UN COFFRE D’OUTILS
...
1 4 9 16
...
1 3 6 10
T1 = 1 ,
T2 = 1 + 2 = T1 + 2 ,
T3 = 1 + 2 + 3 = T2 + 3 ,
..
.
Tn = 1 + 2 + · · · + n = Tn−1 + n .
n(n + 1)
Tn = .
2
La figure suivante en fournit une preuve visuelle (Tn correspond à la moitié des points
formant un rectangle de côtés n et n + 1).
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 7
...
1 5 12
n(3n − 1)
On peut vérifier que le ne nombre pentagonal est donné par .
2
Le procédé peut être poursuivi ; on obtiendra ainsi des nombres hexagonaux, hepta-
gonaux, octogonaux, etc. On peut aussi passer à 3 dimensions : on parlera alors de
nombres cubiques, pyramidaux, etc.
L’usage a consacré l’expression carré parfait pour désigner un entier qui est le carré
d’un entier, comme on vient de le voir ; cette expression vise à insister sur le fait
√ que
même si un nombre comme 5 pourrait être vu comme un carré (à savoir de 5), ce
n’est pas vraiment ce qu’on a à l’esprit lorsqu’on parle d’un entier qui est un carré. De
la même façon, on a la notion de cube parfait.
2. Divisibilité.
On dit qu’un entier b est divisible par un entier a = 0 s’il existe un entier x tel que
b = ax, auquel cas on écrit a | b. Dans le cas contraire, on écrit a | b. Si a | b, on dit
aussi que a est un diviseur ou un facteur de b, que a divise b ou encore que b est un
multiple de a. Dans le cas où a | b et a = b, on dit que a est un diviseur propre de b. Il
est à noter que pour tout entier non nul a, on a, par définition même, a | 0.
Exemple:
120 possède 16 diviseurs : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 10, 12, 15, 20, 24, 30, 40, 60, 120.
Les principales propriétés de la relation de divisibilité sont les suivantes ; elles découlent
immédiatement de la définition.
(i) 1 | x et x | x, quel que soit l’entier x ;
(ii) a | b et b | c ⇒ a | c ;
(iii) a | b ⇒ a | bx, quel que soit l’entier x ;
(iv) a | b et a | c ⇒ a | (b ± c) ;
8 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
(v) a | b et a | (b ± c) ⇒ a | c ;
(vi) a | b et b | a ⇒ a = ±b ;
(vii) a | b et b = 0 ⇒ |a| ≤ |b|.
Démonstration:
Nous démontrons la propriété (vi). Comme a | b, il existe un entier u tel que b = au. De
même, puisque b | a, il existe un entier v tel que a = bv. Mais alors a = bv = (au)v = a(uv),
d’où il suit que uv = 1. Mais les seuls cas possibles de produits d’entiers donnant 1 sont 1 × 1
et −1 × −1. On a donc v = ±1, c’est-à-dire a = ±b.
On écrit ai b pour signifier que ai | b mais que ai+1 | b. Lorsque ai b, i est donc
l’exposant de la plus grande puissance de a divisant b.
Un nombre pair est un multiple de 2 ; il est donc de la forme 2k pour un certain entier
k. Les nombres impairs sont de la forme 2k + 1.
Exemples:
(a) impair + impair = pair ; impair × impair = impair .
Calculons : (2j + 1) + (2k + 1) = 2j + 2k + 2 = 2(j + k + 1) et (2j + 1) × (2k + 1) =
4jk + 2j + 2k + 1 = 2(2jk + j + k) + 1.
(b) Montrer que n2 est pair si et seulement si n est pair. De même en remplaçant le mot
“pair” par “impair”.
Cela découle du fait que pair × pair = pair et que impair × impair = impair .
(c) Montrer que la différence entre des carrés parfaits successifs est un nombre impair.
(n + 1)2 = n2 + (2n + 1). La figure ci-dessous illustre le cas n = 4. On remarquera que
le nombre impair qui constitue la différence croı̂t avec n.
3. La division euclidienne.
Le résultat suivant joue un rôle fondamental en théorie des nombres ; il nous dit com-
ment diviser dans ZZ.
Soit a et b deux entiers, a > 0 ; alors il existe des entiers q (le quotient) et r (le reste),
tous deux uniques, tels que b = qa + r, où 0 ≤ r < a ; de plus, si a | b, alors 0 < r < a.
Exemples:
(a) a = 3 et b = 14 ; alors 14 = 4 × 3 + 2.
(b) a = 3 et b = −14 ; alors −14 = −5 × 3 + 1.
La division par 2 donne deux restes possibles : 0 ou 1. Les entiers sont donc de la
forme 2k (les pairs) ou 2k + 1 (les impairs). De même, en divisant par 3, on voit que
les entiers sont soit de la forme 3k, soit 3k + 1, soit 3k + 2.
Exemple:
Montrer qu’à l’exception de 2 et de 3, tout nombre premier est voisin d’un multiple de 6.
Répartissons les naturels en six catégories, selon leur reste dans la division par 6 ; ils sont
donc de l’une des formes suivantes :
6k, 6k + 1, 6k + 2, 6k + 3, 6k + 4, 6k + 5.
Mais remarquons que 6k + 2 et 6k + 4 sont forcément divisibles par 2, que 6k + 3 est divisible
par 3 et bien sûr que 6k est divisible par 6. Les seules catégories qui ne sont pas éliminées
a priori sont 6k + 1 et 6k + 5. Et on peut réécrire 6k + 5 comme 6(k + 1) − 1. Ceci montre
donc que tout premier, sauf 2 et 3, est de la forme 6j ± 1 où j ∈ IN∗ .
Par exemple, 29 = 6 · 5 − 1 et 31 = 6 · 5 + 1.
