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opérations militaires contre Gaza en 2012 et 2014 L’argument de la « cinquième colonne » est
et qui a défendu les assassinats ciblés contre les repris en permanence par Netanyahou
responsables du Hamas. Durant la campagne, plusieurs partis religieux
Surtout, Gantz ne fait que manier les généralités de et d’extrême droite, ainsi que des membres du
bon aloi les rares fois où il s’est aventuré à discuter de Likoud à titre individuel, ont ouvertement appelé à
la question palestinienne. Questionné lors d’un forum l’annexion de toute ou d’une partie de la Cisjordanie.
public à propos de la manière dont il envisageait une (Netanyahou lui-même, en fin de campagne, a fait une
solution au conflit israélo-palestinien, il n’a avancé déclaration floue dans ce sens, promettant d'annexer
que des déclarations qui semblent tout droit sorties de les colonies israélienne pour les intégrer dans le giron
la bouche de Netanyahou : « Nous devons préserver national.) En échange, ils souhaitent proposer aux
la vallée du Jourdain comme une barrière de sécurité, Palestiniens un statut de résident sans droit de vote,
nous ne pouvons pas revenir aux frontières de 1967, une citoyenneté israélienne avec des droits réduits ou
nous devons préserver les blocs d’implantations [les alors une aide financière pour émigrer… Sachant que
colonies – NDLR], et Jérusalem restera pour toujours ces tendances ou ces politiciens feront nécessairement
unie et notre capitale. » Il a néanmoins ajouté être partie d’une coalition avec Netanyahou, et peut-être
« prêt à tendre la main en faveur de la paix : nous avec Gantz, on voit bien que la politique du statu
ne voulons pas gouverner les Palestiniens, nous ne quo risque d’évoluer.
voulons pas d’un État binational ». Il a cependant D’ailleurs, pour Menachem Klein, « la gestion du statu
refusé de se prononcer en faveur d’un État palestinien. quo repose en fait entre les mains de Mahmoud Abbas,
Même avec la meilleure volonté du monde, il est le président de l’Autorité palestinienne. Tant qu’il
difficile de voir en quoi ce discours se distingue de ne fait rien, c’est-à-dire qu’il continue à collaborer
celui du premier ministre. « Si Gantz est élu, il fera avec les services de sécurité israéliens, et tant que
du Netanyahou sans Netanyahou sur le conflit israélo- la Cisjordanie ne se soulève pas, cela peut durer
palestinien », estime un diplomate étranger en poste longtemps. Mais Mahmoud Abbas est âgé et il est
à Tel-Aviv. « C’est par ailleurs ce que l’immense malade. S’il disparaît, tout peut changer. Cette notion
majorité des Israéliens souhaite. Et, de toute manière, du statu quo est donc extrêmement fragile. »
il sera obligé de rallier à lui des petits partis religieux
pour former une coalition, qui menaceront de le faire
tomber à la moindre initiative qu’il prendra sur ce
sujet. »
Pour l’ancien ministre de l’Autorité palestinienne
Ghassan Khatib, « l’absence de tout débat sur la
question israélo-palestinienne durant la campagne
Les affiches de campagne des deux listes arabes pour le scrutin du 9 avril.
électorale est préjudiciable. Cela signifie, en creux,
que plus personne en Israël ne croit dans la solution Si le conflit israélo-palestinien a été en grande
à deux États. La seule alternative est donc un État partie balayé d’un revers du bras durant cette
binational avec un régime d’apartheid. Cela est très campagne, ou alors brandi en étendard par Netanyahou
mauvais pour les Palestiniens, mais pour les Israéliens pour promouvoir ses slogans martiaux et son
aussi. » « inflexibilité », il en est quasiment de même pour la
minorité arabe-israélienne, qui se qualifie parfois de
« Palestiniens d’Israël ». Représentant un peu plus de
17 % du corps électoral, elle devrait pourtant jouer un
rôle capital. Sauf qu’elle est tenue à l’écart.
