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1er cycle – PCEM2 – MB7 – Parasitologie – M1 – Champignons et mycoses 2007-2008

CHAMPIGNONS
Principaux Champignons impliqués en pathologie humaine
Mycoses chez l'Homme

1. Définition bionte. Ils favorisent la formation de spores issues de


la reproduction asexuée, mais les éléments d'attente et
Les Champignons, ou Fungi, sont des organis- de reproduction sexuée y sont exceptionnels.
mes nucléés (Eucaryotes), constituant un groupe A l'état « parasitaire », les Champignons s'ex-
autonome au sein du monde vivant, indépendant des priment dans les tissus sous forme d'éléments
Bactéries, des organismes naguère regroupés sous le levuriformes [Figure 1] et/ou de filaments [Figure
nom de « Protistes », des Végétaux et des Animaux. 2], ou de formations spéciales du mycélium (cellu-
Leur structure primordiale est un thalle dépourvu de les hyalines septées, éléments fumagoïdes, « truffes »
pigment assimilateur, dénommé « mycélium » chez les aspergillaires, grains fongiques, sphérules, ...).
Champignons. Ils se comportent donc nécessaire-
ment en hétérotrophes vis-à-vis du carbone et utili-
sent les matières organiques comme source d'énergie. 3. Principaux Champignons impliqués en
Ils sont consommateurs, décomposeurs, saprobion- pathologie humaine
tes ou exceptionnellement parasites obligatoires
(essentiellement sur des Végétaux). La définition Les Champignons d'intérêt médical sont répartis
complète des Champignons fait appel aux caractères dans divers groupes taxonomiques au sein des Eu-
suivants : mycètes. Ils suivent en principe les désinences taxo-
* Les caractères morphologiques concernent nomiques classiques : Ordre (-ales), Famille (-aceae),
quatre sortes d'éléments. -1) les éléments végéta- Genre (initiale majuscule), espèce (initiale minuscule).
tifs sont représentés par un mycélium unicellulaire de La Classe des Zygomycètes groupe les Moisissu-
quelques µm (levure) et/ou pluricellulaire pouvant res à filaments coenocytiques, cloisonnés de loin en
atteindre plusieurs mètres (« hyphe » ou filament loin, et dont la reproduction sexuée passe par des
mycélien); -2) les éléments de la reproduction zygospores. Cet ensemble est bien délimité et, si
asexuée sont des spores diverses nommées selon toutes les espèces n'ont pas montré de stade sexué,
leur origine ou forme : blastospores, arthrospores, leurs caractéristiques biologiques et morphologiques
aleuriospores, conidiospores, phialospores, sporan- sont cependant suffisantes pour les intégrer dans
giospores, chlamydospores; -3) les éléments de la cette Classe. Parmi les Zygomycètes, seules les Muco-
reproduction sexuée sont des zygotes (ou zygospo- rales, occasionnellement responsables de mucormy-
res), des ascospores ou des basidiospores; -4) les coses chez des patients particulièrement immuno-
éléments d'attente perdurent, parfois de nombreuses permissifs, doivent retenir l'attention du médecin
années, sous forme de fragments d'hyphes, de dias- européen.
