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OS N°2 CANGACEIROS NOTES EDITORIALES I, LARGUEZ LES AMARRES ! otre époque est marquée par un retour a la sauvagerie initiale des pauvres. Voila qui tranche N gréablement avec la période antérieure. Le mouvement ouvrier, dominé par les idées réformistes et staliniennes, encadré par des appareils bureaucratiques, avait presque partout réussi a civiliser la protestation des pauyres. (Le Front populaire avait été le moment le plus impor- tant de ce processus.) L’intégration de l’ancien mouvement ouvrier dans la société civile est désor- mais totalement achev Dans les 70” les travailleurs révoltés sont allés aussi loin qu’ils le pouvaient dans les limites du systéme existant. Leurs luttes débordaient sans cesse les consignes syndicales. Mais elles sont cepen- dant presque toujours restées en porte--faux par rapport aux appareils syndicaux : et ceux-ci ont pu concilier et manceuvrer avec assez de force pour finalement emporter cette guerre d’usure. Les exi- gences démesurées qu’avancaient alors les travailleurs révoltés semblent avoir momentanément refluées. La plupart des conflits importants de ces derniéres années, dans les entreprises, ont sé principalement défensifs, et portaient contre les effets de la récente modernisation industrielle. Dans les 70°, les syndicats ne pouvaient pas se permettre sans risque de désavouer ouvertement les excés des travailleurs révoltés, Dans les 80”, ils ne peuvent plus se permettre de les cautionner. En Pologne en 81, la direction de Solidarité a fini par dénoncer le mouvement des gréves sauvages et désavouer les revendications sans fin des travailleurs, au nom de Vintérét national. En Grande- Bretagne, le TUC a entravé par tous les moyens les ébauches de solidarité pratique envers les mineurs en gréve, et en organisant ainsi leur isolement, a finalement assuré leur défaite. En France en décembre 83/janvier 84 a I’usine Talbot, la CGT et la CSL ont combattu — l'une de Vintéricur ct autre de Pextérieur — les OS immigrés en gréve, qui ont été vaineus dans la solitude. En Espagne, de la meme répartition des fonctions policiéres reléve l'attitude de I" UGT et des CCOO qui ont du combattre ces derniers temps les pratiques assembléistes subsistant dans les luttes récentes. La liqui- dation de ces révoltes ouvrieres s’est faite partout au nom du méme principe. Avant, les syndicats faisaient appel a l’intérét des travailleurs pour mettre fin a une gréve : maintenant, ils font appel a Pintérét de entreprise. Dans cette période, les bureaucrates en arrivent 4 pouvoir discuter ce qui pour les travailleurs était indiscutable dans les 70”. Ces appareils syndicaux se comportent a présent, et de fagon systématique, en gestionnaires, se mélant des affaires de l’entreprise. Le concept réfor- miste d’auto-gestion est entré dans la pratique syndicale désormais principalement consacrée a la co- gestion. Ce qui n’était pas encore évident en 68, l’est devenu. Le mouvement ouvrier se définissait ainsi : il s’agissait de faire de la masse des trav sujet juridique collectif défendant ses intéréts dans le cadre de la société civile. Les luttes des 70’ ont fait éclater tout cela. Les pauvres étant, alors, encore unis dans I’usine par des conditions de travail identiques pouvaient constituer une force unique, qui s’exprimait dans les revendications de salaire anti-higrarchiques et le méme rejet du travail — absentéisme, coulage des cadences, sabotage... —. Contre cette force, le capitalisme a réagi de la sorte : il a réintroduit les forces du marché comme seule référence, et il a entrepris également de ré-organiser toute l’exploitation du travail, en exacer- bant la concurrence entre les pauvres. Les syndicats, fondés sur la hiérarchie salariale et I’identifica- tion du travailleur & son entreprise, participent pleinement A l'organisation de cette concurrence. Ils ont de méme largué les amarres avec le langage de 'ancien mouvement ouvrier, qu’ils remplacent par le jargon plus empirique des gestionnaires. Comme le déclare récemment un expert «les entrep! ses elles-mémes découvrent parfois qu’elles ont en face d’elles des interlocuteurs qui, 6 surprise, pat lent le méme langage économique». La principale préoccupation des syndicats est seulement de rat fier juridiquement avec les patrons et Etat, ce qui est depuis longtemps entré dans la pratique — par ex. tout le baratin sur «la flexibilité du temps de travail» ou le SMIG —. Il est désormais admis ‘ouveriement que les syndicats, les hommes d’affaires et I’Etat parlent tous la méme langue (seules 3 quelques minorités d’activistes syndicaux s*accrochent désespérément au langage de I'ex-mouvement ouvrier dont ils continuent encore de réciter les cantiques). L’époque est finie ot les travailleurs pou. vaient s’avancer trés loin dans leurs luttes en s‘abritant plus ou moins derriére la couverture syndi- cale, obligeant leurs délégués a les suivre sous peine de débordement ouvert. Pour la premiére fois dans ce pays, des grévistes ont été condamnés individuellement a verser une indemnité & des jaunes, et non pas leur syndicat : cela s’est passé une premiére fois au début 85 a Pusine Delsey, dans le Pas-de-Calais, puis dans une usine de transports ou, quinze chauffeurs licen- ciés a la suite d’une gréve, ont été condamnés par le tribunal d’Arras a verser de leurs poches 52 600 F aux sept non grévistes constitués en «Association pour la liberté du travail» ! Les médiations ayant pour tache d’intégrer les travailleurs ont maintenant accompli un cycle complet. Les travailleurs sont & présent supposés suivre la méme logique que leurs représentants syndicaux, et s’identifier enti¢rement au fonctionnement de leur entreprise. En Grande-Bretagne par exemple, des firmes américaines et japonaises qui reprennent certains secteurs comme l'automobile ou [électronique imposent leurs conditions : les managers définissent en étroite collaboration avec les syndicats les nouvelles régles de gestion du travail, et ces derniers sont chargés de les imposer eux- mémes aux travailleurs (dans certains cas, il y a une clause selon laquelle ’employé s’interdit volon- tairement le recours a la gréve !). Mais ce progrés dans l’exploitation du travail a dd s'accompagner d'un conditionnement de la main-d’ccuvre, comme cela se fait au Japon et en Corée du Sud. Si la- bas les usines sont de vraies casernes ou le travail est militarise, il faut encore y imposer un culte reli- gicux aux travailleurs. La nécessité et la terreur ne suffisent pas, méme en Asie, a mobiliser l'ardeur des salariés au travail. Les chefs d'entreprise nippons le savent bien, qui se comportent comme de veritables chefs de secte. A 'impossibilité d’organiser les nouvelles formes d’exploitation du travail par le seul régime de la caserne, l'ennemi répond en ajoutant un mensonge, religieux ou laic. C'est ce qu’exprime aussi bien en France un entrepreneur dynamique qui déclare «qu'il manque un credo commun dans ’entreprise» (il s'agit encore de l'inévitable Bernard Tapié). Cette force unique des travailleurs révoltés ayant été brisée au début des 80” au nom de la crise, les capitalistes peuvent imposer librement aux pauvres des conditions les plus draconniennes. On retourne au fondement du capitalisme, au XIX® : prendre les gens & la faim, tout en organisant le spectacle de la pénurie (comme le coup des prétendus «nouveaux pauvres»). Les gens se voient ainsi imposer des conditions de travail et de salaire impensables il y a dix ans. La main dceuvre est enue & la pleine et entiére disposition de |’employeur — c’est ce qu’on appelle par euphémisme syndical «la flexibilité du travail», heures supplémentaires non