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7
Grand amoureux d’histoire, de littérature et de la France en
particulier, Robert Greene parle plusieurs langues couramment
(dont le français). Diplômé de Berkeley, Californie, en lettres
classiques, il est également l’auteur de L’art de la séduction,
Stratégie, les 33 lois de la guerre et Atteindre l’excellence.

Des extraits, des vidéos, des interviews de Robert Greene


sur son site : www.robertgreene.fr

Cette œuvre est protégée par le droit d’auteur et strictement

7
86
99
réservée à l’usage privé du client. Toute reproduction ou dif-

26
53
fusion au profit de tiers, à titre gratuit ou onéreux, de tout ou

3:1
.14
partie de cette œuvre est strictement interdite et constitue une

27
contrefaçon prévue par les articles L 335-2 et suivants du Code

7.1
.21
de la propriété intellectuelle. L’éditeur se réserve le droit de

96
2:1
poursuivre toute atteinte à ses droits de propriété intellectuelle

42
41
devant les juridictions civiles ou pénales.
88
0:8
21

Design couverture : Bernard Amiard


88
53

Traduction : Myra et Lakshmi Bories


43
A:
SC

Mise en page : Sébastienne Ocampo


:E

Titre de l’édition originale : The Concise 48 Laws of Power


om
x.c

Édition condensée de l’œuvre The 48 Laws of Power, publiée


vo
lar

en 1998 aux Etats-Unis par Viking, une division de Penguin


ho
sc

Putnam Inc.
w.
ww

Édition condensée, approuvée par Robert Greene, et publiée


en 2002 par Profile Books Ldt, Grande-Bretagne
Copyright © Robert Greene and Joost Elffers, 1998, 2002

© 2015 Alisio (ISBN : 979-10-929-2855-6) édition numérique de


l’édition imprimée © 2015 Alisio (ISBN : 979-10-929-2814-3).
Alisio est une marque des éditions Leduc.s.

Rendez-vous en fin d’ouvrage pour en savoir plus sur les édi-


tions Alisio
Robert Greene

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O

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Les 48 lois
du pouvoir :
l’édition
condensée

A Joost Elffers Book


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7.1
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3:1
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7
SOMM AIR E

Préface  page 11

LOI 1  page 13
NE SURPASSEZ JAMAIS LE MAÎTRE

7
LOI 2  page 17

86
99
NE VOUS FIEZ PAS À VOS AMIS,

26
53
3:1
UTILISEZ VOS ENNEMIS

.14
27
7.1
LOI 3  page 21

.21
96
DISSIMULEZ VOS INTENTIONS

2:1
42
41
88
LOI 4  page 25
0:8
21
DITES-EN TOUJOURS MOINS QUE NÉCESSAIRE
88
53
43
A:

LOI 5  page 29
SC
:E
om

PROTÉGEZ VOTRE RÉPUTATION


x.c

COMME LA PRUNELLE DE VOS Y EUX


vo
lar
ho
sc
w.

LOI 6  page 33
ww

ATTIREZ L’ATTENTION À TOUT PRIX

LOI 7  page 37
LAISSEZ LE TR AVAIL AUX AUTRES,
MAIS RECUEILLEZ-EN LES LAURIERS

LOI 8  page 41
OBLIGEZ L’ADVERSAIRE À SE BATTRE
SUR VOTRE PROPRE TERR AIN

SOMM A I R E 5
LOI 9  page 45
REMPORTEZ LA VICTOIRE PAR VOS ACTES
ET NON PAR VOS DISCOURS

LOI 10  page 49
FU Y EZ LA CONTAGION DE LA MALCHANCE
ET DU MALHEUR

LOI 11  page 53

7
86
RENDEZ-VOUS INDISPENSABLE

99
26
53
3:1
LOI 12  page 57

.14
27
SOY EZ D’UNE HONNÊTETÉ

7.1
.21
ET D’UNE GÉNÉROSITÉ DÉSARMANTES

96
2:1
42
LOI 13  page 61

41
88
MISEZ SUR L’INTÉRÊT PERSONNEL, 0:8
21
88

JAMAIS SUR LA PITIÉ NI LA RECONNAISSANCE


53
43
A:
SC

LOI 14  page 65
:E
om

SOY EZ UN FAUX AMI… ET UN VR AI ESPION


x.c
vo
lar
ho

LOI 15  page 69
sc
w.
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ÉCR ASEZ COMPLÈTEMENT L’ENNEMI

LOI 16  page 73
FAITES-VOUS DÉSIRER

LOI 17  page 77
SOY EZ IMPRÉVISIBLE

LOI 18  page 81
NE RESTEZ PAS DANS VOTRE TOUR D’IVOIRE

6 S O M MAIRE
LOI 19  page 85
NE MARCHEZ PAS SUR LES PIEDS
DE N’IMPORTE QUI

LOI 20  page 89
NE PRENEZ PAS PARTI

LOI 21  page 93
À SOT, SOT ET DEMI

7
86
99
26
LOI 22  page 97

53
3:1
CAPITULEZ À TEMPS

.14
27
7.1
.21
LOI 23  page 101

96
2:1
CONCENTREZ VOS FORCES

42
41
88
LOI 24  page 105 0:8
21
88

SOY EZ UN COURTISAN MODÈLE


53
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A:
SC

LOI 25  page 111


:E
om

CHANGEZ DE PEAU
x.c
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ho

LOI 26  page 115


sc
w.
ww

GARDEZ LES MAINS PROPRES

LOI 27  page 120


CRÉEZ UNE M YSTIQUE

LOI 28  page 124


FAITES PREUVE D’AUDACE

LOI 29  page 128


SUIVEZ UN PLAN PRÉCIS JUSQU’AU BUT FINAL

SOMM A I R E 7
LOI 30  page 132
N’AY EZ JAMAIS L’AIR DE FORCER

LOI 31  page 136


OFFREZ LE CHOIX :
CHARY BDE OU SCY LLA ?

LOI 32  page 140


TOUCHEZ L’IMAGINATION

7
86
99
26
LOI 33  page 145

53
3:1
TROUVEZ LE TALON D’ACHILLE

.14
27
7.1
.21
LOI 34  page 149

96
2:1
SOY EZ ROYAL

42
41
88
LOI 35  page 153 0:8
21
88

MAÎTRISEZ LE TEMPS
53
43
A:
SC

LOI 36  page 157


:E
om

MÉPRISEZ LES CONTR ARIÉTÉS


x.c
vo
lar
ho

LOI 37  page 161


sc
w.
ww

JOUEZ SUR LE VISUEL

LOI 38  page 165


PENSEZ LIBREMENT, PARLEZ SOBREMENT

LOI 39  page 169


EXASPÉREZ L’ENNEMI

LOI 40  page 174


N’HÉSITEZ PAS À PAY ER LE PRIX

8 S O M MAIRE
LOI 41  page 179
NE SUCCÉDEZ À PERSONNE

LOI 42  page 184


ÉLIMINEZ L’AGITATEUR

LOI 43  page 188


PARLEZ AUX CŒURS ET AUX ESPRITS

7
86
LOI 44  page 193

99
26
SINGEZ L’ENNEMI

53
3:1
.14
27
LOI 45  page 197

7.1
.21
APPELEZ AU CHANGEMENT,

96
2:1
PAS À LA RÉVOLUTION

42
41
88
LOI 46  page 202 0:8
21
88

NE SOY EZ PAS TROP PARFAIT


53
43
A:
SC

LOI 47  page 207


:E
om

SACHEZ VOUS ARRÊTER


x.c
vo
lar
ho

LOI 48  page 212


sc
w.
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SOY EZ FLUIDE

Bibliographie  page 217

SOMM A I R E 9
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w.
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ho
lar
vo
x.c
om
:E
SC
A:
43
53
88
21
0:8
88
41
42
2:1
96
.21
7.1
27
.14
3:1
53
26
99
86
7
PR É FAC E

Le sentiment de n’avoir aucun pouvoir sur les gens et les événe-


ments est difficilement supportable : l’impuissance rend mal-
heureux. Personne ne réclame moins de pouvoir, tout le monde
en veut davantage. Dans la société d’aujourd’hui, cependant,
il est dangereux de paraître avide de p ­ ouvoir, d’afficher ses

7
86
99
ambitions. Il faut montrer des dehors impeccablement décents

26
53
et honnêtes. Mieux vaut donc faire preuve d’un certain sens

3:1
.14
des nuances : se montrer sympathique et liant mais n’en être

27
pas moins habile, voire retors.

