PRÉSENTATION GÉNÉRALE DES GARANTIES
BANCAIRES CONVENTIONNELLES
USUELLES DU CRÉDIT
Client brief rédigé par Mehdi Kettani, Associé, DLA Piper Casablanca
Dans un système économique moderne, le crédit est le
moteur de l’économie.
Le crédit peut se manifester dans plusieurs relations
d’affaires et sous des formes différentes. Cependant,
les crédits les plus importants pour le développement
économique sont les crédits accordés pour l’investissement
et dans ce domaine ce sont les banques qui accordent en
général ce type de crédit.
Ces dernières n’étant pas des organismes de charité,
elles veillent à se prémunir au mieux contre le risque
d’insolvabilité de leurs débiteurs. Pour ce faire, elles
demandent des garanties à leurs clients qui veulent obtenir
un crédit; et vu que ces garanties sont données par des
actes écrits dénommés « conventions », elles sont appelées
« garanties conventionnelles. »
I NOTIONS FONDAMENTALES ET
TYPOLOGIE
A. PRÉCISION NOTIONNELLE
1.  Garantie ou sûreté
La raison d’être des garanties conventionnelles est d’assurer
ou du moins de ménager le paiement d’une créance. C’est
pour cela que les garanties conventionnelles sont aussi
appelées sûretés conventionnelles.
2.  Frontière
Il faut cependant relever une nuance entre les deux
notions : « La sûreté est une garantie mais toute garantie
n’est pas une sûreté ». Ainsi, les sûretés ne seraient qu’un
sous-ensemble parmi l’ensemble des garanties.
Cette nuance ne nous paraît pas revêtir une grande
importance dans le cadre de notre étude car nous allons
délimiter avec précision les garanties conventionnelles que
nous étudierons et qui sont sans aucun doute des sûretés.
Nous pourrons donc indifféremment utiliser les deux
expressions d’autant plus qu’en droit et en pratique au
Maroc les deux notions se superposent.
Ainsi, dans une circulaire interne diffusée dans les services
d’une grande banque de la place, le terme «garantie » est
utilisé comme titre alors que dans un premier sous-titre on
parle de « sûreté conventionnelle». Il s’agit d’une circulaire
interne à la banque. Elle a un caractère confidentiel et nous
a été communiquée en notre qualité d’avocat de la banque.
B. DÉFINITIONS
3.  Définition de base par la finalité
La finalité d’une garantie (sûreté) conventionnelle est
d’offrir au créancier une sécurité accrue, une chance
supplémentaire de paiement.
Il s’agit d’une prérogative superposée aux prérogatives
ordinaires du créancier par un contrat et qui a pour finalité
juridique exclusive de le protéger contre l’insolvabilité de
son débiteur.
4.  Définition complémentaire par les aspects
juridiques
Pour compléter cette définition, il faut dégager quelques
aspects juridiques des sûretés :
■■ celles-ci permettent de faire échec au principe général de
l’égalité des créanciers ;
■■ elles offrent un régime préférentiel qui sort du droit
commun (droit de préférence et droit de suite) ;
■■ le créancier titulaire d’une sûreté est donc un créancier
privilégié : il a plus de chances de se faire payer qu’un
créancier chirographaire.
C. TYPOLOGIE
5.  Garanties personnelles et garanties réelles
Les garanties conventionnelles se divisent en deux grandes
catégories : les garanties personnelles et les garanties
réelles.
Bien que poursuivant le même but (paiement préférentiel),
les deux types de sûretés font appel à des mécanismes
différents.
Tandis que le droit des garanties personnelles se rattache
essentiellement au droit des contrats, le droit des garanties
réelles se rattache essentiellement au droit des biens qui
présente un caractère plus rigide et impératif que le droit
des contrats.
II. GARANTIES PERSONNELLES
6.  Distinction
L’un des principaux critères de distinction parmi les
garanties personnelles est l’existence ou l’absence
d’un caractère « accessoire » par rapport à l’obligation
principale. Il existe ainsi des garanties personnelles qui ne
sont que l’accessoire de l’engagement principal (le contrat
de crédit par exemple) et d’autres qui sont autonomes.
7.  Plan
Pour illustrer le premier type de garantie personnelle,
nous avons choisi de traiter du cautionnement (A) et pour
le second type nous traiterons de la garantie à première
demande (B).