payées, travail le dimanche, baisses de salaire imposées par le chantage au licenciement. Il arrive méme a certaines entreprises en difficulté de faire appel a la participation volontaire des travailleurs, pour qu’ils constituent un capital en versant tout ou partie de leur salaire ! Le cas limite a été atteint & Lyon début 85 : un cadre nommé in extrémis & la te dune boite en difficulté a posé comme condition au sauvetage de l’entreprise, que ses employés lui avancent I’équivalent de deux mois de leur salaire. Bien inspirés les rarcs salariés qui ont refusé : sitdt les versements opérés, le nouveau PDG s'enfuit a létranger avec la caisse. Tout ce qui rampe sur la terre est gouverné par les coups ! I. HISTOIRE UNIVERSELLE DU DESESPOIR forme de la pure nécessité. Jamais les gens n’avaient éé aussi fermement rabaissés & leur état de nécessiteux. II s'agit de remettre les pauvres leur place, [I faut les faire saliver devant la toute-puissance de I’argent. En Pologne, par exemple, il n’est pas trop difficile de trouver de Pargent, en magouillant au marché noir, ce que font beaucoup de gens. Mais il est trés dur de se pro- curer des marchandises : les magasins sont vides. Ici, la rareté s’organise de facon inverse : les maga- sins sont pleins, mais il est trés dur de se procurer de l’argent. J amais, sous le régne du spectacle, le principe de I’argent ne s’était manifesté a ce point sous la En France, nous avons rencontré des polonais qui se déclaraient effarés par le zéle des francais au travail : 1a-bas rien de tel, au contraire ! C’est que dans notre maudit pays, le fait d’avoir un bou- lot, méme le plus sale et le plus mal payé, passe pour bien des gens comme une faveur céleste. Mais il se trouve quand méme des gens pour cracher sur 'offrande. L’accumulation désormais irréversible de chémeurs-a-vie est bien sir une conséquence directe de organisation plus rationnelle de l’exploi- tation, Mais bien plus qu’un résultat quantitatif, il s'agit de quelque chose de qualitatif. En grande partie, ce sont des jeunes qui ne peuvent pas accepter de subir les nouvelles conditions faites aux tra- vailleurs. Si beaucoup de jeunes n’ont pas de boulot, c’est qu’ils n’en veulent pas. Et en méme temps que les conditions de travail salarié sont de plus en plus ignobles, les conditions d’existence des ché- meurs deviennent de plus en plus irrespirables. Au début 84, I’Etat frangais sétait attaqué au chémage volontaire en réduisant A presque rien le systéme des allocations. II s’est ensuite appuyé sur ¢4 pour introduire le travail volontaire sous-payé, les TUC. Pendant plus de 6 mois, on a vu des jeunes cons déclarer A la télé que méme mal payés, c*était mieux que de rester a rien faire. Un coup double pour I’Etat : réussir a faire dire a des gens qu’en dehors du travail (méme aussi mal payé qu’un TUC) ils n’auraient rien a faire de leur jeunesse. Travailler, c'est n’avoir rien 4 faire ! Ensuite, ceux qui auront eu l’échine assez souple pour s’abais- ser a ¢& pourront bien accepter n’importe quel job smicard avec joie. S’il est de plus en plus insup- portable de travailler, vu les conditions de soumission accrue qui sévissent, il est aussi de plus en plus difficile de ne pas travailler. I n’est méme plus possible d’aménager sa subsistance immeédiate en bossant en turn-over ou en touchant les allocations chémage. Au début des 70’, la délinquance avait pour nous un air de liberté, de virée sauvage, de jeu en bande, La recherche de l’argent, bien qu’elle en faisait partie, ne constituait pas le principal but. Dans les 80", cette atmosphére d’insouciance est épuisée. Le plus haut moment de cette liberté crimi- nelle a été l’automne 81 des rodéos et incendies dans ’Est lyonnais. Depuis, Etat et les défenseurs de la société existante ont fait en sorte de rendre impossible de tels excés : le régne de la nécessité a fait le reste, Un jeune des Minguettes nous racontait qu’en 81, ils volaient des voitures pour s’amu- ser. Maintenant, avant tout elles doivent avoir une fonction utilitaire et servir au moins & plusieurs arrachés et plusieurs casses — aprés quoi seulement on peut s'amuser avec. Il est devenu si difficile de voler de grosses cylindrées ! La fureur de la répression policiére et judiciaire, ponctuée d’une vague d’exécutions sommaires sans précédent, a marqué nettement Ia fin d’une époque. Tous ces chmeurs-A-vie remplissent alors les prisons, entrainant une surpopulation automatique. Les travail- leurs ne sont pas épargnés et ont de plus en plus affaire a la police. Dettes, impossibilité de payer le loyer et divers crédits, chéques sans provisions, vols dans les supermarchés, etc., en aménent de plus en plus risquer la prison. Ce retour au régne le plus sauvage de la nécessité a pour effet d’exacerber ’hostilité et la con- currence qui réglent de toutes facons les rapports des pauvres entre eux dans la société. L’isolement et atomisation dominent incontestablement tout, et il en résulte une ambiance d’angoisse et d’oppression jamais atteinte jusque la — c'est au point qu’aux USA, dans certaines grandes villes, des gens meurent subitement de solitude —. La propagation de la poudre, qui est en train de démolir la colére de tant de jeunes, est évidemment une des conséquences les plus directes de ce processus, qu'elle accentue en retour. I! n’y a désormais plus de médiation possible entre la misére des gens et la société civile. Les révoltes qui ont suivi 68 auront contraint l’ennemi a moderniser oppression et & 5 rendre ainsi le monde encore plus invivable, la misére encore plus visible. Le vieux principe de 1789 revient alors au premier plan des préoccupations ennemies : combler le vide entre la classe domi nante et les pauvres, qui s’est dangereusement creusé ces derniéres années. C’est A quoi s'affairent une génération de réformistes aux ordres de "Etat. Ils ne peuvent évidemment parler que le langage de l’Btat et précher le mensonge démocratique a la masse des pauvres. C’est que la bourgeoisie se trouve brutalement confrontée a ce qui la définit : absence de communauté, poussee a son paroxysme par les conditions sociales modernisées.. La violence qui régne entre les pauvres et s’exerce parfois ouvertement entre eux est la mesure dela violence des conditions qui leur sont faites. Au moment méme oti tous les pauvres subissent de plein fouet les régles de la guerre de tous contre tous, ils ne peuvent plus prétendre a une existence civile et deviennent alors absolument dangereux. Ce moment oi la séparation a tout envahi montre aussi que les pauvres ne peuvent constituer un sujet juridique collectif comme a l’époque de I’ex- mouvement ouvrier. Leur insatisfaction retourne alors a son fondement, c’est~a-dire a la sauvageri qui caractérisait leur révolte avant que la société ne cherchat a les civiliser. La derniére gréve des mineurs en Grande-Bretagne a ainsi vu les grévistes recourir a des formes d’actions criminelles, qui rappellent les expéditions punitives auxquelles se livraient les ouvriers anglais au début du XIX, tel- les qu’Engels nous les relate dans «La situation de la classe laborieuse en Angleterre», c’est-a-dire avant que le trade-unionisme n’ait civilisé les pauvres et anéanti leur colére. III. LES FANATIQUES DE L’ APOCALYPSE d'insatisfaction ; au contraire, ils venaient ld en principe pour passer une bonne soirée. Les organisateurs du spectacle n'imaginaient pas que la misére des foules puisse exploser ainsi en plein caeur du stade. II n’y avait pas de motif la violence, s’étaient-ils dit, Au Heysel, le spectacle a du montrer seconde apres seconde et en direct a des millions de gens sa fonction de manipulation des foules solitaires au moment méme ot il n’y