d'Extrême-Orient
Bhattacharya France. Un texte du Bengale médiéval : le yoga du kalandar {Yoga-Kalandar). In: Bulletin de l'Ecole française
d'Extrême-Orient. Tome 90-91, 2003. pp. 69-99;
doi : https://doi.org/10.3406/befeo.2003.3608
https://www.persee.fr/doc/befeo_0336-1519_2003_num_90_1_3608
Le Yoga-Kalandar, d'auteur incertain, a été composé en bengali au XVIIe siècle. S'adressant à des
débutants sur la voie ésotérique de l'islam, il établit des correspondances entre des notions et des
pratiques appartenant au yoga et la démarche mystique soufie. Il s'agit d'un exemple tardif de
l'influence de la secte des Nāths sur les Soufis, influence évidente dès le XVe siècle. Le vocabulaire
technique employé dans l'ouvrage est plus populaire que savant : nombre de termes d'origine arabe et
sanskrite sont très « bengalisés ». Le texte traite des stations, mokām (ar. maqām), sur la voie, du
corps grossier et subtil, des pratiques recommandées à chaque station, des postures convenant à la
méditation et des effets de celle-ci. Enfin, il détaille les signes annonciateurs de la mort. La popularité
du Yoga-Kalandar est attestée par le grand nombre de manuscrits trouvés dans la région de
Chittagong, au Bengale oriental (actuel Bangladesh). La présente traduction française, accompagnée
de nombreuses notes, est fondée sur le texte édité en 1969 par Ahmad Sharif, des divergences avec
la traduction anglaise de Enamul Haq (1975) étant signalées en note.
Abstract
France Bhattacharya
A text from medieval Bengal: The Yoga-Kalandar.
Yoga and Sufism, the confluence of two rivers
The anonymous Yoga-Kalandar was composed in Bengali in the seventeenth century. Addressing itself
to neophytes on the path of esoteric Islam, it establishes correspondences between the notions and
practices of yoga and those of Sufi mysticism. It is thus a late example of the influence of the Nāths on
the Sufis, an influence that is discernible from the fifteenth century. The technical vocabulary used in
the work is popular rather than erudite: a number of the Arabic and Sanskrit terms have been
"bengalified". The text treats of the stations on the path {mokām: Arabic maqām), of the gross and
subtle bodies, of the practices to be followed in each station, of the postures suitable for meditation and
their effects and, finally, it details the signs that herald death.
The popularity of the Yoga-Kalandar is attested to by the large number of manuscripts found in the
Chittagong region of East Bengal (today Bangladesh). The present French translation, accompanied by
numerous notes, is based on the text of the 1969 edition of Ahmad Sharif; divergences from the
English translation of Enamul Haq (1975) are signaled in the notes.
Un texte du Bengale médiéval :
le yoga du kalandar {Yoga-Kalandar)
Yoga et soufisme, le confluent des deux fleuves
France Bhattacharya*
1324 et enterré à Panipat dans le nord de l'Inde, qui est crédité de plusieurs ouvrages en
persan dont un traité de yoga, intitulé précisément Yoga Qalandar, qui aurait pu inspirer
des traités de même type dans les langues vernaculaires (Sharif 1969 : 120). Toutefois,
aucune trace de ses écrits n'a été à ce jour retrouvée. On peut penser que le Bengale
comptait depuis longtemps, avant même que ne fut rédigé notre texte, un certain nombre
de Kalandars parmi les renonçants musulmans. Cependant la littérature bengali,
contemporaine du Yoga-Kalandar, ne mentionne la présence de Kalandars dans la liste des
habitants d'une ville idéale qu'au tout dernier rang de la population musulmane, bien au-
dessous des tisserands et même des charmeurs de serpents {Cakravartî 1975 : 77, pada
131). Le mot kalandar y prend le sens de derviche, religieux mendiant de bas statut, et ne
fait pas référence à un ordre soufi.
Selon Ahmad Sharif, le Yoga-Kalandar est d'auteur inconnu. Il n'y a en effet aucune
signature où que ce soit dans le texte qu'il a édité, alors que l'usage de l'époque voulait
que chaque poème fût terminé par un colophon indiquant le nom du poète. Comme la
quasi-totalité de la littérature médiévale, le Yoga-Kalandar s'est transmis d'abord oralement
et n'a été transcrit que tardivement. La première copie manuscrite fut suivie de beaucoup
d'autres puisque le grand collectionneur de manuscrits médiévaux, Maulana Abdul Karim,
en obtint plus de trois cents dans la région de Chittagong si l'on en croit son catalogue des
manuscrits bengalis Bangalà Prâcïn Puthïr Vivaran, publié en 1320 BS (1913-14), dont
Enamul Haq reproduit une page dans sa History ofSufism in Bengal (1975 : 371). Pour ce
dernier, sur la base d'autres manuscrits qu'il a étudiés, le Yoga-Kalandar serait l'œuvre
d'un certain Saiyid Murtuzâ (Haq 1957 : 369 et 1975 : 373). Selon lui, ce Saiyid Murtuzâ,
qui appartiendrait au dix-septième siècle, serait aussi l'auteur de plusieurs poèmes lyriques
d'inspiration krishnaïte, collectés dans la même région de Chittagong (Haq 1975 : 369).
De plus, Haq mentionne un poème sur le même thème, signé encore par un Saiyid
Murtuzâ, originaire cette fois de Murshidabad au Bengale occidental, qui a trouvé place
dans une anthologie de poèmes krishnaïtes, des Padàvaïî, compilée par des dévots
vishnouites. Malgré la distance qui sépare Chittagong de Murshidabad, Haq considère
qu'il s'agit de la même personne, auteur à la fois du Yoga-Kalandar, des poèmes
krishnaïtes trouvés à Chittagong et de celui qui fut inclus dans l'anthologie de
Murshidabad. Il n'en donne pas de preuve. L'historien M. R. Tarafdar mentionne un
certain Saiyid Mortudâ (Tarafdar 1965 : 215) ou Murtuzâ (ibid. : 380) qu'il considère
comme l'auteur probable du Yoga-Kalandar sur la base des données fournies par Haq.
À partir du quinzième siècle, dans l'Inde du Nord, rédiger des traités mêlant des
pratiques yogiques à des concepts soufîs, à l'aide d'un vocabulaire mixte appartenant à
ces deux traditions, n'avait rien d'exceptionnel. Il suffit de rappeler le Bahr al-Hayât
traduit en persan par Shaikh Muhammad Ghauth à partir d'une version arabe d'un original
sanskrit perdu (Tarafdar 1993 : 129-130), et le Rushd-nama de Abd Al-Quddus Gangohi
(1456-1537) (Digby 1975 : 36-51). Le Bengale se distingue par le fait que l'on y a
retrouvé très peu de manuscrits soufis en persan - aucun, d'après Haq -, mais beaucoup
en bengali, langue vernaculaire de la région, la plupart venant du Sud-Est de la province.
Il semble que l'influence de la secte des Nâths se soit exercée très fortement sur le
soufisme bengali à la période moghole, comme le montre clairement l'examen de
plusieurs textes dont le Yoga-Kalandar. En témoignent l'homologie affirmée entre
microcosme et macrocosme qui, bien que commune à beaucoup d'autres écoles mystiques,
est au centre des conceptions nàth, le rappel des centres subtils, les cakra, l'importance
accordée au contrôle du souffle et à toute la physiologie mystique, la description des
postures, ainsi que la mention des signes annonciateurs de la mort, topos que l'on retrouve
dans les récits chantés bengalis concernant les maîtres Nâths. La langue du Yoga-
Kalandar mêle aux expressions d'origine arabo-persane, appartenant au vocabulaire soufi
Un texte du Bengale médiéval 11
traditionnel, des termes sanskrits en usage dans les traités de yoga. Les uns comme les
autres apparaissent dans ce texte sous des formes souvent corrompues, dénonçant son
appartenance première à la tradition orale et semblant indiquer qu'il était destiné à un
public doté de peu de culture littéraire. On peut y relever aussi l'usage métaphorique de la
langue, caractéristique aussi des récits nàth. Il n'est pas inutile de souligner le fait que les
compositions concernant Goraksanâth, Matsyendranâth et Gopïcandra étaient chantées par
des fakirs musulmans dans les villages du Nord du Bengale jusqu'à la Partition de 1947.
Tous ces éléments concordent à mettre en lumière les liens qui existaient entre la secte des
Nâths et les musulmans du Bengale, qu'ils soient Soufis, plus ou moins orthodoxes et
orthopraxes, ou chanteurs itinérants de bas statut. Le Yoga-Kalandar présente le cas d'une
tentative de vulgarisation des notions du yoga des Nâths au bénéfice des débutants sur le
chemin de la pratique ésotérique soufïe. Destiné à un assez large public, ce texte fut sans
aucun doute plus populaire que les ouvrages des auteurs savants tel que Saiyad Sultan,
comme le prouve le grand nombre de ses copies manuscrites.
