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Les PUB sont une initiative de l’Union des Anciens Étudiants, des Bureaux et Cercles d’étudiants qui
ont voulu, il y a plus de 50 ans, faciliter l’accès aux études par l’édition de cours et la vente de livres.
Nous sommes donc des étudiants et des anciens étudiants à votre service qui, cette année, étendent
l’offre.
Lors de la dernière année académique, nous avons mesuré vos attentes en réalisant une étude sur un
panel de 1430 étudiants inscrits à l’ULB. Les nombreux échanges que nous avons entretenus en
interview et discussions de groupe, avec les étudiants et professeurs, nous ont permis de développer
de nouveaux projets qui font écho à leurs attentes.
Mais ce n’est pas tout, l’année 2016-2017 verra d’autres nouvelles initiatives :
Si vous avez des questions ou des suggestions, n’hésitez pas, nous restons à l’écoute.
« L’accès au savoir n’est plus le seul fait des scientifiques. La connaissance
devient le bien sans cesse grandissant d’un nombre croissant d’individus : des
individus plus humains, conscients des possibilités de la science contemporaine,
exigeant sans cesse plus fermement de pouvoir en bénéficier. »
1. Définitions
Le mot « droit » tire son origine du latin tardif directum, qui désignait
l’« application des principes de droit », puis l’« ensemble des lois »1. L’adjectif
« juridique » indique ce qui est relatif au droit. Il tire son origine, tout à fait
différente, des termes latins ius (droit) et dicere (dire). La plupart des termes qui
concernent le droit et sa mise en œuvre sont d’ailleurs formés sur la base du mot
ius : justice, juge, jugement, juridiction, etc.
Actuellement, le mot « droit » est employé dans deux acceptions
différentes, que l’on distingue en parlant de « droit objectif » et de « droit
subjectif » :
1° Le droit objectif* désigne l’ensemble des règles juridiques applicables au
sein d’un ordre juridique donné. En ce sens, le droit objectif équivaut au
droit positif*. Ainsi, on parlera du « droit belge » ou du « droit européen ».
2° Le droit subjectif* désigne une prérogative attribuée à une personne et
reconnue par le droit objectif. C’est en ce sens qu’on parle des « droits de
l’homme » ou bien d’un « droit de créance ».
En outre, le même terme « droit » désigne également la discipline qui
étudie les règles de droit et leur mise en œuvre. Une telle homonymie entre la
science et son objet existe dans d’autres disciplines, comme l’économie et
l’histoire. Elle indique en l’espèce les liens indissociables qui unissent, comme on
le verra, le droit et le discours que l’on tient sur lui.
conclure que l’usage* est établi de s’arrêter au feu rouge. Mais pouvons-nous pour
autant en inférer l’existence d’une règle comme l’obligation de s’arrêter au feu
rouge ?
Imaginons (ce qui n’est guère difficile) qu’un automobiliste néglige de
s’arrêter et « brûle », comme on dit, le feu. Cela voudrait-il dire a contrario que
l’obligation de s’arrêter n’existe pas ? Mais n’est-ce pas au contraire lorsque nous
sommes témoins d’un tel comportement que nous prenons le plus concrètement
conscience de l’existence de la règle et de son caractère obligatoire ?
Imaginons encore qu’un policier assiste à la scène à nos côtés. Il sort son
calepin, note le numéro d’immatriculation du véhicule. Son propriétaire recevra
un procès-verbal constatant l’infraction. Peut-être le conducteur devra-t-il
comparaître devant un juge. Ou, plus probablement, se verra-t-il proposer
d’acquitter une somme d’argent pour éviter des poursuites. Mais que signifie tout
ceci ? La règle de droit n’apparaîtrait-elle que lorsqu’elle est violée, voire
sanctionnée ? Dans ce cas, pourquoi les gens s’arrêtent-ils au feu rouge lorsqu’il
n’y a aucun policier à l’horizon et qu’il y a donc peu de risque d’être pris en
faute ?
Peut-être parce qu’ils ont le sentiment de devoir s’arrêter. L’obligation de
s’arrêter au feu rouge résulterait alors d’une croyance généralement partagée,
d’une opinion presque unanime suivant laquelle il est effectivement obligatoire
de se comporter ainsi sur la voie publique. Cela signifierait-il que le droit n’existe
que dans les têtes ? Cependant, en toutes matières, les croyances diffèrent et les
opinions divergent. Souvent, quelques-uns se trompent. Si le cas du feu rouge
paraît clair, celui du feu orange l’est déjà beaucoup moins. Comment identifier
dès lors la règle de droit ? Faudrait-il procéder par sondage d’opinion ou
disséquer les consciences ? Le droit serait-il un sous-produit de la psychologie ?
En réalité, nous pourrions passer des heures et des jours, postés à notre
carrefour à observer le flux de la circulation, nous ne rencontrerons probablement
jamais l’obligation de s’arrêter au feu rouge elle-même. Sans doute aurons-nous
plus de chance si nous nous rendons à la bibliothèque de droit ou sur Internet.
Parmi les livres de la bibliothèque ou sur le site de la police, nous pourrons
trouver le texte de l’arrêté royal du 1er décembre 1975 portant règlement général
sur la police de la circulation routière, couramment appelé le « Code de la route ».
Celui-ci prévoit, en son article 61.1, 1°, que :
« le feu rouge signifie interdiction de franchir la ligne d’arrêt, ou, à
défaut de ligne d’arrêt, le signal même ».
fausse, il faut mais il suffit de pointer le nez à la fenêtre. Par contre, pour décider
si la phrase « il faut s’arrêter au feu rouge en Belgique » est vraie ou fausse, il ne
suffit pas d’observer la circulation dans la rue, mais il faut se référer à des textes
comme le « Code de la route » ou les jugements qui en font application.
A bien y réfléchir cependant, il n’y a rien ici d’étonnant. Nous ne prenons
connaissance de la plupart des événements du monde que par l’intermédiaire de
textes ou d’autres signes, d’images de télévision, de sites Internet… Du moins
peut-on penser que certains en ont eu une connaissance directe, comme nous
avons nous-mêmes observé le trafic automobile, il y a un instant. Toutefois, en
droit, il semble que toute connaissance directe, tangible de la règle soit
impossible, que les textes soient des intermédiaires obligés et que nous n’ayons
accès aux règles que par eux. C’est pourquoi vous passerez probablement plus de
temps à la bibliothèque (ou sur votre tablette), penchés sur un code, une revue ou
un syllabus qu’au coin des carrefours en train d’observer le flot des voitures. Et
vous ferez bien ! Du moins cela vous sera-t-il plus utile pour réussir vos études.
Toutefois dira-t-on, on peut certes apprendre le droit dans les livres, mais
on peut également l’apprendre « sur le tas ». Il y a, d’une part, l’étude de la
théorie et, d’autre part, la pratique du droit. Et cela est vrai. Vous en ferez
l’expérience quand, à l’issue de vos études, vous entamerez un stage au barreau,
au ministère public, dans la magistrature ou que vous commencerez à exercer
votre métier de juriste dans une entreprise ou une association. Mais même alors,
lorsque vous serez « sur le terrain », à quoi serez-vous confrontés au jour le jour ?
A des codes, à des règlements*, à des conclusions* et à des réquisitoires*, à des
jugements et à des arrêts*, à des lettres, des contrats, des actes notariés, en un
mot à des dossiers, toujours plus de dossiers ; c’est-à-dire, à des mots et à des
textes.
Ce constat, selon lequel non seulement nous étudions mais nous
pratiquons le droit par le moyen des mots et des textes, emporte d’importantes
conséquences pratiques sur le plan méthodologique. En réalité, il conditionne la
manière dont les juristes travaillent et doivent travailler, pour connaître,
appliquer et mettre en œuvre le droit. Ainsi, par exemple, la recherche juridique
consistera principalement à investiguer les sources* du droit, c’est-à-dire
essentiellement à retrouver, lire et comprendre des textes juridiques (infra, ch.
4). De même, le raisonnement juridique, la solution des problèmes et l’application
des règles supposeront la plupart du temps le recours à l’interprétation* des
textes (infra, ch. 9).
Tout se passe donc comme si, du moins dans notre culture, deux univers
fonctionnaient en parallèle. D’un côté, le monde des faits, des phénomènes
matériels et sociaux ; de l’autre, le monde des règles, des phénomènes juridiques.
Ces deux univers seraient fondamentalement séparés : l’un indiquant ce qui est ;
l’autre, ce qui doit être. Toutefois, si ces deux univers ne se confondent pas, ils
évoluent en parallèle et communiquent entre eux.
D’une part, le droit est largement conditionné par la nature des choses, par
la nature de l’homme, par l’état et le fonctionnement des sociétés. Le droit ne
saurait exiger l’impossible, comme par exemple de progresser sur le trottoir par
bonds de 12 mètres. C’est ce qu’exprime l’adage bien connu : « à l’impossible, nul
n’est tenu ». Le droit interdit d’ailleurs de soumettre un engagement à une
condition impossible, comme par exemple de remettre un paiement à la semaine
des quatre jeudis. En vertu de l’article 1172 du Code civil, de telles clauses sont
nulles*2. Le droit est largement tributaire des réalités et doit donc en tenir
compte. On n’aurait pas pu créer le droit aérien avant l’invention de la
montgolfière et de l’aviation, ni les lois sur la bioéthique avant l’apparition du
génie génétique. De même, les règlements concernant la circulation des
diligences ont depuis longtemps été abrogés ou sont tombés en désuétude.
Mais, d’autre part, si le droit subit l’influence des réalités, il tente lui-
même d’en contrôler ou d’en modifier le cours. C’est même sa raison d’être et la
mesure de son efficacité. Le droit apparaît comme un discours, mais c’est un
discours qui produit des effets. Même si le Code pénal n’énonce que des « règles
de papier » et qu’une décision de justice, fût-ce une condamnation à un
emprisonnement ou même à mort, n’est au fond qu’une formule, la porte qui se
referme sur le condamné est bien réelle, tout comme la lame métallique qui
s’abat sur sa nuque3. A moins qu’une autre décision ou une nouvelle règle ne
vienne en paralyser l’effet, comme un arrêt de cassation*, une grâce royale ou
l’abolition de la peine de mort4.
Le droit énonce des règles, mais toutes les règles ne sont pas
nécessairement des règles de droit. On relève, dans le champ social, des règles en
tous genres, multiples et variées : les règles de la bienséance ; les règles
2« Toute condition d’une chose impossible, ou contraire aux bonnes mœurs, ou prohibée par la loi,
est nulle, et rend nulle la convention qui en dépend ».
3 Le Code pénal prévoyait en effet, en son article 8 : « Tout condamné à mort aura la tête
tranchée ».
4 La peine de mort a été abolie en Belgique par la loi du 10 juillet 1996 (art. 2). Toutefois, les
dernières exécutions capitales remontaient aux suites de la seconde guerre mondiale. Les crimes
commis en période de paix étaient systématiquement graciés par le Roi depuis 1863 (avec une
exception en 1918). L’interdiction de la peine de mort correspond désormais à des obligations
internationales souscrites par la Belgique. En 1998, ce pays a ratifié le 6ème Protocole additionnel
de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales
(1983) concernant l’abolition de la peine de mort. Ce Protocole permettait toutefois aux Etats de
prévoir une exception en temps de guerre. La Belgique a par la suite ratifié, le 23 juin 2003, le
13ème Protocole qui abolit la peine de mort « en toutes circonstances ». Ce protocole est entré en
vigueur le 1er octobre 2003.
d’orthographe ; les règles des sports et des jeux de société ; le règlement d’ordre
intérieur d’une école, d’une entreprise, d’un club ou d’une association ; les règles
d’éthique et de déontologie professionnelles ; les règles morales et religieuses ;
etc. Toutes ces règles, d’origine, de forme, de force et de valeur très différentes
contribuent chacune à leur manière à peupler le monde des normes.
Mais ces règles n’ont pas toutes la même force ni la même valeur. Elles ne
se voient pas accorder un statut équivalent. Dans nos sociétés, les règles du droit
tendent à prendre le pas sur toutes les autres. Les règles autres que juridiques ne
peuvent en pratique être sanctionnées* de manière contraignante que si et dans
la mesure où le droit les prend en considération et leur prête main forte.
Par exemple, le droit reconnaît les règles des sports de combat dans la
mesure où il ne réprime, au titre de coups et blessures, dans le cadre d’une
épreuve organisée, que les coups portés en violation des règles du sport en
question. La violation des règles d’un jeu de société ne donnera pas lieu
normalement à la mise en œuvre du droit, même s’il s’agit d’un jeu d’argent.
Ainsi, le vainqueur d’une partie de poker ne pourra réclamer l’argent gagné par
voie de justice. Son adversaire malheureux pourra lui opposer en droit l’exception
de jeu5. Toutefois, celui qui paie volontairement une dette de jeu ne pourra la
répéter, c’est-à-dire en réclamer le remboursement, sauf lorsqu’il y a eu
tricherie6. Le droit peut alors être mobilisé pour sanctionner la fraude, comme
par exemple lorsqu’un gain est obtenu à l’occasion d’un jeu télévisé par le moyen
d’un trucage.
De même, les règles de savoir-vivre sont normalement étrangères au droit.
Cependant celui-ci peut les intégrer à l’ordre juridique au titre du respect des
bonnes mœurs et de l’ordre public*. C’est à ce titre que le droit sanctionnera, par
exemple, le fait de se promener en public dans une tenue indécente.
Enfin, les règles déontologiques et les règles de l’art, de même que les
normes techniques sont d’une certaine manière prises en considération par le
droit qui sanctionne, à titre de faute, les professionnels qui ne les ont pas
respectées dans l’exercice de leur activité ou de leur métier.
2. Règles et normes
5 L’article 1965 du Code civil prévoit que « La loi n’accorde aucune action pour une dette de jeu ou
le paiement d’un pari ».
6 L’article 1967 du Code civil dispose que « Dans aucun cas le perdant ne peut répéter ce qu’il a
volontairement payé, à moins qu’il n’y ait eu de la part du gagnant, dol, supercherie ou
escroquerie ».
et en août et que les gens prennent leurs vacances pendant cette période ; ou
encore que les gens s’arrêtent au feu rouge. Ce que l’on décrit ici n’est pas une
règle mais un élément de la réalité, tiré de l’observation : une moyenne
statistique dressée sur la base d’un nombre significatif d’événements.
On veillera cependant à ne pas confondre la normalité et la légalité,
lesquelles ne correspondent pas toujours comme dans le cas du feu rouge. En
effet, il est normal mais nullement obligatoire que les gens prennent leurs
vacances en juillet ou en août. Par conséquent, ce qui n’est pas dans la norme,
n’est pas pour autant forcément interdit par le droit. A l’inverse, il appartient
souvent au droit, au nom du respect des droits de l’homme et des libertés
individuelles, d’énoncer les règles qui s’imposent pour protéger ceux qui, parce
que leur apparence ou leur comportement diffère de la majorité, sont sujets à des
vexations et à des discriminations. Tel est le cas des personnes handicapées ou
qui appartiennent à certaines minorités* ethniques, ou religieuses ou encore les
personnes LGBT7.