7.1
.21
Cette constante duplicité rappelle tout à fait la dynamique

96
2:1
du pouvoir jadis en vigueur à la cour. Tout au long de l’histoire,

42
41
une cour s’est en effet toujours formée autour du personnage
88
investi du pouvoir : roi, reine, empereur, dictateur… Les cour- 0:8
21

tisans étaient dans une position particulièrement délicate : il


88
53

leur fallait bien sûr servir leur maître, mais s’ils paraissaient
43
A:
SC

trop serviles, s’ils cherchaient trop ouvertement à gagner ses


:E

faveurs, les autres courtisans ne manquaient pas de le remarquer


om
x.c

et de leur mettre des bâtons dans les roues. Par conséquent,


vo
lar

les tentatives pour entrer dans les bonnes grâces du souve-


ho
sc

rain devaient être subtiles. Et même les courtisans talentueux


w.
ww

capables d’une telle ingéniosité devaient se protéger de leurs


pairs qui à tout moment intriguaient pour les évincer.
En même temps, la cour était censée être le comble de la
civilisation et du raffinement. On désapprouvait les actions
violentes ou la recherche trop ouverte du pouvoir ; les courtisans
ourdissaient secrètement contre ceux des leurs qui utilisaient
la force. C’était là leur dilemme : tout en étant un parangon
d’élégance, chacun devait se montrer plus malin que ses rivaux
et contrecarrer leurs projets de la manière la plus voilée. Avec
le temps, le courtisan habile apprenait à agir de manière indi-
recte ; s’il frappait son adversaire dans le dos, c’était avec un

P R É FA C E 11
gant de velours et le plus charmant sourire. Au lieu d’utiliser
la coercition ou la trahison pure et simple, le p ­ arfait courtisan
traçait son chemin grâce à la séduction et au charme ; il appli-
quait une tactique consommée de manipulation, planifiant
toujours plusieurs coups à l’avance. La vie à la cour était un
jeu sans fin qui nécessitait une vigilance constante et de la
stratégie : une guerre feutrée.
De nos jours, on se heurte au même étrange paradoxe :
tout doit paraître civilisé, décent, démocratique et juste. Mais
si on applique ces règles à la lettre, on se fait écraser par

7
86
99
plus malin que soi. Pour citer le grand diplomate et courti-

26
53
san de la Renaissance Nicolas Machiavel : « Celui qui veut

3:1
.14
en tout et partout se montrer homme de bien ne peut manquer

27
de périr au milieu de tant de méchants. »

7.1
.21
La cour se voulait le summum du raffinement, mais sous

96
2:1
ce vernis bouillonnait un infernal chaudron de pulsions

42
41
brutales : cupidité, envie, luxure, jalousie, haine. Le monde
88
d’aujourd’hui se croit au faîte de la justice et pourtant les 0:8
21

mêmes vices immondes sont tapis en chacun de nous, comme


88
53

autrefois. Le jeu n’a pas changé. Extérieurement, on est censé y


43
A:
SC

mettre les formes, mais à part soi, à moins d’être stupide, il faut
:E

apprendre à suivre le conseil de Napoléon : avoir une main de


om
x.c

fer dans un gant de velours. Si, comme les courtisans de jadis,


vo
lar

vous pratiquez l’art du louvoiement en apprenant à séduire,


ho
sc

charmer, manipuler subtilement vos adversaires, vous atteindrez


w.
ww

les sommets du pouvoir. Vous serez capable de plier les gens à


votre volonté sans qu’ils s’en aper­çoivent ; et si d’aventure ils le
font, ils céderont et ne vous en voudront même pas.
Les 48 lois du pouvoir se présentent comme une sorte de
manuel de l’art de biaiser. En étudiant les lois de ce livre, vous
comprendrez le pouvoir et ses propriétés. Et en les mettant en
pratique, vous serez en mesure de prospérer dans le monde
moderne, en apparaissant comme le parangon de la décence
tout en étant le manipulateur consommé.

12 P R É FACE
LOI

1
NE SURPASSEZ

7
86
JAMAIS LE MAÎTRE

99
26
53
3:1
.14
27
7.1
.21
PRINCIPE

96
2:1
42
Ceux qui sont au-dessus de vous doivent toujours se sentir

41
88
largement supérieurs. Dans votre désir de leur plaire et 0:8
21
88

de les impressionner, ne vous laissez pas entraîner à faire


53
43
A:

trop étalage de vos talents, ou vous pourriez obtenir l’effet


SC
:E
om

inverse : les déstabiliser en leur faisant de l’ombre. Faites


x.c
vo

en sorte que vos maîtres apparaissent plus brillants qu’ils


lar
ho
sc

ne sont et vous atteindrez les sommets du pouvoir.


w.
ww

L OI 1 13
LES CLEFS DU POU VOIR
Il n’est personne qui, à un moment ou à un
autre, n’éprouve la fragilité de son prestige.
Quand vous dévoilez au monde vos talents,
vous suscitez naturellement envie, ressenti-
ment et autres sentiments inavouables. Il faut
vous y attendre. Vous ne pouvez évidemment
passer votre vie à vous soucier de la mesquine-
rie des autres, cependant, avec ceux qui sont
au-dessus de vous, montrez-vous avisé : dans

7
86
99
les sphères du pouvoir, surpasser le maître est

26
53
peut-être la pire erreur qui soit.

3:1
.14
N’allez pas croire que la vie a changé

27
depuis l’époque des Médicis et celle de

7.1
.21
Louis XIV. Ceux qui atteignent les sommets

96
2:1
sont comme les rois et les r­ eines : ils veulent se

42
41
sentir en sécurité dans leur position et supé-
88
rieurs en intelligence, esprit et charme à ceux 0:8
21

qui les entourent. Croire qu’en faisant montre


88
53

de vos talents vous allez gagner l’affection du


43
A:
SC

maître est une erreur fatale mais courante.


:E

Celui-ci peut feindre de vous apprécier mais,


om
x.c

à la première occasion, il vous remplacera


vo
lar

par quelqu’un de moins intelligent, moins


ho
sc

séduisant, moins menaçant.


w.
ww

Cette loi implique deux règles que vous


devez comprendre. La première est qu’il
peut vous arriver de faire involontairement
de l’ombre à un maître en étant simplement
vous-même. Il en est en effet dont le complexe
d’infériorité est particulièrement sensible.
Si vous ne pouvez vous empêcher d’être
charmant après vous, apprenez à éviter de tels
monstres de vanité, ou trouvez le moyen de
mettre vos qualités sous le boisseau lorsque
vous êtes en compagnie d’un tel maître.

14 LOI 1
Seconde règle : parce que le maître vous
aime, ne vous imaginez pas que vous pouvez
vous permettre n’importe quoi. On pourrait
écrire des livres entiers sur tous les favoris tom-
bés en disgrâce pour s’être cru intouchables
et avoir osé surpasser leur bienfaiteur.
Conscient du danger d’éclipser votre
maître, vous pouvez tourner cette loi à votre
avantage. Tout d’abord, flattez son orgueil.
La flatterie ouverte, pour efficace qu’elle

7
86
99
soit, a ses limites : lourde, voire grossière,

26
53
elle risque de déplaire aux autres courtisans.

3:1
.14
Une flagornerie plus discrète est beaucoup

27
plus puissante. Si vous êtes plus intelligent

7.1
.21
que lui, par exemple, ­prétendez le contraire :

96
2:1
faites en sorte qu’il apparaisse plus intelligent

42
41
que vous. Jouez les naïfs. Faites appel à son
88
expérience. Commettez de petites fautes qui 0:8
21

ne vous feront pas de tort mais vous donneront


88
53

l’occasion de solli­citer son aide — les maîtres


43
A:
SC

adorent ce genre de requête. Un maître dont


:E

l’expérience ne vous apporte rien peut vous


om
x.c

en tenir rigueur.
vo
lar

Si vos idées sont plus créatives que les


ho
sc

siennes, attribuez-les-lui, et si possible en


w.
ww

public. Présentez le conseil que vous donnez


comme un écho du sien.
Si vous êtes naturellement plus sociable
que lui et plus charismatique, prenez soin de
ne pas être le nuage qui l’obscurcit aux yeux
des autres. Il doit rester le centre de l’attention
générale, le soleil autour duquel le monde
entier gravite, irradiant sa puissance et sa
splendeur.
Dans toutes ces situations, ce n’est pas
faire preuve de faiblesse que de déguiser vos

L OI 1 15
forces si cela vous conduit au pouvoir. En lais-
sant les autres vous surpasser, vous gardez le
contrôle de la situation au lieu d’être le jouet
de leurs complexes. Tout cela tournera à votre
avantage le jour où vous déciderez de vous éle-
ver de votre état d’infériorité. Si vous pouvez
accroître encore le lustre de votre maître, alors
vous serez vu comme un envoyé des dieux et
immédiatement promu.

