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Surfaces et intériorité | Cabanès Jean-Louis
Surface et
intériorité chez
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18/4/2019 Surfaces et intériorité - Surface et intériorité chez Henri Michaux - Presses Universitaires de Bordeaux
Henri Michaux
De L’Espace du dedans aux Émergences-
Résurgences
Éric Benoit
p. 93-118
Texte intégral
« je ne sais quel miroitement, en dessous, peu
séparable de la surface concédée à la rétine »
Mallarmé
1 « J’écris pour me parcourir », déclare Michaux. C’est
effectivement sur le mode spatial de l’intériorité et de la
surface que s’exprime chez lui la subjectivité, et que se
présente l’activité d’écriture qui en découle : comme en
témoigne le titre du recueil dans lequel Michaux rassemble
anthologiquement l’essentiel de son œuvre, L’Espace du
dedans ; ou comme en témoigne encore cet autre titre,
Émergences-Résurgences, livre dans lequel Michaux
commente sa production de dessins et de peintures, et
montre comment sous la surface du papier se discerne une
profondeur : des têtes, des visages, apparaissent sur la page,
participant ainsi à la fois de la surface, et d’une intériorité
mystérieusement latente sous la surface.1
2 Indiquons d’emblée que ces deux termes, surface et
intériorité, peuvent d’ailleurs entrer dans un rapport de
réversibilité, « dans le sens dessus dessous » (ER p. 35) :
« Vous ne pouvez concevoir cet horrible en dedans en dehors
qu’est le vrai espace », écrit Michaux dans Face aux verrous.
3 Nous allons ici explorer les fantasmes michaudiens de
l’intériorité dans son rapport à la surface.
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ou de la représenter :
5 l’intériorité psychique, ou psycho-spirituelle, intériorité liée
à la conscience, au subconscient, ou à l’inconscient,
intériorité de ce que je pense ou de ce qui est enfoui dans
l’inconscient : dans ce modèle que le langage courant
exprime spontanément de façon spatiale, la conscience
correspond à une surface, et l’inconscient à une profondeur ;
6 et l’intériorité physique, corporelle, intériorité de la matière
qui compose mon corps, lequel occupe une portion de
l’espace tridimensionnel, comme nous l’indique l’expérience
concrète immédiate : la surface en est l’enveloppe cutanée, la
peau, et la profondeur de l’intériorité est occupée par les
organes.
7 Faut-il concevoir de façon distincte ces deux manières de
penser l’intériorité du sujet (intériorité psychique, intériorité
physique), ou peut-on envisager le lien des deux ? Le plus
intéressant et le plus fréquent chez Michaux, c’est la liaison
voire la confusion des deux, et nous aborderons ce point tout
à l’heure. Mais, parfois, le texte michaudien présente la
dissociation, la séparation des deux types d’intériorité. Dans
plusieurs de ses premiers textes, Michaux met en scène une
dissociation du corps et de « l’âme » ; par exemple dans La
Paresse : « L’âme adore nager. Pour nager on s’étend sur le
ventre. L’âme se déboîte et s’en va » (ED p. 35). C’est ici une
parodie de la représentation traditionnelle de la mort
comme séparation de l’âme et du corps ; ce que nous
retrouvons dans le poème intitulé Nausée, ou c’est la mort
qui vient : « Oh ! mon âme,/Tu pars ou tu restes,/Il faut te
décider./Ne me tâte pas ainsi les organes » (ED p. 27). De
même encore dans Révélation Michaux envisage une chute
depuis le haut d’un building : « le corps seul tombe. [...]
L’âme [...] voit son corps de près et qu’il n’est plus
habitable » (ED p. 10). Ce type de dissociation de soi à soi,
de l’esprit et du corps, tend à ruiner la validité même de
l’idée d’intériorité subjective. « Se peut-il vraiment qu’on se
survole ? » (ED p. 215) se demande Michaux. Dans une
phrase comme celle-là, où peut-on localiser l’intériorité du
sujet ? dans « on » ? dans « se » ? nulle part, — pas même
dans celui qui écrit, ni dans ce qui s’écrit. La scission portée
jusque dans l’usage des outils grammaticaux (on, se)
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4 - Extériorisations, exorcismes
37 Premier moyen d’extériorisation : le voyage. Dans ses
Quelques renseignements, Michaux évoque ses années de
jeunesse : « Il voyage contre. Pour expulser de lui sa patrie,
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Notes
1. L’Espace du dedans, nouvelle édition revue et augmentée, NRF,
Gallimard, 1966. Dans nos références citationnelles entre parenthèses,
nous abrégerons en ED.
Emergences-Résurgences, éditions Skira, Champs, Flammarion, 1972.
Nous abrégerons en ER.
Nous utiliserons aussi La Nuit remue, nouvelle édition revue et corrigée,
NRF, Gallimard, 1967 (nous abrégerons en NR) ; et Plume précédé de
Lointain intérieur, nouvelle édition revue et corrigée, NRF, Gallimard
196.3 (nous abrégerons selon le cas en P1 ou LI).
2. L’idée d’une semblable exploration se retrouve dans les premières
pages de Molloy de Beckett, où il s’agit de « contempler [...] avec d’autres
yeux [...] l’intérieur, tout cet espace intérieur qu’on ne voit jamais, le
cerveau et le cœur et les autres organes où sentiment et pensée tiennent
leur sabbat » (Beckett, Molloy, 1951, éditions de Minuit, collection
« double », p. 11). Ou encore : « Et dans le crâne, est-ce le vacuum ? »
(Malone meurt, éditions de Minuit, 1951, p. 87).
3. Le Clézio, L’Extase matérielle, Folio essais, Gallimard, 1967, pp. 135 et
139.
4. Paru la première fois en tête du livre de Robert Bréchon, Michaux,
Gallimard 1959. pp. 9-16.
5. De même chez Bechett en 1938 : « L’esprit de Murphy s’imaginait
comme une grande sphère creuse, fermée hermétiquement à l’univers
extérieur » (Murphy, éditions de Minuit, 1965).
6. Même évolution chez Beckett : « alors je n’étais plus cette boîte fermée
à laquelle je devais de m’être si bien conservé » (Molloy, 1951, éditions
de Minuit, collection « double », p. 65).
7. Varèse, lettre à Odile Vivier. Cité dans Varèse, d’Odile Vivier, Seuil
1973 p. 147.
8. « ma petite chambre » : autre figuration métaphorique de l’intériorité
subjective liée au thème de la nuit. Dans Mon Roi, texte qui commence
d’ailleurs par « Dans ma nuit », nous rencontrons deux fois l’expression
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Auteur
Éric Benoit
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