A. CAUTIONNEMENT
1. Définitions
8.  Définition légale
Le Dahir du 12 août 1913 formant Code des obligations
et des contrats (DOC) et publié au Bulletin officiel
du 12 septembre 1913, consacre tout un titre au
cautionnement. Ainsi, à l’article 1117 on peut lire la
définition suivante : « Le cautionnement est un contrat par
lequel une personne s’oblige envers le créancier à satisfaire à
l’obligation du débiteur, si celui-ci n’y satisfait pas ».
9.  Définition doctrinale
Cette définition légale, bien qu’étant exacte et claire,
s’avère plus descriptive que conceptuelle. Aussi, pour
replacer le cautionnement dans le cadre du régime des
sûretés en général, on pourrait dire que « le cautionnement
est une sûreté personnelle accessoire créée par un
contrat unilatéral qui oblige la caution à exécuter la
02  |  Présentation Générale Des Garanties Bancaires Conventionnelles Usuelles Du Crédit
dette du débiteur principal et lui donne un recours en
remboursement contre ce dernier » (V. notamment J.-Y.
Henckes, Précis des marchés publics : Ed. Legitech, 2010).
10.  Polysémie du terme « caution »
Il faut signaler que le terme « caution » désigne à la fois une
somme d’argent et la personne qui s’est portée garante
pour le paiement en cas d’insolvabilité du débiteur principal.
2. Justification de l’attractivité du cautionnement
pour les établissements bancaires
11.  Efficacité
Les établissements bancaires, souvent confrontés à
l’insolvabilité de leurs débiteurs, ont trouvé avec le
cautionnement une sûreté plutôt efficace qui leur permet
d’en tirer bon nombre d’avantages. Ainsi, le cautionnement
présente certaines particularités qui en font une sûreté
appréciée des banquiers qui la demandent très souvent à
l’occasion de l’octroi de crédits.
12.  Souplesse de la constitution
Les conditions de fond classiques de validité du contrat de
cautionnement (capacité, consentement, objet, cause) et le
peu de formalisme qu’il requiert permettent sa conclusion
rapide, ce qui est un atout majeur en tant que sûreté.
13.  Flexibilité
L’une des autres particularités du cautionnement réside
dans le fait que celui-ci est considéré comme une sûreté
« flexible » qui s’adapte à la quasi-totalité des opérations de
crédit.
14.  Partage des risques
Ensuite, cette sûreté permet le partage des risques entre
le débiteur et la caution. Si le premier s’avère défaillant,
la seconde lui sera substituée pour le remboursement des
sommes dues à l’établissement bancaire. Ce dernier étend
donc son action à deux patrimoines qui sont généralement
distincts.
3. Principes fondamentaux du cautionnement
15.  Caractère accessoire
Le cautionnement revêt un caractère accessoire par
rapport à l’obligation principale. L’obligation de la caution
est subordonnée à la défaillance du débiteur principal
(C. Supr., 28 janv. 2009, n° 115)
Ainsi, le cautionnement ne peut porter que sur une
obligation valable (DOC, art. 1120). Si l’obligation principale
est nulle, de nullité absolue, le cautionnement est également
nul en vertu du principe « l’accessoire suit le principal ».
16.  Opposabilité des exceptions
Comme conséquence du principe de l’accessoire, la caution
peut opposer au créancier les exceptions que le débiteur
principal aurait pu opposer au créancier (DOC, article 1140).
Cette affirmation doit cependant être nuancée parce que si
la caution peut opposer au créancier toutes les exceptions
liées à l’obligation (montant de la dette, par exemple),
elle ne peut lui opposer les exceptions qui sont purement
personnelles en raison du principe de l’effet relatif des
contrats.
17.  Caractère civil ou commercial
Le cautionnement est, par nature, un acte civil. Néanmoins,
il est admis que, par exception, le cautionnement peut être
de nature commerciale (CA Casablanca, 29 juill. 1999, n°
1151). La nature commerciale du cautionnement implique la
compétence du tribunal de commerce en cas de litige.
Le cautionnement peut être qualifié de commercial quand :
■■ il est souscrit à titre onéreux par un établissement de
crédit. Dans ce cas l’établissement se porte caution
pour son client, ce dernier le rémunérant pour cette
prestation ;
■■ la caution s’engage à honorer en cas de défaillance du
débiteur principal des effets de commerce ;
■■ le cautionnement est souscrit pour les besoins d’une
activité commerciale, par exemple lorsqu’un fournisseur
se porte caution de son distributeur envers une banque
pour lui faciliter l’octroi d’un prêt ;
■■ la caution a un intérêt personnel d’ordre patrimonial
dans l’affaire et l’opération cautionnée est commerciale.
