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À PROPOS DE LA RECHERCHE DE ULRIKE MAY

Sur dix-neuf patients en analyse chez Freud (1910-1920)


Renate Sachse

ERES | « Essaim »

2008/2 n° 21 | pages 187 à 194


ISSN 1287-258X
ISBN 9782749210025
Article disponible en ligne à l'adresse :
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http://www.cairn.info/revue-essaim-2008-2-page-187.htm
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Renate Sachse, « À propos de la recherche de Ulrike May. Sur dix-neuf patients en
analyse chez Freud (1910-1920) », Essaim 2008/2 (n° 21), p. 187-194.
DOI 10.3917/ess.021.0187
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À propos de la recherche de Ulrike May


Sur dix-neuf patients en analyse chez Freud
(1910-1920) 1

Renate Sachse 2

Ulrike May a pu prendre connaissance, parmi les nombreuses archives

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concernant l’œuvre de Freud, d’une nouvelle source jusque-là peu explo-
rée : des agendas couvrant une période de dix années et concernant des
patients que Freud eut en analyse entre 1910 et 1920. Dans ces agendas,
conservés au musée Freud de Londres, Freud prenait note chaque jour des
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analysants qu’il avait reçus.


Dans ce travail d’Ulrike May, qui a choisi de limiter sa recherche à dix-
neuf analysants dont on savait déjà publiquement qu’ils avaient été en ana-
lyse chez Freud, nous découvrons des informations sur la durée et le
rythme des analyses pratiquées par Freud 3.
Ulrike May donne tout d’abord une description minutieuse de l’aspect
de ces agendas : il s’agit d’agendas intégrés dans un annuaire destiné aux
médecins 4, des petits carnets au format DIN-A6 pour lesquels on pouvait
acheter des insertions pré-imprimées. Dans chacun de ces carnets, une

1. Ulrike May, Neunzehn Patienten in Analyse bei Freud (1910-1920). Teil I : Zur Dauer von Freuds
Anlaysen ; Teil II : Zur Frequenz von Freuds Analysen. (Dix-neuf patients en analyse chez Freud (1910-
1920) ; Première partie : Sur la durée des analyses chez Freud ; Deuxième partie : Sur la fréquence des ana-
lyses chez Freud), dans : Psyche, Zeitschrift für Psychoanalyse und ihre Anwendungen no 6 et no 7,
Klett-Cotta, Stuttgart, juin et juillet 2007, p. 590-625, première partie ; p. 686-709, deuxième partie
(en allemand).
2. Avec le regard de Sophie Aouillé et de Denise Lepeltier sur mon usage de la langue française.
3. Ulrike May est psychanalyste à Berlin. Son travail ici présenté n’est pas encore traduit en fran-
çais. La base de mon résumé est la version d’origine en allemand et je reprends beaucoup de son
texte. J’ai essayé de faire « une traduction très résumée ». J’étais bien sûr obligée de faire des rac-
courcis, des coupures, et par la suite quelques liaisons qui me semblaient nécessaires. Les réfé-
rences aux différents correspondants de Freud sont également extraites du texte d’Ulrike May.
4. Grubers Ärztliches Tages-Notizbuch.
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double page était prévue pour chaque mois 5. Sur la gauche de la page, se
trouvent – l’un au-dessous de l’autre – les noms des patients. À droite,
trente et une colonnes pour préciser quel jour le patient est vu, la dernière
colonne à droite de la page étant censée mentionner le montant des hono-
raires mensuels.
Freud indique chaque rendez-vous par un trait vertical dans la case du
jour correspondant, deux traits quand le patient a été reçu deux heures, un
trait et demi pour une heure et demie et ainsi de suite. Dans la case réser-
vée aux honoraires, il mentionne parfois combien d’heures en tout le
patient a été reçu dans le mois, mais jamais le montant auquel s’élèvent les
honoraires. La plupart du temps, il ne note que le nom de famille du
patient, les prénoms étant inscrits seulement s’il avait en analyse un autre
patient portant le même nom de famille. En dehors de ces indications,
Freud ne fait aucun autre commentaire.
Ulrike May s’est donc employée, par sa lecture minutieuse, à dégager
ce que peuvent nous apprendre ces petits carnets sur les dix ans de pra-

