après 1720 (Dugnoille, 1984, p. 27-29). Le gabarit, la
service qu'en 2009. Elles ont débuté par une évaluation taille des pierres et l'appareil des maçonneries corres-
des terrains sous forme de longues tranchées réparties pondent à cette période. Démoli partiellement en
tous les 10 m. Trois secteurs ont fait l'objet de vastes 1745 (Dugnoille & de Waha, 1983, p. 189), cet ouvrage
décapages. aurait été récupéré par les Hollandais lors du redres-
Le premier secteur se trouve dans la partie septen- sement de la place forte entre 1816 et 1825 (Dugnoille
trionale du site, près du mur exhumé en 2009. Ce mur & de Waha, 1983, p. 186-189 ; Godet, 1973). En effet,
a d'abord été interprété comme pouvant appartenir à la des traces de reconstructions sont assez perceptibles
fortification hollandaise (Deramaix & Dupont, 2011), sur les vestiges notamment des réfections en brique
mais les découvertes réalisées en 2015 montrent qu'il et la présence de pierres taillées à la boucharde ou à la
s'agit d'un mur de clôture de la sucrerie. Il aurait été pointe, encadrées d'une ciselure, technique propre au
agencé entre la fin du 19e siècle et le début du 20e siècle. 19e siècle. L'analyse des rapports des travaux mensuels
Il est associé non seulement à une plateforme destinée conservés montre une interruption des travaux entre
à la grue à vapeur, déjà relevée en 2009, mais aussi à 1818 et 1825 qui pourrait correspondre à la mise au
deux autres murs parallèles observés au sein de la jour des vestiges autrichiens par les Hollandais et à
parcelle. Ces aménagements sont reliés entre eux par la réintégration de ces fondations dans une nouvelle
des tirants qui en outre traversent le mur de clôture. Ils construction. En outre cette hypothèse est étayée
ont été réalisés vraisemblablement vers 1922 lors d'une par une modification des plans de la place d'armes
réorganisation des raccordements ferroviaires (Dera- dès 1825 (Deramaix, Dupont & Sartieaux, 2015 ; à
maix & Dupont, 2011). paraître).
Ath, ancienne sucrerie : vue aérienne de la place d'armes prise depuis le sud-est : 1. Tronçon occidental ; 2. Tronçon oriental encore
voûté transformé en citerne ; 3. Annexe donnant accès du réduit vers le fossé ; 4. Nouvel accès vers le fossé.
La place d'armes se compose des deux fossés du à l'intersection des deux segments et un caniveau en
réduit disposés en angle de 140°. Ces fossés sont limités brique s'y déverse.
sur chaque segment par deux murs parallèles. Le tron- Au nord-ouest, une construction industrielle s'est
çon occidental (1) a été dégagé sur toute sa longueur, appuyée contre l'un des murs externes de la place
soit 42 m. L'autre (2) a été observé sur près de 18 m. d'armes. Incomplète, elle mesure au moins 12 m de
Du côté septentrional les murs des fossés sont renfor- long sur 2,80 m de large. Elle est réalisée en brique. Les
cés par des piliers disposés tous les 5,20 m. Leur socle, murs des longs côtés sont disposés à 45° contre les sédi-
réalisé en pierre calcaire, est chaîné au mur. La partie ments encaissants. Plusieurs murs successifs forment
supérieure présente le départ de deux arcs de décharge des cloisons. La forme en entonnoir de cette structure
façonnés en brique. Cette partie en brique appartient à évoque celle de silos à betteraves que l'on trouvait
la phase d'occupation hollandaise. au 19e siècle (Blachette & Zoéga, 1826, p. 152-157 ;
L'accès du réduit vers le fossé se fait par une construc- Dureau, 1886, p. 379 ; Figuier, 1873-1877, p. 93).
tion annexe (3) comprenant un couloir. Ce passage
est bordé d'une petite pièce ayant vraisemblablement Bibliographie
servi de magasin à poudre. Une grande partie de ces ■■ Blachette L.-J. & Zoéga F.S., 1826. Manuel du fabricant de
aménagements semblent dater de l'époque hollandaise sucre et du raffineur ou Essai sur les différens moyens d'extraire le
comme en témoignent l'usage massif de la brique et les sucre et de le raffiner, Paris.
remarquables pierres de taille qui forment les chaînes ■■ Deramaix I. & Dupont A., 2011. Ath/Ath : vestiges des
des piédroits des baies. fortifications hollandaises sur le site de l'ancienne sucrerie,
Après l'arasement des fortifications hollandaises, les Chronique de l'Archéologie wallonne, 18, p. 72-73.
fondations de la place d'armes ont encore été utilisées. ■■ Deramaix I., Dupont A. & Sartieaux P.-P., 2015. Ath :
Une voûte en brique en plein cintre a été agencée sur fouilles préventives sur le site de l'ancienne sucrerie. In :
les deux segments de fossés. Seul le tronçon oriental a L'Archéologie en Hainaut occidental 2009-2015, catalogue
conservé aujourd'hui cette couverture (2). Un nouveau d'exposition, Ath (Amicale des Archéologues du Hainaut
occidental, XIX), p. 170-174.
couloir d'accès (4) assez étroit a été ajouté au sud-ouest
du tronçon occidental du fossé. Lors de l'activité de la
sucrerie le segment oriental du fossé a été transformé
en citerne. Un mur est venu condamner l'ouverture
119
Pierre à aiguiser découverte à Quevaucamps au « Bois de la Berlière ». A. Entailles ; B. Axe du trou de suspension.
La datation de cet objet reste problématique car soient plus limitées, les observations et descriptions
hormis les pierres à aiguiser gallo-romaines, désormais que nous avons recensées incitent à ne pas attribuer
mieux connues par des travaux récemment publiés la pierre du « Bois de Berlières » à cette époque. Il
(Thiébaux, Herbosch & Goemaere, 2012 ; Thiébaux est, en l'état actuel des connaissances, très difficile de
& Goemaere, 2013 ; Thiébaux et al., 2016), les autres trancher entre Âge du Bronze et période médiévale sur
périodes n'ont pas fait l'objet d'études exhaustives en base de critères morphologiques. Pourtant, certains
Belgique et dans les régions limitrophes. Toutefois, la détails comme la légère convergence des quatre faces
forme parallélépipédique de l'aiguisoir de Quevau- vers l'extrémité ainsi que son usure pyramidale sont
camps, ses dimensions et son percement biconique des traits uniquement repérés, pour l'instant, sur des
sont des caractéristiques communes aux aiguisoirs de aiguisoirs médiévaux.
l'Âge du Bronze comme du Moyen Âge décrits dans Les études publiées (déjà anciennes et sans illus-
la littérature non belge (Cordier, 1964 ; Gomez, 1976 ; trations photographiques) sur les pierres à aiguiser
Pautreau & Cassen, 1975 ; Kars, 1983 ; Aubourg & de l'Âge du Bronze provenant du centre de la France
Josset, 2003 ; Resi, 1990). On peut également exclure indiquent l'emploi de schistes, de schistes métamor-
l'époque romaine parce que les trous de suspension phiques ainsi que de « roches verdâtres » mais en l'ab-
sont (très) rares à cette période, que les formes qui sence d'analyse approfondie et de matériel de compa-
dominent pour nos régions sont cylindriques et que raison dans nos collections de référence, il est difficile
ce type de roche n'a pas été utilisé pour les pierres à de tirer des conclusions définitives. L'utilisation de
aiguiser gallo-romaines du nord de la Gaule. Bien roches métamorphiques est attestée sur de nombreux
que nos connaissances des aiguisoirs de l'Âge du Fer sites médiévaux dans le nord de l'Europe (Dorestad
122
aux Pays-Bas, Haithabu au Danemark…) où deux ■■ Thiébaux A., Feller M., Duchêne B. & Goemaere É.,
types de schistes ont été utilisés, l'un est de couleur gris 2016 (accepté). Roman whetstone production in northern Gaul
clair et l'autre de couleur gris foncé. Ils proviennent de (Belgium and northern France), Journal of Lithic Studies.
formations calédoniennes du sud-ouest de la Norvège. ■■ Thiébaux A. & Goemaere É., 2013. Étude des pierres à
Le schiste gris clair était extrait de carrières de la région aiguiser provenant de cinq sites gallo-romains des Vallées des
d'Eidsborg (comté de Telemark, Norvège) exploitées Eaux-Vives (sud-ouest de la province de Namur, Belgique),
Archéo-Situla, 32-33, p. 69-79.
pour le façonnage de pierres à aiguiser jusque dans
les années 1950 (Resi, 1990 ; Hansen, 2011). D'un ■■ Thiébaux A., Herbosch A. & Goemaere É., 2012. Un atelier
gallo-romain de pierres à aiguiser découvert à Buizingen (Hal,
point de vue macroscopique, ces matériaux diffèrent
Belgique) : reconstitution des étapes de fabrication et détermi-
par leur couleur de l'aiguisoir de Quevaucamps. Une
nation des origines géologiques et géographiques du matériau,
origine scandinave serait a priori à exclure. D'autres Revue du Nord, 94 (398), p. 143-158.
travaux sont donc encore nécessaires pour identifier,
caractériser et distinguer les matériaux utilisés aux
différentes périodes pour la fabrication de pierres à
aiguiser. C'est seulement à ce moment que nous aurons Courcelles/Gouy-lez-Piéton : sondage au
peut-être assez d'éléments pour nous prononcer sur la
pied de la tour de l'église Saint-Martin
datation de la pierre à aiguiser découverte au « Bois de
la Berlière ».
S'il reste donc beaucoup à faire, les premières études Nicolas Authom
menées sur les pierres à aiguiser de la période romaine
sont déjà révélatrices du potentiel de ces outils Dans le cadre d'un certificat patrimoine visant la
modestes. Les informations qu'ils nous livrent sur la restauration de l'église Saint-Martin (parc. cad. :
diffusion des produits et l'économie ainsi que sur la vie Courcelles, 5e Div., Sect. B, no 1001b ; coord. Lambert :
quotidienne ne doivent plus être négligées. 147134 est/130627 nord), le groupe Monument (sa
filiale Monument Vandekerckhove NV) a commandité
Bibliographie un sondage au pied de la tour occidentale de l'édifice
■■ Aubourg V. & Josset D., 2003. Le site du promontoire du afin d'en diagnostiquer l'état sanitaire. Le Service de
château de Blois du viiie au xie s. (Loir-et-Cher). Seconde partie : l'archéologie de la Direction extérieure du Hainaut 1
le mobilier non céramique, Revue archéologique du Centre de la (DGO4 / Département du patrimoine) a apporté son
France, 42, p. 169-216. expertise quant à la direction du terrassement et au
■■ Cordier G., 1964. Aiguisoirs de l'âge du Bronze provenant traitement des vestiges.
de la Touraine, Revue archéologique du Centre de la France, 3/1, Une imposante fondation, large de 1,60 m, a partielle-
p. 49-53. ment été dégagée au sud de la tour ; elle longe parallèle-
■■ Gomez J., 1976. Quelques aiguisoirs protohistoriques du ment cette dernière, à seulement 0,46 m. La fondation a
centre-ouest de la France. Éléments de datation, Revue archéo- été observée, depuis le mur occidental de la nef, sur une
logique du Centre de la France, 15/3-4, p. 261-265. longueur de 2,90 m avant de marquer un coude à angle
■■ Hansen S.C.J., 2011. The Icelandic whetstone material. An droit vers le nord et de revenir sous la tour. Côté ouest,
overview of recent research, Archaeologia Islandica, 9, p. 65-76. elle se perd hors emprise du sondage. Elle atteint plus de
■■ Kars H., 1983. Early-Medieval Dorestad, an archaeo-pe- 2 m de profondeur (mesure exacte impossible à relever
trological study. Part V. The whetstones and the touchstones,
Berichten van de Rijksdienst voor het Oudheidkundig Bodemon-
derzoek, 33, p. 1-37.
■■ Mitchell S.A., 1985. The whetstone as symbol of authority
in old English and old Norse, Scandinavian Studies, 57, p. 1-31.
■■ Parent S., 1995. Prospections archéologiques sur le territoire
de Stambruges (1980-1994). In : Un siècle de découvertes archéo-
logiques dans l'entité de Belœil, Belœil (Association pour la
sauvegarde du Patrimoine de Belœil, Documents, 2), p. 59-65.
■■ Pautreau J.-P. & Cassen S., 1975. Aiguisoirs inédits de l'âge
du Bronze dans le Centre-Ouest, Revue archéologique du Centre
de la France, 14/1-2, p. 63-67.
■■ Resi H.G., 1990. Die Wetz- und Schleifsteine aus Haithabu,
Neumünster (Berichte über die Ausgrabungen in Haithabu, 28).
La fondation dégagée au pied de la tour de l'église Saint-Martin.
123
vu l'étroitesse et la profondeur du sondage). La mise en à Léon Losseau, célèbre avocat et érudit montois.
œuvre est soignée : sur les deux faces est monté un pare- Dans le cadre de Mons 2015, la Province de Hainaut,
ment, maintenu par un blocage central de pierres et de propriétaire de l'ensemble dénommé « site Losseau »,
mortier à base de chaux et sable jaune. Le soin apporté souhaitait y installer le futur Centre d'interprétation de
à la construction pourrait suggérer une élévation plutôt la littérature. Les sept interventions limitées du Service
qu'une fondation. Un débord de quelques centimètres, de l'archéologie se sont étalées entre novembre 2014 et
à 0,44 m de profondeur par rapport à la tête du mur mars 2015, date limite pour l'inauguration.
conservée, pourrait marquer le passage entre fondation Diverses découvertes fortuites de structures
et élévation. Mais à l'exception du débord, aucune diffé- anciennes (citerne, caves, évacuation, puits, fonda-
rence ne s'observe dans le mode de construction de ces tions…) ont amené l'architecte, gestionnaire du projet,
deux niveaux. Quelques traces de rubéfaction ont été à prévenir les agents du patrimoine et de l'archéologie.
relevées au niveau du parement côté sud où les pierres Plusieurs visites, espacées en fonction des découvertes
et le mortier sont rougis. et des possibilités de circulation sur le chantier, ont
Entre cette fondation et le mur sud de la tour se trouve permis d'observer de nombreux détails sans toutefois
un béton à base de mortier beige et moins chargé en avoir les moyens de réaliser les relevés étant donné la
sable ; sa surface est plane. Ce béton se prolonge sous rapidité d'exécution des travaux. Les diverses descrip-
le mur sud de la tour qui semble élevé sur celui-ci ; il tions présentées ci-après se suivent sans avoir nécessai-
peut s'agir d'un niveau de sol, aménagé à l'intérieur de rement de lien entre elles.
l'espace délimité par le mur de fondation. Une fissure Une première visite du bâtiment, alors que les murs
importante a été observée dans la fondation du mur étaient complètement dégarnis, a permis l'observation
sud de la tour, à 2 m de l'angle ouest, à l'endroit où des vestiges de baies et de décalages dans les murs et
la fondation découverte fait retour sous ce mur. Un les niveaux de sol des étages. Bien que l'ensemble ait
examen général de l'édifice montre qu'une partie de la déjà été très fort remanié au cours du temps, il s'avérait
façade de la tour a légèrement basculé vers l'ouest. Ce évident qu'il s'agissait de plusieurs anciennes maisons
déplacement pourrait trouver une explication dans le rassemblées en une seule rendue uniforme par la
sous-sol dont la densité est irrégulière vu la présence façade placée dans le dernier tiers du 18e siècle. À
des vestiges d'un édifice plus ancien. l'arrière, l'espace d'une ruelle était parfaitement visible
L'église Saint-Martin, remontant au 16e siècle, a été dans l'enchevêtrement des bâtiments.
remaniée et agrandie au 18e siècle, avant une restauration Lors d'un creusement profond en sous-œuvre, ont été
en 1926 (Égl. paroiss. St-Martin, 1994, p. 211). La tour mis au jour une vanne, probablement du 19e siècle, et
actuelle, hors œuvre, aurait été installée au 17e siècle. Le un réseau d'évacuation constitué entre autres d'un bac
mur de fondation retrouvé pourrait vraisemblablement en briques liées au mortier gris et aux parois internes
appartenir à l'église primitive du 16e siècle ou bien à un revêtues de céramique blanche avec estampille anglaise
édifice plus ancien encore inconnu. (encore non déterminée). Partiellement sous cette
installation se trouve le cuvelage en briques (liées au
Bibliographie mortier de chaux) d'un puits circulaire dont le diamètre
■■ Égl. paroiss. St-Martin, 1994. Égl. paroiss. St-Martin. In : interne avoisine 50 cm. Creusé dans le sol en place, il
Province de Hainaut. Arrondissement de Charleroi, Liège (Le est comblé de restes de démolition ; vu la profondeur
Patrimoine monumental de la Belgique, 20), p. 211-212. atteinte, aucun prélèvement n'a pu être réalisé et il
n'a pas été vidé. Sa partie supérieure de même que sa
hauteur d'origine resteront toujours inconnues.
À la même profondeur que le puits et à l'aplomb
Mons/Mons : rue de Nimy, suivis d'une fondation de cave plus récente, se trouve un
archéologiques au « site Losseau » alignement de briques liées au mortier de chaux,
conservé sur une seule assise longue de 60 cm et posé
directement sur le sol en place. Entre ces deux vestiges
Cécile Ansieau anciens se trouve un remblai mélangé de sol en place et
de fragments de briques rouges et de mortier.