pores ou de sclérotes. En ce qui concerne les Champignons à filaments
* Les caractères biochimiques essentiels sont la régulièrement cloisonnés, la reproduction sexuée des
composition de la paroi (chitine-glucosane, chitine- Ascomycètes aboutit à des ascospores formées à
mananne, mananne-glucane...) et la biosynthèse de la l'intérieur d'asques (ascus, -sci, sacs), alors que celle des
lysine (ayant pour intermédiaire l'acide amino- Basidiomycètes est caractérisée par la formation de
adipique). basidiospores sur des basides (basidium, -ia, petites
* Leurs caractères écologiques traduisent la colonnes). La taxonomie linnéenne s'applique alors
diversité de leurs modes de vie. Les Champignons parfaitement. Certaines espèces peuvent cependant
sont saprobiontes, symbiontes, parasites par oppor- bénéficier d'une double appellation quand leurs états
tunité, exceptionnellement parasites vrais. asexués ou imparfaits nettement individualisés (ana-
morphes) ont une désinence différente des états
sexués ou parfaits (téléomorphes). En principe, le
2. Différents états morphologiques des nom de la téléomorphe devrait primer sur celui de
Champignons selon leurs milieux de vie l'anamorphe, aussi bien dans les publications que
dans les résultats de laboratoire. Toutefois, en prati-
Dans l'environnement, les Champignons vivent que, cette loi n'est pas entièrement respectée. De plus,
sous des états variés : levuriforme, filamenteux, avec les noms de certaines mycoses (par exemple candi-
sporulation asexuée et/ou sexuée, et sous forme dose, cryptococcose, histoplasmose ...), depuis long-
d'éléments d'attente. temps entérinés par l'usage, consacrent la désinence
Les milieux de culture artificiels à 25 ou 27°C désuète des états anamorphes correspondants.
essaient de reconstituer les conditions naturelles, dans Par ailleurs, la catégorie taxonomique conven-
le but d'obtenir la morphologie de la phase sapro- tionnelle – « form-Class », selon Alexopoulos (1962) -

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des Deutéromycètes a dû être créée en parallèle zymes, biologie moléculaire), une classification plus
pour inclure les Champignons imparfaits pouvant, par proche des affinités naturelles, évitant les dénomina-
leur structure générale (filaments cloisonnés) et cer- tions multiples et souvent abusives, source de syno-
taines caractéristiques (par exemple biochimiques), nymies.
être rapprochés des Ascomycètes ou des Basidiomy- Il est remarquable de constater que les Champi-
cètes, mais qui ne sont connus que sous ce seul état gnons le plus fréquemment isolés de lésions humai-
asexué. Leur reproduction sexuée n'étant pas encore nes ou animales proviennent des groupes telluriques
découverte, ayant disparu ou ayant été remplacée par majeurs, à haut degré de sporulation ou à développe-
des phénomènes de parasexualité, ces formes sont ment localisé intense. Ce sont essentiellement deux
désignées par un taxon qui n'a pas de réelle valeur ordres d'Ascomycètes faisant partie intégrante de la
dans le système linnéen (« form-Order », « form- population fongique habituelle des sols : Eurotiales
Family », « form-Genus », ...). D'une façon presque (formes sexuées des Aspergillus et Penicillium), Onygé-
générale, les identifications par les laboratoires de nales surtout. Ce dernier ordre renferme les formes
biologie médicale sont effectuées sur les formes sexuées connues des agents des grandes mycoses
asexuées, habituellement seules isolées sur les milieux viscérales (histoplasmoses, blastomycose nord-
usuels, et correspondant soit à des Champignons américaine ou chrysosporiose, et vraisemblablement
classés parmi les Deutéromycètes, soit à des états coccidioïdomycose ainsi que blastomycose sud-
anamorphes. Dans certaines conditions de culture, américaine ou paracoccidioïdomycose), mais aussi des
ces derniers peuvent occasionnellement révéler des Dermatophytes. Cependant, ces Champignons qui
fructifications sexuées. C'est donc encore dans la puisent dans les matières organiques en décomposi-
catégorie taxonomique "Deutéromycètes et anamor- tion les éléments nécessaires à leur croissance et leur
phes" que le médecin trouvera classés les Champi- multiplication, bien que déterminant des primo-
gnons le plus souvent impliqués dans les mycoses infestations à forte prévalence (positivité des intra-
humaines, notamment européennes, et tout particu- dermoréactions) dans les zones d'endémie, notam-
lièrement : ment américaines, ne provoquent des maladies graves
- parmi les "Levures" ou Blastomycètes, les que chez les sujets dont les défenses sont diminuées
Candida, les Cryptococcus, les Malassezia ou Pityrosporum et/ou débordées par un grand nombre de spores et la
et les Pneumocystis, responsables respectivement des multiplicité des contacts. De même, une altération des
candidoses, des cryptococcoses, des pityrosporoses et défenses locales (microtraumatisme, macération,
de la pneumocystose; traitement corticoïde, ...) autorise le développement
- entre nombreux autres "Champignons fila- d'une mycose superficielle. L'atteinte des défenses
menteux" ou Hyphomycètes, les Dermatophytes, générales peut permettre l'envahissement dermique
Champignons kératinolytiques des genres Epidermo- après franchissement de la membrane basale, éven-
phyton, Microsporum et Trichophyton, responsables des tuellement la dissémination viscérale. Toutefois, cette
dermatophytoses, et les Aspergillus, impliqués dans généralisation n'est possible que si le Champignon
différentes pathologies, notamment des voies respira- opportuniste tolère la température de 37° C.