L'intérêt pour ces textes écrits en bengali par des Soufis est relativement récent au-
delà des frontières du Bangladesh. Ashim Roy leur a fait une place dans son étude sur la
tradition islamique au Bengale (1983). Quant à David Cashin, il leur a consacré sa thèse
de doctorat et en a traduit en anglais plusieurs extraits (The Ocean of Love, 1995). Mon
intérêt pour ce domaine de la littérature médiévale est né à la suite d'une première
recherche sur les chants de Lâlan Šáh et de plusieurs autres fakirs et Bâuls, respectivement
musulmans ou hindous de naissance. Il s'agissait d'y relever les expressions
métaphoriques concernant le corps (Bhattacharya 2002). La science du corps, le dehatattva, est
commune aux Bâuls et aux Fakirs, ainsi qu'aux Soufis de la période médiévale, sans
oublier les vishnouites hétérodoxes Sahajiyâ. Ce dehatattva est basé pour une large part
sur les théories des Nâths fortement influencées par le tantrisme. Du fait de l'importance
de cette tradition, qui a perduré au moins jusqu'au vingtième siècle au Bengale, il m'a
paru intéressant de tenter une traduction française intégrale du Yoga-Kalandar, à laquelle
j'ai ajouté un appareil de notes. Ce n'est qu'après avoir terminé la traduction que je me
suis aperçue que Enamul Haq avait mis en annexe à son ouvrage A History ofSufism in
Bengal (1975) une traduction anglaise de ce même texte (p. 378-396), reprise dans le
quatrième volume de ses œuvres complètes {Racanàvaïî, p. 378-394). J'ai donc pu
comparer sa traduction à la mienne. Malheureusement, ni Ahmad Sharif ni Enamul Haq ne
donnent d'indication précise sur les manuscrits qu'ils ont utilisés. Le second mentionne
seulement avoir travaillé sur la base de sept manuscrits dont quatre en écriture arabe, et il
ajoute qu'il s'est servi pour sa traduction de copies se trouvant dans la bibliothèque
personnelle du collectionneur Maulavi Abdul Karim de Chittagong. D'après Tarafdar,
Haq avait collationné une version composite du Yoga-Kalandar qui ne fut pas publiée. Il
aurait travaillé sur des copies incomplètes en écriture arabe, comme l'indique le professeur
Tarafdar, dont la bibliographie comporte l'entrée suivante : « Saiyid Murtuzâ (?) Yoga
Kalandar. Mss. 386 and 388 (in Arabie script) in Sahitya Visharad's collection, D.U.
Library. A composite texte (yet unpublished) of this book, prepared by Dr. Enamul Haq,
now in Varendra Research Museum of Rajshahi, together with another unnumbered MS.
of the same organization, has been used. » (Tarafdar 1965 : 380 ; notons que le manuscrit
édité par Sharif est en écriture bengali et qu'il écrit kalandar tandis que Tarafdar et Haq
écrivent kalandar). Je n'ai donc pas pu avoir accès à ce texte qui a précédé de plusieurs
décennies celui de Ahmad Sharif. Ce dernier ne fait aucune mention du travail de son
prédécesseur, bien qu'il fasse référence en bibliographie à son ouvrage le plus ancien,
Baňge Suphï Prabhàv (1935). Il est clair que les manuscrits utilisés par l'un et l'autre
comportaient des différences substantielles. C'est pourquoi, outre les variantes
intéressantes proposées par Sharif, j'ai donné en note la traduction de Haq pour les
72 France Bhattacharya
passages présentant de notables divergences avec mon texte. J'ai hésité à inclure toutes les
variantes présentées par la traduction de Haq dans la mesure où je n'ai pas eu
connaissance de l'original bengali, mais j'ai trouvé que dans plusieurs cas elles éclairaient
le sens général de certains passages obscurs. Toutefois, Haq semble souvent s'éloigner du
texte et gloser plus que simplement traduire.
Dans ma traduction, les mots d'origine arabe ou persane sont notés selon leur
orthographe bengali. J'ai donné, une fois au moins, la translittération des mots de ces langues.
Le plan du Yoga-Kalandar est le suivant : après quelques vers de louange, stuti,
commence la partie la plus longue qui concerne les mokám (ar. : maqám), sous le titre
mokám tattva (p. 94-101 de Г éd. de Sharif). Vient ensuite la description du corps, taner
vicàr (p. 102). Puis l'auteur fait un rapprochement entre les mokám et les étapes de la
pratique, mokám o sádhantattva (p. 103-107) ; il recense ensuite les postures ainsi que les
méthodes et les effets de la méditation, ásan dhyán (p. 108-1 12). Pour finir, il énumère les
signes annonciateurs de la mort, mrtyu laksan (p. 113-115). Un court passage (p. 116) sur
la signification des couleurs met un terme à l'ouvrage sans conclusion particulière. Le
texte est en vers payár de quatorze syllabes organisés en distiques à rimes plates. La
langue ne semble pas très ancienne. Sa transmission orale a sans doute contribué au fil des
temps à sa modernisation.
Louange
1 Je salue d'abord le Seigneur Niranjan, la
Après Lui je salue les pieds du Prophète.
2 Allah le Clément, le Miséricordieux, le Tout-puissant protecteur,
Lui qui a créé les dix-huit mille mondes.
3 Le Prophète était anxieux à propos du monde, sache-le,
L'Envoyé d'Allah se faisait beaucoup de soucis.
4 Puis sache que Bibi Phâtemà est la fille de l'Envoyé, 4a
L'épouse du seigneur Alï, la mère du monde.
5 Saluant les pieds de tous les compagnons, 5a
Je vais vous dire tout sans rien omettre, écoutez attentivement.
la Niranjan: «le sans maquillage, l'immaculé». Nom donné à l'Absolu sans qualité dans la
littérature nâth, repris par les Maňgalkavya bengalis à la fin du XVe siècle, ainsi que par les poètes de la
tradition des Sants de l'Inde du Nord. Les auteurs musulmans utilisent ce terme très généralement. Il se
retrouve aussi dans le Rushd-nama de Abd al-Quddus Gangohi (Digby 1975 : 60).
4a Phâtemâ (ar. Fàtima) fille du prophète, épouse d'Ali. On peut se demander si elle n'est pas ici
considérée quelque peu comme la sakti, puissance divine féminisée. Chez les Sunnites, c'est Aisha,
épouse du Prophète, qui est appelée Mère du monde. Par contre, c'est Fatima qui reçoit ce titre chez les
Ismaéliens (communication orale de Zawamir Moir).
5a Âsabbà : corruption de l'arabe sihâb « compagnons », notamment du Prophète (pluriel de sâhib).
Notons que deux distiques supplémentaires ont été traduits par Haq :
I pay my respect to all the angels living in the sky
By whose order the whole system of the universe is maintained
Now, О people, hear the (great) tidings:
I only tell you the mysteries of the four Maqâms.
Un texte du Bengale médiéval 73
6a Tiharî : le « trois-pointes ». C'est l'image du fourneau de terre à trois pointes sur lesquelles se place
le pot à cuire le riz. Le terme est utilisé pour signifier le lieu d'où partent les trois conduits subtils, nàdî : idâ,
pingalâ et susumnà. Ce mot tiharî renvoie au cakra de la base, le mulàdhàra, mentionné au vers 8a. Il est
employé aussi dans les textes nàth dans le même sens, par exemple dans le Goraksa-vijay de Šekh Phayjullâ
(éd. Abdul Karim, p. 120 et 148). Il figure aussi dans le Jnàn-Pradïp de Saiyad Sultan (p. 584 et 625). Abd
al-Quddus Gangohi, dans son Rushd-nama, utilise le terme tikuti dans le même sens : (c'est) « le point de
jonction des cordes idâ et pingalâ duquel la kundaliriï peut monter par la troisième corde centrale susumnâ »
(Digby 1975 : 47). La kundalinï, énergie primordiale, s'y trouve lovée à l'entrée de susumnà. «Dans le
péricarpe du lotus de Yâdhàra se trouve la belle yoni triangulaire, cachée et gardée secrète dans tous les
Tantras » (Siva-samhitâ II, 22). Ida est à gauche de susumnâ et pingalâ, à droite.
6b Chaque station est placée sous l'autorité d'un ange, comme chaque cakra est présidé par une
divinité. Les quatre archanges (phiristà) sont présentés selon un ordre hiérarchique ascendant, reconnu,
semble-t-il, par la tradition : Àjrâil, Isrâphil, Mikàel et Jibràil.
7a Khàchâl : le terme est obscur. Le professeur Haq traduit par « cavity, solitary cavity », ce que j'ai
finalement adopté. Le mot se retrouve d'abord au vers 19a et ensuite au vers 47b avec la variante mandir,
« demeure, temple », ce qui renforce l'idée d'un endroit fermé et protégé de l'extérieur. L'élément feu
caractérise cette station et c'est précisément le cas du mulàdhàr.
8a Le mulàdhàr est le centre subtil situé à hauteur du coccyx, selon le système hindou du yoga. Il est
ici mis en rapport avec la station nâsut (ar. nâsut).
8b « Le soi existentiel » traduit jïvàttamà. C'est le soi individuel par opposition au Soi essentiel, ou
l'Absolu, le Paramàttamà.
9a Le terme arabe dhikr est bengalisé enjikir.
Variante : « La kalimà du prophète est le dhikr qu'il y faut réciter ».
9b Je traduis par « instructions » le terme phikir (ai.ýikr) qui signifie « pensée ». Le Yoga-Kalandar
est composé en vers payâr selon une disposition en distiques qui riment, ďoujikir et phikir.
10 « Le maître de maison » traduit grhasvâmï, ce qui n'a guère de sens dans ce contexte. Sharif
propose deux variantes : gryartu (pour grismartu, « saison de l'été ») et ànalartu (« saison du feu »), qui
permettent de faire correspondre l'été à ce centre et complètent l'attribution dl'une saison à chaque
maqàm.
