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c Christophe Bertault – Mathématiques en MPSI

Arithmétique des entiers relatifs

1 Division dans Z

1.1 Relation de divisibilité

Définition (Divisibilité, diviseur, multiple) Soient a, b ∈ Z. On dit que a divise b, ou que a est un diviseur de b, ou
que b est divisible par a, ou que b est un multiple de a, s’il existe k ∈ Z tel que b = ak. Cette relation se note a|b.

Théorème (Propriétés de la relation de divisibilité) Soient a, b, c, d ∈ Z.


(i) La relation de divisibilité | est une relation d’ordre sur N mais elle est seulement réflexive et transitive sur Z car :

a|b et b|a ⇐⇒ |a| = |b| ⇐⇒ a=b ou a = −b.



(ii) Si d|a et si d|b, alors d (au + bv) pour tous u, v ∈ Z.

(iii) Si a|b et si c|d, alors ac|bd. En particulier, si a|b, alors ak |bk pour tout k ∈ N.

   Explication Dans ce chapitre entièrement dévolu à la relation de divisibilité, toute expression comme « plus grand »
ou « minorant » est à comprendre au sens de la divisibilité sur N et non au sens de la relation 6. Ces deux relations ne sont

pas sans lien cela dit, gardez bien en tête que pour tous a, b ∈ N∗ — on exclut 0, attention : a|b =⇒ a 6 b.

Démonstration
(i) Si a|b et b|a, alors b = ak et a = bl pour certains k, l ∈ Z, donc b = bkl.
– Si b = 0, alors a = bl = 0 donc |a| = |b|.
– Si b 6= 0, alors kl = 1, donc soit k = l = 1, soit k = l = −1, i.e. soit a = b, soit a = −b, i.e. |a| = |b|.
(ii) Si d|a et d|b, alors a = dk et b = dl pour certains k, l ∈ Z, donc au + bv = d(ku + vl) avec ku + vl ∈ Z pour
tous u, v ∈ Z, donc enfin d (au + bv).
(iii) Si a|b et c|d, alors b = ak et d = cl pour certains k, l ∈ Z, donc bd = (ac)(kl) avec kl ∈ Z, bref ac|bd. 

Définition (Diviseur/multiple commun) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z.


• On appelle diviseur commun de a1 , . . . , ar tout entier relatif qui divise à la fois a1 , . . . , ar .
• On appelle multiple commun de a1 , . . . , ar tout entier relatif divisible à la fois par a1 , . . . , ar .

   Explication Dans le cas où a1 , . . . , ar sont positifs, alors au sens de la divisibilité qui est une relation d’ordre :
n o
– les diviseurs communs positifs de a1 , . . . , ar sont exactement les minorants de a1 , . . . , ar ,
n o
– les multiples communs positifs de a1 , . . . , ar sont exactement les majorants de a1 , . . . , ar .

Exemple Les diviseurs positifs de 12 sont 1, 2, 3, 4, 6 et 12, ceux de 18 sont 1, 2, 3, 6, 9 et 18. Leurs diviseurs communs
positifs sont donc 1, 2, 3 et 6. Leurs multiples communs sont tous les multiples de 36 — ce que nous ne chercherons pas à justifier
proprement pour le moment.

1.2 Relation de congruence modulo un entier

Définition
(Relation de congruence modulo un entier) Soient n ∈ N et a, b ∈ Z. On dit que a est congru à b modulo
n si n (b − a), i.e. s’il existe k ∈ Z tel que b = a + kn. Cette relation se note a ≡ b [n].

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   Explication Les relations de congruence généralisent la relation de divisibilité : n|a ⇐⇒ a ≡ 0 [n].

Théorème (Propriétés de la relation de congruence modulo un entier) Soient a, a′ , b, b′ ∈ Z et m, n ∈ N.


(i) La relation ≡ [n] est une relation d’équivalence sur Z.
(ii) Somme : Si a ≡ b [n] et si a′ ≡ b′ [n], alors a + a′ ≡ b + b′ [n].
(iii) Produit : Si a ≡ b [n] et si a′ ≡ b′ [n], alors aa′ ≡ bb′ [n].
En particulier, si a ≡ b [n], alors ak ≡ bk [n] pour tout k ∈ N.
(iv) Multiplication/division par un entier non nul : Si m 6= 0 : a ≡ b [n] ⇐⇒ am ≡ bm [mn].

Démonstration L’assertion (i) a été prouvée au chapitre « Relations binaires ».


(ii) Si a ≡ b [n] et a′ ≡ b′ [n], alors n divise b − a et b′ − a′ , donc aussi (b + b′ ) − (a + a′ ) par somme. Ainsi
a + a′ ≡ b + b′ [n].
(iii) Remarque : bb′ − aa′ = b(b′ − a′ ) + a′ (b − a). Du coup, si a ≡ b [n] et a′ ≡ b′ [n], alors n divise b − a
et b′ − a′ , donc aussi b(b′ − a′ ) + a′ (b − a) = bb′ − aa′ . Ainsi aa′ ≡ bb′ [n].
m6=0
(iv) Enfin : a ≡ b [n] ⇐⇒ n (b − a) ⇐⇒ mn m(b − a) ⇐⇒ am ≡ bm [mn]. 