7
86
99
26
53
3:1
.14
27
7.1
.21
Image : Les étoiles dans le ciel. Il

96
2:1
ne peut y avoir qu’un soleil à la fois.

42
41
N’obscurcissez jamais sa lumière,
88
ne rivalisez pas avec son éclat ; au 0:8
21

contraire, fondez-vous dans le ciel


88
53

et trouvez les moyens de faire briller


43
A:

d’un éclat plus vif l’étoile du maître.


SC
:E
om
x.c

Autorité : Se bien garder de vaincre


vo
lar

son maître. Toute supériorité est


ho
sc

odieuse ; mais celle d’un sujet


w.
ww

sur son prince est toujours folle,


ou fatale… C’est une leçon que
nous font les astres qui, bien qu’ils
soient les enfants du soleil, et tout
brillants, ne paraissent jamais en
sa compagnie. (Baltasar Gracián,
1601-1658)

16 LOI 1
LOI

2
NE VOUS FIEZ PAS

7
86
À VOS AMIS, UTILISEZ

99
26
53
3:1
.14
VOS ENNEMIS

27
7.1
.21
96
2:1
42
41
88
PRINCIPE 0:8
21
88

Gardez-vous de vos amis : beaucoup vous trahiront par


53
43
A:

envie. D’autres se montreront gâtés, tyranniques. Un ancien


SC
:E
om

ennemi que vous engagez sera plus loyal qu’un ami parce
x.c
vo

qu’il devra faire ses preuves. En fait, vous avez plus à


lar
ho
sc

craindre de vos amis que de vos ennemis. Si vous n’avez


w.
ww

pas d’ennemis, trouvez le moyen de vous en faire.

L OI 2 17
Le bienfait conserve LES CLEFS DU POU VOIR
son mérite, tant que
Il est naturel de vouloir employer ses amis
l’on croit pouvoir
lorsqu’on a besoin d’appuis. Le monde est
s’acquitter ; quand la
reconnaissance n’a pas dur et leur amitié peut l’adoucir. Par ailleurs,
de prix assez haut, on on les connaît. Pourquoi s’en remettre à un
le paye par la haine. étranger quand on a un ami sous la main ?
Tacite, Le problème est que l’on ne connaît pas
environ 55-120 ses amis aussi bien qu’on le croit. Souvent ils
apr. J.-C., acquiescent à vos propos pour éviter une dis-
annales, iv, 18,
cussion. Ils ne relèvent pas vos travers pour ne

7
traduit par

86
99
J. L. Burnouf pas se porter préjudice. Ils rient plus fort que

26
53
d’autres à chacun de vos bons mots. Puisque

3:1
.14
l’honnêteté renforce rarement l’amitié, il se

27
peut que vous ignoriez leurs vrais sentiments.

7.1
.21
Vos amis vous diront qu’ils aiment votre poésie,

96
2:1
qu’ils adorent votre musique, qu’ils envient

42
41
votre bon goût ; c’est peut-être vrai, mais pas
88
toujours, tant s’en faut. 0:8
21

Quand vous décidez d’embaucher un ami,


88
53

vous découvrez progressivement les côtés qu’il


43
A:
SC

vous avait cachés. Curieusement, c’est votre


:E

magnanimité envers lui qui fausse tout. On


om
x.c

a besoin de sentir qu’on mérite une bonne


vo
lar

fortune. Une faveur peut devenir oppressive si


ho
sc

elle signifie qu’on a été choisi parce qu’on est


w.
ww

un ami et non pas forcément parce qu’on en


est digne. Il y a dans le fait d’engager des amis
une note de condescendance qui les affecte
secrètement.
Engager des amis va inévitablement limi-
ter votre pouvoir. Un ami est rarement le plus
apte à vous aider. Enfin, le talent et la com-
pétence sont bien plus importants que des
sentiments amicaux.
Toutes les situations professionnelles
nécessitent une sorte de distance entre les

18 LOI 2
personnes. Vous êtes là pour travailler, non sur l’utilité que
l’on peut retirer
pour vous faire des amis ; la gentillesse (vraie de ses amis
ou fausse) ne peut occulter ce fait. La clef du Quelqu’un qui
pouvoir consiste à juger qui est le plus apte n’aimait pas Hiéron
à servir vos intérêts dans chaque situation. lui reprocha un jour
D’autre part, vos ennemis sont une mine qu’il avait la bouche
d’or inutilisée que vous devez apprendre à mauvaise. Ce prince,
exploiter. Quand Talleyrand, ministre des de retour chez lui, se
Affaires étrangères de Napoléon, décida en plaignit à sa femme de
1807 que son maître était en train de conduire ce qu’elle ne l’en avait

7
86
pas averti. Comme elle

99
la France au désastre et qu’il était temps de

26
était aussi simple que

53
se retourner contre lui, il comprit les dangers

3:1
chaste, elle répondit :

.14
d’une conspiration contre l’Empereur ; il avait « Je croyais que tous

27
besoin d’un partenaire, d’un complice. À qui

7.1
les hommes sentaient

.21
pouvait-il faire confiance pour un tel projet ? de même. » C’est ainsi

96
2:1
Il choisit son pire ennemi, Joseph Fouché, chef qu’on apprend par un

42
41
de la police secrète, qui avait même essayé de ennemi, bien plutôt

88
le faire assassiner. Il savait que la haine qu’ils 0:8
que par des amis, ces
21

éprouvaient l’un pour l’autre pouvait susciter défauts naturels qui


88
53

une réconciliation émouvante. Il savait que frappent tout le monde.


43
A:

Plutarque,
SC

Fouché, n’attendant rien de lui, travaillerait


:E

environ 46-120
à prouver qu’il était digne de son choix, et
om

apr. J.-C.
x.c

un individu qui a quelque chose à prouver est


vo
lar

capable de déplacer des montagnes. Enfin il


ho
sc

savait que sa relation avec Fouché, sans aucune


w.
ww

contamination affective, ne serait fondée que


sur la satisfaction réciproque de leurs inté-
rêts personnels. Le choix était parfait. Bien
que les conspirateurs aient échoué à détrô-
ner Napoléon, l’union improbable de deux
partenaires aussi puissants généra beaucoup
d’intérêt pour leur cause et l’opposition à
l’Empereur commença lentement à prendre
corps. De plus, Talleyrand et Fouché entre-
tinrent désormais une relation professionnelle
fructueuse. Ainsi, chaque fois que cela est

L OI 2 19
possible, enterrez la hache de guerre avec
un adversaire et efforcez-vous de le mettre à
votre service.
Ne vous laissez jamais déstabiliser par la
présence d’ennemis : vous êtes en bien meil-
leure posture avec un ou deux adversaires
déclarés que lorsque vous ignorez où vos vrais
ennemis se cachent. L’homme de pouvoir
accueille le conflit, utilise son antagoniste
pour soutenir sa réputation, comme il le ferait

7
86
99
d’un combattant prévisible et sûr en des temps

26
53
d’incertitude.

3:1
.14
27
7.1
.21
96
2:1
Image : Les mâchoires de l’ingra-

42
41
titude. Sachant ce qui se passerait
88
si vous mettiez votre doigt dans la 0:8
21

gueule d’un lion, vous allez garder


88
53

vos distances avec vos ennemis.