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tique analytique de Freud qu’ils recouvrent. Ils posent en effet beaucoup de
questions très intéressantes dont elle a tiré les fils l’un après l’autre. Elle a
d’abord pris une décision concernant la publication des noms de ces
patients suivis par Freud, choisissant, comme nous l’avons précisé plus
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haut, de ne pas révéler au public d’autres noms que ceux qui étaient déjà
connus. Elle a par ailleurs pris soin de recouper pour chacun, au moyen
d’autres sources, qu’ils étaient bien en analyse chez Freud et a pris comme
autre critère que le début et la fin de chaque analyse soient inclus dans les
dix années concernées. Le dernier des critères qu’elle s’est donnés est le
suivant : l’analysant devait être arrivé chez Freud comme patient et n’être
pas au moment de son analyse membre d’une association psychanaly-
tique 6.
Dix-neuf patients au total, dix femmes et neuf hommes, répondent à
ces différents critères. Ce sont par ordre d’apparition dans les agendas :
Sergueï Pankejeff (l’homme aux loups), Elfriede Hirschfeld, Victor v. Dirsz-
tay, Claire v. Wallentin-Metternich, Tatjana Nacht, Elma Pálos, Loe Kann,
Bruno Veneziani, Lucy Hoesch-Ernst, Karl Mayreder, Aranka Schwarcz,

5. Voir la reproduction dans Christfried Tögel, Sigmunds Freuds Praxis. Visiten und Ordinationen
– Psychoanalysen – Einnahmen. Psyche – Z Psychoanal 60, 2006 (en allemand).
6. Un autre travail d’Ulrike May porte sur les analyses de dix-sept analystes suivis par Freud dont
les traces se trouvent dans le même agenda de patients entre 1910 et 1920. Il s’agit des analystes
suivants : Van Emden, Spitz, Stegmann, Oberholzer, Jekels, Sokolnicka, Ferenczi, Révész, Von
Freund, Hollós, Helene Deutsch, Dubovitz, Forsyth, Daly, Rickmann, Lévy, Stern. Voir aussi :
Freuds Patientenkalender : Siebzehn Analytiker in Analyse bei Freud (1910-1920), en : Luzifer-
Amor, Zeitschrift zur Geschichte der Psychoanalyse, Heft 37, 2006, p. 43-97.
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Rózsi v. Freund, Arthur Fischer-Colbrie, Rudolf Kriser, Georgina Weiss,


Margarete Rie, Julius Hering, Bieber (prénom inconnu), George M. Young.

Comment se déroulait une journée de travail de Freud ?

Entre 1910 et 1914, Freud a vu entre neuf et onze patients par jour. Il
travaillait du lundi au samedi, ne donnant que très rarement des rendez-
vous le dimanche. Son année de travail était organisée de façon très pré-
cise, commençant le 1er octobre pour se terminer au début du mois de
juillet de l’année suivante, ce qui représentait neuf mois de travail en
continu. Il ne recevait pas les 25 et 26 décembre ni le 1er janvier, ainsi qu’un
ou deux jours autour de Pâques et de la Pentecôte. Le 24 décembre et la
Saint-Sylvestre étaient en revanche des jours de travail ordinaires. Ses
vacances d’été duraient de mi-juillet jusqu’à fin septembre.

Quelle était la clientèle de Freud ?

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Cent trente femmes et hommes sont venus voir Freud pour un traite-
ment entre 1910 et 1920. Certains d’entre eux ont eu un seul et unique ren-
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dez-vous. D’autres sont restés des semaines, des mois, voire des années.
Seulement dix-sept de ces personnes étaient des analystes. Ulrike May en
conclut que Freud, pendant les dix ans en question, a une pratique analy-
tique classique, alors que dans les années suivantes, il ne prendra essen-
tiellement en analyse que des analystes.

