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América : Cahiers du CRICCAL

Pour une définition du conte : entretiens avec quatre écrivains


argentins contemporains
Jean-Claude Villegas

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Villegas Jean-Claude. Pour une définition du conte : entretiens avec quatre écrivains argentins contemporains. In: América :
Cahiers du CRICCAL, n°2, 1987. Techniques narratives et représentations du monde dans le conte latino-américain. pp. 113-
126;

doi : https://doi.org/10.3406/ameri.1987.906

https://www.persee.fr/doc/ameri_0982-9237_1987_num_2_1_906

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/ / V

POUR UNE DEFINITION DU CONTE :


ENTRETIENS AVEC
QUATRE ECRIVAINS ARGENTINS CONTEMPORAINS.

Jean-Claude VILLEGAS
Université de Dijon
CRICCAL

Qu'est-ce qu'un conte ? Telle est la question que j'ai


posée lors d'un récent séjour à Buenos Aires à quatre
écrivains argentins reconnus, espérant trouver auprès d'eux
une possible définition de ce genre que Julio Cortazar
qualifiait de "si difficile à définir, si fuyant, dans ses
multiples aspects antagoniques, et finalement si secret,
replié sur lui-même, colimaçon du langage, frère mystérieux
de la poésie, dans une autre dimension du temps
littéraire" (1). Qu'est-ce qu'un conte, donc, et qu'est-ce
qu'une nouvelle ?
On s'apercevra à la lecture des réponses ici
reproduites qu'aucune réponse définitive ne nous a été apportée. Le
linguiste ou l'écrivain, le théoricien du langage ou le
praticien se heurteront toujours avec embarras a toute tentative
de définition rigoureuse et les dictionnaires ne seront dans le
cas présent que d'un bien maigre secours (2). Les quatre
auteurs interrogés coïncident sur quelques points essentiels :
précision, brièveté, unité de ton et d'effet. Mais ils ne font
là que reproduire les postulats fondamentaux du genre
clairement formulés avant eux par Poë, Tchekov, Quiroga dans le
domaine hispano-américain, que tous revendiquent comme
maître incontesté du genre. Liliana Heker (3), auteur de
plusieurs recueils de contes et co-rédactrice avec Abelardo
Castillo de la revue El Ornitorrinco illustre clairement ce
point de vue et se garde bien d'avancer une définition
Jean-Claude VILLEGAS

précise de la nouvelle "à la française", par opposition (ou


comparaison) au conte. Elle se contente de mettre en
lumière l'opposition conte/roman, et situe notre genre
"national" -Maupassant oblige- à un niveau intermédiaire. Autre
tentative, non moins partielle, celle d'Isodoro Blaisten (4) qui
s'essaye à travers quelques titres à une définition par
l'exemple. Ricardo Piglia (5), romancier, critique et
professeur à l'Université de Buenos Aires apporte du point de vue
formel, mais sans la démontrer, une idée intéressante : celle
de la présence dans tout conte de deux récits parallèles et
convergeant vers leur final commun. Hypothèse qu'il serait
fort intéressant de vérifier sur les textes de Quiroga, Rulfo
et Bareiro Saguier. Abelardo Castillo, lors de notre entretien,
puis dans un article paru dans le quotidien Clarin qu'il a bien
voulu nous confier et que nous reproduirons à la suite, met
l'accent sur la prédilection des auteurs argentins, mais aussi
américains (du Nord et du Sud) pour ce genre concis, précis,
rigoureux, et laisse ainsi ouverte une question de premier
plan : cette prédilection pour le genre ne serait-elle pas
suscitée par une autre représentation du monde de ces pays
neufs héritiers d'une autre conception de l'histoire et du
temps ? La question temporelle en effet semble être au
coeur de la définition du conte. De sa forme la plus ancienne
et traditionnelle à ses avatars les plus avant-gardistes, le
conte reste avant tout le récit d'un passé révolu. Le roman,
au contraire, participe d'un présent prospectif (je n'entends
pas par là bien évidemment l'emploi des temps opéré tout au
long du récit mais bien la perspective narrative choisie par
le créateur de la fiction), présent du temps partagé au fil de
la lecture avec les protagonistes d'une intrigue ouverte et en
évolution.
L'auteur d'un conte opère très précisément à l'inverse
du romancier et pose le dénouement de son récit dès les
premiers mots qu'il écrit. Il est en cela un "créateur
omniscient" et il est aidé dans sa tâche par la concision de
son propos, par le fait qu'il se limite à raconter une
anecdote, une histoire, et une seule (voire, comme le suggère
R. Piglia deux histoires parallèles qui n'en font cependant
qu'une et se fondent en leurs dénouements). C'est à ce prix
que sont obtenues tension et unité d'effet, postulats
essentiels du conte chez Poë et Quiroga notamment, et toujours
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 115