43
A:

Vous ne prendrez pas de telles pré-


SC
:E

cautions avec des amis et, si vous


om
x.c

les employez, ils vous mangeront


vo
lar

tout cru avec ingratitude.


ho
sc
w.
ww

Autorité : Savoir tirer profit de


ses ennemis.Toutes les choses se
doivent prendre, non par le tran-
chant, ce qui blesserait, mais par
la poignée, qui est le moyen de se
défendre ; à plus forte raison l’envie.
Le sage tire plus de profit de ses
ennemis que le fou n’en tire de ses
amis. (Baltasar Gracián, 1601-1658)

20 LOI 2
LOI

3
DISSIMULEZ

7
86
VOS INTENTIONS

99
26
53
3:1
.14
27
7.1
.21
PRINCIPE

96
2:1
42
Maintenez votre entourage dans l’incertitude et le flou en

41
88
ne révélant jamais le but qui se cache derrière vos actions. 0:8
21
88

S’ils n’ont aucune idée de ce que vous prévoyez, ils ne pour-


53
43
A:

ront pas préparer de défense. Guidez-les assez loin dans


SC
:E
om

une autre direction, enveloppez-les d’un écran de fumée et


x.c
vo

quand ils perceront à jour vos desseins, il sera trop tard.


lar
ho
sc
w.
ww

L OI 3 21
Ne point passer pour LES CLEFS DU POU VOIR
homme d’artifice.
La plupart des gens se lisent à livre ouvert. Ils
Véritablement,
disent ce qu’ils ressentent, laissent échapper
on ne saurait vivre
aujourd’hui sans en étourdiment leurs opinions et révèlent leurs
user ; mais il faut moindres projets et intentions. Les causes de
plutôt choisir d’être cela sont multiples. Tout d’abord, il est natu-
prudent que d’être fin. rel d’exprimer ses sentiments et de dévoiler
Le plus grand artifice ses projets, alors que cela demande un effort
est de bien cacher de contrôler ses paroles. Ensuite, beaucoup
ce qui passe pour pensent qu’honnêteté et franchise leur feront

7
86
tromperie.

99
gagner le cœur de leur entourage. Quelle illu-

26
Baltasar Gracián

53
sion ! La franchise est une lame émoussée qui

3:1
(1601-1658)

.14
fait saigner plus qu’elle ne coupe. Elle risque

27
même d’offenser. Il est prudent de mesurer

7.1
.21
ses paroles, de ne dire aux gens que ce qu’ils

96
2:1
veulent entendre et non la vérité brute, parfois

42
41
hideuse. Surtout, en s’exprimant ouvertement
88
on se rend tellement prévisible et familier qu’il 0:8
21

est presque impossible de se faire respecter et


88
53

surtout craindre : or le pouvoir fuit ceux qui


43
A:
SC

sont incapables d’inspirer de tels sentiments.


:E

Si vous recherchez le pouvoir, laissez


om
x.c

l’honnêteté de côté. Passez maître dans l’art


vo
lar

de la dissimulation et vous aurez toujours le


ho
sc

dessus. Appuyez-vous pour cela sur la nature


w.
ww

humaine : la première impulsion conduit


toujours à croire les apparences, car il serait
impossible de vivre en doutant constamment
de la réalité de ce que l’on perçoit. Faites sim-
plement miroiter tel objet que vous prétendez
convoiter, tel but que vous semblez vouloir
atteindre, et tout le monde s’y trompera.
L’une des façons de cacher vos intentions est
de parler librement de vos désirs et de vos
buts — mais pas les vrais. Vous ferez ainsi
d’une pierre trois coups : sous des dehors

22 LOI 3
amicaux, ouverts et confiants, vous cacherez traverser
furtivement
vos intentions réelles et lancerez vos rivaux à l’océan en plein
la poursuite d’un leurre. jour
Un autre puissant subterfuge est la fausse Cela signifie créer un
sincérité. Les gens confondent facilement sin- décor qui donne une
cérité et honnêteté. Faites semblant de croire impression familière,
à ce que vous dites, cela donnera à vos paroles grâce à laquelle le stratège
un grand poids. peut manœuvrer sans
Si vous croyez que les imposteurs sont être vu, tandis que
tous les regards sont
des personnages hauts en couleur qui écha-

7
86
tournés vers des objets

99
faudent de spectaculaires mensonges, vous

26
évidents.

53
vous fourvoyez. Les plus doués gardent un

3:1
Thomas Cleary,

.14
profil bas pour ne pas attirer l’attention sur 1991, « the thirty

27
eux. Ils savent que les propos et comporte- six strategies »

7.1
citées dans the

.21
ments extravagants éveillent les soupçons. Au

96
japanese art of war

2:1
lieu de cela, ils tissent autour de leur cible un

42
41
cocon familier, banal, inoffensif.
88
Une fois que vous avez ainsi détourné 0:8
21

l’attention de votre naïf, il ne remarque pas


88
53

la supercherie qui se trame dans son dos. Plus


43
A:
SC

la fumée de votre écran est grise et uniforme,


:E

plus elle dissimule efficacement vos desseins.


om
x.c

La forme la plus simple de l’écran de


vo
lar

fumée est l’expression du visage. À l’abri d’une


ho
sc

apparence morne et impassible, on peut ima-


w.
ww

giner toutes sortes de manigances sans en


manifester quoi que ce soit. C’est une arme
que les plus puissants personnages de l’his-
toire ont appris à fourbir. Personne, dit-on,
ne pouvait déchiffrer la moindre expression
sur le visage de Franklin Roosevelt. Le baron
James Rothschild pratiqua tout au long de sa
vie l’art de masquer ses pensées derrière des
sourires fades et une apparence ordinaire.
Souvenez-vous : il faut de la patience et de
l’humilité pour ternir ses brillantes couleurs,

L OI 3 23
pour revêtir le masque du personnage falot.
Ne vous laissez pas rebuter : c’est souvent votre
absence de relief qui conduira les gens à vous
et qui fera de vous une personne de pouvoir.

Image : La toison du mouton. Le

7
86
99
mouton ne chasse pas, le mouton

26
53
ne trompe pas, le mouton est bête

3:1
.14
et docile à souhait. Avec une toison

27
sur le dos, le renard pénètre aisé-

7.1
.21
ment dans le poulailler.

96
2:1
42
41
Autorité : Avez-vous jamais vû un
88
général habile, rempli du dessein 0:8
21

de surprendre une place, annon-


88
53

cer à l’ennemi par tous ses mouve-


43
A:

ments sur qui l’orage alloit tomber ?


SC
:E

Dérobez votre marche ; ne décou-


om
x.c

vrez l’étendue de vos desseins que


vo
lar

quand on ne pourra plus s’opposer


ho
sc

à leur succès, que le combat soit


w.
ww

rendu et la victoire assurée avant


que vous ayez déclaré la guerre ;
en un mot, imitez ces peuples
guerriers dont on n’apprend les
desseins et les entreprises que par
les ravages qu’ils ont laissés. (Ninon
de Lenclos, 1623-1706)

24 LOI 3
L OI

4
DITES -EN TOUJOURS

7
86
MOINS QUE NÉCESSAIRE

99
26
53
3:1
.14
27
7.1
.21
PRINCIPE

96
2:1
42
Plus vous vous laissez aller à parler, plus vous avez l’air

41
88
banal et peu maître de vous-même. Même anodines, vos 0:8
21
88

paroles sembleront originales si elles restent vagues et énig-


53
43
A:

matiques. Les personnages puissants impressionnent et


SC
:E
om

intimident parce qu’ils sont peu loquaces. Plus vous en


x.c
vo

dites et plus vous risquez de dire des bêtises.


lar
ho
sc
w.
ww

L OI 4 25
Le scénariste Michael LES CLEFS DU POU VOIR
Arlen alors dans une
Le pouvoir est en bien des manières un jeu
mauvaise passe se rendit
d’apparences, et moins vous en dites, plus vous
à New York, en 1944.
Pour se changer les paraissez puissant. Votre silence met votre
idées, il alla dans un entourage mal à l’aise. Les êtres humains sont
restaurant à la mode, des machines à interpréter et à expliquer ;
le 21. À l’entrée, il tomba ils ont besoin de connaître vos pensées. Si
sur Sam Goldwyn, qui vous révélez celles-ci au compte-gouttes, ils
lui donna un conseil ne pourront pas percer à jour vos intentions.
irréalisable : acheter Vos réponses laconiques ou inexistantes

7
86
des chevaux de course.

99
les troubleront. Ils se hâteront alors de com-

26
Ensuite, au bar, Arlen

53
bler ce silence en bavardant à tort et à travers,

3:1
rencontra Louis B. Mayer,

.14
trahissant ainsi toutes sortes d’informations
une vieille connaissance ;

27
précieuses sur eux-mêmes et leurs faiblesses.