Le Service de l'archéologie de la Direction extérieure En divers endroits, plusieurs caves ont été touchées
du Hainaut 1 (DGO4 / Département du patrimoine) est par la rénovation, dont l'une voûtée en briques du
intervenu dans le cadre de travaux de rénovation d'un 16e siècle (?) a été coupée en deux dans le sens de la
imposant bâtiment situé à la rue de Nimy, nos 39-41, longueur. Ses fondations encore visibles sont peu
jouxtant la maison classée de style Art nouveau (objet profondes et reposent directement sur le sol en place.
d'une restauration simultanée) ayant appartenu Son niveau de circulation est constitué de deux assises
124
de briques superposées (soit 16 cm) recouvertes d'une la présence d'une baie dans le pignon de la maison
couche de béton. Les fondations des murs porteurs Losseau, obturée puis divisée en deux par la construc-
descendent 30 cm plus bas que le niveau de sol en tion d'un mur dans le bâtiment qui nous occupe.
place. Les briques sont liées au mortier de chaux de Dans la partie nord du bâtiment à front de rue, le
teinte beige contenant des éléments végétaux. bois de charpente est surtout issu de la récupération et
Entre deux caves situées à l'extérieur de la zone décrite, en mauvais état sanitaire, tandis que du côté sud (côté
le sol en place apparaît quasi dès la surface et jusqu'à maison Losseau) la charpente avec les assemblages
plus de 2 m de profondeur ; cette information revêt une croisés semble d'origine, par contre sa base ouest a été
certaine importance tant les constructions sont denses modifiée par l'agrandissement du bâtiment de ce côté.
en intra-muros, rendant la restitution de la topographie La ville de Mons figure sur plusieurs plans rassem-
originelle bien compliquée. blés pour les campagnes de Louis XIV ; ils apportent
Une fois sa voûte percée, une ancienne citerne exté- des renseignements fiables, relatifs aux aménagements
rieure devenue accessible a pu être observée (long. défensifs et militaires ou encore sur la fonction religieuse
interne 5,80 cm, larg. 3,60 m au bas de la voûte, haut. des parcelles : église ou présence de congrégations.
2,60 m) : elle est constituée entièrement de briques régu- L'un d'eux daté de 1693, plus détaillé, est généralement
lières (22 × 10 × 5,5 cm) liées au mortier de chaux de utilisé pour apporter l'information recherchée (Recueil
teinte brun-beige contenant des fragments de briques des plans des places du Royaume, 1693) ; l'îlot qui nous
et des charbons de bois de tailles différentes. Elle est occupe est renseigné uniquement comme zone d'habi-
installée dans le sol en place composé de lits de sable tat et ne présente aucun détail particulier. L'enchevê-
et de fines couches d'argile (?). La voûte est constituée trement des murs, des charpentes et leurs orientations
d'une brique de long ou de deux demi-briques. L'enduit variées, le décalage entre les niveaux et la présence de
qui couvre les parois intérieures est un mortier de teinte ruelles plaident en faveur de cette interprétation.
beige, cependant, la couleur de surface est noire partout. Les indices d'agrandissement et de modifications de
L'enlèvement du niveau de sol d'une des pièces située même que du rassemblement de plusieurs modules de
à l'arrière a mis au jour une épaisse fondation (entre 80 base sont nombreux, cependant il aurait fallu procéder à
et 95 cm) dont l'orientation est différente de l'orienta- une étude d'archéologie du bâti plus poussée pour arri-
tion générale des bâtiments. Les parements de la fonda- ver à des conclusions pertinentes sur l'évolution de cet
tion, conservés sur 35-40 cm de haut, sont composés en ensemble.
tuffeau de Ciply avec quelques blocs de grès à la base La procédure de certificat de patrimoine ne
tandis que le blocage contient des briques. Elle est orien- s'appliquait pas à cette imposante bâtisse datée à
tée est/ouest et se trouve très reculée dans la parcelle, l'inventaire uniquement d'après sa façade unifor-
loin du front de rue où aucune trace n'a été perçue. Elle misée au 18e siècle ; le Service de l'archéologie
est assisée sur le niveau de sable vert (sol en place) ; tout n'aura pas pu tirer parti de toutes les informations
a été excavé autour d'elle et aucune stratigraphie n'est encore disponibles sur les habitations antérieures
visible dans les parois sous les autres fondations. Au qui la composaient ; la synthèse finale de toutes les
nord-ouest de cette fondation, une couche organique observations archéologiques et réflexions n'a encore
(de décomposition de bois ?) est observée sur le sable pu aboutir à un plan complet. Toutefois, l'appel tardif
en place ; il est peu probable qu'il s'agisse d'un plancher mais efficace de Madame Daphné David, architecte
en lien avec cette construction car il se situe plus bas en charge de ce dossier, aura permis de percevoir une
que la fondation ancienne et celle des murs de la pièce fois de plus la quantité de vestiges encore présents
(17e siècle) ; la fondation relevée est recoupée par celles tant dans les sous-sols que dans les élévations et char-
des murs de la pièce qui l'entourent et est donc antérieure pentes des édifices montois. Nous tenons vivement à
(15e-16e siècles ?). Aucun matériel archéologique n'a été la remercier, de même que le Service technique des
mis au jour à cette occasion. Peut-être correspond-elle à bâtiments de la Province de Hainaut dont elle dépend
un mur de soutènement ancien de cette partie haute de pour sa démarche constructive et qui aura permis de
la rue de Nimy ? mettre au jour de nombreux éléments aujourd'hui
Au rez-de-chaussée, le parement intérieur du couloir disparus ou occultés par la rénovation.
(qui correspond au pignon originel de la maison
Losseau) est réalisé en moellons équarris de grès de Sources
facture médiévale, indiquant la présence probable d'une ■■ Recueil des plans des places du Royaume, divisées en provinces,
ruelle à cet endroit. faits en l'an 1693, no 32, plan de Mons (Paris, Bibliothèque
À l'occasion d'une autre visite sur place, alors que la nationale de France, département Cartes et Plans, GE DD-4585
charpente et les étages étaient accessibles, de nombreuses [1, RES] ; http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/btv1b5967727j/f113.
observations ont été réalisées portant par exemple sur item.r=Mons,%201693, consulté le 13 septembre 2016).
125
Mouscron/Mouscron : château des dimensions atypiques pour le site (24 × 11 × 4,5 cm).
Comtes, suivi du réaménagement de la Le dégagement de la structure a livré quelques indices
basse-cour céramiques évoquant les productions du 17e siècle.
Bien que le plan et les dimensions de cet élément
rappellent les structures de puits connues sur d'autres
Marceline Denis sites, sa mise en œuvre, légère et incomplète, semble
écarter de facto cette fonction. Une vocation plus
Le château des Comtes a déjà fait par le passé l'objet décorative n'est sans doute pas à exclure.
de nombreuses opérations préventives et de suivis Diverses fosses, massifs de fondation isolés, sections
s'attardant sur le logis et ses remparts (parc. cad. : de canalisation maçonnées et aménagements de rigoles
Mouscron, 6e Div., Sect. A, nos 572l, 572m et 572h). En recueillant les eaux de ruissellement ont été perçus sur
2015, le projet de réaménagement de la basse-cour fut le flanc ouest de la basse-cour. L'absence de matériel
l'occasion de poursuivre les recherches menées depuis archéologique associé à ces structures empêche toute-
2002. L'intervention archéologique s'est uniquement fois tout essai de datation. Le suivi des décapages a néan-
concentrée sur le suivi des décapages opérés par le moins révélé des fondations plus explicites fermant
soumissionnaire des travaux. l'espace de la basse-cour sur son flanc nord-est. Cette
La basse-cour se développe à l'est du château sur annexe, exclusivement réalisée en briques et mortier
une surface de près de 2 000 m². Elle est encadrée par de chaux, était équipée d'une citerne extérieure. L'ana-
un portail d'entrée, deux ailes de bâtiments agricoles lyse des fondations a révélé plusieurs phases d'agran-
réhabilités, les douves et un large accès menant au dissement de l'édifice ainsi que des modifications de
logis du château. Cette configuration en fait le prolon- ses espaces internes. Des aménagements à fonction
gement naturel de l'espace dévolu au logis comtal. La indéterminée et probablement contemporains des
cour de plan rectangulaire est actuellement libre de précédents ont également été révélés dans l'angle sud-
tout aménagement. Le suivi des travaux de rénovation ouest de la basse-cour. Leur lien avec les édifices à
permettra toutefois de relever de nombreux indices vocation agricole toujours présents sur le site n'a pu
modifiant cette perspective. être établi avec certitude.
L'opération a pu mettre en évidence la nature très
largement remaniée de la terrasse dédiée à la basse- Bibliographie
cour. Le décapage de toute la surface a fait apparaître ■■ Dasseleer S., Dosogne M. & Deramaix I., 2003. Mous-
l'apport successif de substrat anthropique révélant du cron/Mouscron : étude archéologique au château des Comtes,
matériel couvrant une ample fourchette chronologique Chronique de l'Archéologie wallonne, 11, p. 75-77.
comprise entre le 15e et le 19e siècle. Cette observation
n'est pas en contradiction avec les sources historiques
mentionnant explicitement l'existence d'une basse-
cour dès 1431 (Dasseleer, Dosogne & Deramaix, 2003). Quévy/Quévy-le-Grand : fouille d'un
Un fossé de 3,20 m de large fut observé sur une établissement rural
section de 5,50 m sur la moitié est de la basse-cour.
Il est implanté suivant un axe nord-est/sud-ouest
dans les substrats anthropiques constituant le socle Véronique Danese, Olivia De Staercke
de la basse-cour. Son tracé est régulier et sa largeur et Benjamin Van Nieuwenhove
relativement constante. L'environnement immédiat
de ce fossé est fortement marqué par des épisodes de De mi-mai à octobre 2015, une nouvelle saison
réduction et d'oxydation successifs, témoignant d'une de fouille s'est déroulée à Quévy-le-Grand, sur les
présence d'eau discontinue. L'implantation de ce fossé parcelles comprises entre les rues des Sœurs, du Culot
réduit considérablement l'emprise de la basse-cour et de la Fontaine (parc. cad. : Quévy, 2e Div., Sect. C,
telle qu'on la connaît actuellement. Le comblement nos 560C, 562D, 564M, 559G et 558C ; coord. Lambert :
supérieur de ce fossé, vraisemblablement lié à la phase 120255 est/116871 nord). Les recherches, comman-
d'abandon de la structure, a révélé la présence de maté- ditées par le Service de l'archéologie de la Direction
riel céramique correspondant à des productions s'éta- extérieure du Hainaut 1 (DGO4 / Département du
lant des 14e-15e siècles au 17e siècle. patrimoine), ont été réalisées par une équipe d'ar-
Face au corps de logis du château, un dispositif chéologues, de techniciens de fouilles et d'opérateurs
circulaire de 2,20 m de diamètre a été identifié au de l'asbl Recherches et Prospections archéologiques
sein de remblais anthropiques. Sa mise en œuvre est (RPA), secondée par des opérateurs du Service de
caractérisée par l'emploi d'un seul rang de briques de l'archéologie.
126
conservés sur plus de 1 m de d'épaisseur et présentent beige clair à jaune pâle. Les moellons sont essentiel-
un comblement multiple. Le fond de cabane le mieux lement en grès quartzites locaux de teinte bordeaux,
préservé mesure 1,90 m sur 1,40 m et 60 cm de hauteur. gris, blanchâtre et brun et plus rarement en calcaire
Il est orienté nord-nord-est/sud-sud-ouest et possède importé ou en silex. La détermination des phases de
un fond plan, des parois verticales, des poteaux d'angle construction n'a donc pu se faire que via l'observa-
et un plancher. Deux terres cuites presque entières tion de l'appareillage et des différentes coutures entre
et datant du 15e siècle ont été mises au jour dans son les maçonneries.
remblai. Le logis se situe au sud-est et les autres bâtiments
Pour ces diverses époques (7e-15e siècles), la docu- autour de la cour ont été identifiés comme ayant servi
mentation archéologique n'est encore que partielle. à la stabulation. Le bâtiment 5, l'abreuvoir et les accès
Une part importante de la superficie fouillée en 2015 complètent les éléments du plan.
est encore occupée par des vestiges maçonnés plus
récents, ce qui justifie en partie la saison archéolo- Le bâtiment 1
gique 2016-2017. Celle-ci permettra le démontage des
structures maçonnées en vue d'accéder aux vestiges Au sud-ouest de la cour, il subsiste la fondation d'un des
antérieurs au 16e siècle et de les étudier. Elle devrait murs gouttereaux du bâtiment 1, orienté est-sud-est/
contribuer à conclure pour ces époques. ouest-nord-ouest. Elle mesure 19,5 m de long sur 60 cm
de large et a été construite en fosse. Seuls le creusement
Des Temps modernes à nos jours : une de la tranchée et parfois une à deux assises de la fonda-
exploitation agricole tion ont été conservés.
L'étable
La cour centrale et les chemins d'accès au sud-ouest de l'abreuvoir, à l'arrière du logis. Repéré
sur 16 m de long et sur 4 m de large, ce bief conserve
La cour centrale est de plan trapézoïdal mesurant de nombreux vestiges de poteaux et de branchages.
40 m × 33 m × 27 m × 27 m. Deux puits de 1,5 m de L'eau était maintenue dans le réservoir grâce à la vanne
diamètre ont été repérés dans l'angle sud de la cour. aménagée dans le mur nord-est. Le système d'alimen-
Distants de 8 m, ils sont proches du logis et présentent tation et d'évacuation des eaux explique certains détails
un cuvelage maçonné, pour l'un en moellons, pour architecturaux de l'abreuvoir, comme la reconstruc-
l'autre en briques. tion du mur sud-ouest dégradé par la poussée des eaux
Le niveau de circulation de la cour est partiellement ou encore les imposants massifs encadrant la vanne,
empierré, aménagement qui semble avoir été exclusi- destinés à canaliser les eaux sortantes et à renforcer le
vement construit ou alors seulement conservé dans la mur soumis à la pression des eaux.
moitié sud-est. Il n'est pas plan et présente un profil en Le comblement de l'abreuvoir a livré un très grand
légère cuvette. Le long du logis, un espace de 3 à 5 m de nombre de fragments de mobilier : vaisselle en céra-
large, aménagé avec plus de soin, se caractérise par la mique et verre, couvert en métal, objets en fer, semelles
mise en œuvre soit de briques posées à plat, soit de pavés en cuir, etc.
disposés sur des surfaces quadrangulaires de gros blocs
équarris. La zone nord-nord-est possède également un Le bâtiment 5
sol particulièrement bien soigné. Elle marque le passage
entre la cour à proprement parler et le portail principal Au sud-ouest du logis, au-delà du bief, se localise le
de la ferme. Établi entre la grange et l'étable, celui-ci y bâtiment 5, constitué de trois pièces et d'une petite
forme un angle tronqué ; il présente un seuil constitué annexe. Le volume principal quadrangulaire de 6 m de
de grandes dalles taillées. De là, un chemin pavé de 3 côté est flanqué de deux petites pièces, dont une semi-
à 4 m de large, observé sur 20 m de long, s'éloigne de enterrée. L'une mesure 4,3 m sur 2,3 m et l'autre 3,3 m
la ferme en direction du nord-nord-est. Ce chemin a sur 2,6 m. Cet ensemble est construit en moellons et le
été partiellement aménagé sur le dérasement du mur revêtement de sol conservé dans l'une des petites pièces
en moellons qui prolongeait le passage charretier. Dans est constitué de briques posées à plat. Ces dernières
l'angle est-sud-est de la cour, un autre passage ouvert sur sont couvertes d'une couche de charbon de bois dont
1,5 m de large donne accès à un second chemin empierré la présence pourrait indiquer une fonction de cave à
se dirigeant vers le sud-est. Formé d'un pas d'âne large charbon. Cependant, l'emplacement dans le bief, soit
de 3 m et long de 13 m, il mène à un abreuvoir creusé dans une zone très humide, n'y serait pas favorable.
en contrebas des bâtiments du logis ; ses trois premiers Au nord-est du volume principal, une très petite
mètres ne sont pas conservés. La dernière marche est annexe a été construite en briques, matériau qui la
caractérisée par un empierrement assez fruste, contras- distingue des trois autres pièces. De 3,3 m sur 1,6 m,
tant avec le pavage soigné du reste du chemin. Ce détail elle est orientée nord-ouest/sud-est et présente un
semble indiquer que cette marche était sous eau et donc petit aménagement interne peu solide en briques, base
que son revêtement de sol était non visible. probable d'un petit établi.
Deux murs parallèles sont positionnés de part De très nombreuses fosses d'enfouissement pour
et d'autre des deux pas d'ânes inférieurs. À leurs animaux ont été creusées tout autour des bâtiments
extrémités sud-est, les murs s'écartent l'un de l'autre évoqués. D'époques diverses et de dimensions très
en deux courbes opposées et s'ouvrent sur un espace variables, elles contiennent des squelettes soit partiels
quasi ovoïde de 10 m sur 6,5 m, orienté nord-est/ soit entiers, souvent en connexion, de chevaux, brebis
sud-ouest, formant l'abreuvoir. Le mur nord-est de ou chèvres et de chiens. L'une d'elles sort du lot : elle
cet espace se compose de deux segments courbes dont mesure 3 m sur 11 m et contient de nombreux sque-
les têtes élargies en de puissants massifs maçonnés lettes en connexion mêlés à de la chaux. Cet enfouisse-
encadrent une baie de 50 cm de large, fermée par une ment collectif est sûrement le résultat d'une épidémie
vanne en bois. Au sud-est et au sud-ouest, les murs ayant ravagé le cheptel.
mesurent 40 cm de large. Le second, long de 4 m, est
percé en son centre d'une baie de 46 cm de large. L'état Bilan et perspectives
de ce mur semble résulter d'un réaménagement. Le
sol de l'abreuvoir consiste en un empierrement assez Actuellement, l'équipe archéologique ne dispose que de
grossier. L'amenée d'eau se fait grâce à un bief, situé peu d'informations historiques sur Quévy-le-Grand,
130
Bibliographie
■■ Lecomte A., 2014. Quévy/Quévy-le-Grand : un site médié-
val à la rue du Culot, château et activité artisanale. Campagne
de fouilles 2012, Chronique de l'Archéologie wallonne, 21,
p. 102-105.
Sources
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
plan parcellaire de Quévy-le-Grand.
■■ Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens (1771-1778) de
Joseph-Johann-Franz Comte de Ferraris, Havay, pl. 55B.