Parmi les différentes sortes de règles qui côtoient les normes juridiques
sans pour autant se confondre avec elles, le droit contemporain tente de se
démarquer des règles morales et religieuses. Les règles morales, même si elles
peuvent être juridiquement sanctionnées au titre des bonnes mœurs, sont
généralement considérées comme relevant du for intérieur, c’est-à-dire de la
conscience de chacun, alors que le droit exerce sa juridiction uniquement sur le
for extérieur, c’est-à-dire sur les relations sociales, sans prétendre pénétrer dans
le secret des consciences. De même, les convictions religieuses ou l’absence de foi
et l’appartenance à une communauté religieuse ou à une église, ainsi que le
respect de ses articles de foi, relèvent de la liberté de conscience et de culte. Ils
sont laissés au libre choix de chacun et, à ce titre, protégés par le droit8.
Toutefois, les prescriptions religieuses ne sont pas censées interférer avec les
règles du droit, lui-même astreint à une certaine neutralité à l’égard des
religions.
Une telle séparation forte du droit, d’un côté, de la morale et de la religion
de l’autre, n’est pourtant ni universelle ni permanente. Les premières
prescriptions juridiques étaient pratiquement toutes d’origine religieuse. Dans
les religions dites du Livre, principalement l’Islam et la religion juive, le texte de
la Révélation divine est tenu pour la source principale sinon unique de la
législation. De même, dans les sociétés anciennes ou traditionnelles, le respect
des règles de vie et de conduite de la communauté (l’ethos), s’impose de manière
contraignante à tous les membres du groupe et est certainement justiciable de la
contrainte collective.
4. Règles et valeurs
9 G. HAARSCHER, La laïcité, Paris, P.U.F., coll. Que sais-je ?, 5ème édition, 2011.
10E. Bribosia et I. Rorive, « Le voile à l’école : une Europe divisée », Rev. trim. dr. h., 2004, pp.
951-984 ; I. Rorive, « Religious Symbols in the Public Space: In Search of a European Answer »,
Cardozo Law Review, 2009, vol. 30, pp. 2669-2698.
11 Cette thèse est défendue de manière convaincante notamment par R. DWORKIN dans Taking
Rights Seriously, Cambridge, Massachusetts, Harvard University Press, 1978, spéc. pp. 22-28 à
travers la distinction entre « rules » et « policies ».
1. La justice
4. L’équité
Après avoir distingué la règle de droit des autres normes sociales et des
valeurs, il convient à présent d’examiner les caractéristiques qui lui sont propres.
Puisque l’on aborde les règles juridiques par l’intermédiaire obligé des textes qui
les énoncent, il est logique d’examiner si la formulation des règles peut nous
indiquer quelque chose de leur nature.
Le droit énonce ce qui doit être. Il édicte donc des ordres qui imposent à
leur destinataire des obligations*. Cependant, bien qu’elles énoncent des ordres,
les règles juridiques sont rarement rédigées à l’impératif. Elles s’expriment de
préférence à l’indicatif. Ainsi, la Constitution belge énonce que « Les Belges sont
égaux devant la loi … » (art. 10, al. 2) et que « Le domicile est inviolable » (art.
15). L’emploi du futur marque éventuellement le caractère inéluctable qui
s’attache à ce qui doit être. Par exemple, en vertu du principe du contradictoire*,
l’article 736 du Code judiciaire prévoit que : « Les parties se communiqueront les
pièces avant leur emploi, à peine de surséance d’office à la procédure ».
La prose juridique utilise également, mais pas de manière systématique,
certains verbes ou locutions qui indiquent ou nuancent l’obligation comme
« devoir », « pouvoir », « il est interdit de…. », etc. Souvent aussi, le
commandement n’est pas énoncé explicitement. Ainsi, en matière de vol, le Code
pénal se borne à définir l’infraction : « Quiconque a soustrait frauduleusement
une chose qui ne lui appartient pas est coupable de vol » (art. 461, al. 1er) et à en
spécifier la peine : « Les vols (…) seront punis d’un emprisonnement d’un mois à
cinq ans et d’une amende de 26 francs à 500 francs » (art. 463)17. L’interdit du
vol, qui apparaît de manière évidente, n’est cependant pas exprimé en tant que
tel.
Bien plus, certaines dispositions juridiques semblent purement
descriptives et paraissent n’impliquer d’obligation d’aucune sorte. Ainsi, par
exemple : « La Belgique comprend trois régions : la Région wallonne, la Région
flamande, la Région bruxelloise » (art. 3 de la Constitution) ou encore : « Tous les
biens sont meubles ou immeubles » (art. 516 du Code civil). D’autres dispositions
définissent simplement une notion légale. En réalité, ces propositions dessinent
le « paysage » de l’univers juridique. Ce faisant, elles y créent des entités (comme
les régions) ou des catégories (comme la distinction entre meubles et immeubles).
Ces entités et ces catégories sont destinées à produire des effets juridiques. Ainsi,
les régions se voient attribuer des compétences par la Constitution. Elles
deviennent ainsi des institutions productrices de droit (infra, ch. 3). De même,
aux catégories de biens meubles ou immeubles s’attachent des régimes juridiques
spécifiques, qui entraînent l’application de règles déterminées et donc
d’obligations particulières. Si bien que lorsque le juriste qualifie* un
17Ce montant, comme de manière générale celui de toutes les amendes, doit être augmenté par
application des décimes additionnels prévus par la loi et converti en euros.
Si x alors y
où :
- x désigne l’hypothèse, soit la situation et les conditions
d’application de la règle ;
- y désigne l’obligation juridique proprement dite.
Suivant leur objet, on peut distinguer, au sein des normes juridiques, les
règles primaires et les règles secondaires.
essentiellement liées aux institutions juridiques (infra, ch. 3), dont elles règlent
le fonctionnement.
1° Certaines règles habilitent en effet des personnes ou des autorités à créer
et modifier les règles de droit. Ainsi, les règles qui attribuent des
compétences aux pouvoirs constitués et aux autorités publiques ; mais
aussi, les principes de l’autonomie de la volonté et de la convention-loi*,
consacrés par le droit civil*, qui permettent aux particuliers de créer par
leur simple consentement des engagements juridiquement obligatoires : les
contrats*.
2° Les règles secondaires peuvent également reconnaître l’existence et la
force obligatoire de règles relevant d’un autre ordre. Tel est le cas
notamment des règles de droit international privé* qui prescrivent dans
certains cas au juge de trancher un litige par référence à une loi
étrangère (infra, ch. 5, s. 3) ; ou encore, la situation déjà mentionnée où le
droit se réfère à des normes non juridiques comme les règles éthiques,
déontologiques ou à des normes techniques.
3° Les règles secondaires déterminent également les modalités d’application
des règles juridiques. Par exemple, la Constitution confie au pouvoir
exécutif* le soin de prendre les mesures qu’impose l’exécution des lois (art.
108)20 et au pouvoir judiciaire* la tâche de trancher les contestations qui
surviennent à l’occasion de leur mise en œuvre (art. 144 et 145)21.
4° D’autres règles secondaires encore organisent la suppression de règles
juridiques, leur abrogation* ou leur annulation*, ou encore paralysent leur
application. Tel est le cas de l’article 159 de la Constitution qui impose au
juge de n’appliquer les règlements et arrêtés du pouvoir exécutif que pour
autant qu’ils soient conformes aux lois22. Le droit organise même certains
recours qui permettent d’obtenir l’annulation d’un règlement par le Conseil
d’Etat* pour contrariété à la loi, ou même l’annulation d’une loi par la
Cour constitutionnelle* pour violation de la Constitution (infra, ch. 3).
5° Le plus souvent, les règles secondaires organisent en outre des procédures
et des formalités dont le respect conditionne la validité des règles et des
décisions prises à cette occasion. Ainsi, par exemple, la procédure
d’élaboration de la loi (infra, ch. 3) réglée par la Constitution ou les règles
de procédure applicables aux procès civils et pénaux, régis par le Code
judiciaire et le Code d’instruction criminelle (infra, ch. 8).
20« Le Roi fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l’exécution des lois, sans pouvoir jamais
ni suspendre les lois elles-mêmes, ni dispenser de leur exécution ».
21 « Les contestations qui ont pour objet des droits civils sont exclusivement du ressort des
tribunaux. Toutefois, la loi peut, selon les modalités qu’elle détermine, habiliter le Conseil d’Etat
et les juridictions administratives fédérales à statuer sur les effets civils de leurs décisions » (art.
144). « Les contestations qui ont pour objet des droits politiques sont du ressort des tribunaux,
sauf les exceptions établies par la loi. » (art. 145). Voy. infra, ch. 3.
22 « Les cours et tribunaux n’appliqueront les arrêtés et règlements généraux, provinciaux et
locaux, qu’autant qu’ils seront conformes aux lois ». Voy. infra, ch. 5.
23Tel est le cas de H.L.A. HART, l’auteur de cette distinction, qui en fait le fondement de sa
définition du droit, dans son ouvrage classique Le concept de droit, Bruxelles, F.U.S.L., 1976.
24 On parle aussi de système auto-poïétique, car le droit se produit en quelque sorte lui-même.
Cette idée a été développée principalement par le sociologue du droit allemand NIKLAS LUHMANN.
25 J. HABERMAS, Droit et démocratie, Paris, Gallimard, 1997, spéc. pp. 386-414.
26 R. VON JHERING, La lutte pour le droit, Paris, Maresq, 1890.
27 H. DE PAGE, Droit naturel et positivisme juridique, Bruxelles, Bruylant, 1939, p. 40.
28 Sur l’Ecole de Bruxelles et son action notamment sur les questions mentionnées ici, voir B.
FRYDMAN, « Perelman et les juristes de l’Ecole de Bruxelles », in B. Frydman et M. Meyer, Chaïm
Perelman (1912-2012) : De la nouvelle rhétorique à la logique juridique, Paris, P.U.F., 2012, pp.
229-246 ; B. FRYDMAN et G. LEWKOWICZ (dir.), Le droit selon l’Ecole de Bruxelles, Bruxelles, éd. de
l’Académie royale de Belgique, à paraître (2016).
Au sens large et non technique, on appelle règles impératives les règles qui
s’imposent en manière telle que leurs destinataires n’ont pas les moyens d’en
écarter l’application. Au sein de cette catégorie, on distingue toutefois entre les
règles simplement impératives et les règles d’ordre public.
La règle d’ordre public * est « celle qui touche aux intérêts essentiels de
l’Etat ou de la collectivité, ou qui fixe, dans le droit privé, les bases juridiques
fondamentales sur lesquelles repose l’ordre économique ou moral de la société »29.
Relèvent en tout premier lieu de l’ordre public, les dispositions de la
Constitution*. Celle-ci fixe les règles essentielles de l’organisation des pouvoirs
publics ainsi que les droits fondamentaux des citoyens. Plus largement, les règles
du droit public*, qui régissent les attributions et l’exercice des pouvoirs publics
appartiennent à cette catégorie, ainsi que les matières du droit fiscal*, du droit
administratif* ou de la fonction publique. Sont également d’ordre public, toutes
les dispositions du droit pénal*, ainsi que de la procédure pénale*. Plus
généralement, les règles de l’organisation judiciaire sont d’ordre public, mais non
pas toutes les dispositions qui règlent la procédure civile*.
Bien que le droit privé* règle, comme son nom l’indique, les rapports privés
entre les personnes, il contient néanmoins certaines dispositions d’ordre public.
Tel est le cas pour une grande partie du droit des personnes*, et notamment du
droit familial*. Sont d’ordre public, les règles qui fixent l’état et la capacité des
personnes*, le statut du corps humain, certains rapports de couple, comme le
mariage, le divorce et leurs suites, les rapports de famille, comme la garde et
l’autorité des enfants. Mais il existe également des règles d’ordre public dans le
domaine patrimonial ou économique. Ainsi, l’obligation de souscrire une
assurance de la responsabilité civile* en matière de véhicules à moteur est
d’ordre public30. Il existe même des règles d’ordre public dans le domaine des
contrats*, où les parties se fixent normalement à elles-mêmes leurs propres
règles.
29 Cette définition classique a été forgée par HENRI DE PAGE dans son célèbre Traité élémentaire
de droit civil belge (3e éd., t. 1, p. 111). Elle a été reprise telle quelle et de manière constante par
la Cour de cassation (Cass., 9 décembre 1948, Pas., 1948, I, p. 699), ainsi que par le Conseil d’Etat
(avis de la section de législation, 7 décembre 1989, Doc. Parl., Sénat, 1989-1990, n° 916/1, p.
177).
30 Cette obligation est prévue par la loi du 21 novembre 1989 relative à l’assurance obligatoire de
31 « Le mineur est l’individu de l’un et de l’autre sexe qui n’a point encore l’âge de 18 ans
accomplis » (modifié par l’art. 1er de la loi du 19 janvier 1990).
32 L’article 3 du Code civil a été abrogé par la loi du 16 juillet 2004 portant Code de droit
international privé, M.B., 27 juillet 2004. L’article 34, § 1er de cette législation est désormais
explicite : « Hormis les matières où la présente loi en dispose autrement, l’état et la capacité d’une
personne sont régis par le droit de l’Etat dont celle-ci a la nationalité ».
33 Voy. l’article 21 du Code de droit international privé.
34 « On ne peut contracter un second mariage avant la dissolution du premier ».
35 « Quiconque, étant engagé dans les liens du mariage, en aura contracté un autre avant la
36Voy. les articles 1 à 12 de la section insérée dans le Code civil par la loi du 20 février 1991 à la
suite de l’art. 1762bis de ce Code.
37 Par exemple : la loi du 6 avril 2010 relative aux pratiques du marché et à la protection du
énoncent ainsi un régime juridique « par défaut », qui vient compléter tous les
aspects de leurs relations que les sujets de droit n’ont pas réglés spécifiquement.
Il ne faut donc pas confondre « supplétif » et « facultatif ». Les règles supplétives
sont bien obligatoires, mais elles ne s’appliquent que de manière subsidiaire. Les
règles supplétives relèvent essentiellement du droit privé*. Elles sont
particulièrement nombreuses dans le domaine des contrats*.