Trad, de Haq : « A black lotus is there; and the season grisma (summer) prevails / Fire incessantly burns
in that region. »
Chaque cakra a la forme d'un lotus dont la couleur et le nombre de pétales diffèrent. Ici, le nombre de
pétales, quatre pour le mulàdhàr, n'est pas précisé.
11 Le feu est l'élément attribué au mulàdhàra, et donc à la station nâsut.
13 Le feu qui doit brûler sans cesse doit pousser les souffles vers le haut par le canal de susumnà.
Selon les textes du yoga, le nectar qui coule de la lune dans le « mille-pétales » descend par un conduit
appelé šaňkhim, représenté comme un serpent à deux bouches. Par l'une d'elles, ce nectar poursuit ensuite sa
74 France Bhattacharya
descente par idâ et piňgala jusqu'au cakra mulâdhâr où le soleil le transforme en un poison destructeur. Par
l'autre, la « dixième porte », située à la base du palais, ce nectar est arrêté dans sa descente par le yogi qui le
boit au moyen d'un exercice particulier, appelé khecarï mudrâ. Le yogi qui absorbe ce « grand suc »,
mahâras, ne craint ni la maladie, ni la vieillesse, ni la mort (Mallik 1950 : 143, 310, 313).
14 Ce distique fait allusion à la pratique des yogis selon laquelle ils contractent les muscles du
périnée pour faire remonter les souffles. C'est le mulabandha (Siva-samhitâ IV, 41). La rétention du
souffle et la posture mentionnée sont supposées permettre la réussite de cette entreprise. Voir aussi Jnàn-
Pradîp de Saiyad Sultan (p. 587). Le mot guhyamul, qui veut dire littéralement « base cachée, racine
cachée », signifie la région du périnée et précisément l'anus.
17a Je traduis la variante proposée par Sharif plutôt que la leçon choisie qui donne : « Le soi corporel,
sarirer àttamâ, se trouve dans les oreilles ». Mais cette variante fait du vers 18a une répétition de celui-ci.
Haq traduit : « Know that the main doors of a body are two ears ».
17b Le pratiquant entend le son continu, non frappé, anâhata, à l'intérieur de son corps lorsqu'il
l'écoute, l'esprit concentré, précise le commentaire de la Hatha-yoga-pradïpikâ (120) ; voir aussi ibid.
chap. 4, versets 65-106.
À la place de bâdyadhvani, Sharif propose en variante parimâni, « en proportion » ?
1 8a Sharif propose en note l'ajout catur (« intelligent, rasé »), que Haq traduit par « clever ».
18b Je traduis muluk (sg. mulk en arabe) par « pays ». Il s'agit du monde extérieur dont les messages
parviennent jusqu'au soi existentiel, jïvâttamâ, par l'ouïe.
19a Le terme khàchàl est traduit par « cavité », comme le fait Haq ; cf. supra au distique 7a.
19b Le vent sera mentionné comme élément caractéristique de la station suivante : malakut. Le vent et
le souffle sont homologues l'un à l'autre ; le vent, qui est un élément du macrocosme, est mis ici pour le
souffle qui est son correspondant dans le microcosme. En outre, chaque station est mise en relation avec
une saison. On retrouvera pour jabarut la mention du printemps. Le lieu du père (pitâ) est encore, me
semble-t-il, la partie du corps où se trouvent les organes génitaux qui sont responsables de donner la vie.
Cette région correspond au mulâdhàr, au moins dans la conception des fakirs. Haq traduit pita par « gall
bladder » (« vésicule biliaire »), considérant sans doute que pita est mis pour pittakosa, ce qui n'a aucun
rapport avec la base de la colonne vertébrale où se trouve le « trois-pointes ». L'expression pita sthàna
pourrait se comprendre aussi comme signifiant « lieu du dos » (pitha). Ce ne semble pas faire grand
sens : il s'agirait dans ce cas de fixer en esprit son regard sur son propre dos, ce qui est demandé au vers
suivant. Le texte n'est pas du tout clair.
20 La concentration sur les stations produit des visions qui sont détaillées aux distiques suivants.
21b L'apparition d'effigies, murti, est intéressante dans un texte islamique. Le pratiquant ne voit pas
seulement des lumières comme dans certaines pratiques soufies (Buehler 1998 : 129). Selon une variante,
il s'agit même de l'effigie de Muhammad. Haq traduit par « image ».
Un texte du Bengale médiéval 75
23 La méditation réussie produit d'abord des effets physiques : le corps devient indestructible.
L'insistance sur les pouvoirs, siddhi, est caractéristique des Nàths. Elle l'est moins des Soufis
« classiques ».
24-29 II s'agit des signes d'une mort prochaine. Le sujet sera traité plus longuement dans l'avant-
dernière partie du texte. La traduction de Haq place ces distiques à leur vraie place dans le chapitre sur
les signes de la mort.
30 La station malakut est placée dans la région de l'ombilic, ce qui correspond au cakra manipurà,
mentionné au distique suivant. Le vent est l'élément distinctif de malakut alors que le feu était celui de nâsut.
31a Malakut et manipur sont mis en équivalence : deux noms pour une même chose.
31b La saison des frimas, hemanta, caractérise cette station.
32b La notion de porte, dvàra, est un autre élément caractéristique d'une station.
33a. Le terme dhâm signifie « résidence, lieu », et aussi, moins fréquemment, « réceptacle ». Une
variante propose nâm, « nom ».
33b Le contrôle du souffle, chez les Soufis et les fakirs comme chez les yogis, est une pratique
fondamentale. Le terme utilisé ici est sambaran, le yoga parle de kumbhaka pour la rétention du souffle
en général (Hatha-yoga-pradïpikà II, 43, et Mallik 1950 : 315).
Trad, de Haq : « From which breath constantly comes out ».
34a II s'agit d'un chiffre conventionnel dont l'origine est peut-être à chercher dans l'importance
attachée aux chiffres quatre et quarante dans l'islam : période de méditation des Soufis de quarante jours
(Schimmel 1975 : 103), Soufi ne dormant pas pendant la même durée (ibid : 115), les quatre sortes
d'amour selon Bayezid (132), Dieu a pétri la glaise quarante jours pour créer Adam (188), Ruzbihan
Baqli parle des quarante dont les cœurs sont comme celui de Moïse (202) et les quarante stades par
lesquels l'homme doit remonter jusqu'à Dieu (224).
34b J'ai traduit par « corps » le terme ghat qui signifie au premier sens « cruche ». Cet emploi
métaphorique est fréquent.
76 France Bhattacharya
36a Trad, de Haq : « Fixing your gaze on (the tip of) the nose hold up your breath... ». Var. Sharif:
« Fixe le regard sur ton nez, les yeux ouverts ».
36-37 Description de la posture habituelle au yogi qui s'exerce au contrôle du souffle.
38b Reprise de la description des visions avec une effigie, muni, de la couleur (verte) d'une feuille
d'arum. Le vert est la couleur la plus valorisée par l'islam. « "Celui qui est vêtu de vert" a toujours été
une épithète de ceux qui vivent au plus haut niveau spirituel... » (Schimmel 1975 : 102). Par contre, le
vert ne figure pas parmi les couleurs attribuées aux lotus des divers cakra.
Haq traduit : « a light resembling the colour of the leaves of arum ». Son texte introduit le mot « light »,
que celui de Sharif ne comporte pas.
39 Trad, de Haq : « Amidst this light an image will be seen / Know that this image represents the
light of Atma (or soul). » Le mot varan (skt. varna) toutefois ne veut pas dire « lumière », mais
« couleur ». Haq pense aux laufa, mais le mot ne figure dans le texte qu'une fois au vers 167b (voir note
afférente et tableau).
42b Au lieu de yug àkhi, « deux yeux », Sharif donne la var. divya àmkhi « œil divin », reprise par Haq.
43a Le mot bengali ici rendu par « lieu » est puri, « ville ». Var. jyoter antare, « à l'intérieur de la
lumière ». Trad, de Haq : « in that region ».
Le fruit de la pratique réussie à la station malakut est la vision du monde des êtres spirituels : les anges
selon l'islam. Le terme employé toutefois est sanskrit : suràsura, « dieux et démons ».
43b Var. : « Tu verras la forme du passé et du futur », et encore « Tu verras beaucoup de formes
élaborées ». Trad, de Haq : « and all other beings ».
45a La place de la stationjabarut à la base du palais la fait correspondre au cakra visuddha.
45b. Le terme magaja veut dire « cerveau ». Il semble s'agir de la masse nerveuse en général. S. B.
Dasgupta place le visuddha cakra à la jonction de la moelle épinière et de la medulla oblongata, ce qui
correspond à ce qui est dit ici (1974 : 147, n. 3).
46b La station est appelée nàsirà, « yeux » ; Subhan écrit nàsirà. Dans cette station, le Soufi doit fixer
le milieu du front, alors que dans la station màhmudà, il doit regarder la pointe de son nez, cf. vers 67
(Subhan 1970: 100). La porte de jabarut est constituée par les yeux, ce qui est précisé en 47a.
Un texte du Bengale médiéval 11
47b Var. Sharif : mandir, « demeure, temple », plus intelligible que la leçon khachâl adoptée par
l'édition, mais qui n'est pas conforme aux autres mokàm pour lesquels il est toujours question de khâchâl,
que j'ai finalement rendu par «cavité». «Foie» traduit kalijà, ce qui correspond à l'usage actuel.