revendiqués par nos auteurs d'aujourd'hui.


Le romancier à l'opposé de l'auteur d'un conte,
construit donc sa fiction dans une perspective temporelle ouverte
et qui est toujours pour l'auteur de la fiction comme pour
son lecteur celle d'un présent, celui de la propre narration
ouverte à une infinité de jeux temporels : distorsion de
l'instant, flashbacks, prospection dans un futur lointain ou
simplement suivi linéaire d'une intrigue de son
commencement jusqu'à son dénouement. Libéré donc de cette
contrainte temporelle, des lois de la vraisemblance, de l'obligation de
maintenir une tension narrative et une unité d'effet, il
navigue au fil des pages en toute liberté créatrice mais, en
contrepartie, il n'est pas toujours maître de son intrigue et
des situations qu'il a su créer et cède parfois à la
digression : ses personnages ou parfois certains faits finissent par
s'imposer d'eux-mêmes et viennent modifier le propos
narratif initial du créateur.
Différence de conception, autre technique d'écriture,
mais aussi attitude de lecture bien distincte. Un conte ne
peut se lire comme un roman -et peut-être faut-il voir dans
une pratique et une formation littéraire particulière, ou
simplement un goût partagé d'un public donné, l'apparition
massive du genre à une époque ou dans un lieu donné-. Le
lecteur de roman se laisse mener par l'intrigue et les
personnages et partage avec eux ce même espace temporel
dont il fixe lui-même les limites -de quelques heures à
quelques jours ou quelques semaines, selon sa rapidité de
lecture et son intérêt. Un roman inachevé peut rester le
récit d'une tranche de vie, et s'éclairer d'un sens. Un conte
inachevé n'a pas de sens. Comme le rappelle clairement
Blaisten, il doit être lu d'un trait parce que tout est mis en
oeuvre par le créateur pour susciter cet intérêt de la part de
son lecteur, provoquer tension et attention. Un conte ne
s'éclaire qu'en son dénouement, parfois même dans une
relecture, comme le revendiquait Borges. Confirmation
encore, au niveau de la lecture, de mon propos d'il y a quelques
lignes : le conte tient toujours d'un passé, celui-ci du fait
déjà réalisé et déjà connu dans le cas d'une relecture.
Toute tentative de définition du conte doit prendre en
compte à mon sens ce parti pris narratif initial, parti pris
clairement accepté par le lecteur comme un jeu de lecture-
116 Jean-Claude VILLEGAS

