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INTRODUCTION GENERALE

Les écoulements pariétaux avec injection de fluide (figure 1) ont fait l'objet de
nombreux travaux théoriques et expérimentaux. Les résultats de ces études ont permis
d'importantes améliorations de systèmes industriels notamment dans les domaines
aéronautiques et aérospatiaux. Le principal domaine d'application est la protection thermique
des parois soumises à de fortes contraintes thermiques. Un exemple de retombée directe
concerne les moteurs à flux continus (turbines à gaz, turboréacteurs, moteurs de lanceurs...) où
l'optimisation des performances nécessite une température des gaz en écoulement de plus en
plus élevée. Pour illustrer ce propos, l'exemple du rendement thermique d'une turbine à gaz,
en fonction de la température des gaz en sortie de chambre de combustion, est donné en
annexe I.

Ecoulement principal

Ecoulement secondaire

Fig. 1. Ecoulement pariétal avec injection de fluide.

Ces dernières années ont vu le développement de la protection thermique des aubes de


turbines des moteurs d'avions. En effet, malgré les importants progrès réalisés dans le
domaine de la métallurgie, la température admissible par les matériaux constituant les aubes
ne dépasse pas 1100 °C alors que les températures des gaz en entrée de turbine dépassent
1500 °C dans les moteurs récents (Petot 1997). Les constructeurs de moteurs ont alors
développé des systèmes de refroidissement par convection interne et refroidissement "par
film" pour garantir l'intégrité des matériaux (figure 2). Cependant, ce type de protection
nécessite une prise d'air en amont de la chambre de combustion (donc "gaspillé" d'un point de
vue énergétique) de 8 à 10 % du débit total dans un réacteur d'avion actuel (Greffoz 1997).
Une autre importante application de l'injection de masse dans un écoulement pariétal
chaud est la protection thermique par ablation c'est à dire la sublimation d'un revêtement
protecteur. Dans les propulseurs à propergol solide, tels ceux d'Ariane V, H2 (Japon), la
Navette Spatiale et Titan IV (USA), les gaz issus de la combustion sont portés à environ

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3500 K (Lengellé et al. 1997). Les surfaces de la structure du propulseur, qui ne sont pas
recouvertes de propergol, sont alors exposées à ces produits de combustion et les concepteurs
ont recours à la pose de matériaux de protection qui se subliment sous l’effet de l’écoulement.
Sur les sondes spatiales, la protection thermique vis à vis des agressions extérieures peut
également être assurée par ablation. Une étude de Green et Davy (1981), sur un prototype de
sonde “Galileo”, a montré la nécessité de poser 126 kg de matériau protecteur (pour un poids
de la sonde de 3 10 kg) pour résister aux contraintes induites par l’entrée dans l’atmosphère de
Jupiter.

Température entnie
2200 turfrhe T(K)

2000
_
1800

1600 forcée et films

-1400
Aube à cavités

200
Aube non refroidie

000
Moteurs en sewice
1960 1970 1980 1990 2000 2010

Fig. 2 Evolution des technologies de refroidissement (Petot 1997).

Une autre possibilité de protection thermique des parois est l’effusion. Il s’agit de
llmJection d’un fluide frais à travers une matrice poreuse. Ce procédé, s’il peut engendrer des
contraintes dues à une moindre tenue mécanique et aux risques d’encrassement des milieux
poreux, semble prometteur quant aux performances thermiques. En effet, l’injection de fluide
frais combine le refroidissement par convection interne à la paroi poreuse et la réduction du
flux thermique convectif incident du fait de l’épaississement des couches limites pariétales
(figure 3). De plus, l’emploi de matériaux poreux peut permettre de réduire la masse
embarquée par allégement des parois. Une application de ce procédé est la protection
thermique des chambres de combustion ou des tuyères de moteurs à flux continus mais peut
également être envisagée dans d’autres domaines : séchage et aérodynamique. Dans ce dernier