Toutefois, le terme kalijâ était aussi employé pour signifier le cœur à la période médiévale, comme me le
disait le professeur A. Sharif avec qui j'ai eu la chance de pouvoir vérifier le sens de certains mots. S'il
fallait traduire par « cœur », il s'agirait du cœur « grossier » par opposition au cœur « subtil » appelé SI,
mentionné au distique 65. Haq toutefois emploie le terme anglais liver, « foie ». Je remercie vivement
Marc Gaborieau qui m'a éclairée sur ce point comme sur bien d'autres. Le foie, m'a-t-il fait remarquer,
est le siège des émotions dans le sous-continent indien (cf. aussi Brown 1868 : 364). Le foie n'est pas
mentionné, toutefois, comme emplacement d'une latïfa. L'auteur a pu vouloir évoquer le côté droit de la
poitrine où se trouve le ruh (voir infra tableau) ? Signalons toutefois que Shah Wali Allah Dihlawi fait du
foie la place de l'âme concupiscente, nafs shahwiyya (Baljon 1986 : 70).
48a La station jabarut a pour élément l'eau, ce qui la ferait correspondre au cakra svàdhisthâna, situé
dans la région de l'ombilic (voir tableau).
49 Ce distique reste énigmatique. « L'intelligence des causes » traduit littéralement hetubuddhi. Cette
expression est reprise plusieurs fois plus avant dans le texte. Elle exprime un état de conscience supérieur qui
permet d'appréhender une réalité supra-sensorielle. Haq la traduit par « intellect for ultimate reasoning ».
50a La mention du réservoir de nectar, amrtakunda, renvoie tout à fait à la terminologie nâth. Ce
nectar est source d'immortalité. Toutefois, il se trouve, selon les Nâths, dans le sahasrâra cakra au
sommet de la tête, et non pas dans un cakra inférieur. La pratique de la khecarï mudrà, qui permet au
yogi de boire ce liquide qui se déverse du haut de la tête et d'empêcher ainsi sa descente dans le corps où
il serait brûlé, a déjà été évoquée à propos de la « dixième porte » au vers 13b. Dans le macrocosme, la
lune est le réservoir de ce liquide qui y prend le nom de soma.
J'ai donc traduit amrtakunda par « réservoir de nectar ». Sharif propose une variante ardhacakra : un
demi cakra, un demi-cercle ? Haq (p. 381) traduit ce vers : « AU Sâdhaka as call it (i.e. the cavity of
liver) Âjnà cakra » (sic !).
50b Le printemps et l'automne (hemanta, « les frimas », au distique 31) sont les saisons qui sont les
plus favorables pour débuter une pratique yogique selon les Nâths (Mallik 1950 : 401). Dans ce deuxième
vers du distique, saison et souffle sont confondus.
51a Haq, malgré sa traduction du vers 50a, poursuit : « This Amritakunda (i.e. well of nectar) is a
great lake... »
52b Trad, de Haq : « Her beams give a physical satisfaction to look at. »
54 Le compagnon aimé dont la vision apparaît dans la méditation est le Prophète Muhammad.
55 Iblis, le Satan islamique, est sans pouvoir sur celui dont l'intelligence est stable puisque
l'intelligence des causes s'est éveillée en lui.
78 France Bhattacharya
56-63 L'évocation de l'union des deux Sois, l'individuel et le Suprême, fait référence à la conception
soufïe du wahdat-al wujud, avec une nuance apportée par la conception indienne du corps comme
microcosme homologue au macrocosme.
À partir du distique 56, la traduction de Haq ne correspond plus du tout au texte que je traduis. Selon la
version de Haq, la description de jabarut se termine avec le vers 55b et celle de lâhui commence. Un
certain nombre des distiques manquant sont incorporés plus loin. En outre, la traduction de Haq termine
ce qui concerne jabarut en disant : « When the perfection oîMâlkut Maqàm is attained... » (p. 381).
58b Var. Sharif : « Tous deux, l'un l'autre, se contemplent ».
60a Var. Sharif pour nabîr murti : jMnavanta ati, « le très savant » (?).
60b Nur Muhammad ou la « lumière de Muhammad » se manifeste avant même le commencement de
la création.
62a Var. Sharif : au lieu de sadap, « huître », puspa, « fleur ».
65 La station lahut, située dans le cœur, dïl, correspond à Vanâhata du seul point de vue de sa place.
Le distique 68 affirme cette correspondance.
L'élément attribué à la station lâhut est la terre. Cette hiérarchie des éléments, plaçant le plus grossier au
sommet, surprend et diffère des attributions concernant les cabra. On peut penser que la valorisation de
l'élément terre est due au fait qu'Adam, le premier homme, a été fait de glaise. La version traduite par
Haq ne comporte pas la mention de cet élément. Les éléments appartiennent tous au monde physique du
latifa nafs (Buehler 1998 : 107).
67 Mahmuda est un des noms de la station du cœur où réside Allah. Une variante propose, au lieu de
prabhu, traduit par « Seigneur », âttamâ, « le soi ». Selon Subhan (1970 : 100), dans la station mahmuda les
yeux du pratiquant sont fixés sur le bout du nez. En même temps, le Soufi médite sur la présence divine qui
le regarde. Simon Digby écrit que la tradition fait de Maqaman Mahmudan la station de l'intercession pour
autrui (1975 : 44). Le professeur Carl Ernst me signale que l'expression figure dans le Coran (Sura 17 : 79).
68 Je traduis desântare (littéralement : « dans un autre pays ») par « ailleurs ».
À propos de la station lahut, la mention de l'automne est unique et très claire.
Un texte du Bengale médiéval 79
69 « Tout à l'intérieur » est une approximation pour l'expression tili de'se. TU signifie au sens propre
« sésame, grain de sésame », et au figuré « ce qu'il y a de plus petit ». Haq traduit comme s'il y avait en
bengali plihâ, ce qui signifie « rate », en anglais spleen : « Know that in the region of spleen lies the
heart ». Il semble que Haq pense à la place des latlfa dans certaines confréries soufies où la notion de
droite et de gauche est importante (voir infra les tableaux). Le foie est à droite, la rate à gauche.
70a « Le soi », avec minuscule, traduit jïvâttamâ.
70b Var. Sharif: au lieu de suddhi «purification», sandhi «jonction». Haq traduit par
« realisation », mettant entre parenthèses le mot siddhi.
71a Trad, de Haq : « wine » au lieu de ksîr, « lait ».
71b Le texte de Sharif donne jot (?) etjyoti, « clarté ». Haq traduit « color ».
72 L'expression « chacun des deux » renvoie au Seigneur Nirafijan d'une part et au soi individuel,
d'autre part. Le distique 75 est très explicite à cet égard. Trad, de Haq : « Paramàtmà (i.e. divine soul)
lives with Jîvâtmd (i.e. individual soul) / When you meditate, you will see Him there (i.e. in the colour)
with your own eyes. »
La traduction de Haq inclut à partir du distique suivant les distiques 56-63 du texte publié par Sharif que
j'ai traduit concernant la station jabarut.
74 L'accent mis sur la concentration est caractéristique des textes yogiques.
75a « Image » traduit murti.
76 L'auteur semble faire la différence entre le paramàttamâ qui serait le soleil, divâkar, et le
jïvâttamâ, ses rayons.
77 Âttamà est ici le paramàttamâ, comme le dit une variante. Le lotus est ici le sahasrâr, le mille-
pétales, noté sahasr. La station lâhut correspond de ce fait à la fois au centre anàhat et au sahasrâr.
78 Le Seigneur réside en un lieu qui est le lotus du cœur, mais sa présence se fait sentir dans le corps
tout entier.
80a Trad, de Haq : « With the help of divine vision of the hidden eye », ce qui correspond à une
variante indiquée par Sharif.
80b L'insistance sur le trône, simhâsan, paraît bien islamique.
80 France Bhattacharya
A propos du corps
89 Je vais dire maintenant quelque chose d'essentiel à propos du corps
II y a quatre corps en un corps, écoute leur nom.
90 Le corps kasiphu, le corps latiphu, le corps bakàu, le corps phâni 90a
Écoute cela de la bouche du gourou et comprend ce qu'ils sont.
91 II y a sept montagnes incomparables, 91
Elles se trouvent dans le corps, écoute leurs noms :
81 «Le soi à l'intelligence animale» est une traduction du bengali pasu buddhi. Le vers suivant
précise le nom donné à ces mêmes entités dans le vocabulaire islamique : ruhu hàyaoyàni (ar. ruh-i
haivâriî, locution persane faite de deux mots arabes, le nom ruh « âme » et l'adjectif haivâriî « animal »).
On peut penser que le soi individuel, jïvâttamâ, est constitué par ces deux éléments : l'animalité et
l'esprit (l'âme). Le mot arabe al-hayulà, qui n'est pas très éloigné non plus de la forme bengali
corrompue hàyaoyàni, signifie la matière, par opposition à l'esprit, ruh.
82 Iblis figure encore à ce niveau puisqu'il y a toujours de l'animalité. L'omniprésence du mal,
exprimée une autre fois dans le distique 83, n'est pas mentionnée dans les textes de yoga lorsque le
pratiquant arrive à ce stade (Schimmel 1975 : 183-196).
Les distiques 83, 84 et 85 ne figurent pas dans la traduction de Haq.
86 Le texte évoque à nouveau le son anâhat qui est continu et non frappé. Les Nâths lui accordent
beaucoup d'importance.