C’est, par exemple, le cas du dirigeant de l’entreprise
qui se porte caution lors de l’obtention d’un crédit au
bénéfice de son entreprise.
4. Particularités du cautionnement en tant que
garantie de crédit bancaire
a) Solidarité et renonciation aux bénéfices de
discussion et de division
18.  Caractère nécessairement exprès de la
solidarité
Selon l’article 1133 du DOC, le cautionnement n’entraîne
pas solidarité, si elle n’est expressément stipulée (C. Supr.,
22 juin 2005, n° 735).
Or, dans les actes de cautionnement que font signer les
établissements bancaires aux cautions, la solidarité est
toujours stipulée que ce soit entre le débiteur et sa caution
ou entre les cautions du débiteur en cas de pluralité de
celles-ci.
19.  Solidarité et renonciation au bénéfice de
discussion
Ainsi stipulée, la solidarité permet au créancier, en cas de
défaillance du débiteur principal, de demander à la caution
d’honorer les engagements du débiteur principal sans
qu’il soit obligé de demander d’abord à ce dernier de les
honorer.
Ainsi, la solidarité emporte de plein droit renonciation au
bénéfice de discussion (CAC Casablanca, 7 janv. 2002, n° 31)
dont le principe est établi par l’article 1136 du DOC.
20.  Solidarité et bénéfice de division
De plus, le créancier peut ainsi poursuivre toutes les
cautions pour qu’elles soient condamnées solidairement
à payer l’ensemble des dettes du débiteur principal, sans
qu’elles puissent se prévaloir du bénéfice de division, en
vertu duquel chacune d’elles paie une partie de la dette
conformément à l’article 1138 du DOC.
b) Opposabilité de la déchéance du terme à la
caution
21.  Principe
Le droit commun du cautionnement prévoit que la
déchéance du terme par un agissement fautif ou non du
débiteur ne peut être opposée à la caution. Ainsi, à titre
d’exemple, citons l’article 1135 alinéa 3 du DOC qui stipule
que « la mort du débiteur fait échoir la dette à l’égard
de la succession de celui-ci, mais le créancier ne pourra
poursuivre la caution qu’à l’échéance du terme convenu ».
22.  Dérogation
Cependant, les contrats de cautionnement dans lesquels
une banque est bénéficiaire contiennent en général une
clause dérogatoire à ce principe en prévoyant que la
déchéance du terme qui s’applique au contrat principal est
étendue au contrat de cautionnement.
c) Opposabilité de la prorogation du terme à la
caution
23.  Contrats de cautionnement
Pour faire échec au principe contenu à l’article 1157, alinéa
3 du DOC, les contrats de cautionnement signés au profit
des banques prévoient généralement une clause par laquelle
l’établissement bancaire se donne le droit de proroger
le terme du contrat principal sans que cela n’ait aucune
incidence sur la garantie.
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24.  Illustration
Ainsi, on peut lire, habituellement, dans « contrat de
caution conjointe et solidaire », que les cautions déclarent
« autoriser la banque à accorder à la société (cautionnée)
tous les délais, toutes les facilités de paiement et tous
renouvellements de crédit qu’il lui paraîtra opportun de lui
consentir ».
B. GARANTIE À PREMIÈRE DEMANDE
25.  Garantie autonome
Parmi les garanties autonomes (appelées aussi garanties
indépendantes), la garantie à première demande (désignée
quelques fois par l’expression « lettre de garantie ») est
la plus couramment utilisée dans le monde des affaires et
particulièrement à l’occasion de crédits bancaires.
La garantie autonome est définie par la doctrine comme
étant « un engagement de payer une certaine somme,
pris en considération d’un contrat de base et à titre
de garantie de son exécution, mais constitutif d’une
obligation indépendante du contrat garanti et caractérisé
par l’inopposabilité des exceptions tirées de ce contrat »
(Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes : Litec 1999,
n° 857)
26.  Jurisprudence
La garantie à première demande a donné lieu à un arrêt
de principe de la Cour Suprême (C. Supr., 31 janv. 2001,
n° 231). Le principal apport de cet arrêt est de consacrer
la distinction entre la garantie à première demande et le
cautionnement.
Ainsi, le garant qui s’engage « à première demande » ne
peut s’opposer au paiement pur quelque motif que ce soit.
De plus, le bénéficiaire de la garantie à première demande
dispose d’un droit direct qui est indépendant de la relation
entre le donneur de garantie et le garant.