Imaginons, par exemple, que deux personnes s’accordent sur la vente d’une
voiture d’occasion à un prix déterminé. Cet accord sur les éléments essentiels de
la vente (la chose et le prix) suffit à former un contrat. Il n’est pas nécessaire que
les parties en disent davantage, ni même qu’elles rédigent un écrit (sinon dans le
souci de se réserver une preuve* de leur engagement). Mais que se passera-t-il si
un doute ou un désaccord survient quant à la date de la livraison du véhicule ou
du paiement du prix ? Qui subira la perte en cas de vol ou de destruction du
véhicule entre le moment de l’accord et celui de la livraison ? A partir de quand
comptera-t-on des intérêts de retard sur le prix ? Quelle garantie le vendeur
offre-t-il que le véhicule soit en bon état ? etc. Autant de questions que les parties
n’ont peut-être pas envisagées au moment de conclure la vente et qui sont réglées
par les dispositions supplétives du droit des contrats en général et de la vente en
particulier.
Cependant, les parties auraient très bien pu décider de régler tous ces
points par avance, à leur meilleure convenance. Par exemple, spécifier que le
véhicule est livré « dans l’état où il est, bien connu de l’acheteur » ce qui est de
nature à limiter la garantie donnée par le vendeur non professionnel. Elles
auraient pu fixer une date précise pour la livraison ou le paiement.
Le statut obligatoire de la règle n’est pas toujours facile à déterminer.
Parfois, la loi mentionne elle-même la sanction qui frappe sa violation. Mais
souvent aussi, tel n’est pas le cas. En outre, il ne suffit pas toujours de se référer
à la branche du droit* dont la règle relève. Ainsi, le droit de la procédure* relève
en principe de l’ordre public*, mais le droit judiciaire* contient bon nombre de
dispositions auxquelles il est permis aux parties de déroger. En ce qui concerne la
compétence des juges civils (infra, ch. 3), la compétence d’attribution* est d’ordre
public mais la compétence territoriale* est en principe supplétive. A l’inverse, le
droit des contrats*, qui est la sphère de l’autonomie de la volonté*, contient non
seulement des dispositions supplétives mais aussi, on l’a vu, bon nombre de
dispositions impératives* ou même d’ordre public*. Pour conclure sur ce point, on
voit donc que l’intensité du caractère obligatoire des règles est affaire non de
principe mais de degrés, et parfois sujet à discussions et à controverses.
A. Définitions
1. L’exécution forcée
42 Le régime de l’astreinte est réglé aux articles 1385bis à 1385nonies du Code judiciaire.
un terrain ou à un local. Dans tous les cas, l’astreinte permet de faire pression
sur la personne sans pour autant exercer de contrainte matérielle.
2. La réparation
Celui qui ne respecte pas une règle de droit ou viole ses obligations commet
une faute* qui est susceptible d’engager sa responsabilité civile*.
On parle de responsabilité contractuelle*, lorsque l’obligation qui a été mal
exécutée trouvait sa source dans un contrat. Dans les autres cas, la
responsabilité est dite extra-contractuelle*, aquilienne* ou encore quasi-
délictuelle*.
Pour être établie en droit, la responsabilité suppose la réunion de trois
éléments distincts.
1° La faute*, qui peut résulter non seulement de la violation d’une règle ou
d’une obligation déterminée, mais aussi de la violation de l’obligation
générale de diligence et de prudence qui s’impose à tous dans la vie en
société. Le respect de cette obligation générale est évalué par référence au
comportement du bon père de famille*, c’est-à-dire d’une personne
normalement soucieuse et désireuse de ne pas causer de dommage à
autrui.
2° Le dommage* ou préjudice*, c’est-à-dire le tort causé à autrui, qui peut
être porté à sa personne (dommage corporel), à ses biens (dommage
matériel) ou encore à son esprit (dommage moral).
3° Le lien de causalité* entre la faute et le dommage. L’existence de ce lien
s’apprécie dans notre droit d’après la théorie de l’équivalence des
conditions : il faut, mais il suffit de démontrer que sans la faute le
dommage ne se serait pas produit tel qu’il s’est produit.
Lorsque ces trois éléments sont réunis, la personne responsable devra
répondre le cas échéant de son acte, c’est-à-dire réparer le dommage que son
manquement a causé à autrui (art. 1382 du Code civil). La responsabilité peut
non seulement découler de la commission d’un acte dommageable, mais encore
d’une abstention d’agir, lorsque celle-ci est fautive (art. 1383 du Code civil).
On est responsable non seulement de son fait, mais également des
dommages causés par les personnes et les choses que l’on a sous sa garde ou sous
sa surveillance.
Les cas de responsabilité du fait d’autrui sont au nombre de trois :
1° Les parents sont responsables des dommages causés par les enfants
mineurs dont ils ont la garde (art. 1384 al. 2 du Code civil).
2° De même, les enseignants sont responsables de leurs élèves et apprentis
pendant qu’ils en ont la surveillance (art. 1384 al. 4 du Code civil).
3. La répression
43 Certains droits (notamment dans des pays de common law), mais non le droit belge,
connaissent les dommages-intérêts punitifs qui, comme leur nom l’indique, ont pour objet de
punir l’auteur du manquement en l’obligeant à verser aux victimes une somme d’argent qui
excède, parfois de beaucoup, le dommage réellement subi.
4. L’annulation
Enfin, il faut faire une place spécifique à l’annulation* par laquelle le droit
anéantit un acte juridique formé en violation de ses règles. L’annulation
constitue une forme d’exécution du droit qui supprime ce qui lui est contraire.
Elle peut en outre avoir un effet réparateur (par exemple, à l’égard de la partie
protégée dans les nullités relatives*), voire répressif, en vouant à l’échec les
entreprises illégales des auteurs de l’acte annulé (spécialement dans les nullités
absolues*).
L’annulation peut frapper les actes juridiques tant publics que privés. En
matière publique, la Cour constitutionnelle* peut annuler une loi*, un décret* ou
une ordonnance* pris en violation de la Constitution* ou des lois spéciales* de
réforme institutionnelle fixant la répartition des compétences entre l’autorité
fédérale et les entités fédérées. Le Conseil d’Etat* peut annuler les arrêtés et
règlements pour violation de la loi, abus ou excès de pouvoir. En matière
44 Cass., 14 juillet 1924, Pas., 1924, I, p. 474 (« punition ») et Cass., 16 mars 1970, Pas., 1970, I, p.
50 Loi instaurant des tribunaux de l’application des peines du 17 mai 2006, M.B., 15 juin 2006.
51 Voyez spécialement HANS KELSEN, Théorie pure du droit, trad. Ch. Eisenmann, Paris,
L.G.D.J., 1999, ainsi que le courant positiviste dont il est le chef de file.
52 Ch. 7 de la Charte des Nations Unies.
Ière partie
L’ORDRE JURIDIQUE
En un premier sens, qui est aussi celui du langage courant, l’ordre signifie
le commandement. Il renvoie à la dimension impérative, prescriptive du droit.
Ainsi Hobbes, l’un des fondateurs de la pensée juridique moderne, définit la règle
de droit comme « un commandement adressé par un supérieur à un homme
préalablement obligé à lui obéir »54. Le droit trace ainsi une frontière entre ceux
qui commandent et ceux qui sont censés obéir, entre les gouvernants et les
gouvernés, entre les autorités qui exercent le pouvoir et les sujets de droit qui le
subissent. En ce sens, le sujet de droit* désigne non pas le titulaire d’un droit
subjectif*, mais bien celui qui est assujetti aux règles juridiques et aux autorités
qui les formulent. Cette dimension politique met particulièrement l’accent sur la
volonté de ceux qui commandent, laquelle doit être obéie, ce qui suppose que
l’autorité ait les moyens de la faire respecter. La sanction et la force publique
jouent donc ici un rôle essentiel.
Dans cette dimension politique, l’ordre juridique désigne :
- d’un point de vue organique : les institutions qui produisent et appliquent
le droit ;
- d’un point de vue dynamique : les procédures d’élaboration et d’application
des règles juridiques par ces institutions ;
- d’un point de vue statique : les sources formelles du droit, soit les textes
produits par les institutions selon les procédures d’élaboration et
d’application du droit.
Les chapitres 3 et 4 du cours seront consacrés respectivement aux
institutions et aux sources du droit.
Enfin, on désigne encore par ordre juridique l’ordre social que le droit
contribue à créer ou à maintenir. Dans cette troisième optique, le droit est
envisagé moins en lui-même que par les effets qu’il produit dans la réalité. Cette
dimension est évidemment très importante dans la mesure où elle affecte
directement la société et la vie des citoyens. L’étude des rapports entre droit et
société comporte deux volets particulièrement importants.
D’une part, les principes de base qui régissent les rapports entre, d’un côté,
l’Etat et le droit qu’il produit, et, de l’autre, la société et les citoyens. Deux
concepts fondamentaux dominent la matière : l’Etat de droit, qui impose que
l’Etat soit lui-même soumis au droit dont il est le garant, et la démocratie, qui
suppose une participation des citoyens à l’exercice du pouvoir politique.
D’autre part, les fonctions que le droit prétend remplir, ainsi que les
valeurs qui les sous-tendent. Le droit est censé contribuer à établir ou à rétablir
l’ordre et la sécurité publique, par opposition à un état d’anarchie ou de troubles.
Mais il doit également garantir la liberté individuelle et une certaine forme
d’égalité entre les sujets de droit. Plus largement, le droit contribue à la
régulation des sociétés et des relations sociales. Les règles et les procédures
juridiques sont ici conçues comme des moyens de protéger et de garantir le
respect de ces fonctions et valeurs fondamentales. Elles peuvent être jugées à
l’aune de leurs résultats.
Le chapitre 6 de ce cours sera consacré, dans cette perspective, à l’étude
des principes juridiques de l’Etat de droit et de la démocratie, ainsi qu’à l’examen
des fonctions du droit et des valeurs qui sous-tendent l’ordre juridique.
59P. MAGNETTE et E. REMACLE, Le nouveau modèle européen, vol. 1, Bruxelles, PUB, 2000 ; J.M.
Ferry, La question de l’Etat européen, Paris, Gallimard, 2000 ; F. OST et M. VAN DE KERCHOVE, De
la pyramide au réseau?, Bruxelles, Publications des Facultés Universitaires St-Louis, 2002, pp.
65-78.
60 Recueil C.J.C.E., 1964, pp. 1159-1160, notre accent.
61 C.J.C.E., 5 février 1963, 26/62, Rec., p.1.
1. Notion
certainement pas être considérée, dans son état actuel, comme une forme
de gouvernement mondial. Pour autant, il est incontestable que les
instances de régulation et de concertation se multiplient et intensifient
leurs actions dans l’environnement international.
2° Sur le plan social, il serait pour le moins abusif de qualifier d’ordonné l’état
actuel du monde, où les guerres demeurent fréquentes, les conditions
d’existence souvent précaires, les inégalités criantes, et dont une
succession de crises paraît guider l’évolution chaotique. Pour autant, il
semble bien que la coordination des activités humaines s’accroisse dans un
environnement global où les différentes parties du monde voient leur sort
de plus en plus lié les unes aux autres. En outre, malgré ses violations, le
droit international s’impose, dans les discours des acteurs internationaux,
comme l’instance commune de référence et de légitimation pour
l’évaluation et parfois le règlement de leurs relations et de leurs différends.
3° Sur le plan logique, le foisonnement de traités et d’organisations liant,
suivant une géométrie variable, des parties différentes, en vertu de formes
disparates, peut également donner une impression de désordre. Pour
autant, les règles et les institutions du droit international présupposent
nécessairement la référence à un ordre juridique spécifique, organisé de
manière cohérente sur la base de principes autonomes. Cet ordre juridique
dispose de sources, d’institutions, de procédures, de principes généraux et
de règles qui lui sont propres. Il forme une discipline spécifique, cultivée
par une communauté de spécialistes et mise en œuvre dans des enceintes
particulières.
En conclusion, l’ordre juridique international représente moins un fait
constatable qu’une idée régulatrice indispensable à la conception, à
l’organisation, à la mise en œuvre et à l’évaluation des relations entre les Etats
qui composent la communauté internationale.
(Tora), dans les droits dits hindous (Védas) et dans les droits du Sud-est
asiatique reposant sur le bouddhisme.
I. L’ordre constitutionnel
A. La nation
67S. GOYARD-FABRE, Les principes philosophiques du droit politique moderne, Paris, P.U.F., 1997,
pp. 325 et s.
68 E. SIEYES, Qu’est-ce que le Tiers-Etat (1789).
69 FR. CAPOTORTI, Etude des droits des personnes appartenant aux minorités ethniques,
religieuses et linguistiques, ONU, N.Y., 1991, cité par CH-E. LAGASSE, Les nouvelles institutions
politiques de la Belgique et de l’Europe, Bruxelles, Erasme, 2003, pp. 428 et s.
70 En tant qu’elle touche, à la fois et de manière contradictoire, au droit souverain des peuples à
disposer d’eux-mêmes et au principe de non-ingérence dans les affaires intérieures des Etats.
2. La nation belge
B. Les pouvoirs
73 Nous verrons cependant que comprise de manière absolue, elle est impraticable. L’Etat belge
est en réalité fondé sur une séparation des pouvoirs tempérée par des mécanismes de
collaboration et de contrôle entre ceux-ci (infra, ch. 6).
74 Des consultations populaires peuvent toutefois être organisées au niveau local et régional
l’accent sur les organes qui les exercent. Au rang de pouvoirs, le titre III de la
Constitution range aujourd’hui :
- le pouvoir législatif fédéral composé de trois branches : la Chambre des
représentants*, le Sénat* et le Roi* ;
- le pouvoir exécutif fédéral chapeauté par le Roi et qui comprend les
ministres*, les secrétaires d’Etat* ainsi que les services publics* dont ils
ont la charge ;
- les pouvoirs fédérés des communautés* et des régions* qui sont de nature
législative et exécutive et qui sont exercés respectivement par des
parlements et par des gouvernements ;
- le pouvoir juridictionnel qui se compose des cours et tribunaux de l’ordre
judiciaire*, mais aussi des juridictions de l’ordre administratif* et de la
Cour constitutionnelle* ;
- les pouvoirs subordonnés des provinces* et des communes*.
de l’Europe, le français est la langue dominante parmi les classes dirigeantes qui
concentrent le pouvoir politique en vertu du suffrage censitaire. Seuls ceux qui
paient le cens, c’est-à-dire l’impôt, et qui vivent dans la prospérité sont électeurs
et éligibles. Le français s’impose ainsi comme la langue officielle du pays tandis
que la plus grande partie de la population, tant au Sud qu'au Nord, utilise divers
dialectes dans la vie de tous les jours. A cette époque, le français est la langue des
lois et des arrêtés, de la justice, de l’enseignement et de l’armée. L’emploi des
langues est toutefois libre. Dans ses rapports avec les autorités, chacun peut se
servir du français ou du flamand.
