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1
L’acteur central de la circulation des trains est l’homme, qu’il soit au sol ou aux
commandes du train. Au cœur de l’exploitation réside ce dialogue permanent
entre le « mobile » et le « sol ». Pour permettre ce dialogue, un langage visuel
« codé » a été mis en place sous forme de « signaux » balisant la ligne de chemin
de fer. L’esprit de ce dialogue repose sur une obéissance « passive » et
« absolue », éliminant toute improvisation. Mais l’homme a ses limites, physio-
logiques notamment, de sorte qu’une défaillance est toujours possible. À ce
stade, l’automatisme entre en jeu pour aider, contrôler, voire surveiller l’activité
humaine. C’est le formidable développement des systèmes de sécurité qui ont
investi toutes les fonctions liées à la circulation des trains, allant jusqu’au
« pilotage automatique » largement pratiqué en transport urbain du type métro.
Les technologies de la mécanique puis celles de l’électromécanique et de
l’électronique et de nos jours, l’informatique, sont à la base de l’ensemble des
fonctions de sécurité de l’exploitation.
L’objectif du présent dossier est de décrire l’architecture des principaux systè-
mes de sécurité ferroviaire, leurs composantes et leurs applications actuelles.
Bien entendu, il ne peut être question de décrire tous les systèmes en service ;
une encyclopédie n’y suffirait pas. Nous dégageons les caractères essentiels en
décrivant leurs évolutions.
Nous traitons l’aspect particulier de l’exploitation des lignes électrifiées en ter-
mes de régulation de l’alimentation en énergie, aussi vitale que l’exploitation
des lignes classiques.
Le passager d’un train ou d’un métro ne peut réaliser la complexité de la « toile
sécuritaire » qui, en permanence, autorise le bon déroulement de son voyage ou
de son déplacement quotidien. Cette « toile » ne cesse d’évoluer en bénéficiant
des développements du génie électrique ; elle contribue largement à la satisfac-
tion des clients du transport ferroviaire et à sa rentabilité.
L’un des développements majeurs de l’époque actuelle concerne les réseaux
européens. Ils doivent en effet relever le défi de « l’interopérabilité » apte à assu-
rer la continuité des circulations à travers deux ou plusieurs pays. C’est pourquoi
le présent dossier est complété par l’étude spécifique de l’« ERTMS » – European
Railway Trafic Management System – (voir [D 5 545]).
1. Exploitation ferroviaire Il importe donc de tirer le meilleur parti de l’existant selon les prin-
cipes d’optimisation suivants :
— gestion du trafic par l’adéquation entre la demande et l’offre à
chaque période, journalière, hebdomadaire et annuelle, et par la
1.1 Objectifs et optimisation résolution de situations dégradées dans les délais les plus brefs ;
— gestion des ressources par la collecte des informations relati-
ves aux matériels et au personnel (disponibilité, maintenance) ;
Le terme « exploitation » désigne l’entité en charge de la ges- — amélioration constante du service : fréquence des circulations,
tion du trafic. temps de parcours, information des clients, qualité (réduction des
retards et incidents).
2
H
2a 2b 2c
A B 1 C D E F
2d 2e
G J
2
2f 2g
Itinéraire 1 : A – B - C – G – J
Itinéraire 2 : J – H – G - A
Chaque liaison est réalisée par un ou plusieurs « itinéraires » 1.2.1.3 Systèmes de sécurité associés
(figure 1). Ceux-ci indiquent donc un chemin parcouru et un sens de
parcours.
Ils comprennent : la signalisation – étudiée (§ 3) – et la
L’architecture du réseau est basée sur différentes configurations : réglementation.
— la voie unique parcourue dans les deux sens de circulation
(figure 2 a) ; Cette dernière explicite les dispositions prises par chacun des
— la double voie ; chaque voie est dédiée à un seul sens acteurs : aiguilleurs, agents de sécurité des terminaux et gares,
(figure 2 b) ; régulateurs, agents de conduite, etc.