toires, dénommées aspergilloses.
En principe, tous les Champignons possédant un
équipement enzymatique approprié peuvent trouver, 4. Principales mycoses européennes
sur ou dans l'organisme humain, les conditions favo-
rables à leur développement opportuniste. Aussi, les 4.1. Candidoses
Champignons isolés par les laboratoires d’analyses 4.1.1. Candidoses muqueuses et cutanéo-
médicales se répartissent-ils dans un grand éventail phanériennes
d'Ordres. Anciennement placés parmi les Fungi, La prolifération des Candida au niveau des mu-
certains embranchements (Myxomycètes, Oomycètes queuses, de la peau et des phanères, détermine des
...) sont désormais classés dans d’autres catégories pathologies très fréquentes. Sont ainsi individualisés
taxonomiques par la systématique phylogénétique trois groupes de lésions :
moderne, étayée notamment par la biologie molécu- ¾ Candidoses buccales et digestives :
laire. N'étant pas non plus des Champignons, sont * Les stomatites aiguës candidosiques regroupent :
également exclus les Actinobactéries, anciennement - la stomatite pseudo-membraneuse, ou muguet
« Actinomycètes », Rhinosporidium seeberi, ainsi que les buccal : enduit blanchâtre en plaques, recouvrant
« Algues » Prototheca, Chlorella et Fissuricella. Par ail- une muqueuse jugale érythémateuse, voire hémor-
leurs, le polymorphisme morphologique et physiolo- ragique; atteinte concomitante fréquente de la
gique de la plupart des Champignons induit une langue (glossite) et du palais (ouranite);
mouvance des dénominations. De plus, certains - la stomatite érythémateuse, souvent après anti-
groupes taxonomiques sont mal définis (Blastomycè- biothérapie : pas d'enduit blanchâtre, mais éry-
tes, Hyphomycètes, ...). Il n'est donc pas possible, thème intense, sensation de brûlure, glossite éry-
dans un souci de schématisation et de clarification, de thémateuse, lisse et vernissée, ouranite;
simplifier encore la liste des Champignons intéressant - la stomatite des dentiers, ou "candidose des pro-
le médecin. Cependant, il est permis d'espérer, en thèses" : érythème intense, limité à la zone prothé-
utilisant des techniques de plus en plus performantes tique.
(microscopie électronique, électrophorèse des isoen-

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* Les Candida peuvent coloniser et pérenniser certai- les. La septicémie à Candida est soit d'apparence
nes lésions de stomatites chroniques, sans pour cela primitive, soit la phase terminale d'une candidose
devoir toujours être considérés comme responsables connue. Elle se traduit par une fièvre et des fris-
de la pathologie : leucoplasie buccale, glossite losan- sons, une altération rapide de l'état général, un tu-
gique médiane, langue noire villeuse, ... phos et une éruption maculo-papuleuse en rash.