1.3 Division euclidienne

Théorème (Théorème de la division euclidienne) Soient a ∈ Z et b ∈ N∗ . Il existe un et un seul couple (q, r) ∈ Z × N


tel que :
a = bq + r et 0 6 r 6 b − 1 (ou encore : 0 6 r < b).
On appelle a le dividende de la division euclidienne de a par b, b son diviseur, q son quotient et r son reste.
jak
Par ailleurs : q = et r ≡ a [b].
b

   Explication
• Le théorème de la division euclidienne est un résultat d’existence et d’unicité : voilà l’essentiel.
• On peut reformuler ce théorème en termes de congruences : ∀a ∈ Z, ∃ ! r ∈ J0, b − 1K/ a ≡ r [b]. Cette proposition
affirme simplement que tout entier relatif a est congru modulo b à unn unique entier r compris o entre 0 et b − 1.
L’ensemble quotient de Z par la relation ≡ [n] est donc l’ensemble nZ, nZ + 1, . . . , nZ + n − 1 à n éléments noté
Z
généralement . Par exemple, on peut ramener a = 123 à l’un des entiers 0, 1, 2, 3 ou 4 modulo b = 5. Précisément :
nZ
123 = |{z}
|{z} 5 × |{z} 3 , donc 123 ≡ 3 [5].
24 + |{z}
a b q r

Démonstration
• Existence : L’idée de la preuve est simple. Si a est positif, on lui retranche b une fois, deux fois, trois fois. . .
jusqu’à ce que a ait presque complètement fondu, c’est-à-dire jusqu’au moment où le résultat est compris
entre 0 et b − 1. Si a est négatif, on fait pareil mais en ajoutant b au lieu de le retrancher.
n o
L’ensemble D = a − bk ∩ N est une partie non vide de N — il contient a si a > 0 et a(1 − b) si a < 0
k∈Z
— donc possède un plus petit élément r. Pour un certain q ∈ Z, on peut donc écrire que a = bq + r avec
r > 0. Se peut-il qu’on ait r > b ? Si c’était le cas, a − b(q + 1) = r − b serait un élément de D strictement
plus petit que r = min D — impossible. Conclusion : 0 6 r 6 b − 1.
• Unicité : Soient (q, r) et (q ′ , r ′ ) deux couples de la division euclidienne de a par b. Aussitôt |r ′ − r| 6 b − 1,
mais par ailleurs b(q − q ′ ) = r ′ − r.
Supposons q 6= q ′ . Dans ce cas |q − q ′ | > 1, donc : b 6 b|q − q ′ | = |r ′ − r| 6 b − 1, donc b 6 b − 1 —
contradiction. Conclusion : q = q ′ , donc aussitôt r = a − bq = a − bq ′ = r ′ .
a a jak
• Pour finir, comme 0 6 r = a − bq < b, alors : − 1 < q 6 , donc en effet q = . 
b b b

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   En pratique (Algorithme de la division euclidienne) On vient de le voir, le couple (q, r) de la division


euclidienne de a par b se calcule à partir de a par une série d’additions/soustractions. Hélas, si le principe est simple, sa mise
en œuvre paraît pénible. Pour diviser 1000 par 3, sommes-nous vraiment obligés d’effectuer 333 soustractions ? Oui et non. En
réalité, vous pratiquez sans le savoir la division euclidienne depuis votre plus tendre enfance.
3 4 7 5
Tâchons de le comprendre sur la division de 347 par 5. Dans un premier temps, on retranche en apparence − 3 0 (0) 6 9
6 × 5 = 30 de 34, mais en fait on retranche 60 × 5 = 300 de 347 puisque le « 6 » apparaît comme chiffre des 4 7
dizaines dans le quotient. Dans un second temps, on retranche 9 × 5 = 45 de 47. Au total, on a donc effectué − 4 5
69 soustractions mais en deux fois seulement : d’abord 60, puis 9. Le reste obtenu est 2. 2
Conclusion : diviser, c’est soustraire. Pour un ordinateur, un grand nombre de soustractions n’est pas un

problème. Pour nous autres cerveaux c’en est un. Nous compensons en apprenant et en utilisant les tables de multiplication,
car ça nous le faisons vite et bien. C’est grâce aux tables de multiplication que nous avons trouvé les chiffres « 6 » et « 9 » du
quotient dans l’exemple précédent.

Exemple Soient x, y, z ∈ Z trois entiers solutions de l’équation de Fermat x3 + y 3 = z 3 . Alors l’un des entiers x, y ou z est
divisible par 3.
En effet Raisonnons par l’absurde en supposant que ni x ni y ni z n’est divisible par 3.

x [9] x2 [9] x3 [9] Alors le reste de la division euclidienne de x par 9 est l’un des
1 1 1 entiers 1, 2, 4, 5, 7, 8 — on peut rejeter les cas 0, 3 et 6. Etudions
un à un ces différents cas dans le tableau ci-contre. Il en ressort
2 4 8 ≡ −1
que x3 ≡ ±1 [9]. On montrerait de même que y 3 ≡ ±1 [9] et que
4 16 ≡ −2 −8 ≡ 1 z 3 ≡ ±1 [9].
5 ≡ −4 16 ≡ −2 8 ≡ −1 Or par hypothèse x3 + y 3 ≡ z 3 [9]. A gauche on a modulo 9 soit
7 ≡ −2 4 −8 ≡ 1 1 + 1 = 2, soit 1 − 1 = 0, soit −1 + 1 = 0, soit −1 − 1 = −2, et
8 ≡ −1 1 −1 à droite ±1. Impossible !

Exemple Le reste de la division euclidienne de 265362 par 7 est 2.


En effet La démonstration de ce résultat est très longue si on applique l’algorithme précédent comme un
rustre, car l’entier 265362 possède près de 20000 décimales. Or on remarque que 23 ≡ 8 ≡ 1 [7]. C’est l’idée-phare
de cet exemple : dénicher, si elle existe, la première puissance de 2 congrue à 1 modulo 7.
On divise alors 65362 par 3 : 65362 = 3 × 21787 + 1 et aussitôt 265362 ≡ (23 )21787 × 21 ≡ 121787 × 2 ≡ 2 [7].

2 PGCD, PPCM

2.1 Définitions du PGCD

Définition (PGCD d’une famille d’entiers naturels) Soient a1 , . . . ,nar ∈ N. Onoappelle plus grand commun diviseur (ou
PGCD) de a1 , . . . , ar , si elle existe, la borne inférieure de l’ensemble a1 , . . . , ar pour la relation d’ordre de divisibilité
sur N, notée a1 ∧ . . . ∧ ar .