écriture. En ce sens la nouvelle à la française, qui fonctionne


comme un regard prospectif posé sur une (courte) intrigue à
suivre relève bien plus, comme le soulignent Heker et
Castillo, du domaine du roman que de celui du conte. La
nouvelle nous montre une tranche de vie tandis que le conte
démontre un fait déjà réalisé dans l'antériorité du récit. Il
est intéressant de noter du reste que pour désigner
clairement ces genres, d'une langue à l'autre un mot nous fait
défaut. Conte ne suffit pas à lui seul à désigner le cuento
latino-américain tandis qu'il manque à la langue espagnole le
mot nouvelle, et le recours à l'adjectif est le plus souvent
indispensable : conte extraordinaire, fantastique, policier,
novela jorta. Tout simplement parce que ces termes
désignent respectivement un genre qui a connu à différentes
époques et d'un continent à l'autre, un essor particulier.
L'hypothèse d'Abelardo Castillo qui parle actuellement de
"cuento nacional" ou "americano" me semble à cet égard
pleinement fondée.
"Cuento americano", donc, qui prend modèle du récit
traditionnel, qui est à la fois la forme la plus ancienne et la
plus neuve, soulignent nos auteurs interrogés : "II était une
fois". Et l'auteur de conte devient désormais, précise Blais-
ten, celui qui fait le compte de son conte. Le conte dans son
sens premier, lié à la mesure du temps : computus, le temps
écoulé, révolu, fondement même du récit et non seulement le
fait nouveau novus, le fait étrange et singulier cher à
Cervantes, "eZ extrano caso", rapporté dans ses Nouvelles
exemplaires. Parce que toujours et encore nous devons nous
situer dans cette perspective d'un passé absolu. D'où le fait
que le conte relève d'une poétique particulière, d'un système
de récurrences, avec ses règles propres, indéfinissables et
pourtant reconnues par chacun des auteurs interrogés et qui
toutes découlent de ce choix de perspective narrative.
Règles, procédés, "trucs" clairement codifiés avant eux et non
sans une pointe d'ironie par Horacio Quiroga, notamment
dans quelques articles parus dans la presse de son temps (7).
Mais au-delà de ce jeu d'écriture, il reste à nous interroger
sur les raisons de cette prédilection pour une forme à la fois
concise et épurée ("depurada de ripios", dit Quiroga),
enchevêtrée et multiple, née d'un continent neuf, en proie à une
nature omniprésente, féroce et obsédante, qui resurgit com-
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 117

me un leitmotiv au fil de ces récits, et d'une Histoire, le


temps de l'homme, toujours à écrire.

/Que es un cuento ?

Ricardo PIGLIA : (Entretien du 8 septembre 1986).

"Yo creo que desde el punto de vista técnico uno


puede tomar como ejemplo una anécdota que escribe Chejov
en un diario de notas : alguien va a Monte-Carlo y se
engancha en una partida, gana una buena cantidad de dinero,
va a su casa y se suicida. Esa es la idea del cuento de
Chejov. Yo creo que ahf se puede ver bien como funciona un
cuento. Por un lado altéra primeramente la logica estereoti-
pada que serfa que alguien pierde y se suicida. Y por otro
lado me parece que ahf se ve bien lo que para mf es el
elemento central del relato clasico : siempre se cuentan dos
historias. Hay una historia uno, digamos, que actda en la
superficie del texto y que serfa en este caso el relato del
juego. Y después hay otra que se encuentra cifrada, que es la
historia del suicidio. Y el final es la aparicion de la historia
dos en primer piano.
La hipdtesis séria pues que hay siempre dos historias,
una de las cuales se encuentra cifrada y que el final
sorpresivo del cuento no es sino la aparicion de la segunda
historia en el primer piano.
Uno puede ver entonces la historia del cuento como
una historia donde la historia dos no pasa al primer piano de
un modo tan directo, como por ejemplo Hemingway. La
teoria del iceberg serfa una teorfa donde la historia dos esta
tan cifrada que no emerge al primer piano en el final como
el cuento clâsico de Poe, pero no obstante tiene que estar la
historia dos dentro del relato dandole tension. En 'El rfo de
dos corazones1 por ejemplo, que es una historia de pesca, se
cuentan muy cuidadosamente todos los elementos con los
cuales se construye un d'à de pesca. Pero en realidad esta
todo puesto de un modo muy obsesivo porque -vos te vas
enterando de un modo muy sutil- el protagonista acaba de
llegar de la guerra y esta totalmente alterado y casi sicotico
118 3ean-Claude VILLEGAS