parvient pas ! Les dirigeants ont paniqué en direct. Et ce qui a tant choque les spectateurs, ce ne sont pas les 38 morts mais le fait d’avoir été témoin en direct d'une telle violence que le spectacle n’a pas su, cette fois, leur épargner. Ils sont génés davoir vu. Le scandale était si fort qu’en RFA ils ont purement et simplement arrété le reportage. Un journaliste du Monde se demande, catastrophé, dans un article sur cette affaire «quel effet cela a-t-il bien pu produire chez ces peuples d’ Afrique noire (le reportage avait en effei été diffusé en direct dans plu- sieurs pays africains), auxquels il fut un temps, nous avons essayé d’imposer notre civilisation 7...» Depuis, on a vu un concert de reggae en Guinée tourner court devant I’excitation des spectateurs, qui ont finalement saccagé toutes les installations du show. En Gréce vers la méme date, les organisa- teurs ont au contraire donné l’ordre aux vedettes d’un concert de jouer dans te seu! but de calmer la foule déchainée : et celle-ci a quand méme traité les chanteurs comme de mauvais larbins incapables, de décharger I'insatisfaction, et a tout cassé. Les sauvages sont partout dans le monde. A u Heysel, les gens venant voir un match de haute tenuc n’avaient pas de raisons particuliéres Le simple fait que nous ayons pris la défense des hooligans contre la calomnie et la répression a fait partout scandale, jusque chez des gens proches. Les arguments qu’on a tenté de nous opposer relévent tous du méme jugement moral, qui ne voit li que violence irrationnelle et gratuite. I n’y a pas d’actes gratuits dans ce monde : il y en a qui paient parfois trés cher pour le savoir. Ensuite, le hooliganisme est une manifestation immédiate de linsatisfaction qui n’a rien d’étonnant ni de cho- quant aprés une semaine d’ennui et de labeur. La misére a toujours quelque chose de honteux pour les réformistes, de sacrilége. Ils ne comprennent pas davantage en quoi consiste la misére de tous les jours, et donc la violence qu’elle engendre. Nous affirmons que les pauvres ne sont unis que dans la rupture de tous les freins sociaux et le renversement de toutes les lois. Sinon, ils ne constituent en rien une communauté. C'est seulement en exprimant leur insatisfaction que les pauvres peuvent se reconnaitre. C’est par cela que s’opére le renversement de situation, et qu’ils se trouvent unis dans Vaffrontement avec ennemi commun. Un commissaire anglais déplorait, au lendemain de la belle émeute d’ Handsworth, le fait que les gens considérent ¢4 comme un amusement, au méme titre que le hooliganisme du foot, En tout cas, l’affaire du Heysel aura créé des conditions nouvelles pour les 6 hooligans, avec le quadrillage militaire des stades qui a suivi. Désormais, ceux qui vont au match pour se défouler seront obligés de s‘attaquer aux flics présents en masse sur place, plutot que de se battre contre les supporters adverses. C’est ce qui s'est déja produit a Leicester le 9 octobre. Le moment of la bourgeoisie et I’Etat achévent d organiser la séparation qui définit les pauvres et leur rendent I'existence absolument invivable, est aussi celui qui erée les conditions d’un renverse- ment de situation. Ce qui sépare les gens, et qui en fait précisément des pauvres, est aussi ce qui les identifie. Les pauvres ne se connaissent pas, ils se reconnaissent. Début septembre 4 Marseille, aprés une course-poursuite succédant a un braquage raté, les flics abattent un des jeunes braqueurs devant lacité La Paternelle : ils sont aussit6t attaqués par les habitants du lieu, révoltés, et doivent se replier aprés un vigoureux échange de pierres et de grenades. Au grand éonnement des flics et des journa- listes, puisque la malheureuse vietime n’était pas originaire de cette cité, ct n’était pas arabe non plus (S'il avait été de la Paternelle, les flics auraient alors eu affaire 4 un soulévement aussi violent qu’a Brixton ct A Tottenham). Les jeunes principalement arabes qui habitent la Paternelle se sont immé- diatement reconnus dans le sort fait par les flics & ce jeune inconnu, eux qui subissent exactement les mémes galéres. Jusque dans le quartier des Halles Paris, qui est pourtant psychogéographiquement Popposé exact des Quartiers Nord de Marseille, od ’arrestation dun petit dealer provoque un ras- semblement de 400 personnes qui s’attaquent aux flics et méme au décor (¢a s’est passé en septem- bre). L'indifférence et la frime qui régnaient contradictoirement aux Halles ont trouvé la une ébau- che de dépassement. Nous en sommes contents. IV. NOUS, CANGACEIROS n’y ait que la qu'il se passe quelque chose. Seulement, beaucoup de nos semblables y vivent, ¢t souvent nous-mémes, Nous ne faisons pas que parler de la violence : c'est notre élément, et méme peut-on dire, notre lot quotidien. La violence est d?abord celle des conditions qui nous sont faites, celle des gens qui les défendent et plus rarement, hélas, celle que nous leur renvoyons & la gueule. Nous ne connaissons pas tous nos ennemis, mais on connait ce qu’ils défendent. Tous nos alliés ne sont pas forcément nos complices. Il arrive qu’ils le soient. Nous ne sommes pas en rapport avec tous nos alliés, Les chémeurs qui combattent l'indigence sont autant nos alliés que les travail- leurs qui se révoltent contre le travail et échappent au contréle des syndicats. Nous ne pensons pas détenir une vérité universelle, mais la communiquer. Les vérités universelles sont celles qui se com- muniquent, pas celles que l’on détient. A ceux qui se demandent si nous sommes assembléistes, con- seillistes, nous répondons que ce qui nous importe c’est de savoir comment les gens établissent et organisent le dialogue. Nous ne sommes pas des terroristes parce que nous tenons a la clandestinité creuse vieille taupe, disait-on jadis. A notre époque, les gens qui affirment des exigences révolution- naires passent pour des réveurs. Mais l'homme est fait de la méme matire dont sont faits ses réves. Nous sommes révolutionnaires. Os Cangaceiros veut dire : «Tout est possible», « Nous sommes en guerre», «Rien n'est vrai tout est permis». Nous sommes nombreux, par rapport a l’atomisation régnante, On a beaucoup dialliés de par le monde. N ous parlons beaucoup de la violence dans les banlieues. Toutefois nous ne pensons pas qu’il Notre programme est trés ancien : vivre sans temps morts. Nous comptons bien sir lui assurer sa publicité par le scandale. II n’y a pas d’autres moyens dignes dun tel programme. Notre existence en elle-méme est déja un scandale. Nous ne sommes évidemment pas indispensables : toutefois il se trouve qu’en plusieurs occasions nous avons d@ I’étre. Dans la guerre sociale, nul ne peut étre dis- pensé. Nous sommes aussi trés méfiants — l'expérience prouve qu’on ne Vest jamais assez. La méfiance juge de la confiance qu’on accorde aux autres. Nous ne faisons pas vraiment partie de ce qu’on appelle couramment «le monde du travail», encore que nous en sommes issus. Mais lorsque des luttes dignes de ce nom sy déroulent, elles combattent elles aussi le monde du travail et s'en prennent a ce qui contraint les pauvres au travail, la nécessité de argent. Nous expliquons le fait qu'il n’existe a l'heure actuelle aucun autre groupe comme le nétre en Europe par cet autre fait, que nous sommes tout simplement les premiers. Bien stir, notre revue a ? une diffusion dérisoire en regard de nos énormes ambitions, Mais |’on compte sur la force d’esprit de nos lecteurs pour y pallier, ce qui ne remet pas en cause nos ambitions. La diffusion d’une telle revue n’a évidemment rien A voir avec la diffusion massive et quotidienne des mensonges de la presse. Si son audience est quantitativement limitée, elle s’adresse a