4. Le plus grand commun diviseur de deux entiers.
Soit a et b deux entiers différents de zéro. Le plus grand commun diviseur (pgcd) de
a et b est l’unique entier positif g qui divise à la fois a et b et qui est tel que si c | a et
c | b, alors c ≤ g. On le désigne par le symbole pgcd(a, b), ou tout simplement — si le
contexte ne porte pas à confusion avec la notion de couple — par (a, b).
Exemples:
(9, 24) = 3, (9, −18) = 9, (9, 14) = 1 .
Voici quelques propriétés du pgcd de deux nombres.
(i) Si c | a et c | b, alors c | (a, b) ;
(ii) (a, b) = (b, a) ;
(iii) pour chaque entier positif m, on a (ma, mb) = m(a, b) ;
a b
(iv) si g = (a, b), alors ,
g g
= 1;
(v) (a, b + ma) = (a, b), pour m ∈ ZZ.
10 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
Démonstration:
Nous démontrons la propriété (v). Posons d = (a, b) et g = (a, b + ma). Puisque d | a et d | b,
alors d | (b + ma). Mais alors d | g est une conséquence de d | a et de d | (b + ma). Par ailleurs,
g | a et g | (b + ma) impliquent que g | a et g | b, donc g | d. Comme d | g et g | d et que d et
g sont positifs, on conclut que d = g.
Puisque 1 | a et 1 | b, on a toujours (a, b) ≥ 1. On dit de deux entiers a et b qu’ils
sont relativement premiers lorsque (a, b) = 1. Par exemple, 9 et 14 sont relativement
premiers.
(vi) (a, a + 1) = 1 ;
(vii) si (a, b) = 1 et a | bc, alors a | c ;
(viii) si (a, b) = 1 et (a, c) = 1, alors (a, bc) = 1.
Démonstration:
Nous démontrons la propriété (vi). Soit d est un diviseur commun de a et a + 1. Comme
a = dk pour un certain k, le multiple suivant de d est d(k + 1) = a + d ; mais ce multiple ne
peut coı̈ncider avec a + 1 que si d = 1. (Les propriétés (vii) et (viii) peuvent se démontrer en
considérant les factorisations premières des nombres en cause.)
5. L’algorithme d’Euclide.
Conjuguons la propriété (v) de la section qui précède avec la relation de division eu-
clidienne : si r est le reste de la division de u par v, c’est-à-dire si u = qv + r, on a
alors
(u, v) = (v, r) .
Appliquant cette égalité à répétition, on obtient ainsi une méthode commode de calcul
d’un pgcd : l’algorithme d’Euclide.
Exemple:
Voici comment trouver (867, 748).
Il s’ensuit que (867, 748) = (748, 119) = (119, 34) = (34, 17) = (17, 0) = 17.
Ces mêmes calculs nous permettent de voir que le pgcd de a et b peut toujours s’écrire
sous la forme
(a, b) = xa + yb
pour des entiers x et y convenablement choisis.
Exemple:
Reprenons le calcul précédent, mais en le parcourant de bas en haut.
17 = 119 − 3 · 34
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 11
L’algorithme d’Euclide peut s’appliquer à des entiers exprimés sous une forme générale.
Exemple:
21k + 4
Montrer que pour tout entier k, la fraction est irréductible.
14k + 3
Nous utilisons l’algorithme d’Euclide pour montrer que le numérateur et le dénominateur
sont relativement premiers.
Mais pour être plus précis, il faudrait peut-être écrire (8243)dix afin de signifier qu’il
s’agit bien d’un symbole numérique interprété dans le système décimal : notre base
usuelle de numération est la base dix (comme dans dix doigts !).
Exemple:
Trouver un nombre dont l’écriture dans le système décimal comporte six chiffres et tel qu’en
12 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
intervertissant (en bloc) les trois premiers chiffres avec les trois derniers, on se trouve à le
multiplier par un facteur de 6.
Posons n = 1000x+y, où x et y sont des nombres à trois chiffres. La manipulation décrite dans
la donnée revient à introduire le nombre 1000y + x. Par hypothèse, 1000y + x = 6(1000x + y),
de sorte que 5999x = 994y. Simplifiant par 7 = (5999, 994) (calculé par exemple à l’aide de
l’algorithme d’Euclide), on obtient 857x = 142y. On a donc 857 | 142y ; mais puisque 857
et 142 sont relativement premiers, il s’ensuit que 857 | y. Mais n’oublions pas que y est un
nombre à trois chiffres, ce qui entraı̂ne que y = 857. On en tire que x = 142, de sorte que
n = 142 857.
Revenons au nombre (8243)dix ; comment ce même nombre se représente-t-il dans
d’autres bases, par exemple en base deux (numération binaire) ? Il s’agit de trouver
une expression analogue à (∗) mais dans laquelle interviennent des puissances de 2. Il
y a plusieurs façons de procéder ; en voici une.
On cherche d’abord la plus grande puissance de 2 n’excédant pas 8243. Comme 8192 =
213 , on a donc 8243 = 213 + 51. On fait de même avec 51, et ainsi de suite. On obtient
alors successivement
8243 = 213 + 51
= 213 + 25 + 19
= 213 + 25 + 24 + 3
= 213 + 25 + 24 + 21 + 20
= (10000000110011)deux .
De manière générale, étant donné un entier b ≥ 2 (la base de numération), tout nombre
entier positif n peut s’écrire de manière unique sous la forme
n = ak bk + ak−1 bk−1 + · · · + a2 b2 + a1 b + a0 ,
où les ai sont des naturels satisfaisant à 0 ≤ ai < b. Les chiffres ai forment ce qu’on
appelle le développement de n en base b, que l’on écrit habituellement sous la forme
n = (ak ak−1 . . . a2 a1 a0 )b .