$ $ $ Attention ! A ce stade, l’existence du PGCD n’est pas du tout acquise !

Exemple 12 ∧ 18 = 6.
En effet Les diviseurs communs positifs de 12 et 18 étant 1, 2, 3 et 6, leur plus grand commun diviseur positif
au sens de la divisibilité est 6.

Exemple 28 ∧ 42 ∧ 98 = 14.
En effet Les diviseurs communs positifs de 28, 42 et 98 étant 1, 2, 7 et 14, leur plus grand commun diviseur
positif au sens de la divisibilité est 14.

Exemple Pour tout a ∈ N : a ∧ 0 = a.


En effet Tout entier naturel divise 0, donc les diviseurs communs positifs de a et 0 sont exactement les diviseurs
de a, dont a est bien sûr le plus grand élément au sens de la divisibilité.

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   Explication Bref, dans le cadre des entiers naturels, au sens de la divisibilité :

Borne inférieure = Plus grand minorant = Plus grand commun diviseur = PGCD.

Par définition, a1 ∧ . . . ∧ ar est donc un diviseur commun de a1 , . . . , ar et le meilleur au sens où il est divisible par tout diviseur
commun de a1 , . . . , ar . Cette reformulation justifie la généralisation suivante aux entiers relatifs — on ne peut alors plus parler
de borne inférieure car la relation de divisibilité n’est pas une relation d’ordre sur Z.

Définition (PGCD d’une famille d’entiers relatifs) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z. On appelle plus grand commun diviseur
(ou PGCD) de a1 , . . . , ar tout entier d ∈ Z satisfaisant les deux assertions :
– d est un diviseur commun de a1 , . . . , ar , – d est divisible par tout diviseur commun de a1 , . . . , ar .

Théorème (« Unicité » du PGCD) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z. En cas d’existence, les seuls PGCD de a1 , . . . , ar sont
|a1 | ∧ . . . ∧ |ar | et son opposé. Quand on dit « le PGCD de a1 , . . . , ar », c’est toujours au PGCD positif |a1 | ∧ . . . ∧ |ar | qu’on
fait référence, noté a1 ∧ . . . ∧ ar .

Démonstration Si d et d′ sont deux PGCD de a1 , . . . , ar , alors tous deux sont divisibles par tout diviseur
commun de a1 , . . . , ar , donc se divisent mutuellement, donc sont égaux ou opposés. 

2.2 PGCD de deux entiers et algorithme d’Euclide

Théorème (Idée fondamentale de l’algorithme d’Euclide) Soient a ∈ Z et b ∈ N∗ . On note r le reste de la division


euclidienne de a par b. Alors a et b ont les mêmes diviseurs communs que b et r.

   Explication En particulier : a∧b= b∧r — du moins quand nous aurons prouvé l’existence du PGCD.

Démonstration Notons q le quotient de la division euclidienne de a par b. Tout diviseur commun de a et b


divise aussi b et r = a − bq, et inversement, tout diviseur commun de b et r divise aussi a = bq + r et b. 

   En pratique (Algorithme d’Euclide)


• Soient a, b ∈ N tels que 0 6 b 6 a. L’algorithme d’Euclide va nous permettre de calculer rapidement le PGCD de a et b —
dont il prouve au passage l’existence. On définit les entiers naturels r0 , r1 , r2 . . . de la façon suivante :
– Au départ, on pose r0 = a et r1 = b.
– Ensuite, pour k ∈ N, tant que rk+1 6= 0, on note rk+2 le reste de la division euclidienne de rk par rk+1
— en particulier, rk+2 < rk+1 .
A l’issue de cette construction : r0 > r1 > r2 > . . . > 0. Comme il n’existe qu’un nombre fini d’entiers naturels entre
0 et r0 , on obtient forcément rN = 0 pour un certain N ∈ N∗ et l’algorithme s’arrête. Or en vertu de l’idée fondamentale
de l’algorithme d’Euclide, a = r0 et b = r1 ont les mêmes diviseurs communs que r1 et r2 , puis que r2 et r3 . . . et enfin que
rN−1 et rN = 0. Comme rN−1 ∧ 0 = rN−1 , a et b admettent donc aussi rN−1 pour PGCD.

Conclusion : a ∧ b est le dernier reste non nul de la suite des restes successifs r0 , r1 , r2 . . .

• Dans le cas général de deux entiers a et b quelconques, on se ramène au cas « 0 6 b 6 a » de la manière suivante :
– on peut supposer a et b positifs car a ∧ b = |a| ∧ |b|,
– on peut supposer b 6 a car a ∧ b = b ∧ a.

Exemple 1542 ∧ 58 = 2.
En effet Il s’agit seulement d’effectuer quelques divisions euclidiennes :

1542 = 26 × 58 + 34, 58 = 1 × 34 + 24, 34 = 1 × 24 + 10, 24 = 2 × 10 + 4, 10 = 2 × 4 + 2 et 4 = 2 × 2 + 0.


Dernier reste
non nul

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L’algorithme d’Euclide a établi au passage le résultat suivant.

Théorème (Existence du PGCD de deux entiers) Soient a, b ∈ Z. Alors a et b possèdent un PGCD.

En prolongeant l’algorithme d’Euclide comme expliqué ci-dessous, on obtient naturellement l’important théorème suivant :

Théorème (Relations de Bézout pour deux entiers) Soient a, b ∈ Z. Il existe des entiers u, v ∈ Z tels que a∧b = au+bv.
Une telle relation est appelée une relation de Bézout de a et b.

$ $ $ Attention ! Les entiers u et v ne sont pas du tout uniques.