En outre, cet arrêt consacre le principe de la nécessité
pour les magistrats de ne pas se contenter de l’intitulé d’un
document pour en déduire la qualification. Au contraire,
ils doivent déduire la qualification de l’analyse des termes
utilisés dans le corps du texte de la garantie.
1. Définition de la garantie à première demande
27.  Contrat sui generis
À la différence du cautionnement, la garantie à première
demande est un contrat sui generis qui ne peut être assimilé
à aucun des contrats nommés régis par le droit marocain.
04  |  Présentation Générale Des Garanties Bancaires Conventionnelles Usuelles Du Crédit
28.  Proposition de définition
En l’absence de définition légale, il est possible de définir la
garantie à première demande comme étant une convention
par laquelle, à la requête ou sur instruction du donneur
d’ordre, le garant s’engage à payer une somme déterminée
au bénéficiaire, sur première demande de la part de ce
dernier.
29.  Illustrations
Dans les crédits accordés par les banques aux filiales de
grands groupes industriels, il est fréquent que la banque
prêteuse exige que la maison mère garantisse « à première
demande » les engagements de la filiale emprunteuse
envers elle.
Par ailleurs, dans le cadre d’opérations internationales de
crédit, lorsqu’une entreprise originaire d’un pays A cherche
à emprunter auprès d’une banque d’un pays B, cette
dernière demande souvent à l’entreprise de lui fournir une
garantie à première demande émanant d’une banque de
premier rang de son pays d’origine (A).
2. Formation et réalisation d’une garantie à
première demande
30.  Consensualisme
Étant un contrat sui generis, la garantie à première demande
nécessite très peu de formalisme pour sa formation.
Bien entendu, les conditions de formation classiques des
contrats doivent être réunies : la capacité, le consentement,
la cause et l’objet.
Si la capacité et le consentement ne semblent pas poser
de problème particulier, la cause et l’objet de la garantie à
première demande et des garanties autonomes en générale
ont nourri par le passé plusieurs débats doctrinaux à
l’étranger et notamment en France (V. à ce sujet, Ph. Simler,
cité supra n° 25. – P. Ancel, Les sûretés personnelles non
accessoires en droit français et en droit comparé : thèse Dijon,
1981).
31.  Appel de la garantie à première demande
Il s’opère généralement au moyen d’une lettre adressée
par le bénéficiaire au garant lui demandant de procéder au
paiement.
Il est d’usage que le donneur d’ordre soit informé de la
mise en jeu de la garantie à première demande, pour qu’il
puisse éventuellement formuler ses observations et, en cas
de fraude ou d’abus de la part du bénéficiaire, demander
amiablement ou judiciairement la suspension ou l’annulation
de la mise en jeu de la garantie.
3. Principales caractéristiques de la garantie à
première demande
32.  Caractère autonome
Le caractère autonome de la garantie à première demande
lui confère une spécificité par rapport à d’autres contrats
similaires, notamment le cautionnement, et influe tant
sur ses conditions de formation et de validité, que sur les
modalités de sa réalisation.
Contrairement au cas du cautionnement, le garant dans
le cadre de la garantie à première demande prend un
engagement qui lui est propre et qui est distinct de celui du
donneur d’ordre dans le contrat de base.
Cette distinction a non seulement pour intérêt de
permettre de différencier les deux garanties personnelles
mais aussi de mettre l’accent sur les autres caractéristiques
distinctives de la garantie à première demande.
33.  Principe de l’inopposabilité des exceptions
Il s’agit de la conséquence la plus notable du caractère
autonome de la garantie à première demande.
Selon Ph. Simler, l’inopposabilité des exceptions
n’est que « le corollaire et la traduction concrète de
l’autonomie de la garantie » (Ph. Simler, cité supra n° 25).
En vertu de ce principe, le garant appelé en paiement
du montant de la garantie par le bénéficiaire, ne peut
lui opposer d’exceptions comme c’est le cas en matière
de cautionnement dans lequel la caution peut opposer
au créancier les exceptions que le débiteur pourrait lui
opposer.
Hormis les cas de fraude manifeste ou d’abus de droit lors
de la mise en œuvre de la garantie à première demande,
cette garantie offre une sécurité accrue au créancier grâce
à ce principe de l’inopposabilité des exceptions.