de possibles interlocuteurs et non @ une masse de spectateurs. Et micux vaut avoir avec soi gens d’élite et d’escarmouche que masse informe. Cela favorise les énormes ambitions. Nous sommes contre toute hiérarchie, et notre association se veut égalitaire dans la mesure ou chacun doit étre en mesure d’y décider. Le fait de nous référer 4 des intellectuels comme Marx et Hegel ne nous géne pas : & leur époque, on pouvait étre un intellectuel sans étre un pute intellectuelle. A présent c’est fini et méme impossible. De plus, ils n’étaient pas que des intellectuels puisqu‘ils ont cu une action sur le monde. Nous considérons comme possible des contacts suivis avec d’autres groupes sur cette condition élémentaire : le dépas- sement de toute forme d’agitation/propagande dans son activité. Ce que nous critiquons dans la politique, c’est I'Etat. La question est d’apporter du sang neuf dans cette époque, et d’en avoir les moyens. A plu- urs reprises, lorsque nous sommes allés rencontrer des grévistes mineurs en Grande-Bretagne, on hous a pos¢ cette question éémentaire ; «Quelle force, constituez-vous réellement ? Qu’allez-vous pouvoir faire des informations que nous vous donnons ?». A ces questions il faut étre en mesure de répondre clairement, d’autant qu’un regroupement comme Ie notre n'est pas évident pour tous. On nous a aussi demandé, en Pologne : «Mais qui done &tes-vous ? Quel est votre mouvement ?». Il faut savoir manifester le caractére universel de notre existence. L’intérét que nous portons aux révol- tes de nos semblables dépasse I’intérét qu’a Ie pauvre isolé pour le monde, qui est souvent sans moyens. Cependant, il doit étre bien clair que nous ne parlons que de ce qui nous concerne. En aucun cas nous entendons faire de I’assistance aux luttes d’autrui. Nous entendons simplement les rencontrer, et prendre part aux réjouissances. La plupart des travailleurs révoltés que l’on est amené @ rencontrer sont encore influencés par |’état d’esprit militant issu de I’ex-mouvement ouvrier. En Pétat actuel, on ne peut miser que sur des rencontres avec des individus pris isolément, encore qu'il nous arrive de passer par le biais de groupes organisés qui conservent encore quelques illusions sur le 8 syndicalisme et oil se trouvent des travailleurs révoltés, Si activisme de ces groupes nous | froids, on y connaiit des gens qui sont trés proches de nous par le refus du travail Les jeunes kids de banlieues, ayant plutét 'habitude de rencontrer des gens isolés ou en bandes locales, sont toujours un peu étonnés de voir, quand ils nous rencontrent, un groupe constitué et organisé. A lopposé, les travailleurs en lutte, ayant plutét I’habitude de voir des gens qui agissent en tant que membres d’une organisation officielle, sont étonnés, quand ils nous rencontrent, de voir des individus qui semblent agir en Icur scul nom. En Grande-Bretagne ou en Espagne, nombre de leurs révoltés ont été ainsi surpris de voir un groupe de chémeurs-a-vie, organisés, ayant des contacts et des informations internationales, et disposant de certains moyens, alors qu'il existe indé- pendamment de tout appareil politique et syndical. Finalement, nous intriguons par notre simple existence. Mais de toute facon, le seul risque sérieux que nous courons, c’est celui de mourir pauvres. trav: Notes établies par : Yves Delhoysie Georges Lapierre Louise Riviere 10 ECOSSE Plas + is sont les premiers com give ct ks demic b eeprend Ravenscraig NORTH YORKSHIRE Un geese 2 dé tue 3 Ferry Badge SOUTH YORKSHIRE CCononwood : 1* puis du York en gréve (Ongreave : 3 semaines dalfrentements tes woken Emeuies dans 28 puis Lei da 12 aovembee DONCASTER AREA Rossington : le puis cs incendé NORTH NOTTS Haworth : 10 000 pickes Olleron : un geevite BARNSLEY AREA teem Sour waus Yeh tion Ne aruve rvont J vonbars Unchatrds en \, sanemaiee a BRICK KEEPS BRITAIN BEAUTIEUL ! (1) mineuts britanniques ont fait gréve. Ce fut la plus longue en Grande-Bretagne depuis celles du début du sicle, et une des plus achar- nées, des plus violentes qu’ait entamé une caté- gotie d’ouvriers. Les mineurs se référaient fré- quemment i celle de 26 comme élément de com- paraison, pour exprimer a quel point il était inha- bituel de voir mobiliser autant de flies contre des grévistes. Un tel déploiement de force n’aurait pas &té concevable lors des décennies précédentes — sauf évidemment en Irlande du nord. Les gré- ves de 72 et 74 s’étaient développées dans un tout autre contexte social et avaient été victorieuses. P endant un an, de février 84 4 mats 85, les La vie des mineurs et d'une grande partie de la population des bassins miniers s'est trouvée trans- formée en un an de gréve. Beaucoup de gens ont pris des initiatives qui rompaient avec existence routinige du travail. Constamment des mincuts cx des femmes de mineuts ont voyagé 4 travers toute |'Angleterre pour organiser des piquets, pour collecter de I'argent... Tous ceux qui partici- paient aux piquets du matin dormaient peu, seu- Jement deux ou trois heures par nuit. Un gréviste intervogé par un journaliste sur la fatigue causée par la greve, répondait que, de toutes facons, ils auraient bien wop de temps pour dormir apres, quand ce serait fini ! Les welfares, normalement ouverts aux sculs mineuts, étaient devenus des centres d'activité dans les villages miniers. Ils res taient ouverts route la nuit. Dans un pays of) Mheure Iégale et incontournable de fermeture est 23 H, on pouvait enfin boire et bavarder toure la nuit, Des jeunes non mineurs, nous ont présente comme une conquéte de la gréve qu’ils puissent s'y réunir, ce qu’ils voulaient préserver apres la greve. Sous différentes formes, une résistance collec- tive a la force employée par I'Etat s'est dévelop- pée, de la part de toute une population. L'orga- nisation conte la penurie s‘est faite collective meat, La participation aux piquets devant les puits a été massive : des femmes et beaucoup de gens qui n’étaicnt pas mineurs sont venus sc join- dre & eux, notamment les chOmeurs habicant prés des puits, et méme venant de grandes villes. Face au quadcillage des fics et a leurs provocations, la population s'est organisée : par exemple, & Hat- field (Sud-Yorkshite), les flics ont tenté une fois de pénévrer dans le welfare, mais ils n’ont pu y réussir. Ceux qui s'y trouvaient séunis se sont monttés assez menacants pour les en dissuader (cela n’a malheureusement pas été possible tou- jours et partout, les flics ont parfois arrété des gens dans les welfares). Quand les flies ont investi toutes les régions miniéres, la colére s'exprima dans des émeutes et des attaques conte les com- missatiats. Des actions commando ont détruit du matériel de la mine appartenant au NCB, Les jau- nes et ceux qui ont pris parti pour eux ont été mis a I'index, bannis littéralement des villages minicrs. Ils ont du souvent partir et se metire sous Ia protection des flics. Certains commercants qui refusaient de faire crédit (assez rares) ont écé pil- és, ainsi que parfois des supermarchés. Etat a liveé une bataille non seulement contre les mineurs, mais aussi contre tous ceux qui se sont reconnus pour résister & ce déploiement de force. II ne s'agissait plus seulement d'un conflit du travail pouvant prendre certaines formes vio- lentes, mais d'un conflit social, qui a suscité Vintérét_ non seulement en Grande-Bretagne, mais dans le monde entier. La détermination de toute une population 4 résister A une véritable machine de guerre mise en ceuvre contre elle a éé impressionnante Les mineurs, dont la combativité est légendaire en Grande-Bretagne, constituaient le dernier sec- teur ouvrier que |’Etat britannique devait mettre 4 genoux pour parachever la contre-offensive