Lorsque b > 10, on doit introduire de nouveaux chiffres pour représenter les nombres
“dix”, “onze”, etc. En base douze, par exemple, on pourra prendre A pour dix et B
pour onze.
Exemples:
Voici le développement de quarante-sept dans diverses bases :
(47)dix , (101111)deux , (1202)trois , (233)quatre , (142)cinq , (57)huit , (3B)douze .
Les méthodes de calcul familières en numération décimale se transposent facilement
aux bases autres que dix. Mais certaines pratiques doivent cependant être revues.
Exemples:
(a) Voici une multiplication par trois en base trois :
1222 × 10 = 12220.
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 13
où chaque ai est un naturel tel que 0 ≤ ai < b. Le développement de r s’écrit habituel-
lement sous la forme suivante, à l’aide d’une virgule :
Exemples:
(a) En base dix,
4 38= 4,3750000 . . . = 4,375;
1
11 = 0,09090909 . . . = 0,09;
√
2 = 1,4142135623730950488016887 . . . .
1
(b) Voici le développement de la fraction 4 dix dans diverses bases :
(0,01)deux , (0,02)trois , (0,1)quatre , (0,1)cinq , (0,13)six ,
(0,15)sept , (0,2)huit , (0,2)neuf , (0,25)dix , (0,28)onze .
Pour que cette méthode de représentation des réels produise un développement unique
pour chaque réel r, il faut exiger qu’il n’y ait pas d’entier m tel que ak = b − 1 pour
tout k < m. Sinon, on aurait, par exemple en base dix, 1 = 0,9 ; en effet,
1
0,99999 . . . = 9 × 0,11111 . . . = 9 × = 1.
9
2, 3, 5, 7, 11, 13, 17, 19, 23, 29, 31, 37, 41, 43, 47, 53, 59, 61, 67,
71, 73, 79, 83, 89, 97, 101, 103, 107, 109, 113, 127, 131, 137, 139,
149, 151, 157, 163, 167, 173, 179, 181, 191, 193, 197, 199.
14 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
Exemple:
Montrer que pour tout premier p > 2, 24 | (p3 − p).
On a que p3 − p = (p − 1)p(p + 1). Comme p est impair, p − 1 et p + 1 sont donc deux pairs
consécutifs, l’un d’eux étant un multiple de 4. Par ailleurs, l’un des trois nombres p − 1, p ou
p + 1 est un multiple de 3. Il s’ensuit donc que (p − 1)p(p + 1) est divisible à la fois par 8 et
par 3.
La propriété fondamentale des nombres premiers est la suivante :
Si p est premier et si p | ab, alors p | a ou p | b.
Autrement dit, lorsqu’un nombre premier est “contenu” (multiplicativement parlant)
dans un produit de deux facteurs, il est tout entier dans l’un des facteurs. Cela n’est
pas vrai d’un nombre composé : par exemple, 12 | 6 · 8, mais 12 | 6 et 12 | 8.
On tire comme conséquences de cette propriété des premiers que
– si un nombre premier divise le produit de plusieurs nombres, alors il divise au moins
l’un de ces nombres ;
– si un nombre premier divise le produit de plusieurs nombres premiers, alors il est
l’un de ces nombres premiers.
10. Le théorème fondamental de l’arithmétique.
Tout nombre naturel n > 1 peut s’écrire comme un produit de nombres premiers, et
cette représentation est unique, à part l’ordre dans lequel les facteurs premiers sont
disposés. (Une telle représentation s’appelle la factorisation première, ou décomposition
en facteurs premiers, du nombre n.)
Ce théorème affirme que dans l’ensemble des nombres naturels, la factorisation en
nombres premiers est unique. Ce résultat peut sembler banal, mais il n’en est rien. En
effet, il arrive que dans d’autres ensembles où on peut définir une notion de “nombres
entiers” et une notion de “nombres premiers”, la factorisation d’un entier en produit
de nombres premiers n’est pas unique. En voici un exemple classique. Considérons
l’ensemble E = {2n : n ∈ IN∗ }, l’ensemble des nombres pairs positifs ; par analogie
avec le cas usuel, un élément m de E est considéré comme premier seulement si m
n’est pas le produit de deux nombres de E. Ainsi les nombres premiers de E sont :
2, 6, 10, 14, 18, 22, 26, 30, . . . . Or 60 ∈ E et 60 peut s’écrire comme 2 × 30 ou encore
comme 6 × 10. Il s’ensuit que la factorisation en nombres premiers dans cet ensemble
n’est pas unique.
Il est souvent plus commode d’énoncer le théorème fondamental de l’arithmétique de
la façon suivante : Tout nombre naturel n > 1 peut s’écrire de manière unique sous la
forme
n = q1α1 q2α2 . . . qrαr
où les qi sont premiers et distincts et où les αi sont des entiers ≥ 1. (L’exposant ai
s’appelle la “multiplicité” de qi dans n.) Il est d’usage de prendre q1 < q2 < · · · < qr .
On appelle souvent cette dernière représentation la forme canonique du naturel n. Par
exemple, la forme canonique de 60 est 60 = 22 · 3 · 5. La forme canonique d’un entier
z < −1 s’obtient en précédant du signe − la forme canonique de |z|. Par exemple,
−72 = −(23 · 32 ).
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 15
(∗) ak = nbk .
Comme n n’est pas une k e puissance parfaite, l’exposant d’(au moins) un de ses diviseurs
premiers n’est pas un multiple de k ; soit q0 , un tel premier et soit ν0 son exposant dans la
factorisation première de n.