34.  Application du principe de l’inopposabilité des
exceptions
Bien que le cautionnement sans bénéfice de discussion ou
de division ne soit plus de nos jours courant en matière
de crédit bancaire, il convient de souligner que l’un des
intérêts majeurs de la garantie à première demande est
l’impossibilité pour le garant de se prévaloir de l’un de ces
deux bénéfices lorsqu’il y a mise en jeu de la garantie.
Par ailleurs, la garantie à première demande implique
l’inopposabilité par le garant des exceptions ayant trait à la
relation contractuelle de base entre le donneur d’ordre et
le bénéficiaire.
Pour reprendre l’exemple du contrat de prêt à la filiale
d’un groupe, supposons que la filiale n’honore pas ses
engagements envers la banque prêteuse en arguant que
celle-ci aurait commis une quelconque faute contractuelle
envers elle. La maison mère, garante à première demande,
ne peut se prévaloir de l’argument de la filiale, même s’il est
avéré, pour refuser d’exécuter son engagement au titre de
la garantie à première demande.
III. GARANTIES RÉELLES
35.  Tentative de définition
La notion de garantie réelle en tant que telle ne trouve
pas de définition précise dans la loi. Aussi la doctrine tente
d’en élaborer une, tâche qui ne s’avère pas facile et qui
pousse les auteurs à définir les garanties réelles d’une part
à travers leur finalité et d’autre part à travers la technique
utilisée pour atteindre le but visé : les garanties réelles ont
pour finalité d’assurer le paiement préférentiel et de faire
ainsi échec au principe du concours des créanciers (DOC,
art. 1241) et la technique utilisée est l’affectation d’un bien
au paiement de la dette du débiteur.
36.  Plan
Partant de l’idée de complémentarité entre les garanties,
les établissements de crédit demandent souvent à leurs
clients, en plus des garanties personnelles, des garanties
réelles. Selon les caractéristiques de chaque opération de
crédit et au regard des caractéristiques contingentes de
chaque débiteur, le créancier choisit parmi les garanties
réelles celles qui lui procurent le plus de chances de
recouvrement. En pratique, ce sont l’hypothèque
immobilière (A), le nantissement de fonds de commerce et
le nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement
(B) qui sont le plus souvent utilisés.
A. HYPOTHÈQUE IMMOBILIÈRE
1. Définitions
37.  Définition légale
La loi n° 39.08 promulguée par le Dahir du
22 novembre 2011 et publiée au Bulletin officiel
du 24 novembre 2011 définit, dans son article 165,
l’hypothèque comme étant un droit réel accessoire
portant sur un bien immeuble immatriculé ou en cours
d’immatriculation et affecté à la garantie du paiement
d’une dette. Il est à noter qu’à la date de publication de
la présente synthèse, ladite loi est publiée uniquement en
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langue arabe. En conséquence, la traduction de la définition
est une traduction libre et pourrait être différente après la
publication de la version française de la loi n°39.08.
L’article 166 de cette loi complète cette définition en
indiquant que l’hypothèque est indivisible, qu’elle porte
sur l’ensemble des biens hypothéqués, sur chacun d’eux
et sur toute partie de chacun d’eux. L’article 167 précise
que l’hypothèque porte sur le bien hypothéqué, ses
dépendances, les améliorations qui y sont apportées et les
ouvrages qui y sont incorporés après la conclusion de l’acte
d’hypothèque.
38.  Définition doctrinale
En doctrine, l’hypothèque est définie comme étant une
sûreté immobilière constituée sans la dépossession du
débiteur par une convention, un texte de loi ou une
décision de justice et en vertu de laquelle le créancier
qui a procédé à l’inscription a la faculté de faire vendre
l’immeuble grevé en quelques mains qu’il se trouve (droit
de suite) et d’être payé par préférence sur le prix (droit de
suite).
Utilisée en matière de crédit bancaire, l’hypothèque permet
à l’établissement bancaire prêteur, en cas de défaillance de
l’emprunteur de faire saisir le bien immeuble hypothéqué,
de le faire vendre en justice et se faire payer sur le
produit de la vente, par préférence à d’autres créanciers,
notamment les créanciers chirographaires.
2. Constitution de l’hypothèque conventionnelle
39.  Dispositions applicables
Les articles 174 et suivants de la loi n° 39.08 prévoient
certaines exigences pour la validité de la constitution de
l’hypothèque.
40.  Conditions de fond
Il faut que l’acte d’hypothèque prévoie, en plus de l’identité
des parties et de la désignation précise du bien hypothéqué,
le montant de la dette garantie par l’hypothèque ainsi que
son échéance.