Par exemple, 4 ∧ 6 = 2 et on a à la fois 2 = 4 × (−1) + 6 × 1 et 2 = 4 × 2 + 6 × (−1).

   En pratique (Algorithme d’Euclide étendu) Nous présenterons cet algorithme sur un exemple, celui du PGCD
de 525 et 3080 et d’une relation de Bézout associée. On commence par mettre en œuvre l’algorithme d’Euclide :
r0 r1 r2 r1 r2 r3 r2 r3 r4 r3 r4 r5
z }| { z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{
3080 = 5 × 525 + 455 , 525 = 1 × 455 + 70 , 455 = 6 × 70 + 35 , 70 = 2 × 35 + 0 .
r4 r2 r3
z}|{ z}|{ z}|{
Le dernier reste non nul est 35 : 525 ∧ 3080 = 35. Partons alors de l’avant-dernière division sous la forme 35 = 455 −6 × 70 .
Nous allons y éliminer progressivement r3 puis r2 , nous aurons ainsi exprimé r4 = 35 en fonction de r0 = 3080 et r1 = 525.
r4 r2 r3 r2 r1 r2
z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{ z}|{
525 ∧ 3080 = 35 = 455 −6 × 70 = 455 −6 × ( 525 −1 × 455 ) (on élimine r3 )
r1 r2 r1 r0 r1
z}|{ z}|{ z}|{ z }| { z}|{
= −6 × 525 +7 × 455 = −6 × 525 +7 × (3080 −5 × 525 ) (on élimine r2 )
r0 r1
z }| { z}|{
= 7 × 3080 −41 × 525 . La voilà, notre relation de Bézout.

2.3 PGCD d’une famille finie d’entiers

Théorème (Existence du PGCD et relations de Bézout pour une famille finie d’entiers) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z.
• Existence : Les entiers a1 , . . . , ar possèdent un PGCD.
• Relations de Bézout : Il existe des entiers u1 , . . . , ur ∈ Z tels que : a1 ∧ . . . ∧ ar = a1 u1 + . . . + ar ur . Une
telle relation est appelée une relation de Bézout de a1 , . . . , ar .

Démonstration Résultat trivial si a1 = . . . = ar = 0, nous supposerons


 qu’au contraire l’un des ak au moins
est non nul. Dans ce cas, comme |a1 | + . . . + |ar | ∈ a1 Z + . . . + ar Z ∩ N∗ , l’ensemble a1 Z + . . . + ar Z ∩ N∗ est
une partie non vide de N donc possède un plus petit élément d. Par définition, cet entier naturel non nul d s’écrit
d = a1 u1 + . . . + ar ur pour certains u1 , . . . , ur ∈ Z — tiens, une relation de Bézout. Il nous reste à montrer que d
est un PGCD de a1 , . . . , ar .
• Pour montrer que d est un diviseur commun de a1 , . . . , ar , il suffit de montrer que d divise a1 par symétrie
des rôles de a1 , . . . , ar . La division euclidienne de a1 par d s’écrit a1 = dq + r pour certains q, r ∈ Z avec
0 6 r < d. Dans ces conditions,  r = a1 − dq = a1 − (a1 u1 + . . . + ar ur )q = a1 (1 − u1 q) − a2 u2 q − . . . − ar ur q,
donc r ∈ a1 Z + . . . + ar Z ∩ N. Par minimalité de d, forcément r = 0, i.e. d divise a1 .
• Ensuite, tout diviseur commun de a1 , . . . , ar divise d puisque d = a1 u1 + . . . + ar ur . 

   En pratique Pour calculer le PGCD d’une famille finie d’entiers, on peut se ramener à des calculs de PGCD de
deux entiers en regroupant comme on le souhaite deux par deux les entiers du calcul à effectuer. Par exemple :

10 ∧ 12 ∧ 18 = 10 ∧ (12 ∧ 18) = 10 ∧ 6 = 2 mais aussi, si on préfère : 10 ∧ 12 ∧ 18 = (10 ∧ 12) ∧ 18 = 2 ∧ 18 = 2.

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Théorème (Propriétés du PGCD) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z.


(i) Pour tout k ∈ Z : (a1 k) ∧ . . . (ar k) = |k| (a1 ∧ . . . ∧ ar ).
a1 ar a1 ∧ . . . ∧ ar
(ii) Pour tout diviseur commun d 6= 0 de a1 , . . . , ar : ∧ ... ∧ = .
d d |d|

Démonstration Contentons-nous de prouver le résultat pour deux entiers a, b ∈ Z.


(i) Nous pouvons supposer k 6= 0. Posons δ = a ∧ b et ∆ = (ak) ∧ (bk). Pour montrer que ∆ = |k|δ, il nous
suffit de montrer que ∆ et δk se divisent l’un l’autre.
– Pour commencer δ|a et δ|b, donc δk|ak et δk|bk, donc δk|∆.
– Ensuite k|ak et k|bk, donc k|∆, et donc ∆ = nk pour un certain n ∈ Z. A présent, nk = ∆|ak et
nk = ∆|bk, donc n|a et n|b car k 6= 0. Ceci montre que n|δ, et enfin ∆ = nk|δk.
a  b  
a b

(ii) D’après (i) : a ∧ b = ×d ∧ × d = |d| ∧ , d’où le résultat. 
d d d d

2.4 Entiers premiers entre eux

Définition (Entiers premiers entre eux, cas de deux entiers) Soient a, b ∈ Z. On dit que a et b sont premiers entre
eux si 1 est leur seul diviseur commun positif, i.e. si a ∧ b = 1.

Exemple 6 et 35 sont premiers entre eux car les diviseurs positifs de 6 sont 1, 2, 3 et 6 et ceux de 35 sont 1, 5, 7 et 35. Autre
manière de voir les choses : un simple calcul de PGCD par l’algorithme d’Euclide montre que 6 ∧ 35 = 1.