7.1
celui-ci lui demanda

.21
Leurs rencontres avec vous leur laissera le

96
quels étaient ses projets.

2:1
« J’étais justement en sentiment d’avoir été dépouillés et ils rentre-

42
41
train d’en parler avec Sam ront chez eux méditer chacun de vos brefs
88
Goldwyn… commença commentaires, ce qui ne fera qu’augmenter 0:8
21
Arlen. – Combien t’a-t-il leur portée.
88
53

offert ? interrompit Mayer. L’artiste Andy Warhol avait appris dès


43
A:

– Pas assez, répliqua


SC

sa jeunesse qu’on peut rarement obtenir ce


:E

Arlen évasivement.
que l’on veut des gens simplement en le leur
om

– Accepterais-tu quinze
x.c

demandant. Ils se retournent contre vous,


vo

mille dollars pour trente


lar

prennent vos paroles à contresens, n’en font


ho

semaines ? » demanda
sc

qu’à leur tête avec une véritable perversité.


w.

Mayer. Cette fois-ci,


ww

répondit oui sans hésiter. « J’ai appris qu’on a plus de pouvoir quand on
Clifton Fadiman se tait », confia-t-il un jour à un ami.
(éd.), Warhol employa ultérieurement ce pro-
the little brown cédé avec beaucoup de succès. Ses interviews
book of anecdotes,
1985 étaient de véritables exercices d’interprétation
d’oracle : il prononçait quelques vagues propos
fumeux, et le journaliste se creusait la tête
pour essayer de comprendre ce que cela vou-
lait dire, imaginant une profondeur derrière
des phrases souvent dénuées de sens. Warhol
parlait rarement de son travail ; il laissait aux

26 LOI 4
autres le soin de le faire. Moins il en disait sur Les huîtres béent quand
la lune est pleine ;
son travail d’artiste, plus les gens en parlaient.
et quand le crabe
Et plus ils en parlaient, plus ses œuvres pre-
en aperçoit une, il y
naient de la valeur. projette un caillou ou
En appliquant cette tactique, vous charge- une algue en sorte que
rez vos rares paroles de sens et de pouvoir. En l’huître ne puisse plus
outre, moins vous en direz, moins vous cour- se refermer : son repas
rez le risque de laisser échapper des propos est servi. Tel est le sort
stupides, voire dangereux. En 1825, lorsque de celui qui ouvre trop
Nicolas Ier monta sur le trône de Russie, une grand sa bouche et se

7
86
met ainsi à la merci

99
rébellion éclata immédiatement, menée par

26
de son auditeur.

53
des libéraux qui exigeaient la modernisation

3:1
Léonard de

.14
du pays ; ils voulaient que les industries et les Vinci (1452-1519)

27
infrastructures comblent leur retard par rap-

7.1
.21
port au reste de l’Europe. Nicolas Ier réprima

96
2:1
brutalement cette révolte – l’Insurrection

42
41
décembriste – et condamna à la peine capi-
88
tale un de ses ­leaders, Kondrati Ryleïev. Le 0:8
21

jour de l’exécution, alors que le condamné


88
53

se tenait sous la potence, la corde autour du


43
A:
SC

cou, la trappe s’ouvrit, Ryleïev bascula mais la


:E

corde cassa. À cette époque, de tels événements


om
x.c

étaient vus comme des signes de la Providence


vo
lar

ou de la volonté divine, et un condamné qui


ho
sc

échappait ainsi à sa peine était habituellement


w.
ww

gracié. Ryleïev se releva, contusionné et sale


mais sûr qu’il aurait la vie sauve, et, s’adressant
à la foule : « Vous voyez, s’écria-t-il, en Russie,
on ne sait vraiment rien faire de propre, pas
même une corde ! »
Un messager partit immédiatement au
palais d’Hiver avec la nouvelle de la pendai-
son manquée. Nicolas Ier, contrarié, accepta
néanmoins d’accorder la grâce. « Ryleïev a-t-il
dit quelque chose après ce miracle ? demanda-
t-il au messager. — Sire, il a dit qu’en Russie

L OI 4 27
on ne sait même pas fabriquer une corde.
– Dans ce cas, répliqua le tsar, prouvons-lui
le contraire. » Et il déchira l’acte de grâce. Le
lendemain, Ryleïev fut de nouveau pendu. Et
cette fois, la corde tint bon.
Retenez la leçon : une fois les mots sortis
de votre bouche, il est trop tard. Maîtrisez-les
à temps, surtout les sarcasmes : la satisfaction
momen­t anée que vous en tirez peut vous coû-
ter cher plus tard.

7
86
99
26
53
3:1
.14
27
Image : L’oracle

7.1
.21
de Delphes. Quand les

96
2:1
visiteurs consultaient l’oracle,

42
41
la pythie marmonnait quelques mots
88
sibyllins qui semblaient importants et 0:8
21

pleins de sens. Personne ne désobéissait aux


88
53

paroles de l’oracle : ils avaient pouvoir de vie


43
A:

et de mort.
SC
:E
om
x.c

Autorité : Ne commencez jamais à


vo
lar

agiter vos lèvres et vos dents avant


ho
sc

vos subordonnés. Plus longtemps


w.
ww

je reste muet, plus vite les autres


agitent leurs lèvres et leurs dents.
Et tandis qu’ils le font, je peux
deviner leurs intentions réelles…
Si le souverain n’est pas mystérieux,
ses ministres saisiront l’occasion de
prendre et de prendre encore. (Han
Feizi, philosophe chinois, iiie siècle
av. J.-C.)

28 LOI 4
L OI

5
PROTÉGEZ

7
86
VOTRE RÉPUTATION

99
26
53
3:1
.14
COMME LA PRUNELLE

27
7.1
.21
96
2:1
DE VOS Y EUX
42
41
88
0:8
21
88
53
43
A:

PRINCIPE
SC
:E
om

La réputation est la pierre angulaire du pouvoir. À elle


x.c
vo

seule, elle peut vous permettre d’impressionner et de gagner ;


lar
ho
sc

cependant, lorsqu’elle est compromise, vous êtes vulnérable


w.
ww

et l’on vous attaquera de toutes parts. Faites en sorte que


votre réputation soit toujours impeccable. Soyez vigilant
et déjouez les attaques avant qu’elles ne se produisent. En
même temps, apprenez à détruire vos ennemis par leur
réputation : ouvrez-y des brèches, puis taisez-vous et laissez
faire la meute.

L OI 5 29
Car, comme le dit LES CLEFS DU POU VOIR
Cicéron, ceux-
Les personnes qui nous entourent, y compris
là mêmes qui la
les plus proches, souhaitent toutes préserver
combattent, encore
veulent-ils, que les un jardin secret : leur personnalité recèle
livres qu’ils en écrivent, des aspects qu’elles ne dévoilent jamais.
portent haut leur nom, L’impossibilité de vraiment connaître l’autre
et se veulent rendre pourrait être troublant, si l’on y réfléchit bien,
glorieux du fait qu’ils puisque cela signifie qu’il nous est impossible
ont méprisé la gloire. de porter un jugement sur lui. Alors nous
Toutes les autres choses préférons ignorer ce fait et juger les gens sur

7
86
peuvent être prêtées :

99
leur apparence, sur ce qui saute aux yeux :

26
nous mettons nos biens

53
vêtements, attitudes, paroles, actes… Dans le

3:1
et nos vies au service

.14
domaine des relations, inutile de se leurrer,
de nos amis quand il le

27
les apparences sont le baromètre de presque

7.1
faut. Mais faire cadeau

.21
toutes nos appréciations. Un faux pas, un

96
à quelqu’un d’autre de

2:1
son honneur et de sa changement d’apparence soudain ou insolite

42
41
réputation, cela ne peuvent s’avérer désastreux.
88
se voit guère. C’est la raison pour laquelle il est extrê- 0:8
21

mement important d’établir et de maintenir


88
53

une réputation que vous avez forgée de toutes


43
A:
SC

pièces.
:E

Cette réputation vous protégera dans le


om

Il est plus facile


x.c

jeu dangereux des apparences, empêchant les


vo

de s’arranger avec
lar

curieux de savoir qui vous êtes réellement ; elle


ho

sa mauvaise conscience
sc

vous donnera aussi une certaine maîtrise de


w.

qu’avec sa mauvaise
ww

réputation. la manière dont votre entourage vous juge :


Friedrich c’est une position de force.
Nietzsche Commencez par vous construire une répu-
(1844-1900) tation exceptionnelle, que ce soit de généro-
sité, d’honnêteté ou d’astuce. Cette qualité
vous distinguera des autres et fera parler de
vous. Puis diffusez-la auprès du plus grand
nombre de gens possible (attention : avec sub-
tilité ! Prenez soin de la construire lentement,
sur des bases solides) et regardez-la s’étendre
comme un feu de forêt.