sociale qu'il m&ne depuis les 80". S'il réussissait & abattre les mineurs, il réduisaic le dernier bastion de la combativité ouvrigre des 70° (Pa due da vorflit, qui annonce que FAngleterte» Projectile fet caffchée un peu parout en Grande Bretagne pendant la la brigue fair le charme de ‘brigue sedis tellement les revises que ce fur ut u L’Angleterre était malade de V’indis ses ouvriers, ce que la bourgeoisie européenne a appelé la «maladie anglaise». Elle bawtait le record d'Europe du nombre d’heutes de gréve. L'esprit général de refus du travail s‘exprimait parfois en de véritables defis lancés a I'Etat, comme la gréve des mineurs en 72. Les ouvriers Gtaient en position de force. Jusqu’en 78, les gouvernements qui vont se suceéder s'évertiérent, sans succés, d’enrayer cette offensive par des mesures législatives et poli- tiques. Le gouvernement Heath tenta a plusieurs reprises d’appliquer «the industrial relation act» (2) et dut reculer chaque fois devant lz menace d'une gréve générale sauvage. Il laissa la place en 74 aux travaillistes De 74 4 78, ccux-ci s'efforcerent d’apporter une solution politique en s'appuyant sur ce qui restait d'influence aux trade-unions. Ils conclu- rent un epacte social» qui visait & imposer un régime d’austérité aux ouvriers (blocage des salai- res, mesures anti-gréves). Mais ils ne parvinrent pas faire cesser de facon durable I'agitation dans, les usines. L’hiver du mécontentement, en 79, précipita la chute du gouvernement Dés le milieu des 70’, les capitaux ont entamé un exode vers des zones plus dignes de confiance (sud-est asiatique, Amérique du sud, Afrique). Index det noms snglai, Scab jaune, sigaife firemen ccoute sur re plaice Welfare: maison des mineuts 00 ily 4 évidemmmens un pub sy eoare galement le section lle syed Picket : ce sont les gens qui patcipent2ux paquets de gréve Picketine; c'est le piauct proprement dit Mas: picket: piquet de masse. epreupant sur wn lie les mineuts dep sieuts puts (de 300 & 6 00). ying pickets: piquess voli, is allen pigueter un endroit pat sur prie, Exirémement effcces, is ort 6 steeds pat la oie combats ar une amée de flies Branch. meeting Women Suppor Group: reptouperment de feaines de miveuts occupa des collectes et de Fomganiation collective des moyens de subss- tance. Ces groupes jouerent un fle acif et dynamisan: dans la reve. TUC : Tade Union Congres. Cenfédéation rationale de tous les ade- unions (sya. NUM: National Union of Mineworkers. Syniens desi alent syndiques 100%. A le finde la gree ese Derbyshire ont fait secession ce qui aes deveru que recemment officiel ‘TGWU : Syncicat des transports et de la métallugie. C'est le plas gros teade-union. On y trouve notamment les docker: et Is conducteuss de NCB ; National Coal Board, Organiame diet qui give kes Gregor ea 4 €xé ke dicecteur pendane la give Labour : parti des uavallistes, gauche anghise io lca des incurs enue sous égide du NUM. 3 Me Tovies: comewateus, droite ange ows : Nowinghanhite, Yorks Yorkshire Wales: Pays de Galles 2 Ce mouvement s'est effcetud alors discrétement, a la seule connaissance des financiers. Cette ouverture sur le marché mondial, qui caractérise dailleurs ensemble des nations industrielles avancées (Etats-Unis, Japon, URSS) a permis aux capitalistes anglais de prendre leurs distances face aux difficultés croissantes de l'industrie anglaise L’apparcil industriel avait peu évolué, et devenait de moins en moins compétitif : dans ce pays od les ouvriers écaient aussi notoitement indiscipli: nés, les entreprises étaient réticentes 2 investir pour le moderniser. Ce que Thatcher traduit & sa maniére en disant que «si on laissait faire les syndicats, on transformerait I’Angleterre en musée industriel» Cet exode des capitaux fur évidemment encou- ragé a partir de 79 par la venue au gouvernement des tories, farouches partisans du libre échange et de la libre concurrence, Grace une totale liberté de circulation, les capitaux ont quiteé |’ Angle- terre, et, subissant de plein fouet la loi du marché mondial, des pans entiers du vieil apparcil indus- triel se sont effondrés, entrainant la mise au ché- mage d’une masse de gens (4 millions aujourd'hui). La bourgeoisie anglaise, depuis l'époque victorienne, a toujours été tentée de trouver dans le libre éhange une solution a ses problemes sociaux. Le capitalisme anglais a, par le biais des pays du Commonwealth, étendu sa puissance financiére au reste du monde, avec les USA et leur soutien logistique Crest partir de ces nouvelles bases que la bourgeoisie britannique put mettre les ouvriers face aux conséquences de leur révolte, L’ouver- ture sur le marché mondial 2 permis de renforcer avec méthode la concurrence sur le marché du tra- vail et d'ageraver la séparation entre les gens. Les ouvriers sont contraints de se défendre séparé. (2) Lot sur les relations sociales qui visa &restreindse les posible de préve, en vigueur au dabut des 70 ment, secteur apres secteur, face @ une ‘contre- offensive bien préparée et conduite unitairement Le gouvernement Thatcher va mettte tous les moyens de I’Etat dans cette entreprise de «net- toyage> de I’Angleterre. Toutes les gréves qui se sont déroulées depuis le début des 80", dans la sidérurgie d’abord, automobile ensuite, les chantiers navals enfin, n'ont pu empécher des milliers de licenciements (80 000 dans la sidérur- gie par exemple). C’est dans ce contexte défensif, dans une Angleterre déja passablement newoyée qu’a éclaté la gréve des mineurs, L’Etat s’est bien gardé d’affronter les mineurs en 81 en méme temps que les sidérurgistes et les ouvriers de Fautomobile car une reconnaissance aurait pu alors naitre d'une colére commune ct d'une con- vergence d’intéréts Cette gréve a du se dérouler dans les conditions les plus hostiles. Dans les 70°, il aurait été impen- sable pour un travailleur de traverser un piquet, et a fortiori impensable qu’un sidérurgiste aille availler i décharger du charbon scab. Ce conflit s'est présenté d’emblée comme une épreuve de force décisive : pour le gouvernement, venir & bout des mineurs signifiait une victoire décisive dans le processus de mise au pas des ouvriers, et pour les mincurs, il s'agissait de résister sur la position de force acquise dans les 70° "est une stratégic mondiale qui a décidé C de la fermerure des puits en Grande- Bretagne. Plus «d’issue négociée avec les partenaires sociaux», on introduit & la place les forces du marché comme principe de référence et seul reméde au mal britannique. Alors que depuis la hausse des tarifs pétroliers, la consom- mation du charbon est en constante progression en Europe, les mineurs de ces pays cotitent trop cher, Depuis 73, les multinationales (Exon, BP, General Electric, etc.) investissent dans le char- bon et se tounent avec intérét vers les pays of les coats de main-d’ccuvre sont minimes (Afrique du sud et centrale, Colombie, Indonésie, etc.) : la concurrence entre les pauvtes y est extréme, ct les mouvements de révoltes y sont réprimés sauvage- ment, Par exemple, le charbon sud-africain vaut deux fois moins cher que l'anglais. En consé- quence, le NCB veut faire tomber la production de 105 496 millions de tonnes par an, ct suppri- mer & terme tous les puits périphériques (Ecosse, Wales, Durham, Kent). L’argument du NCB selon lequel les puits & fermer en priorité sont <économiquement non rentables» est apparu immédiatement comme un pur mensonge, Il appartenait simplement aux responsables locaux du NCB d’additionner les fermetures jusqu’a un toral de 4 millions de tonnes par an, dans un pre- miet temps. En 80, afin de tester le degré de mobilisation des mineurs, le NCB avait annoneé la fermeture de quelques puits dans le South-Wales, pour ajourner aussitdt son projet. En 82, il a réussi a fermer 20 puits et A supprimer 20 000 emplois, avec l'aide du NUM, dans le cadre dune procé- dure obtenue en 74 par le syndicat qui lui don- nait un droit de regard sur les restructurations toute fermeture de puits devait ere soumise & arbitrage d’une commission tripartite au sein de laquelle le NUM pése autant que le NCB. Alors que le Kent s’était spontanément mis en greve de soutien au Pays de Galles, le NUM rejeta route idée de mobilisation nationale. Cette prise de position lui fut amérement teprochée en 84 Alors qu’en 82, les mineurs étaient encore en position de force face 4 "Etat, en 84 il n’était méme plus question pour I’Etat de faire semblant de négocier. Le NCB voulait étre le seul maitre des décisions. En mars 84, en court-circuitant la procédure de 74, les Charbonnages entendaicnt bien imposer I'épreuve de force. 