* La chéilite candidosique se traduit par un gonfle- Les foyers secondaires sont le plus fréquemment
ment des lèvres, recouvertes de squames sèches et de localisés aux reins, au cœur, à l'encéphale et aux
croûtelles. La chéilite angulaire, ou perlèche candido- poumons. Chaque foyer peut être lui-même à
sique, est un intertrigo des commissures labiales : l'origine de nouvelles décharges candidémiques ou
fissures érythémato-squameuses. septicémiques.
* La colonisation de la muqueuse digestive par les - Candidoses rénales. Du fait de leur rôle de filtre et
Candida détermine divers tableaux cliniques : oeso- de la faiblesse relative de leurs défenses immuni-
phagite (en particulier chez le sidéen; avec ensemen- taires, les reins sont fréquemment et précocement
cement broncho-pulmonaire), gastrite (notamment au colonisés lors d'une candidose systémique. Se dé-
cours des traitements antibiotiques), gastro-entérite veloppent alors une pyélonéphrite, des abcès, ...
(du nourrisson), cholécystite, entéro-colite, rectite - Candidoses cardiaques. Endocardites sévères (sur-
(hémorragique), anite. tout chez le nourrisson) simulant une maladie
¾ Candidoses génitales : d'Osler, voire pancardites.
* La vulvo-vaginite candidosique est liée à un -Candidoses cérébrales. Méningo-encéphalites, mé-
déséquilibre de la trophicité et/ou du pH de la mu- ningites purulentes, parfois pseudo-
queuse vaginale. Elle est favorisée en particulier par la néoformations cérébrales.
grossesse, toutes les affections gynécologiques, la - Candidoses respiratoires. La laryngite candidosique
prise d'œstro-progestatifs et le diabète. Elle détermine est une extension de l'œsophagite et/ou du mu-
prurit vulvaire et leucorrhées crémeuses. guet buccal. La candidose bronchique comporte
* La balano-posthite candidosique est une lésion souvent une importante note allergique. Les can-
inflammatoire du sillon balano-préputial, recouverte didoses pulmonaires parenchymateuses sont des
d'un enduit blanchâtre. broncho-pneumonies ou des formes de dissémi-
* La dissémination ascendante de ces candidoses nation (abcès, miliaire, ...). Les atteintes pleurales
peut être à l'origine d'uréthrite et de prostatite, de et médiastinales sont rares.
cystite et d'annexites, parfois d'uretérite, voire d'at- - Candidoses oculaires. Conjonctivite, dacryocystite,
teintes rénales. uvéite, iritis, irido-cyclite. Kératite ponctuée, kéra-
¾ Candidoses cutanées et unguéales : to-conjonctivite, ulcère cornéen, ... Rétinite, en-
* Les intertrigos candidosiques sont des lésions dophtalmie avec fonte purulente du globe ocu-
des grands plis (axillaires, sous-mammaires, génito- laire.
cruraux, ...) et des sillons interdigitaux, parfois inter- - Autres localisations. Candidoses hépatique, spléni-
digito-plantaires. La lésion est symétrique par rapport que, pancréatique, … Cholécystite candidosique
au pli, prurigineuse, érythémateuse et inflammatoire, aiguë fébrile. Otite, parotidite. Abcès candidosi-
humide et suintante, avec un dépôt blanchâtre au que du sein. Foyers cutanés secondaires, sous
fond du pli. forme d'abcès sous-cutanés, souvent compliqués
* L'onyxis candidosique atteint le plus souvent les de phlébite. Péritonite (peu fréquente). Rarement,
ongles des mains, mais existe aux pieds. La lésion localisations osseuses et articulaires, à type de
évolue depuis la partie proximale de l'ongle. La zone spondylodiscite, ostéo-arthrite.