Trad, de Haq : « Sound spontaneously flourishes there / Being seated in a solitary place, hear it
attentively. // Steadying the mind, recite the mystic formula Ajapâ / and realise the Stainless Lord
(Niranjana) residing in the physique of man. » Le mot anâhat, emprunté au yoga, ne figure donc pas dans
la trad, de Haq.
88 Les résultats obtenus au terme de cette pratique qui mène l'aspirant de nàsut à làhut sont de
l'ordre des pouvoirs : le (ou les) savoir(s) et la longévité. La préoccupation avec la longévité, et même
l'immortalité, est primordiale pour les Nâths. Par tradition, les Soufis n'y sont pas autant attachés.
90a Kasiphu est le corps grossier (< ar. kaslf, « épais, lourd, grossier »), latiphu (< latïf, « subtil »),
bakàu (< baqâ) est le corps qui reste (après l'union mystique) et phâni (<fanà) le corps extinct en Dieu.
Ces quatre « corps » se retrouvent, potentiellement au moins, en un corps individuel. Je remercie Marc
Gaborieau qui m'a suggéré que kasiphu pouvait venir de kathïf.
91 II semble être question des montagnes de la mythologie hindoue, dont le mont Sumeru est la plus
importante puisqu'il constitue l'axe du monde. Selon l'homologie microcosme-macrocosme, ces
montagnes se retrouvent dans le corps humain. Le Meru est aussi l'axe du corps (Siva-samhità II, 4).
Un texte du Bengale médiéval 81
92 Cette liste ne recoupe pas celle des sept kulgiri que connaissent les épopées et les Puràna
sanskrits. Seul, le mont Malya est commun. Udaygiri est la montagne du levant, Astagiri celle derrière
laquelle le soleil est supposé se coucher.
93a Var. Sharif : « J'ai parlé du "mille-pétales", écoute ce qui concerne le corps... »
La traduction de Haq est plus pertinente : « Let me name the seventh one known as Merugiri... » Merugiri
(« mont Meru ») et Sumeru désignent la même chose.
94b Tel qu'il est imprimé, le second vers du distique n'est pas compréhensible dans la leçon adoptée.
Je traduis donc la variante.
95a L'ombilic n'est généralement pas compté parmi les portes, sinon, avec les narines qui comptent
pour deux, il y a un élément de trop. C'est pourquoi, j'ai traduit nâsikâ par « nez », et « non narines », au
vers précédent. Selon Haq : « Two nostrils and a mouth are added to give the number ten ».
95b Je préfère à la leçon de Sharif, que j'ai traduite, la traduction de Haq : « Complete the number
ten. Know them each separately (from the guru). »
96-98 Le thème des « dons paternels » et « dons maternels » est habituel dans les textes relevant de la
« science du corps », dehatattva. On le retrouve dans les chants bàul et l'enseignement des fakirs
(Cakravartï 1990 : 22). J'ai traduit herà par son équivalent « vue », mais c'est la chair qui figure
habituellement dans cette enumeration (voir ci-dessous la traduction de Haq).
Le sperme est désigné figurativement par le mot mani qui signifie «joyau », ce qui n'est pas un emploi
rare. Magaj est ici plus que le cerveau, c'est aussi la masse nerveuse, la moelle.
98b Aux huit « dons » des parents viennent s'ajouter ceux d'Allah : ruh, aspect non individuel de
l'âme, et nafs, l'âme individuelle inférieure.
99a Le terme bàndà signifie à proprement parler « esclave ». Ici, il signifie tout être humain dont
Allah est le maître.
100 Le dernier distique se lit comme un proverbe. Les mots employés sont d'origine arabo-persane :
hayât, maut, rizik (ar. rizq) et daulat, sauf le dernier, âpad, mot bengali traduit ici par « tribulations ».
96-100 Du distique 96 à la fin selon la numérotation de Sharif, la traduction de Haq est quelque peu
différente :
« The first thing is semen, the second nerves, the third, bones,
The fourth, brain, -these four belong to father.
The first thing is hair, the second, skin,
The third thing is blood, the fourth, flesh.
Besides these eight things, the remaining ten belong to Allah.
When an embryo is six-month-old in the womb
Six things are written (by God) on his forehead.
(These six things plus other) four, viz. life, death, subsistence and wealth,
Are (exclusively) under the dispensation of God. »
82 France Bhattacharya
102a Aux quatre stations sont rattachés quatre éléments : ab, l'eau, âtas, le feu, khàk, la glaise et bât,
l'air, le vent. Le vocabulaire choisi est arabo-persan. Le texte reprend beaucoup d'éléments déjà fournis
dans la section traitant de la connaissance des stations.
102b Trad. Haq : « Attentively hear - 1 now like to explain their respective locations. »
104 Chaque station a son ange gardien auquel est associée une apparence animale. Les anges sont
disposés selon une gradation ascendante.
Chaque station est aussi mise en correspondance avec un stade, maňjil. Habituellement, en Inde, ce terme
a le sens de « palais », « demeure », mais l'arabe manzil signifie « étape », je traduis par « stade ».
104a Trad, de Haq : « Like tiger, he assumes a form ». L'anglais de Haq laissant à désirer, il n'est pas
facile de saisir ce qu'il veut dire exactement.
105b Ce vers est énigmatique. Littéralement on peut le traduire ainsi : « En sommeil dans la chambre
du père, couche fraîche ». Var. Sharif : à la place de piter ghare (« dans la chambre du père »), phirâe
grhe, « il circule dans la pièce ».
A « chambre du père » correspond dans la traduction de Haq « the chamber of gall-bladder », ce qui
signifie la chambre de la vésicule biliaire. Le vers est traduit ainsi : « He sleeps in the chamber of
gallbladder on a cool bed ». Au distique 19, Haq avait avancé la même traduction pour pita (cf. la note au
vers 19b, et plus loin, au distique 106).
Nidrâte peut être aussi bien une forme verbale qu'un substantif à l'instrumental ou au locatif. Dans ce
cas, la traduction est « pour dormir », ou encore « dormant », et non « en sommeil ».
106 Ce distique éclaire, me semble-t-il, le précédent. Il s'agit de fixer le regard sur le lieu propre à chaque
station. L'ange semble jouer le rôle de la kundalinï. L'énergie que les yogis appellent la kundalinï, et qui
n'est pas nommée dans le texte, se trouve endormie au cakra mulàdhâr. Elle doit y être réveillée, puis elle
doit monter en perçant chaque cakra. À la station nasut cette énergie est dans la chambre du père, c'est-à-
dire dans l'organe sexuel. À la station malakut, elle se trouve dans les poumons (109b), etc.
110 Le stade tarikat (ar. tarïqd) est la voie mystique du soufisme, par rapport à sarï'a, qui signifie
littéralement aussi « chemin », mais qui est la « loi » révélée, exotérique, extérieure. (Schimmel 1975 :
98). Les précisions sur le sens des mots arabes viennent de Marc Gaborieau, que je remercie.
Un texte du Bengale médiéval 83
112 Hakikat (ar. haqïqa), littéralement « Réalité divine », traduit parfois aussi par « Vérité », est le
troisième stade sur la voie mystique soufie. Pour certains c'est le dernier, mais les Soufis du sous-
continent indien y ajoute un quatrième, mârphata, la gnose (ar. Ma'rifa). Voir distique 1 16.
1 13b Le déplacement, le voyage, payàn, est celui du pratiquant mais aussi celui de l'énergie qui arrive
jusqu'au cœur, díl (pers. dit). Le soufisme appelle sdlik le voyageur mystique et sayr sa démarche.
1 14b Trad, de Haq : « Perfection of haqiqat manzil will sure be attained ». Il est clair que le texte que
je traduis, édité par Sharif, est différent de celui que traduit Haq.
117 Le texte reprend l'idée exprimée au distique 82 selon laquelle Niranjan et Iblis sont présents
ensemble dans le cœur du pratiquant à la station làhut, la plus élevée. Le premier des anges, Jibrâil, s'y
trouve aussi.
118. Il s'agit de voir ces trois formes (mp) dans le cœur, ce qui permettra d'obtenir des pouvoirs,
siddhi.
Trad, de Haq : « If you can recognize these three persons, the perfection of M'arafat will surely be
attained in meditation. »
119 Ce distique est placé chez Haq après le distique 116.
123 Après ce distique, la traduction de Haq introduit un passage que le texte de Sharif place dans la
section « Principes des couleurs », vers 240-242, de façon beaucoup moins élaborée :
« The Prophet has said in the Hadith
Obligations oîShariat are (the observances of) my sayings,
Those of TarTqat are (the imitations of) my character;
And know that Haqiqat is the stage of devout practices of my life.
Certainly know that Marafat is the secret of mine.
These four kinds of descriptions are found in the Hadith. »
84 France Bhattacharya
125 Tu diras Allah avec ta bouche et tu Lui obéiras dans ton cœur,
Dans le cœur et par la bouche tu reconnaîtras un seul Allah en essence.
126 Tu feras l'aumône de la richesse qui t'adviendra. 126b
Tu distingueras le licite de l'interdit, une caste d'une autre.
127 On appelle sarïyat les cinq devoirs du musulman :
Le jeûne, la prière, le pèlerinage, la profession de foi et l'aumône.