   En pratique La remarque qui suit est utile dans de très nombreux exercices.

Pour tous a, b ∈ Z de PGCD d, a = da′ et b = db′ pour certains entiers a′ , b′ ∈ Z premiers entre eux.

a b a∧b
Tout simplement, en effet : a ′ ∧ b′ = ∧ = = 1.
d d |d|

Définition (Entiers premiers entre eux dans leur ensemble/deux à deux) Soient a1 , . . . , ar ∈ Z.
• On dit que a1 , . . . , ar sont premiers entre eux dans leur ensemble si 1 est leur seul diviseur commun positif, i.e. si
a1 ∧ . . . ∧ ar = 1.
• On dit que a1 , . . . , ar sont premiers entre eux deux à deux si ai et aj sont premiers entre eux pour tous i, j ∈ J1, rK
distincts.

$ $ $ Attention ! Premiers entre eux deux à deux =⇒ Premiers entre eux dans leur ensemble

mais la réciproque est fausse ! Par exemple, 6, 10 et 15 sont premiers entre eux dans leur ensemble mais 6 ∧ 10 = 2 6= 1,
6 ∧ 15 = 3 6= 1 et 10 ∧ 15 = 5 6= 1.

Théorème (Théorème de Bézout) Soient a, b ∈ Z. Les assertions suivantes sont équivalentes :


(i) a et b sont premiers entre eux. (ii) Il existe deux entiers u, v ∈ Z tels que au + bv = 1.

Démonstration L’implication (i) =⇒ (ii) est une simple relation de Bézout — déjà prouvée. Pour la réciproque
(ii) =⇒ (i), supposons l’existence de deux entiers u, v ∈ Z tels que au + bv = 1 et fixons d un diviseur commun
positif de a et b. Alors d divise au + bv = 1, donc d = 1. Comme voulu, a ∧ b = 1. 

Théorème (Théorème de Gauss) Soient a, b, c ∈ Z. Si a|bc et si a ∧ b = 1, alors a|c.

Démonstration Faisons l’hypothèse que a|bc et que a∧b = 1. Alors bc = ak pour un certain k ∈ Z et au+bv = 1
pour certains u, v ∈ Z — relation de Bézout. Multiplions par c : acu + bcv = c puis remplaçons bc par ak :
a(cu + kv) = c. Comme voulu, a|c. 

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Théorème (Entiers premiers entre eux et produit d’entiers) Soient n, a1 , . . . , ar ∈ Z.


(i) Si chacun des entiers a1 , . . . , ar est premier avec n, leur produit a1 . . . ar l’est aussi.
(ii) Si les entiers a1 , . . . , ar divisent n et sont premiers entre eux deux à deux, leur produit a1 . . . ar divise n.

$ $ $ Attention ! Dans l’assertion (ii), il est impératif de supposer a1 , . . . , ar premiers entre eux deux à deux. Par
exemple, pour n = 30, a1 = 6, a2 = 10 et a3 = 15, les entiers a1 , a2 et a3 divisent n mais sont seulement premiers entre eux
dans leur ensemble, et clairement leur produit a1 a2 a3 = 900 ne divise pas n.

Démonstration Par récurrence sur r pour les deux assertions (i) et (ii). Fixons n ∈ Z.
Initialisation : Pour r = 1, rien à montrer.
(i) Hérédité : Soit r ∈ N∗ . On suppose le théorème vrai au rang r. Soient alors a1 , . . . , ar+1 ∈ Z pour lesquels
chacun des entiers a1 , . . . , ar+1 est premier avec n. Par hypothèse de récurrence, a1 . . . ar et n sont premiers
entre eux, donc a1 . . . ar u + nv = 1 pour certains u, v ∈ Z — relation de Bézout. De même, ar+1 et n étant
premiers entre eux, ar+1 u′ + nv ′ = 1 pour certains u′ , v ′ ∈ Z, et du coup :
 
a1 . . . ar+1 (uu′ ) + n var+1 u′ + v ′ = ar+1 u′ a1 . . . ar u + nv + nv ′ = ar+1 u′ + nv ′ = 1.
| {z }
=1

D’après le théorème de Bézout, cette relation de Bézout montre que a1 . . . ar+1 et n sont premiers entre eux.
(ii) Hérédité : Soit r ∈ N∗ . On suppose le théorème vrai au rang r. Soient alors a1 , . . . , ar+1 ∈ Z pour lesquels
a1 , . . . , ar+1 divisent n et sont premiers entre eux deux à deux. Par hypothèse de récurrence, a1 . . . ar divise
n, donc n = a1 . . . ar k pour un certain k ∈ Z. Ensuite, d’après (i), a1 , . . . , ar étant tous premiers avec ar+1 ,
les entiers a1 . . . ar et ar+1 sont premiers entre eux. Comme ar+1 divise n, le théorème de Gauss montre
ainsi que ar+1 divise k. Comme voulu, a1 . . . ar+1 divise a1 . . . ar k = n. 

Théorème (Forme irréductible d’un rationnel) Tout rationnel peut être écrit d’une et une seule manière, appelée sa
p
forme irréductible, sous la forme où p ∈ Z et q ∈ N∗ avec p et q premiers entre eux.
q

   Explication En choisissant p dans Z et q dans N∗ , on impose que le signe de la fraction soit porté par son numérateur.
Sans cela, il n’y aurait pas unicité de la forme irréductible.