por las experiencias que ha pasado. Esta historia casi no se


cuenta en el relato de Hemingway pero lo que pasa es que si
esa historia funciona, es que todo el relato tiene la tension
de alguien que esta luchando contra la locura, y por eso la
minuciosidad con que se cuentan hechos triviales. Ahf podna
encontrar uno el movimiento de transformaciôn del cuento
moderno, que no tiene historia sorpresiva al final, donde la
historia dos esta présente muy elusivamente. En Borges esto
esta muy claro. Yo creo que en Borges la historia uno es
siempre un género y la historia dos es siempre la misma :
una historia de repeticiones, con dobles y laberintos. En
Quiroga, en 'La Gallina degollada', por ejemplo, esta la
historia de la sucesion de los hijos minusvalidos por un lado,
y la historia de la otra hija, sana, que va por abajo y termina
con muerte. Pero enfin, eso séria una hipo'tesis para
verificar".

Liliana HEKER : (Entretien du 4 septembre 1986)

"Para que haya un cuento, se tiene que contar algo.


No hay cuento si no se cuenta algo aunque sea mediante un
monolo'go interior. Pero aquello que realmente le da rigor al
cuento es la unidad de efecto. El cuento siempre apunta a un
unico efecto, a diferencia de la novela y del poema. Eso no
quiere decir que a veces no se vincule el efecto con el final
-en Castillo eso si da- vincula siempre el efecto con el final
del cuento. Yo, no. Yo creo que algunos cuentos, ciertos
cuentos son como una especie de embudo hacia donde todo
converge y el cuento viene como amenazado hacia el final.
Hay otros cuentos en los que el efecto va dandose como una
especie de acumulaci6n. En un cuento como 'Los Asesinos',
uno siente que hay una unidad de efecto. Todo apunta a esa
especie de violencia que nunca se realiza. Podria decir que
es un efecto desparramado : no ocurre nada pero uno siente
que todo puede ocurrir. Pero también es un efecto unico.
Tanto el dialogo primero con los dos matones, como el
diâlogo al final con el negro, producen ese efecto unico. De
cualquier modo el final es por supuesto fundamental en el
cuento pero no necesariamente es la condensacion de algo. El
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 119

final de 'Los asesinos1 podrfa ser otra frase.


Y esa es la diferencia entre el cuento y la novela.
Cortazar decia que la novela gana por puntos y el cuento
gana por knock out. Y es cierto. En la novela todo se da por
acumulacidn, se va dando un mundo. Uno convive con la
novela, pero en cambio el cuento se tiene que leer hasta
terminarlo porque uno esta buscando que se le esta contando.
Chejov decia definiendo el cuento que cuando en un cuento
hay una pistola cargada en el primer renglon, el tiro tiene
que sonar al final. De alguna manera eso es lo que define el
cuento. Si la novela admite digresiones, el cuento no.
A eso aglutinaria ciertas carecterfsticas del cuento :
una es la extension. Nadie puede decir que un cuento tiene
que tener 15 paginas como maximo, sin embargo este efecto
dnico esta limitando la extension. Luego viene el rigor que
debe tener un cuento, lo que decfa antes sobre las
digresiones. Y definiria el final : una vez que uno termina eso, no
puede seguir con otra cosa porque ya la tension del lector
acaba.
Una "nouvelle" esta a caballo para mi entre el cuento
y la novela. La "nouvelle" muchas veces tiene, no el efecto
dnico en el sentido en que puede tenerlo el cuento pero casi
se aproxima a esa unidad. Muchas veces también se puede
leer la nouvelle de una sentada y en general tampoco tiene
digresiones. Sin embargo hay necesariamente un tono mas
parejo que lo aproxima a la novela. Pero ya creo que esta
estructurada casi como un cuento. Participa un poco de los
dos géneros pero tiene mucho del cuento.
No todo relato es un cuento por fin, pero un cuento
puede utilizar las técnicas del relato, que es lo que hace
Hemingway. Sin embargo si uno utiliza esa técnica del
relato, creo que hay cierta premeditacion en el final de un
relato que hace que sea un cuento. En ese sentido creo que
no hay, como se dice comunmente, cuento de final abierto y
cuentos de final cerrado. Desde el punto de vista formal,
todo cuento tiene un final cerrado. Esa situacio'n que se
interrumpe como casualmente esta interrumpida con cierta
habilidad."
120 Jean-Claude VILLEGAS

Isodoro BLAISTEIN : (Entretien du 8 septembre 1986).