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domaine, une part importante des efforts de recherche est employée à la réduction des traînées
autours de profils d'ailes et une injection de masse peut contribuer à réduire les forces de
frottement qui les engendrent.
Il semble, selon Grootenhuis (1959), que la première expérimentation de l'effusion
date de 1930. Elle concerne la protection d'une paroi poreuse en céramique soumise à un flux
de chaleur dégagé par la combustion d'un mélange de pétrole et d'oxygène. Le réfrigérant
utilisé est de l'oxygène et l'expérience, qui a duré 11 secondes, semble avoir prouvé la
faisabilité du refroidissement par effusion. Un premier brevet incluant ce mode de
refroidissement date de 1938. Cependant, c'est avec l'accélération des recherches en
aéronautique, après la seconde guerre mondiale, que les travaux portant sur la protection
thermique par effusion se sont développés. Ils concernent essentiellement les transferts de
chaleur au sein de matériaux poreux chauffés (Grootenhuis 1951) et les transferts en couches
limites soumises à de l'injection (Mickley et al. 1954). Cette séparation en deux aspects de
l'étude de l'effusion semble s'être longtemps prolongée avec, d'une part, des travaux sur les
matrices poreuses (Koh et al. 1973, Kar 1980, Yamamoto 1990) et, d'autre part, des études sur
les couches limites (Moffat et Kays 1968, Simpson 1970, Baker et Launder 1974a, Silva
Freire et al. 1995).

ECOULEMENT TURBULENT CHAUD

COUCHE LIMITE

CONVECTION + transferts de : masse,


SORTIE DU FLUIDE FRAIS
RAYONNEMENT quantité de mouvement
et chaleur

CONDUCTION + CONVECTION

PAROI PAROI
IMPERMEABLE POREUSE
ENTREE DU FLUIDE FRAIS CONVECTION +
RAYONNEMENT

Fig. 3 Schéma de principe de l'effusion.

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Au sein de l'Equipe Energétique et Thermique du Centre de Thermique de Lyon ont
débuté, au début des années 1990, des études portant sur l'expérimentation et la modélisation
de ce procédé. Andoh (1992) s'est principalement attaché à décrire les transferts de masse et
de chaleur au sein des milieux poreux. Il a ensuite couplé son modèle avec une modélisation
simplifiée des couches limites laminaires. Campolina França (1996), a étudié l'effet de
l'injection de masse sur la couche limite pariétale laminaire puis turbulente mais, dans son
étude, le fluide frais provient d'un milieu poreux considéré comme un milieu unique
équivalent donc sans transfert de chaleur interne.
Le présent travail, de nature numérique et expérimentale, traite de l'effusion dans le
cadre du régime turbulent de l'écoulement pariétal. Il a pour objectif d'aboutir à une
modélisation complète des écoulements et des transferts thermiques couplés, tant dans la
couche limite pariétale qu'à l'intérieur de parois poreuses, dans le cas d'une géométrie plane
et d'un écoulement bidimensionnel. L’utilisation d’une soufflerie subsonique à température
moyenne (300 °C) permet une approche expérimentale du problème et une confrontation des
résultats de la modélisation avec l'expérience.

Du fait de la diversité des phénomènes physiques étudiés, ce mémoire est présenté de


façon thématique.
Dans le premier chapitre, les différentes possibilités de modélisation de la turbulence
sont présentées. Les moyens expérimentaux et numériques que nous avons retenus sont
ensuite détaillés. Enfin, les résultats expérimentaux obtenus avec la soufflerie thermique, dans
le cas où il n'y a pas d'effusion, sont comparés aux résultats numériques.
Le second chapitre traite d'une nouvelle approche pour modéliser les couches limites
turbulentes dynamique et thermique soumises à l'effusion d'un gaz frais. La confrontation des
résultats numériques avec nos propres expériences et ceux issus de la bibliographie est ensuite
effectuée.
La troisième partie porte sur le couplage entre les transferts au voisinage et à l’intérieur
de matériaux poreux. Expérimentalement, des températures de la phase solide d'une plaque
poreuse sont mesurées dans diverses configurations. A l'aide, d'une part, d'un modèle des
transferts thermiques internes à la paroi et, d'autre part, du modèle de transferts en couches
limites (avec addition du rayonnement incident sur la plaque), les températures de parois sont
calculées et, par comparaisons avec les mesures, les coefficients d'échanges internes sont
quantifiés.

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Enfin, dans le dernier chapitre, une optimisation du système de protection thermique
est proposée. Pour cela, les recherches portent sur la transpiration d'un liquide. Le phénomène
de mouillabilité est, tout d'abord, analysé. L'étude expérimentale met en évidence une
amélioration de la protection. La quantité de chaleur absorbée par évaporation est ensuite
déterminée à partir des mesures de concentrations de vapeur de réfrigérant dans la couche
limite pariétale. Ce calcul de chaleur absorbée par changement de phase est ensuite confronté
à des calculs théoriques de flux incidents et à des résultats de simulations numériques des
transferts en couches limites turbulentes.

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