Faut-il rouvrir la mine de tungstène de Salau ? Voilà cinq ans que la question divise
Couflens, tout petit village (84 habitants) des Pyrénées ariégeoises, frontalier avec
l’Espagne. Ce débat se pose plus que jamais ces jours-ci, alors que le président chinois
Xi Jinping est en visite officielle en France et que
se multiplient les mises en garde contre une trop grande dépendance des États
européens vis-à-vis de la Chine.
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Mais cette emprise chinoise se traduit aussi par la mainmise du pays sur l’extraction et la
transformation de métaux stratégiques, difficiles à repérer et extraire et pourtant
indispensables à des technologies de pointe. C’est le cas du tungstène, qui a le double
avantage d’être très dur et très résistant à la chaleur. Idéal pour faire des alliages
destinés à l’aérospatiale surtout, mais aussi au nucléaire, au high-tech, à l’armement,
aux outils de découpe,
liste le BRGM (Bureau de recherches géologiques et minières)
La demande en tungstène va croissant, ce qui fait les affaires de la Chine qui en détient
60 % des réserves et assure 81,5 % de la production mondiale. La France ? Zéro.
Pourtant, nous pourrions être un gros producteur mondial de tungstène. Treize
gisements ont même été exploités à des degrés divers au cours du XXe siècle. Parmi eux,
la mine de Salau. « Jusqu’à 150 personnes y ont travaillé, faisant d’elle le principal
employeur de la vallée », raconte Jacques Soucasse qui y a occupé un poste de chimiste
pendant onze ans. Mais le 24 décembre 1986, rideau. La mine ferme, victime comme
beaucoup d’autres d’un effondrement des cours du tungstène orchestré depuis la Chine.
Pour Jacques Renoud, premier adjoint à la mairie de Couflens, opposé au projet comme
le maire, Henri Richl, c’est tout vu. « La présence d’amiante a déjà été déterminée du
temps de l’exploitation de la mine de Salau, le minéral n’a pas disparu en trente ans,
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lance-t-il. Il est ridicule de faire de nouvelles études aujourd’hui, d’autant plus par des
experts désignés par l’État, certes, mais payés par les porteurs de projet. »
C’est cet équilibre que menace le projet d’Apollo Minerals, aux yeux des opposants,
même si Hugo Schumann promet une mine propre et responsable, limitant au maximum
les impacts environnementaux. « Les mines propres n’existent pas, c’est du pur
marketing, fustige Solène Demonet, coordinatrice du réseau industrie à FNE (France
nature environnement) qui soutient Stop-Mine-Salau. Les techniques ont beau avoir
évolué, le principe d’une mine reste le même : on va sous terre, on fait exploser de la
roche, on extrait le minerai qui nous intéresse. Les gravats forment ensuite de grands
terrils stockés à l’air libre, bien qu’ils puissent contenir des résidus chimiques et
représentent des menaces d’éboulement ou de pollution des eaux alentour. »
L’œuf ou la poule ?
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La FNE restera très frileuse sur ces projets d’explorations tant que plusieurs garanties ne
sont pas apportées. « Celles notamment que tout soit fait pour réduire nos utilisations
de ces métaux stratégiques et améliorer au moins leur recyclage, illustre Solène
Demonet. Celle aussi que les minerais extraits en France y soient aussi transformés et
n’alimentent pas un marché mondialisé souvent peu soucieux des considérations
environnementales. »
Transition énergétique: «Le bilan écologique de l’extraction des métaux rares est
déplorable»
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