PÉLAGIQUES
Des poissons, des saisons…
Sardine, anchois et thon représentent des espèces importantes
pour les pêcheurs du golfe de Gascogne.
Les saisons en cours s’affichent avec des teintes différentes selon les espèces.
Sardine :
la production n’est pas à la hauteur des
années précédentes. »
Une centaine de navires traquent le péla-
gique dans le golfe de Gascogne, dont une
vingtaine de chalutiers et une trentaine de
bolincheurs. La saison a débuté pour les
dine commune (Sardina pilchardus). En
2017, elle a pesé 17 000 tonnes, ce qui en
aussi congelée.
En France, entre janvier et juillet 2017, les 0,92
(- 4 %)
€/kg
bolincheurs finistériens fin juin, où on les
avait vus débarquer leurs captures à Lorient
fait le second poisson en tonnages sur le premières ventes de sardine avaient atteint Keroman. Ils traquent la sardine au large de
carreau des criées.
En Atlantique, deux stocks sont exploi-
tés. Le stock septentrional revient surtout
8,65 millions d’euros pour 8 876 tonnes
(+ 21 % en valeur et + 13 % en volumes
par rapport à janvier-juillet 2016). Au cours
Anchois :
(- 52 %)
1 €/kg
Groix et de Belle-Île et apprécient de débar-
quer ici en économisant temps et carbu-
rant. « Fin août, nous étions à 1 900 tonnes
à la France et à l’Espagne. Tandis que l’Es- des trois dernières années, les prix en pre- Source : FranceAgriMer et l’ensemble de la saison passée donnait
pagne et le Portugal exploitent celui du mière vente de sardine avaient varié de 2 120 tonnes, précise François Cuvilly, res-
sud. Ces stocks échappent à des Tac et quo- 0,56 à 1,39 euro/kg. Cette année, les ponsable halieutique au sein de la Sem
tas de pêche mais des mesures de gestion pêcheurs faisaient le constat d’une arrivée Lorient Keroman, entreprise gestionnaire
couvrent à la fois des aspects techniques tardive et d’une taille réduite. « La pêcherie du port. Il y a eu un bon pic en juin, puis le
et des limites sur les licences aux senneurs est compliquée et irrégulière, commente poisson est remonté plus au nord. C’est un
dans les eaux françaises pour le stock sep- Yves Foëzon, directeur de l’OP Pêcheurs métier de traque et les volumes comme les
tentrional. Des limites sur les efforts de de Bretagne. Les prix sont corrects, mais prix varient. Mais étant donné que c’est un
DR
L.F.
Douarnenez, avec 4 800 tonnes, reste le principal port de débarque pour la sardine, devant Saint-Guénolé, Lorient, La Turballe, Concarneau et Saint-Gilles-Croix-de-Vie.
métier côtier et que la demande est régu- conserveurs qui s’entendent directement Consommation lement, estime Jean-François Hug, Pdg
lière, nos six bolincheurs y vont. » sur le prix. de la société plus que centenaire. Donc
La sardine
À La Turballe, le responsable de la criée La société Chancerelle, installée à les trois quarts de ce que l’on fabrique
est au 11e rang
Max Palladin se réjouit, lui, d’une excel- Douarnenez, traite ainsi au plus vite ce des espèces de poisson en France l’est à partir de ce que l’on
lente année avec 24 % de débarquement qu’elle achète en frais auprès des bolin- frais consommées en prend sur la façade atlantique voire en
supplémentaires (1 356 tonnes) à un prix cheurs pour sortir des boîtes label Rouge. France. Méditerranée : Croatie, Tunisie… Les sar-
moyen de 0,88 euro/kg. « Cela rattrape L’innovation est impérative pour se démar- Source : Kantar
dines entières en MDD sont plutôt faites au
la perte de 30 % sur l’anchois et avec les quer et rester dans la course. Outre le Worldpanel Maroc avec des captures marocaines. » Le
très bons débarquements et prix en ger- haut de gamme, il convient de lancer de conserveur ne passe pas de contrats directs
mon (1 200 tonnes) et en thon rouge nouvelles recettes, des gammes inédites avec les pêcheurs de l’Hexaogne, mais reste
(54 tonnes), nous devrions combler le (sans arêtes et sans peau), des séries qui en permanence en contact avec eux. « Les
retard du début d’année causé par la mau- feront s’emballer les gourmets et les col- pêches sont très variables, peu régulières,