L’exposant de q0 dans ak est de la forme kα0 , un multiple de k. De même l’exposant de q0
dans bk est de la forme kβ0 , de sorte que son exposant dans nbk est ν0 + kβ0 . Mais en vertu
du théorème fondamental de l’arithmétique (partie unicité), l’égalité (∗) entraı̂ne que
kα0 = ν0 + kβ0 ,
ce qui est impossible puisque ν0 n’est pas un multiple de k. Il nous faut donc rejeter l’hy-
√
pothèse que k n est rationnel.
La connaissance de deux entiers a et b via leur factorisation première permet de trouver
facilement leur pgcd et leur ppcm. En effet, modifions légèrement leur forme canonique
a = q1α1 q2α2 . . . qrαr et b = q1β1 q2β2 . . . qrβr en permettant aux exposants αi et βj de prendre
la valeur 0, de sorte qu’on puisse comparer une à une les multiplicités des divers nombres
premiers apparaissant dans l’une et l’autre factorisation. On voit alors que
min(α1 ,β1 ) min(α2 ,β2 )
(a, b) = q1 q2 . . . qrmin(αr ,βr )
16 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
et
max(α1 ,β1 ) max(α2 ,β2 )
[a, b] = q1 q2 . . . qrmax(αr ,βr ) .
Exemple:
Soit a = 60 et b = 294. Comme 60 = 22 · 31 · 51 et 294 = 21 · 31 · 72 , on peut écrire
60 = 22 · 31 · 51 · 70 , 294 = 21 · 31 · 50 · 72 .
Démonstration:
Illustrons la chose à l’aide de l’exemple précédent.
En effectuant le produit (a, b) · [a, b], chaque premier qi survient donc à deux reprises : une
fois avec l’exposant dont il est affecté dans la factorisation première de a et une autre fois
avec l’exposant dans b (pensons au fait qu’on a mis min(αi , βi ) dans le pgcd et max(αi , βi )
dans le ppcm).
r αi
Il est facile de voir que le nombre de diviseurs distincts de n = i=1 qi est donné par
r
(αi + 1) ;
i=1
en effet, les seuls nombres premiers pouvant figurer dans la factorisation première d’un
diviseur de n sont q1 , q2 , . . . , qn , chaque qi pouvant survenir 0, 1, . . . , αi fois. On peut
aussi montrer, mais cela est un peu plus difficile, que la somme des diviseurs de n est
α +1
r i
qi −1
.
i=1 qi − 1
Exemple:
120 = 23 · 3 · 5 a 4 · 2 · 2 = 16 diviseurs : 1, 2, 3, 4, 5, 6, 8, 10, 12, 15, 20, 24, 30, 40, 60, 120. Leur
somme est
24 − 1 32 − 1 52 − 1
· · = 15 · 4 · 6 = 360 .
2−1 3−1 5−1
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 17
N = p1 p2 . . . pk + 1.
Si N est premier, on a donc trouvé un nombre premier plus grand que tout élément de la
liste p1 , p2 , . . . , pk , ce qui constitue une contradiction. Si, par contre, N est composé, N peut
donc s’écrire comme un produit de nombres premiers ; mais comme p1 , p2 , . . . , pk sont les
seuls premiers existants, il doit exister un i (1 ≤ i ≤ k) tel que pi | N ; mais alors il découle
de la définition de N que pi | 1, ce qui est à nouveau une contradiction. On a donc le résultat
désiré.
Les nombres construits comme le N dans cette démonstration sont parfois premier
(2 · 3 · 5 · 7 · 11 + 1 = 2311), mais pas toujours (2 · 3 · 5 · 7 · 11 · 13 + 1 = 30 031 = 59 · 509).
Mais dans tous les cas un “nouveau” premier survient.
La même technique de démonstration permet d’établir qu’il existe une infinité de
nombres premiers de la forme 4n + 3. Il est également vrai qu’il existe une infinité
de premiers de la forme 4n + 1, mais l’approche précédente ne saurait en fournir
une démonstration. Ce résultat peut cependant être vu comme une conséquence d’un
théorème général dû à Dirichlet (1837) : Soit deux entiers positifs a et b tels que
(a, b) = 1 ; alors il existe une infinité de nombres premiers de la forme an + b.
Observons qu’il est possible de trouver des suites aussi longues que l’on veut d’entiers
consécutifs qui sont tous composés ; en effet, les k naturels
sont tous composés, puisque pour 2 ≤ n ≤ k + 1, on a que (k + 1)! + n est divisible par
n tout en étant différent de n.
13. Les congruences.
La notion de congruence, qui constitue un outil de base en théorie des nombres, a été
introduite par le grand mathématicien allemand Carl Friedrich Gauss en 1801. On lui
doit la notation qui prévaut encore de nos jours.
Soit m un entier positif. Si a et b sont deux entiers, on dit que a est congru à b modulo m
si les restes obtenus lors de la division de a et de b par m sont les mêmes ; on écrit alors
a ≡ b (mod m). Dans le cas contraire, on écrit a ≡ b (mod m). On a l’équivalence
suivante :
a ≡ b (mod m) ⇐⇒ m | (a − b).
Exemples:
(a) 19 ≡ 9 (mod 10), 1 ≡ −11 (mod 12), 32 ≡ 4 ≡ −1 (mod 5).
18 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
La manipulation des congruences repose sur les propriétés suivantes, qui se démontrent
facilement à partir de la définition.