Tandis que dans le Sud du pays, le français gagne toutes les couches de la
population et remplace peu à peu les dialectes wallons, le Nord du pays voit se
développer un « mouvement flamand » qui défend l’affirmation linguistique et
culturelle de la Flandre. Dans la seconde moitié du XIXe siècle, les avancées du
flamand sont visibles dans le paysage politique belge. En 1865, un parlementaire
prête serment dans cette langue alors que le français est traditionnellement
utilisé dans les assemblées législatives. Ensuite, différentes lois reconnaissent
l’emploi du flamand dans la magistrature (1873), dans l’administration (1878),
dans l’enseignement secondaire (1883) et universitaire (1890), dans l’armée
(1913). En 1898, la loi dite « d’égalité » est adoptée : elle établit le principe
d'équivalence, sur le plan juridique, des textes flamands et français des lois et
arrêtés royaux. Le flamand accède ainsi au statut de langue officielle. Désormais,
les lois belges sont votées, sanctionnées, promulguées et publiées dans les deux
langues au Moniteur belge*, le Journal officiel des textes normatifs de la
Belgique. Mais ce n’est qu’en 1961 qu’un texte autorisé de la Constitution sera
disponible en néerlandais. Il faudra attendre 1991 pour la version allemande.
Peu à peu, les dialectes flamands sont unifiés sur la base de la langue
néerlandaise. Celle-ci est utilisée, en Flandre, par l'administration et dans toutes
les communications au public, tandis qu’elle est enseignée dans les écoles et enfin
dans les universités à partir de 1930. L’adoption du suffrage universel masculin
dès 1919 confère à la Flandre le poids nécessaire au parlement pour donner à ses
revendications linguistiques et culturelles une véritable dimension politique.
Dans le domaine de l’emploi des langues, les lois vont se succéder marquant le
passage d’une approche individuelle de cette matière vers une conception
collective. Les régions linguistiques se mettent progressivement en place et, avec
elles, l’unilinguisme s’instaure dans la majeure partie du pays. Dans les années
soixante, la frontière linguistique est définitivement tracée. Quatre régions
linguistiques* sont créées75 :
- la région de langue néerlandaise qui comprend les cinq provinces actuelles
du Nord du pays (Flandre orientale, Flandre occidentale, Anvers, Brabant
flamand76 et Limbourg) ;
fonctionnement de l’Etat fédéral, ainsi que pour créer un lieu de rencontre pour
les parlements de communauté et de région85.
De prime abord, le visage institutionnel de la Belgique est
particulièrement délicat à saisir car il cumule deux types d’entités fédérées : les
communautés et les régions. Un tel chevauchement s’explique par des motifs
historiques. Nous avons vu que les revendications de la Flandre étaient
essentiellement d’ordre linguistique et culturel. Elles vont donner naissance, en
1970, aux communautés, qualifiées à l’origine de « culturelles ». A ce
« mouvement flamand » va répondre, principalement après la seconde guerre
mondiale, un « mouvement wallon », notamment mû par des considérations
économiques et sociales. Les industries charbonnières et sidérurgiques qui
formaient jusqu’alors l’épine dorsale de l’économie wallonne sont en déclin et
cette situation appelle la création d’infrastructures modernes pour enrayer
l’enlisement. Or, la courbe démographique décroissante, plus marquée en
Wallonie qu’en Flandre, se fait sentir dans la représentation parlementaire et
conduit la Wallonie à vouloir prendre son destin économique en main en se
dotant d’entités politiques compétentes dans ces matières. Les régions sont ainsi
nées en même temps que les communautés, même s’il faut attendre les années
1980 pour qu’elles soient véritablement organisées et pourvues d’institutions
propres.
B. L’autorité fédérale
2011-2012, n° 5-1720/1, p. 2.
Il s’agit, notamment, de :
- la justice et l’organisation du pouvoir judiciaire ;
- la défense ;
- la politique étrangère qui comprend notamment les relations
diplomatiques de la Belgique et la coopération au développement, sous
réserve des compétences internationales confiées aux communautés et aux
régions ;
- l’union économique et monétaire : la politique monétaire, la protection de
l’épargne, la politique des prix et des revenus, le droit de la concurrence, le
droit des pratiques du commerce, la protection des consommateurs, le droit
commercial* et le droit des sociétés, les conditions d’accès à la profession,
la propriété intellectuelle, le droit du travail*, etc. ;
- les affaires intérieures : la police, la sûreté publique, les plans
« catastrophe », la politique d’immigration, etc. ;
- le nucléaire ;
- les entreprises publiques, telles que la Société nationale des chemins de fer
belges, l’aéroport de Bruxelles-National, la Poste et certains
établissements culturels et scientifiques nationaux (Théâtre Royal de la
Monnaie, Palais des Beaux-Arts, Bibliothèque Royale, dite l’Albertine,
etc.) ;
Suite à la sixième réforme de l’Etat, des aspects de la sécurité sociale
(communautarisation des allocations familiales notamment) et du droit civil
(régionalisation du droit du bail) échappent à la compétence de l’Etat fédéral.
D’autres compétences ont également éte transférées vers les entités fédérées
comme les soins de santé, la sécurité routière, les maisons de justice, etc.86
entités fédérées.
par exemple, la Communauté française est compétente pour les écoles, les
universités (notamment l’U.L.B.) et les théâtres francophones de Bruxelles ou
pour les cliniques universitaires Saint-Luc qui dépendent de l’U.C.L. Quant au
reste de l’exercice des compétences communautaires à Bruxelles, comprendre le
système institutionnel mis en place dans la capitale belge relève presque de la
gageure. Qu’il nous suffise de dire ici qu’une loi spéciale* a institué trois
collectivités politiques qui prennent en charge à Bruxelles certaines matières
communautaires : la Commission communautaire française (dite « Cocof »), la
Commission communautaire flamande (dite « Cocon ») et la Commission
communautaire commune (dite « c.c.c. » ou « Cocom »). Chacune de ces
collectivités publiques est dotée d’une assemblée et d’un exécutif (nommé Collège)
et est, dans une certaine mesure, soumise à l’autorité de tutelle* des
Communautés flamande et/ou française89.
89Pour plus de détails, voy. M. UYTTENDAELE, Trente leçons de droit constitutionnel, Bruxelles,
Bruylant, 2011, pp. 751 et s.
a) Principe
Ces compétences d’attribution sont exclusives en ce sens que l’Etat fédéral n’est
plus habilité à intervenir dans les matières qu’elles visent. Il n’y a donc pas en
Belgique, contrairement à d’autres Etats fédéraux, de compétences concurrentes.
A défaut d’attribution expresse, les communautés et régions peuvent
néanmoins être compétentes en application de la théorie des pouvoirs implicites*.
En vertu de cette théorie, les entités fédérées reçoivent des compétences qui ne
leur ont pas été formellement attribuées si celles-ci sont nécessaires à l’exercice
des compétences qu’elles ont expressément reçues. Au nom du principe de l’effet
utile des compétences attribuées à titre principal, la règle des pouvoirs implicites
prévaut dans tout Etat fédéral. Il s’agit d’éviter que les compétences confiées aux
entités fédérées ne demeurent symboliques. Ainsi, par exemple, les régions ont
été reconnues compétentes par la Cour constitutionnelle* pour limiter le droit de
propriété (qui relève du droit civil et donc, en principe, du fédéral) afin de
poursuivre leur politique en matière d’aménagement du territoire ou de
conservation de la nature (domaines qui ont été confiés aux régions)91.
Afin d’assurer une gestion cohérente de certains secteurs interdépendants,
des accords de coopération* peuvent être conclus entre l’autorité fédérale, les
communautés et les régions. Ils permettent aux différentes entités politiques du
royaume d’exercer conjointement des compétences propres ou de développer des
initiatives en commun. De tels accords de coopération ont notamment été conclus
entre les régions pour régler les questions relatives aux routes et autoroutes, aux
voies hydrauliques et aux services de transport en commun dépassant les limites
territoriales d’une seule région.
b) Les communautés
c) Les régions
Au même titre que les communautés, les régions sont compétentes pour la
recherche scientifique et les relations internationales dans la sphère de leurs
attributions.
d) Difficultés
92Par exemple, les Communautés sont libres de décider du contenu des programmes du primaire
et du secondaire, sous la réserve de l’obligation faite aux écoles publiques de prévoir un cours de
L’économie.- Elle relève des régions, mais l’Etat fédéral reste compétent
dans la mesure nécessaire au maintien de l'union économique et monétaire de la
Belgique. Cette union économique et monétaire est aujourd’hui largement définie
par l’Union européenne. C’est à l’Etat fédéral qu’il revient de gérer, dans le cadre
européen, la politique monétaire, la protection de l’épargne, la politique générale
des prix et des revenus, le droit du travail*, la propriété intellectuelle, le droit de
la concurrence, etc.
Le transport.- Il relève des régions, mais l’autorité fédérale reste
compétente pour la S.N.C.B., l’aéroport de Bruxelles-National et les aérodromes
militaires.
Au quotidien, cet enchevêtrement de compétences ne facilite pas le travail
des responsables politiques. Prenons, par exemple, la directive* européenne du
29 juin 2000, relative à la mise en œuvre du principe de l'égalité de traitement
entre les personnes sans distinction de race ou d'origine ethnique93. Ce texte
européen vise à lutter contre les discriminations fondées sur la « race » ou
l’origine ethnique dans différents domaines dont l’accès à l'emploi, la formation
professionnelle, les conditions de travail et le licenciement. Il protège notamment
les personnes qui se voient refuser un travail en raison de la couleur de leur peau
ou qui sont harcelées sur leur lieu de travail pour un motif similaire. Afin que
cette directive européenne sorte tous ses effets en Belgique, les autorités belges
ont dû la transposer, endéans un certain délai, dans un texte législatif. Pour que
cette transposition soit complète, l’Etat fédéral, les communautés et les régions
ont dû légiférer puisque la matière de l’emploi au sens large est éclatée entre les
différentes entités territoriales habilitées à exercer la fonction législative94. Dans
la pratique, de telles situations créent souvent maints quiproquos quant aux
tâches et responsabilités incombant à chacun.
A cet enchevêtrement de compétences qui n’est pas toujours aisément
décryptable s’ajoute une disparité de compétences entre les différentes entités
fédérées. On parle, à cet égard, du caractère asymétrique du fédéralisme belge.
Au Nord du pays, la Communauté flamande et la Région flamande, qui
correspondent toutes deux à la région linguistique de langue néerlandaise, ont
fusionné leurs organes législatifs et exécutifs. Il existe donc un seul parlement
flamand et un gouvernement flamand unique, compétents à la fois pour les
matières communautaires et régionales. Au Sud du pays, une des réponses
politiques fut de parler de la Fédération Wallonie-Bruxelles en lieu et place de la
Communauté française dont le parlement se présente comme l'assemblée
représentative de la population de la Région wallonne de langue française et des
morale et de religion. Les religions reconnues sont les cultes catholique, protestant, anglican,
orthodoxe, israélite et islamique.
93Directive 2000/43/CE du Conseil du 29 juin 2000, Journal officiel n° L 180 du 19 juillet 2000,
pp. 22 à 26.
94 Au moment de la transposition, l’autorité fédérale réglait les conditions d’accès au travail
salarié, non salarié ou indépendant, les conditions d'emploi et de travail, le licenciement. Les
communautés s’occupaient de la formation professionnelle. Les régions étaient compétentes en
matière de placement des travailleurs et des demandeurs d’emploi.
99 Cette motion de méfiance est dite « constructive » dans le sens où sa recevabilité dépend de la
100Comme organismes d’intérêt publics régionaux, on peut, par exemple, épingler l’Office régional
bruxellois de l’emploi (Actiris), la Société régionale wallonne du transport ou le Hoge Raad voor
Toerisme.
Matières
Compétences Matières communautaires Matières régionales
fédérales
Parlement
fédéral Parlement de la
Parlement de la Parlement de la
Pouvoir Parlement Parlement Région de
(Chambre des Communauté Communauté
législatif flamand wallon Bruxelles-
représentants germanophone française
Capitale
et Sénat)
Introduction au droit
Gouvernement
Gouvernement Gouvernement Gouvernement
fédéral (Roi, Gouvernement Gouvernement
Pouvoir de la de la de la Région de
ministres et de la Région
exécutif Communauté Communauté flamand Bruxelles-
secrétaires wallonne
germanophone française Capitale
DROI-C-1001_A
FRYDMAN B. et RORIVE I.
FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Volume 1
1. Les communes
b) L’autonomie communale
101 Art. 41, al. 1er. Voy. aussi l’article 162 de la Constitution.
102 Auparavant, le nombre des communes s’élevait à 2.359.
103Loi du 27 janvier 1999 modifiant la loi du 19 octobre 1921 organique des élections provinciales,
la nouvelle loi communale et la loi électorale communale, et portant exécution de la directive du
Conseil de l'Union européenne n° 94/80/CE du 19 décembre 1994, M.B., 30 janvier 1999.
104Loi du 19 mars 2004 visant à octroyer le droit de vote aux élections communales à des
étrangers, M.B., 23 avril 2004.
3°) Le bourgmestre
Nommé par le gouvernement régional, le bourgmestre est un organe
mixte : à la fois représentant des autorités supérieures et de sa commune. En
tant que représentant des autorités supérieures, le bourgmestre est responsable
de la mise en œuvre et du respect des législations fédérales, communautaires et
régionales. En tant qu’autorité locale, le bourgmestre, qui est l’émanation de la
majorité politique du conseil, dirige l’administration communale et préside les
réunions du conseil et du collège communal.
Le rôle du bourgmestre en matière de police et de maintien de l’ordre sur
le territoire communal est très important. Le corps de la police locale106 est placé
sous son autorité. Dans certaines circonstances, le bourgmestre est habilité à
prendre des mesures limitant les libertés individuelles en vue d’assurer l’ordre
public. Le bourgmestre peut, par exemple, ordonner la fermeture provisoire d’un
établissement qui ne répond pas aux mesures de sécurité prescrites en matière
de prévention contre les incendies. Dérogeant au pouvoir de principe du conseil
communal en matière réglementaire, la loi confère au bourgmestre le soin de
faire des ordonnances de police* « en cas d’émeutes, d’attroupements hostiles,
d’atteintes graves portées à la paix publique ou d’autres événements imprévus
lorsque le moindre retard pourrait occasionner des dangers ou des dommages
pour les habitants »107. En vertu de ce pouvoir réglementaire exceptionnel, le
bourgmestre se substitue juridiquement au conseil communal : il peut dès lors
105 Article 119 de la nouvelle loi communale contenue dans l’arrêté royal de coordination du 24
assortir les ordonnances qu’il prend de peines de police* pour en réprimer les
infractions.
2. Les provinces
b) L’autonomie provinciale
108 Sur la situation particulière de Bruxelles-Capitale, voy. CH-E. LAGASSE, Les nouvelles
institutions politiques de la Belgique et de l’Europe, Bruxelles, Erasme, 2003, pp. 492 et s.
109 Article 41 de la Constitution.
3°) Le gouverneur
Le gouverneur est le commissaire des autorités supérieures dans la
province. Il est nommé et révoqué par le gouvernement régional, sur avis
conforme du Conseil des ministres*, en dehors des conseillers provinciaux, mais
généralement parmi les habitants de la province.