— la double voie « banalisée » ; chaque voie est parcourue dans
les deux sens de circulation (figure 2 c) ; 1.2.1.4 Entités de régulation
— la communication permet la liaison entre deux voies
(figure 2 d) ; Les moyens au sol mis en œuvre pour assurer les fonctions de
l’exploitation sont organisés pour réaliser un programme de circula-
— la bifurcation permet la création d’un itinéraire (figure 2 e) ;
tion. À leur tête une instance de commandement – le PC – coor-
— l’évitement ; c’est un segment de double voie permettant le donne et dispose :
croisement de deux circulations (figure 2 f) ;
— des aiguilleurs chargés de l’établissement des itinéraires ;
— le tiroir constitue une voie d’évitement en cul de sac (garage)
— du régulateur « circulations » chargé de leur suivi en temps
(figure 2 g).
réel ;
— du régulateur « sous-station » – ou « énergie » – chargé de
1.2.1.2 Parc du matériel roulant l’alimentation en énergie pour les lignes électrifiées.
Ce poste de commandement est en liaison avec les établisse-
C’est l’ensemble des matériels – remorqués (voitures et ments gérant le matériel et le personnel.
wagons) et moteurs (locomotives, automotrices, rames) – aptes ■ Aiguilleurs : si au début du chemin de fer, chaque branchement –
à satisfaire la demande de transport. ou aiguillage – était manœuvré à « pied-d’œuvre » par un aiguilleur,
très tôt ils ont été groupés en « poste ». Les agents préposés
Ce parc est réparti en établissements (appelés autrefois commandent les itinéraires, c’est-à-dire plusieurs aiguillages asso-
« dépôts »), responsables de leur gestion et de leur maintenance. Il ciés à leur signalisation de protection.
est à disposition de l’exploitant. Un parc est dimensionné en fonc- ■ Régulateur : sa mission est de gérer une ligne, ou portion de
tion du trafic de pointe. ligne. Il dispose du graphique « espace – temps » théorique des cir-
Ces établissements gèrent également le personnel de conduite et culations et est informé en temps réel par les agents de sécurité des
le personnel commercial d’accompagnement. Un établissement a gares, ou par une détection automatique, du passage de chaque
en charge le programme d’emploi des matériels et personnels sous circulation (figure 4). Il trace le graphique réel à partir duquel il est
forme de « roulements » établi sur plusieurs jours. Un exemple de en mesure de résoudre les conflits et incidents, par des garages,
roulement de locomotives est donné en figure 3. doublement sur voie banalisée, etc.
1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
Jour
1 Metz Modane
4321 56789
Dijon
Jour
2 Calais
56777 4342 Thionville
Une locomotive part de Dijon en tête du train 4321 pour Metz, arrivée 7h00 ; elle en repart à 8h30 pour remorquer le 56789,
arrivée à Modane à 17h00 ; départ à 21h01 avec le train 56777 pour Calais où elle arrive le jour 2 à 10h04. Elle en repart à 13h00
en tête du 4342. Et ainsi de suite, la journée1 étant assurée par une autre locomotive de l'établissement.
3
Gare A km 10
Gare B km 20
10 11 13
12 102326 15 25
Bifur km 35
Gare C km 40
4546 4551
Gare D km 60
16 4558
Gare E km 70
4547
32
Gare F km 85 4553
454 12345
10921
1234
Gare G km 106
Gare H km 121 22
0h 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20 21 22 23 24
4
(0)
Accident
5
Générateur
Récepteur
a b
Feu rouge
/ arrêt absolu
3.2 Protection des itinéraires -
M
La plupart des itinéraires sont sécants et leur emprunt exige, pour
éviter le risque de conflit, une protection telle que la position des
aiguillages et que l’indication des signaux soit assurée en fonction
des circulations les empruntant : cette fonction s’appelle
« l’enclenchement ». Le sens du mot s’est élargi à la « réalisation
-
matérielle de l’incompatibilité de deux situations ». Feu vert
Le principe d’un enclenchement électrique pour la protection d’un / voie libre
aiguillage est donné en figure 7.