Démonstration
p p′
• Unicité : Soient (p, q), (p′ , q ′ ) ∈ Z × N∗ . On suppose que r = = ′ , que p ∧ q = 1 et que p′ ∧ q ′ = 1.
q q
Comme pq ′ = p′ q, q|pq ′ . Mais p ∧ q = 1, donc q|q ′ d’après le théorème de Gauss, puis q ′ |q par symétrie des
rôles de q et q ′ , donc enfin |q| = |q ′ |. Comme q > 0 et q ′ > 0, on a même q = q ′ . Il nous reste à diviser
l’égalité pq ′ = p′ q par q = q ′ et enfin p = p′ .
a
• Existence : Par définition de r, r = pour certains a, b ∈ Z avec b 6= 0. On peut toujours supposer que
b
b est positif. Notons d le PGCD de a et b. Alors a = dp et b = dq pour certains p ∈ Z et q ∈ N∗ dont nous
a dp p
savons qu’ils sont premiers entre eux. C’est terminé : r = = = . 
b dq q

2.5 PPCM de deux entiers

Définition (PPCM de deux entiers naturels) Soientn a, bo∈ N. On appelle plus petit commun multiple (ou PPCM) de
a et b, si elle existe, la borne supérieure de l’ensemble
a, b pour la relation d’ordre de divisibilité sur N, notée a ∨ b.

   Explication Bref, dans le cadre des entiers naturels, au sens de la divisibilité :

Borne supérieure = Plus petit majorant = Plus petit commun multiple = PPCM.

Par définition, a ∨ b est donc un multiple commun de a et b et le meilleur au sens où il divise tout multiple commun de a et b.
Cette reformulation justifie la généralisation suivante aux entiers relatifs — on ne peut alors plus parler de borne supérieure car
la relation de divisibilité n’est pas une relation d’ordre sur Z.

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Définition (PPCM de deux entiers relatifs) Soient a, b ∈ Z. On appelle plus petit commun multiple (ou PPCM) de a
et b tout entier m ∈ Z satisfaisant les deux assertions :
– m est un multiple commun de a et b, – m divise tout multiple commun de a et b.

Théorème (Existence du PPCM et lien avec le PGCD) Soient a, b ∈ Z.


• Existence et « unicité » : Les entiers a et b possèdent un PPCM et les seuls PPCM de a et b sont |a| ∨ |b| et
son opposé. Quand on dit « le PPCM de a et b », c’est toujours à |a| ∨ |b| qu’on fait référence, noté a ∨ b.
• Lien avec le PGCD : |ab| = (a ∧ b) (a ∨ b).

Démonstration
• « Unicité » : Comme dans le cas des PGCD.
• Existence et lien avec le PGCD : Si a = b = 0, 0 est le seul multiple de a et b donc a et b admettent 0
pour unique PPCM.
ab
Supposons désormais a 6= 0 ou b 6= 0 et posons d = a ∧ b 6= 0. Nous allons montrer que est un PPCM de
d
a et b. Cela prouvera d’un coup d’un seul et l’existence du PPCM et le lien PPCM/PGCD.
ab
Partons du fait que a = da′ et b = db′ pour certains a′ , b′ ∈ Z premiers entre eux. Ensuite : = ba′ = ab′ .
d

ab ab ab
est un multiple commun de a et b car : a ab′ = et b ba′ =

– Pour commencer, .
d d d
ab
– Montrons ensuite que tout multiple commun de a et b est divisible par . Soit m un multiple
d
commun de a et b. Alors m = au = bv pour certains u, v ∈ Z, donc ua′ = vb′ après division par d,
donc a′ |vb′ . Comme a′ ∧ b′ = 1, a′ |v d’après le théorème de Gauss. Bref, v = a′ k pour un certain k ∈ Z.

ab ab
Concluons : m = bv = ba′ k = k , donc en effet m. 
d d

Exemple 12 ∨ 18 = 36.
En effet Nous avons énoncé plus haut sans preuve que les multiples communs positifs de 12 et 18 sont tous les
12 × 18 12 × 18
multiples de 36, donc leur PPCM est 36. En guise de justification : 12 ∨ 18 = = = 36.
12 ∧ 18 6

Théorème (Propriétés du PPCM) Soient a, b ∈ Z.


a b a∨b
Pour tout k ∈ Z : (ak) ∨ (bk) = |k| (a ∨ b) et pour tout diviseur commun d 6= 0 de a et b : ∨ = .
d d |d|

3 Nombres premiers

Définition (Nombre premier, nombre composé) Soit p ∈ N. On dit que p est premier si p 6= 1 et si les seuls diviseurs
positifs de p sont 1 et p. On dit que p est composé si p 6= 1 et si p n’est pas premier.
L’ensemble des nombres premiers est parfois noté P.

   Explication Il n’est pas inutile de connaître la liste des premiers nombres premiers : 2, 3, 5, 7, 11, 13, 17, 19, 23, 29,
31, 37. . .

Le résultat suivant est un théorème d’existence facile à démontrer. Nous aurons ensuite un théorème d’unicité, mais
nettement plus difficile à obtenir.

Théorème Tout entier naturel non nul est un produit de nombres premiers.

   Explication Dans cet énoncé lapidaire, on considère 1 comme le produit de 0 nombre premier et tout nombre premier
comme le produit d’1 nombre premier — soi-même.

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Démonstration Par récurrence forte. Un seul outil ici : la relation de divisibilité et ses propriétés élémentaires.
• Initialisation : 1 n’est divisible par aucun nombre premier, c’est le produit de zéro d’entre eux.
• Hérédité : Soit n > 2. Faisons l’hypothèse que tout entier naturel non nul strictement inférieur à n est un
produit de nombres premiers. Qu’en est-il de n ? Deux cas possibles, soit n est premier, soit n est composé.
Si n est premier, c’est terminé, il est produit de nombres premiers. Et s’il est composé ? Il s’écrit dans ce cas
n = ab où a et b sont deux diviseurs positifs de n autres que 1 et n. Par hypothèse de récurrence, a et b sont
des produits de nombres premiers, donc n aussi par produit. 

Théorème (Infinité de l’ensemble des nombres premiers) L’ensemble P des nombres premiers est infini.