"Définir el cuento es muy dificil y yo pienso que hay


tantas teonas del cuento como escritores hay. Cada cuentis-
ta casi tiene una teorfa. Entonces serfa interesante de ver
aquellos puntos de contacto entre los grandes maestros, ver
como han definido el cuento, para ver ddnde se verifica la
identidad de la opinion. Una es indudablemente la brevedad.
Un cuento no puede tener 100 paginas, ya no es un cuento.
Hay cuentos muy largos como por ejempio Bola de sebo de
Maupassant, que para rm es un cuento, y un cuento bastante
largo. Incluso Mademoiselle Fifi, dir'a yo, no es una
"nouvelle'1. No obstante Sombras suele vestir de José Bianco,
ya es, creo yo, una "nouvelle". Pero volviendo a la definiciôYi.
Tenemos la definicio'n de Poe que de algun modo sigue siendo
valida : un cuento tiene que ser escrito de una sola sentada,
es decir que no se puede interrumpir la lectura en el lector.
Desde la primera palabra hasta el final tiene que haber un
hilo conductor. Yo creo que en algunos momentos y dado el
cuento actual, sigue siendo valida esta definicion. Quiroga
decia que es una flécha que sale del arco y va al bianco y
sabemos que la flécha que se desvia no da en el bianco. O
sea que no se puede cambiar de objetivo. El cuento no
permite cambiar de caballo a mitad de rfo. Yo lo he
intentado. Porque como yo lo rfnico que hago son cuentos,
traté de ver todas las posibilidades del cuento, desde inven-
tar el anticuento. Y me di cuenta que lo mas dificil sigue
siendo hacer un cuento clasico. Habia una vez, ese principio
que tiene valor de conjuro... Hay también una teoria del
comienzo del cuento : las primeras palabras del cuento te
van a marcar todo lo que viene después. Por ejempio en
'Hombre de la esquina rosada', vos decfs "A mi tan luego
venir a hablarme de Francisco Real..." donde esta dado todo
el cuento. A mi me intereso mucho también contar el final
de entrada, como lo hice por ejempio en 'El Tio Facundo'. Y
me di cuenta de que el cuento es un género en algun sentido
tan ngido como lo es el soneto. Hay ciertas leyes misteriosas
del cuento que se siguen y se tienen que mantener. En este
sentido creo que es un género bastante rebelde, bastante
diffcil, y que exige una gran humildad del autor. No podés
hacerte el loco con el cuento. En definitiva el cuento no se
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 121

aleja de las premisas fundamentales.


Bosch decia que contar un cuento es llevar cuenta del
cuento y que etimoldgicamente viene de la rafz latina
contador. El que cuenta lleva la cuenta de lo que esta
contando. Por eso es un género tan diffcil, con un equilibrio
muy delicado porque, en cualquier momento en una novela, si
vos te salfs de un capftulo, ma's o menos pasa, pero en el
cuento no. Me parece una buena definicion del cuentista :
aquel que lleva la cuenta de lo que esta contando. Mas la
brevedad. Otra caracterfstica por fin, es que no podés poner
una gran cantidad de personajes. Yo lo intenté y puse 33
personajes en un cuento 'Carroza y reina1. Y entonces no
pude entrar a définir los personajes que funcionan como el
coro griego y s<5lo quedan definidos en sus dialogos.
Después hay que distinguir un relato de un cuento. Yo
diria como aproximacion que un relato es aquello que tiene
un mero ribete de anécdota, que no se apunta a la sorpresa
final, o al final inesperado, o al final abierto, o al final
cerrado. Por ejemplo Pavese. Quien podrfa participar de
ambas cosas entre el relato y el cuento, por ejemplo, con
descripciones importantes dentro del cuento, serfa Dylan
Thomas. Por lo demas técnica mas, técnica menos, yo creo
que no se puede uno alejar de las grandes premisas que nos
han dejado los maestros. El cuento es econc5mico : no se
puede poner una palabra impunemente, tampoco se puede
hacer una acotacion cuando no hace falta. Y otra cosa que
dicen los maestros y que a mî me parece valida es que el
comienzo del cuento tiene que ser factico. El personaje tiene
que estar en accidn, las descripciones tienen que ser breves.
'A la dériva' de Quiroga apunta k o 5 cosas y ya esta la
descripcio'n. No podés hacer como Victor Hugo que te
describia todas las alcantarillas de Paris, desviando la accion.
En cuanto al final, hay mucha gente que opina que el
cuento tiene que ser totalmente sorpresivo. A mi me interesa
cierto tipo de ambiguedad perversa y ciertos desafios que yo
mismo me propongo cuando inicio el cuento, como contar el
principio de entrada, yo mismo cortarme todos los caminos
que me podnan dar la facilidad.
122 3ean-Claude VILLEGAS