30 LOI 5
Une solide réputation accroît votre pré-
sence et décuple vos forces sans exiger de vous
une trop grande dépense d’énergie. Elle peut
aussi vous entourer d’une aura inspirant le
respect, et même la crainte. À la tête de l’Afri-
kakorps pendant la Seconde Guerre mondiale,
le général allemand Erwin Rommel se fit la
réputation d’un fin stratège qui inspirait la
terreur à ses ennemis. Même quand les chars
du « renard du désert » ne se battaient plus

7
86
99
qu’à un contre cinq, des villes entières furent

26
53
évacuées à l’approche des Panzer.

3:1
.14
Faites en sorte que votre réputation soit

27
simple et fondée sur une seule solide qualité.

7.1
.21
Cet unique talent – efficacité ? charme ? –

96
2:1
devient une sorte de signal d’appel qui

42
41
annonce votre présence et place les autres
88
en état d’infé­r iorité. 0:8
21

La réputation est un trésor dont il faut


88
53

s’occuper sans cesse. Particulièrement lorsque


43
A:
SC

vous commencez à l’établir ; vous devez la


:E

protéger avec rigueur et anticiper toutes les


om
x.c

attaques. Une fois qu’elle est solide, ne vous


vo
lar

laissez pas aller à la colère en cas de calomnie


ho
sc

de la part de vos ennemis : cela révélerait un


w.
ww

manque de confiance. Au lieu de cela, pre-


nez-le de haut et ne tentez jamais de contre-
attaque brutale. A contrario, le fait d’attaquer
la réputation d’autrui est une arme puissante,
surtout si vous avez moins de pouvoir que lui.
Il a beaucoup plus à perdre que vous, et votre
propre réputation encore insignifiante ne lui
donne que peu de prise pour vous rendre la
pareille. Mais cette tactique doit être pratiquée
avec précaution ; vous ne devez pas avoir l’air
d’assouvir une vengeance minable. Faute de

L OI 5 31
ruiner la réputation de votre ennemi intelli-
gemment, vous ruineriez la vôtre.
N’allez jamais trop loin dans vos attaques,
car cela attire l’attention sur votre propre désir
de vengeance plus que sur la personne que
vous calomniez. Quand votre renommée est
solidement établie, utilisez des tactiques plus
subtiles, comme la satire ou le ridicule, qui
affaiblira votre adversaire tandis que vous
apparaîtrez comme un charmant voyou. Le

7
86
99
puissant lion se contente de jouer avec la souris

26
53
qui croise son chemin : toute autre réaction

3:1
.14
gâcherait sa réputation de fauve redoutable.

27
7.1
.21
96
2:1
Image : Une mine

42
41
pleine de diamants et
88
de rubis. Vous avez vous- 0:8
21

même creusé et trouvé le filon,


88
53

votre fortune est faite. Gardez-la


43
A:

comme votre propre vie, car les voleurs


SC
:E

de tout poil surgiront autour de vous. Ne


om
x.c

considérez jamais votre richesse comme défi-


vo
lar

nitivement acquise et renouvelez-la constam-


ho
sc

ment ; le temps en ternira l’éclat et vos joyaux


w.
ww

deviendront invisibles.

Autorité : C’est la raison pourquoy je conseille


à nôtre courtisan de s’ayder d’un peu d’artifice,
et qu’avant que de paroître dans une compagnie
où il sera inconnu, il fasse que les esprits y soient
prévenus d’une opinion avantageuse, et qu’on soit
persuadé qu’il est dans une haute estime auprès
d’un autre prince, parce que la renommée impose
aisément créance aux esprits sur le mérite d’un
homme. (Baldassare Castiglione, 1478-1529)

32 LOI 5
L OI

6
ATTIREZ L’ATTENTION

7
86
À TOUT PRIX

99
26
53
3:1
.14
27
7.1
.21
PRINCIPE

96
2:1
42
Les gens jugent tout à l’apparence ; ce qui n’est pas visible

41
88
ne compte pour rien. Ne vous laissez jamais noyer dans la 0:8
21
88

foule ni sombrer dans l’oubli. Soyez à tout prix le point de


53
43
A:

mire, celui que l’on remarque. Faites-vous plus grand, plus


SC
:E
om

chatoyant, plus mystérieux que la masse terne et morne,


x.c
vo

soyez l’aimant qui attire tous les regards.


lar
ho
sc
w.
ww

L OI 6 33
la guêpe LES CLEFS DU POU VOIR
et le prince
Briller plus intensément que ceux qui vous
Une guêpe nommée entourent n’est pas un talent inné. Vous devez
Queue d’Aiguille
apprendre à attirer l’attention « aussi sûrement
se languissait à la
recherche de quelque
que l’aimant attire le fer ». Au début de votre
exploit qui la rendrait carrière, associez votre nom et votre réputation
célèbre à jamais. Un à une caractéristique, une image qui soit votre
jour elle entra dans signature. Cette image peut être un style ves-
le palais du roi et piqua timentaire, une bizarrerie de la personnalité
le petit prince dans qui amuse et qui fait parler. Une fois l’image

7
86
99
son berceau. Le prince établie, vous avez une apparence, une place

26
se réveilla en pleurant

53
dans le ciel est assurée pour votre étoile.

3:1
bruyamment. Le roi

.14
C’est une erreur assez commune de croire

27
et les courtisans
que cette apparence singulière ne doit pas

7.1
accoururent pour voir ce

.21
être controversée, que le fait d’être attaqué

96
qui s’était passé.

2:1
Le prince hurlait est néfaste. Rien n’est plus loin de la vérité.

42
41
et la guêpe le lardait Pour éviter d’être un feu de paille et de voir
88
de coups de dard. Les votre notoriété éclipsée par celle d’un autre, 0:8
21

ne faites pas le difficile ; quelle que soit le


88

courtisans essayèrent
53

d’attraper la guêpe motif de votre célébrité, celle-ci jouera en


43
A:

et chacun fut à son


SC

votre faveur.
:E

tour piqué. Toute la Il ne manquait pas à la cour du roi


om
x.c

maisonnée royale se Louis XIV d’écrivains et d’artistes de talent,


vo

précipita, la nouvelle
lar

de grandes beautés, d’hommes et de femmes


ho

se répandit bientôt et le
sc

d’une vertu irréprochable, pourtant personne


w.

peuple afflua au palais.


ww

La ville était sens ne fit autant parler de lui que le singulier duc
dessus-dessous, de Lauzun. Le duc était petit, presque nain, et
toutes affaires enclin à toutes sortes d’inso­lences : il couchait
suspendues. avec la maîtresse du roi, et insultait ouverte-
La guêpe se dit avant ment non seulement les autres courtisans mais
d’expirer après tous ses aussi le souverain lui-même. Louis XIV était
efforts : « Un nom sans cependant tellement séduit par les excentri-
réputation est un feu cités du duc qu’il ne pouvait supporter ses
sans flammes. Il faut
absences de la cour. C’est simple : l’étrange
attirer l’attention
à tout prix. »
personnalité du duc attirait l’attention. Une
fois captivé, on ne pouvait plus se passer de lui.
fable indienne

34 LOI 6
La société a grand besoin de personnalités Même quand on
m’accable d’injures,
flamboyantes, d’individus qui tranchent sur la
j’ai mon compte
médiocrité générale. Ne soyez donc pas effrayé
de renommée.
des qualités qui vous distinguent et qui attirent
Pietro Aretino
l’attention sur vous. Cultivez la controverse et (Pierre l’Arétin),
même le scandale. Mieux vaut être attaqué, 1492-1556
voire calomnié, qu’ignoré.
Si vous vous trouvez désespérément dans
l’ombre, attaquez la personnalité la plus en
vue, la plus célèbre, la plus puissante que vous

7
86
99
puissiez trouver. C’est un stratagème très effi-

26
53
cace pour vous faire remarquer. Quand Pietro

3:1
.14
Aretino, dit l’Arétin, jeune ambitieux du début

27
du xvie siècle, voulut se faire une réputation

7.1
.21
de poète, il publia une satire en vers ridicu-

96
2:1
lisant le pape et son affection pour un élé-

42
41
phant apprivoisé. Tous les yeux se tournèrent
88
immédiatement vers l’auteur de ce scandale, 0:8
21

ce qui donna le coup d’envoi à sa carrière


88
53

littéraire. Toute charge calomnieuse contre


43
A:
SC

une personne connue aura un effet similaire.