vaise météo. » lectionneurs (boîtes millésimées…). Car et notre difficulté est de s’adapter aux ton-
En Cornouaille avec Douarnenez, l’essentiel de la production est avant tout nages débarqués en même temps qu’aux
Concarneau et Saint-Guénolé, on espé- transformé au Maroc. On y traite plus prix négociés avec la grande distribution
rait une bonne fin de saison, après avoir de 850 000 tonnes par an de sardine pour nos produits finis. »
constaté des débarquements quotidiens entre Dakhla (au sud), Safi et Agadir où Fin août, le dirigeant estimait que la véri-
de 150 tonnes fin août. Les tailles étaient se concentrent les usines. Les navires en table saison commençait pour lui. « Notre
petites, mais les prix soutenus grâce au ramènent 250 tonnes par marée, d’une niveau de qualité nécessite un certain taux
marché estival du frais. espèce qui n’est pas exactement la même de matière grasse qui est atteint de juillet à
Une grande partie des volumes reste que celle exploitée dans le golfe. Son traite- novembre. Mais l’été, il y a une demande
néanmoins destinée aux conserveries. ment lui-même est différent, en particulier sur le marché du frais. » Une partie est alors
L’Hexagone n’en compte plus 300 comme la cuisson à la vapeur et non à la friture per- traitée en frais, pour le label Rouge notam-
aux plus belles heures du p’tit bleu, mais met de gagner en productivité et en main- ment, une autre est congelée au plus vite,
quelques-unes subliment encore avec d’œuvre. Mais les ventes sont colossales dans l’entreprise ou chez des prestataires.
talent le poisson argenté. Elles apprécient dans le monde entier. Chancerelle dispose Sa production totale de 150 millions de
la qualité qui résulte des efforts consentis d’une usine au Maroc, où elle produit sur- boîtes, toutes espèces et sites confon-
par les pêcheurs : la sardine est stockée à tout pour les MDD. dus, en fait le numéro un de la sardine
bord dans des cuves remplies d’eau de mer À Douarnenez, l’entreprise fabrique dans en France, avec une couverture du mar-
et de glace, puis débarquées sur le quai deux autres usines à sa marque Connétable. ché complet : du label Rouge à sa marque
dans des conteneurs réfrigérés. La vente se « Pour avoir un produit de qualité, la meil- propre, en passant par les marques de dis-
fait alors de gré à gré, entre pêcheurs et leure solution est de s’approvisionner loca- tributeur, le bio et l’export. n
Anchois :
de la ressource mais pas de marché
Malgré des signes selon les captures du Maroc, du Portugal, de
d’abondance l’Espagne et de la France. « De nombreux
facteurs entrent en jeu. Nous n’en traitons
dans le golfe de Gascogne,
plus en France. Tout est fait en Espagne ou
la saison de l’anchois au Maroc. »
est loin de satisfaire Directrice d’Olamerfish, entreprise
les producteurs qui n’ont de négoce spécialisée en poisson bleu,
pas vu le marché s’ouvrir. Frédérique Le Bourhis évoque en juillet
T
« une saison de deux semaines cette année,
alors qu’elle dure normalement jusqu’en
out a commencé par une bonne novembre. Mais les pêcheurs n’ont pas
nouvelle. Pelgas, la traditionnelle trouvé la bonne taille. Il n’y avait que du
campagne que l’Ifremer mène petit qui ne passait pas en Espagne. Pas de
chaque année avec les profession- vente, pas de prix : les navires ont changé
nels de La Turballe afin d’estimer la bio- de métier et sont passés à la sardine… Or,
masse disponible de petits pélagiques sur le moins ils sont à traquer l’anchois, plus le
plateau continental du golfe de Gascogne, poisson est difficile à trouver. Il y a de bons
dresse un constat positif en juin : le stock quotas mais l’année dernière, nous ne les
d’anchois est en très bonne santé. Déjà avions pas mangés non plus. »
estimée en 2017 à 120 000 tonnes, la res- La majeure partie de l’anchois européen
source a profité de la chaleur des eaux et de (Engraulis encrasicolus) est capturée au cha-
L.F.