Dès lors, il est possible de commander plusieurs aiguillages en b
sécurité à partir d’un seul ordre : c’est la « commande d’itinéraires »
réalisée à partir de postes d’aiguillages (voir § 6.2). Figure 7 – Principe d’un enclenchement
6
V1
3 V2
AN
RS
V3
1
2
AA1 AA2
Signal d'arrêt
CDV
V1, V2, V3 : paliers de vitesse
AN : arrêt normal
1 : contact sur voie ; 2 : contact sur engin ; 3 : information visuelle AA1 : arrêt automatique d'un train en survitesse
ou sonore sur poste de pilotage ; RS : traitement de la répétition AA2 : arrêt automatique au franchissement du signal d'arrêt
des signaux ; CDV : circuit de voie
Figure 10 – Synoptique du contrôle de vitesse par paliers
Figure 8 – Principe de la répétition des signaux à bord
— informations en retour vers le conducteur : demande de ralen-
tissement, vitesse maximale autorisée, ou « sanction » par freinage
d’urgence.
ATP Deux méthodes sont appliquées pour réaliser le contrôle de
Système vitesse :
de contrôle de vitesse
— contrôle par paliers ;
— contrôle « à point but ».
Position Enveloppe
vitesse Informations États des vitesses
train conducteur signaux maximales 3.3.2.1 Contrôle de vitesse par paliers
C’est le système le plus répandu sur les réseaux de métros. La
voie, toujours découpées en cantons matérialisés par leur circuit de
FREIN voie, transmet au véhicule, équipé de capteurs, une consigne de
Urgence vitesse maximale, en fonction de la ligne et de la position des trains.
Cette consigne est traitée à bord sous forme :
— d’un affichage de cette vitesse ;
— du contrôle de la vitesse du train ;
— de l’action sur le freinage d’urgence s’il y a dépassement.
Figure 9 – Automatic Train Protection – ATP - Schéma synoptique Le synoptique est donné en figure 10. Le système peut être
complété par un contrôle de décélération.
3.3.1 Répétition des signaux à bord 3.3.2.2 Contrôle de vitesse « à point brut »
Dans ce cas, l’ATP connaît :
Le principe est simple : donner sur le poste de conduite l’informa- — la position du point à protéger ;
tion du signal observé et demander au conducteur « l’acquittement », — la vitesse à respecter en un point donné ;
preuve qu’il a bien compris l’ordre donné. En l’absence d’acquitte- — la capacité de freinage du train.
ment, le freinage d’urgence du train est déclenché.
Il détermine la courbe de décélération au-delà de laquelle le train
La répétition des signaux provoque un signal sonore ou lumineux ne pourra plus respecter le point à protéger ; s’il y a dépassement,
dans le poste de conduite. Cette fonction exige une interface voie – l’ATP déclenche le freinage d’urgence.
engin capable de capter et de traiter cette information. La figure 8
donne un exemple de répétition par contact sur la voie. Ce principe permet de freiner « au plus tard » permettant de
réduire l’intervalle entre les trains et accroître le débit de la ligne.
Trois catégories d’ATP se sont développées :
3.3.2 Contrôle de vitesse — à transmission ponctuelle ;
— à transmission semi-continue ;
L’assurance de l’exécution des ordres donnés par la signalisation, — à transmission continue.
même après acquittement, n’est pas entière. Une défaillance du
conducteur entre l’acquittement et la fin d’exécution est possible, ■ « Point but » à transmission ponctuelle
entraînant l’accident. Pour éliminer cette éventualité, il est néces- L’état du signal, la vitesse maximale, la distance du prochain
saire de « suivre » le mouvement du train et de s’assurer qu’il est signal, le profil de la voie sont transmis au train par des balises
dans « l’enveloppe » de la vitesse à respecter : c’est le contrôle de fixées sur la voie. Le calculateur de bord donne la courbe de con-
vitesse, ou « Automatic Train Protection – ATP ». Son schéma synop- trôle et vérifie en permanence que le train ne dépasse pas la vitesse
tique est indiqué en figure 9. maximale et qu’il peut respecter le point but (figure 11).