Saint-Ghislain/Baudour : sondages
Quévy-le-Grand : photogrammétrie de l'une des fosses
préalables à l'extension du temple
contenant le squelette d'un jeune cheval. protestant de Douvrain
de l'église et du temple protestant. Il conclut à la présence atelier de taille) n'a été mise au jour. Les silex taillés
d'ateliers de taille du silex néolithiques comparables à et non taillés présents sur la totalité de la parcelle ont
ceux du « Camp-à-Cayaux » de Spiennes. Fin 1922, des été recueillis dans la couche de colluvions, au contact
sondages menés à l'arrêt du tram à Douvrain-Temple des sables immédiatement sous-jacents et dans les
livrent des artefacts en silex, tantôt épars tantôt plus structures archéologiques postérieures au Néoli-
concentrés, sur toute l'épaisseur des sables soit 1,2 m thique. L'assemblage est donc en position secondaire
à 1,5 m. Ceux-ci reposent directement sur le Crétacé et ne peut être considéré comme totalement homo-
(Houzeau de Lehaie, 1922-1923). Entre 1936 et 1939, gène. Le sondage profond creusé jusqu'à 2,5 m de
des sondages ne dépassant pas 1,5 m de profondeur, profondeur n'a pas permis d'atteindre le Crétacé et
réalisés dans des jardins avoisinant le temple protestant n'a pas montré de banc de silex en place. Il a révélé
et le long de la rue Louis Caty, ont livré des ébauches de un substrat sableux extrêmement instable peu propice
hache et des outils sur éclat (Lefrancq, 1973). Des pros- au creusement de structures profondes. Les matières
pections pédestres réalisées en 2011 ont fourni quelques premières présentes sur le site comprennent par ordre
indices supplémentaires. Au cours de celles-ci, des d'importance du silex de type Ghlin, caractérisé par
déchets de taille, dont d'assez nombreux exemplaires un support en forme de plaquette, un cortex usé, une
en silex de type Ghlin, ont été collectés dans une prairie matrice grise à gris foncé mate présentant un litage et
située face au cimetière entre les rues du Temple, Louis des vermiculures caractéristiques, résultat de bioturba-
Caty et Pasteur Grégoire. Deux ébauches de hache en tions (156 pièces), des silex remaniés dans les sables
silex de type Ghlin ont été ramassées dans les déblais de thanétiens (37 pièces) et du silex turonien, au cortex
la construction d'une maison située au no 40 de la rue scoriacé et à la matrice foncée chargée de spicules
du Temple. d'éponges (37 pièces). Quelques artefacts en silex de
Ces découvertes successives laissaient donc espérer Villerot ou Obourg, à la matrice noire, fine et extrême-
la présence d'ateliers de taille et d'éventuelles structures ment homogène, sont identifiables. Par contre, aucune
d'extraction du silex en liaison avec ce type de vestiges. pièce en silex de type Spiennes n'a été identifiée. Il
La forte proportion de silex de type Ghlin renforçait s'agit pourtant d'une matière largement utilisée et
l'intérêt archéologique de cette intervention. En effet, diffusée dès le Néolithique moyen, au niveau régional
jusqu'à aujourd'hui on ne connaît pas la provenance mais également en dehors du Bassin de Mons (Bostyn
exacte de cette matière première utilisée abondam- & Collet, 2011). Près de 60 % des silex rencontrés sont
ment à partir du Néolithique ancien. taillés. Ce pourcentage varie fortement en fonction
de la matière première. Ainsi si la majorité des silex
L'intervention turoniens et la plupart des silex thanétiens sont bruts,
Résultats de l'intervention
à l'inverse la majorité des silex de type Ghlin (environ du site (ST01, ST07, ST11, ST12, ST13, ST14, ST21 et
75 %) sont taillés. Les exemplaires non taillés en silex ST22). Les autres sont antérieures à cette couche de
de type Ghlin sont des fragments de plaquettes dont colluvions (ST02, ST04, ST06, ST09, ST15, ST16, ST17,
quelques-unes présentent un cortex verdi, mais sans ST18, ST19 et ST24). Parmi celles-ci, seul le fossé ST19
développement d'une zone sous-corticale brun orangé a livré quelques fragments de céramique datant des 17e
typique des silex thanétiens. La présence de fragments et 18e siècles (identification par Cécile Ansieau). Les
non taillés en silex de type Ghlin renforce l'hypothèse éléments céramiques hors structures découverts sur la
d'une origine locale pour ce matériau, même si l'em- parcelle sont datables des périodes s'échelonnant du
placement des affleurements reste à découvrir. Typolo- 16e au 18e siècle (identification par Cécile Ansieau et
giquement, un unique outil, un perçoir, a été collecté. Marceline Denis). La fosse ST18 a livré des moellons
Le reste des artefacts relève d'activités de taille et de de silex liés par du mortier. Il est à noter que la matière
débitage. La plupart des éclats et nucléus illustrent première est de type Ghlin et corrobore une probable
un débitage sur plaquettes avec production d'éclats origine locale de ce matériau.
et d'éclats laminaires. Quelques pièces diagnostiques
indiquent la production de pièces bifaciales (ébauches Bibliographie
et éclats de façonnage) ainsi que le débitage de lames ■■ Bostyn F. & Collet H., 2011. Diffusion du silex de Spiennes
(nucléus à lames, tablette d'avivage et lames). Alors et du silex Bartonien du Bassin parisien dans le Nord de la
que la production bifaciale daterait a priori au plus France et en Belgique de la fin du 5e millénaire au début du
tôt du Néolithique moyen, la production laminaire 4e millénaire BC : une première approche. In : Bostyn F.,
pourrait, quant à elle, remonter au Néolithique ancien Martial E. & Praud I. (dir.), Le Néolithique du Nord de la
sous réserve d'une étude technologique plus poussée France dans son contexte européen : habitat et économie aux 4e et
3e millénaires avant notre ère. Actes du 29e colloque interrégional
du mobilier.
sur le Néolithique. Villeneuve-d'Ascq, 2-3 octobre 2009, Amiens
Dix-huit structures archéologiques postérieures au
(Revue archéologique de Picardie, n° spécial 28), p. 331-347.
Néolithique ont été identifiées. Il s'agit d'un chemin, de
■■ Collin J.-P., à paraître. Mining for a week or for centuries:
deux fossés et de fosses détritiques. Le chemin (ST09,
variable aims of flint extraction sites in the Mons Basin within
ST20, ST23 et ST24) large de 4 m présente une succes- the lithic economy of the Neolithic (Province of Hainaut,
sion d'ornières. Il est parallèle à la voirie actuelle de Belgium), Journal of Lithic Studies.
la rue du Temple et pourrait correspondre à l'Ancien ■■ Houzeau de Lehaie J., 1922-1923. Note préliminaire sur
Grand Chemin d'Hautrage qui doublait le Grand les ateliers de l'industrie néolithique spiennienne à Baudour
Chemin de Mons à Condé (Leblois, 1997). À l'excep- (Douvrain), Bulletin des Naturalistes de Mons et du Borinage, 5,
tion de la ST19, les structures n'ont pas livré d'élé- p. 20-23.
ments permettant de les dater. Stratigraphiquement,
plusieurs sont récentes. Elles sont postérieures à la
couche de colluvions présente sur la majeure partie
133
Tournai, place Reine Astrid : plan général des vestiges (infographie P.-P. Sartieaux, Serv. archéologie, Dir. ext. Hainaut 1).
135
(Grand Atlas, 2009, carte 21B ; plan de Tournai en 1863 0,85 m de large et est conservé en fondation sur 1 m de
dans Bozière, 1864, pl. I) n'offrent pas de précisions haut. Il est percé d'un caniveau dont la couverture et le
sur la nature de l'occupation de la parcelle. Il s'agit sol sont formés de grandes dalles en pierre de Tournai.
souvent d'un pâté de couleur qui laisse supposer qu'elle Ce caniveau se poursuit vers le sud-est où il plonge à
est entièrement bâtie. Par contre sur les cadastres du 45° vers un faux-puits qui n'a pu être dégagé suite au
19e siècle (plan de P.-C. Popp, notamment), la moitié passage en oblique de l'égout encore en usage. Il est
méridionale est exempte de constructions, l'autre est encadré à cet endroit de dalles en pierre irrégulières et
clairement occupée par des édifices dont l'accès se fait non cimentées. Ses parois sont réalisées en brique.
via la rue Saint-Martin. Parmi ceux-ci figure l'hôtel de Entre les murs F 001 et F 003 se trouve une vaste
Saint-Génois réalisé pour Nicolas-François de Saint- fosse quadrangulaire (F 005) de 3 m de long sur au
Génois par le père de l'architecte B. Renard. Cette moins 1,50 m de large. Recoupée dans la tranchée, elle
maison de maître a été rachetée en 1839 par le baron de a juste été repérée, mais pas fouillée. Elle s'enfonce à
Rasse, bourgmestre et sénateur (Bozière, 1864, p. 182). plus de 1 m de profondeur. Son remplissage est prin-
Selon Soil de Moriamé (1895, p. 43), la construction cipalement constitué de limons gris-brun panachés de
remonterait au 17e siècle avec façade et avant-cour de boulettes jaunes qui dessinent un remplissage concen-
style Louis XVI. Vendu en 1947, cet immeuble dispa- trique.
raît avant 1951 au profit entre autres du garage Delune Un troisième mur (F 006) a été mis au jour au sud-
(Benoît Dochy, communication personnelle). est du mur F 001. Il se situe à 7,50 m de ce dernier. Sur
le profil nord-est de la tranchée (profil 2), on observe
Les résultats des interventions que ce mur s'installe au nord-ouest contre des strates
(US 024 à US 027) offrant un pendage de 45° nord-
Dans la tranchée réalisée en 2014 s'observe au nord- ouest/sud-est. De plus, il est en fondation de ce côté et
ouest une cave dont subsistent les départs de la voûte est doté d'un parement soigné à l'opposé. Ces observa-
en brique (US 007) et la paroi sud-est (US 006). Cette tions laissent à penser que ce mur retient des terres en
dernière, en brique (25 × 11,5 × 5 cm), s'appuie sur bordure d'un fossé. De plus le remplissage collé contre
un mur en fondation (F 003) constitué de moellons le parement soigné correspond assez bien aux rejets de
et rares briques liés par un mortier à base de chaux. destruction du mur lors de son abandon (US 022).
Large de 0,50 m, celui-ci est doté au sud-est d'une Le mur F 006 est arasé à 1,20 m de profondeur. À
excroissance arrondie. Sa base n'a pas été atteinte à ce niveau, il ne mesure que 0,50 m de large. Il offre un
1,30 m de profondeur. À 9 m de ce mur se situe un léger fruit du côté parementé. Il est suivi sur 4,50 m de
second disposé parallèlement et exclusivement réalisé long et s'interrompt au sud-ouest sans retour perpen-
en pierre (moellons bruts et équarris) cimentée par un diculaire. Il est réalisé en calcaire de Tournai cimenté
mortier blanchâtre à base de chaux (F 001). Il mesure par un mortier crème à base de chaux. L'appareil,
de gabarit moyen, est réglé au sud-est. De ce côté, il d'un parement supplémentaire qui renforce le rempart
présente deux ressauts successifs de 0,20 m d'épaisseur sur sa face externe (Amand, 1986 ; Deramaix, Dury &
et d'une trentaine de centimètres de haut constitués Sartieaux, 2002). Cela sous-entend dès lors que le mur
d'assises irrégulières de moellons de petit gabarit déli- primitif a aujourd'hui disparu et que sa base était plus
mités à l'extrémité sud-ouest par un bloc équarri. haute puisqu'elle n'est pas perceptible dans le profil 2.
L'extrémité du mur F 006 est perturbée par le Ce qui est cohérent par rapport aux observations réali-
passage de buses en grès. Cette perturbation ne permet sées sur le site des Douze Césars. À nouveau, à cette
pas d'appréhender le lien précis qu'il entretient avec le hypothèse s'oppose la faible largeur de la maçonnerie
mur F 008 qui débute à cet endroit. Ce dernier mur du mur F 006, puisque les dimensions relevées pour
est conservé sur près de 1 m de haut avant d'être arasé ces aménagements atteignent au moins 0,80 m. Enfin,
quasi à sa base sous la fosse de garage. Il présente dans il est aussi difficile de comprendre l'interruption du
sa partie supérieure quelques assises qui semblent mur à cet endroit.
parementées en appareil irrégulier du côté sud-est, Les autres murs (F 008, F 009, F 013 et F 014)
alors qu'il est surtout en fondation. Il tend à s'évaser témoignent clairement de constructions domes-
vers la base, de ce fait, il mesure 0,60 m à son point le tiques et non plus défensives. Peu d'indices matériels
plus haut d'arasement et 0,80 m à son niveau le plus permettent actuellement de les dater. Ils sont antérieurs
bas. Il est réalisé principalement en pierre calcaire de au 19e siècle car ils ne figurent pas sur les premiers
Tournai associée à quelques briques liées par mortier cadastres réalisés à cette période. Ils pourraient être
beige à base de chaux. postérieurs au 17e siècle, car, avant cette date, les plans
À 9,65 m de son extrémité nord-est, le mur F 008 anciens de la ville montrent toujours la première
est chaîné avec un autre, perpendiculaire, de même enceinte communale bordée de son fossé. Néanmoins,
constitution et arasé au même niveau (F 009). Celui-ci cette supposition doit être toute relative, car les fouilles
s'appuie contre le mur F 012, situé à la limite d'emprise menées à l'ancien hôpital Saint-Georges ont mis en
de la fouille. Ce dernier semble en fondation, consti- évidence le manque de fiabilité de ces documents en
tué de pierres liées par un mortier blanchâtre à base ce qui concerne la représentation de cette fortification
de chaux. (Deramaix, 2013).
Contre le mur F 009, et dans l'axe du mur F 008,
s'installe le mur F 014. Il est réalisé en pierre calcaire
de Tournai associée à de rares briques cimentées par
un mortier beige à base de chaux. Il mesure entre 0,55
et 0,60 m de large. Il semble servir d'appui au mur
F 013. Ce dernier est réalisé principalement en brique
(24 × 11,5 × 5,5 cm) avec de gros blocs équarris. Il
dispose d'une baie de 0,60 m de large, délimitée par
deux piédroits en brique encadrant un seuil en pierre
calcaire (US 043). La face sud-est de ce mur est renfor-
cée par un parement en brique (24 × 11,5 × 5,5 cm) de
la largeur d'une brique (US 045 et US 046). Ces aména-
gements sont à la limite d'emprise de la propriété et
Tournai, place Reine Astrid : vue générale des fouilles.
sont perturbés par les fondations du mur qui clôt la
parcelle.
Conclusion
Interprétations générales
Les sondages réalisés à l'arrière de l'ancien garage Delune
Les murs F 001 et F 003 appartiennent à l'hôtel de à Tournai n'ont pas livré de vestiges concrets pouvant
Saint-Génois identifiable sur les cadastres du 19e siècle. être attribués à la première enceinte communale. Tout
La position stratigraphique du mur F 006 et sa face au plus le mur F 006 pourrait être un réaménagement
parementée semblent indiquer qu'il limite le fossé sur le tracé de celle-ci vu son parement soigné qui borde
périphérique à l'enceinte. Toutefois, sa faible épaisseur vraisemblablement l'ancien fossé défensif.
pose question et ne semble pas correspondre à un mur Les autres vestiges mis au jour conduisent à davan-
de courtine. En effet, les vestiges connus de la première tage de questions sur la pérennité de cette fortification
enceinte livrent à leur base des largeurs comprises dans ce quartier au cours des siècles qui ont suivi son
entre 1,20 m et 1,50 m. Il pourrait s'agir, comme sur abandon. Les limites de la fouille actuelle ne permettent
les sites du Marché au Jambon et des Douze Césars, pas d'aller plus loin dans les interprétations.
137
Ces premières interventions archéologiques devront ■■ Le Poivre P., 1585-1622. Recueil de plans de villes et de
être suivies d'une fouille préventive sur l'ensemble du châteaux, de fortifications et de batailles, de cartes topographiques
site lors de la demande de permis d'urbanisme, ce qui et géographiques, se rapportant aux règnes de Charles-Quint, de
permettra peut-être de mieux comprendre les vestiges Philippe II et d'Albert et Isabelle, s.l., pl. 46 (Description du siege
de la ville de Tournay, 1582).
déjà exhumés.
Avec la collaboration de Benoît Dochy
Bibliographie
■■ Amand M., 1986. Les enceintes médiévales de Tournai :
documents inédits. In : Autour de la ville en Hainaut. Mélanges
d'archéologie et d'histoire urbaines offerts à Jean Dugnoille et à
René Sansen à l'occasion du 75e anniversaire du C.R.H.A.A.,
Ath (Études et Documents du Cercle royal d'Histoire et d'Ar-
chéologie d'Ath et de la Région et musées athois, VII), p. 161-174.
■■ Atlas des villes, 1884-1924. Atlas des villes de la Belgique au
xvie siècle. Plans du géographe Jacques de Deventer exécutés sur
les ordres de Charles-Quint et de Philippe II, reproduction fac-
similé exécutée à l'Institut national de Géographie, Bruxelles.
■■ Bozière A.-F.-J., 1864 [1976]. Tournai ancien et moderne,
Bruxelles (réimpression anastatique).
■■ Deramaix I., 2013. Tournai/Tournai : fouilles préventives sur
le site de l'ancien hôpital Saint-Georges, Chronique de l'Archéo-
logie wallonne, 20, p. 130-132.
■■ Deramaix I., Dury C. & Sartieaux P., 2002. Fouilles
préventives à l'îlot des Douze Césars à Tournai. Un nouveau
regard sur la première enceinte communale. In : Sixième
Congrès de l'Association des cercles francophones d'Histoire et
d'Archéologie de Belgique et LIIIe Congrès de la Fédération des
cercles d'Archéologie et d'Histoire de Belgique. Congrès de Mons.
25, 26 et 27 août 2000. Actes. II, Mons, p. 131-141.
■■ Dury C. & Nazet J., 1983. Tournai. In : Les enceintes
urbaines en Hainaut, Bruxelles, Crédit communal de Belgique,
p. 223-254.
■■ Grand Atlas, 2009. Le grand atlas de Ferraris. Le premier atlas
de la Belgique. 1777. Carte de Cabinet des Pays-Bas autrichiens et
de la Principauté de Liège, Bruxelles.
■■ Jacques M.-A. & Stocman R., 2013. Deux chapelles jumelles
de haute antiquité à la rue Saint-Martin : Saint-Éloi et Saint-
Pierre, Bulletin Pasquier Grenier, 114, p. 3-8.
■■ Pl. Reine Astrid, 1978. Pl. Reine Astrid. In : Province de
Hainaut. Arrondissement de Tournai (T-W). Arrondissement de
Mouscron, tome 2 (A-T), Liège (Le Patrimoine monumental de
la Belgique, 62), p. 735-736.
■■ Soil de Moriamé E.-J., 1895. Tournai archéologique en 1895,
Tournai, Casterman.
■■ Thomas F. & Nazet J. (dir.), 1995. Tournai. Une ville, un fleuve
(xvie-xviie siècle), Bruxelles, Crédit communal de Belgique.