126b « Le licite » et « l'interdit » traduisent hâlâl (ar. halâï) et haram (ar. hárám). Jate jat est traduit
par « une caste d'une autre ». En bengali, le terme jât est employé surtout dans le sens de « caste ». Il
peut aussi vouloir dire « communauté religieuse ». On retrouve l'expression dans le Jnan-Pradïp de
Saiyad Sultan (p. 576) : Hàlâl hárám jâna ját ki aját. Haq traduit simplement par : « Make a careful
distinction between halál (i.e. lawful) and hárám (i.e. unlawful things). »
128a « Les ordures », traduction littérale dejaňjál. Haq traduit : « ...renounce all (worldly) botherations ».
On retrouve le terme jaňjál avec le même sens dans le JMn-Pradïp de Saiyad Sultan (p. 576).
129 «Tu contrôleras » traduit ksemâ debe. Les Nâths utilisent le terme ksemá, khemâ, au sens de
« système de contrôle » (Das Gupta, cité par Tarafdar 1965 : 213). Dans le Mna-cetan, récit nâth, on lit :
« Garde ton corps sous contrôle avec le plus grand soin », khemá kari rákha káyá (éd. Bhattasali, p. 41).
La liste des dangers à éviter recoupe partiellement les six ennemis, rpu, mentionnés aussi souvent par les
Bâuls et qui sont empruntés aux textes yogiques. Les textes nâths parlent des quatre obstacles : kám,
krodh, lobh et moh, par exemple dans le Goraksa-vijay de Šekh Phayjullâ (p. 151, 162, etc.).
131 Ce distique ne figure pas dans la traduction de Haq.
135a Je traduis prabhurbháve par «pensée du Seigneur», même si le terme bháv exprime une idée
d'émotion, d'affectivité.
Un texte du Bengale médiéval 85
140b « La science de la conduite » traduit riîti šas tra. Haq utilise à cet endroit le mot « religion ». Je ne
suis pas à même de dire si l'expression bengali était la traduction habituelle du mot arabe din. Toutefois,
l'importance des conseils de morale est caractéristique des écrits soufis en bengali et diffère sensiblement
sur ce point des textes de yoga.
142a Ahaňkár est le terme traduit par « ego ».
143 Ebàdat kam prend ici le sens général de « faire la pratique correspondant aux stades ». Une
variante dit sàdhan karà, ce qui éclaire le sens. L'arabe 'ibàda (pers. 'ibâdat) a aussi le sens de « devoirs
religieux obligatoires, prescriptions rituelles canoniques » (Metcalf 1982 : 363).
La variante du deuxième vers du distique se traduit par « il demeurera constamment auprès de Allah ».
Après ce distique, semblable dans le texte de Sharif et dans la traduction de Haq, cette dernière introduit
le passage sur les couleurs attribuées respectivement à chacun des quatre éléments du cosmos (distiques
145-147). Sharif le place à la fin du texte. À la suite des couleurs, la traduction de Haq poursuit par sept
distiques qui ne se retrouvent pas chez Sharif :
« 10 - Description of dresses worn by the four angels living in the four Maqâms
Here me [sic], - 1 like to describe the respective dresses of
Those angels who inhabit four Kishwars (= kingdom = Maqâms)
Know that the angel Azrâil is a terrible guard;
He puts on a red dress and rides on a horse.
Angel Isrâfil possesses green dress and a green horse.
Angel Mikâil rides on a (white) horse with white dress on.
Angel Jibrâil lives near Niranjana, and
He rides on a yellow horse with yellow dress on.
« 1 1 - Description of Díl or heart
(Just as) there are four (subtle) bodies within one body,
(so also) there are four (subtle) hearts (within the body).
Attentively hear me, I give a description of them.
They are: Díl Mudawwarí, Díl Sanawwarî.
Díl Ambari, and Díl Nilufarî.
I, the humble one, cannot describe their greatness.
Hear of their unparallel secret from oral explanation of the Guru. »
146b Le corps humain selon le Yoga-Kalandar serait fait de terre et de chair. Variante proposée par
Sharif : « de mort et de terre ».
148 Le mot ârohà semble être une déformation de àroyà ou àraoyah signifiant « être doté de vie »,
jïva,prâni (Haq 1984 : 106, 105). Ce distique ne figure pas dans la traduction de Haq.
86 France Bhattacharya
158 II s'agit sans doute des purifications internes pratiquées par les yogis. Le basti est un lavement
des intestins (Hatha-yoga-pradïpikà II, 26 et Gheranda-samhitâ I, 45, 49). Il est possible aussi que bàri,
« eau », soit une faute d'impression pour bábi, « air, vent ». Si tel est le cas, ce que donnerait à penser la
traduction de Haq, il faudrait comprendre : « tu respireras en prenant une inspiration d'air printanier ».
Haq traduit : « Draw the breath of basanta (or lit. vernal breeze) through the nostrils ». Le texte de Haq,
ou sa traduction, s'éloigne ici des références yogiques qui sont réintroduites au vers 159.
159 Les trois conduits subtils sont joints à la base du coccyx, avant de se séparer pour se rejoindre au
centre entre les sourcils. Cet endroit correspond au premier centre, le mulàdhâr, où se trouvent le « trois-
pointes », tiharï (cf. verset 6). Dans le Goraksa-vijay (p. 148), on lit : « Presse le trois-pointes que la
fumée s'élève, commence à allumer le feu, que ton corps soit calme. »
La variante propose, au lieu de « ta méditation sera profonde (mot à mot : tu iras en un lieu inacessible) »
(gahane yâibà), « tu courras dans le ciel », gagan dheyàiba. Haq traduit sa version : « Igniting the fire of
sacral region, press Tribeni and / Concentrating the mind, meditate a deep meditation. »
160 « Mémorisation » traduitjikir (ar. zikr). C'est l'invocation répétée du Nom.
161 On peut s'étonner de cette allusion à la réincarnation : janmântar pâp, « les péchés des autres
naissances ». C'est sans doute une expression pour dire que les péchés de toute la vie sont effacés. Saiyad
Sultan toutefois accepte la réincarnation dans son JMn-Pradïp.
162b « La forme » traduit le mot rup qui peut aussi vouloir dire « beauté ». Haq traduit le mot qu'il
trouve dans sa version par « light », à chaque occurrences.
163 L'évocation de ces formes colorées qui apparaissent au cours de la méditation rappelle les lumières
de couleurs différentes que voit le Soufi à l'intérieur de son corps. Najmuddïn Kubrâ fut le premier à en faire
l'exposé, suivi par 'Alâ ud-Dawla Simnânï un siècle après lui (Corbin 1971 et Mole 1982 : 99). Ces couleurs
sont mises en rapport avec les centres subtils, latïfa, des parties de l'univers et avec les prophètes (Schimmel
1975 : 379, et Baldick 1989 : 95). Voir aussi au vers 167 b. Selon Tarafdar, les Soufîs qadiri et naqshbandi
du sous-continent ont développé ces concepts plus particulièrement (1965 : 214-216), ce qui est précisé pour
les Naqshbandis par Buehler (1998 : 106-120). Voir infra tableau.
165b Alekhâ, alakh, sont souvent employés indifféremment et sont dérivés de alaksya qui est la forme
sanskrite (et bengali) correcte, signifiant « invisible, imperceptible ».
166b « Jeu » traduisant le mot lïlâ, il ne peut s'agir que du jeu divin. Ce mot appartient en premier lieu
au vocabulaire vishnouite.
167b L'arabe aurait voulu le pluriel latâ 'if.
88 France Bhattacharya
171 Parmi les « prophètes », Adam est relié au noir, c'est l'aspect extérieur, qàlabiyya. Abraham l'est
au rouge et c'est l'aspect du cœur. Moïse est en rapport avec le blanc, c'est l'aspect du tréfonds du cœur,
sirr. Cette dernière couleur est mentionnée au vers 163, avec le jaune qui est relié à David et constitue
l'aspect spirituel, rûhï. Le noir lumineux est mis en relation avec Jésus et avec le secret le plus intime,
khqfî (Schimmel 1975 : 379). Il manque le bleu que l'auteur du Yoga-Kalandar ne prend pas en compte..
173 L'idée du percement, bhed, est importante dans les Tantras et le yoga où il est question du sat-
cakra-bhed ou « percement des six centres subtils ».
Chez certains Soufis, le front est considéré comme le centre le plus important en tant que siège de la
conscience et de la perception des formes (Glassé 1991 : 234).
176 L'image du miroir est importante chez les Soufis. Allah a créé le monde comme le miroir de sa
propre grandeur.
181 La présence côte à côte de Niranjan (le Soi) et de Iblis est déjà mentionnée aux distiques 82 et
117 (cf. Schimmel 1975 : 193-196).
1 83b « La forme infinie, invisible » traduit ananta alekhâ rup.
Un texte du Bengale médiéval 89
189a Kerâbin et Katebin sont les anges qui tiennent le compte des bonnes et des mauvaises actions
humaines.
191 Tajallï est traduit par «illumination divine» (cf. Subhan 1970: 63). «Compagnon» traduit
sakhâ, terme chargé d'affectivité, utilisé aussi dans la mystique hindoue vishnouite (féminin : sakhî).
195b Ici encore alekhà est traduit par « invisible ».
197 Brahmavadh, « meutre du brahman » au lieu de bràhmanavadh « meutre du brahmane ».
198 La mention de Srîgopàlnagar, de Tripinï et du suc d'amour, kelirasa, renvoie au vishnouisme
sahajiyd hétérodoxe, et laisse à penser que l'auteur fait allusion à l'union sexuelle ritualisée qui fait aussi
partie de la pratique des Bàuls et de nombreux fakirs. Le distique 202 en donne confirmation.