l’abondance d’eau douce cette année. Et lut pélagique. Les principales flottes concer-
pourtant, « cette année s’avère très compli- nées par cette pêcherie sont situées dans le Anchois de bolincheurs sous la criée de Saint-Guénolé, achetés
quée pour l’anchois avec du poisson petit nord-est de l’Espagne et dans le sud-ouest en majeure partie par l’espagnol-catalan Ros, via le mareyeur Art Mer.
ou moyen, constate Yves Foëzon, directeur de la France. Pour les stocks de l’Atlantique
de l’OP Pêcheurs de Bretagne. Le marché, nord-est, en 2017, les Tac étaient fixés
tourné complètement vers l’Espagne, s’est à 45 500 tonnes, répartis entre la France La taille minimale chois avaient baissé tant en valeur qu’en
vite retrouvé saturé. Les Espagnols ont rem- (3 300 tonnes), l’Espagne (35 678 tonnes) de débarquement volumes : respectivement - 77 % et - 34 %
pli leurs usines avec leurs seules captures. et le Portugal (6 522 tonnes). L’anchois est est fixée à 12 cm par rapport à janvier-juillet 2016. Au cours
Une ressource sans marché, ce n’est pas généralement commercialisé en conserve en Atlantique et 9 cm des trois dernières années, les prix moyens
bon… ». Le directeur indique des prix maxi- et salé, mais également frais ou congelé. en Méditerranée. étaient d’1,63 euro/kg. Ils sont orientés à la
maux d’1 ou 1,20 euro/kg, ce qui est très En France déjà, sur la période janvier- baisse dans l’ensemble des pays qui s’inté-
bas, même s’ils varient toujours beaucoup juillet 2017, les premières ventes d’an- ressent à l’espèce. n
P etit, l’anchois n’en demeure pas moins complexe ! Entre moratoire, partage de quota,
délocalisation de la production…, l’histoire de son exploitation est mouvementée. Si l’es-
sentiel de la production de la flèche d’argent du golfe est espagnol et que sa transforma-
tion est principalement marocaine, les Vendéens demeurent attachés à l’espèce.
La Sablaise propose ainsi dans sa large gamme des marinades d’anchois déclinées au
bouquet garni, à l’ail, au piment d’Espelette… Une façon de faire perdurer les recettes de
la famille Thomazeau pour valoriser l’anchois du golfe.
Plus haut sur la côte, la conserverie Gendreau a eu l’idée de le proposer en conserve, préparé
selon les mêmes recettes que la sardine, fleuron de la maison. Débarqué en pleine saison
L’anchois dans l’atelier de La Sablaise, par les pêcheurs de Saint-Gilles-Croix-de-Vie, l’anchois est mis en boîte entier et recouvert
d’huile d’olive vierge extra.
L.F.
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team@moalia.com +34 968 141 863
Dossier ❘ PÉLAGIQUES
L.F.
et rouge mi-juillet. Ceux-ci repassent de 2,20 à 2,40 euros. » n
Depuis mai, la marque propose aussi des sardines sans peau et rise aussi sa production au naturel et en bio. Parmi ses
sans arêtes. Toujours préparées à la main, elles complètent la nouveautés, les consommateurs peuvent découvrir une sardine au tartare
série de « sans arêtes » et se déclinent à l’huile d’algues bio ou une autre au curcuma et gingembre bio… et détox !
d’olive extra-vierge, au piment, au naturel à Le curcuma, qui est censé améliorer la digestion et posséder une action
la sauce tomate et au citron. Ce nouveau anti-inflammatoire, verrait ses bienfaits boostés
concept répond aux comportements d’une par le poivre noir et le gingembre. On retrouve
partie des consommateurs qui retirent ces deux recettes dans la gamme Bonne Nature
l’arête centrale, voir la peau, avant de qui décline anchois, maquereau, thons (listao
déguster les sardines. et blanc) et autres poissons.
DR
DR
D
appartenant à la famille
McKee, de Killybegs,
ès le milieu de l’été, les ports l’un des repreneurs
bretons du Guilvinec, de irlandais de l’armement
L.F.