1a, il n’y a méme pas eu un semblant de plan de reconver- sion jeté en pature aux syndicats, ce qui interdi sait d’emblée le genre de manipulation qu'on a pu voir en France dans la sidérurgie ou l'automo- bile. A présent l'envoi des casqués, qui n'est dhabitude que la face cachée des plans sociaux, est employé d’emblée. Pour remettre de l'ordre dans les charbonnages britanniques, I’Etat a fait appel & un mercenaire dont le pedigree !’a impressionné : lan McGregor (depuis quelque temps apparait sur le marché international une nouvelle race de mercenaites 13 spécialistes de la guerre sociale). Cet écossais a commenc€ sa cartitre et sa fortune aux USA 02 i s'est signalé notamment par la rapidité avec laquelle il a su nettoyer une grande société de charbonnage, Amay. Le gouvernement anglais l’a acheté pour 2,5 millions de dollats a la banque Lazard fréres, Ila d’abord été chargé de mettre au pas les sidérurgistes ; bilan de l'opération : 80 000 emplois supprimés au prix d'une longue grive de trois mois, infructueuse, des sidérurgis- tes soutenus par les mineurs La décision du NCB a tout de suite été enten- due pour ce qu'elle était, une déclaration de guerre, sans téve ni compromis. Les mineurs nont pas été dupes du pseudo-arrangement qui Jeur était proposé : 10 000 F par année d’ancien- neté, ce qui est encore une tentative de division puisque beaucoup de mineurs sont jeunes et ont peu d'ancienneté. Le but déclaré de I'Etat est d’en finir une bonne fois pour toutes avec les mineurs. Ceux-ci ne sont pas préts d’oublier le discours de Thatcher les qualifiant d’ennemis intérieurs L'Etat s'est préparé de longue date a cette guerre. Avant méme d'artiver au pouvoir, les conservateurs avaient plusieurs reprises explici- tement précisé leuss intentions : «face aux mena- ces de conflits sociaux, la bataille éventuelle se déroulera sur le tetrain choisi pat les tories, dans un secteur od ils pourraient étre vainqueuts» disait Ridley, aujourd'hui ministre des trans- ports ; et Crozier, membre de la droite des tories : «la tragédic ultime n'est pas d’avoir une confrontation mais de la perdres. Toutes les mesures que I'Etat devait prendre & cette fin avaient été dévoilées a la veille des élec- tions de 79 : il fallait accumuler des stocks de charbon en Grande-Bretagne et & |’étranger, reconvertir les centrales fonctionnant au charbon en centrales mixtes charbon-fuel, encourager le recrutement des camionneurs non syndiqués. LE s'est aussi pourvu de toute une série de moyens pour empécher les piquets et les rendre inopérents : interdiction des piquets volants et limitation du piquet & six personnes (loi de 80), création des la fin des 70° d’unités de flics anti- picketing. Il existe méme des tribunaux volants qui jugent les gens sur place et & huis-clos. Sou- vent les procés étaient reportés, et la mise en liberté assortie de conditions extrémement restric- tives (interdiction de sortir apres 21h, interdic- tion d'aller sur les piquets, etc.). Beaucoup 4 furent jugés apres la gréve ; il y ena encore main- tenant, Une autre loi a été vorée pour rendre extrémement difficile une gréve légale : il faut maintenant une majorité des deux tiets, obtenuc lors d’un scrutin par courrier et au niveau natio- nal de l'industrie concernée. C’est une belle salo- petie, les gréves n'ont jamais été déclenchées par tune majorité nationale. Le processus de liquidation de cette force est engagé depuis de nombreuses années, et a été poursuivi tant par le Labour, que par les tories Depuis longtemps de nombreux puits ont fermé, contraignant un fort contingent de mineurs 4 devenir des nomades industtiels périodiquement déporrés d'un puits Mautre. Dans le méme temps, certaines régions comme le Notts. ont connu un afflux massif de «green labour», petits commercants en faillite, paysans et _méme danciens flics (1), qui bénéficitrent des avantages salariaux conquis par plusicurs générations de mineurs, sans en partager la tradition combative. Voulant faire du Notts. une région protégée (res- sources de charbon durables et facilement exploi- tables), le NCB préféra embaucher ces gens-li plutét que des mineurs d'autres régions dont les puits avaient fermé. La plupast de ces «green labours devinrent des scabs. La concurrence enue mineurs des différents puits fut entretenue par l'octroi de primes au ren- dement qui avantageaient certaines régions par rapport & d'autres (le Notts. par exemple, od ces ptimes sont quatre fois supérieures a celles du Yorks., ce qui donne 3 travail égal un salaire deux fois plus grand). En 66, le NCB avait trouvé avan- tage & uniformiser les salaires afin de pouvoir déplacer facilement les mineurs au gré des ferme- tures de puits. Aprés la gréve de 72, il centa diintroduire des primes au rendement comme élément de division entre régions. Malgré I’ oppo- sition des mineurs, le NUM essaya de les négo- ciet. En décembre 77, passant outre un vote con- traire des mineurs, il imposa l'accord. Uy 2 done belle lurette que la vieille strategic de diviser pour régner, en inscaurant hiécarchie ex concurrence entre les mineurs, est effective. Ceci pour donner la mesure de |"imbécilité réformiste qui geint maintenant sur la estutilisé touteslessau- ces en Grande-Bretagne (jusqu’a I'ilotage policier en cours d’instauration qui se nomme «commu- nity polices !). Mais c'est cependant dans un tout auure esprit que les mincurs parlent de «commu- nities». Ce qu’ils nomment ainsi, c'est le mode d'existence collectif propre 4 chaque village minier. Tous les mineurs que nous avons rencon- trés ont insisté sur ce fait que I"Etat cherche a détruire les communautés (ce qui est tout diffé- rent que de parler d'une communauté abstraite de tous les mineurs). Ces collectivités particuliéres ont eu un poids décisif dans le déroulement de la greve. Cette cohésion propre 4 de nombreux villa- ges a permis aux mineurs dexercer une pression soutenue sur la hiérarchie du NUM. Les puits les plus battants ont éé ceux autour desquels existait au préalable une telle collectivité (Sud Yorks., Ecosse, Pays de Galles). Ils ont pu ainsi s‘organi- ser collectivement face a la pénurie, A Corton- wood, il n'y avait debut f€vrier que 22 scabs, parmi lesquels 21 avaient toujours habité hors du village (Brampton). Le 22° fut vite contraint de déménager cn catimini : on vit mal dans une maison carbonisée ! Dans le West-Yorks., par contre, 0 les travailleurs d'un méme_puits étaient souvent disséminés sur plusieurs villages, les scabs étaient plus nombreux. Les grévistes ne se rettouvaient que sur les piquets Il ne s'agit évidemment pas de magnifier ce mode d'existence, dont les mineurs eux-mémes connaissent bien Ix misére. La plupart des jeunes avaient tout d’abord refusé l’existence lzborieuse de leurs parents, et ce n'est souvent