■■ Vercauteren F., 1965. Plans en relief de villes belges levés
par des ingénieurs militaires français, xviie-xixe siècle. Tournai,
Bruxelles, Pro Civitate (Collection Histoire, série in- 4o, 1).
Sources
■■ Atlas cadastral de Belgique publié par P.-C. Popp (1842-1879),
développement de la ville de Tournay (intra muros).
Liège
Herstal/Milmort : cave gallo-romaine (photo S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie,
Dir. ext. Liège 1).
139
Juprelle Hermalle-sous-Argenteau
Oupeye
Milmort
Herstal Welkenraedt
Rocourt
Jupille- Soumagne
sur-Meuse
Ayeneux
Mons-lez-Liège
Olne Verviers
Soiron
Pepinster
Villers-le-Bouillet
Amay Esneux
Theux
Huy
Vierset-Barse
Anthisnes
Terwagne
Malmedy
Clavier La Gleize
Ferrières Stavelot
Vieuxville Stoumont
Carte administrative des communes de la province de Liège visées par les notices.
Commune dont la localité du même nom est concernée
Commune dont la localité du même nom n'est pas concernée
Autre localité concernée
Éditorial
Ce qui interpelle cette fois n'est pas le lot de découvertes, certes parfois très significatives et qui donnent de l'attrait à
cette cuvée, mais la consistance en croissance continue de l'apport du monde associatif qui porte un regard attentif
sur le destin de notre patrimoine archéologique. Ces attentions de veilleur sont d'autant plus pertinentes qu'elles
émanent de fins et expérimentés connaisseurs d'un terroir et d'autant plus efficaces qu'elles s'initient dans l'immé-
diateté, grâce à la proximité physique des protagonistes. De la plus petite à la plus grande, ce genre de démarche est
à louer ; chacune des informations enrichit nos inventaires cartographiés et plus généralement le corpus de notre
histoire régionale.
D'un point de vue méthodologique, nous retiendrons aussi le travail de réexamen de la coupe de Rocourt, site
éponyme du sol préhistorique bien connu. Outre que cette analyse vise à donner un souffle nouveau dans notre
connaissance de ces enregistrements sédimentaires et dans celle de la chronologie de l'occupation préhistorique, le
travail contribue également à documenter toute une partie du plateau liégeois, localisée au sud du site classé, dans
la perspective de pouvoir anticiper les travaux d'infrastructure envisagés dans ce secteur. Ce n'est plus seulement un
seul profil qui retiendra notre attention mais le secteur dans lequel nos spécialistes auront diagnostiqué et localisé les
horizons porteurs de connaissance.
Les débats avec nos collègues géologues et pédologues se poursuivront également à propos des énigmatiques
« puits » de Herstal/Milmort. Les archéologues pensent y voir le résultat d'actions anthropiques, du creusement
au comblement ; les spécialistes des sciences de la terre y discernent plutôt le résultat d'évènements de dissolution
du substrat crayeux. Le débat est d'autant plus animé que ces puits côtoient intimement l'habitat gallo-romain ; se
clora-t-il au terme de l'examen des carottes de sédiments prélevées dans leur comblement, la recherche dans ces
profondeurs « abyssales » (aux environs de 15 m de profondeur) s'étant révélée impossible à mener. Pour autant qu'il
s'agisse de structures anthropiques, l'enjeu consiste à savoir à quelle époque a débuté ou s'est prolongée l'exploitation
des ressources souterraines hesbignonnes.
Jean-Marc Léotard
140
Herstal/Milmort : tête de puits jouxtant la cave gallo-romaine (photo S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
141
Préhistoire Liège
PRÉHISTOIRE
Ferrières/Vieuxville : datation
radiocarbone d'une calvaria humaine au
Trou du Renard/Grotte Geneviève
Entrée du Trou du Renard/Grotte Geneviève (photo J. Éloy, Plan du Trou du Renard/Grotte Geneviève (modifié, d'après
AWEM). Dubois, 1981).
142
évoquerait le nom d'une femme pauvre, mise au ban de la glabelle ni des arcades sourcilières. La face et la
de la communauté villageoise, qui aurait trouvé refuge mandibule manquent ; aucune dent n'a été récoltée.
dans la grotte. Cette histoire en rappelle une autre, Le fossile est large, avec 15,2 cm de dimension maxi-
celle de Gertrude Frankignoul, une mendiante aussi male (Martin 8). Sa longueur (Martin 1) ne peut être
appelée Mère Gaieté, qui aurait habité une cabane mesurée avec précision mais est estimée à quelque 18 cm.
édifiée à l'entrée de la cavité en 1807 (Fanon, 1965). Le La hauteur de la calotte (basion-bregma, Martin 17) est
docteur Bovy (1839) parle également de cette masure de 13,2 cm. Le profil médian du sommet du crâne, tant
adossée à une grotte sur le toit de laquelle broutait une dans la partie arrière du frontal que sur l'essentiel de la
chèvre, tandis que Jérôme Pimpurniaux (1856-1858) suture sagittale, est en légère pente. La mastoïde droite,
indique la présence d'une pauvre famille habitant la la seule conservée, atteint le plan des deux condyles
cabane construite à l'entrée d'une grotte. On pouvait occipitaux ; elle est assez robuste. La capacité crânienne
encore observer, il y une vingtaine d'années, les calculée à partir de la première formule du tableau 1 de
fondations maintenant en grande partie disparues de Olivier et al. (1978) est de 1 550 cm3.
ce qui semblait être un mur fermant le porche d'entrée. Le sujet était un adulte, ni très jeune, ni sénile. Sur
On notera qu'une dernière appellation, tout aussi base du degré de fermeture des cinq sites du système
anecdotique, a parfois été utilisée : « Trou des Nutons » antéro-latéral de Meindl et Lovejoy (1985 ; niveaux de
(Cosyn, s.d.) – un de plus – qui désigne plutôt un trou fermeture 2 à 3 sur le crâne de Logne), le sujet corres-
fréquenté par des Nutons (Fanon, 1965). pond à un âge moyen de 52 ans avec une variation de
L'échantillon daté, un petit fragment de frontal, a 33 à 76 ans. Par rapport aux sept sites du système de la
été soumis au laboratoire en 2015. Le résultat est de voûte, l'âge moyen serait de 49 ans, avec un intervalle
4080 ± 31 BP, soit entre 2860 et 2490 BP en date cali- de variation de 30 à 71 ans.
brée à deux sigmas (RICH-22897, FE/VXV/GEN 01). Le sexe du défunt est plus délicat à estimer dans la
Une telle datation situe le crâne au Néolithique final. mesure où seul l'os coxal, ici absent, peut fournir une
Le fossile a été découvert tout au fond de la cavité, au diagnose réellement fiable. Sur le crâne, la largeur
début des années 2010, par des jeunes qui tentaient de bizygomatique (Martin 45) manque mais dépassait
désobstruer le conduit. Il a été remis en 2014 au musée clairement 142 mm ; en utilisant notamment cette
du château fort de Logne par un résident néerlando- valeur minimale, diverses équations discriminantes
phone de Vieuxville, M. Wolter Ten Bokkel Huinink, permettent d'émettre l'hypothèse d'un sujet masculin
qui l'avait lui-même reçu. Aucun contexte stratigra- (Defrise-Gussenhoven, 1966 ; Henke, 1973 ; Leguebe
phique n'a été noté lors de la trouvaille. & Albert, 1981, fonction totale à trois variables).
La calvaria, qui a reçu des coups récents engendrant Entre son utilisation à la fin du Néolithique attestée
des manques, comprend encore l'os occipital complet, par le crâne daté au radiocarbone et les occupations
donc la base du crâne avec le trou occipital et les condyles modernes représentées par les personnes qui ont résidé
occipitaux, le temporal droit complet, le pariétal droit à l'entrée du site, la grotte a connu d'autres phases d'oc-
complet, l'essentiel du pariétal gauche, la grande aile cupation. Ainsi quelques tessons de poterie récoltés
du sphénoïde droit, l'écaille du frontal mais pas la zone sous le porche d'entrée semblent indiquer une occu-
pation du lieu entre le Bas Moyen Âge et
le 17e siècle (détermination par Sophie
Challe, Direction de l'archéologie).
Le Trou du Renard/Grotte Geneviève
est loin d'être le seul site du bassin de
l'Ourthe à avoir livré des sépultures et
des ossements humains isolés du Néoli-
thique. En effet, rien qu'entre Hotton,
où elle quitte l'Ardenne pour entrer en
Calestienne, et le confluent de l'Amblève
à Comblain-au-Pont, la vallée a livré
plusieurs dizaines de sépultures en milieu
karstique, le plus souvent plurielles, ainsi
que deux allées couvertes. D'autres sépul-
tures ont en outre été trouvées plus en
aval, entre Comblain-au-Pont et Liège.
En matière d'attribution culturelle, le
Calibration de la datation du crâne du Trou du Renard/Grotte Geneviève.
Trou de la Heid relève de la fin du Néoli-
143
Préhistoire Liège
Le crâne du Trou du Renard/Grotte Geneviève : a. Vue latérale droite ; b. Vue antérieure (photos J. Éloy, AWEM).
thique moyen de type Michelsberg, avec des pointes ■■ Bovy J.P.P., 1839. Huitième promenade. Bords de l'Amblève
en silex et de la céramique caractéristique (Toussaint et de l'Ourthe. In : Promenades historiques dans le Pays de Liège,
& Becker, 1994). Les ossements humains de la grotte II, Liège, p. 123-124.
de la Brouette à My ont fourni deux datations assez ■■ Cosyn M., s.d. La vallée de l'Ourthe, Bruxelles, Guides Cosyn.
similaires mais sans matériel archéologique corres- ■■ De Broyer C., Thys G., Fairon J., Michel G. & Vrolix M.,
pondant (Moreau, Groenen & Otte, 2013). Les autres 1996. Atlas du karst wallon. Province de Liège. Inventaire carto-
sépultures datées au radiocarbone correspondent au graphique et descriptif des sites karstiques et des rivières souter-
Néolithique récent/final. Dans la vallée de la Lembrée raines de Wallonie, 3 vol., s.l., Commission wallonne d'Étude et
où s'ouvre le Trou du Renard/Grotte Geneviève, c'est de Protection des sites souterrains.
ainsi le cas du Trou de la PJ, à Ferrières (Toussaint, ■■ Defrise-Gussenhoven E., 1966. A Masculinity-Feminity
Masy & Léotard,1994). C'est aussi celui de la grotte de Scale Based on a Discriminant Function, Acta Genetica et Statis-
tica Medica, 16, p. 198-208.
La Préalle II, à Heyd (Toussaint, 2002), comme d'ail-
leurs des deux allées couvertes sépulcrales de Wéris ■■ Dubois J., 1981. Cavités karstiques de la province de Liège :
inventaire des phénomènes karstiques pénétrables tels que :
(Toussaint, Frébutte & Hubert, 2009).
abîme, abri, caverne, chantoir, faille, grotte, puits et trou, 2 vol.,
Les vicissitudes de la calvaria du Trou du Renard/
Liège (Mémoires de la Société wallonne de Palethnologie, 2).
Grotte Geneviève soulignent une fois encore l'impor-
■■ Fanon M., 1965. Contes et légendes de chez nous, Vieuxville-
tance des menaces que court le patrimoine archéolo-
Sy-Logne, Syndicat d'initiative, 14 p.
gique du karst wallon, soumis à de multiples pressions,
■■ Henke W., 1973. Zur Methode der diskriminanzanalytischen
dues notamment à des désobstructions spéléologiques,
Geschlechtspazität und Hirnschädelwölbung im Genus Homo,
à des activités de carrières et à des collectionneurs sans
Homo, 15, p. 218-224.
guère d'éthique patrimoniale. De tels risques sont
■■ Leguebe A. & Albert A., 1981. Détermination du sexe
souvent sous-estimés, car se déroulant dans des zones
des crânes au moyen de l'analyse discriminante logistique,
peu accessibles et guère fréquentées. Pourtant, si on Zeitschrift für Morphologie und Anthropologie, 72, p. 172-179.
n'y prend pas assez garde, c'est tout un pan du passé
■■ Meindl R.S. & Lovejoy C.O., 1985. Ectocranial Suture
régional qui risque de s'effacer dans le silence des bois
Closure: A Revised Method for the Determination of Skeletal
et des falaises. Age at Death Based on the Lateral-Anterior Sutures, American
Signalons, pour terminer, que la calvaria du Trou Journal of Physical Anthropology, 68, p. 57-66.
du Renard/Grotte Geneviève est conservée dans les ■■ Moreau L., Groenen M. & Otte M., 2013. Ferrières/
collections du musée du château fort de Logne. My : campagne de fouille 2011 dans la grotte de la Brouette,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 20, p. 137-140.
Bibliographie ■■ Olivier G., Aaron C., Fully G. & Tissier G., 1978. New
■■ Anciaux F., 1950. Explorons nos cavernes, Dinant, éditions du Estimation of Stature and Cranial Capacity in Modern Man,
Guide de la Nature, 315 p. Journal of Human Evolution, 7, p. 513-518.
144
■■ Pimpurniaux J., 1856-1858 [1981]. Guide du voyageur en constitue toujours, à l'heure actuelle, le marqueur du
Ardenne ou Excursions d'un touriste belge en Belgique, Bruxelles dernier interglaciaire (Eemien) et du Début glaciaire
(réimpression anastatique). weischsélien en contexte lœssique (Haesaerts et
■■ Toussaint M., 2002. Durbuy/Heyd : positionnement al., 2016). Immédiatement au-dessus du « Sol de
chronologique de l'ossuaire de La Préalle II par AMS, Chronique Rocourt », Gullentops (1954) décrit la présence d'un
de l'Archéologie wallonne, 10, p. 176-179. épais limon humifère, connu aujourd'hui comme
■■ Toussaint M. & Becker A., 1994. Une sépulture du « Complexe humifère de Remicourt » (Haesaerts,
Michelsberg : le trou de la Heid à Comblain-au-Pont (province Mestdagh & Bosquet, 1997). Dans ce limon humifère,
de Liège, Belgique), Bulletin de la Société préhistorique française, il mentionne en outre la présence d'un téphra à ensta-
91 (1), p. 77-84.
tite (Gullentops, 1954), rebaptisé par la suite « Téphra
■■ Toussaint M., Frébutte C. & Hubert F. (dir.), 2009. de Rocourt » (Juvigné, 1977 ; Pouclet, Juvigné &
Le « champ mégalithique de Wéris ». Fouilles de 1979 à 2001.
Pirson, 2008). La sablière Gritten constitue donc le site
Volume 2. Rapports de fouilles, Namur (Études et Documents,
éponyme du Pédocomplexe de Rocourt et du Téphra
Archéologie, 15), 320 p.
de Rocourt.
■■ Toussaint M., Masy P. & Léotard J.-M., 1994. La sépulture
La présence de matériel archéologique dans la sablière,
collective du trou de la PJ à Ferrières (prov. de Liège) : note
préliminaire, Notae Praehistoricae, 14, p. 195-199.
notamment un éclat Levallois, est mentionnée pour la
première fois en 1911 lors d'une visite du site par Victor
Commont, le célèbre naturaliste de la région d'Amiens
(Lohest & Fraipont, 1911-1912). Après Commont,
quelques découvertes ponctuelles furent également
Liège/Rocourt : étude stratigraphique réalisées (Haesaerts, Di Modica & Pirson, 2011), mais
de la coupe de lœss du site classé de la c'est en février 1977 qu'une concentration d'artefacts
sablière Gritten lithiques fut identifiée et fouillée par l'Institut royal
des Sciences naturelles de Belgique (Haesaerts, 1978 ;
Otte, Boëda & Haesaerts, 1990 ; Haesaerts, Di Modica
Stéphane Pirson, Paul Spagna, & Pirson, 2011). Plusieurs centaines d'artefacts répar-
Dominique Bosquet, Simon Delvoie, tis sur une trentaine de mètres carrés furent ainsi mis
Kévin Di Modica, Paul Haesaerts, au jour au sommet du Pédocomplexe de Rocourt, dans
Étienne Juvigné et Pierre van der Sloot un équivalent de l'« Horizon blanchi de Momalle »
défini à Remicourt à la fin des années 1990 (Haesaerts,
Introduction Mestdagh & Bosquet, 1997 ; 1999). Cet horizon est
rattaché à un épisode froid de la fin du Début glaciaire
La sablière Gritten, située sur l'interfluve Meuse- weichsélien ; le matériel pourrait donc se positionner
Geer à Rocourt, a été en activité jusqu'en 1986. Elle dans le SIM 5b, vers 87 000 ans, ou dans le SIM 5a, vers
exploitait les sables oligocènes accessibles sous une 80 000 ans (Haesaerts, Di Modica & Pirson, 2011 ; Pirson
couverture lœssique d'épaisseur variable (parc. cad. : & Di Modica, 2011). L'intérêt principal de ce matériel
Liège, 29e Div., Rocourt, Sect. A, nos 154A, 192H, 192S, lithique est qu'il a été un des premiers à permettre la
192T, 198B et 225L). L'importance scientifique du site, reconnaissance d'une industrie laminaire en contexte du
de renommée internationale, réside à la fois dans Paléolithique moyen (Haesaerts, 1978 ; Otte, Boëda &
son intérêt pour la géologie du Quaternaire et pour Haesaerts, 1990 ; Haesaerts, Di Modica & Pirson, 2011).
l'archéologie préhistorique. Ces différents aspects
ont récemment fait l'objet d'une synthèse (Haesaerts,
Di Modica & Pirson, 2011). Ils sont résumés ci-après.
L'intérêt géologique du site date des travaux que
F. Gullentops y effectua dans le cadre de sa thèse. Cet
auteur y reconnut trois générations de lœss, respec-
tivement attribuées au Hennuyen, au Hesbayen et au
Brabantien, séparées par deux paléosols : le « Sol de
Rocourt » et le « Sol de Kesselt » (Gullentops, 1954).