(i) a ≡ a (mod m) ;
(ii) a ≡ b (mod m) si et seulement si b ≡ a (mod m) ;
(iii) si a ≡ b (mod m) et b ≡ c (mod m), alors a ≡ c (mod m) ;
(iv) si a ≡ b (mod m) et k | m, k > 0, alors a ≡ b (mod k) ;
(v) a ≡ b (mod m1 ) et a ≡ b (mod m2 ) si et seulement si
a ≡ b (mod [m1 , m2 ]) ;
(vi) si a ≡ b (mod m) et c ≡ d (mod m), alors
a + c ≡ b + d (mod m) et a − c ≡ b − d (mod m) ;
(vii) si a ≡ b (mod m) et c ≡ d (mod m), alors ac ≡ bd (mod m).
Démonstration:
Nous démontrons la propriété (v).
(⇒) Puisque, par hypothèse, m1 | (a − b) et m2 | (a − b), alors a − b est un multiple commun
de m1 et m2 . Conséquemment, [m1 , m2 ] | (a − b).
(⇐) On a par hypothèse que [m1 , m2 ] | (a − b). Mais comme m1 | [m1 , m2 ] et m2 | [m1 , m2 ],
on a donc que mi | (a − b), i = 1, 2.
Démonstration:
(viii) Puisque par hypothèse ac ≡ bc (mod m), on a donc m | c(a−b). Et comme (c, m) = 1,
il s’ensuit que m | (a − b), c’est-à-dire a ≡ b (mod m).
m c c
(ix) On a, comme dans le cas précédent, m | c(a − b), d’où | · (a − b). Et comme et
d d d
m m
sont relativement premiers, on a donc | (a − b).
d d
Il résulte des propriétés précédentes que si a ≡ b (mod m), alors pour tout naturel
n, an ≡ bn (mod m) ; plus généralement, si P est un polynôme à une variable et à
coefficients entiers, alors a ≡ b (mod m) entraı̂ne que P (a) ≡ P (b) (mod m).
Exemples:
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 19
j(j + 1)
(2j + 1)2 = 4j 2 + 4j + 1 = 4j(j + 1) + 1 = 8 · + 1 = 8Tj + 1,
2
où Tj est le j e nombre triangulaire.
À l’aide des congruences, on peut établir des critères (ou caractères) de divisibilité,
c’est-à-dire des règles permettant d’identifier facilement les naturels qui sont divisibles
par un naturel m fixe. (Soulignons que de fait, ces règles nous permettront non seule-
ment de savoir si un nombre est divisible par m, mais plus précisément de trouver le
reste obtenu lors de la division par m.)
Soit donc le naturel n = ak ak−1 . . . a2 a1 a0 donné sous forme de développement décimal
et considérons d’abord le cas m = 3.
n est divisible par 3 si et seulement si ak + ak−1 + · · · + a2 + a1 + a0 est divisible par 3.
En effet, comme
n = (ak ak−1 . . . a2 a1 a0 )b ,
0, où P est un polynôme à coefficients entiers, dont on cherche à connaı̂tre les solu-
tions entières, s’il y en a. Il n’existe pas de méthode générale pour trouver les solutions
d’une équation diophantienne quelconque, lorsqu’elle en a. Et même plus : il n’existe
pas de méthode permettant de déterminer si une équation diophantienne quelconque
possède ou non des solutions dans ZZ (sans qu’on se préoccupe pour autant d’identifier
ces solutions). Ce résultat, qui apporte une réponse négative au célèbre “10e problème
de Hilbert”, a été établi en 1970 par le mathématicien russe Yuri V. Matiyasevich,
alors âgé de 22 ans ; la technique de la démonstration repose sur des développements
récents en logique mathématique.
L’équation diophantienne la plus célèbre est sans aucune doute l’équation xn + y n =
z n , où l’exposant n est un entier positif. Lorsque n = 1 ou n = 2, cette équation
possède des solutions entières (en fait, une infinité de solutions entières). Pierre de
Fermat (1601–1665) avait affirmé que pour n’importe quel n ≥ 3, cette équation ne
possède pas de solutions dans ZZ∗ , les entiers non nuls. Cette conjecture a fait l’objet
de recherches intenses au fil des ans, mais ce n’est qu’en 1993 qu’Andrew Wiles en a
donné une démonstration dans laquelle interviennent des outils complexes et puissants
de la théorie des nombres moderne.
Il est parfois possible, à l’aide des congruences, de montrer que certaines équations
diophantiennes n’ont pas de solution.
Exemple:
Montrer que l’équation diophantienne x2 − 8y 2 = 3 n’a pas de solution.
Si u et v étaient des entiers tels que u2 − 8v 2 = 3, on aurait alors, pour tout entier m positif,
u2 ≡ 8v 2 + 3 (mod m). Mais cela ne fonctionne pas lorsqu’on prend m = 8, car on aurait
u2 ≡ 3 (mod 8), ce qui est impossible car un carré est congruent, modulo 8, à 0, 1 ou 4.
Nous nous concentrons ici sur deux cas importants d’équations diophantiennes, l’équa-
tion diophantienne linéaire à deux variables ax + by = c, avec a, b ∈ ZZ∗ , et l’équation
pythagoricienne x2 + y 2 = z 2 .
16. L’équation ax + by = c.
Soit donc des entiers a, b et c avec a et b non nuls. Résoudre l’équation diophantienne
ax + by = c revient à rechercher des points à coordonnées entières appartenant à une
certaine droite. Observons d’abord le fait suivant : L’équation ax + by = c possède des
solutions dans ZZ si, et seulement si, (a, b) | c.
Démonstration:
Posons g = (a, b), avec a = ge et b = gf .
(⇒) Soit une solution (x0 , y0 ) de l’équation ; on a alors c = ax0 + by0 = gex0 + gf y0 =
g(ex0 + f y0 ), de sorte que g | c.
(⇐) Supposant maintenant que g | c, posons c = gh. Comme g est le pgcd de a et b, on sait
qu’il existe des entiers x et y tels que g = ax + by . Mais alors c = gh = a(x h) + b(y h), de
sorte que x = x h et y = y h constituent une solution de l’équation ax + by = c.