Il est à signaler à ce titre qu’il est possible de former une
hypothèque pour garantir le paiement d’un compte courant
débiteur à condition que son plafond soit déterminé à
l’avance.
41.  Conditions de forme
La constitution de l’hypothèque est assujettie à un certain
formalisme qui se comprend aisément étant donnée
l’importance de l’enjeu pour le débiteur hypothécaire s’il
s’avère défaillant.
06  |  Présentation Générale Des Garanties Bancaires Conventionnelles Usuelles Du Crédit
Ainsi, un écrit exprimant le consentement des parties
est exigé et l’hypothèque n’est valable que lorsqu’elle est
inscrite sur le titre foncier.
3. Effets de l’hypothèque conventionnelle
42.  Effets entre les parties
Pour rappel, l’hypothèque est une garantie sans
dépossession. Ceci implique que le propriétaire du bien
hypothéqué continue à jour de son bien, à l’exploiter et à
en disposer à condition de ne pas porter atteinte aux droits
du créancier hypothécaire.
En cas de défaillance du débiteur, le créancier dispose du
droit de faire vendre le bien hypothéqué aux enchères
publiques et de se faire payer sur le produit de la vente.
43.  Effets à l’égard des tiers et droit de préférence
Le droit de préférence permet de déroger au principe de
l’égalité des créanciers. Il s’agit d’une des caractéristiques
fondamentales de l’hypothèque qui en justifie l’attrait en
tant que garantie réelle.
Il permet au créancier hypothécaire de se faire payer à
partir du produit de la vente du bien hypothéqué par
préférence aux autres créanciers qui viendraient concourir
avec lui lors de la distribution du produit de la vente.
Ce droit a été maintes fois consacré par la jurisprudence,
notamment dans certaines décisions importante dans
laquelle le Trésor voulait se prévaloir d’un privilège (C. Supr.,
21 juill. 2004, n° 896. – C. Supr., 9 mai 2007, n° 519).
Pour illustrer notre propos, supposons qu’un établissement
bancaire soit créancier hypothécaire d’une société X qui
s’est avérée défaillante et donc débitrice d’une somme Y.
Après la réalisation de l’hypothèque par la vente du bien
immeuble et si le prix de vente est supérieur ou égal à
Y, l’établissement bancaire pourra récupérer l’intégralité
de sa créance même si la société X a d’autres créanciers
chirographaires qui ont formulé des prétentions sur le bien,
en opérant par exemple des saisies conservatoires. Ainsi,
il n’y aura pas de distribution par contribution du prix de
vente. L’établissement bancaire prendra la somme Y et
les autres créanciers chirographaires se partageront, par
contribution, le reliquat.
44.  Effets à l’égard des tiers et droit de suite
Le droit de suite permet au créancier hypothécaire
de suivre le bien, immeuble ou meuble, dans quelques
mains qu’il se trouve qu’il soit propriétaire dudit bien
ou simplement détenteur d’un droit réel sur le bien
qui appartient alors à une autre personne. Ainsi, si le
débiteur défaillant décède, la banque prêteuse a le droit de
demander la réalisation de l’hypothèque qu’elle détient à
l’encontre des héritiers.
4. Réalisation de l’hypothèque
45.  Principe
L’article 214 de la loi n° 39-08 pose le principe selon lequel
le créancier titulaire d’un certificat spécial d’inscription
d’hypothèque, remis par le conservateur, est en droit
de demander la vente aux enchères publiques du bien
hypothéqué, si le débiteur ne paie pas à l’échéance.
46.  Procédure
Conformément à l’article 215, le créancier hypothécaire
doit, avant d’obtenir la vente judiciaire du bien hypothéqué,
adresser un commandement de payer au débiteur en lui
octroyant un délai de 15 jours pour ce faire.
Ce commandement de payer qui doit contenir le nom du
débiteur et la désignation du bien hypothéqué, doit être
également notifié au conservateur. Il produit les mêmes
effets qu’une saisie immobilière.
Si le débiteur ne répond pas favorablement au
commandement de payer, le créancier hypothécaire
demande à l’agent d’exécution du tribunal du ressort
duquel dépend le bien immeuble de procéder à une saisie-
exécution sur le bien. L’agent dresse un PV décrivant le
bien, prépare un cahier des charges et fixe une date pour la
vente.
Lorsque la vente est réalisée et après déduction des frais
y afférant, le créancier hypothécaire réclame la remise du
produit de la vente.
Enfin, il convient de préciser que la procédure peut se
heurter à des difficultés d’ordre pratique qui seront traitées
dans le cadre d’une autre synthèse.