Le concept du « Sol de Kesselt » a depuis été aban-
donné (Haesaerts et al., 1981 ; Haesaerts, Di Modica
& Pirson, 2011 ; Juvigné et al., 1996). Par contre, le
« Sol de Rocourt », rebaptisé depuis « Pédocomplexe
Rocourt, sablière Gritten : vue générale du secteur étudié.
de Rocourt » (Pirson, 2007 ; Haesaerts et al., 2016),
145
Préhistoire Liège
Rocourt, sablière Gritten : log stratigraphique relevée en 2015. Unités lithostratigraphiques (Haesaerts, Pirson & Meijs, 2011) : les
Membres de Brabant, de Hesbaye, de Vellereille et de Warneton (Warn.) appartiennent à la Formation de Gembloux ; le Membre
du Hainaut appartient à la Formation de Veldwezelt. Principaux horizons repères (Haesaerts et al., 2016) : HLN : Horizon à langues
de Nagelbeek ; TE : Téphra d'Eltville ; TR : Téphra de Rocourt ; GT : gley de toundra ; Ki-A : Sol de Kincamp A ; CHR : Complexe
humifère de Remicourt ; HBM : Horizon blanchi de Momalle ; VSG-B : Sol de Villers-Saint-Ghislain B ; Harm. : Sol d'Harmignies.
Symboles graphiques : 1. Horizon humifère ; 2. Krotovine ; 3. Horizon Bt d'un sol lessivé ; 4. Horizon légèrement plus foncé ;
5. Lœss ; 6. Sable ; 7. Limon blanc (Horizon blanchi de Momalle) ; 8. Galets ; 9. Taches d'hydroxydes de fer ; 10. Glosse (langue de
déferrification) ; 11. Coin de glace.
146
Dès la fin de l'exploitation de la sablière en 1986, – comparaison de la stratigraphie observée avec les
son remblaiement fut entamé (communication orale données connues. En particulier, confrontation avec la
C. Gritten). Le 13 février 2001, une portion de la position du matériel archéologique, connue d'après les
coupe de Rocourt fut classée comme site par arrêté travaux de P. Haesaerts (IRSNB).
ministériel, ce qui eut pour effet d'interrompre le La seconde intervention consiste à évaluer le
remblaiement. L'intervention, objet de cette notice, potentiel archéologique du site (extension du gise-
répond à la volonté du propriétaire de terminer le ment archéologique). Pour ce faire, des sondages
remblayage de la carrière pour une remise en culture à la tarière manuelle sont envisagés sur le plateau
de la parcelle concernée (parc. cad. : Liège, 29e Div., afin de déterminer le pendage du Complexe humi-
Rocourt, Sect. A, no 198B). Dans les années précé- fère de Remicourt (CHR), horizon caractéristique
dentes, le maintien d'un accès à la coupe se justifiait immédiatement sus-jacent au matériel archéo-
dans la mesure où celle-ci servait de stratotype pour logique fouillé dans les années 1970 et servant de
le Pédocomplexe de Rocourt. Toutefois, depuis 2007, repère aisément identifiable en sondage. Les essais
une nouvelle coupe de référence a été identifiée dans de pénétration statique contribueront également à
la carrière CBR de Romont, à Eben-Emael. Elle est la localisation du Pédocomplexe de Rocourt et du
beaucoup plus complète que celle de Rocourt, notam- Complexe humifère de Remicourt. Des travaux
ment pour la partie englobant le pédocomplexe. Cette récents (Delvoie et al., 2016a ; 2016b) ont en effet
nouvelle coupe a été proposée comme nouveau strato- montré le potentiel de cette méthode pour localiser
type du Téphra de Rocourt (Juvigné et al., 2008) mais ces deux marqueurs stratigraphiques qui présentent
également comme stratotype pour la séquence des un grand intérêt pour l'archéologie préhistorique
lœss de Moyenne Belgique (Haesaerts, Pirson & Meijs, étant donné qu'ils concentrent la plupart des sites
2011). Dès lors, le remblayage était envisageable, dans du Paléolithique moyen en contexte lœssique en
la mesure où il permettra une meilleure protection du Belgique et en France (Locht & Depaepe, 2011 ;
site archéologique. Locht et al., 2015 ; Pirson & Di Modica, 2011 ; Di
Modica et al., 2016). De plus, cette méthode pour-
Objectifs de l'intervention rait contribuer à affiner le zonage archéologique de
la Wallonie (Landenne, 2011) pour cette période en
Deux interventions complémentaires sont prévues contexte lœssique.
avant le remblayage de l'ancienne carrière.
La première concerne l'enregistrement détaillé de Premiers résultats et perspectives
la stratigraphie de ce site majeur pour la géologie du
Quaternaire et la préhistoire du nord-ouest européen. En 2015, seule l'intervention concernant l'enregistre-
Dans le détail, il s'agit d'entreprendre les opérations ment stratigraphique a été entamée. Le choix du secteur
suivantes : à étudier s'est fait le 31 août 2015 en concertation avec
– nettoyage minutieux d'une portion représentative P. Haesaerts (IRSNB) et É. Juvigné (ULg), sur base de
de la séquence stratigraphique ; leurs travaux antérieurs dans la carrière ; la proximité
– relevé détaillé de la stratigraphie afin d'identifier avec la zone fouillée dans les années 1970 a notamment
la succession des processus dépositionnels et post- été privilégiée. Par la suite, quatre journées de terrain
dépositionnels et de reconstituer la géométrie des dépôts ; ont été consacrées au nettoyage détaillé des coupes.
– relevé photographique complet et en haute résolu- La séquence stratigraphique étudiée comprend
tion de la coupe ; environ 8 m de dépôts du Quaternaire, reposant
– relevé photogrammétrique afin de valoriser la coupe sur un peu moins de 4 m de sables oligocènes, ces
d'un point de vue à la fois scientifique et pédagogique ; derniers ayant été atteints principalement à la tarière.
– relevé topographique précis de la zone étudiée ; Les principales unités stratigraphiques observées
– prélèvements divers (notamment granulométrie, sont présentées sur le log qui, pour l'essentiel, est
minéraux denses des lœss, recherche des téphras, comparable aux enregistrements stratigraphiques
micromorphologie et susceptibilité magnétique) ; précédents, en particulier aux relevés détaillés de
– mesures géotechniques de résistance à la péné- P. Haesaerts (Haesaerts, 1978 ; Haesaerts, Di Modica
tration, à la fois directement sur la coupe à l'aide d'un & Pirson, 2011 ; Haesaerts et al., 2016). Parmi les
pénétromètre de poche (collaboration avec S. Delvoie différences, signalons une plus grande complexité
et le Laboratoire de Géotechnologie de l'ULg) et sur identifiée au sein du Pédocomplexe de Rocourt,
le plateau situé en arrière de la coupe par des essais offrant une belle opportunité de tenter un position-
de pénétration statique (Cone Penetration Test, CPT ; nement chronostratigraphique plus précis du maté-
Delvoie et al., 2016a ; 2016b) ; riel archéologique.
147
Préhistoire Liège
À ce stade, deux fragments de silex ont été mis au ■■ Gullentops F., 1954. Contributions à la chronologie du
jour lors du nettoyage des coupes, mais aucun ne peut Pléistocène et des formes du relief en Belgique, Mémoires de
être considéré comme artefact indiscutable. Ceci n'est l'Institut géologique de l'Université de Louvain, 18, p. 125-252.
pas étonnant compte tenu de la faible densité de maté- ■■ Haesaerts P., 1978. Contexte stratigraphique de quelques
riel qui caractérise la plupart des gisements de plein air gisements paléolithiques de plein air de Moyenne Belgique,
du Paléolithique moyen. Bulletin de la Société royale belge d'Anthropologie et de Préhis-
toire, 89, p. 115-133.
La poursuite des travaux en 2016 permettra de
compléter les relevés stratigraphiques, de réaliser les ■■ Haesaerts P., Di Modica K. & Pirson S., 2011. Le gise-
relevés photographique et photogrammétrique détail- ment paléolithique de la Sablière Gritten à Rocourt (province
de Liège). In : Toussaint M., Di Modica K. & Pirson S.
lés, ainsi que d'entreprendre les divers prélèvements
(éd.), Le Paléolithique moyen en Belgique. Mélanges Margue-
envisagés. Les mesures au pénétromètre de poche rite Ulrix-Closset, Liège (Bulletin de la Société royale belge
seront également effectuées sur les coupes. d'Études géologiques et archéologiques Les Chercheurs de la
Dans la foulée, les sondages à la tarière manuelle Wallonie, hors-série 4 ; Études et Recherches archéologiques de
seront réalisés sur le plateau, afin de cartographier le l'Université de Liège, 128), p. 359-374.
Complexe humifère de Remicourt et le Pédocomplexe ■■ Haesaerts P., Juvigné É., Kuyl O., Mucher H. &
de Rocourt, et ainsi l'extension potentielle du gisement Roebroeks W., 1981. Compte rendu de l'excursion du 13 juin
archéologique. Parallèlement à ces sondages, les essais 1981, en Hesbaye et au Limbourg néerlandais, consacrée à la
de pénétration statique seront mis en œuvre. Ces essais chronostratigraphie des lœss du Pléistocène supérieur, Annales
géotechniques permettront notamment de confirmer de la Société géologique de Belgique, 104, p. 223-240.
le potentiel de cette méthode, démontré récemment à ■■ Haesaerts P., Mestdagh H. & Bosquet D., 1997. La
Romont (Delvoie et al., 2016b) et Remicourt (Delvoie et séquence lœssique de Remicourt (Hesbaye, Belgique), Notae
al., 2016a), pour identifier le Pédocomplexe de Rocourt Praehistoricae, 17, p. 45-52.
ailleurs dans le domaine lœssique de la Moyenne ■■ Haesaerts P., Mestdagh H. & Bosquet D., 1999. The
Belgique. sequence of Remicourt (Hesbaye, Belgium): new insights on the
pedo- and chronostratigraphy of the Rocourt Soil, Geologica
Remerciements Belgica, 2, p. 5-27.
■■ Haesaerts P., Spagna P., Damblon F., Gerasimenko N.
Les auteurs souhaitent remercier le Consortium & Pirson S., 2016. The Upper Pleistocene loess-palaeosol
sequence of Middle Belgium, Quaternary International (http://
Gritten, propriétaires de la carrière, et en particulier le
dx.doi.org/10.1016/j.quaint.2016.02.012).
Dr Christian Gritten, ainsi que Monsieur Joseph Pâque,
■■ Juvigné É., 1977. Zone de dispersion et âge des poussières
pour l'accès au site et le soutien logistique. Merci
volcaniques du tuf de Rocourt, Annales de la Société géologique
également à Vincent Ancion (Service de l'archéologie de
de Belgique, 100, p. 13-22.
la Direction extérieure de Liège 1, DGO4, Département
■■ Juvigné É., Haesaerts P., Mestdagh H., Pissart A. &
du patrimoine) pour les relevés topographiques, ainsi
Balescu S., 1996. Révision du stratotype lœssique de Kesselt
qu'à Dimitri Preud'homme (Direction de la protection
(Limbourg, Belgique), Comptes rendus de l'Académie des
du patrimoine, DGO4, Département du patrimoine) Sciences de Paris, 323, p. 801-807.
pour la gestion administrative du dossier.
■■ Juvigné É., Tallier E., Haesaerts P. & Pirson S., 2008.
Un nouveau stratotype du Téphra de Rocourt dans la carrière
Bibliographie de Romont (Eben/Bassenge, Belgique), Quaternaire, 19,
■■ Delvoie S., Boulvain F., Charlier R. & Collin F., 2016a. p. 133-139.
Detailed characterization of the Late Pleistocene loess sequence ■■ Landenne A.-S., 2011. L'inventaire des sites archéologiques et
stratigraphy of Remicourt (Hesbaye Region, Belgium) with le zonage archéologique en Wallonie. Connaître, protéger, gérer,
cone penetration tests, Geologica Belgica. Namur, Département du Patrimoine, 12 p. (http://dgo4.spw.
■■ Delvoie S., Pirson S., Charlier R. & Collin F., 2016b. wallonie.be/DGATLP/DGATLP/Pages/Patrimoine/Dwnld/
Étude de la séquence stratigraphique des lœss de la carrière de Inventaire_sites_archeologiques.pdf).
Romont (Eben-Emael, Belgique) par une campagne géotech- ■■ Locht J.-L. & Depaepe P., 2011. Regards sur le Paléolithique
nique, Notae Praehistoricae, 36, p. 5-21. moyen de France septentrionale et de Belgique. In :
■■ Di Modica K., Toussaint M., Abrams G. & Pirson S., Toussaint M., Di Modica K. & Pirson S. (éd.), Le Paléolithique
2016. The Middle Palaeolithic from Belgium: Chronostra- moyen en Belgique. Mélanges Marguerite Ulrix-Closset, Liège
tigraphy, territorial management and culture on a mosaic of (Bulletin de la Société royale belge d'Études géologiques et
contrasting environments, Quaternary International (http:// archéologiques Les Chercheurs de la Wallonie, hors-série 4 ;
dx.doi.org/10.1016/j.quaint.2015.12.072). Études et Recherches archéologiques de l'Université de Liège,
128), p. 229-237.
148
■■ Locht J.-L., Hérisson D., Goval É., Cliquet D., Huet B., connue en Belgique qui contient des dépôts datant de
Coutard S., Antoine P. & Feray P., 2015 (sous presse). cette période ; il peut donc potentiellement fournir
Timescales, space and culture during the Middle Palaeolithic in des données importantes concernant la présence et
northwestern France, Quaternary International (http://dx.doi. la disparition des Néandertaliens dans cette région,
org/10.1016/j.quaint.2015.07.053).
l'arrivée des premiers hommes modernes et leurs
■■ Lohest M. & Fraipont C., 1911-1912. Découverte de silex réponses respectives aux oscillations climatiques. Sur
taillés dans le limon Hesbayen de Liège et de l'importance de
la terrasse, cette période transitionnelle concerne la
cette découverte au point de vue de l'origine des limons et des
séquence allant de l'unité 17 (Moustérien récent) à
classifications qu'on y a établies, Annales de la Société géologique
de Belgique, 39, B125-B130.
l'unité 15 (Aurignacien).
Les analyses de la faune issue des unités 17 à 15 sont
■■ Otte M., Boëda É. & Haesaerts P., 1990. Rocourt : indus-
en cours. D'autre analyses caractérisent les couches
trie laminaire archaïque, Helinium, XXIX/1, p. 3-13.
d'un point de vue géologique, les processus déposi-
■■ Pirson S. & Di Modica K., 2011. Position chronostrati-
tionnels et les contextes de sédimentation des unités
graphique des productions lithiques du Paléolithique ancien
en Belgique : un état de la question. In : Toussaint M.,
dans lesquelles se trouvent les ensembles archéolo-
Di Modica K. & Pirson S. (éd.), Le Paléolithique moyen giques. La séquence est en cours de datation par AMS
en Belgique. Mélanges Marguerite Ulrix-Closset, Liège et par luminescence. Les analyses lithiques abordent
(Bulletin de la Société royale belge d'Études géologiques et l'exploitation des matières premières, la structure des
archéologiques Les Chercheurs de la Wallonie, hors-série 4 ; ensembles, leur technologie, y compris la production
Études et Recherches archéologiques de l'Université de Liège, des outils.
128), p. 105-148. Nous présentons ici les résultats préliminaires de
■■ Pouclet A., Juvigné É. & Pirson S., 2008. The Rocourt l'analyse des ensembles lithiques moustériens des
Tephra, a widespread 90-74 ka stratigraphic marker in Belgium, couches 17a et 17b, fouillées en 2015. Nous abor-
Quaternary Research, 70, p. 105-120. dons également brièvement d'autres analyses en
cours.
Sources
■■ Haesaerts P., Pirson S. & Meijs E., 2011. New proposal for Séquence géologique des unités 17 à 15
the Quaternary lithostratigraphic units (Belgium). Aeolian sedi-
ments, Liège, National Commission for Stratigraphy, Subcom- Nous pouvons décrire brièvement les trois unités, de
mission Quaternary (http://www2.ulg.ac.be/geolsed/GB/SCQ. bas en haut :
htm). – unité 17 : comme noté par Pirson (1999 ; Pirson &
■■ Pirson S., 2007. Contribution à l'étude des dépôts d'entrée de Collin, 2005), l'unité 17 comprend plusieurs couches
grotte en Belgique au Pléistocène supérieur. Stratigraphie, sédi- formées sous des conditions sédimentaires variées :
mentologie et paléoenvironnement, Thèse de doctorat inédite, 17c.2 : zone localisée riche en charbons de bois,
Université de Liège (Faculté des Sciences), 2 vol., 435 p. et
interprétée comme un foyer ;
5 annexes.
17c.1 : blocs de dolomite décimétriques présents
dans le profil M5/4 sur le limon brun de l'unité 18 ;
17c : limon brun sans fraction grossière ;
17b : limon sableux gris-brun avec graviers émoussés
Modave/Modave : le Moustérien récent de 2 à 4 cm et des blocs de dolomite de 5 à 10 cm.
du Trou Al'Wesse, l'unité 17 Ensemble moustérien ;
17a : limon sableux brun clair ; fraction grossière
mineure comprenant des fragments de dolomite
Rebecca Miller, Pierre Noiret, John Stewart, subanguleux entre 2 et 10 cm. Ensemble moustérien ;
Keith Wilkinson et Yann Waersegers – unité 16 : fouillée par demi-carrés du M10 à M6,
et dans la colonne M4-L4, cette unité se révèle plus
Introduction complexe que considérée auparavant et contient
plusieurs couches mises en place selon différents
Le Trou Al'Wesse se situe sur la rive gauche du Hoyoux, processus ;
un affluent de la Meuse, près du lieu-dit « Petit- – unité 15 : cette unité contient dix couches, dont
Modave ». L'objectif des fouilles actuelles est d'éluci- 15.8-BE, 15.9 et 15.4/5 qui contiennent du matériel
der le contexte climatique et environnemental ainsi attribuable à l'Aurignacien.
que la chronologie des occupations humaines durant
la transition du Paléolithique moyen au Paléolithique
supérieur. Ce site est, actuellement, la seule grotte
149
Préhistoire Liège
Analyses fauniques
Préhistoire Liège
Pepinster/Soiron : haches polies poli et 2 haches polies : une entière et un gros fragment
« Aux Trois Journaux » réutilisé en nucleus.
La hache entière est façonnée dans un silex gris sable
clair à moyen très homogène et sans traces de rouille.
Francis Polrot Les bords convergent vers le talon, épais et en biais.