Démonstration Raisonnons par l’absurde en supposant P fini et notons donc p1 , . . . , pr la liste complète des
nombres premiers. Posons ensuite N = p1 . . . pr + 1. Cet entier N , au moins égal à 2, est un produit de nombres
premiers d’après notre théorème précédent, donc divisible par pk pour un certain k ∈ J1, rK. En particulier, pk
divise N − p1 . . . pr = 1, i.e. pk = 1 — contradiction. 

   Explication (Crible d’Eratosthène) Le crible d’Eratosthène, qui permet une détermination simple de tous les
nombres premiers inférieurs à un seuil donné, repose sur la remarque suivante. Si n ∈ N∗ est composé et si nous notons p le plus
∈ N∗ , mais comme alors tout diviseur premier de k est supérieur
petit de ses diviseurs premiers, alors n = pk pour un certain k √
2
ou égal à p, en particulier k > p, et donc n = pk > p , i.e. p 6 n. En résumé :


Tout entier composé n ∈ N∗ possède un diviseur premier inférieur ou égal à n.

Déduisons-en la liste des nombres premiers inférieurs ou égaux à 100. On part d’une liste des entiers de 2 à 100, dont on va peu
à peu rayer les entiers composés et dont ne resteront vierges à la fin que les nombres premiers.
• L’entier 2 est premier, c’est notre point de départ. On raye tous ses multiples hormis lui-même, car ceux-ci sont composés.
• Le premier entier non rayé est alors 3. Il est forcément premier
car s’il était composé, il aurait un diviseur premier strictement 2 3 4 5 6 7 8 9 10
inférieur — ici 2 — et on l’aurait déjà rayé. On raye tous les 11 12 13 14 15 16 17 18 19 20
multiples de 3 hormis lui-même, car ceux-ci sont composés. 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30
31 32 33 34 35 36 37 38 39 40
• Même chose avec 5, même chose avec 7. Le premier entier non 41 42 43 44 45 46 47 48 49 50
rayé est alors 11. Or tout entier compris
√ entre 2 et 100 possède 51 52 53 54 55 56 57 58 59 60
un diviseur premier inférieur ou égal à 100 = 10 < 11, donc en 61 62 63 64 65 66 67 68 69 70
fait en rayant les entiers que nous avons rayés, nous avons rayés 71 72 73 74 75 76 77 78 79 80
tous les entiers composés compris entre 2 et 100. Les entiers non 81 82 83 84 85 86 87 88 89 90
rayés restants sont exactement tous les nombres premiers de la 91 92 93 94 95 96 97 98 99 100
liste étudiée.

Théorème La décomposition d’un entier naturel non nul en produit de nombres premiers est unique à l’ordre près.

Démonstration Par récurrence forte. Contrairement à la preuve simple de l’existence d’une décomposition, la
preuve de son unicité requiert massivement le théorème de Gauss.
• Initialisation : 1 n’a aucun diviseur premier, donc évidemment. . .
• Hérédité : Soit n > 2. Faisons l’hypothèse que la décomposition de tout entier naturel non nul strictement
inférieur à n en produit de nombres premiers est unique à l’ordre près. Qu’en est-il de n ? Donnons-nous deux
décompositions n = pα αr β1 βs
1 . . . pr et n = q1 . . . qs de n en produit de nombres premiers avec p1 < . . . < pr et
1


q1 < . . . < qs et α1 , . . . , βs ∈ N .
Se peut-il qu’on ait p1 6= q1 ? Dans ce cas, par exemple,
p1 < q1 . Premiers et distincts, p1 et q1 sont premiers
entre eux, donc d’après le théorème de Gauss, p1 q1β1 −1 q2β2 . . . qsβs . Bref, q1β1 −1 q2β2 . . . qsβs = p1 d pour un certain
d ∈ N∗ qu’on peut lui-même décomposer en produit de nombres premiers. Comme q1β1 −1 q2β2 . . . qsβs < n,
l’hypothèse de récurrence nous autorise à conclure de tout ceci que p1 est l’un des entiers q1 , q2 , . . . , qs , ce
qui est impossible car p1 < q1 < q2 < . . . < qs .
1 −1 α2 β1 −1 β2
Conclusion : p1 = q1 . Dans ces conditions, pα
1 p2 . . . pα
r = q1
r
q2 . . . qsβs . Ce sont là deux décomposi-
tions en produit de nombres premiers d’un entier naturel non nul strictement inférieur à n. Par hypothèse
de récurrence, r = s et pi = qi et αi = βi pour tout i ∈ J1, rK, c’est terminé. 

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La définition suivante repose intégralement sur l’existence et l’unicité de la décomposition de tout entier naturel non
nul en produit de nombres premiers.

Définition  (Factorisation première, valuation p-adique) Pour tout n ∈ N∗ , il existe une et une seule famille presque
nulle vp (n) p∈P d’entiers naturels — i.e. dont tous les éléments sont nuls sauf un nombre fini d’entre eux — telle que :
Y
n= pvp (n) . Cette décomposition est appelée la factorisation première de n.
p∈P

Pour tout p ∈ P, vp (n) est appelé la valuation p-adique de n. L’entier pvp (n) est la plus grande puissance de p qui divise n.

n o
Exemple Comme 60 = 22 × 3 × 5 : v2 (60) = 2, v3 (60) = 1, v5 (60) = 1 et vp (60) = 0 pour tout p ∈ P \ 2, 3, 5 .

Théorème (Propriétés des valuations p-adiques) Soient a, b ∈ N∗ .