Alebardo CASTILLO : (Entretien du 1er septembre 1986).

"El género cuento en la Argentina, a diferencia de


Francia es terriblemente significativo, es casi la literatura
argentina. En Francia el cuento es un género casi desconoci-
do. En cambio en Francia hay un género, la "nouvelle", que
nosotros los Argentinos casi desconocemos. Por alguna razon,
que no me voy a poner a explicar.
La "nouvelle" es un género a caballo entre la novela y
el cuento. En la "nouvelle" no se respetan para nada aquellas
reglas basicas del cuento definidas por Poe. De allf que
Maupassant y Camus sean como el modelo del género. En la
Argentina, el cuento mas largo que se dio y que mantiene el
ritmo interno del cuento es 'El Persiguidor1 de Cortazar. Es
un cuento que es muy extenso pero que por su ritmo interno,
por la tension como lo llamarfa Poe, y por la suma de los
efectos parciales que se van uniendo hacia el efecto final es
técnicamente un cuento. En cambio, en el caso de L'Etranger
de Camus, no hay necesidad de formular nada para darse
cuenta que el texto va ocurriendo en el tiempo. "Ayer murid
mama", escribe Camus ; sin embargo el texto a partir de ese
momento es imposible porque, si uno dice "Ayer murio
mamd", en el momento de sentarse a escribir, lo Cfnico que
puede contar son las ultimas 24 horas. Sin embargo, a medida
que el texto avanza, marna ha empezado a morir anteayer,
olvido'
después hace una semana, vale decir que Camus se
totalmente de la pauta temporal que fijo en el primer
renglon y la prueba es que va escribiendo en el tiempo como
novelista -eso es lo que détermina la diferencia de la novela
con el género cuento-. Un buen cuentista nunca hubiera
hecho eso, porque sabe desde que se sienta que si pone
"ayer" solo puede contar las ultimas 24 horas. ^Como va a
contar lo que nos va a ocurrir pasado manana ? Camus aquf
comète un pequeno error, error que para un novelista no
tiene ninguna importancia. En un modo Proust, todo el mundo
lo sabe, escribe una novela en primera persona y de pronto
en la novela Un amor de Swann, comprende la psicologia de
Swann, lo cual es imposible al estar narrando en primera
as'
persona. Una cosa destroza un cuento.
En la Argentina estamos por supuesto privilegiando el
cuento pero es que los géneros breves son esenciales. Tene-
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 123

mos la forma tango por la poesia popular, el teatro breve


argentino y el sainete que son formas del teatro brève que
han recorrido toda la historia del teatro argentino y cobrado
sus letras de nobleza. El teatro de la resistencia que es una
forma de teatro abierto nunca ha dado obras que superan los
45 minutos. Es como si tuviéramos una predisposiciôVi para la
brevedad. Tomar el cuento como modelo del acto narrativo
no es un mero capricho estético sino también una cuestion
casi nacional."