B. NANTISSEMENT DU FONDS DE COMMERCE
ET NANTISSEMENT DE L’OUTILLAGE ET DU
MATÉRIEL D’ÉQUIPEMENT
47.  Généralités
Le nantissement du fonds de commerce et le nantissement
de l’outillage et du matériel obéissent aux règles de droit
commun contenues dans les articles 1170 et suivants du
DOC et aux règles spécifiques contenues dans le Code de
commerce.
L’article 1170 du DOC définit le nantissement comme étant
« un contrat par lequel le débiteur, ou un tiers agissant dans son
intérêt, affecte une chose mobilière ou immobilière ou un droit
incorporel à la garantie d’une obligation, et confère au créancier
le droit de se payer sur cette chose, par préférence à tous autres
créanciers, au cas où le débiteur manquerait à le satisfaire ».
Le nantissement du fonds de commerce et le nantissement
de l’outillage et du matériel sont tous deux des
nantissements sans dépossession.
Dans le nantissement du fonds de commerce, « la chose
mobilière » affectée en garantie est constituée par le fonds
de commerce avec ses éléments corporels et incorporels.
Le nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement
est placé par l’article 355 du Code de commerce dans le
contexte de garantie du paiement du prix d’acquisition au
vendeur dudit outillage ou matériel ou au remboursement
de celui qui a prêté les fonds nécessaires à son acquisition.
1. Nantissement du fonds de commerce
48.  Constitution de la garantie
L’acte de nantissement doit être enregistré et déposé au
secrétariat-greffe du tribunal dans le ressort duquel est
exploité le fonds ou le principal établissement du fonds.
Un extrait de cet acte est inscrit au registre de commerce.
L’intérêt de l’inscription est de rendre opposable aux tiers
le nantissement du fonds de commerce. Toutefois, cette
affirmation doit être nuancée, la présomption d’opposabilité
demeurant réfragable (C. Supr., 6 oct. 2004, n° 1078).
Les formalités et les modalités de l’inscription sont
détaillées aux articles 131 et suivants du Code de
commerce. On constate qu’un certain formalisme est
exigé et on le conçoit parfaitement parce que le fonds
de commerce constitue l’un des « gages » principaux des
autres créanciers. Il est nécessaire que la formation de la
garantie y afférant soit entourée de toutes les précautions
pour, d’une part, permettre au bénéficiaire de s’en prévaloir
et, d’autre part, offrir aux autres cocontractants du
propriétaire du fonds de commerce la possibilité d’être
informés de la situation du fonds.
49.  Effets de l’inscription du nantissement sur le
fonds de commerce
Lorsque l’inscription est effectuée conformément aux
articles 108 et 109 du Code de commerce, dans les
15 jours suivant la date de l’acte, le nantissement du fonds
de commerce produit ses effets entre les parties et à
l’égard des tiers.
Ainsi, à titre d’exemple, le débiteur nanti ne peut déplacer
son fonds de commerce nanti sans avoir prévenu le
créancier, sous peine de voir la créance garantie par le
nantissement devenir exigible.
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Par ailleurs, lorsque le fonds de commerce est établi dans
un local loué, le propriétaire des murs désirant poursuivre
la résiliation du bail doit notifier sa demande aux créanciers
nantis dûment inscrits. Cette obligation a été confirmée
par la jurisprudence à plusieurs occasions (V. notamment,
C. Supr., 25 juin 2003, n°802).
50.  Réalisation du nantissement sur le fonds de
commerce
Lorsque le débiteur s’avère défaillant, le créancier titulaire
d’un nantissement sur un fonds de commerce peut
demander la réalisation de sa garantie. Pour ce faire, il doit
tout d’abord adresser au débiteur une sommation de payer
et lui accorder un délai de huit jours pour s’acquitter de sa
dette. Cette exigence a été affirmée par la jurisprudence
(V. CAC Fès, 3 juin 2004, n° 685). À défaut, il peut saisir le
tribunal afin d’obtenir un jugement l’autorisant à procéder à
la vente du fonds de commerce nanti.
Ce jugement est notifié au débiteur et au créancier par
le secrétaire-greffier qui procède, en même temps, à la
publicité légale et ce, aux frais avancés du créancier.
L’avis de la mise aux enchères indique la date d’ouverture et
la durée des enchères et énonce les conditions de la vente.