:E

Souvenez-vous cependant d’utiliser de telles


om
x.c

tactiques avec mesure lorsque vous êtes vous-


vo
lar

même sous les feux de la rampe : l’action se


ho
sc

révèle parfois risquée.


w.
ww

Une fois connu, à vous de constamment


renouveler l’attention en adaptant et en variant
votre méthode, faute de quoi le public se las-
sera, se désintéressera de vous et se tournera
vers une nouvelle étoile. Le jeu exige une
vigilance constante et une grande créativité.
Pablo Picasso ne se laissait jamais disparaître
du paysage ; si son nom s’attachait trop à un
style particulier, il bouleversait la donne avec
une série d’œuvres révolutionnaires qui pre-
naient tout le monde au dépourvu. Mieux vaut

L OI 6 35
créer quelque chose de laid et de dérangeant,
croyait-il, que de flatter les spectateurs avec des
œuvres connues d’avance. À retenir : les gens
se sentent supérieurs à quelqu’un dont les actes
sont prévisibles. Si vous montrez clairement
qui a la situation en main en créant la surprise,
vous gagnerez le respect et r­ esserrerez votre
emprise sur leur volage attention.

7
86
99
Image :

26
53
L e s feu x de l a

3:1
.14
rampe. L’acteur qui s’avance

27
sous cette brillante lumière

7.1
.21
« brûle les planches ». Tous les

96
2:1
regards sont sur lui. Il n’y a de place

42
41
que pour un seul acteur sous l’étroit
88
faisceau lumineux ; faites en sorte 0:8
21

que ce soit vous. Osez des gestes si


88
53

larges, amusants et scandaleux


43
A:

que la lumière s’y attarde, lais-


SC
:E

sant les autres dans


om
x.c

l’ombre.
vo
lar
ho
sc

Autorité : Faire, et faire paraître.


w.
ww

Les choses ne passent point pour ce


qu’elles sont, mais pour ce qu’elles
paraissent être. Savoir faire, et le
savoir montrer, c’est double savoir.
Ce qui ne se voit point est comme
s’il n’était point. La raison même
perd son autorité, lors qu’elle ne
paraît pas telle… Le bon exté­r ieur
est la meilleure recommandation de
la perfection intérieure. (Baltasar
Gracián, 1601-1658)

36 LOI 6
LOI

7
LAISSEZ LE TR AVAIL

7
86
AUX AUTRES,

99
26
53
3:1
.14
MAIS RECUEILLEZ-EN

27
7.1
.21
96
2:1
LES LAURIERS
42
41
88
0:8
21
88
53
43
A:

PRINCIPE
SC
:E
om

Utilisez la sagesse, le savoir et le travail des autres pour


x.c
vo

faire avancer votre propre cause. Non seulement cette aide


lar
ho
sc

vous fera gagner une énergie et un temps précieux, mais


w.
ww

elle vous conférera une aura quasi divine d’efficacité et de


diligence. À la fin, vos collaborateurs seront oubliés et on
ne se souviendra que de vous. Ne faites jamais ce que les
autres peuvent faire à votre place.

L OI 7 37
Certes, si le chasseur LES CLEFS DU POU VOIR
prend un char à six Le monde du pouvoir a la même dynamique
chevaux et confie les
que la jungle : il y a ceux qui vivent de leur
rênes à Wang Liang,
il rattrape facilement le
chasse, mais il y a aussi une foule de créatures
gibier le plus rapide. – hyènes, vautours… – qui vivent de la chasse
Mais sans char ni des autres. Moins imaginatives, elles sont sou-
chevaux ni Wang vent incapables de faire le travail essentiel à
Liang, il aura beau la création du pouvoir. Elles comprennent
courir aussi vite que cependant très vite que si elles attendent assez
Lou Ji, il ne pourra longtemps, elles pourront toujours trouver un

7
86
jamais attraper ses

99
autre animal qui fera le travail pour elles. Ne

26
proies à la course.

53
soyez pas naïf : en ce moment même, tandis

3:1
En fait, avec de bons

.14
que vous trimez sur un projet, des vautours
chevaux et un bon char,

27
tournoient au-dessus de votre tête en essayant

7.1
le moindre manant,

.21
de trouver le moyen de survivre et même de

96
le premier souillon venu

2:1
peuvent rapporter prospérer grâce à votre créativité. Il est inutile

42
41
du gibier. de s’en plaindre ou de se consumer d’amer-
88
Han Fei Zi, tume. Mieux vaut se protéger et entrer dans 0:8
21
philosophe le jeu. Une fois que vous avez établi une base
88
53

chinois,
de pouvoir, devenez vous-même un vautour
43

iii  siècle av. J.-C.


e
A:
SC

et vous vous épargnerez beaucoup de temps


:E

et d’énergie.
om
x.c

L’artiste Rubens, vers la fin de sa carrière,


vo
lar

se trouva submergé de commandes. Il avait


ho
sc

mis au point un stratagème : dans son grand


w.
ww

atelier, il employait des dizaines de remar­


quables peintres spécialistes, l’un des vête-
ments, l’autre des paysages, etc. Il créa ainsi
un vaste atelier où un grand nombre de toiles
étaient en même temps en chantier. Quand un
client important venait en visite, Rubens expé-
diait ses petites mains dans la nature. Pendant
que son visiteur ­l’observait du balcon de la
mezzanine, Rubens travaillait à une allure
incroyable, avec une fantastique énergie.
Le client repartait plein de respect pour cet

38 LOI 7
homme prodigieux capable de peindre autant la poule aveugle
de tableaux en si peu de temps. Une poule, devenue
C’est là l’essence même de la loi : apprenez aveugle, aloit toujours
à obtenir des autres qu’ils fassent le travail grattant la terre avec
pour vous pendant que vous en tirez tous les ses pattes comme
auparavant. Peine
honneurs, et vous apparaîtrez d’une force et
perdue pour cette
d’une puissance quasi divines. Si vous v­ oulez pauvre laborieuse !
absolument tout faire par vous-même, vous Une autre poule, qui
n’irez jamais bien loin. Trouvez plutôt les colla- avoit la vue bonne mais
borateurs qui ont les compétences et la créati-

7
les pattes délicates, se

86
99
vité qui vous manquent. Engagez-les et mettez tenoit sans cesse à ses

26
53
votre nom au-dessus des leurs, ou trouvez un côtés et recueilloit le

3:1
fruit de son travail.

.14
moyen de récupérer leur travail et le faire

27
vôtre. Ils retireront pour vous les marrons du Dès que la poule

7.1
.21
feu et vous serez aux yeux du monde un génie. aveugle avoit découvert

96
quelque grain,

2:1
Il existe une autre application de cette loi.

42
l’autre le dévoroit.