Soit maintenant d = (a, b) et supposons que d | c, c’est-à-dire que l’équation ax+by = c
possède des solutions entières. Posant a = da , b = db et c = dc , on a donc (a , b ) = 1.
Mais par simplification, l’équation ax+by = c devient a x+b y = c ; et réciproquement,
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 23
cette dernière se transforme, par multiplication par d, en la première. Il s’agit donc là
de deux équations ayant exactement les mêmes solutions, de sorte qu’il est toujours
possible de travailler avec une équation dont les coefficients sont relativement premiers.
Exemple:
L’équation 14x + 35y = 91 a exactement les mêmes solutions que l’équation 2x + 5y = 13.
Nous voulons maintenant donner la forme générale des solutions de l’équation ax+by =
c lorsque a et b sont relativement premiers. Il est remarquable que la connaissance d’une
seule solution de cette équation permette de les trouver toutes. On a en effet le résultat
suivant : Si (x0 , y0 ) est une solution de l’équation ax + by = c (avec ab = 0, (a, b) = 1),
alors toute solution (x, y) de cette équation est de la forme
x = x0 + bt, y = y0 − at,
donc a | b(yo − s). Mais comme (a, b) = 1, on a forcément a | (y0 − s). Il existe donc un entier
t tel que at = y0 − s, c’est-à-dire s = y0 − at. Remplaçant y0 − s par at dans (∗) et simplifiant
par a, on trouve que r = x0 + bt.
Exemple:
On voit, par simple inspection, que (4, 1) est une solution de l’équation 2x + 5y = 13, de sorte
que la solution générale est de la forme x = 4 + 5t, y = 1 − 2t, où t ∈ ZZ.
Revenons à une équation quelconque ax + by = c et posons d = (a, b). Lorsque d | c, on
voit, après simplification par d, que les solutions de cette équation sont données par
b a
x = x0 + · t, y = y0 − · t,
d d
où t est un entier arbitraire et (x0 , y0 ) est une solution particulière de ladite équation.
Exemple:
Soit l’équation 14x + 35y = 91, dont on observe que (4, 1) en est solution. Alors la solution
générale est de la forme
35 14
x=4+ · t = 4 + 5t, y =1− · t = 1 − 2t.
7 7
17. L’équation x2 + y 2 = z 2 .
Étudier les solutions entières de l’équation diophantienne x2 +y 2 = z 2 revient à chercher
tous les triangles rectangles dont les longueurs des côtés sont des entiers, la variable
z correspondant à l’hypoténuse. En l’honneur du mathématicien grec Pythagore (6e
24 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
siècle av. J.-C.), on appelle triplet pythagoricien un triplet d’entiers positifs (u, v, w)
tels que x = u, y = v et z = w constituent une solution de cette équation.
Il est clair qu’il existe une infinité de triplets pythagoriciens ; par exemple, on vérifie
facilement que pour n’importe quel entier positif n,
où r et s sont des entiers arbitraires de parité opposée tels que r > s > 0 et (r, s) = 1.
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 25
Il est facile de vérifier que tout triplet d’entiers (u, v, w) satisfaisant ces trois équations
est bel et bien un triplet pythagoricien : u2 +v 2 = w2 ; on peut aussi démontrer qu’il est
primitif. Nous voulons maintenant démontrer que les triplets pythagoriciens primitifs
sont tous de cette forme.
Démonstration:
Soit donc (u, v, w) un triplet pythagoricien primitif. Comme v est pair, on a v = 2t, de sorte
que l’égalité u2 + v 2 = w2 peut se réécrire 4t2 = w2 − u2 = (w + u)(w − u). Mais u et w étant
impairs, w + u et w − u sont tous les deux pairs ; on a donc
w+u w−u
(∗) t2 = · ,
2 2
où les facteurs à la droite de (∗) sont non seulement des entiers, mais sont de plus relativement
premiers. En effet, tout facteur qui leur est commun doit aussi diviser leur somme, qui est
w, ainsi que leur différence, qui est u ; mais comme nous avons un triplet primitif, le pgcd
de u et w est 1.
Soit maintenant p, un premier divisant le membre de gauche de (∗) ; l’exposant dont il est
affecté dans la factorisation première de t2 étant pair, il doit en être de même du côté droit
de (∗). Mais aucun premier ne pouvant diviser simultanément les deux facteurs à la droite,
p doit donc se retrouver dans un seul de ces facteurs et y être affecté d’un exposant pair.
Autrement dit, chacun des deux facteurs à la droite de (∗) est un carré parfait, disons
w+u w−u
= r2 et = s2 ,
2 2
où on peut supposer que r et s sont positifs.
Additionnant des deux équations, on trouve w = r2 + s2 , et en soustrayant, u = r2 − s2 .
Puisque u > 0, il s’ensuit que r > s. Comme w est impair, r et s ne peuvent être de la même
parité. On a vu plus haut que r2 et s2 sont relativement premiers, ce qui entraı̂ne qu’il en
est de même pour r et s. Notons enfin que t2 = r2 s2 , de sorte que v = 2t = 2rs.
Il est clair, d’après le résultat précédent, qu’il existe une infinité de triplets pythagori-
ciens primitifs : on n’a qu’à balayer les valeurs possibles de r et de s. Le tableau suivant
donne les triplets obtenus en prenant r ≤ 7.
r s u v w
2 1 3 4 5
3 2 5 12 13
4 1 15 8 17
4 3 7 24 25
5 2 21 20 29
5 4 9 40 41
6 1 35 12 37
6 5 11 60 61
7 2 45 28 53
7 4 33 56 65
7 6 13 84 85
26 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
Exemples:
(a) Trouver tous les triplets pythagoriciens primitifs (u, v, w) avec u = 15.