199 Abhayà, « celle qui enlève la peur », peut se traduire aussi par « celle qui assure que rien de
fâcheux ne se produira » et encore « celle qui est sans peur ». Haq traduit : « It (sensual pleasure) remains
hidden in its own place ». Abhayâ est un nom de la Déesse, c'est-à-dire de la Šakti qui réside sous la
forme de la kundalinï dans le corps humain.
200a Trad, de Haq : « Abinas and Alekha are two solitary places », ce qui ne correspond pas au bengali
de Sharif: abinas anal jvàl dui sthân, que j'ai traduit littéralement. La variante proposée par Sharif:
abinas alekhâ nijjal dui sthân, ne correspond pas non plus à la traduction de Haq. À la place de nijjal
(« sans eau » ?), il faudrait nirjan, « solitaire, désert ».
201b Le texte est obscur. Une variante proposée par Sharif supprime la négation, ce qui rend le vers
encore moins compréhensible. Haq propose une glose plus qu'une traduction : « (But this much I know
that) when they are destroyed, foundation of that superb house is shaken. »
90 France Bhattacharya
202 On relève un distique très proche dans le Mîn-cetan, texte nâth (Mîn-cetan, éd. Nalinï Kanta
Bhattâsâlï, p. 41) : « Garde avec le plus grand soin ton corps sous ton contrôle / si tu perds ce corps tu
n'en obtiendras pas un autre // Le soleil et la lune (?) le premier jour lunaire, le jour de la pleine lune / Tu
ne dois pas ť approcher d'une femme // ». On retrouve le dernier distique mot pour mot dans le Jnàn-
Pradïp de Saiyad Sultan (p. 616).
203 Trad, de Haq : « Kalandar says, - skilfully practice Yoga, When it is (properly) understood, all of
you will be informed of death. » L'original bengali a été donné dans l'introduction à sa traduction (p.
372) : kausale dhyâo yog bale kalandar I bujhile pâibe sabe maran khabar. La variante de Sharif : kusale
ye dheyâiyâ mahâkâlàntar I jânile pâibejân nibandha khabar, est plus obscure.
Les signes annonciateurs de la mort semblent être un topos habituel dans l'Inde, en général (Sinclair
Stevenson 1971 : 137-138) et dans le corpus nâth, en particulier. On les retrouve avec des similitudes et
des différences dans le Mîn-cetan édité par Nalinï Kânta Bhattâsâlï, p. 46-47. Ils figurent aussi dans le
Goraksa-vijay, éd. par Paficânan Mandai, p. 143-145. Voir Tarafdar 1965 : 212. Par contre, on ne les
trouve pas dans l'édition faite par Abdul Karim. Le topos a été adopté par les auteurs soufis, et on le
retrouve aussi dans le JMn-Pradïp de Saiyad Sultan (p. 650-654) et le JMn-sâgar de Alï Bidâ. La
mention de ces signes rappelle que les Soufis, comme les fakirs et les yogis, ont souvent joué le rôle de
thaumaturges et d'astrologues.
204b Le deuxième vers est identique dans le Mîn-cetan, mais la mort est alors promise dans un délai de
sept jours.
205b « Lune » traduit indu, mais une variante propose bindu, ce qui se traduirait par « goutte ». Haq
traduit : « If no drop (of water) is seen to come out of the nose, when it is pressed...) ». On reste perplexe.
206 Le distique est presque identique dans le Mîn-cetan.
Haq traduit : « If the mind of any person always roam about ». La version de Sharif a le mot bhram qui
signifie « erreur, illusion », et non bhraman (qu'a sans doute lu Haq) qui veut dire « voyage,
déplacement ».
207-209 Les distiques 207, 208 et 209 ne correspondent pas chez Haq, dont voici la traduction :
« If the heart of anybody is dejected at the time of laugh / When all these signs are manifested, death is
believed to occur within a year. // If vultures are always seen on the tree, / If the sun looks like a monkey,
when it is beholden ».
208b J'ai traduit svarga par « ciel » bien que le sens propre soit « paradis ». Une variante, proposée par
Sharif, remplace bhânu (« soleil ») par bhâluk (« ours »).
209a Mîn-cetan (p. 46) : « Celui qui mange de la chair en rêve après avoir vu des vautours femelles et
qui voit des dromadaires, des grues, des ânes et des serpents... meurt dans un mois. »
209b Gàdir a pour variante gâbhir, « vaches ». Haq n'a pas ce vers.
Un texte du Bengale médiéval 91
210 Qui bien qu'il n'y ait personne derrière (lui) entend des bruits d'hommes, 210
Qui a le palais desséché en ne voyant pas les sept étoiles, 210b
211 Qui à la vue du soleil levant n'en perçoit pas le sens profond, 211
Qui ne voit pas le grand chemin dans les lignes de la lune,
212 Qui ne voit pas son nez si le bout en est courbé,
Qui n'entend pas le son primordial (nâd) en faisant l'amour,
213 Celui qui en plein jour voit choir des comètes 213
Qui viennent soudain tomber en tournoyant sur quelqu'un,
214 Celui qui voit donc ces signes particuliers,
À celui-là la mort est assurée dans six mois.
215 Celui qui, levant la tête en plein jour, 215
Voit un homme semblable à lui-même
216 Mais ne voit pas sa tête quand il le regarde, ■ ■
De tels signes annoncent la mort dans un mois.
217 Celui qui voit dans le ciel ce qui ressemble à un homme, 217
Et ne voit pas sa tête quand il regarde,
218 Celui qui ne sent pas l'odeur d'huile quand il éteint la lampe,
Mais perçoit soudain une odeur de mort,
219 Celui qui ne voit pas de lumière en se mettant le doigt dans l'œil, 219
Et dont le front paraît immense au toucher de la main,
220 II est assuré de mourir dans six mois
Celui qui reconnaît tous ces signes.
221 Celui qui voit des éclairs sans qu'il y ait des nuages,
Qui voit sans cesse canards, corbeaux, paons et serpents,
222 Celui qui, de nuit, voit un arc-en-ciel,
Qui a les dents qui grincent quand il est en colère,
223 Par tous ces signes, sa mort annoncée dans un mois. 223
Celui qui a froid le jour et n'a que peu froid la nuit,
224 Celui dont le corps est à moitié chaud et à moitié froid,
Sache que c'est mauvais quand il en est ainsi.
225 Celui qui ne voit son reflet ni dans l'eau ni dans un miroir,
Qui rêve d'un paon lorsqu'il dort,
226 Celui dont les pieds et les mains sèchent vite après le bain, 226
Celui dont le cœur bat très fort jour et nuit,
210 Le premier vers est identique dans le Mn-cetan, mais le deuxième est différent. Il est impossible
de dégager une idée claire de cette partie du texte.
210b Haq traduit : « If the palate of anybody dries up, when he does not look at the constellation of the
seven stars ».
211 Haq n ' a pas ce distique .
Selon la conception hindoue, les ancêtres morts prennent le chemin de la lune.
213 La chute des comètes se retrouve dans le Mn-cetan (p. 46).
Haq traduit ainsi le deuxième vers du distique : « If a man unexpectedly falls giddily on other's body ».
215 Inversement, la Šiva-samhitá écrit : « Celui qui voit tous les jours son ombre dans le ciel, verra
croître le nombre de ses années et ne mourra jamais d'une mort accidentelle. » (V, 17).
217 Ce distique est une répétition de 215b et 216 qui ne figure pas dans la traduction de Haq.
219 À partir de ce distique, la traduction de Haq diffère. Même si les « signes » sont communs, ils ne
sont pas considérés comme annonçant la mort pour une même période de temps.
223 Le deuxième vers du distique se retrouve peu ou prou semblable dans le Mn-cetan (p. 46), et la
mort s'y situe aussi dans un délai d'un mois.
226 Pour l'auteur du Mn-cetan (p. 46), c'est l'ombilic qui tremble.
92 France Bhattacharya
239-242 Le mot khecâl (239b), comme khâchâl, est un équivalent de mandir, « temple », voulant dire ce
qui est au plus profond de soi, selon le Professeur Ahmed Sharif. Ce mot ne se trouve dans aucun
dictionnaire ! Ces vers renvoient à une tradition du Prophète : « The sharïa are my words, the tarîqa are
my actions and the haqîqa is my interior states » (Schimmel 1975 : 99). On note que marifa ne figure pas.
Ils ressemblent aux distiques qui, dans la traduction de Haq, se trouvent après le distique 123 de ma
propre traduction, basée sur le texte de Sharif. Ces distiques sont beaucoup mieux à leur place là où les
met la traduction de Haq, c'est-à-dire dans la section intitulée «Les stations et la pratique» (101 et
suiv.). La formulation de Sharif est moins claire. Au vers 241b, nisthà est traduit par « dévotion » et hàl
par « état » ; au vers 242, j'ai traduit bhed par « dévoilement ».
La traduction de Haq s'arrête pour ce qui est des couleurs à mon distique 239. Par contre, on y trouve, à
la fin du texte, une conclusion très bien venue, et qui manque au texte de Sharif :
« Leaving wisdom think over Nirafljan in meditation, and
In the quay of Tribenï drink nectar-like water.
To him in whose heart Murshid or Pïr has not a place,
Thakur (i.e. God) does not reveal Himself.
Father is responsible for birth and mother for milk.
Sayyid Martuzâ says, - This is the clue to human birth. »
Si l'on retient cette leçon, on note la présence du colophon avec le nom du poète.