41
Sans jouer les parasites de vos contemporains,
88
Gotthold
allez puiser dans le passé, cet immense entre- 0:8
Ephraim Lessing,
21

pôt de savoir et de sagesse. Isaac Newton appe- 1729-1781,


88
53

lait cela « monter sur les épaules des géants » fables et


43

dissertation sur
A:
SC

— il voulait dire par là que ses propres décou- la nature de la


:E

vertes s’étaient appuyées sur les exploits des fable, traduit par
om
x.c

M. d’Anthelmy
autres. Une grande part de son génie, il le
vo
lar

savait, était son astucieuse capacité à exploiter


ho
sc

les idées des savants de l’Antiquité, du Moyen


w.
ww

Âge et de la Renaissance. Shakespeare, quant


à lui, emprunta des intrigues, des person-
nages et même des dialogues à Plutarque,
entre autres, car il savait que personne ne
surpassait la subtile psychologie de Plutarque
et ses commentaires plein d’esprit. Depuis,
­combien d’écrivains ont à leur tour plagié
Shakespeare ?
Écrivains qui ont fouillé la nature
humaine, stratèges de l’Antiquité, historiens
de la folie humaine, rois et reines qui ont

L OI 7 39
appris à grand-peine à porter le fardeau du
pouvoir : leur savoir est là, il n’attend que vous ;
montez sur leurs épaules. Leur esprit peut être
le vôtre, leur talent aussi, et ils ne viendront
jamais d­ énoncer votre manque d’originalité.
Certes, vous pouvez consumer votre vie dans
un long travail pénible, commettre d’innom-
brables erreurs, perdre du temps et de l’éner-
gie à essayer de vous débrouiller à partir de
votre propre expérience — ou bien vous pou-

7
86
99
vez lever les armées du passé. Comme l’a dit

26
53
Bismarck : « Les fous disent qu’ils apprennent

3:1
.14
par expérience. Je préfère profiter de l’expé-

27
rience des autres. »

7.1
.21
96
2:1
42
41
Image : Le vautour. De toutes les créatures
88
de la jungle, il a la meilleure part. Il fait 0:8
21

sien le dur travail des autres ; leur échec


88
53

à survivre devient sa nourriture. Gardez


43
A:

un œil sur le vautour : pendant que vous


SC
:E

vous tuez à l’ouvrage, il tourne au-dessus


om
x.c

de vous. Ne le combattez pas, rejoignez-le.


vo
lar
ho
sc

Autorité : L’homme a beaucoup à savoir, et


w.
ww

peu à vivre ; et il ne vit pas s’il ne sait rien.


C’est donc une singulière adresse d’étudier
sans qu’il en coûte, et d’apprendre beau-
coup en apprenant de tous. Après cela, vous
voyez un homme parler dans une assemblée
par l’esprit de plusieurs ; ou plutôt ce sont
autant de sages qui parlent par sa bouche,
qu’il y en a qui l’ont instruit auparavant.
Ainsi, le travail d’autrui le fait passer pour
un oracle… (Baltasar Gracián, 1601-1658)

40 LOI 7
L OI

8
OBLIGEZ L’ADVERSAIRE

7
86
À SE BATTRE SUR VOTRE

99
26
53
3:1
.14
PROPRE TERR AIN

27
7.1
.21
96
2:1
42
41
88
PRINCIPE 0:8
21
88

Quand on force une personne à agir, on est maître de la


53
43
A:

situation. Il vaut toujours mieux amener un adversaire à


SC
:E
om

soi en le faisant abandonner ses propres plans. Appâtez-le


x.c
vo

avec des gains fabuleux, puis passez à l’attaque. Vous aurez


lar
ho
sc

ainsi les cartes en main.


w.
ww

L OI 8 41
Quand j’ai posé des LES CLEFS DU POU VOIR
appâts pour un cerf,
Combien de fois ce scénario s’est-il répété
je ne tire pas sur
au cours de l’histoire ? Un dirigeant belli-
la première biche qui
se présente, j’attends queux entreprend une série d’actions qui
que toute la harde commencent par lui rapporter beaucoup de
soit réunie. pouvoir. Peu à peu, cependant, son pouvoir
Otto von culmine, s’essouffle, puis tout se retourne à son
Bismarck désavantage. Ses nombreux ennemis s’allient ;
(1815-1898) il s’épuise à tenter de se maintenir et, inévita-
blement, il échoue. Ce schéma s’explique par

7
86
99
le fait qu’un individu agressif est rarement

26
53
maître de la situation. Désavantagé par une

3:1
.14
vision à court terme, il ne peut mesurer les

27
conséquences de telle ou telle de ses audaces. Il

7.1
.21
est forcé à la riposte par chaque mouvement de

96
2:1
ses ennemis toujours plus nombreux, obligé de

42
41
remédier aux effets inattendus de ses propres
88
réactions brutales, et son énergie agressive 0:8
21

finit par se retourner contre lui.


88
53

Demandez-vous  : quel est l’intérêt de


43
A:
SC

vous dépenser sans compter pour essayer de


:E

résoudre les problèmes et de vaincre l’ennemi


om
x.c

si vous ne vous sentez jamais maître de la situa-


vo
lar

tion ? pourquoi toujours réagir aux événements


ho
sc

au lieu de les diriger ? La réponse est simple :


w.
ww

votre idée du pouvoir est erronée. Vous confon-


dez pugnacité et efficacité. Et le plus ­souvent,
l’efficacité voudrait que vous restiez en retrait,
que vous gardiez votre calme et que vous laissiez
les autres s’embourber dans les pièges que vous
leur aurez tendus, misant sur le pouvoir à long
terme plutôt que sur la victoire immédiate.
Souvenez-vous  : l’essence du pouvoir
réside dans l’habileté à garder l’initiative,
à obtenir des autres qu’ils réagissent à vos
actions, à maintenir votre adversaire et votre

42 LOI 8
entourage sur la défensive. En obligeant les
autres à vous rejoindre, vous prendrez soudain
le contrôle de la situation – et qu’est-ce que le
contrôle sinon le pouvoir ? Vous y parviendrez
à deux conditions : en apprenant à maîtriser
vos émotions et à ne jamais agir sous le coup
de la colère ; et, parallèlement, en misant sur
la tendance naturelle qu’ont les hommes à
s’emporter quand ils sont poussés ou appâ-
tés. À long terme, la capacité à faire venir les

7
86
99
autres à soi est une arme plus puissante que

26
53
tout instrument d’agression.

3:1
.14
Il existe un avantage supplémentaire

27
à faire venir votre adversaire à vous : votre

7.1
.21
adversaire est obligé d’opérer sur votre terri-

96
2:1
toire. Le fait d’être en milieu hostile le ren-

42
41
dra nerveux et souvent il agira de manière
88
précipitée et commettra des erreurs. Pour les 0:8
21

négociations et les rencontres, il est toujours


88
53

conseillé d’attirer la partie adverse sur votre


43
A:
SC

territoire ou sur un territoire de votre choix.


:E

Vous aurez vos repères tandis que vos adver-


om
x.c

saires, en terrain inconnu, seront subtilement


vo
lar

placés sur la défensive.


ho
sc

La manipulation est un jeu dangereux.


w.
ww

Une fois les soupçons de votre cible éveillés,


son contrôle devient de plus en plus difficile.
Tandis que si vous faites venir à vous votre
adversaire, vous créez l’illusion que le contrôle
lui appartient.
Daniel Drew, requin de la finance du
xixe siècle, était un habile spéculateur à la
bourse des valeurs. Quand il voulait faire
vendre ou acheter un lot particulier d’actions, il
en faisait préalablement monter ou descendre
la cote, mais rarement par approche directe.

L OI 8 43
Une de ses astuces consistait à se précipiter dans
un club près de Wall Street sur son chemin vers
la Bourse. Là, il enlevait son habituel foulard
rouge pour s’éponger le front. Un petit morceau
de papier en tombait ; il faisait mine de ne pas
y prendre garde. Des consommateurs, toujours
à l’affût de ses moindres gestes, se précipitaient
sur le papier où était immanquablement grif-
fonné ce qui semblait être un tuyau inestimable
sur quelque titre. La rumeur se répandait et

7
86
99
les membres du club achetaient ou vendaient

26
53
l’action en masse, faisant le jeu de Drew.

3:1
.14
Tout dépend de la qualité de l’appât. Si

27
votre piège est assez attractif, la violence des

7.1
.21
émotions et des désirs de vos ennemis les aveu-

96
2:1
glera et les empêchera d’y voir clair. Plus ils

42
41
deviendront avides, plus il sera facile de les
88
manipuler. 0:8
21
88
53

Image : L’ours et le piège à miel. Le


43
A:

chasseur d’ours ne poursuit pas sa proie ;


SC
:E

un ours se sachant poursuivi est pratiquement


om
x.c

impossible à attraper et, acculé, devient féroce.


vo
lar

Au lieu de cela, le chasseur lui tend un piège


ho
sc

avec du miel. Sans s’épuiser ni risquer sa vie


w.
ww

à la traque, il appâte et attend.

Autorité : Les bons guerriers font venir les autres


à eux et non l’inverse. C’est le principe du vide
et du plein appliqué aux autres et à soi. Quand
vous obligez un adversaire à venir à vous, alors
sa force est toujours vide ; tant que vous n’allez
pas à lui, votre force est toujours pleine. Attaquer
le vide par le plein est comme lancer des cail-
loux sur des œufs. (Zhang Yu, commentateur
du xie siècle de L’Art de la guerre)

44 LOI 8

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