Il s’agit de résoudre l’équation diophantienne w2 − v 2 = 152 . Notons qu’il ne peut y
avoir qu’un nombre fini de solutions, puisque la différence entre des carrés consécutifs
devient de plus en plus grande.
Comme on a 15 = (w + v)(w − v), les deux facteurs à la droite doivent être soit 15 et
1, soit 5 et 3. En résolvant
w + v = 15 et w − v = 1,
on trouve w = 8 et v = 7, ce qui correspond au triplet (15, 112, 113). L’autre cas donne
w = 4 et v = 1, d’où le triplet (15, 8, 17).
(b) Trouver tous les triplets pythagoriciens primitifs (u, v, w) avec v = 28.
Posons v = 2rs. Les seules possibilités pour rs = 14 sont r = 14, s = 1 et r = 7, s = 2,
qui mènent respectivement aux triplets primitifs (195, 28, 197) et (45, 28, 53).
(c) Trouver tous les triplets pythagoriciens (u, v, w) avec v = 28.
Cela revient à chercher tous les triplets pythagoriciens primitifs (a, b, c) pour lesquels il
existe un entier k tel que (ka, kb, kc) est de la forme (u, 28, w). Il s’agit donc de prendre
chacun des diviseurs de 28, à savoir 1, 2, 4, 7, 14 et 28, et de voir s’il peut figurer dans
un triplet pythagoricien primitif.
Soit d’abord d, un diviseur pair de 28. Si d est élément d’un triplet primitif, il doit
donc être de la forme 2rs. Le cas 2rs = 2 est impossible, car on aurait rs = 1 alors
que r et s sont de parité opposée. Le même raisonnement montre qu’on ne peut avoir
2rs = 14. Avec 2rs = 4, on trouve r = 2 et s = 1, qui donne le triplet primitif (3, 4, 5) ;
en multipliant par 7, on obtient alors le triplet (21, 28, 35). Enfin, l’équation 2rs = 28 a
été étudiée dans l’exemple précédent, donnant les deux triplets primitifs (195, 28, 197)
et (45, 28, 53).
Considérons maintenant un diviseur impair d de 28, qui doit être de la forme d =
r2 − s2 . L’équation 1 = r2 − s2 n’a pas de solution dans les entiers positifs. Cependant
7 = r2 − s2 = (r + s)(r − s) donne r = 4 et s = 3, menant au triplet primitif (7, 24, 25).
En multipliant par 4, on obtient le triplet (28, 96, 100), que l’on réécrit (96, 28, 100),
puisqu’on veut avoir v = 28.
Il y a donc quatre solutions au problème : les triplets primitifs (195, 28, 197) et (45, 28, 53),
ainsi que les triplets (21, 28, 35) et (96, 28, 100).
Exemple:
Soit la congruence x3 + x + 2 ≡ 0 (mod 3). On a ici P (x) = x3 + x + 2. Or P (0) = 2 ≡ 2
(mod 3), P (1) = 4 ≡ 1 (mod 3), et P (2) = 12 ≡ 0 (mod 3). On a donc une seule solution,
à savoir x ≡ 2 (mod 3), c’est-à-dire x ∈ {2, 5, 8, . . .}.
Une congruence linéaire à une variable est de la forme ax ≡ b (mod m). L’étude de
telles congruences revient à celle d’équations diophantiennes linéaires à deux variables.
En effet,
ax ≡ b (mod m) ⇐⇒ m | (ax − b),
de sorte qu’on est ramené à l’équation diophantienne ax−my = b ; l’entier x est solution
de ax ≡ b (mod m) si et seulement s’il existe un entier y tel que ax − my = b. Posant
d = (a, m), on sait qu’il y a solution seulement si d | b ; et dans ce cas, les solutions
sont données par
m a
x = x0 + · t, y = y0 + · t,
d d
où t ∈ ZZ et (x0 , y0 ) est une solution particulière de ax − my = b. Les valeurs de x telles
que
m
x = x0 + ·t
d
sont les solutions de la congruence linéaire, et il y en a une infinité.
Il reste maintenant à voir combien de ces solutions ne sont pas congruentes, modulo m,
les unes avec les autres. Soit donc deux solutions x1 et x2 , déterminées par des entiers
t1 et t2 , dont on suppose qu’elles sont congruentes. On a donc
m m
x0 + · t1 ≡ x0 + · t2 (mod m) ,
d d
d’où il suit que
m m
· t1 ≡ · t2 (mod m) .
d d
Mais comme m/d est le pgcd de m et de m/d, il découle de la propriété (ix) des
congruences que
t1 ≡ t2 (mod d).
Il y a donc autant de solutions non congruentes qu’il y a de restes dans la division
par d. En bref : Soit la congruence linéaire ax ≡ b (mod m), avec m > 0, et posons
d = (a, m). Alors cette congruence a des solutions si et seulement si d | b. Et dans un
tel cas, il y a exactement d solutions non congruentes.
Exemples:
(a) La congruence 3x ≡ 2 (mod 6) n’a pas de solution, puisque (3, 6) = 3 et que 3 | 2.
(b) Soit la congruence 7x ≡ 4 (mod 12). Comme (7, 12) = 1, on a donc une seule solution,
modulo 12. Pour la trouver, on considère l’équation diophantienne linéaire 7x−12y = 4.
À l’aide de l’algorithme d’Euclide, on peut exprimer le pgcd de 7 et 12 sous la forme
1 = 3 · 12 − 5 · 7. Il s’ensuit que 4 = 4 · (3 · 12 − 5 · 7) = 12 · 12 − 20 · 7, de sorte que
x0 = −20 et y0 = 12 est une solution particulière de 7x − 12y = 4. La solution de la
congruence est donc donnée par x = x0 ≡ −20 ≡ 4 (mod 12).