péri-unguéale est le siège d'un péri-onyxis, bourrelet
inflammatoire et douloureux. 4.2. Cryptococcose neuro-méningée
* Les candidoses granulomateuses des sujets très Méningo-encéphalite subaiguë due à la proliféra-
immunodéprimés s'expriment par des granulomes de tion de Cryptococcus neoformans dans l’encéphale et les
la face et du cuir chevelu, avec généralisation se- méninges chez le sujet immunodéprimé. La contami-
condaire. nation, le plus souvent pulmonaire (notamment par
inhalation de Cryptocoques disséminés dans les pous-
4.1.2. Candidoses profondes sières à partir des fientes de Pigeon), détermine une
Sur terrain prédisposé, la dissémination sanguine pneumopathie pseudo-grippale ou une infestation
(candidémie) se produit le plus souvent à partir d'un asymptomatique. Les immunodépressions (essentiel-
foyer primitif intestinal. Toutefois, l'inoculation d'ori- lement SIDA, également hémopathies malignes,
gine exogène par voie chirurgicale (chirurgie viscérale, cancers et autres affections débilitantes) permettent la
cardiaque, ORL, ...) ou sanguine (toxicomanie, cathé- dissémination hématogène, en particulier à l'encé-
ters, ...) est possible. On distingue les tableaux clini- phale et aux méninges, éventuellement aux viscères, à
ques suivants : la peau et au squelette.
- Candidémie et septicémie à Candida. Une candidé-
mie, même passagère, permet la dissémination de 4.3. Pityrosporoses ( = malassezioses) Les
la Levure dans tout l'organisme et son éventuelle pityrosporoses ou malassezioses sont des mycoses
implantation à distance, en particulier dans les or- superficielles cosmopolites dues à des levures lipophi-
ganes les moins protégés par les défenses résiduel- les du genre Pityrosporum (= Malassezia). La principale

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espèce impliquée en pathologie humaine est Pityrospo- * Pneumopathie interstitielle du sidéen. Avant
rum (= Malassezia) furfur, épisaprobionte de la peau et l’instauration des tri-thérapies et de la chimioprophy-
des follicules pilo-sébacés. Les pityrosporoses se laxie, sa prévalence au cours du SIDA était de 50 à 60
manifestent généralement sur terrain hyperséborrhéi- %. Après un début assez insidieux avec des signes
que à l'occasion d'une diminution des défenses locales radiologiques discrets, l’évolution est lente, sub-aiguë,
et/ou générales. Les expressions cliniques les plus sur plusieurs mois. La détresse respiratoire aiguë est
fréquentes sont le pityriasis versicolor, le pityriasis peu fréquente.
capitis et la folliculite à Pityrosporum. Elles peuvent * Pneumopathie du prématuré ou du nourrisson
coexister chez le même patient. (2 à 6 mois). Le début est assez brutal, sans signes
Les taches dyschromiques du pityriasis versicolor, spécifiques, évoluant rapidement vers l’insuffisance
légèrement squameuses, éventuellement prurigineu- respiratoire aiguë.
ses, apparaissent après une exposition au rayonne- * Pneumonie granulomateuse (6% des cas). Les
ment solaire. Se révélant classiquement au printemps Pneumocystis ne sont pas libres dans les alvéoles, mais
ou en été, elles sont très souvent rapportées à tort à entourés d’histiocytes.
une « contamination à la plage ». En fait, la proliféra- * Très rares cas de pneumocystose extra-
tion de la levure lipophile dans l’épiderme, favorisée pulmonaire et/ou disséminée : rate, foie, ganglions,
par l’hypersudation et l’hyperséborrhée, détermine, moelle osseuse, œil, tube digestif, oreille externe et
par zones plus ou moins étendues (« taches »), une moyenne. Exceptionnellement : cerveau, peau, reins,
diminution ou une augmentation de la synthèse et du cœur, pancréas, surrénales …
transfert de la mélanine vers les couches superficiel- Toutes formes cliniques confondues, la mortalité
les, révélées, après exposition solaire, par un hâle de de la pneumocystose reste élevée (25 %), essentielle-
moindre (pityriasis hypochromique) ou de plus forte ment par insuffisance respiratoire aiguë.