Le principe de base de l’ATP repose sur quatre catégories ■ « Point but » à transmission semi-continue
d’informations :
En cas de libération du point but (canton suivant libéré), le train ne
— état de la voie (vitesses limites) et de la signalisation (position le sait pas dès lors qu’il a franchi la balise ; il est obligé de s’arrêter
des signaux) ; inutilement. La transmission semi-continue consiste à informer le
— paramètres du train : position et vitesse ; train après le franchissement de la balise en cas de libération du
— comportement du conducteur : acquittement, vigilance ; signal suivant. Le rail ou un conducteur au sol joue ce rôle.
7
L’espacement entre deux trains correspond à tout instant à la dis-
Vitesse limite tance de freinage à la vitesse considérée, plus une distance de sécu-
rité. Cette zone correspond à un canton qui se déplace avec le train.
L’ATP – sol connaît en permanence la position de tous les trains et
Courbe de
transmet à chacun d’eux la vitesse maximale autorisée et la distance
contrôle
du premier point devant lui. Ce point peut correspondre à la position
du train qui le précède (moins la longueur de ce train et moins la dis-
tance de sécurité).
Capteur Balise
En échange l’ATP – bord, qui maintient sa localisation dans un
Point But repère artificiel, transmet sa position au calculateur central qui la
transmettra au train suiveur. Le synoptique du canton mobile est
Figure 11 – Contrôle de vitesse « à point but » à transmission
représenté en figure 12.
ponctuelle
Vitesse maximale
du train 2
2 1
Distance de
Distance de freinage sécurité
Indique au train 2
la position du train 1
Position du train 1
ATP - sol
Position de
Caractéristiques
tous les trains
ligne
en ligne
Figure 12 – Synoptique du canton mobile
8
PCC
Détection Détection
d'entrée de sortie
Plots de programme
9
THT Neutre
Télécommandes Téléinformations
Manque tension HT
Annonce
sectionnement
Disjoncteur Disjoncteur Disjoncteur
fermé ouvert fermé
Relais Büchholz
Amorçage masse Figure 17 – Franchissement d’un sectionnement
Manque tension
auxiliaire
Mesure intensité Monophasé Neutre Continu
Manque tension
Départ 25 kV
Annonce
séparation
25 kV
Manque tension
caténaires
10
— impulsions à tension élevée cadencées à quelques hertzs pour
la transmission d’informations discrètes (exemple : métro de Mar- Calculateurs
seille) ou à quelques dizaines de kilohertzs pour la transmission de Information vitesse train Informations
signaux numérisés (exemple : SACEM du RER parisien). conducteur
Afficheur
L’installation de câbles rayonnant dans la voie autorise l’émission
de champs magnétiques à partir d’un signal porteur (135 Hz pour le
métro de Paris) modulé, ou de courant de fréquence de quelques Commande moteurs Freinage
kilohertzs. Ces câbles sont toujours disposés avec croisement des Antenne
circuits aller et retour de place en place pour limiter la diaphonie et
Capteur de vitesse
permettre aussi de fournir une information complémentaire de
recyclage géographique. Figure 19 – Architecture de l’équipement embarqué
11
8. Conclusion L’évolution des technologies accompagne celle des trafics, de plus
en plus denses et rapides. L’électronique, l’automatique et l’informa-
tique permettent de compléter et de contrôler l’action humaine, non
Exploitation et sécurité du trafic sont deux composantes du sys- de s’en dispenser.
tème ferroviaire (voir [D 5 510, § 1]) dont les interfaces sont de plus
en plus nombreuses et concernent tous les types de transport : Le défi majeur des années présentes et à venir concerne l’intero-
grandes lignes, banlieue, métro, tramway. Dès l’élaboration du pérabilité entre réseaux, tout en garantissant un niveau très élevé de
cahier des charges d’une exploitation (trafic nouveau ou ligne nou- sécurité. À ce titre, les pays européens ont mis en œuvre un système
velle), la conception de la sécurité est l’un argument majeur mis en permettant les circulations des trains de tous les réseaux partici-
œuvre pour atteindre les objectifs de capacité de transport. pants. Le dossier [D 5 545] en donne une étude exhaustive.
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