28 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
(c) Soit la congruence 9x ≡ 12 (mod 15). Comme (9, 15) = 3 et 3 | 12, on a donc trois
solutions non congruentes. Considérant l’équation diophantienne 9x − 15y = 12, on
trouve à l’aide de l’algorithme d’Euclide que 3 = 2·9−1·15, de sorte que 12 = 8·9−4·15.
On a donc une première solution x = x0 ≡ 8 (mod 15). Les deux autres solutions non
congruentes sont obtenues en additionnant des multiples appropriés de 15/3 = 5. On
trouve ainsi x = x0 + 5 ≡ 13 (mod 15) et x = x0 + 5 · 2 ≡ 18 ≡ 3 (mod 15).
(ix) Soit x = n + h où 0 ≤ h < 1. Par division euclidienne, on a des entiers q et r tels que
n = qm + r avec 0 ≤ r ≤ m − 1. Conséquemment,
x qm + r + h r+h
= =q+ = q,
m m m
puisque 0 ≤ r + h < m. Mais on a d’autre part
[x] n r
= = q+ = q.
m m m
Le résultat suit donc immédiatement.
Exemples:
√
√
10 [ 10] 3
(a) = = = 1.
2 2 2
(b) Montrer que lorsque n et a sont des entiers positifs, [ na ] est le nombre de multiples
positifs de a qui sont inférieurs ou égaux à n.
Pour n < a, on a bien [ na ] = 0. On suppose maintenant n ≥ a et soit a, 2a, 3a, . . . , ka, la
liste de tous les multiples positifs de a n’excédant pas n. Il nous faut donc montrer que
k = [ na ]. Mais alors le multiple suivant de a, (k + 1)a, est supérieur à n, de sorte que
n
ka ≤ n < (k + 1)a, c’est-à-dire k≤ < k + 1.
a
n
Mais cela exprime justement le fait que l’entier k est la partie entière de la fraction a.
(c) De manière analogue à l’exemple précédent, donner une interprétation de l’expression
a ], où n, a et t sont des entiers positifs et t ∈ {1, 2, . . . , a − 1}.
[ n+t
Posons k = [ n+t a ]. On a donc
n+t
(∗) k≤ < k + 1, c’est-à-dire ka ≤ n + t < (k + 1)a.
a
Nous distinguons deux cas. Lorsque n + t < a, c’est-à-dire n < a − t, on a k = 0. Soit
maintenant n ≥ a − t ; on peut alors réécrire la dernière expression de la ligne (∗) sous
la forme ka − t ≤ n < (k + 1)a − t, ou encore (k − 1)a + (a − t) ≤ n < ka + (a − t). On
est donc en train de compter les entiers de la forme ja + (a − t).
Bref, dans les deux cas, k = [ n+t
a ] est le nombre d’entiers inférieurs ou égaux à n qui,
lorsque divisés par a, donnent un reste de a − t.
30 CHAPITRE 1. UN COFFRE D’OUTILS
La valeur de α donnée par cette somme est donc le plus grand exposant tel que pα | n!,
c’est-à-dire pα n!. La somme en question est bien sûr finie, puisque n < pj lorsque j
est suffisamment grand.
Démonstration:
Si p > n, alors p n’apparaı̂t pas dans la factorisation première de n, de sorte que chaque
terme de la somme ∞ i
i=1 [n/p ] est nul, comme désiré.
Soit maintenant p ≤ n ; il s’agit donc, pour chaque k ∈ {1, 2, . . . , n}, de compter le nombre
de fois que p survient comme facteur premier dans la factorisation première de k, c’est-à-dire
de trouver l’exposant αk tel que pαk k. Plutôt que de considérer une à la fois chacune des
valeurs de k, nous effectuons ce comptage en considérant l’une après l’autre les puissances
possibles de p.
n
Tel que vu à la section précédente, l’expression correspond au nombre d’entiers dans
p
{1, 2, . . . , n} qui sont multiples de p, à savoir
n
p, 2p, 3p, . . . , p.
p
n
Parmi ceux-ci, sont divisibles à nouveau par p :
p2
n
2 2 2
p , 2p , 3p , . . . , 2 p2 .
p
n n
En effet, si m est le plus grand entier tel que mp2 ≤ n, on a alors m ≤ 2 , donc m = 2 .
p p
n
Par le même raisonnement, on voit que 3 de ces derniers entiers sont divisibles par p une
p
troisième fois ; ce sont
n
p , 2p , 3p , . . . , 3 p3 .
3 3 3
p
∞ i]
En répétant cet argument un nombre fini de fois, on conclut que la somme (finie) i=1 [n/p
donne le nombre total de fois que p divise un nombre dans {1, 2, . . . , n}.
Exemples:
(a) La plus grande puissance de 11 qui divise 1000! est 98, car
∞
1000 1000 1000
= + = 90 + 8 = 98.
i=1
11i 11 121
1.2. THÉORIE DES NOMBRES 31
f1 = f3 − f2 ,
f2 = f4 − f3 ,
f3 = f5 − f4 ,
..
.
fn = fn+2 − fn+1 .
n
Additionnant membre à membre ces égalités, on trouve i=1 fi = fn+2 − f2 = fn+2 − 1.
On peut démontrer de même que
f1 + f3 + f5 + · · · + f2n−1 = f2n ,
fn+1 = fn · 1 + fn−1 ,
fn = fn−1 · 1 + fn−2 ,
..
.
f4 = f3 · 1 + f2 ,
f3 = f2 · 2 + 0.