Les dix-neuf analyses

Ulrike May présente les analyses l’une après l’autre par ordre de
durée, en commençant par la plus brève. Les résumés de ces dix-neuf ana-
lyses sont d’une grande richesse de détails pour chaque patient. Nous
mentionnerons ici quelques-unes de ces indications :

Claire Wallentin-Metternich (1878-1934)

Une actrice d’origine aristocratique dont l’analyse s’est terminée après


deux mois et dont Freud a regretté la courte durée.
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Karl Mayreder (1856-1935)

Un patient présentant une forte dépression qui a fait dix semaines


d’analyse « sans résultat thérapeutique visible 7 ». Le patient était archi-
tecte, fondateur et professeur de la chaire d’urbanisme à l’université de
Vienne. Il semble que sa cure ait été interrompue du fait de l’intervention
de son épouse, Rosa Mayreder.

Julius Hering

Son analyse est connue par la correspondance Freud-Abraham. Selon


Freud, ce patient était « un vrai fanatique, avec une psychose de persécu-
tion » et il ajoute : « Le commencement de mon influence sur l’analysant a
échoué quand l’argent pour me payer lui a manqué 8. » Hering avait six
heures d’analyse par semaine et a eu en tout soixante-cinq heures d’ana-
lyse.

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Elma Pálos (1887-1970)

Elle a été envoyée chez Freud par Ferenczi parce que celui-ci était
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tombé amoureux de sa patiente et ne pouvait donc plus continuer l’ana-


lyse 9. Son analyse a duré en tout soixante-dix-sept heures à raison de six
heures par semaine entre le 8 janvier 1912 et le 5 avril 1912.

George M.Young (1882-1959)

Le patient, un diplomate, était arrivé chez Freud adressé par Jones à


cause d’une érythrophobie et de problèmes sexuels 10. Son analyse – de
trois à six heures par semaine – a compté au total soixante-treize heures et
a duré jusqu’à ce que le patient soit envoyé sur un autre poste diploma-
tique, alors que son analyse n’était pas terminée.

Lucy Hoesch-Ernst (née en 1874 ?)

La patiente est adressée à Freud également par Jones qui la décrit


comme une « very troublesome lady », « a german psychologist who has read

7. Sigmund Freud-Karl Abraham, Correspondance complète, 1907-1925, Paris, Gallimard 2006.


8. Ibid.
9. Sigmund Freud-Sandor Ferenczi, Correspondance, vol. 1 (1908-1914), Paris, Calmann-Lévy, 1992.
10. Sigmund Freud-Ernest Jones, Correspondance (1908-1939), Paris, PUF, 1998.
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most of the psa.literature, and is sure that she knows everything 11… L’analyse a
duré seize semaines au total. Freud parle d’elle à Jones en disant qu’elle est
« a heavy burdon ».

Georgina Weiss (née en 1898)

Elle est arrivée chez Freud envoyée par son frère, le psychanalyste ita-
lien Eduardo Weiss. Elle apparaît dans l’agenda de Freud à partir de jan-
vier 1918. Son analyse a duré en tout cent vingt-huit heures. En raison de
la guerre, il ne lui était plus possible de faire le voyage entre Trieste et
Vienne pour continuer son analyse.

Tatjana Tamara Nacht (morte en 1934)

Son analyse est répertoriée dans la Correspondance Freud-Eitingon 12. La


patiente souffrait d’une grave névrose obsessionnelle. Son analyse chez

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Freud a duré cent cinquante et une heures et Freud a jugé cette analyse trop
courte. Plus tard elle a aussi été la patiente d’Abraham.

Bruno Veneziani (1890-1952)


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Le patient a eu cent quatre-vingt-sept heures d’analyse, à raison de


quatre à sept heures par semaine. Freud, à propos de ce patient, écrit à
Abraham qu’il était un « méchant cas », « énigmatique 13 ». Freud a refusé
plus tard un deuxième traitement du patient, ne le jugeant pas apte à l’ana-
lyse. Ce patient avait des problèmes de drogue (Suchtprobleme).

Margarete Rie (1899-1986)

La patiente était la fille d’Oskar Rie, l’ami de Freud et médecin géné-


raliste de la famille Freud et des enfants. L’analyse de Margarete Rie, qui
avait alors 19 ans, commence en octobre 1918, à raison de six séances par
semaine. Son analyse a duré en tout deux cent douze heures et s’est termi-
née en juin 1919.