La mission impartie au gouverneur est double. D’une part, il est l’organe
des autorités supérieures. En cette qualité, il exerce d’importantes compétences
d’intérêt général : veiller au respect, par les autorités provinciales, des lois,
arrêtés royaux, décrets et arrêtés des communautés et régions ; assurer le
110 Article 85 de la loi provinciale du 30 avril 1836, Bull. off. XIII, n° 209.
A. Le pouvoir législatif
1. Présentation
Duché du Luxembourg, ainsi que dans certains Länders autrichiens et cantons suisses.
115 Ce suffrage universel plural s’organisait de la manière suivante : une voix pour les hommes de
25 ans, une voix supplémentaire pour les pères de famille de 35 ans et certains propriétaires, une
voix supplémentaire pour les diplômés, avec un maximum de trois voix par personne.
2. Composition
1°) Le Roi
Si le Roi est avant tout le chef du pouvoir exécutif, il constitue également
la troisième branche du pouvoir législatif fédéral. La participation du Roi au
pouvoir législatif est une des manifestations du caractère non étanche de la
séparation des pouvoirs* et des mécanismes de collaboration qui relient les
différents pouvoirs. Derrière la personne du Roi se profile, dans la Constitution,
celle de ses ministres. En toute hypothèse, les actes du Roi sont toujours
contresignés par un ministre qui en assume la responsabilité119.
pouvoir exécutif.
120 Art. 63 de la Constitution.
121 Art. 65 de la Constitution.
droits civils et politiques122, c’est-à-dire qui n’en ont pas été déchus à la suite
d’une condamnation pénale123.
Pour être éligible, le candidat doit, au jour des élections, remplir quatre
conditions en vertu de la Constitution124 : être belge ; être domicilié en Belgique ;
avoir 18 ans ; jouir de ses droits civils et politiques.
3°) Le Sénat
Composé de 60 sénateurs125, le Sénat s’est profondément transformé à la
suite de la réforme de l’Etat et de la fédéralisation de la Belgique. La mutation
est complète depuis que le Sénat est devenu, en 2014, une « Chambre des Etats »,
c’est-à-dire une assemblée représentant exclusivement les intérêts régionaux et
communautaires.
Il y a lieu de distinguer deux catégories de sénateurs qui doivent répondre
aux mêmes conditions d’éligibilité126 que les députés :
- les 50 sénateurs des entités fédérées qui exercent leur mandat de sénateur
en parallèle avec leur mandat de représentant au sein d’un parlement de
communauté et/ou de région.
o Le groupe linguistique néerlandais est composé de 29 sénateurs
désignés par le Parlement flamand en son sein ou au sein du groupe
linguistique néerlandais du Parlement de la Région de Bruxelles-
Capitale.
o Le groupe linguistique français est composé de 20 sénateurs : 10
sénateurs sont désignés par le Parlement de la Communauté
française, 8 par le Parlement de la Région wallonne et 2 par le
groupe linguistique français du Parlement de la Région de
Bruxelles-Capitale.
o Un sénateur est désigné par le Parlement de la Communauté
germanophone.
- les 10 sénateurs cooptés sont désignés par les sénateurs des entités
fédérées. Cette cooptation a lieu par groupe linguistique (les 29 sénateurs
flamands désignent six membres et les 20 francophones font de même pour
quatre) sur la base des résultats des élections à la Chambre et en suivant
122 Au rang des droits civils se trouvent, notamment, le droit de faire partie d’un conseil de
FEDERAL
10 1
29
8
2 (fr.) Parlement de la
Parlement de la
Vlaamse Raad Communauté
Communauté française
germanophone
124 membres
COMM.
94 membres
25 membres
19
Introduction au droit
75 6
Parlement de la Région de
Parlement régional wallon
Bruxelles-Capitale 118 25
REGIONS
75 89
Corps électoral
DROI-C-1001_A
FRYDMAN B. et RORIVE I.
FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Volume 1
2°) Incompatibilités
Le statut des parlementaires se caractérise par un régime assez strict
d’incompatibilité qui leur interdit de cumuler leur mandat avec une série d’autres
fonctions.
Certaines incompatibilités sont liées à la séparation des pouvoirs*. Un
parlementaire ne peut, par exemple, être en même temps ministre129 ou
secrétaire d’Etat d’un gouvernement, qu’il soit fédéral, communautaire ou
régional. Il s’agit d’empêcher que la même personne se retrouve à la fois dans le
rôle du contrôleur et du contrôlé. Chaque gouvernement est en effet responsable
devant son parlement (infra, ce chapitre, point B).
D’autres règles d’incompatibilité visent à maintenir la répartition des
compétences entre les trois niveaux de pouvoirs. Un parlementaire fédéral ne
peut être membre d’une assemblée régionale ou communautaire, à l’exception
bien évidemment des 50 sénateurs des entités fédérées. De même, un
parlementaire fédéral ne peut exercer aucune fonction au sein de la Cour
constitutionnelle*, que ce soit en qualité de juge, de référendaire* ou de greffier.
Enfin, l’objectif de certaines incompatibilités est d’empêcher les cumuls qui
mettraient à mal la disponibilité des parlementaires en leur laissant peu de
temps pour mener à bien leur tâche de représentants de la nation. A cette fin, un
parlementaire ne peut, par exemple, exercer une charge universitaire à temps
plein.
3°) Immunités
Le statut des parlementaires se caractérise également par un régime
d’immunité qui, à l’origine, visait à éviter que le pouvoir exécutif, compétent pour
déclencher les poursuites pénales (droit d’injonction positive* du ministre de la
Justice), n’entrave le bon fonctionnement du pouvoir législatif en exerçant des
pressions de nature judiciaire sur ses membres. Le constituant de 1831 a donc
prévu une série de dispositions destinées à assurer l’irresponsabilité des
parlementaires ou la suspension des poursuites judiciaires à l’égard de ceux-ci.
Le climat politique n’étant plus le même qu’au XIXe siècle, ce régime d’immunité
est aujourd’hui moins protecteur que par le passé130.
Un régime différent est établi suivant que les faits reprochés se sont
déroulés dans le cénacle parlementaire ou en dehors de celui-ci.
L’immunité est totale, tant sur le plan pénal que civil, pour les opinions ou
votes émis dans le cadre normal des fonctions du parlementaire, à l’intérieur des
locaux du parlement. Il s’agit de faire en sorte que chaque parlementaire dispose
d’une véritable liberté de parole dans l’exercice de son mandat. L’irresponsabilité
ne vise cependant pas les actes violents ou les opinions émises dans l’hémicycle
qui sortiraient du cadre normal des fonctions du représentant de la nation131.
Les parlementaires jouissent également d’une certaine protection sur le
plan pénal pour les infractions commises durant les sessions bien qu’elles soient
étrangères à leurs fonctions132. Les sessions parlementaires sont les périodes
d’activité des chambres. En pratique, le parlement est en session presque toute
l’année, la session n’étant clôturée par le Roi que quelques jours avant la rentrée
parlementaire qui a lieu en principe le deuxième mardi d’octobre. Ici, il s’agit
d’éviter que les activités parlementaires ne soient perturbées par des poursuites
judiciaires déclenchées, soit par des particuliers, soit par le parquet*,
éventuellement sur injonction du gouvernement. Cette immunité n’est pas totale.
D’abord, la protection ne s’applique pas en cas de flagrant délit qui se
définit comme « l’infraction qui se commet actuellement ou vient de se commettre
et dont les preuves sont encore saisissables ». Ensuite, la protection varie selon
l’importance des actes de poursuite et la nature contraignante de ceux-ci.
L’arrestation (judiciaire ou en exécution d’un jugement) ainsi que le renvoi ou la
citation directe* devant une juridiction répressive ne sont possibles que
moyennant l’autorisation préalable de l’assemblée à laquelle le parlementaire
appartient. Quant aux autres actes qui nécessitent l’intervention d’un juge parce
qu’ils portent atteinte aux libertés individuelles (mandat d’amener* pour un
interrogatoire, mise sur écoutes téléphoniques, etc.), la décision du premier
président de la Cour d’appel* est requise et le président de l’assemblée à laquelle
appartient le parlementaire doit être informé de la procédure. Par contre, aucune
autorisation n’est nécessaire aujourd’hui pour les actes d’information* et
a) La phase préparlementaire
politiques différentes.
souvent, des consultants privés parmi lesquels se trouvent au premier rang les
cabinets d’avocats. Le texte ainsi élaboré est alors déposé sur la table du Conseil
des ministres. Cette délibération au sein du Conseil des ministres* est
fondamentale. Souvent, en effet, l’avant-projet de loi relève de la compétence de
plusieurs ministres et exige une concertation entre ceux-ci. Par ailleurs, le
système de la représentation proportionnelle en Belgique implique, pour former
un gouvernement, de réunir plusieurs familles politiques, aucun parti ne
disposant jamais de la majorité au parlement. Le recours aux gouvernements de
coalition rend le rôle du Conseil des ministres d’autant plus important, chaque
membre du gouvernement souhaitant disposer d’un droit de regard sur ce que
font ses collègues et notamment être avisé des avant-projets de loi qui sont
élaborés au nom du Roi. Cette délibération au Conseil des ministres est une des
raisons pour lesquelles, dans la pratique, la très grande majorité des lois
finalement adoptées sont issues de projets et non de propositions de loi, même si
ces dernières sont nettement plus nombreuses. En effet, lorsqu’un projet de loi
est déposé au parlement, un accord s’est déjà formé autour de ce texte au sein du
gouvernement qui, par définition, dispose de la majorité parlementaire. Il existe
donc, dès le départ, une volonté politique de le faire aboutir. Il n’en va pas de
même pour les propositions de loi. Nombre d’entre elles sont déposées dans le
cadre d’un débat politique, pour afficher une position de principe, parfois en
raison de préoccupations électorales. Par ailleurs, les projets de loi sont souvent
plus aboutis d’un point de vue légistique. Contrairement aux ministres, les
parlementaires ne disposent souvent que de ressources humaines très réduites
pour les assister dans la rédaction de leur texte.
Conseil d’Etat.- Une fois délibéré en Conseil des ministres, l’avant-projet
de loi doit être soumis à la section de législation du Conseil d’Etat* qui va
émettre un avis. Ce dernier porte tant sur la compatibilité du texte avec les
normes juridiques en vigueur que sur ses qualités légistiques et stylistiques. Il
s’agit d’un examen juridique et formel qui ne se prononce pas sur l’opportunité
des mesures envisagées. Sur le plan juridique, le Conseil d’Etat va vérifier : (1) si
le texte qui lui est soumis est conforme à la Constitution et aux normes
internationales applicables en Belgique137 ; (2) s’il respecte les règles de
répartition de compétences ; et (3) s’il n’est pas contraire à d’autres dispositions
législatives en vigueur qu’il conviendrait, le cas échéant, d’abroger. Sur le plan
formel, le Conseil d’Etat va procéder à la toilette du texte, en suggérant des
aménagements terminologiques et grammaticaux propres à en améliorer la
lisibilité. Tout avant-projet de loi doit être soumis au Conseil d’Etat. Dans les cas
d’urgence spécialement motivés par le gouvernement, le Conseil d’Etat
examinera uniquement si l’avant-projet de loi respecte les règles de répartition de
compétences et si le texte relève de la compétence de la seule Chambre des
représentants, du bicaméralisme aménagé* ou du bicaméralisme intégral*.
Il est obligatoire de solliciter l’avis du Conseil d’Etat mais la portée de ce
celui-ci est non contraignante. Il s’agit d’un avis au sens propre du terme, même
s’il revêt une grande autorité morale. Le Conseil des ministres est donc libre de le
suivre ou de l’ignorer, sauf si le Conseil d’Etat pointe une violation des règles de
b) La phase parlementaire
vote article par article. Au cours de ces débats, les parlementaires peuvent
solliciter l’audition d’experts qui ne sont ni députés, ni sénateurs, pour les
éclairer sur le contexte dans lequel s’inscrit le texte soumis à leur analyse ainsi
que sur ses implications. Ces « experts » sont susceptibles de venir de tous les
horizons en fonction du domaine traité : avocats, médecins, professeurs
d’université, représentants des mondes syndical et patronal, directeurs de prison,
ingénieurs, etc. Pendant la durée des débats, les parlementaires et les ministres
ont la possibilité de déposer, à tout moment, des amendements, c’est-à-dire des
modifications, des ajouts ou des suppressions au texte initial.
Les débats en commission sont généralement publics. Un rapport relatant
les discussions est rédigé par un membre de la commission nommé à cette fin : le
rapporteur. Ce rapport est accessible à tous et fait partie des documents
parlementaires*. Il constitue une source précieuse pour l’interprétation* du texte
de loi s’il est adopté.
Le débat en séance plénière.– En séance plénière, la discussion générale
sur le texte tel qu’il a été adopté en commission (et non plus sur le texte initial)
commence par l’intervention du rapporteur qui commente publiquement son
rapport. Ensuite, comme en commission, la discussion article par article et le
dépôt éventuel d’amendements ont lieu. La discussion d’un article se clôt
généralement par son vote, même si le vote des articles qui sont sources de
difficultés est parfois réservé pour la fin, quand un accord sur la plus grande
partie du texte est déjà intervenu.
La procédure de sonnette d’alarme.- Cette procédure exceptionnelle crée
une garantie constitutionnelle (art. 54) au profit des minorités linguistiques. Elle
peut être enclenchée par les trois quarts des membres d’un groupe linguistique
lorsqu’ils estiment qu’un projet ou une proposition de loi déposé à la Chambre (ou
au Sénat) est de nature à porter gravement atteinte aux relations entre les
communautés. La sonnette d’alarme consiste en une motion motivée et signée,
introduite après le dépôt du rapport et avant le vote final. Elle peut porter sur
n’importe quel proposition ou projet de loi, à l’exception du budget* et des lois
spéciales* et doit indiquer spécifiquement les dispositions critiquées. Le dépôt
d’une telle motion a pour effet de suspendre temporairement les travaux
parlementaires. Le projet ou la proposition sont déférés au Conseil des ministres
qui, dans les 30 jours, rend un avis motivé sur la motion ou propose un texte
amendé de la proposition ou du projet. La Chambre concernée est invitée à se
prononcer sur l’avis ou l’amendement et procédure parlementaire peut ensuite en
principe reprendre son cours normal.
La procédure de sonnette d’alarme n’a été déclenchée qu’à deux reprises,
en 1985 et 2010. Elle joue un rôle essentiellement dissuasif. Elle empêche une
majorité parlementaire d’imposer sa volonté à un groupe linguistique, en
permettant à celui-ci de porter l’affaire au niveau gouvernemental, de manière à
régler le problème ou à déclencher une crise, qui pourrait éventuellement
conduire à la démission du gouvernement.