EL CUENTO NACIONAL (Paru dans le supplément culturel


du quotidien Clarin, 1984).

El género ideal para el ejercicio del mas alto talento,


pensaba Poe es el cuento. El cuento, escribi6 Quiroga, es la
novela depurada de ripios. Dostoiewsky y Kropotkine, y acaso
también Tolstoï, sospecharon que toda la literatura rusa
aspiraba a repetir un cuento, El Capote, de Gogol. Faulkner,
poco antes de morir, declaro' que después de la poesia, solo
existe una literatura rigurosa : el cuento. Yo he visto en el
cuento la forma estética mas antigua del lenguage, y hasta
los criticos literarios saben que, en su estructura moderna, es
también la mas reciente. No se si el lector esta muy
impresionado pero lo que se es que, en la Argentina, nuestra
mejor narrativa pasa por el cuento.
Desde 'El Matadero', de Echevarria, -origen de la
literatura nacional mas o menos en la época en que Poe
fundaba la norteamericana y Gogol la rusa- hasta Borges,
Cortazar, Dalmiro Saenz y Bioy Casares, pasando por Payro,
por Quiroga, por Benito Lynch, por Lugones, incluyendo no
digo el 'Facundo' pero si algunos capitulos circulares e
imborrables del 'Facundo1, sin olvidar a mi propia generacion,
parecena que algo especialmente argentino exige ser expre-
sado en este género que, en cuanto se lo mira de cerca,
aparece muy emparentado con otras dos de nuestras formas
expresivas esenciales : la mejor poesia del tango -donde
siempre se cuenta una historia, a veces sorprendente como
un zarpazo, en ciertas milongas de final inesperado -y el
teatro brève, en cuyos ongenes estan el sainete y el grotes-
124 Jean-Claude VILLEGAS

co, y cuya vigencia escénica y testimonial puede comporbar-


se con solo pensar en la experiencia de Teatro Abierto.
Quiza somos pascalianos ("où trois lignes suffisent je
n'en mettrai pas une de plus", frase que en realidad es de
Gide, pero le penso' Pascal) o ineptos haraganes, como dice
Borges de si mismo. O quiza hay algo en la Argentina, y aun
en toda America -pienso en Twain, en Hawthorne, en
Hemingway, en Salinger, pienso en Rulfo, en Arreola, en Valdés, en
Onetti, en Skârmeta, en Felisberto Hernandez- algo fragmen-
tario o roto, algo como un gigantesco rompecabezas que
busca su dibujo o alguna vez lo tuvo, y cuyo espejo es el
cuento.
Desde el Cervantes de las Novelas ejemplares al
Bécquer de las Leyendas, Espana apenas ha dado algun
cuento, después de los que escribieron Unamuno y Baroja. En
la cuarta parte de este tiempo, America dio un centenar, la
mitad en el Rio de la Plata y Mexico. Desde Maupassant, en
Francia, nunca se escribio un cuento legible si exceptuamos a
Villiers. Curiosamente también, Francia es cuna de un género
ambiguo, la "nouvelle" que en nuestro pa's casi no existe.
No se si tengo espacio para organizar estos hechos en
una teoria que, aun siendo cuentista, pondrfa demasiado a
prueba mi poder de sintesis. Lo incontestable es que, en el
Ri'o de la Plata, cuando se nombra a aquellos escritores que
irrefutablemente son nuestra literatura -Lugones, Quiroga,
Benito Lynch, Arlt, Maréchal, Onetti, Sabato, Cortazar,
Manauta, Roa Bastos, Mujica Lainez, Bioy Casares, Borges-,
la estadfstica se arma sola. Casi todos han sido cuentistas.
Uno solo, Sabato, jamas escribio' cuentos. Maréchal, Arlt,
Mtijica Lainez, sf los han escrito y hasta han escrito mas de
un libro de cuentos fundamental : El jorobatito, Misteriosa
Buenos Aires. Olvido nombres, por supuesto, ya que en
realidad no estoy escribiendo esta pagina : la estoy dictando.
Pero los nombres que olvido solo confirman lo que digo :
Haroldo Conti, Beatriz Guido, David Vinas. De cualquier
modo, no es este un censo de las letras nadonaies sino una
aproximacion a este género.
Puesto en la tarea de senalar algunos nombres entre
los nuevos narradores argentinos, me remito a los que
conozco y senalo algunos con la misma certeza con que -en
la década del sesenta- mi generacion hablaba de Daniel Moyano,
POUR UNE DEFINITION DU CONTE 125