11. Ibid.
12. Sigmund Freud-Max Eitingon, Briefwechsel 1906-1939, Diskord, 2004 (en allemand).
13. Sigmund Freud-Karl Abraham, Correspondance complète 1907-1925, Paris, Gallimard, 2006.
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Bieber

Ce patient était un dentiste venu des États-Unis et envoyé chez Freud


par Jones. Il souffrait d’un « vrai délire de jalousie 14 ». Bieber a fait deux
tranches d’analyse, une première de deux cent trois heures, à raison d’une
heure par jour. Quelques mois plus tard le patient a fait une rechute et repris
l’analyse chez Freud pour une autre tranche de cent trente-quatre heures.
Bieber est le deuxième ou troisième patient psychotique analysé par Freud.

Rózsi v. Freund (née en 1887)

La patiente est l’épouse d’Anton Freund et elle arrive chez Freud


envoyée par Ferenczi 15. Son analyse a comporté deux tranches, la première
de trois cent quatre-vingt-dix-neuf heures et la deuxième de quarante-deux
heures. Freud écrira plus tard dans une lettre à Anna qu’elle était un « cas
très compliqué sinon intraitable 16 ».

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Aranka Schwarcz (née en 1895)

La patiente, d’origine hongroise, est venue chez Freud envoyée égale-


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ment par Ferenczi 17. Elle a eu d’abord cent quatre-vingt-trois heures d’ana-
lyse et a été ensuite envoyée une deuxième fois à Freud, toujours par
Ferenczi, pour une autre tranche qui a duré cent vingt-sept heures.

Arthur Fischer-Colbrie (1895-1968)

Lorsqu’il est arrivé chez Freud, le patient était étudiant en littérature


allemande et devint plus tard un poète reconnu. Il a d’abord eu cent
soixante-dix-neuf heures d’analyse, à raison de six heures par semaine, la
guerre venant interrompre son analyse. Sa deuxième tranche, à partir de
1919, a duré cent quarante heures et une particularité de cette analyse est
que le patient a réussi à convaincre Freud de le tutoyer.

Louise (« Loe ») Dorothea Kann (1882-1944)

Le cas de cette patiente, une Hollandaise très riche, est connu par la
correspondance entre Freud et Jones. Il y a un échange d’une cinquantaine

14. Sigmund Freud-Ernest Jones, Correspondance (1908-1939), Paris, PUF, 1998.


15. Sigmund Freud-Sandor Ferenczi, Correspondance, vol. 2 (1914-1919), Paris, Calmann-Lévy, 1992.
16. Sigmund Freud-Anna Freud, Briefwechsel 1904-1938, Fischer, 2006 (en allemand).
17. Sigmund Freud-Sandor Ferenczi, Correspondance, vol. 2 (1914-1919), Paris, Calmann-Lévy, 1992.
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de lettres sur l’analyse de « Loe » Kann qui était liée à Jones et s’appelait
également « Jones ». Elle apparaît d’ailleurs sous ce nom dans l’agenda des
patients. Freud met fin à son analyse après trois cent quatre-vingt-douze
heures.

Rudolf Kriser (né en 1885)

Le patient était viennois et son analyse a duré quatre cent cinquante-


sept heures. Rudolf Kriser était un artiste et vers la fin de son analyse il a
dessiné un portrait de Freud. « Je me fais dessiner en ce moment par un
patient rendu à son art… », écrit Freud à Abraham 18.

Victor v. Dirsztay (1884-1935)

Ce patient a eu probablement l’analyse la plus longue parmi l’en-


semble des patients mentionnés dans cette recherche, avec mille quatre

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cent quatre-vingt-neuf heures, voire mille huit cents heures au total,
comme l’indique Ulrike May. Il subsiste encore un doute sur le fait que les
trois tranches se référeraient à la même personne dans l’agenda de Freud
ou à d’autres membres de la même famille. Le patient était aristocrate et
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écrivain. Kokoschka, qui avait fait des lithographies pour deux de ses
livres, écrit sur lui dans ses Mémoires : « Même Freud qu’il a consulté pen-
dant des années ne pouvait pas le guérir 19. » Le patient a terminé sa vie de
la même manière tragique que les héros de ses livres : le 7 novembre 1935,
la Wiener Zeitung 20 publie l’information du double suicide de Victor v.
Dirsztay et son ex-épouse.