Un bord est naturellement arrondi et droit, entière-
Un champ labouré (parc. cad. : Pepinster, 3e Div., ment en cortex légèrement poli. L'autre bord, fin et
Sect. A, no 486a ; coord. Lambert moyennes : arrondi, est partiel en raison d'un manque accidentel
249635 est/142070 nord) que nous avons déjà et d'un enfoncement en cortex. Le tranchant, convexe
parcouru (Polrot, 2014) a reçu notre visite en juin et arrondi, est très abîmé. Dimensions : (80,5) × 53,7 ×
2015. Nous y avons glané une bonne centaine de silex 26,5 mm.
dont une dizaine d'éclats retouchés ou utilisés ainsi Le gros fragment de hache est façonné dans un silex
que 3 grattoirs, 4 éclats polis, 1 fragment mésial d'objet en partie comparable à celui de la hache précédente,
en partie plus gris avec quelques points de rouille.
C'est un fragment longitudinal sans tranchant ni talon.
Le bord converge vers la partie la plus épaisse de la
pièce qui se termine sur un gros accident transversal.
Le bord est plat, étroit et bordé de deux fines bandes
polies qui donnent un arrondi cannelé à l'ensemble
du bord. La pièce est polie soigneusement. Elle a été
utilisée en nucleus avec un bord d'attaque unique dans
le sens de l'épaisseur : débitage de toutes petites pièces.
Dimensions : (69) × (35,5) × (26,7) mm.
Le fragment mésial poli est en silex gris foncé marqué
de petits fossiles et d'une tache de cortex. Il se présente
comme étant un fragment d'une grande et large lame
mais les deux bords, abattus, ont ensuite été bien polis
Soiron : hache polie. au point de faire disparaître une bonne partie de l'abat-
tage. Dimensions : (23) × 36,5 × 9,5 mm.
Bibliographie
■■ Polrot F., 2014. Pepinster/Pepinster et Soiron : récolte de
matériel archéologique aux alentours du lieu-dit « Croix Maga »,
Chronique de l'Archéologie wallonne, 22, p. 156-158.
Préhistoire Liège
Bibliographie
■■ Polrot F. & Pelzer B., 2015. Theux/Theux : ramassages de
silex à « Turon », chemin du Chivrou, Chronique de l'Archéologie
wallonne, 23, p. 172-173.
PROTOHISTOIRE
Oupeye/Hermalle-sous-Argenteau :
conservation de dépôts funéraires
provenant d'un champ d'urnes
ÉPOQUE ROMAINE
Amay/Amay : découverte d'un sabot de
pieu provenant du pont romain
Léon Dardenne, Gianni Gava, Raymond Polis sabot ont été assemblées par forgeage et martelage sur
et Jacques Witvrouw une culasse pyramidale de 10 cm de hauteur pour une
section quadrangulaire de 5 × 7 cm.
Dans le courant du mois de janvier 2015, une tran- La typologie du sabot métallique découvert en 2015
chée de pose d'un câble téléphonique a été ouverte correspond à celle des sabots des autres ponts romains
sur la rive gauche de la Meuse. Au niveau de la culée du nord-ouest de l'Europe et plus spécifiquement à celle
du pont actuel (parc. non cadastrée ; coord. Lambert : de la majorité des sabots (une vingtaine) provenant
218255 est/137508 nord), ces travaux, réalisés à faible des fondations du pont romain d'Amay : certains ont
profondeur (60 cm), ont mis au jour un sabot de pieu. été découverts encore en place dans le lit de la Meuse
Celui-ci se trouvait manifestement en contexte secon- alors que d'autres proviennent des graviers issus des
daire : les rampes d'accès du pont sont en effet consti- dragages successifs du lit du fleuve (Witvrouw, 2005,
tuées pour l'essentiel de graviers puisés dans le lit du p. 131 ; Witvrouw et al., 2005, p. 89-105). C'est à ce
fleuve. dernier groupe qu'appartient l'exemplaire présenté ici.
Il s'agit d'un sabot complet en fer forgé, d'une hauteur Il a été remis au Musée communal d'Amay.
de 46,5 cm et d'un poids de 9,3 kg. Il a subi une défor-
mation importante lors des travaux de dragages (arra- Bibliographie
chement des pieux en bois de chêne par des dragues à ■■ Witvrouw J., 2005. Le pont romain d'Amay. Synthèse. In :
godets, alors que les sabots restaient en place dans les Witvrouw J. & Gava G. (dir.), Le pont romain et le franchis-
graviers alluvionnaires). sement de la Meuse à Amay. Archéologie et histoire, Bulletin du
De forme pyramidale, le sabot est muni de quatre Cercle archéologique Hesbaye-Condroz, XXIX, p. 129-134.
branches pratiquement symétriques (longueur ■■ Witvrouw J., Gava G., Lehance H. & Polis R., 2005. Le pont
moyenne : 48 cm, largeur moyenne : 5,75 cm, épais- romain d'Amay. Le matériel archéologique. In : Witvrouw J. &
seur moyenne : 1,3 cm). Leurs extrémités sont recti- Gava G. (dir.), Le pont romain et le franchissement de la Meuse
lignes, chacune étant percée d'un trou de forme carrée à Amay. Archéologie et histoire, Bulletin du Cercle archéologique
Hesbaye-Condroz, XXIX, p. 89-117.
(1,5 cm de côté). Ces trous servaient à fixer le sabot à
l'extrémité d'un pieu au moyen de quatre clous dont un
seul est resté en place (tête aplatie, longueur conser-
vée : 11 cm, section : 0,9 × 0,9 cm). Les branches du
Herstal/Milmort : fouille d'un établissement
le long de la chaussée Brunehaut
FOUILLE DE 2001
CH
P
F3
F8 F230
F4 FE
FE
F7
A
F27 FE
F32
F43
C
FO2 B FE
FE
F40
FE
FE ?
F187
OR
Chaussée Brunehaut D
FE FO1
FE
OR
FE
F212
FE FE
FO = fossé FE
OR = ornières
P = palissade
0 10 m
= structure de combustion
Hauts-Sarts : plan général des vestiges (infographie F. Giraldo Martin et S. de Bernardy de Sigoyer, Serv. archéologie, Dir. ext. Liège 1).
d'enclos et de drain. Il a été repéré sur une longueur À une distance comprise entre 85 m et 95 m à l'ouest
de 103 m, suivant une orientation nord-est/sud-ouest. figure un second fossé FO2. Sa morphologie, qui
Il présente une largeur variant de 1,8 m à 2,3 m pour correspond à la fonction d'enclos, est confirmée par
une profondeur comprise entre 0,7 m et 1 m. Le fossé des critères liés à l'organisation de l'espace. Il s'inter-
est implanté sur de grandes structures fossoyées attri- rompt pour l'aménagement d'un passage de 3,4 m de
buées à des activités d'extraction (FE). Il accuse un profil large. La section sud du fossé, appréhendée sur une
en cuvette. Le remplissage inférieur du creusement se longueur de 24,5 m, se perd au-delà. La section nord
caractérise par son caractère hydromorphe illustrant la longue de 17,5 m est visible jusqu'à la limite d'emprise
circulation et la stagnation saisonnière des eaux. Des du site. La structure est très arasée principalement
traces de curage et de recreusement attestent de son dans la partie nord, ce qui pourrait expliquer qu'elle
entretien. Deux excroissances excavées de la bordure n'ait pas été repérée dans la parcelle attenante lors de
occidentale du fossé pourraient être assimilées à des la fouille de 2001. Le profil montre un fond plat et irré-
points d'eau saisonniers : leurs profils en pente douce gulier par endroits. L'envergure du fossé oscille entre
façonnent des rampes d'accès. Un comblement progres- 1 m et 30 cm, du sud vers le nord. Un second creuse-
sif par colmatage naturel suit l'abandon du fossé. ment oblong se juxtapose à la portion sud du fossé ; ses
158
dimensions sont de 65 cm de large pour une longueur consiste en une margelle haute de 50 cm. Elle est
de 11 m. Le comblement ces aménagements n'a livré construite en trois assises régulières de moellons posés
aucun élément de datation. à sec, surmontées d'un aménagement de rognons de
Un autre type d'équipement divise la partie nord- silex plus irrégulier. L'ensemble est parachevé par
ouest du site. Il pourrait s'agir d'une palissade (P) qui une assise de réglage formée de carreaux de tuiles
suit un axe divergent de celui du fossé FO2. La clôture fragmentaires. Sous cette maçonnerie le creusement
repérée jusqu'à la limite nord de l'emprise sur une se prolonge sous la forme d'un cylindre régulier. Un
longueur de 30 m est constituée d'un alignement de six dépôt très organique sans doute issu de la décompo-
poteaux massifs profondément ancrés. Cette palissade sition d'un cuvelage en bois ou d'un clayonnage en
trouve son pendant parallèle dans la parcelle fouillée matière végétale est présent le long des parois sur une
en 2001 à une distance de 54 m. faible épaisseur, soit 1 cm. Ce chemisage atteint une
Les vestiges d'une voie de circulation (CH) ont été épaisseur de plus de 10 cm sur le fond de la structure.
dégagés à la lisière nord-ouest du terrain. Elle est Le remplissage inférieur est une épaisse couche incor-
constituée d'une assise de 3,6 m de large mêlant des porant divers déversements de limon lessivé, incluant
éclats et des rognons de silex et est bordée sur un seul des rejets de tuile, de rognons de silex, de galets et de
côté par des moellons de silex. Elle a été suivie sur une morceaux épars de charbon de bois. Elle est recouverte
distance de 24 m au-delà de laquelle le terrain n'était par des dépôts stratifiés alternant avec des sédiments
plus accessible. Cet empierrement est associé à des lessivés et humifères. Le comblement sommital corres-
traces d'ornières linéaires (OR) repérées au sud-est pond au remblaiement de la structure après démoli-
du site. Ces deux éléments paraissent suivre la même tion de la partie maçonnée. L'ouverture de la structure
orientation. à l'aide de la pelle mécanique a permis d'observer la
Outre ces éléments de partition de l'espace, l'occu- coupe dans son entièreté et d'y effectuer des prélève-
pation a révélé la présence de thermes, d'une cave, ments destinés à être analysés par l'Institut royal des
de structures de stockage fossoyées, de bâtiments sur Sciences naturelles de Belgique afin d'établir son usage
poteaux, de structures de combustion aux fonctions avec certitude. Le matériel céramique issu des deux
diverses et de larges fosses. L'interprétation fonction- fosses se rattache à la seconde moitié du 2e siècle.
nelle du site et des activités qui y ont été pratiquées est Une cave maçonnée, F8, est implantée à 10 m de
rendue complexe par cette diversité des installations et distance de ces deux structures. Les dimensions
leur distribution spatiale. internes du cellier sont de 2,7 m sur 2,9 m soit une
superficie 7,8 m². Les maçonneries, préservées en
Les structures de stockage élévation sur 1,75 m, sont composées d'une alternance
d'assises régulières de moellons, probablement du
Deux structures de stockage fossoyées sont installées grès carbonifère, et de lits de briques. Les murs sont
dans la section nord-ouest du site. La première, F3, dépourvus de fondation. Deux niches en ogive ont été
présente un plan quadrangulaire de 1,5 m sur 1,4 m. percées dans le mur sud. Les parties centrale et supé-
Son profil montre des parois irrégulières jusqu'à rieure du mur sud-est sont interrompues par l'aména-
50 cm de profondeur. Sous ce niveau elles évoluent gement d'un soupirail. L'accès externe à la structure est
verticalement jusqu'à une profondeur de 1,14 m. Un établi au nord-est. Le remblai reposant sur le fond de la
liseré de matière organique en décomposition souligne cave est constitué de limon incluant une forte charge de
les parois rectilignes s'évasant très légèrement vers le tuiles et de terre cuite, ainsi que de gros fragments de
bas. Le fond est incurvé sous un niveau qui pourrait charbon de bois et des nodules de mortier à la chaux.
correspondre à un plancher en bois décomposé. Le Les remplissages postérieurs recèlent de nombreux
remplissage inférieur de la fosse est une alternance de matériaux de construction tels que des blocs de grès
dépôts de sédiments lessivés et de dépôts organiques en équarris, des tuiles, des fragments de torchis et d'en-
ordonnance complexe alors que les dépôts sommitaux duit peint. La céramique recueillie dans le remblai de
correspondent à des rejets détritiques. Deux trous de la cave est datée entre la première moitié du 3e siècle et
poteau, distants de 5,5 m, sont situés de part et d'autre le troisième quart du 3e siècle. Les murs et le sol non
de la fosse laissant présumer un système de couverture aménagé du cellier portent les traces d'un incendie qui
à cet agencement. a ravagé l'édifice.
La seconde structure, F4, de forme circulaire, s'en- La cave a pris place sur une structure excavée en
fonce à 4 m de profondeur. Ses dimensions affichent matériaux périssables. Deux calages de poteaux et des
un diamètre externe de 2 m pour un diamètre interne fosses de tailles variables sont partiellement recoupés
de 1,45 m. Ce puits-silo a d'abord été dégagé sur par les murs du cellier. Leurs comblements ont livré des
une moitié de sa circonférence. La partie supérieure fragments de torchis et d'enduit à couverte peinte, des
159
clous, des restes fauniques et de la céramique datée entre ment arasés jusqu'à leurs fondations, celles-ci étant
la seconde moitié du 2e siècle et le premier quart du malheureusement toutes évidées à l'exception de
3e siècle. L'abandon de cette installation serait contem- quelques lambeaux. La construction de plan rectan-
poraine de celle des structures de stockage F3 et F4. gulaire suit une orientation générale nord/sud. Elle
est divisée en trois zones aux fonctions différentes. La
Les thermes partie sud correspond à la zone de service non publique
où l'on peut imaginer l'aménagement d'un praefurnium
Au sud-est du fossé FO2 se trouve un petit édifice (a) ; ce local communique avec la zone chauffée. De la
thermal, F27. Les murs du bâtiment sont complète- zone centrale ne subsiste qu'un vestige de la chambre
de chaleur marqué de neuf empreintes de pilette (c).
La hauteur de cette chambre sur laquelle reposaient les
dalles de la suspensura devait être comprise entre 60 et
80 cm. Cette chambre de chaleur s'étend sous les deux
absides qui étaient chauffées. La zone nord du bâtiment
non chauffé intègre également une abside. Cette partie
du bâtiment est la plus préservée, elle a conservé une
e couche de rognons de silex posés à sec servant de prépa-
ration à une fondation maçonnée. Aucun élément ne
permet de déduire les caractéristiques de l'élévation,
vraisemblablement construite en dur. Les sections
centrale et nord constituent les zones publiques des
thermes où se succédaient en partant du centre le calda-
rium (b), suivi du tepidarium (d) puis du frigidarium (e).
Ce plan linéaire, bien orienté, place les pièces chaudes
d au sud. Des matériaux de construction en terre cuite
c tels que des fragments de tubuli et des plaques à croi-
sillons incisés ont été découverts lors de la fouille des
tranchées de fondation. Les rares éléments du corpus
mobilier placent l'abandon de cet aménagement à la fin
du 3e siècle tout comme la cave F8.
b Les structures sur poteaux
des fragments de tuile. La base du four est aménagée avons opté pour des forages mécaniques. Ils se sont
avec un dépôt d'argile brune incorporant des frag- concentrés dans la partie du site qui n'était pas encore
ments de silex et des scories, surmonté par une couche investie par la construction de l'entrepôt.
de chaux épaisse de 2 cm. Son embouchure, aménagée Ces carottages visaient à établir quelle était la nature
à l'est, se déverse dans sa fosse cendrier installée dans du matériau exploité. Un premier carottage dans le sol
le comblement sommital d'une fosse d'extraction. Le en place a confirmé la présence de la craie à 13 m de
matériel céramique prélevé dans les rejets du cendrier profondeur. Le second, effectué dans le puits d'extraction
place l'utilisation du four dans le courant de la première F32, a atteint le fond de celui-ci à 13,4 m au contact avec
moitié du 2e siècle. la craie. Des fragments de ce matériau avaient d'ailleurs
La structure de combustion F43 est également été observés en position de remblai dans cette même
établie à la lisière d'une fosse d'extraction. Elle se fosse. Le troisième carottage dans le puits F40 fut poussé
caractérise par un canal de chauffe central pénétrant à sa limite technique à une profondeur de 16,8 m sans
dans une chambre de chaleur rectangulaire de 2,9 m atteindre le fond du creusement. Ces éléments semblent
sur 1,4 m. Le canal est long de 2,85 m pour une largeur démontrer une volonté d'accéder à la craie, ce que l'ana-
de 1,2 m au niveau du foyer et de 0,7 m à l'extrémité lyse détaillée des carottes de forage devra confirmer. La
de la chambre de séchage. Celle-ci est située au même céramique découverte dans les comblements supérieurs
niveau que le foyer mesurant 1,1 m sur 0,9 m. Les de certains de ces puits couvre essentiellement la fin du
dimensions hors tout de cet aménagement sont de 2e siècle et le début du 3e siècle.
3,8 m sur 2,9 m. Il suit une orientation sud-est/nord- L'occupation du site s'est prolongée jusqu'au
ouest. Le plan de cette structure est identifié à celui 4e siècle, comme le suggère le mobilier archéologique
d'un séchoir. Son remblai a livré quelques fragments renfermé dans deux structures fossoyées, F230 et F7.
de tuiles qui ont pu servir de matériau de construction. Cette dernière contenait outre de la céramique de
La structure est creusée dans le sol en place. L'amorce nombreux matériaux de construction et des éléments
d'une voûte aménagée à l'emplacement du canal de architectoniques tels des fragments de fûts de colonnes
chauffe est perceptible. Des blocs de limon portant des en pierre blanche.
traces de rubéfaction correspondent à l'effondrement L'évaluation archéologique d'une seconde parcelle
de ses parois. Des prélèvements ont été effectués afin (C) située à l'est du secteur évoqué ci-dessus s'est
de préciser la fonction de cet aménagement que la terminée en août 2015. Elle s'est révélée négative, ce
présence d'installations de stockage sur le site pourrait qui signifie la fin des opérations archéologiques dans
corroborer. cette partie de la zone d'activité économique des
Hauts-Sarts.