Douarnenez et de Lorient se féli- La Houle.
citaient d’une belle saison de
thon. Le seul port bigouden affichait, fin coup mieux que de voir le poisson plus à Apports record en ché de la conserve, l’entreprise ne pèse que
août, 340 tonnes de germon débarquées l’ouest ou en sud Irlande avec une météo 2018 à Douarnenez, quelques petits pourcents sur cette espèce.
contre 170 tonnes à la même période l’an- par forcément clémente. Dans ce cas, les le port prévoit entre « Le germon est une espèce haut de
née précédente. À Lorient, on annonçait
378 tonnes tandis qu’à Douarnenez, on
navires sont plus hésitants alors que cette
année, même les petits bateaux peu habi- 2 500 gamme. Elle représente une toute petite
partie de ce que nous produisons, précise
3 000
comptait 1 400 tonnes. Et la saison s’étale tués à cette pêcherie s’y sont mis. Les prix Jean-François Hug, Pdg de Chancerelle.
normalement jusque fin octobre… Pour les se tiennent entre 2,80 et 3 euros/kg. Et et t Néanmoins, nous achetons plus d’un tiers
professionnels, la température élevée de la saison devrait s’achever fin septembre. de germon, dont plus de la production française. Des apports
l’eau constitue l’une des explications de Mais nous sommes sur du pélagique et la de 70 % débarqués par que nous complétons parfois avec des
ces bons chiffres. donne peut changer très rapidement. Là, des navires irlandais. achats aux pêcheurs irlandais, lorsque l’es-
Les bateaux adhérents de l’OP Pêcheurs la configuration est optimum ». Seul bémol pèce remonte. Cette année, la production
de Bretagne représentent près des deux donc, la taille du poisson, un peu petite. Les est bien là, avec des quotas presque tota-
tiers des captures de thon. Elle avale envi- moins de 5 kg n’intéressent pas les conser- lement atteints fin août. »
ron 3 000 tonnes de captures sur un quota veurs, bretons ou espagnols, qui préfèrent Le conserveur fonctionne selon le même
de 5 871 tonnes, partagé avec les pêcheurs acheter au-delà de 7 kg en négociant avec schéma que pour la sardine. À savoir, un
d’Aquitaine et de Vendée. des mareyeurs ou des acheteurs spécialisés. traitement en frais pour le très qualitatif
Yves Foëzon, le directeur breton, se Le marché est avant tout espagnol (Pays (label Rouge) ou une congélation rapide
réjouit de « cette campagne très bonne, basque ou Galice). En France, le principal pour d’autres gammes de produits finis.
avec un rendement intéressant, malgré des acheteur est la conserverie Chancerelle, Ses outils de transformation travaillent
tailles réduites du poisson : 4 à 7 kg, en suivie par d’autres, plus petites, comme la ainsi à l’année. Une stratégie gagnante
grande majorité, voire plus petit fin août. Belle Îloise. Chez Chancerelle, on travaille puisque Chancerelle se porte plutôt bien
Mais les zones de pêche sont proches (à effectivement tous les thons (albacore, lis- avec 10 % du marché global de la conserve
10-12 heures de mer), ce qui est beau- tao, germon), même si, dans le grand mar- de poisson de l’Hexagone. n
L es bons chiffres qui accompagnent la saison du germon valent aussi pour son cou-
sin le thon rouge. Depuis début juillet, sa campagne est plutôt satisfaisante avec un
thon valorisé jusqu’à 13 euros/kg, avant de connaître une baisse. Les apports demeurent
toujours limités avec un quota de 10 tonnes seulement par paire de pélagiques, pour
une espèce qui doit rester uniquement accessoire et non ciblée. À la palangre par des
navires de l’île d’Yeu notamment, le prix moyen s’est établi autour de 11 euros/kg. Le
marché porte sur le frais, encore entre France et Espagne, mais est totalement décon-
necté du commerce du thon rouge de Méditerranée, car la production est marginale.
Une association Thon rouge de ligne tente de valoriser au mieux cette origine, mais son
Thon rouge débarqué par des pélagiques.
travail est difficile : pour que le sigle remonte jusqu’aux consommateurs, il faudrait que
L.F.
L’excellente qualité
n’est pas une fin en soi,
mais une condition
pour nous.
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