(i) Pour tout p ∈ P : vp (ab) = vp (a) + vp (b).
(ii) a divise b si et seulement si pour tout p ∈ P : vp (a) 6 vp (b).
Y min{v (a),v (b)} Y max{v (a),v (b)}
(iii) a ∧ b = p p p
et a ∨ b = p p p
.
p∈P p∈P

   En pratique
• D’après (ii) et (iii), on peut savoir si un entier en divise un autre ou connaître le PGCD/PPCM de deux entiers quand on
connaît leurs factorisations premières. C’est très pratique, mais attention : déterminer la factorisation première d’un entier
est très long quand cet entier est un grand nombre. L’algorithme de la division euclidienne et l’algorithme d’Euclide
sont incomparablement plus efficaces en général.
• Vous utilisez la formule (iii) sur le PPCM depuis fort longtemps quand vous réduisez une somme de fractions d’entiers au
13 7
même dénominateur. Quel est le plus petit dénominateur commun de + ? Ce n’est pas 12 × 30 mais 12 ∨ 30. Et
12 30
13 7 5 × 13 + 2 × 7 79
comme 12 = 22 × 3 et 30 = 2 × 3 × 5 : 12 ∨ 30 = 22 × 3 × 5 = 60. Bref : + = = .
12 30 60 60

Démonstration
Y v (ab) Y v (a) Y v (b) Y v (a)+v (b)
(i) p p = ab = p p p p = p p p
, puis unicité de la factorisation première.
p∈P p∈P p∈P p∈P

(i)
(ii) Si a|b, disons b = ak pour un certain k ∈ N∗ , alors pour tout p ∈ P : vp (b) = vp (a) + vp (k) > vp (a).
Y v (a) Y v (b)
Réciproquement, si vp (a) 6 vp (b) pour tout p ∈ P, alors pvp (a) pvp (b) , donc a = p p p p = b.
p∈P p∈P
Y min{vp (a),vp (b)}
(iii) Pour le PGCD, posons d = p . Pour montrer que d = a ∧ b, il nous suffit de montrer que
p∈P
a b  a  (i)
∧ = 1. Soit p ∈ P. Si vp (a) 6 vp (b), alors vp (d) = vp (a) donc vp = vp (a) − vp (d) = 0, donc p ne
d d d
a b
divise pas . Si au contraire vp (a) > vp (b), alors p ne divise pas . Dans les deux cas, p ne divise pas à la
d d
a b a b
fois et . En résumé, et n’ont aucun diviseur commun premier, donc sont premiers entre eux.
d d d d
n o n o
Pour le PPCM, remarquons que pour tous x, y ∈ R : x + y = min x, y + max x, y . Cette relation
est d’un certain point de vue équivalente à la relation : ab = (a ∧ b) (a ∨ b) comme on le voit ci-après :
ab Y Y
a∨b = = pvp (a)+vp (b)−min{vp (a),vp (b)} = pmax{vp (a),vp (b)} . 
a∧b p∈P p∈P

Exemple Le PGCD de 600 et 740 est 20 = 22 × 5 car 600 = 23 × 3 × 52 et 740 = 22 × 5 × 37.

Théorème (Petit théorème de Fermat) Pour tous p ∈ P et a ∈ Z : ap ≡ a [p],


et si a n’est pas divisible par p : ap−1 ≡ 1 [p].

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c Christophe Bertault – Mathématiques en MPSI

Démonstration
• Comme p est premier, il est en particulier premier avec tous les entiers compris entre 1!et p − 1. Soit
p
k ∈ J1, p − 1K. Par produit, p est alors premier avec k!(p − k)!. Or p divise p! = k!(p − k)! , donc d’après
k
! !
p p
le théorème de Gauss, p divise . Conclusion : ≡ 0 [p] ⋆.
k k

• Montrons par récurrence que pour tout a ∈ N : ap ≡ a [p]. Initialisation : 0p = 0 ≡ 0 [p].


p
!
X p k ⋆ p HDR
Hérédité : Soit a ∈ N. On suppose que ap ≡ a [p]. Alors : (a+1)p = a ≡ |{z}
a + |{z}
1 ≡ a+1 [p].
k=0
k
k=p k=0

• Pour les entiers négatifs, soit a ∈ Z \ N. Alors −a ∈ N, donc on vient de voir que (−a)p ≡ −a [p], i.e.
(−1)p−1 ap ≡ a [p]. Or (−1)p−1 = 1 si p est impair, et sinon p = 2, donc (−1)p−1 = −1 ≡ 1 [p]. Dans tous
les cas : ap ≡ a [p].

• Enfin, si a n’est pas divisible par p, alors comme p est premier, a ∧ p = 1. Or p divise ap − a = a ap−1 − 1 ,
p−1 p−1
donc d’après le théorème de Gauss, p divise a − 1, i.e. a ≡ 1 [p]. 

Exemple Il existe une infinité de nombres premiers congrus à 1 modulo 4.


De manière plus générale, le théorème de la progression arithmétique, démontré par Dirichlet vers 1840 et dont la preuve est
très difficile, affirme que pour tous a, b ∈ N∗ premiers entre eux, il existe une infinité de nombres premiers congrus à a
modulo b.
En effet Supposons par l’absurde qu’il n’existe qu’un nombre fini de nombres premiers congrus à 1 modulo 4.
Nous pouvons alors noter n le plus grand de ces nombres premiers et nous donner ensuite un diviseur premier p
quelconque de n!2 + 1, de sorte que n!2 ≡ −1 [p].
Par maximalité de n, les nombres premiers congrus à 1 modulo 4 divisent tous n!, donc ne divisent pas n!2 + 1,
ce qui fait que p n’est pas l’un d’entre eux. Or comme n > 2, n! est pair donc n!2 + 1 est impair, et donc p aussi.
Conclusion : p ≡ 3 [4], disons p = 4k + 3 pour un certain k ∈ N.
 p−1
D’après le petit théorème de Fermat modulo p : 1 ≡ n!p−1 ≡ n!2 2 ≡ (−1)2k+1 ≡ −1 [p], donc finalement
2 ≡ 0 [p], i.e. p = 2 — contradiction.

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