Les excavations
Bibliographie
Des dizaines de fosses aux dimensions et profon- ■■ Marchal J.-P., Coquelet C., de Bernardy de Sigoyer S. &
deurs variables ont été mises au jour. Leurs fonctions Goffioul C., 2015. Herstal/Milmort : évaluation archéologique
primaires n'ont généralement pas été reconnues. S'en dans le parc industriel des Hauts-Sarts, parcelle Prologis,
distinguent de grandes structures fossoyées au profil Chronique de l'Archéologie wallonne, 23, p. 184-185.
conique. Certaines de ces excavations semblent reliées ■■ Loicq S. & Marchal J.-P., 2006. Herstal/Milmort : sondages
entre elles par des couloirs d'accès. Deux hypothèses d'évaluation dans le parc industriel, Chronique de l'Archéologie
se confrontent sur la présence de ces puits : soit une wallonne, 13, p. 109-111.
origine naturelle due à la dissolution du substrat
crayeux en place suivi d'un comblement partiellement
anthropique, soit l'exploitation de ressources souter-
raines par l'homme. Cette dernière hypothèse a été Liège/Jupille-sur-Meuse : sondages
privilégiée ; la fonction des fosses a d'abord été rappro- archéologiques dans le parc de l'Institut
chée de l'extraction d'argile suite à la présence de ce Notre-Dame
substrat détectée lors de sondages à la tarière dans la
zone nord-est du site. L'observation des courbes de
niveau et du profil topographique du terrain montrent Catherine Coquelet
des inflexions et des ruptures de pente qui ne parais-
saient pas naturelles. Elles ont été mises en relation L'Institut Notre-Dame, dont les infrastructures
avec l'hypothèse de travaux d'extraction. occupent tout un quartier de Jupille, apparaît comme
Ces excavations ont fait l'objet de fouille jusqu'à 2 m l'un des secteurs clés pour aborder l'histoire tardo-
de profondeur. Ne pouvant en atteindre le fond, nous médiévale de cette commune. Il conserve en ses bâti-
162
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Jupille-sur-Meuse : localisation des sondages archéologiques dans la propriété de l'Institut Notre-Dame, fouille préventive (S1 et S2)
et suivi de chantier (S3) (infographie D. Mattiuz, FCJW. Sources : Creative Architecture et CadGIS).
ments la tour Charlemagne, héritière présumée du ont pu être ouverts jusqu'au sol en place, rencontré
château de Jupille. Ce monument, daté au plus tôt du à une profondeur de 0,80 à 1 m. L'objectif de cette
16e siècle (Capelle, 1980), pourrait en effet succéder première intervention était de vérifier l'état du dépôt
à un ensemble plus ancien, puisque les rues cernant archéologique dans cette zone encore inexplorée du
le quartier de l'Institut mentionnent son existence de cœur historique de la ville. Les vestiges, mis au jour
façon explicite dès le début du 15e siècle (Jacquemotte à 0,50 m de profondeur seulement, se rattachent
& Lejeune, 1907 : rues du Castel, Derrière le Château). uniquement au passé antique de Jupille. Ils illustrent
Pour cette raison, les divers travaux projetés dans cette la densité du bâti romain en périphérie sud de cette
propriété (parc. cad. : Liège, 20e Div., Sect. C, no 688v) agglomération fondée au 1er siècle de notre ère et
ont donné lieu à une intervention archéologique menée abandonnée vraisemblablement dès le 3e siècle.
entre le 1er décembre 2014 et le 30 mars 2015 par le La stratigraphie conduit à subdiviser les structures
Service de l'archéologie de la Direction extérieure de en trois états archéologiques compris dans la fourchette
Liège 1 (DGO4 / Département du patrimoine). Celle-ci chronologique précitée. L'état le plus ancien (état 1)
a débuté par une petite fouille préventive préalablement est caractérisé par la présence d'un sol en galets et en
à la construction d'une extension contre l'aile culturelle moellons de grès bruts et de quelques fosses creusées
de l'Institut (S1 et S2) et s'est prolongée par un suivi de dans le sol en place. L'une d'entre elles, peu profonde
chantier dans le cadre du réaménagement de l'accès et de plan rectangulaire, est bordée de deux petites
extérieur nord-est de l'aile rénovée (S3). accumulations de moellons de grès houiller, peut-être
La zone menacée par l'extension correspond à un les vestiges des supports d'un habitat sur poteaux, dont
espace d'environ 150 m2 s'étendant entre le bâtiment l'espace de vie serait partiellement enterré. Ces vestiges
scolaire et le mur d'enceinte séparant le parc arboré s'ordonnent en fonction de la voirie empierrée de l'état
de la rue Derrière le Château. Malgré l'exiguïté du suivant, suggérant l'existence d'une voie de circulation
terrain, deux sondages totalisant une surface de 60 m2 en terre dès cette première période.
163
Bibliographie sement. Lors de notre passage sur les lieux, ces débris
■■ C[apelle] C., 1980. Tour Charlemagne. In : Province de occupaient la largeur de la tranchée (1,5 m) sur une
Liège. Arrondissement de Liège. Tome 2 (L-V), Liège (Le Patri- longueur de 23 m. Ils s'étendent vraisemblablement au
moine monumental de la Belgique, 8²), p. 465. nord et au sud de la future voirie.
■■ Coquelet C., Coura G. & Van Laere R., 2015. Un dépôt Quelques tessons romains ont aussi été relevés (frag-
monétaire de la fin du 15e siècle à Jupille-sur-Meuse (Liège). In : ments de fond de vase en sigillée d'Argonne, de mortier à
Frébutte C. (coord.), Pré-actes des Journées d'Archéologie en lèvre en collerette, de pot à bord rentrant, etc.). La nature
Wallonie, Rochefort 2015, Namur, Service public de Wallonie de cette occupation d'époque romaine est actuellement
(Rapports, Archéologie, 1), p. 135-137. indéterminée mais elle est sans doute à mettre en
■■ Coquelet C. & Gustin M., 2010. Liège/Jupille-sur-Meuse : relation avec d'autres vestiges romains, attribués à une
fouilles préventives menées à l'école Saint-Amand, campagne implantation de type relais (2) et à une petite nécropole
2008, Chronique de l'Archéologie wallonne, 17, p. 138-140.
(3), découverts il y a quelques années dans le zoning
■■ Jacquemotte E. & Lejeune J., 1907. Glossaire toponymique industriel voisin et le long de la rue Le Marais (Gava
de la commune de Jupille, Liège. & Dardenne, 1991-1992 ; Marchal & Gustin, 1999 ;
Marchal & Loicq, 2003). Les vestiges romains découverts
dans le zoning industriel se répartissent de part et d'autre
d'une voie romaine empierrée (1 ; Marchal, 2001) dont le
Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : prolongement passe très probablement à 150 m au sud-
sud-est des vestiges découverts en 2015.
occupation romaine rue de Vinalmont
Bibliographie
Gianni Gava ■■ Gava G. & Dardenne L., 1991-1992. Villers-le-Bouillet :
trace d'occupation romaine, Bulletin du Cercle archéologique
En février 2015, l'entreprise Thomas & Piron a débuté Hesbaye-Condroz, XXII, p. 145-148.
l'implantation d'un nouveau lotissement résiden- ■■ Marchal J.-P., 2001. Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet :
tiel à Villers-le-Bouillet, rue de Vinalmont (entre les voie romaine rue de la Métallurgie, Chronique de l'Archéologie
nos 2 et 4) à proximité de la ferme de la Croix (parc. wallonne, 9, p. 114.
cad. : 1re Div., Sect. A, no 244y ; coord. Lambert : ■■ Marchal J.-P. & Gustin M., 1999. Voie romaine et occupa-
212961 est/141121 nord). tion riveraine à Villers-le-Bouillet. Rapport préliminaire, Bulle-
Le creusement des tranchées d'égouttage a fait tin de la Société royale belge d'Études géologiques et archéologiques
apparaître un niveau de tuiles romaines (gros frag- Les Chercheurs de la Wallonie, XXXIX, p. 83-101.
ments jusqu'à un quart de tegula) à une profondeur ■■ Marchal J.-P. & Loicq S., 2003. Villers-le-Bouillet/Villers-
de 1,2 m sous le niveau du sol actuel (soit au niveau le-Bouillet : nécropole romaine et occupation protohistorique
de la semelle de fondation de l'égout). Cette couche rue Le Marais, Chronique de l'Archéologie wallonne, 11,
p. 141-142.
archéologique (4) se situe à l'extrémité nord du lotis-
MOYEN ÂGE
Modave/Vierset-Barse : la motte castrale
de Vieux-Barse, un premier bilan de la
campagne de fouilles 2015
petite quantité de sédiments repoussés à l'entrée lors enfouie. Dans ce contexte, la possibilité qu'une pièce en
du comblement de la fouille clandestine, cette struc- sous-sol existe encore et ait été comblée par les ébou-
ture était vide. lis n'est pas à exclure. Malheureusement, l'absence de
Abstraction faite des perturbations engendrées par le moyens alloués à ce programme de recherche ne nous
pillage du site, la stratigraphie s'est révélée particulière- permettra pas d'investiguer plus avant dans des condi-
ment simple. Elle ne se résume en effet qu'à une couche tions satisfaisantes. Nous espérons donc qu'une évolu-
d'effondrement rapide (UF [5] : matrice ouverte de blocs tion favorable de la situation nous offrira la possibilité
calcaires composant jadis les murs de la structure, mêlés de poursuivre ce travail prometteur.
à du mortier de chaux pulvérisé), elle-même située sous
une couche de dégradation de surface (UF [4]). Cette Remerciements
dernière est le résultat du processus naturel de lave-
ment des éboulis par les précipitations, entraînant la L'auteur tient à exprimer sa profonde gratitude aux
disparition de la majeure partie du mortier de chaux, différents membres du Cercle archéologique Hesbaye-
les interstices entres les pierres ont ensuite été progressi- Condroz ayant pris part au travail de terrain, à savoir
vement comblés par l'humus résultant de la dégradation mesdames Françoise Bolland et Amandine Schaus,
du couvert végétal. Ces deux unités prennent princi- ainsi que messieurs Emmanuel Delye, Robert Désert,
palement appui sur l'UF [1] (parement interne du mur Philippe Franquinet et André Jaminon.
ouest, structure 1), l'UF [3] (parement interne du mur
nord, structure 1) et enfin l'UF [7] (parement interne du
mur de fermeture, structure 2).
Le matériel découvert se compose avant tout de très Soumagne/Ayeneux : vestiges en bois
nombreux fragments osseux, tous d'origine animale. rue Pont Al'Plantche
On en dénombre 881, pour un poids total de 1 553 g.
Ces pièces dépassent rarement les quelques centi-
mètres de long et présentent de nombreuses traces Claire Goffioul, Olivier Collette,
à leur surface, indiquant clairement qu'il s'agit d'élé- Sarah Crémer et Pascale Fraiture
ments intrusifs apportés par des animaux opportu-
nistes et se servant des nombreuses cavités préser- Une évaluation archéologique a été menée préalable-
vées dans les couches d'effondrement (UF [4] et [5]) ment à la création d'un lotissement rue Pont Al'Plantche,
comme abris. Les tessons, bien que présents en faible entre le château de Wégimont et le ruisseau de la Magne.
quantité (29 pièces), n'en comportent pas moins L'endroit, au toponyme évocateur, pouvait suggérer un
quelques éléments diagnostiques (CM01 à CM07, dont point de passage pour franchir le cours d'eau.
des éléments de préhension, des fonds et des bords)
ainsi qu'une caractéristique intéressante : presque tous
sont maculés de mortier de chaux qui adhère forte-
ment à leur surface. Ce fait nous laisse penser qu'ils
ont été inclus dans le comblement des murs lors de
l'édification de la structure, nous offrant un terminus
post quem. Les bords – identifiés comme étant des
bandeaux d'Andenne – nous permettent d'avancer une
proposition de datation pour la seconde moitié du 11e
ou la première moitié du 12e siècle. Cette estimation
demande cependant à être confirmée par le biais d'une
analyse approfondie menée par un céramologue, ainsi
que par le recoupement avec d'autres sources. Elle
demeure pour l'heure une hypothèse de travail.
Quoique cette seule campagne de fouilles soulève
autant de questions qu'elle n'apporte de réponses, nous
pouvons affirmer être en présence d'un site remar-
quable et probablement unique en Belgique à l'aune
de nos connaissances actuelles. Les murs, admirable-
ment préservés et plongeant à une grande profondeur Soumagne/Ayeneux, Pont Al'Plantche : plan général
– probablement pour rejoindre le sol en place – laissent (infographie F. Giraldo-Martin et C. Régimont, Serv.
archéologie, Dir. ext. Liège 1).
présager de l'existence d'une importante structure
167
NORD SUD
200 m
195 m
colluvions limoneuses
190 m terrasse
chenaux latéraux ?
185 m schistes et grès houillers La Magne
argile homogène
180 m ? ?
argile à silex
Soumagne/Ayeneux, Pont Al'plantche : profil topographique observé sur le versant nord de la vallée de la Magne.
L'opération s'est déroulée en septembre 2012 sur moins une portion d'aménagement de berge a été
un terrain de 3,45 ha menant à la plaine de la Magne observée. L'assemblage fragile de fines planches, de
(coord. Lambert : 246493 est/144941 nord). L'explora- 25 cm de long sur 10 cm de hauteur et épaisses de
tion en tranchées continues a livré des données géo- 1 cm, clouées à des piquets d'à peine 4 cm de section et
pédologiques intéressantes, permettant d'identifier les de 20 à 30 cm de hauteur, suggère un effondrement in
principaux dépôts présents au sein de la plaine allu- situ de l'ouvrage.
viale de la Magne. Un éventail des types de bois a été prélevé en vue
Le terrain occupe le fond de la vallée de la Magne et d'une expertise dendrochronologique. Les pièces, frag-
son versant septentrional. Son extrémité nord corres- mentées pour la plupart, ont été recueillies à l'aide d'une
pond à la transition avec le plateau de Wégimont. pelle mécanique en trois niveaux successifs d'une ving-
Le substrat géologique est constitué par les terrains taine de centimètres. Il s'agit, pour le niveau 1, d'une
schisto-gréseux du Groupe Houiller. Le versant branche type tenon (un fragment en aulne et un autre
concerné est en pente relativement douce et transite en hêtre), d'une planche travaillée en chêne présentant
par un talus avec la plaine alluviale. Les tranchées un trou et une rainure le long d'une rive (?), d'un pieu
d'évaluation au nord du terrain ont mis en évidence en aulne, d'une planche fine en hêtre, d'une autre plus
des dépôts colluviaux limoneux interrompus à la épaisse en aulne et d'un piquet en noisetier ; pour le
rupture de pente par des pointements du substrat niveau 2, d'une planche travaillée d'une essence non
schisto-gréseux. Une petite terrasse, située 3 m
au-dessus de la plaine alluviale et conservée sur une
vingtaine de mètres de large, laisse affleurer une
argile blanchâtre affectée par un réseau polygonal
recouverte par endroit de plaquages colluviaux. La
plaine alluviale qui débute vers la cote +182,5 m est
particulièrement plane. Elle contient des alluvions
argileuses blanchâtres homogènes en surface
devenant caillouteuses vers 1,2 m de profondeur.
Une accumulation de cailloux grossiers se rencontre
à environ 2 m sous la surface actuelle. Les alluvions
sont parcourues par une frange d'oxydation vers
25 cm de profondeur puis, vers 60 cm de profondeur,
prennent des teintes grisâtres typiques de conditions
hydromorphes. Des cailloux de silex et des blocs épars
de grès se rencontrent régulièrement en surface. Des
concentrations sinueuses de cailloux au sein des allu-
vions argileuses sont interprétées comme les traces de
probables anciens chenaux.
Un sondage profond à proximité de la Magne a
mis en évidence la présence d'un paléochenal sous
les dépôts d'argile homogène. Vu les conditions d'ob-
servation difficiles, seuls les niveaux supérieurs du
paléochenal ont été observés ; ils sont constitués de lits Soumagne/Ayeneux, Pont Al'Plantche : fragment
caillouteux et ont une charge organique importante. d'aménagement de berge en cours de dégagement
De nombreuses pièces de bois y ont été découvertes, (infographie F. Giraldo-Martin, Serv. archéologie, Dir. ext.
Liège 1).
sans ordre apparent pour la plupart d'entre elles. Au
168
identifiée, d'une branche non travaillée en aulne (deux chapitre (Lambotte & Neuray, 2007). À partir de là,
fragments), d'un grand tronc et d'un pieu tous deux il paraissait évident que les quelques trous de pieux
en tilleul ; enfin, pour le niveau 3, d'un bois travaillé relevés à l'entour appartenaient à l'oratoire Saint-
en chêne. Martin dans lequel Remacle avait d'abord été enterré
L'examen dendrochronologique mené sur les selon les premiers témoignages (10e siècle).
vestiges s'est avéré intéressant. Sur les onze pièces Les vestiges d'un bâtiment très arasé, mis au
de bois expertisées, deux fragments de planches du jour dans le transept sud de l'église ottonienne,
niveau 1 ont été retenus pour étude ; l'un est en chêne, ont ensuite été attribués à la première abbatiale :
l'autre en hêtre. Ce dernier n'a pas donné de résultats la partition particulière de l'édifice permettait d'y
suffisamment crédibles à la datation. Quant à l'échan- reconnaître d'ouest en est, une nef centrale bordée
tillon en chêne, il a été daté avec certitude : il provient de bas-côtés, un transept non saillant et un sanc-
d'un arbre abattu entre 1265 et 1285. Ce résultat situe tuaire à abside. Au nord-est, des structures frag-
le comblement supérieur du paléochenal au plus tôt à mentaires dessinant de petites cellules furent ratta-
la fin du 13e siècle. chées aux premiers bâtiments conventuels, tandis
L'intervention archéologique rue Pont Al'Plantche qu'à l'ouest un petit édifice quadrangulaire abritant
a permis de reconnaître les divers éléments structu- plusieurs sépultures et des structures très arasées,
rants de la plaine alluviale de la Magne, la présence de accompagnées d'un abondant matériel verrier,
paléochenaux aux berges parfois aménagées et qui ont furent interprétés respectivement comme chapelle
conservé des éléments de bois dont certains remontent funéraire et aire d'activité artisanale (Lambotte &
à la fin du 13e siècle. Neuray, 2009).
Les bâtiments attribués à la seconde phase, soit
la reconstruction du monastère au 10e siècle après
le passage des Vikings, incluaient une deuxième
Stavelot/Stavelot : nouvelle chronologie abbatiale construite directement au nord de la
des bâtiments monastiques du Haut précédente – composée d'une longue nef, d'un sanc-
Moyen Âge et découverte d'un tuaire à abside et d'une tour occidentale –, le réamé-
nagement de la première abbatiale en grande « salle »
sarcophage mérovingien
accolée à la nouvelle église et la construction d'un
vaste cloître avec lavabo au sud.