La procédure en conflit d’intérêts.- Une autre procédure peut également
entraîner la suspension exceptionnelle de l’élaboration de la loi afin de garantir le
bon fonctionnement du fédéralisme institutionnel. Il s’agit de la procédure en
conflit d’intérêts139. Lorsqu’un autre parlement estime qu’il peut être gravement
lésé par un projet ou une proposition de loi140, il peut demander, par un vote à la
majorité des 3/4 des voix, que la procédure soit suspendue en vue d’une
concertation. La procédure d’élaboration de la loi est suspendue pendant 60 jours.
Si, à l’issue de ce délai, la concertation n’a pas abouti, le Sénat est saisi et rend,
dans les 30 jours, un avis motivé au Comité de concertation*. Celui-ci prend une
décision par consensus dans les 60 jours141. La procédure ne peut être engagée
qu’une seule fois par la même assemblée au sujet d’un même texte142.
Le vote.- Le vote se fait d’abord article par article et puis sur l’ensemble du
texte. L’article 53 de la Constitution dispose que « Toute résolution est prise à la
majorité absolue des suffrages (…). En cas de partage des voix, la proposition
mise en délibération est rejetée. Aucune des deux Chambres ne peut prendre de
résolution qu'autant que la majorité de ses membres se trouve réunie ». La
Constitution impose donc un quorum de présence (la moitié des parlementaires
de l’assemblée) et la majorité absolue des suffrages pour qu’un vote soit
favorable. Le terme de suffrage désigne les votes négatifs et positifs, mais pas les
abstentions. Un texte de loi pourrait être adopté par 30 « oui », 29 « non » et 35
abstentions.
Dans certains cas, le constituant exige que la loi soit prise à des quorums
et majorités particuliers. Ces lois spéciales* règlent notamment la répartition des
compétences entre l’autorité fédérale et les entités fédérées ou les limites de la
frontières linguistique. L’article 4 de la Constitution exige qu’une loi spéciale soit
« adoptée à la majorité des suffrages dans chaque groupe linguistique de chacune
des Chambres, à la condition que la majorité des membres de chaque groupe se
trouve réunie et pour autant que le total des votes positifs émis dans les deux
groupes linguistiques atteigne les deux tiers des suffrages exprimés ».
La Constitution règle aussi les modalités du vote. En son article 55, elle
dispose que « Les votes sont émis par assis et levé ou par appel nominal ; sur
l'ensemble des lois, il est toujours voté par appel nominal. Les élections et
présentations de candidats se font au scrutin secret ». Pour adopter une
disposition législative, il y a deux manières de procéder au vote. D’une part, le
vote par assis et levé. C’est une procédure très rapide lorsqu’il existe une majorité
marquée. D’autre part, le vote par appel nominal qui se réalise au moyen d’un
appareil muni de trois boutons (rouge, vert, blanc) situé en face de chaque
parlementaire. Les résultats sont centralisés sur un tableau lumineux et tirés
sous la forme d’une liste nominative.
A la lumière de ces développements, l’on comprend mieux l’immunité
octroyée aux parlementaires par l’article 58 de la Constitution selon lequel
139 Art. 143 de la Constitution et art. 32, § 1-1quater de la Loi ordinaire de réformes
institutionnelles du 9 août 1980.
140 La même procédure s’applique pour les décrets et les ordonnances.
141 Ce délai est réduit à 30 jours s’il s’agit d’un décret ou d’une ordonnance.
142Une procédure similaire est établie pour régler les conflits d’intérêts entre les différents
gouvernements.
c) La phase postparlementaire
1°) La sanction
Lorsqu’un projet de loi est adopté au parlement, ce n’est pas encore une loi
à proprement parler. Il doit encore être revêtu de la sanction royale. Le Roi est
seul habilité à sanctionner les lois147. La sanction* est l’acte par lequel le Roi, en
tant que branche du pouvoir législatif, marque son accord avec la volonté
exprimée par le parlement fédéral. La formule de la sanction, par laquelle
commence toute loi fédérale, est la suivante : « Philippe, Roi des Belges, A tous
présents et à venir, Salut. Les Chambres ont adopté et Nous sanctionnons ce qui
suit ».
Le refus de sanctionner un texte adopté par le parlement confère au Roi le
pouvoir de bloquer le processus législatif. Ce « droit de veto » est plus théorique
que réel dans la mesure où, sur le plan institutionnel, il ne se conçoit qu’avec
l’accord d’un ministre qui est lui-même responsable devant le parlement.
L'incident d’avril 1990 au cours duquel le Roi Baudouin refusa de sanctionner le
texte relatif à l’interruption volontaire de grossesse, pourtant voté par les deux
chambres, révèle toutefois qu’une telle situation n’est pas à exclure. A cette
2°) La promulgation
La promulgation* est l’acte par lequel le Roi, en tant que chef du pouvoir
exécutif, atteste que la loi a été régulièrement votée selon la procédure prévue à
cet effet. La promulgation rend la loi exécutoire, c’est-à-dire que, en promulguant
la loi, le Roi ordonne à toute autorité publique de veiller à son application. En
pratique, la promulgation intervient au même moment que la sanction, par la
signature du Roi.
3°) La publication
La publication au journal officiel, le Moniteur belge, est ordonnée par le
Roi. Elle permet à tous de prendre connaissance de la loi nouvelle. Cette
publication est fondamentale dans la mesure où elle conditionne l’entrée en
vigueur de la loi qui la rend opposable aux citoyens. Sauf disposition contraire
dans le corps même du texte publié précisant, par exemple, que la loi entre en
vigueur le jour de sa publication ou à une date déterminée, la loi entre en vigueur
dix jours après sa publication.
148Loi du 3 avril 1990 relative à l’interruption volontaire de grossesse, modifiant les articles 348,
350, 351 et 352 du Code pénal et abrogeant l’article 353 du même Code.
libellée comme suit : « Promulguons la présente loi, ordonnons qu’elle soit revêtue
du sceau de l’Etat et publiée au Moniteur belge ».
_________________________________________________________________________
La procédure d’élaboration de la loi
_________________________________________________________________________
DEPOT : DEPOT :
Projet de loi Proposition de loi
+ exposé des motifs + développements
+ avis du Conseil d’Etat
Prise en considération
(avis du Conseil d’Etat)
SANCTION
PROMULGATION
PUBLICATION
B. Le pouvoir exécutif
a) Le Roi
Le Roi est le chef du pouvoir exécutif. Ce statut lui est réservé par l’article
37 de la Constitution : « Au Roi appartient le pouvoir exécutif fédéral, tel qu'il est
réglé par la Constitution ». Le terme « Roi » est souvent utilisé dans les textes,
non pas pour viser la personne royale, mais pour désigner l’ensemble du pouvoir
exécutif.
Le Roi n’exerce toutefois aucun pouvoir à titre personnel. Derrière le Roi, il
y a toujours le gouvernement ou, à tout le moins, un ministre. Dans l’exercice de
chacune de ses prérogatives institutionnelles, le Roi doit disposer du contreseing
d’un ministre qui assume in fine la responsabilité politique. L’article 106 de la
Constitution prévoit à cet égard qu’ « Aucun acte du Roi ne peut avoir d'effet, s'il
n'est contresigné par un ministre, qui, par cela seul, s'en rend responsable ». En
pratique, ceci signifie que tout acte que le Roi s’apprête à poser en tant
qu’institution (discours, visite officielle, sanction d’une loi ou d’un arrêté royal,
etc.) doit recevoir l’aval d’un ministre qui accepte d’en assumer ainsi la
responsabilité politique.
Cette responsabilité ministérielle assumée par l’entremise du contreseing
ministériel est essentielle, car la responsabilité du Roi ne peut en aucune
manière être mise en cause. En proclamant que « La personne du Roi est
inviolable ; ses ministres sont responsables »149, le constituant a donné une portée
juridique pleine et entière aux adages populaires : « Le Roi ne peut mal faire »,
« Le Roi est incapable de mal faire » et surtout « Le Roi règne mais ne gouverne
pas ». Cette inviolabilité politique du Roi se prolonge d’ailleurs sur le plan pénal
et civil : la personne du Roi n’est pas susceptible de faire l’objet de poursuites
pour une infraction pénale et aucune action civile ne peut mettre en cause le Roi,
excepté dans les litiges se rapportant à son patrimoine privé (infra, ch. 6).
b) Le gouvernement
ministres valent pour les secrétaires d’Etat. Voy. l’art. 104, al. 4 de la Constitution.
a) Présentation
Le pouvoir exécutif exécute les lois, c’est-à-dire qu’il adopte les mesures
nécessaires à leur mise en œuvre. Selon l’article 108 de la Constitution, « Le Roi
fait les règlements et arrêtés nécessaires pour l'exécution des lois (…) ».
Il ne s’agit pas, loin s’en faut, d’une fonction subalterne cantonnée aux
points de détails. Dans la pratique le pouvoir exécutif se voit confier d’importants
champs normatifs. Afin d’être pleinement opératoires, la plupart des lois doivent
être mises en œuvre par le pouvoir exécutif. Dans certaines hypothèses, la
carence du pouvoir exécutif paralyse l’entrée en vigueur effective de la norme
législative.
Le pouvoir exécutif exerce sa fonction réglementaire par l’adoption
d’arrêtés royaux*. Nombre d’entre eux sont délibérés en Conseil des ministres. Il
arrive aussi que le pouvoir exécutif délègue à un ministre l’exercice de la fonction
réglementaire sur des questions particulières. Dans ce cas, le ministre ainsi
désigné prend des arrêtés ministériels* qui seront uniquement signés de sa main
et qui ne seront pas, contrairement aux arrêtés royaux, signés par le Roi (infra,
ch. 4).
Les relations entre pouvoirs exécutif et législatif sont basées sur la notion
de confiance et cette confiance repose sur des mécanismes de contrôle. En réalité,
ces relations sont caractérisées par un équilibre des « armes » dont chacun
dispose à l’encontre de l’autre.
qu’ils émettent dans l’exercice de leurs fonctions, même en dehors des hémicycles
parlementaires (interview, conférence de presse, etc.)155. Pour le reste, ils
bénéficient également de garde-fous lorsqu’ils sont impliqués dans des procédures
pénales. Le constituant exige notamment l’accord de la Chambre des
représentants pour certains actes importants comme l’arrestation d’un membre
du gouvernement en fonction ou sa citation directe* par un particulier156.
C. Le pouvoir judiciaire
158Ceci ne vaut pas pour les magistrats de la Cour constitutionnelle qui sont appelés « juges ».
Remarquez toutefois que l’appartenance de la Cour constitutionnelle au pouvoir judiciaire est
controversée.
2. La pyramide judiciaire
159 « Toutefois, la loi peut, selon les modalités qu’elle détermine, habiliter le Conseil d’Etat ou les
juridictions administratives fédérales à statuer sur les effets civils de leurs décisions » (article
144, alinéa 2, de la Constitution).
160 Voy. le schéma de la pyramide judiciaire ci-après.
161 Voy. le schéma récapitulatif des critères fixant la compétence d’attribution des juridictions de
l’ordre judiciaire à la fin des développements.
167Loi du 5 février 2016 modifiant le droit pénal et la procédure pénale et portant des dispositions
diverses en matière de justice (dite « Pot-pourri II »), M.B. 19 février 2016.
168Pour les mineurs, on parle de « faits qualifiés infraction » et non d’infractions pour montrer
qu’ils relèvent d’un régime particulier qui les soustrait au droit pénal*.
169 Loi du 10 avril 2003 réglant la suppression des juridictions militaires en temps de paix ainsi
faits. On dit qu’elle connaît des faits tels qu’ils ont été constatés par le juge du
fond*, ce dernier visant toutes les juridictions de première instance et d’appel. La
Cour de cassation vérifie donc si des faits qu’il a constatés, le juge du fond a bien
pu prendre, en considération du droit positif applicable, la décision qu’il a prise.
De manière lapidaire, la Cour de cassation est parfois désignée comme le « juge
des jugements ». Lorsqu’elle statue sur un pourvoi en cassation, la Cour de
cassation dispose d’une seule alternative : casser ou rejeter le pourvoi. Si la
décision du juge du fond est cassée, elle est renvoyée à une juridiction de même
niveau que celle qui a rendu la décision cassée ou à la même juridiction
autrement composée.
Au sein de la Cour de cassation existe une chambre pénale qui, comme les
autres chambres, statue le plus souvent à cinq conseillers. Un siège de trois
magistrats peut être formé dans les affaires dont la solution « paraît
s’imposer »172. De la même manière, un siège plus large est réuni (9 conseillers ou
plus) dans les affaires particulièrement délicates ou importantes.
_________________________________________________________________________
Les juridictions pénales
_________________________________________________________________________
COUR DE
CASSATION
COUR
COUR D’APPEL
MILITAIRE
COUR
D’ASSISES
TRIBUNAL
DE POLICE
APPEL
POURVOI
179 Des divisions sont prévues: à Anvers (Anvers, Hasselt), à Gand (Bruges, Gand), et à Liège
(Liège, Namur, Neufchâteau). On parlera, par exemple, de la Cour du travail d’Anvers, division
Anvers.
COUR DE
CASSATION
COUR D’APP
EL
COUR DU TRAVAIL
TRIBUNAL DE LA
TRIBUNAL TRIBUNAL DE TRIBUNAL DU
FAMILLE ET DE LA
CIVIL COMMERCE TRAVAIL
Introduction au droit
JEUNESSE
DROI-C-1001_A
FRYDMAN B. et RORIVE I.
FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Volume 1
_________________________________________________________________________
Critères déterminant la compétence d’attribution
des juridictions de l’ordre judiciaire
_________________________________________________________________________
OBJET DU LITIGE :
contentieux familial
baux
NIVEAU DU RECOURS
1ère instance
appel
cassation
COUR DE CASSATION
Chambre
Chambre de la Chambre
civile et
jeunesse correctionnelle
commerciale
COUR D’ASSISES
Introduction au droit
Tribunal de la
Tribunal
JUSTICE TRIBUNAL DE
DE PAIX POLICE
Appel Pourvoi
DROI-C-1001_A
FRYDMAN B. et RORIVE I.
FRYDMAN B. et RORIVE I. Introduction au droit Volume 1
a) Présentation
180 Voy. supra, au point III de la présente section (procédure d’élaboration de la loi).
181Arrêté royal du 25 avril 2007 modifiant divers arrêtés relatifs à la procédure devant la section
du contentieux administratif du Conseil d'Etat.
182Art. 17 des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat du 12 janvier 1973, tel que modifié par la loi
du 20 janvier 2014 portant réforme de la compétence, de la procédure et de l'organisation du
Conseil d'État modifiant l’article 38 des lois coordonnées sur le Conseil d’Etat, M.B., 3 février
2014.
a) L’indépendance
Dans son article 151, la Constitution proclame que « Les juges sont
indépendants dans l'exercice de leurs compétences juridictionnelles ». Afin de
garantir cette indépendance, quatre principes sont posés par la Constitution : la
nomination à vie des magistrats, leur inamovibilité, la fixation par la loi de leur
statut pécuniaire et un régime strict d’incompatibilité. Ces principes visent avant
tout à garantir l’indépendance du pouvoir judiciaire par rapport au pouvoir
exécutif.