Un texte du Bengale médiéval 93
appelée «La méditation et les postures», aux distiques 151, 152 et 153, il est bien
question de ce cakra où se rejoignent « les trois conduits subtils » que les yogis hindous
appellent idâ, piûgalà et susumnà. Au lieu de donner à cet endroit le nom de àjnâ cakra,
le Kalandar l'appelle « le ghât de Tripinï », ce qui est l'expression utilisée aussi dans le
JMn-Pradîp de Saiyad Sultan (p. 622) et dans les chants bâuls du Fakir Lâlan Šáh (voir
Bhattacharya 2000, et les notes correspondant aux distiques dans le présent article). À
chaque cakra, hindou comme bouddhique, sont attribuées une divinité et une couleur.
Dans chaque maqàm a été placé un ange et une couleur a été indiquée. Les couleurs ne
correspondent pas. Voir infra le tableau des latïfa.
Le Yoga-Kalandar mentionne des lampes, des lumières, une clarté, etc., dont la vision
marque les étapes sur la voie que suit le Soufi dès la première station. À la seconde, c'est
une couleur verte que voit l'aspirant. À la troisième, c'est le Soi qui apparaît, très brillant.
La station làhut est créditée de la vision d'une clarté plus brillante qu'une lampe de cristal.
Dans cette première partie, le mot laufa (pi. la ta 'if) n'est pas employé. Les latïfa sont des
« substances subtiles » ou des « centres subtils » (Buehler 1998 : 103). Par contre, dans la
partie intitulée « La méditation et les postures », le terme figure au vers 167b. Le thème
n'est toutefois pas développé de façon systématique. Dans le soufisme le nombre des
latïfa varie suivant les confréries et les auteurs, mais le plus souvent ce nombre est sept
(Buehler 1998 : 105). Des correspondances ont été établies par les maîtres avec des
locations dans le corps humain, des couleurs et des prophètes.
Selon la mystique kubrâwï simnânï, d'après le terme utilisé par Schimmel (1975 : 379)
et Corbin (1971 : 20), on peut présenter les choses dans le tableau suivant :
Conclusion
Le Yoga-Kalandar semble bien avoir pris pour base de son schéma les quatre stades,
manzil, que sont sarî'a, tarîqa, haqîqa et ma'rifa. Il les a fait correspondre aux quatre
stations, mokàm (maqâmât) : nâsut, malakut, jabarut et lâhut. Ce nombre quatre appelait
aussi les quatre éléments constitutifs du monde créé : la terre, l'eau, le feu et le vent. Il
n'est pas non plus impossible que ce soit à partir de ces quatre éléments qu'ait débuté la
quête des correspondances pour notre texte. La question reste ouverte, mais dans la
mesure où le Kalandar cherche à organiser ses matériaux de façon à leur donner un cadre
« islamique », les stations et les stades paraissent essentiels à son propos. Le nombre
quatre ne permettait pas l'évocation des prophètes mais convenait aux quatre anges
principaux. Les couleurs ne sont pas mentionnées très clairement. Ce schéma à quatre
cases ne pouvait pas inclure les six cakra plus un, l'auteur a donc fait un choix :
mulàdhâr, manipur, un cakra non nommé qui correspond au svàdhisthân, et enfin anâhat,
ce qui n'est pas très satisfaisant. En effet, il est obligé de placer « le réservoir de nectar »,
qui se trouve, selon les Nâths, au sahasrâr, au sommet de la tête, au cakra non nommé de
la station jabarut. Saiyad Sultan dans son Jnân-Pradîp prend en compte tous les cakra
avec leur nom sanskrit, en même temps qu'il mentionne les mokám et les manzil.
96 France Bhattacharya
Pour les Soufis en général, les maqàmàt sont plus nombreux que dans le Yoga-
Kalandar et marquent l'acquisition de qualités morales parmi lesquelles se trouvent la
repentance, l'abstinence et le renoncement. On retrouve des préoccupations de ce type
dans notre texte dans la partie intitulée « Les stations et la pratique », lorsqu'il est
question des différents stades. Toutefois, quand il s'agit des stations, maqàmàt, l'accent
est mis plutôt sur l'acquisition de ce que le yoga appelle les siddhi, « pouvoirs », par
exemple la santé du corps, l'immortalité et la connaissance de l'avenir (voir distiques 12,
16, 23...). Ce qui intéresse le Kalandar, c'est la pratique qui permet leur obtention:
contrôle du souffle, postures, contractions des muscles, fixation du regard. À ces
techniques yogiques le texte donne un habillage et un cadre acceptables à l'islam soufi.
L'importance accordée au corps physique est frappante. En témoignent, parmi d'autres
éléments, la place accordée à sa formation dans l'utérus, sa conservation et les signes
annonçant sa fin. Les conduits subtils, nàdï, leur jonction à Tripinï, le nectar qui s'y
déverse et bien des caractéristiques de chaque station sont pour une large part des
emprunts au discours nàth qui a influencé les écrits soufis du sous-continent à la période
médiévale (Digby 1975).
En comparant les notions fournies par le Yoga-Kalcmdar aux différents tableaux de
correspondance des Soufis appartenant aux grandes confréries, il apparaît clairement
qu'avec le passage du temps les deux points de vue sur le cheminement mystique, celui
des yogis et celui des Soufis, se sont beaucoup éloignés dans leur formulation. C'est
pourquoi le texte du Yoga-Kalandar qui présente, plus qu'un rapprochement, une tentative
de fusion des deux courants spirituels sous une forme didactique et en langue vernaculaire
ne manque pas d'intérêt, surtout si on le compare au Jnàn-Pradïp de Saiyad Sultan qui
présente un manuel complet des techniques yogiques à l'usage de ses disciples. Dans une
première partie, Saiyad Sultan expose, lui aussi, les stations et les stades, mais très
brièvement, comme si ces choses étant connues il n'était pas nécessaire d'y revenir. Il
énonce ce qu'il appelle ebàdat, les prières et dévotions requises à chacune de ces étapes
sur la voie et, comme le Yoga-Kalandar, il donne à la divinité suprême le nom de
Niranjan, plutôt qu'Allah. Dans une seconde partie, il insiste beaucoup sur « la science du
corps » : les signes de la grossesse, la formation de l'embryon dans l'utérus, la
détermination de son sexe et les caractéristiques morales des enfants selon le jour et
l'heure de leur conception. Dans une dernière partie, il entre dans beaucoup plus de détails
que le Yoga-Kalandar sur les conduits subtils, les postures, les « portes », les souffles. Il
introduit les mudrà, ou « sceaux », les bandhà ou ligatures, les basti ou lavages et les
méditations sur la syllabe Aum. En bref, il semble parfois traduire la Hatha-yoga-
pradîpikà ou la Siva-samhità sans d'autre changement que l'introduction du procédé
habituel des questions posées par Ali au Prophète et la mention de Šáh Hosen, son maître,
auquel il est redevable de son savoir !
Le Yoga-Kalandar permet de voir le chemin parcouru vers une meilleure
appropriation du yoga par le soufisme populaire. Saiyad Sultan juxtapose tandis que le
Kalandar s'efforce d'intégrer. Le premier prend soin de ne rien laisser de côté de cette
science qu'est le yoga afin de la transmettre dans sa totalité à ses disciples avec tout son
vocabulaire technique sanskrit, tandis que le second essaie d'en garder seulement ce qu'il
estime compatible avec le modèle soufi. On pourrait penser que le Yoga-Kalandar est
quelque peu postérieur au Jnàn-Pradïp et qu'il s'adressait à un public plus populaire,
éventuellement composé de convertis villageois simplement désireux de profiter d'un
savoir ancien qui avait la réputation de soigner les corps et de donner des pouvoirs.
Comme pour le JMn-Pradip, l'écoute, ou la lecture, du Yoga-Kalandar ne constituait
qu'une partie de l'enseignement et le maître dispensait le reste oralement comme l'indique
Un texte du Bengale médiéval 97
le vers 90b, par exemple : « Écoute cela de la bouche du gourou et comprend ce qu'ils (les
quatre corps) sont ». Le texte n'en dit pas plus sur le sujet.
Il aurait fallu s'arrêter sur le problème de la traduction d'un vocabulaire technique à
un autre, du sanskrit bengalisé à un arabo-persan en passe de l'être. Les auteurs de ces
textes y furent confrontés. Une part importante de leur travail fut de trouver des
équivalences bengalis, aussi « neutres » que possible d'un point de vue religieux, pour des
mots arabes chargés, eux aussi, de sens depuis le Coran, les Hadis et la longue histoire du
soufisme. Cette question n'a pas pu être abordée dans cet article.
Au Bengale, région qui a vu sa population musulmane croître jusqu'à devenir
majoritaire, l'islamisation des discours et des pratiques s'est poursuivie, surtout à partir du
dix-neuvième siècle et tout au long du vingtième. On relève déjà dans la version en
écriture arabe du Yoga-Kalandar traduite par Haq des notions et un vocabulaire plus
« islamiques » que dans celle, en écriture bengali, éditée par Sharif. Je donnerai deux
exemples : la mention des différents « cœurs », dil, au distique 143, ainsi que
l'emplacement des centres (distique 69 et sa note). L'influence des réformateurs et la
dissémination des connaissances théologiques ont contribué à rejeter des textes tels que le
Yoga-Kalandar dans les marges de la société où se retrouvent des hétéropraxes, tels que
les fakirs et les Bâuls. Ils marquent toutefois une étape importance dans l'histoire
religieuse du sous-continent indien.
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