Sergueï Pankejeff (1887-1979)

Ce patient est « l’homme aux loups » et son analyse a été écrite par
Freud 21, Mack-Brunswick 22 et par le patient lui-même 23. Ulrike May cal-
cule un total de mille deux cent quatre-vingts heures pour cette analyse.
L’analyse commence en 1910, se termine en 1914 et sera reprise entre 1919
et 1920. Elle reprend une dernière fois en 1926.

18. Sigmund Freud-Karl Abraham, Correspondance complète 1907-1925, Paris, Gallimard, 2006.
19. Oskar Kokoschka, Mein Leben, München, Bruckmann, 1971 (en allemand).
20. Wiener Zeitung n° 308, 1935 (en allemand).
21. Sigmund Freud, Aus der Geschichte einer infantilen Neurose, GW12 (p. 27-157). À partir de l’histoire
d’une névrose infantile ; OCP 13, Paris, PUF, p. 1-118.
22. Ruth Mack-Brunswick, Ein Nachtrag zu Freuds Geschichte einer infantilen Neurose (1928), dans
M. Gardiner, 1971 (en allemand).
23. Sergueï Pankejeff, Meine Kindheitserinnerungen, ibid.
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Elfriede Hirschfeld (née en 1873 ?)

Cette patiente venait de Francfort et a été envoyée à Freud par Jung en


1908. Freud parle de son analyse dans sa correspondance avec Jung, Pfis-
ter, Binswanger et Abraham. Son nom est connu par la correspondance
avec Ferenczi 24 et la description détaillée de Falzeder 25. La durée de l’ana-
lyse est d’environ mille six cents heures sur une période de six ans. Une
lettre de Freud à Binswanger commence par une description de la
patiente : « Elle souffre de la névrose obsessionnelle la plus grave, …
presque entièrement analysée… incurable… analytiquement impossible
pour qui que ce soit 26. »

Ulrike May résume ainsi le résultat de sa recherche :


« Concernant la durée des analyses de ses patients, Freud se comportait de manière
anti-dogmatique et libre. Il était réaliste, pragmatique et homme de science. La com-
binaison de ces traits est caractéristique de son activité analytique : il faisait ce qui

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était possible et essayait en même temps de tirer un enseignement scientifique de sa
pratique. Il assurait son activité de psychanalyste au gré des patients qui arrivaient
à son cabinet, s’adaptant aux possibilités psychiques de chacun et, à l’intérieur de ce
cadre, il poursuivait, dans la mesure où cela lui était possible, ses objectifs scienti-
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fiques. La science devait se soumettre à la pratique, et la pratique aux possibilités


intérieures et extérieures des analysants 27. »

24. Sigmund Freud-Sandor Ferenczi, Correspondance, vol. 1 (1908-1914), Paris, Calmann-Lévy, 1992.
25. Ernst Falzeder, Meine Grosspatienten, meine Hauptplage. Ein bisher unbeachteter Fall Freuds und die
Folgen. Jahresbuch der Psychoanalyse 34, 1995 (en allemand).
26. Correspondance Freud-Binswanger, Frankfurt/M., Fischer, 1992 (en allemand), p. 148.
27. Voir aussi p. 624 de Psyche 6, 2007, op. cit. Ulrike May annonce ici aussi la deuxième partie de sa
recherche sur la fréquence des analyses chez Freud à propos des mêmes dix-neuf patients. Voir
aussi : Psyche, Zeitschrift für Psychoanalyse und ihre Anwendungen, n° 7, Klett-Cotta, Stuttgart, juillet
2007, p. 686-709 (en allemand). Elle donne ses coordonnées : Taunusstr.12, 12161 Berlin, Alle-
magne, courriel : may.tolzman@t-online.de

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