2°) L’inamovibilité
« Aucun juge ne peut être privé de sa place ni suspendu que par un
jugement. Le déplacement d'un juge ne peut avoir lieu que par une nomination
nouvelle et de son consentement »186.
Dans l’hypothèse où un magistrat aurait manqué aux devoirs ou à la
dignité de sa charge, seul un jugement, se prononçant sur un plan disciplinaire,
peut suspendre un magistrat de sa fonction. La destitution d’un juge peut
uniquement être décidée par la Cour de cassation.
b) L’impartialité
plusieurs règles destinées à créer les conditions de cette impartialité. Elle prévoit
notamment que le juge ne peut statuer dans une affaire dont il a précédemment
eu à connaître, que ce soit dans l’exercice d’une autre fonction judiciaire ou en
tant qu’avocat. Le juge ne peut trancher une contestation dans laquelle lui-même
ou un parent proche a un intérêt personnel. Le juge ne peut pas non plus statuer
s’il existe entre lui et l’une des parties une « inimitié capitale ».
Non seulement le juge doit être libre de tout a priori sur l’affaire dont il est
saisi, sous peine de faire l’objet d’une décision de récusation ou de
dessaisissement, mais il doit également offrir toutes les apparences de
l’impartialité. La Cour européenne des droits de l’homme* a répété, dans une
jurisprudence* constante, que pour qu’un juge réponde au principe d’impartialité,
il ne suffisait pas qu’il soit dépourvu de préjugés, il fallait en outre qu’il ait l’air
de ne pas en avoir. Cette exigence s’est cristallisée dans une formule désormais
célèbre, inspirée de la jurisprudence anglaise : « Justice must not only be done, it
must also appear to be done ». Dans l’esprit de cette juridiction, le bon
fonctionnement de la justice exige qu’aucun soupçon de partialité ne ternisse
l’activité des magistrats.
Il s’agit plus particulièrement d’examiner ici quels sont les mécanismes instaurés
pour s’assurer que les différents pouvoirs législatifs en Belgique respectent les
règles de répartition de compétences et ne violent pas les dispositions
constitutionnelles. A cet égard, deux institutions jouent un rôle de tout premier
ordre : la section de législation du Conseil d’Etat et la Cour constitutionnelle.
1. Contrôle a priori
Rappelons que la section de législation du Conseil d’Etat rend des avis sur
tout avant-projet* de loi, de décret, d’ordonnance ou d’arrêté dans lesquels elle
b) Le Comité de concertation
a) Présentation
189 Voy. supra, au point III.A : développements relatifs à la procédure d’élaboration de la loi ;
III.C : développements relatifs aux juridictions administratives.
190 Par suite de la révision constitutionnelle du 7 mai 2007, publiée au Moniteur belge du 8 mai
2007, la dénomination de la Cour d'arbitrage est remplacée par celle de « Cour constitutionnelle ».
191 Loi spéciale du 9 mars 2003 modifiant la loi spéciale du 6 janvier 1989 sur la Cour d'arbitrage,
M.B., 9 mars 2003.
192Nouvel alinéa de l’article 142 de la Constitution, révision votée le 6 janvier 2014, M.B. 31
janvier 2014, p. 8546
193Voy. l’article 143, § 1er, de la Constitution et les articles 47 et 48 de la loi spéciale du 6 janvier
2014 relative à la Sixième Réforme de l’Etat.
b) Modalités du contrôle
1. Déclaration de révision
Dans les quarante jours de la dissolution des chambres, le Roi, par arrêté
royal*, convoque les électeurs. Les assemblées ainsi élues sont dites
constituantes. Elles sont formées dans les deux mois.
I. Aperçu général
A. Le système institutionnel
b) La Commission européenne
c) Le Parlement européen
2. L’élaboration de la décision
a) La procédure de co-décision
B. Le contrôle juridictionnel
a) Recours en manquement
c) Renvoi préjudiciel
199 Voy., par exemple, le Protocole n°13 à la Convention européenne des droits de l'homme, relatif
à l'abolition de la peine de mort en toutes circonstances (2 mai 2002).
200 Voy. l’article 15 de la Convention européenne des droits de l’homme.
a) Recours
b) Arrêt
L’Organisation des Nations Unies n’est pas un « super Etat mondial » doté
d’un pouvoir législatif, d’un pouvoir exécutif et d’un pouvoir judiciaire, mais une
enceinte privilégiée de concertation et de collaboration entre les Etats de la
communauté internationale. Afin de remplir ses différentes missions, l’ONU
dispose de plusieurs organes permanents à New-York. Les principaux sont
l’Assemblée générale, le Conseil de sécurité et le Secrétaire général.
1. L’Assemblée générale
2. Le Conseil de sécurité
3. Le Secrétaire général
206Voy. l’organigrame représentant le système des Nations Unies, disponible sur Internet à
l’adresse suivante : http://www.un.org/french/aboutun/frchart2002.pdf.
1. Des juridictions
Section 1 : Notion
Au sens large, la loi* désigne l’acte de l’autorité publique qui édicte des
règles de droit. Cette définition englobe la constitution, le traité international, la
209 Voy. infra, ch. 9, spécialement sur les méthodes d’interprétation des textes juridiques.
loi au sens strict, les différentes catégories de règlements et certains actes des
organisations internationales.
Malgré la grande variété de leurs formes, les lois (au sens large)
présentent certaines caractéristiques communes :
a. La loi est écrite et publiée. Elle se présente sous la forme d’un texte qui fait
l’objet d’une publication officielle. Cette publication conditionne le
caractère obligatoire de la loi et son entrée en vigueur. Le texte publié est
l’acte authentique* qui fait foi en cas de contestation. La publication fait
connaître la loi, qui peut être ensuite reproduite et diffusée par tous
moyens publics et privés.
b. La loi édicte des règles générales et abstraites. En principe, la loi n’a pas
vocation à régler les cas particuliers. Elle s’adresse à tous indifféremment
et oblige tous ceux qui se trouvent dans la situation qu’elle vise. Pour ce
faire, le texte légal recourt nécessairement à des catégories abstraites,
susceptibles de recouvrir un nombre indéterminé de situations présentes
ou à venir.
c. La loi énonce des règles durables. La règle légale se distingue ainsi des
ordres ponctuels donnés par l’autorité publique. Toutefois, la loi n’a pas
vocation à la permanence ou à l’éternité. Si l’on excepte quelques principes
fondamentaux, normalement logés dans la constitution, les lois sont
soumises au changement accéléré qui affecte nos sociétés contemporaines.
Ainsi, les lois sont-elles fréquemment modifiées, abrogées, remplacées.
Certaines règles sont édictées de manière provisoire, parfois pour faire face
à des situations d’urgence. D’autres sont affectées d’un terme*, à
l’échéance duquel elles sont évaluées et, suivant les cas, reconduites ou
abandonnées.
d. La loi est l’œuvre des autorités publiques. - La loi est le mode d’expression
du pouvoir politique dans l’ordre juridique. Elle est produite par des
institutions publiques dans le respect de certaines procédures. La
compétence d’énoncer des règles de droit générales n’est cependant pas
reconnue à tous les pouvoirs publics. Il est l’apanage du pouvoir
constituant, du pouvoir législatif et du pouvoir exécutif, à l’exclusion du
pouvoir judiciaire. Au terme de l’article 6 du Code judiciaire, « les juges ne
peuvent prononcer par voie de disposition générale et réglementaire sur les
causes qui leur sont soumises ». Le pouvoir d’énoncer des règles générales
n’est pas non plus sans limites. La validité des lois et règlements est
conditionnée par la compétence de l’auteur de l’acte ou son habilitation, le
respect des procédures d’élaboration, ainsi que la conformité aux règles
supérieures dans la hiérarchie des normes*.
La législation se rencontre dans tous les ordres juridiques et à tous les
échelons de pouvoir, depuis le local jusqu’à l’international. De manière générale,
toutes les institutions politiques ont tendance à établir des règles juridiques. Ces
règles représentent à la fois un de leurs principaux moyens d’action et un des
modes principaux d’expression de leur pouvoir. Actuellement, on constate une
1. La Constitution
a) Notion
« [Les pouvoirs] sont exercés de la manière définie par la Constitution » (art. 33, al. 2 de la
210
211 La version papier du Moniteur belge a disparu au profit de l’unique version électronique
212L’actuel Code pénal est contenu dans la loi du 8 juin 1867, qui a remplacé le Code pénal
napoléonien de 1810.
b) Les décrets
d) Les arrêtés-lois
Les arrêtés-lois* sont des actes du pouvoir législatif pris par le Roi ou le
gouvernement dans des circonstances extraordinaires pendant les deux guerres
mondiales.
Durant le conflit de 1914-1918, la plus grande partie du territoire belge
était occupée par l’ennemi et le parlement ne fonctionnait plus. Le Roi Albert Ier
prit, avec le contreseing de son gouvernement, des mesures de nature et de
portée législatives. Au lendemain de la guerre, la validité de ces actes (et donc
leur force obligatoire) fut contestée devant les juridictions par certains
justiciables à qui on prétendait les opposer. Ce point de droit fut porté devant la
Cour de cassation qui décida que :
« En temps de guerre, lorsque le territoire est occupé, le Roi peut,
dans l’impossibilité de réunir les Chambres, prendre seul les
mesures législatives que commande l’intérêt du pays » 213.
Les arrêtés-lois sont des actes du pouvoir législatif. Ils ont la même valeur
et la même portée qu’une loi ordinaire.
S’ils peuvent apparaître comme une curiosité historique, les arrêtés-lois
sont néanmoins riches d’enseignement. En premier lieu, ils démontrent
l’extraordinaire faculté d’adaptation des règles juridiques aux changements de
circonstances et même aux bouleversements sociaux. Nécessité fait loi. La
pertinence de la règle et sa capacité à régir le réel sont à ce prix (supra, ch. 1).
L’ordre juridique fait montre en cette occasion d’une souplesse que le texte formel
de la Constitution sur l’exercice collégial du pouvoir législatif ne laissait pas
présager. Ensuite, la solution retenue consacre le principe de la continuité de
l’Etat et du service public* qui l’emporte sur les règles de procédure, même
constitutionnelles, et contraint, au moins temporairement, à les adapter. Enfin,
l’affaire met bien en lumière le rôle important des juridictions, appelées à dire le
droit et à apprécier a posteriori la validité des applications qui en sont faites.
213 Cass., 11 février 1919, Pas., 1919, I, p. 10 ; Cass. 27 avril 1920, Pas., 1929, I, p. 124.
214 Cass., 6 novembre et 11 novembre 1944, Pas., 1945, I, pp. 23 et 65.
marche du service public. Dans ce cadre, ils édictent une série de documents :
circulaires, directives, dépêches, instructions, notes de service, etc. Dans la
mesure où ces documents dictent aux agents des services publics la manière
d’exercer leur fonction et de mettre en œuvre ou d’interpréter les règles de droit,
ils sont susceptibles d’influencer de manière non négligeable la situation
juridique des administrés. La façon d’apprécier un comportement, d’interpréter
une règle, d’exiger la production de tel ou tel document peut déterminer en
pratique le droit à une prestation, la tarification de celle-ci, l’octroi ou le rejet
d’une allocation, les modalités d’imposition d’une amende administrative, etc.
Par exemple, le ministre de l’Intérieur a émit plusieurs circulaires sur les
modalités d’application de la loi du 15 décembre 1980 sur l’accès au territoire, le
séjour, l’établissement et l’éloignement des ressortissants étrangers. Ces
circulaires aménagent des points importants, soumis à l’appréciation du ministre,
comme les conditions d’application du regroupement familial aux couples non
mariés.
Certaines circulaires font l’objet d’une publication au Moniteur belge. La
question se pose donc en pratique de savoir si ces circulaires ministérielles*
revêtent ou non une portée réglementaire.
De manière constante, la Cour de cassation refuse toute portée normative
aux circulaires ministérielles. Toutefois, elle admet qu’une circulaire peut faire
naître un droit subjectif* au profit d’un administré lorsque la circulaire a créé
dans son chef l’attente légitime d’un certain traitement ou de l’application d’une
règle et que cette attente a été déçue215. Cela ne signifie pas que la circulaire
acquiert un caractère réglementaire, mais les cours et tribunaux refusent, au
nom de la sécurité juridique, que l’administration s’écarte des règles qu’elle s’est
données à elle-même et auxquelles elle a conféré une certaine publicité.
Quant au Conseil d’Etat, il considère les circulaires à portée réglementaire
comme des règlements, dont la section du contentieux administratif prononce le
cas échéant l’annulation, soit parce qu’ils émanent, à défaut de délégation, d’une
autorité incompétente, soit en raison du non-respect des formalités obligatoires
qui entourent l’établissement d’un règlement, spécialement la consultation
préalable de la section de législation du Conseil d’Etat216.
215 Cass., 27 mars 1992, R.C.J.B., 1995, pp. 53 et s., et la note de N. Geelhand.
216 M. LEROY, Contentieux administratif, Limal, Anthemis, 2011, pp. 188-191.
B. Au plan européen
1. Les traités
2. Les règlements
3. Les directives
217 C.J.C.E., 3 avril 1986, Les Verts c. Parlement, 294/83, Rec., pp. 1339 et s.
218 Remarquez que certains Etats ont obtenu une clause de « opt-out ».
déterminé. L’Etat choisit librement les formes et les moyens appropriés. Il peut
s’agir d’une loi, d’un décret ou d’une ordonnance, accompagné le cas échéant
d’arrêtés d’exécution, voire même d’un simple arrêté de l’exécutif concerné.
Les directives sont notifiées aux Etats destinataires, ce qui en détermine le
caractère obligatoire. Elles sont en outre publiées, pour information, au Journal
officiel de l’Union européenne.
Les directives ne créent donc pas immédiatement des droits et des
obligations dans le chef des particuliers. Toutefois, lorsqu’un Etat n’intègre pas
dans son ordre juridique interne les dispositions d’une directive dans le délai
requis et que cette défaillance prive les sujets de droit d’un droit subjectif qui
aurait dû leur être reconnu, les personnes préjudiciées peuvent, dans certaines
conditions, se prévaloir à l’égard de l’Etat des dispositions de la directive. C’est ce
qu’on appelle l’effet direct vertical* des directives. La reconnaissance d’un tel
effet direct suppose que les dispositions de la directive soient inconditionnelles et
suffisamment précises.