(pityriasis hyperchromique) intensité. Ces taches
dyschromiques peuvent persister pendant des années, 4.5. Aspergilloses
la différence d’intensité du hâle étant maximale en Affections dues le plus souvent à Aspergillus fumi-
période d’exposition de la peau au soleil. Elles siègent gatus, mais également, entre autres, à A. flavus, A.
à la partie supérieure du dos, la face antérieure du nidulans, A. terreus et A. niger, Champignons filamen-
thorax, parfois les creux axillaires, les aines, les bras et teux ne se développant qu'à la faveur de facteurs
les cuisses. Leur coloration varie du jaune pâle au locaux ou généraux favorisants. La présence habi-
brun foncé et au blanc (forme achromique). Elles tuelle et constante de spores d'Aspergillus dans l'at-
forment des dessins irréguliers (2 à 20 mm). Le signe mosphère explique la prééminence des aspergilloses
du copeau ou du coup d'ongle apparaît par léger de l'appareil respiratoire.
grattage, détachant d'un seul tenant un lambeau épi-
dermique (formé par la couche cornée parasitée). 4.5.1. Aspergilloses de l'appareil respiratoire
Le pityriasis capitis est une lésion squameuse et * Les sinusites aspergillaires se développent à
prurigineuse du cuir chevelu, associée à une dermite l'occasion d'une altération locale des parois des sinus :
séborrhéique (« pellicules »). infection bactérienne chronique, polypose, anomalies
La folliculite à Pityrosporum, due à la prolifération anatomiques, en particulier traumatiques ...
du Champignon dans les follicules pilo-sébacés, le * Les aspergilloses bronchiques s'expriment sous
plus souvent lors d'un déficit important des défenses forme d'asthme aspergillaire ou de bronchite aspergil-
cutanées, traduit une immunodépression (infestation laire muco-membraneuse.
par le VIH, traitements immunodépresseurs, ...). * Les aspergilloses broncho-pulmonaires sont
diffuses ou localisées. Dans ce dernier cas, il s'agit
4.4. Pneumocystose d'un aspergillome, masse de filaments dans une cavité
La pneumocystose est une affection opportuniste préformée, le plus souvent une caverne tuberculeuse
cosmopolite ne survenant que sur terrain débilité détergée. Dans ce contexte, la réapparition d'hémop-
(prématuré, nourrisson débilité …) ou immunodé- tysies évoque une reviviscence de la tuberculose, mais
primé (sidéen dont le taux de lymphocytes CD4 est la radiologie révèle une image caractéristique en grelot
inférieur à 200/mm3). Elle s’exprime le plus souvent (opacité arrondie surmontée d'un croissant clair).
sous forme de pneumopathie interstitielle sévère et * L'aspergillose pulmonaire invasive, survient le
diffuse, aboutissant au blocage alvéolo-capillaire et à plus souvent chez des patients dont la neutropénie est
l’insuffisance respiratoire aiguë. La plupart des systé- importante (cf. infra).
maticiens s’accordent aujourd’hui pour dénommer
Pneumocystis jiroveci le Champignon responsable de la 4.5.2. Aspergilloses d'autres localisations
pneumocystose humaine, naguère considéré comme * Les Aspergillus peuvent également se développer
la « forme spéciale » hominis de Pneumocystis carinii. La dans le conduit auditif externe, la cornée, la peau
contamination se fait très probablement par voie (brûlures, plaies).
aérienne. L’infestation reste totalement asymptomati- * Des atteintes endocardiques ont été décrites
que chez le sujet immunocompétent. En cas dans les suites de la chirurgie à cœur ouvert (valvulo-
d’immunodépression, Pneumocystis jiroveci se développe plasties) ou après dissémination hématogène.