qu'aprés plu- sicurs années de chémage et d’ indigence qu'ils se retrouverent contraints d’aller au charbon. Mais, stils n'aiment pas leur travail, ils se battent & la fois contre la séparation accrue qu’ entrainera nécessairement la fermeture des puits, ct contre Varbitraite de I’Etat. Il va de soi que ces collectivi- tés qui s'étaient formées autour d'une mistre commune ont trouvé leur fondement réel en se révoltant contre l’aggravation de cette misére. Elles ont donné naissance 4 ce que des mineurs appelaient des «communitics fights : des com- munautés guerti ent des actions contre les fermetures. Mc Gahey (président du NUM Ecosse) refusa lors d’un meeting d’appeler 3 la gréve totale. Ilse fic frapper parles mineurs de Polmaise. Le 4 mars 84, des l'annonce de Ia fermeture de leur puit les mineurs de Cortonwood vorérent la gréve 2 main levée. Le comité régional du NUM n’appe- lait encore a la gréve que dans le Yorkshire. L'otganisation fédérative du NUM permit aux bureaucrates de tenter une division entre les régions. En 82, quand le Wales se mit en gréve, les tergiversations du NUM local empéchérent le Yorkshire de bouger. Inversement, en mars 84, il fallur que les pickets du Yorkshire descendent pour convaincre les gars du Wales. Dés le début, des piquets volants s'organiserent spontanément afin d’étendre le mouvement aux autres régions, Ces flying-pickets, qui joutrent un réle actif dans extension de la gréve, ne furent reconnus que fin mai par le NUM. Les piquets avaient été jusque la la principale arme des grévistes, Suivant l'excellent principe que Ics pickets ont toujours une bonne raison d’étre la, tres peu de gens acceptaient de passer la ligne. Le picket-line est réellement la frontitre qui sépare les deux camps : quiconque la franchit est un scab, mineur ou non. E n février 84, les mineurs Ecossais entame, En entamant cette gréve, les mineurs pensaient avoir affaice 4 un conflit traditionnel, od il suffi- sait de monter une détermination générale et sans faille pour empécher la fermeture des puits. Mais cette détermination se trouva en butte 3 plusieurs obstacles : aux scabs, les ennemis les plus immé- diats de cette généralisation ; aux députies (3) ; 4 la mauvaise volonté des officiels du NUM, qui (3) Depuriee + agents de séurité qui sot aus utilisé: comme conte males A phaseurs reprise, leur podica, le NACODS, 2 menace de se joimite A le give, ve qui aurie &é détceminans, puiaque cla aurait ‘hurané la puralysic de tous les puts. Mis ile ve garent bien de mere fears memes 4 exécution; celles w’éainn decings qu't obser une augmentation de valaite,«¢ 2 coninuer dete payés sans aller avail, agumentant que les pickets les menacaent. Cortme disit un peket ‘ceut e cragnene pas la fermetute des puis. ib pourtont roujous teouverun jb dans la police |», Ea aril 4, un vote national dena 7 600 pour la eve et 6600 contre, mais il fallait une majoreé des deux tes. Ces lanes arruttent dane de son ilégalité pou ne ps faite gréve. 15 efforcérent d’apaiser la situation ; et surtout a Varsenal de pores envoyés pour contenir & cout prix le mouvement Il s’agissaie pour I'Etat de défendre le Notts. par tous les moyens, comme élément essentiel de division. Les cops y instaurérent l'état de sige. Ils en bloquérent tous les accés, organistrent des expéditions punitives chez ceux qui hébergeaient des pickets, massacraient ceux qui avaient le mal- heur de tomber dans leurs pattes, et bien d’autres saloperies. Le Nous. était le terrain de I'Etat et devait le rester. En continuant 2 produire, il affai- bilissait la gréve ; ill était aussi un exemple et une incitation pour tous les scabs a venir Le 12 avril, le NUM appelait a voter par région sur la poursuite de la gréve. Il ne faisait que rati- fier un état de fait : 80% des mineurs éaient déja en greve et le Notts., comme il fallait s'y attendre, vorait contre la gréve a une forte majo- rité. A partir de cette date, I'Etat allait encore intensifier sa r€pression conucc les pickets qui se pointaient sur le Notts. Certains jugérent qu'il Etait vain d'uscr son énergie dans cette région, alors que des piquets sur des points stratégiques auraient été plus efficaces. Ainsi des mineurs de Frikley utilisérent la somme que le NUM leur avait allouée afin de se rendre dans le Notts., pour aller piquetter une centrale électrique. Deux jours plus tard, le NUM leur coupa les vivres. ‘A partir d'avtil, le conflit gagna en violence Des raids de sabotage furent menés contre cer- tains puits et locaux du NCB ; les grévistes s‘atta- quéxent systématiquement 2 Ia circulation du chatbon, notamment a Ravenscraig (Ecosse). Enfin, il s'agissaic de ceprendre Pinitiative face & la violence des flies Le NUM, jugé wop indécis et peu offensif, commensait a se faire déborder. Son autorité par- tant en lambeau, la direction nationale redressa la barre et adopta une ligne plus dure. Des mass- 16 pickets furent alors organisés de fagon quasi mili- taire — des troupes bien encadrées sont moins dangereuses qu'une foule en colére —. Les affrontements a la cookerie d’Orgreave marqué- rent Ia fin de cette premitre période d’agitation spontanée. Les grévistes voulaient en découdre et le NUM organisa l’affrontement sur un terrain qui leur était défavorable. Pendant trois semaines, du 28 mai au 18 jui a bataille fit rage avec une violence inoue, laquelle I'Etat répondit avec une violence supé- ricure, que lui permettaient les conditions de Vaffrontement. Les milliets de flies présents ne se cachaient méme plus pour massacrer des gens. Par exemple, les brigades canines rabatcaicnt les fayards sur des unités 4 cheval, ne leur laissant aucune issue. II y eut de nombreux blessés. Orgreave fut un moment de rencontte important entre des milliers de gens : ils venaient de toute la Grande-Bretagne, et purent ainsi établir des con- tacts qui durérent par Ia suite. Toutefois, on ne peut que déplorer toute cette belle énergie per- due, puisque dépensée sur un terrain entiere- ment contOlé par I'Etat, Les affrontements d’Orgreave furent congus tant par le NUM que par le gouvernement comme une bataille napo- Kéonienne. Le NUM y gagna un prestige qui ne le quitta plus jusqu’a la fin de la greve. Par cette ruse, il n’apparut plus & contre-courant du mou- vement, méme s'il était loin d’en controler tous les exces. Face & arrogance de I’Etat et 4 la violence des flics, ce ne furent plus seulement les mineurs, mais toute la population des régions concernées par la gréve qui se souleva. A partir du mois de juin et durant tout l'été, de nombreuses arcaques de commissariats réunirent les mineurs, leurs pro: ches et de nombreux chomeurs du coin, Les com- mercants qui refusaient de faire crédit eurent aussi quelques problémes. Le terrorisme policier a engendré une haine des flics qui n'est pas préte de's’éeindre, Eux qui étaient auparavant accep- tés dans les villages comme de bons bobbies appaturent aux habitants sous leur vrai visage les pores, lennemi. De juin a novembre Tampleur de l'offensive contre les fics s'appa- renta visiblement aux émeutes de I'éé 81. Par exemple, les nombreux jeunes qui s' étaient révol- té5 3 Barnsley en 81 sont venus préter main forte aux habitants de Brampron. Face & cette réaction collective, qui prenait au mot ka guerre déclarée par Etat, les flics instaurerent l'état de sige dans certains bourgs ou villages et les investirent maison par maison, comme a Armthorpe ou & Murton, Weoley Fiillam Som Pan 2, 97 Hleall ‘Saalnforth (Hattie ‘sin (ely) . BARNSLEY Raby s Aumabore wl ean ee ROTHERHAM ‘Rossington Pe (ia |¢ SHEFFIELD, souTH FN cece b— q ¢ sibs Gilenon c \ = Au moment méme od les mineuts trouvaient un soutien effectif aucour d’cux, des