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En 2015, tout le monde avait parlé de « moment promettant de se débarrasser de Netanyahou et de ses
historique » lorsque la Liste unie, une coalition de politiques racistes, refuse l’idée de collaborer avec les
tous les partis arabes avait remporté 13 des 120 députés arabes israéliens.
sièges de la Knesset, ce qui en avait fait la troisième Ainsi Benny Gantz a déclaré que « bien que n’ayant
force au Parlement. Mais, en 2019, cette alliance a rien contre les citoyens arabes de ce pays, qui sont des
explosé, principalement pour des raisons d’ego, et les citoyens comme les autres, je ne peux pas collaborer
représentants arabes-israéliens vont au scrutin en ordre avec leurs dirigeants politiques qui s’expriment contre
décousu, ce qui les affaiblira mathématiquement dans le gouvernement ». Comme la plupart des autres partis
la nouvelle Knesset. politiques, à l’exception de Meretz, « Bleu et Blanc »
Cependant, le cœur du problème est ailleurs : il n’envisage pas de bâtir une coalition de gouvernement
est dans la marginalisation des élus arabes par les avec les partis arabes-israéliens.
dirigeants israéliens. Ils sont en permanence tiraillés Conséquence de cette mise à l’écart, beaucoup de
entre la défense des droits de leurs administrés en tant Palestiniens d’Israël envisagent de s’abstenir le 9
que citoyens israéliens qui doivent faire face à des avril. Alors que 63 % de cet électorat s’était déplacé
discriminations grandissantes (sur le plan du mariage, aux urnes en 2015, la plupart des sondeurs estiment
des logements, des aides sociales…), et une attention que, cette fois-ci, seulement un sur deux ira voter.
toujours soutenue pour leurs « frères palestiniens » qui Une campagne de boycott a d’ailleurs été lancée sur
vivent à Gaza ou en Cisjordanie. les réseaux sociaux par les jeunes Arabes-Israéliens,
« C’est une position très difficile à tenir, explique estimant qu’« il n’y a rien à retirer de cette élection. »
un proche d’Ayman Odeh, député sortant et candidat Paradoxalement, étant donné le mode de scrutin
à la Knesset. D’un côté nos électeurs arabes nous israélien, leur abstention favorisera les petits partis
reprochent de ne pas faire assez pour eux alors que d’extrême droite alliés à Netanyahou.
nous devons nous battre en permanence contre des lois Selim, l’étudiant arabe-israélien est parfaitement
et des politiques discriminatoires qui sont approuvées conscient de tous ces dilemmes : « Si je vote, ma voix
par la majorité des élus. De l’autre, dès que nous ne servira pas à grand-chose, si je ne vote pas, je
prenons position sur la question du conflit israélo- favorise mes ennemis en même temps que je renforce
palestinien, ce que tous les élus juifs font, on nous l’apathie. » Il admet en souriant qu’il a regardé
accuse d’être des traîtres à Israël. » plusieurs fois la vidéo du rappeur Tamer Nafar, qui
L’argument de la « cinquième colonne » est repris met en scène son questionnement interne autour du
en permanence par Netanyahou et les partis de droite boycott du scrutin sous forme de match de boxe contre
qui ostracisent ainsi les élus arabes-israéliens et, bien lui-même, avant de se prononcer finalement pour la
souvent, leurs électeurs eux-mêmes (alors qu’un tiers participation. Mais, pour Sélim, « cela n’a fait que
d’entre eux votent régulièrement pour les partis juifs renforcer ma confusion. J’ai le sentiment en tant que
comme les travaillistes, Meretz ou le Likoud). Même Palestinien d’Israël d’être une balle de tennis : tout
« Bleu et Blanc », qui a pourtant fait une tentative le monde nous renvoie dans l’autre partie du court en
timide d’aller à la pêche aux électeurs arabes en leur nous tapant dessus le plus fort possible. Et quand le
match est terminé, on nous met à la poubelle ».
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