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Calligrammes, recueillant des “poèmes de la paix et de la guerre”, est un exemple de géométrie

poétique, par la dissipation graphique du discours sur toute la surface de la page. La typographie dessine
le texte dans ces calligrammes à la fois poèmes et dessins. Cette technique vise la simultanéité, la
suppression du temps et la recherche toujours renouvelée d’un présent éternel, d’un présent spatialisé.
Les 6 sections du volume, de longueurs presque égales, chacune ayant sa couleur particulière, mais
étroitement liée aux autres par la reprise de thèmes et formes similaires, représentent, aux yeux de
Michel Butor, les 6 faces d’un cube, la première tournée vers l’avant-guerre, la dernière vers la victoire.

Ayant une “conscience aiguë de la réalité physique du langage”, Apollinaire “a fait retomber la
poésie du ciel sur la terre dans son admirable incapacité d’oublier que les mots c’est d’abord quelque
chose que l’on entend, et que l’on voit” (Michel Butor, Répertoire III). Le poète occupe une place de choix
au confluent de la tradition symboliste et de la modernité. Le choix de thèmes classiques, renouvelés par
une sensibilité toute personnelle, s’accompagne chez lui d’une grande audace stylistique, menant à leur
terme les innovations pressenties par Rimbaud ou Mallarmé. Outre l’abolition de la ponctuation et la
création des calligrammes – ces “idéogrammes lyriques” alliant peinture et poésie -, Apollinaire est un
maître dans l’harmonie sonore de la strophe, dans la ligne mélodique du vers. Les qualités auditives du
poète se manifestent de manière très différente, fondées toutefois sur un principe unique, celui de la
répétition des sons. A un premier niveau, il s’agit de la répétition des simples sons, consonnes, voyelles
ou syllabes, comme dans le procédé classique de l’allitération. A un second niveau, nous trouvons le
procédé de l’harmonie imitative, par lequel les répétitions sonores suggèrent l’image exprimée. Un
troisième système d’harmonie sonore a pour principe la répétition d’un ou de plusieurs mots, ou d’un ou
de plusieurs vers. C’est le principe du refrain de la chanson, utilisé par bien des poètes. A un quatrième
niveau d’analyse se situent les jeux sonores répétitifs qui relèvent de l’homophonie ou de l’homonymie
et du calembour.

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