et se multiplie dans les alvéoles pulmonaires, où il
reste extra-cellulaire. Formes cliniques :

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* La dissémination à partir d'un foyer pulmonaire unguéale. L’envahissement de la table de l’ongle dé-
peut intéresser différents viscères et le cerveau (cf. termine une onychodystrophie. Le diagnostic diffé-
infra). rentiel le plus fréquent est le psoriasis. Le Dermato-
phyte habituellement impliqué est T. rubrum, parfois
4.5.3. Aspergillose pulmonaire invasive et asper- T. mentagrophytes. En fait, tout Dermatophyte peut être
gillose systémique isolé. La fragilisation de l'ongle pendant de longs mois
Ces aspergilloses sont liées à l'extension au paren-
(même sous traitement) favorise la colonisation se-
chyme pulmonaire (aspergillose pulmonaire invasive
condaire par d'autres Champignons filamenteux (op-
= API) et/ou à la diffusion à partir d'un foyer pri-
maire le plus souvent pulmonaire à d’autres viscères, portunistes comme Scopulariopsis brevicaulis et Fusarium
au système nerveux central, au squelette, à la peau … spp.).
L'aspergillose pulmonaire invasive survient géné-
ralement lors de neutropénies profondes (aussi bien 4.6.2. Dermatophytoses de la peau glabre
chez les enfants que chez les adultes), à l'occasion de On entend par « peau glabre » le revêtement cuta-
greffe médullaire chez un leucémique ou de trans- né dépourvu de poils et de cheveux. A l'exception des
plantation d'organes (principalement coeur-poumons paumes des mains et des plantes des pieds, elle est
et foie, beaucoup plus rarement rein). Par ailleurs, elle néanmoins porteuse d'un fin duvet, y compris chez le
se rencontre occasionnellement chez le sidéen en jeune enfant. Toute surface du tégument peut être le
phase terminale. Elle se révèle par une pneumopathie siège de ces lésions plus ou moins prurigineuses.
fébrile résistante aux antibactériens. L'envahissement Cependant, trois grandes entités cliniques sont indivi-
des parois vasculaires par les filaments d'Aspergillus dualisées :
détermine thromboses, hémorragies, et zones d'infar- * La dermatophytose cutanée circinée (Syn. désuet
cissement et de nécrose. L'atteinte parenchymateuse, : herpès circiné) est une lésion érythémato-vésiculo-
systématisée ou diffuse, est objectivée par l'imagerie squameuse de croissance centrifuge rapide, générale-
médicale. En particulier, le scanner (halo, croissant ment due à T. rubrum ou M. canis.
gazeux) permet un suivi évolutif. Une intervention * La dermatophytose inguino-crurale (ancienne-
chirurgicale peut être indiquée en urgence. ment : eczéma marginé de Hebra) est une localisation
Lors de l'aspergillose systémique, la diffusion de l' particulière de la précédente. Souvent unilatérale et
Aspergillus est liée à l'altération des défenses générales due essentiellement à T. rubrum, parfois T. mentagrophy-
lors de : cancers, hémopathies malignes, traitements tes, elle débute sur la face supéro-interne de la cuisse.
immunodépresseurs et corticothérapie, tuberculose, En se chronicisant, elle demeure asymétrique par
irradiations accidentelles ... Elle peut compliquer une rapport au pli inguinal, peut se bilatéraliser, et même
aspergillose pulmonaire invasive. gagner le périnée et le pli inter-fessier.
Diverses localisations sont possibles : cerveau, * Les dermatophytoses des extrémités, dues aux
méninges, orbite, foie, rein, squelette (vertèbres, cô- mêmes Dermatophytes, sont plus fréquentes aux
tes), peau, etc ... pieds qu'aux mains. La dermatophytose interdigito-
plantaire (ou « pied d'athlète ») débute le plus souvent
4.6. Dermatophytoses par une fissure à bords blanchâtres décollés au niveau
Les dermatophytoses sont liées au parasitisme de du quatrième espace, et gagne progressivement la
la peau et des phanères par certains Dermatophytes plante, le dos du pied et les autres espaces par conti-
dont les plus fréquemment isolés en Europe sont guïté. L'atteinte unguéale secondaire survient fré-
actuellement : T. rubrum (65 %), T. mentagrophytes (15 quemment.