Il est placardé à la porte principale de l’immeuble où le
fonds de commerce est situé, dans le cadre spécial réservé
aux affiches placé dans les locaux du tribunal et partout
enfin où apparaît l’opportunité d’un affichage. Il est, en
outre, inséré dans un journal d’annonces légales.
La date de la vente a lieu dans un délai de trente jours
à compter de la notification du jugement. Si, au jour et
à l’heure fixés pour la vente’ adjudication, le propriétaire
du fonds de commerce ne s’est pas libéré, l’agent chargé de
l’exécution procède à la vente.
2. Nantissement de l’outillage et du matériel
d’équipement
51.  Constitution de la garantie
Comme pour le nantissement du fonds de commerce,
un écrit (acte authentique ou sous seing privé) est exigé.
Les biens objets de la garantie doivent être énumérés avec
précision dans l’acte.
L’article 357 du Code de commerce impose explicitement la
formalité d’inscription en stipulant ce qui suit : « À peine de
nullité, le nantissement de l’outillage et du matériel d’équipement
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doit être inscrit dans le délai de vingt jours à compter de l’acte
constitutif. Le privilège en résultant s’établit par le seul fait de
l’inscription sur un registre spécial tenu au secrétariat-greffe du
tribunal dans le ressort duquel les biens nantis sont exploités ».
Les conditions de l’inscription sont similaires à celles
prévues pour le fonds de commerce. Elles sont détaillées
aux articles 358 et suivants.
52.  Effets du nantissement sur l’outillage et le
matériel d’équipement
À compter de l’inscription du nantissement, il est
fait interdiction au débiteur nanti qui n’a pas encore
payé l’outillage ou le matériel ou qui n’en a pas encore
remboursé le prêt ayant servi à l’acquisition de vendre à
l’amiable tout ou partie des biens objets de la garantie sans
le consentement du créancier.
Par ailleurs, si le débiteur s’avère défaillant, le créancier
nanti est privilégié par rapport aux autres créanciers
notamment à l’encontre de tout créancier hypothécaire,
et par préférence au privilège du trésor, au privilège de la
caisse nationale de sécurité sociale et des caisses de crédit
agricole, au privilège du vendeur du fonds de commerce à
l’exploitation duquel est affecté le bien grevé, ainsi qu’au
privilège du créancier nanti sur l’ ensemble dudit fonds, à
condition qu’il ait notifié auxdits créanciers une copie de
l’acte constatant le nantissement dans les deux mois de la
conclusion du nantissement.
53.  Réalisation du nantissement sur matériel et
l’outillage
La procédure de réalisation du nantissement sur le matériel
et l’outillage est sensiblement différente de celle prévue
pour le nantissement du fonds de commerce.
Ainsi, en cas de défaillance du débiteur, le créancier nanti
saisit le juge des référés (et non le tribunal) pour lui
demander de constater l’inexécution par le débiteur de ses
obligations et d’autoriser la vente des biens nantis. Plusieurs
ordonnances ont été rendues dans ce sens (V. à titre
d’exemple, Ord. prés., TC Rabat, 14 mars 2003, n° 244).
Le créancier nanti est payé directement sur le prix de
vente déduction faite des frais de vente. Si le produit de la
vente excède le montant des sommes dues, la différence
est consignée au secrétariat-greffe du tribunal pour qui
de droit. Dans le cas contraire, l’acquéreur reste débiteur
pour le surplus.
TEXTES DE RÉFÉRENCE
DOC, 12 août 1913 : BORM, 12 sept. 1913
L. n° 39-08, portant Code des droits réels, prom. : Da. n° 1-11-178, 22 nov. 2011 : BORM 24 nov. 2011
L. n° 15-95 formant Code de commerce, prom. : Da. n° 1-96-83, 1er août 1996

BIBLIOGRAPHIE
Ouvrages
Ph. Simler, Cautionnement et garanties autonomes : Litec 1999, n° 857.
M. Cabrillac et C. Mouly, Droit des sûretés : Litec 1990.
D. Legeais, Sûretés et garanties du crédit : LGDJ 1998.
Ph. Malaurie et L. Aynès, Droit civil : les sûretés et la publicité foncière, 8e éd. : Cujas 1997.
M. Charqi, Droit des sûretés du crédit : Collection Banque et Entreprise, 2007.

Thèses et mémoires
P. Ancel, Les sûretés personnelles non accessoires en droit français et en droit comparé : thèse Dijon 1981.
M. Sentissi, Les garanties autonomes au Maroc : Mémoire Master II, Université de Perpignan.

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