initiatives locales vont étre prises par les dockets et les che- minots afin d’empécher l'acheminement du charbon jaune. A ce stade, !"extension du conflit écait cruciale et aurait ouvert immédiatement une crise sociale généralisée. Le 9 juillet, les dockers et les marins de Grimbsby ct d’lmmingham se mirent en gréve contre l’embauche d’un person- nel jaune par la direction du port. Trés vite 78 ports furent paralysés, Thatcher-la-salope menaga de la troupe. Le TGWU (syndicat des transports) et le NUS (syndicat des marins) se sont alors cempressés d’appeler a la gréve nationale sur des fevendications purement corporatistes, ce qui leur a permis de négocicr tout aussi rapidement avec I'Etat, et d’appeler Ia reprise du cravail avant méme que le détail de l'accord n’ait &€ révélé. Le 23 aod, les dockers d’Hunterstone (Ecosse) refuserent de décharger du charbon en provenance de Pologne et destiné aux acieries de Ravenscraig. Le déchargement se fit par des sidé- rurgistes (4). Le TGWU appela i une gréve natio- nale le lendemain. Celle-ci s'étendit alors sur 25 ponts et la moitié du uafic maritime fut inter- rompu. Le 18 septembre, alors que le mouve- NoTrs. cmsrRHELD DERBY ment était encore suivi A 60%, les délégués vorérent Ia reprise du travail immédiate sans négociation. Des lors, ke quantité de charbon transitant par les ports ne fit qu’ augmenter (5) De méme, contre les initiatives locales des che- minots qui tefusaient de transporter charbon et minerai, le NUR (syndicat du rail) appela a une journée d’action & Londres et dans le sud-est sans rapport avec le mouvement initial. Néanmoins, les cheminots ont pratiqué un blocus efficacc, ct ils one pris des risques importants. Des conduc- teurs et des aiguilleurs furent menacés, et méme parfois mis 4 pied, pour avoir refusé de faire cir- culer des trains de charbon scab. A King-Cross (Londres), les cheminots se mirent en gréve sau- vage apres avoir assisté 2 un affrontement entre flies et mineurs été 84 marqua le tournant décisif de ce Le Alors qu’en juillet-aodt, unc extension avait semblé possible, 3 la fin de été les grévistes prirent la mesure de leur isole- ment. Depuis plusieurs années, I'Etat a accru sa pression sociale sur les pauvres, les contraignant souvent i une attitude défensive : la crainte de venir grossir les rangs des 4 millions de chémeurs agit de maniére cerroriste dans bien des tétcs Maggie-salope a beau jeu de se targuer de lisole- ment des mineurs, quand elle |’a organisé de con- cert avec cous les rackets syndicaux et politiques. La marche sur Brighton (on se tenait, début septembre, le congrés national du TUC) vint & point pour enterret les illusions que les mineurs pouvaient encore se faire sur l'effectivité d'une solidarité syndicale, Les grévistes comptaient l- bas faire pression sur les directions syndicales pour exiger la gréve générale. Ils n'y trouvérent que de bonnes intentions protégées par un déploiement massif de pores. Les trade-unions prétextaient du caractére «politique» de la giéve pour refuser tout soutien, mais c'était bien évidemment leurs raisons qui - étaient politiques. Si les mineurs espéraicnt ren- verser Thatcher, ils ne songeaient pas spéciale- ment a installer le Labour au pouvoir. Ils avaient (4) UBxt anglais ex piée 3 silver aimporte quelle main d'erave pour boise les gréves En 4, il uta Parmée pour déchargr les bareaux. En 72, 4 Liverpool, i ents d'wilser der tulards pour brser une gréve des cher: lex problabie qu'il I's fie sunt cute année, secritement (6) Pour fire fice a refs des dockets de décharrer le churbon, et pout pater Aéventelles actions commando, Je NCB wtlsa de peelerence de petit port avec dhs penonne sie. Certaine pons déaffeceée Ruent coms fn service pa 'ecestion 7 en téte leur belle victoire de 74 et cette évidence toute simple : s'ils faisaient tomber le gouverne- ment, le suivant ne pourrait revenir sur certaines choses, et aurait été obligé d’endurer leurs exi- gences. Les syndicats se contentaient de pleurni- cher sur les violences, dod qu’elles venaient, de se lamenter sur la fin de la «paix sociale», Mais on sait bien, comme le dit Crozier : «Dans une guerre, il peut malheureusement atriver que les droits de l'homme ne soient pas tout 3 fait respec- téso. En novembre 84, dans un mecting, Wis, seertaze général du TUC, ies violencss « indigaes du mouvement outer >. Aprds ‘Sette Fait copicusement insulté, vt une corde se balancer aucessus dena iste. Cette situation eut une double conséquence entre septembre et octobre : dans un nombre grandissant de puits, certains reprirent le travail, principalement ceux qui, bien que ne franchi sant pas le piquet, s'étaient tenus 4 I'écart de la lucte ; ils ressassaient leurs problémes familiaux et pécuniers, et furent évidemment les premiers 3 craquer, Diautres, détermings 2 n’en pas finie ainsi, exprimérent encore plus violemment leur haine et leur rage. Comme ils se trouvaient désormais contraints de piqueter leur propre puits, ils purent momentanément reprendre I'avantage tactique sur les cops. Cependant, fixés sur leur 18 puits, ils circulaient beaucoup moins. Ils n’allaient plus aux mass-pickets que dans leur secteur, et la communication directe entre grévis- tes se fit plus difficile. Le NUM renforca alors son role d’intermédiaire dans la circulation des infor- mations entre régions. Il accentua encore I'isole- ment des grévistes en réduisant son aide en moyens de transport et en argent Neanmoins ils étaient sur leur terrain, chaque maison était un refuge, et ils profitaient du sou tien actif des familles et d’une bonne partie de la population. Les flics regurent a cette période leurs plus belles branlées. Par exemple, 3 Frickley (Yorks.), ils furene accucillis comme ils le méri- taient. Profitant de la topographie des lieux (an enchevétrement de pavillons surplombant la route d’acc’s a la mine), les gens du village purent facilement les allumer 3 coups de briques L’approvisionnement en munitions était assuré par des gars qui circulaient dans ce labyrinthe avec des brouettes de briques. Bilan des réjouis sances : 42 flics & I’hopital, et pas de perte chez les assaillants. A Cortonwood, durant cing jours (du 8 au 12 novembre) 400 4 4000 personnes affrontérent la police montée ; un mincur avait osé reprendre le travail ! Il y cut plusieurs nuits d’émeutes simultanément dans la plupart des vil ages miniers et de nombreuses embuscades con- tre les flies. Le 12 novembre fut une des plus bel: les nuits d’émeute : une attaque concertée dans vingt-cing puits du Yorks. laissa les flics comple tement impuissants : des commissariats furent atcaqués au cocktail molotov ; des barricades furent construites avec des lampadaires ou du matériel yolé a la mine ; des magasins furent pil- lés. Dans le south-Wales, le formidable disposicif des flics déployé pour protéger les scabs, exacerba la violence des pickets. Ainsi le 30 novembre, des grévistes balancerent un poteau sur un taxi con- duisant un seab au boulot, Le chauffeur fut cu A part les bureaucrates du NUM, il ne s’est trouvé personne pour le regeetter, lui-méme érant du coup un scab. Le seul regret était plutdt qu’ils ne fussent pas morts tous les deux (6). Quelques jours plus tard, dans le south-Yorks., un rail de chemin de fer fut balancé de Ia méme maniére (6) Deux mineusinculpés du eure du chaueur de tas furent con ddamnée 3 la prison ve, apes Lage. Seule, quelques puts du Pays de Galles se mirent en gréve conte len sentences: Inge ne dats que qeel _que jours ft évidemmentimpuisante 3 modifier en ten le cedars ations ; les deus mincuss sont teujous en prion et sans doute pour long, ‘emps

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