%), M. canis (10 %). Tous les Dermatophytes peuvent Bien souvent sont associées chez un même pa-
envahir la peau et les ongles, alors que seulement tient, lésions inguino-crurale, interdigito-plantaire et
quelques-uns attaquent les cheveux et les poils. Les onychomycose, en particulier lorsque l'agent causal se
formes cliniques selon la localisation sont actuelle- révèle être T. rubrum.
ment dans l'ordre de fréquence : - les onychomycoses,
en particulier des orteils; - les dermatophytoses de la 4.6.3. Teignes
peau glabre; - les teignes; - les folliculites suppurées. Progressivement devenues rares actuellement, ces
Très exceptionnellement, un terrain profondément dermatophytoses du cuir chevelu se subdivisent en
immunodéprimé permet la dissémination viscérale trois entités anatomo-cliniques : microsporiques,
(maladie dermatophytique). trichophytiques et favique. Localisation particulière
d'une dermatophytose cutanée, elles évoluent soit
4.6.1. Onychomycoses dermatophytiques vers une colonisation de la tige pilaire (teignes ton-
Elles touchent beaucoup plus souvent les on- dantes : microsporiques, trichophytiques), soit vers
une importante prolifération au niveau de l'ostiole,
gles des orteils (en particulier le premier et le cin-
puis une propagation dans le derme (favus).
quième) que ceux des doigts (souvent contaminés par * Les teignes tondantes microsporiques sont
grattage d'une autre lésion dermatophytique). La caractérisées par des zones arrondies, squameuses et
lésion débute au bord libre de l'ongle ou au niveau du prurigineuses, où les cheveux sont cassés à 3-4 milli-
sillon latéro-distal. L’évolution se fait vers mètres du cuir chevelu. Les Champignons impliqués
l’onycholyse avec dyschromie et hyperkératose sous- sont M. canis, M. audouini langeroni et M. gypseum.

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* Les teignes tondantes trichophytiques sont ...). Les Dermatophytes généralement isolés sont T.
souvent de diagnostic clinique plus difficile. Dans les mentagrophytes, T. verrucosum et T. violaceum. Par ailleurs,
plaques squamo-croûteuses confluentes, les cheveux l'évolution de certaines teignes tondantes peut égale-
sont ou cassés très courts au ras du cuir chevelu, ou ment se faire vers la suppuration.
contournés, inclus dans l' épaisseur des squames. Les
principales espèces responsables sont : T. violaceum, T.
soudanense et T. tonsurans.
* La teigne favique, devenue exceptionnelle de
nos jours en Europe occidentale, est cliniquement
polymorphe : forme classique avec godets, formes
impétigoïde, pityriasique, cicatricielle... Son évolution, Figure 1. - Eléments levuriformes. Spores de Candida albicans
chronique, aboutit à une alopécie cicatricielle défini- à l'examen direct d'un écouvillonnage de muqueuse buccale
tive. Elle est due à T. schoenleini. (muguet).

4.6.4. Folliculites suppurées dermatophytiques


Certains termes, désuets de nos jours, permet-
taient de distinguer quelques formes topographiques :
sycosis (ou mentagre) de la région de la barbe ou du
cou, kérion de Celse du vertex ou de la nuque. Au
plan anatomo-clinique, les pustules folliculaires du
sycosis tendent à s'agglomérer et essaimer à distance.
Celles du kérion constituent un macaron inflamma-
toire surélevé, rouge vif, bien délimité, ponctué d'ori- Figure 2. - Filaments de Dermatophyte à l'examen direct de
fices folliculaires dilatés. En fait, toutes les formes squames (dermatophytose cutanée)
intermédiaires peuvent exister, et d'autres formes
topographiques sont actuellement fréquentes (jambes

Février 2008 6
P. RISPAIL Faculté de Médecine Montpellier-Nîmes

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