Par contre, les directives sont normalement dépourvues d’effet direct
horizontal*, ce qui signifie qu’un particulier ne peut en principe se prévaloir des
dispositions d’une directive non ou mal transposée à l’encontre d’un autre
particulier pour lui imposer une obligation. S’il en était autrement, la directive
serait d’application immédiate à la manière d’un règlement. Toutefois, le juge
national peut être tenu de prendre la directive en considération pour trancher un
litige entre particuliers, notamment pour écarter l’application d’une législation
nationale contraire à la norme européenne ou pour interpréter le droit interne
dans un sens conforme à la directive. En pratique, cela revient en quelque sorte à
reconnaître un certain effet direct horizontal aux directives.
L’Etat qui ne transpose pas une directive dans le délai requis engage en
outre sa responsabilité* et s’expose à une action en manquement* au niveau
européen.
4. Les décisions
Il s’agit d’actes qui sont nés de la pratique des institutions et qui ont été
baptisés sous des noms divers : certaines dénominations renvoient à une fonction
programmatoire (programmes, programmes d’action, livres blancs, livres verts,
code de conduite…), d’autres à une fonction déclaratoire (résolution, déclarations,
délibérations, conclusion, communication, procès-verbaux…), d’autres enfin
empruntent une terminologie utilisée spécifiquement par les traités et qui ne
rentre dans aucune des deux catégories ci-dessus (recommandation, avis…).
Ce foisonnement terminologique se double d’une incertitude quant à la
portée juridique réelle de ces actes. En principe, ces actes ont vocation à exprimer
une position ou un engagement politique et ne sont pas susceptibles comme tels
de produire des effets de droit. Toutefois, la Cour de justice de l’Union
européenne dans son souci constant de ne pas s’en tenir à la forme ou à l’intitulé
de l’acte, mais de faire prévaloir son contenu, a admis que de tels instruments
pouvaient, le cas échéant, engendrer des effets juridiques dès lors que l’auteur de
l’acte en manifestait clairement l’intention219.
C. Au plan international
a) Catégories de traités
221 Négociés généralement dans le cadre du G.A.T.T. (General Agreement on Tariffs and Trade).
222 Si ce n’est qu’il engage les Etats signataires à ne pas adopter de comportement contraire à
l’objet et au but du traité (art. 18 de la Convention de Vienne sur le droit des traités).
la Chambre des Représentants qui donne son accord sous la forme d’une loi
d’assentiment. Il s’agit d’une loi formelle*, qui ne peut modifier ou amender les
clauses du traité. Il n’est en effet plus concevable à ce stade de revenir sur les
clauses du traité lui-même. L’assentiment de la Chambre permet à l’exécutif de
procéder à la ratification* du traité au niveau international.
Pour être obligatoires dans l’ordre interne, les traités doivent encore être
publiés. Ils sont publiés au Moniteur belge, en annexe de la loi d’assentiment. La
Cour de cassation a décidé qu’un traité non publié, ou publié seulement par
mention, ne liait pas les sujets de droit belge223.
Les régions et les communautés ont également le pouvoir de conclure des
traités dans leur domaine de compétence propre (art. 167, § 3 de la Constitution).
Les traités sont conclus par le gouvernement régional ou communautaire, et
soumis à l’assentiment de l’assemblée.
Le Roi dirige cependant les relations internationales (art. 167, § 1er de la
Constitution) et conserve la haute main en cas de difficulté. Il dispose ainsi du
pouvoir de se substituer temporairement aux autorités fédérées pour garantir le
respect des engagements supranationaux ou internationaux du pays (art. 169 de
la Constitution). Cette disposition se justifie par l’unité de la personnalité
juridique de l’Etat belge sur le plan international, qui doit éviter que la
multiplicité des autorités habilitées à conclure des traités ne l’amène à contracter
des engagements contradictoires.
223 Cass., 11 décembre 1953 (Pas., 1954, I, p. 298) et Cass., 19 mars 1981 (J.T., 1982, p. 565, note
Verhoeven).
1. Le protocole
224 M.B., 2 juin 1982. Voy. également la circulaire de « Légistique formelle – Recommandations et
2. Le dispositif
Le dispositif est la partie du texte qui énonce les règles, les dispositions
obligatoires proprement dites. Les textes législatifs contiennent le plus souvent
non pas une mais plusieurs règles, rédigées en un ensemble de dispositions
structurées.
L’unité de base du dispositif est l’article. Les articles sont numérotés. Ils
peuvent être subdivisés en paragraphes et en alinéas. Chaque article constitue
une unité de sens. Il doit cependant être lu et compris en référence à l’ensemble
des dispositions de l’acte, en donnant à chacune des dispositions le sens qui
résulte de l’acte entier (infra, ch. 9).
Le texte dans son ensemble est structuré, à la manière d’un livre, en
différentes parties, chapitres, sections qui sont pourvus de titres. Cette
structuration tend à donner à l’acte dans son ensemble un caractère cohérent et à
favoriser sa lisibilité.
Le début et la fin du dispositif comportent généralement des dispositions
d’une importance particulière. Au début, on trouvera souvent des indications
précisant le champ d’application du texte, ainsi que la définition de certains
termes utilisés dans l’acte. Il peut s’agir de termes du langage courant ou même
du langage juridique qui reçoivent une acception spécifique dans le texte en
question. De telles définitions sont évidemment très importantes pour
l’interprétation de l’ensemble des dispositions. A la fin du texte, sont placées des
indications relatives à l’entrée en vigueur de l’acte, d’éventuelles dispositions
II. La jurisprudence
A. Définition
1. Notion
D’un point de vue formel, la jurisprudence trouve son siège dans les
décisions de justice. La décision de justice* est un acte posé par une juridiction
qui énonce une décision à propos d’une contestation ou d’une action* qui est
portée devant elle.
Sur le plan terminologique, on distingue les jugements* qui sont l’œuvre
des tribunaux et les arrêts* qui sont rendus par les cours. Au sens large, le terme
« jugement » désigne de manière générique n’importe quelle décision de justice.
Le jugement est un acte obligatoire qui est revêtu de l’autorité de la chose
jugée*. L’effet obligatoire de la décision et son autorité sont cependant limités à
l’affaire en cause. Le jugement énonce donc une décision obligatoire, concrète et
particulière. Les jugements n’ont pas et ne peuvent avoir la forme ou la portée
d’un règlement (art. 6 du Code judiciaire).
Les jugements sont prononcés en audience publique (art. 149 de la
Constitution). Ils sont rédigés par écrit et consignés au greffe* de la juridiction.
Ils sont signifiés* ou notifiés* aux parties (infra, ch. 8). En outre, nombre de
décisions font l’objet d’une publication plus large à l’intention des juristes à des
fins scientifiques, c’est-à-dire de connaissance du droit. Les arrêts rendus par les
juridictions suprêmes sont généralement publiés dans des recueils ad hoc. Les
décisions récentes peuvent également être consultées sur le site Internet de la
juridiction concernée. D’autres décisions, rendues par des juridictions inférieures,
sont publiées en raison de leur intérêt ou de leur importance dans des revues
juridiques spécialisées, où elles peuvent faire l’objet d’observations ou d’un
examen critique par la doctrine*. Toutefois, toutes les décisions de justice ne sont
pas publiées, loin s’en faut.
2. Structure formelle
226Voy. notamment Dire le droit et être compris, Vade mecum pour la rédaction des jugements,
édité par l’Association syndicale des magistrats (brochure), qui suggère des changements très
importants dans le style et l’ordre habituels des rubriques des jugements et arrêts.
Les indications fournies ici sur la forme générale des décisions ne doivent
dès lors être considérées que comme des points de repère généralement utiles
pour la lecture des jugements et arrêts. On présentera les jugements et arrêts
dans la forme sous laquelle ils sont publiés dans les publications officielles et
revues scientifiques. Cette forme diffère sur plusieurs points de l’acte tel qu’il est
rédigé par le magistrat et porté à la connaissance des parties.
Les décisions publiées comportent trois parties : le sommaire au sens large,
les motifs (ou la motivation) et le dispositif.
2°) La notice
La notice est formée par une série de mots clés (généralement en gras) qui
indiquent par le moyen de rubriques et de sous-rubriques la ou les questions de
droit tranchées par la décision et qui situent ainsi celle-ci par rapport aux
matières et aux branches du droit* dans l’ordre juridique. La notice va ainsi
permettre le classement systématique de la décision par matière ou par verbo
notamment dans les répertoires de jurisprudence et les bases de données.
b) Les motifs
c) Le dispositif
3. Fonction
227 Art. 463, alinéa 1er du Code pénal. D’autres peines plus lourdes ou plus légères sont cependant
1059 et s., ainsi que l’étude remarquable de J. SPREUTELS, « Le vol de données informatiques »,
Revue de droit pénal et de criminologie, 1991, pp. 1027-1064.
229 Cass. fr. 10 décembre 1887, D.P., 1888,1, p. 93 ; G. HUYBRECHTS, « Les vols d'eau, de gaz et
d'électricité », Revue de droit pénal et de criminologie, 1935, pp. 235-249, spéc. pp. 235-236 et les
autres références citées.
230Voy. pro E. PILON, « Le problème juridique de l'électricité », Revue trimestrielle de droit civil,
1904, pp. 5-30 et contra J.A. ROUX, note sous Toulouse, 7 juin et 3 juillet 1901, Sirey, 1902, II, pp.
185-186.
231 Cass. fr., 3 août 1912, D., 1913,1, p. 439 et Cass., 20 juin 1934, Pas., 1934, I, pp. 332-334.
232MERLE et VITU, Traité de droit criminel, Paris, Cujas, 1982, vol. II, p. 1803 et notes. - Adde :
PILON, o. c., p. 241.
233 Cass., 20 juin 1934, Pas., 1934, I, pp. 332-334.
234 Cass., 23 septembre 1981, Pas., 1982, I, p. 120 confirmant Bruxelles, 25 mars 1981, Revue de
droit pénal, 1982, p. 287.
235 Paris, 24 juin 1987, Gaz. Pal.,, 3 septembre 1987 et obs.
C. La dynamique jurisprudentielle
236 Sur cette question, I. RORIVE, Le revirement de jurisprudence. Etude de droit anglais et de
(ce qu’elle n’est nullement contrainte de faire) et que la nouvelle décision fait à
son tour l’objet d’un pourvoi en cassation, la Cour de cassation examine le
nouveau recours toutes chambres réunies238. L’arrêt rendu, s’il aboutit à une
nouvelle cassation et par voie de suite à un nouveau renvoi, lie cette fois la
juridiction de renvoi mais uniquement sur le point de droit tranché par l’arrêt de
cassation239. Dans ce cas, le procureur général près la Cour transmet la décision
au ministre de la Justice qui, chaque année, en fait rapport aux chambres240.
Cette communication a pour but d’informer le législateur et de lui permettre le
cas échéant de régler lui-même le problème de droit. En toute hypothèse, la force
obligatoire de l’arrêt ainsi rendu se limite à l’affaire en cause et n’acquiert pas de
portée générale.
Dans tous les cas, même lorsqu’elle est bien établie, l’enseignement tiré de
la jurisprudence, y compris celle de la Cour de cassation, ne s’impose jamais au
juge de manière formellement obligatoire en ce qui concerne le cas nouveau à
trancher. Le juge pourra toujours s’écarter des précédents, quitte à subir
l’épreuve des voies de recours. La violation de la jurisprudence n’est pas en soi un
motif de cassation. La Cour de cassation déclare d’ailleurs régulièrement
irrecevable les pourvois pris de la violation de la jurisprudence, y compris de la
sienne. En pratique, le plaideur invoquera la violation de la loi ou du règlement
eux-mêmes lorsque l’application ou l’interprétation de ceux-ci par le juge
contredisent ou s’écartent de l’enseignement tiré de la jurisprudence.
4. Le rôle constructif
III. La doctrine
A. Notion
B. Variétés
241 Notamment au Journal des tribunaux et, depuis la fin des années 1990, sur le site de la Cour
de cassation.
2. La doctrine de législation
3. La doctrine de jurisprudence
C. Fonction et influence
Les écrits doctrinaux sont des œuvres privées. Ils n’ont en principe aucune
portée institutionnelle, ni valeur officielle. Ils sont dépourvus de tout caractère
obligatoire. Cependant, la doctrine remplit une fonction indispensable dans
l’ordre juridique. Elle contribue à la systématisation du droit en intégrant les
sources multiples et éparses (les lois et règlements, les décisions de
jurisprudence, les contributions doctrinales elles-mêmes) en un discours qui tend
à la cohérence. L’évolution constante du droit, l’inflation légale et réglementaire,
le dynamisme de la jurisprudence et la multiplicité des travaux doctrinaux eux-
mêmes, d’importance et de qualité variables, appellent sans cesse des mises à
jour et de nouvelles synthèses qui font de l’entreprise doctrinale une tâche
infinie. La doctrine est ainsi appelée à reformuler et à reconstruire en
permanence l’ordre juridique.
Dépourvue de force obligatoire, la doctrine exerce pourtant une influence
considérable. C’est elle qui, en charge de la formation des futurs juristes, leur
expose une image du droit, de ses catégories, de ses méthodes qui imprimera
l’esprit de toute une génération. La doctrine est le véritable architecte de l’ordre
juridique. Au départ des matériaux fournis par l’ensemble des sources, elle
dessine le plan de l’ordre juridique dans son ensemble et ses principales
articulations.
Au-delà de l’enseignement, la doctrine est également le principal vecteur
de diffusion des connaissances juridiques. Par elle, les juristes prennent pour
l’essentiel connaissance des évolutions du droit, en ce compris des
réglementations et de la jurisprudence. La doctrine contribue d’ailleurs à forger
la jurisprudence, en sélectionnant les décisions à publier et en soumettant celles-
ci à l’épreuve de la critique.
IV. La coutume
A. Notion
242 La solidarité signifie que lorsque plusieurs commerçants sont tenus à une même dette, chacun
peut être tenu de payer le tout au créancier, quitte à se retourner ensuite auprès des autres
débiteurs pour exiger leur contribution. En droit civil, au contraire, la règle est celle de la
divisibilité des dettes suivant laquelle chacun n’est, sauf disposition contraire, tenu à l’égard du
créancier que pour sa part (art. 1202 du Code civil).
_________________________________________________________________________
Table des matières
_________________________________________________________________________
AVERTISSEMENT ............................................................................................................. 1
pour :
Dès le quadrimestre terminé, 4 Donner une rétroaction à vos enseignants
évaluez vos enseignements 4 proposer des améliorations
4 participer à l’évolution des enseignements
4 Valoriser les activités d’enseignement
portant sur :
une évaluation 4 La prestation des enseignants
à plusieurs dimensions 4 L’organisation de l’enseignement
4 Le déroulement des séances
4 L’évaluation des apprentissages
4 www.ulb.be/enseignements/evaluation
Plus d’informations ?
www.fsc.be
A la recherche de produits FSC ?
www.jecherchedufsc.be