Brigitte Neuray
La nouvelle interprétation de la
En préparation à la publication des recherches archéo- chronologie
logiques entreprises sur le site de l'ancienne abbaye de
Stavelot, un workshop a été organisé en octobre 2014, La révision de la chronologie de l'ensemble des sépul-
sur le thème « Archéologie et histoire, de la fondation tures des premiers siècles a rapidement démontré
à Odilon », soit du milieu du 7e à la fin du 10e siècle. À que toutes les inhumations situées à l'intérieur de
cette occasion, archéologues et historiens rassemblés la chapelle dite funéraire avaient été creusées après
se sont penchés sur la problématique des premiers l'incendie de celle-ci, événement stratigraphiquement
bâtiments religieux de Stavelot. rattaché à l'incursion des Vikings en 881. Ce bâtiment
n'avait donc pas une vocation sépulcrale et ce n'est
La chronologie proposée avant 2014 qu'après l'incendie qu'il accueillit au moins six sépul-
tures, entre la fin du 9e et le début du 11e siècle. Par
L'interprétation soutenue jusqu'ici reposait sur la ailleurs, l'examen des vestiges attribués à la première
découverte, au centre de la salle du chapitre du abbatiale a également permis d'identifier la trace d'un
cloître ottonien, d'un sarcophage enterré (T302), premier sanctuaire à chevet plat, sous le mur d'abside
vide d'ossements, identifié à la sépulture primitive du aujourd'hui rattaché à la transformation de ce bâti-
fondateur, Remacle (mort entre 671 et 679), sur base ment au 10e siècle.
de plusieurs arguments : les témoignages historiques Lors du workshop d'octobre 2014, l'interprétation
relativement récents – milieu du 17e siècle pour le générale de la chronologie proposée a soulevé plusieurs
plus ancien – (Pascaud, 2000, p. 30), le désaxement objections. L'identification du sarcophage au tombeau
singulier des bâtiments claustraux dès le 10e siècle, primitif de Remacle a d'abord été remise en cause
supposé induit par l'orientation de ce sarcophage, et pour trois raisons : l'absence de sépultures ad sanctos
surtout la concentration de sépultures dans la gale- antérieures au cloître ottonien, le manque de traces
rie orientale du cloître ottonien, qui longe la salle du claires de bâtiments autour du tombeau du fonda-
169
bâtiments actuels
abbatiale et conventuels du 11e siècle
abbatiale et conventuels du 10e siècle
abbatiale et conventuels du 8e siècle
T302
0 20 m
Stavelot : phasage haut-médiéval tel que publié dans Lambotte & Neuray, 2009.
bâtiments actuels
11e siècle
10e siècle
7e- 9e siècle
7e siècle
08
T3
07
T3
06
T3
01
T3
02
T3
0 20 m
teur et enfin l'éloignement relatif de celui-ci vis-à-vis ensemble, elles témoignent d'un décor de qualité
des églises successives. Par ailleurs, la typologie de la ornant le sanctuaire primitif, démonté au début du
première abbatiale a été jugée anachronique pour la fin 10e siècle, et confirment donc la préexistence d'une
du 7e siècle : la définition du plan en nefs et transept première église, dotée d'un sanctuaire à chevet plat,
mais aussi l'étroitesse des bas-côtés posaient en effet qui remonterait, selon les sources historiques, à la fin
question. Enfin, la deuxième abbatiale présente un du 7e siècle.
plan qui est apparu, a contrario, archaïque au 10e siècle Cette nouvelle interprétation de la chronologie et de
et sa disproportion vis-à-vis de l'ampleur du cloître la fonction des bâtiments nécessitait quelques études
contemporain a également été soulignée. complémentaires. Une série de datations 14C des sépul-
Sur base de ces différentes remarques, une nouvelle tures situées dans l'espace de la chapelle funéraire, de
interprétation de la chronologie des vestiges est celles enfouies sous le sol non perturbé de la première
aujourd'hui proposée ; sans entrer dans les détails abbatiale au nord et de cinq d'entre elles, recoupées
qui seront développés dans la publication, il convient par ce dernier bâtiment, n'apportent pas de preuves
cependant de signaler que le réexamen des obser- formelles mais soutiennent cette nouvelle hypothèse.
vations archéologiques et les études complémen- Les résultats complets de ces datations 14C seront
taires effectuées depuis ce workshop confirment cette présentés dans la publication en cours de préparation.
nouvelle proposition.
Le bâtiment identifié auparavant à la première Le sarcophage mérovingien
abbatiale est en réalité un édifice religieux à vocation
funéraire. La présence de caveaux, maçonnés mani- Dans le cadre des travaux complémentaires également,
festement en même temps que le mur auquel ils sont une sépulture en caveau, signalée dans les carnets
adossés, ainsi que de plusieurs sépultures dans le « bas- de fouille de 1999, méritait un réexamen ciblé en
côté » nord, permet de soutenir cette hypothèse. Son raison de sa position : située à peu près au centre de
plan évoque plutôt un édifice de type memoria, qui la chapelle funéraire, mais mal documentée, elle était
peut être rapproché de l'oratoire Saint-Martin signalé clairement antérieure au réaménagement de l'édi-
par les textes à partir du 10e siècle. La découverte réali- fice au 10e siècle. Un sondage ponctuel est entrepris
sée en mai 2015 et détaillée ci-dessous renforce égale- en mai 2015 afin de préciser son emplacement et
ment cette nouvelle interprétation. compléter les informations disponibles. Les vestiges de
Quant à l'abbatiale dont la construction était aupa- ce qui avait d'abord été interprété comme un caveau
ravant attribuée au 10e siècle, plusieurs éléments sont mis au jour : une grande pierre horizontale,
permettent de remonter sa datation. L'excellente partiellement englobée dans un mur de chaînage de
conservation du mortier de sol en connexion avec l'abbatiale du 11e siècle, constitue une partie du fond ;
des fragments d'enduit mural, clairement datés du une dalle verticale taillée fait office de paroi au sud ; les
10e siècle, et l'absence de traces de remaniement de cet vestiges d'un muret de pierres sèches limitent le caveau
édifice concouraient à son attribution chronologique à l'est. Quelques ossements en désordre sont récoltés
première. Il est néanmoins certain que le sol contem- à cette occasion. Deux grandes dalles recouvraient ces
porain de la salle à abside au sud a été posé à un niveau éléments jusqu'en 1999.
plus bas que le sol primitif de la chapelle funéraire,
arasant visiblement les vestiges de ce premier bâti-
ment. Si cette disposition a été appliquée à l'abbatiale
au nord, il est possible que ces travaux aient effacé tout
indice d'occupation antérieure. Cet abaissement du sol
au 10e siècle trouve certainement son origine dans la
volonté d'uniformiser les niveaux de circulation entre
le nouveau cloître au sud et les bâtiments cultuels au
nord. Un deuxième argument provient de la mise au
jour d'une quarantaine de tesselles de mosaïques à la
feuille d'or dans une couche de remblai de démoli-
tion, bien datée par le matériel associé, du début du
10e siècle. Cette découverte, hors bâtiment construit,
peut être mise en relation avec une autre concentration
des mêmes mosaïques retrouvée le long du parement
intérieur des fondations de l'abside de l'abbatiale du
Les vestiges du sarcophage (T306) mis au jour en mai 2015.
10e siècle, dans un contexte relativement perturbé :
171
l'abbaye, avec l'espoir qu'elles puissent apporter leur lonnant entre le 7e et la première moitié du 11e siècle
contribution à la reconstitution du monastère haut- au plus tard (Henrard, 2012 ; Henrard, de Longueville
médiéval. & Hanut, 2014).
Outre les vestiges habituellement mis au jour pour
Bibliographie un habitat rural de cette période (silos, fosses, fossés,
■■ Cumont G., 1898. Fouilles faites dans l'ancienne abbaye de empreintes de poteaux, foyers et cabanes excavées), la
Stavelot pendant l'année 1896, Annales de la Société d'Archéolo- fouille a livré une vingtaine d'inhumations en bordure
gie de Bruxelles, XII, p. 331-336. septentrionale de l'occupation.
■■ Lambotte B. & Neuray B., 2007. Abbaye de Stavelot. Le L'espace funéraire apparaît en partie tronqué par
tombeau de Remacle. In : Actes des VIIe Congrès de l'Association l'érosion. La répartition des tombes est assez ramassée
des cercles francophones d'Histoire et d'Archéologie de Belgique et montre l'utilisation de deux normes d'orientation
et LIVe Congrès de la Fédération des cercles d'Archéologie et successives. Aucun mobilier ou dépôt funéraire n'est
d'Histoire de Belgique, Louvain-la-Neuve, 26-28 août 2004, associé aux inhumations. Trois datations radiomé-
vol. 2, s.l., p. 581-591.
triques réalisées sur squelettes (F157, F139 et F160)
■■ Lambotte B. & Neuray B., 2009. Stavelot/Stavelot : ancienne indiquent une durée d'utilisation longue du champ
abbaye, vestiges du milieu du viie siècle jusqu'à 881, Chronique
funéraire, contemporaine de l'occupation du site,
de l'Archéologie wallonne, 16, p. 121-125.
probablement à partir de la charnière des 7e et 8e siècles.
■■ Legrand W., 1942. Notes sur le culte de saint Poppon, abbé de Une description générale des sépultures de Villers-
Stavelot, Chronique archéologique du Pays de Liège, 33, p. 34-48.
le-Bouillet a été effectuée par Geneviève Yernaux et
■■ Pascaud C., 2000. Données historiques relatives à la Agnès Malevez-Schmitz à partir de leurs observations
construction de l'abbaye de Stavelot, particulièrement à la
de terrain (Henrard et al., 2010). Cet article complète
sépulture de saint Remacle. In : Léotard J.-M. (dir.), Quatrième
ces informations sur base des analyses anthropo-
journée d'archéologie en Province de Liège (Liège, 1999), Liège,
p. 149-153.
logiques en laboratoire.
■■ Pascaud C., 2013. L'abbaye de Stavelot. Volume 1. Histoire
et représentations des édifices, Namur (Études et Documents,
Matériel ostéologique et méthodologie
Archéologie, 25).
Le corpus du site de Villers-le-Bouillet est composé
■■ Stifkens J., 1981. Fouilles à l'abbatiale de Stavelot (Lg),
Archaeologia Mediaevalis, 4, p. 37. de vingt tombes individuelles dont quatorze ont fait
l'objet d'une analyse anthropologique en laboratoire.
Sources Les individus déposés dans les six autres sépultures
■■ Finoulst L.-A., 2012. Les sarcophages du haut Moyen Âge n'ont pas été prélevés en raison de leur très mauvais
en Gaule du Nord. Production, diffusion, typo-chronologie et état de conservation. Il ne s'agit pas de la totalité
interprétations, Thèse de doctorat inédite, Université libre de de la population, car l'érosion a détruit une partie
Bruxelles, Bruxelles. de la nécropole. Outre ces sépultures primaires
individuelles, deux cas particuliers, F159 et F160,
correspondent à des dépôts de réduction de corps
contenant plusieurs individus.
Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : Globalement, les squelettes sont dans un état de
étude anthropologique des individus conservation médiocre, ce qui a souvent empêché la
découverts sur le site « A Lohincou » détermination du sexe et de la stature des individus.
L'analyse de l'âge au décès des enfants est
fondée sur l'observation de la maturation dentaire
Aubrée Godefroid et Denis Henrard (Moorrees, Fanning & Hunt, 1963) ou osseuse ainsi
que sur la mesure des os longs (Scheuer & Black,
Entre 2008 et 2010, le Service de l'archéologie de la 2000). À partir de vingt ans, l'observation de l'état
Direction extérieure de Liège 1 (DGO4 / Départe- de fusion de la crête iliaque (l'aile du bassin), ainsi
ment du patrimoine) a mené la fouille extensive d'une que la fusion du côté sternal de la clavicule (Owings-
occupation du Haut Moyen Âge dans le parc indus- Webb & Suchey, 1985 ; Kreitner et al., 1998), permet
triel de Villers-le-Bouillet, au lieu-dit « A Lohincou » d'affiner l'âge jusqu'à trente ans. À partir de cet âge,
(coord. Lambert : 213980 est/141750 nord ; parc. ces points d'ossification sont complètement soudés,
cad. : Villers-le-Bouillet, 1re Div., Sect. A, no 549h). rendant délicate l'évaluation de l'âge au décès.
Toutes campagnes confondues, le décapage méca- L'analyse de la surface pré-auriculaire du coxal
nique d'une superficie de 2,65 ha a révélé quelque (c'est-à-dire la zone qui relie le coxal au sacrum)
652 faits archéologiques pour une occupation s'éche- est alors effectuée pour préciser l'âge au décès des
173
F198
F165
F157
F139
(GrA-43609)
(GrA-43605)
1220 ± 30 BP
1105 ± 30 BP
692 - 887 AD (2σ)
885 - 998 AD (2σ)
Les restes osseux constituent une
F141
F142 F160 (GrA-43613) 1290 ± 30 BP 663 -775 AD (2σ) source directe d'information sur l'état
F140
de santé d'un individu ou d'une popu-
F199 lation parce qu'ils permettent de rele-
F164 ver la présence des marqueurs de stress
biologique, des pathologies osseuses
F163
F108 1
F157 F162
(porosité de la voûte crânienne).
N
E
0 1m 2
Les pathologies osseuses identifiées
Villers-le-Bouillet : plan du groupe funéraire de « A Lohincou » identifiant les deux sont les enthésopathies (c'est-à-dire
normes d'orientations (1 et 2) et tableau des datations radiométriques réalisées des ossifications d'insertion liga-
sur squelettes (dessin et infographie F. Giraldo Martin, Serv. Archéologie, Dir. mentaires), les réactions périostées
ext. Liège 1).
(réactions de la corticale de l'os) et
l'arthrose. L'hygiène bucco-dentaire
des individus peut être appréhendée
par plusieurs indicateurs : les lésions
carieuses, le tartre, l'usure dentaire et
la parodontopathie (déchaussement
dentaire).
Analyses biologiques
vidus de moins de 5 ans, sans bien pouvoir, dans ce cas, ■■ Bruzek J., 2002. A Method for Visual Determination of
mesurer le poids respectif d'un recrutement exclusif Sex Using the Human Hip Bone, American Journal of Physical
ou de la conservation différentielle des ossements. Il Anthropology, 117, p. 157-168.
ne paraît pas y avoir eu de recrutement particulier des ■■ Cleuvenot E. & Houët F., 1993. Proposition de nouvelles
individus en fonction des deux normes d'orientation équations d'estimation de la stature applicables pour un sexe
des tombes. indéterminé et basée sur les échantillons de Trotter et Gleser,
Bulletins et Mémoires de la Société d'Anthropologie de Paris, n.s.,
De manière générale, les défunts reposent sur le dos,
5, p. 245-255.
les mains posées sur le bassin et les membres inférieurs
en extension. Dans seulement un cas, les membres ■■ Henrard D., 2012. Villers-le-Bouillet/Villers-le-Bouillet :
occupation antique et du Haut Moyen Âge « A Lohincou »,
inférieurs sont fléchis.
Chronique de l'Archéologie wallonne, 19, p. 175-179.
Il existe différents modes d'inhumation : inhumation
■■ Henrard D., de Longueville S. & Hanut F., 2014. Villers-
en espace vide (neuf individus) dont deux corps dépo-
le-Bouillet/Villers-le-Bouillet : première approche de la pério-
sés dans un contenant souple, inhumation en pleine
disation de l'occupation du Haut Moyen Âge « A Lohincou »,
terre dans deux cas dont un avec un contenant souple. Chronique de l'Archéologie wallonne, 21, p. 185-191.
Pour trois sujets, l'espace de décomposition des corps
■■ Henrard D., Marchal J.-P., Yernaux G. &
est indéterminé. Il ne semble pas y avoir eu non plus Malevez-Schmitz A., 2010. Villers-le-Bouillet/Fize-Fontaine :
de sélection des inhumés selon le type de contenant. l'occupation du Haut Moyen Âge de « Lohincou ». Deuxième
Les deux zones de réductions sont particulièrement campagne de fouilles, Chronique de l'Archéologie wallonne, 17,
intéressantes parce qu'elles attestent d'une gestion p. 118-122.
particulière des personnes décédées depuis longtemps. ■■ Kreitner K.F., Scheden L., Riepert T., Nafe B. &
En outre, ces deux fosses sont très différentes l'une de Thelen M., 1998. Bone age determination based on the study
l'autre. En effet, l'une témoigne peut-être du respect de of the medial extremity of the clavicle, European Radiology, 8,
l'intégrité individuelle des défunts, avec une sélection p. 1116-1122.
des ossements et un rangement de ces restes, tandis que ■■ Moorrees C.F.A., Fanning E.A. & Hunt E.E., 1963. Age
l'autre apparaît plus désorganisée, toutes les parties du variation of formation stages for ten permanent teeth, Journal
corps étant présentes sans sélection des ossements qui of Dental Research, 42 (6), p. 1490-1502.
ne sont pas rangés. ■■ Murail P., Bruzek J., Houët F. & Cunha E., 2005. DSP: A
Les individus présentent un état de santé globale- Tool for probabilistic sex diagnosis using worldwide variability
ment bon, à l'exception de l'hygiène bucco-dentaire in hip-bone measurements, Bulletins et Mémoires de la Société
et des hypoplasies linéaires de l'émail dentaire. Seuls d'Anthropologie de Paris, 17 (3-4), p. 167-176.
deux individus sont atteints de pathologies plus ■■ Owings-Webb P.A. & Suchey J.M., 1985. Epiphyseal Union
remarquables. D'autres sujets présentent des lésions of the Anterior Iliac Crest and Medial Clavicle in a Modern
pathologiques âge-dépendantes signifiant qu'il s'agit Multiracial Sample of American Males and Females, American
Journal of Physical Anthropology, 68, p. 457-466.
de sujets plus âgés.
Enfin, le site de « A Lohincou » est le témoin d'une ■■ Pecqueur L., 2003. Des morts chez les vivants : les
inhumations dans les habitats ruraux du Haut Moyen Âge en
utilisation de longue durée d'un espace funéraire en
Île-de-France, Archéologie médiévale, 33, p. 1-31.
lien avec l