German Rozenmacher, Miguel Briante, Juan José Saer, Ricar-


do Piglia, Pedro Orgambide, Jorge As's o Isodoro Blaisten,
mucho antes de que nadie los leyera.
Los que voy a nombrar. conocidos por mi, ya son
escritores aunque por ahora solo ellos y un grupo mas o
menos secreto lo sepan : Ricardo Maneiro, Susana Silvestre,
Jorge Mirarchi y Roberto Anglade -cuyos "curricula", situa-
dos mas bien en el porvenir, no me impiden saber a mf de
que hablo- a Silvia Iparraguirre y Elena Marengo, quienes
publicaron en la antologfa Doce mujeres cuentan dos de los
mejores cuentos de un libro en el que figuraban Beatriz
Guido, Angelica Gorodischer o Martha Mercader. Otro
nombre para tener en cuenta : Marta Berlin.
Y ahora, para terminar de un modo quizas imprevisto,
pero, como en los cuentos, riguroso, debo confesar que no
creo ni cref nunca en los generos literarios. Creo en la
literatura. Y para mi un cuentista ingresa en la literatura
cuando deja de ser pensado como cuentista y empieza a vivir
en los otros como escritor. Para resumir, cuando le pasa lo
que a Poe, a Mark Twain, a Maupassant, a Chejov, a Borges
o a Rulfo. Cualquier aplicado tallerista puede escribir un
buen cuento, y hasta algun cuento notable. Muy pocos
escritores escriben El desierto o Los desterrados, las Histo-
rias extraordinarias, La casa de las granadas, La sala numéro
seis, Ensuenos, El Aleph, El nombre que corrompid una
ciudad, que, como se sabe, son libros de hombres que
escribieron cuentos.
126 Jean-Claude VILLEGAS

NOTES

(1) Julio Corta'zar, "Algunos aspectos del cuento", Revista Casa de las
Americas, Cuba, 1970.
(2) La définition du Robert (1977) peut en servir d'illustration :
conte : récit de faits, d'aventures imaginaires, destiné à amuser ou à
instruire en amusant. Le conte est court, généralement en prose et la
fantaisie de l'auteur s'y déploie librement.
nouvelle : récit généralement bref, de construction dramatique (unité
d'action), présentant des personnages peu nombreux dont la
psychologie n'est guère .étudiée que dans la mesure où ils réagissent à
l'événement qui fait le centre du récit.
(3) Liliana Heker a publié Los que vieron la zarza, 1966 ; Acuario, 1972 ;
Un resplandor que se apago en el mundo, 1977 ; Las peras del mal,
1982.
(4) Isodoro Blaisten est l'auteur des recueils de contes suivants : La
felicidad, 1969 ; La salvacion, 1971 ; El mago, 1974 ; Dublin al sur,
1979 ; Cerrado por melancoli'a, 1981 ; Carroza y reina, 1986.
(5) Ricardo Piglia est auteur de contes et romancier : La invasion, 1967 ;
Nombre falso, 1975 ; Respiracio'n artificial (roman), 1980.
(6) Abelardo Castillo a écrit les recueils de contes suivants : Las otras
puertas, 1961 ; Cuentos crueles, 1966 ; Las panteras y el templo,
1976 ; El cruce del Aqueronte, 1982 ; Son dernier roman El que tiene
sed vient de paraître.
(7) Ces articles sont reproduits dans l'ouvrage de E. Montoya et M.
Ezquerro, lntroduccion al analisis semiol6*gico, Toulouse, Université de
Toulouse-Le-Mirail.

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