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Edito

Alex Anfruns

Le Brésil, la Caraïbe et la doctrine Monroe


Francesc Casadó

Prise d’assaut contre l’ambassade du Venezuela


à Washington, épreuve du feu pour le multilatéralisme
Alex Anfruns

--- DOSSIER FRACKING ----

Le Venezuela et la guerre de l’empire contre les Peuples :


les vautours du « fracking »
Paulo Correia

Le grand dégât de la fracturation


hydraulique en Colombie
Rodrigo Bernardo Ortega

Le dur combat contre le "fracking" en Colombie


Rodrigo Bernardo Ortega

La guerre contre le Venezuela emploie aussi


les réseaux sociaux comme une arme
Odette Diaz Fumero
L’Edito

L'actuelle tentative de l'opposition putschiste du Venezuela s'appuie sur une pression


médiatique qui vise à suspendre le jugement du public. En pariant sur le soulèvement d'une partie
des forces de l'armée, Guaido présente comme banale une issue de crise par la voie de la violence.
Les morts qui s'ensuivent sont donc assumées comme un sacrifice qui fait tourner le cycle
« mobilisation-répression-mobilisation ». Les violences provoquées par ses propres rangs, tels que les
lynchages de chavistes ou les assassinats de membres des forces de l'ordre, sont, quant à elles,
rendues invisibles car inutilisables pour le but recherché.

L'opposition n'agit pas de façon improvisée, elle déploie les phases d'un scénario longuement
mûri. Dès le jour de sa proclamation en tant que président de l'Assemblée Nationale, Guaido avait
désigné sa cible: les militaires déserteurs, à qui il promettait une amnistie s'ils retournaient leurs
armes contre le gouvernement. Pour mener à bien ce putsch, il désignait Maduro comme un
« usurpateur », en obéissant à ses maîtres de la Maison Blanche et à l'UE. Il fallait coûte que coûte
délégitimer la prise de fonctions de Maduro pour son nouveau mandat présidentiel, après son
élection en mai 2018. Par un tour de passe-passe, Guaido annonçait que Maduro avait « abandonné
le poste » selon une interprétation délirante de la Constitution, et se proclamait lui-même comme le
nouveau chef de l'Etat. Un « gouvernement parallèle » qui comptait automatiquement sur le soutien
des dirigeants de la droite latino-américaine régionale (Bolsonaro, Duque, Macri, Piñera...) réunis
dans le « Cartel de Lima ».

Depuis la victoire de l'opposition aux élections législatives fin 2015, les appels à renverser le
gouvernement de Maduro ont été permanents. A ce moment-là, le président de l'Assemblée
Nationale avait annoncé un compte à rebours infâme. Il s'agissait moins de participer à la vie
politique du pays que de créer les conditions d'une nouvelle vague de violence. Cela s'est confirmé
en 2017. En abandonnant sans explication la table de dialogue à Saint-Domingue, l'opposition avait
définitivement écarté toute solution politique. Ce sabotage porte la marque de l'administration
Trump qui, tel une tornade, a réduit en miettes la possibilité pour la droite vénézuélienne de revenir
au bon sens.

En cette année 2019, ses faucons semblent agir comme si le Venezuela était une affaire de
politique intérieure : leurs appels quotidiens en faveur d'un putsch ne suffisent plus. Désormais, la
menace qui plane, c'est une intervention armée ouverte. Le 1er mai, le Commandement Sud des
États-Unis s'est dit « prêt à toute option » pour une transition pacifique au Venezuela, tandis que
Guaidó annonce « le débrayage des employés publics jusqu'à la grève générale ». C'est connu,
l'Oncle Sam a toujours agi pour la paix et la droite pour les intérêts des travailleurs.

Alex Anfruns
Le Brésil, la Caraïbe et la doctrine Monroe

Trump peut reconnaître le pays carioca comme « un allié non-OTAN », cette condition
permettant que l’exécutif brésilien accède de manière préférentielle à l’achat de
matériels de guerre US et reçoive des formations militaires. La Colombie est déjà « un
partenaire global » depuis que l’ex-président Santos l’a annoncé l’année dernière ;
l’Argentine le fut déjà en 1998 par le président Clinton. L’adhésion de ces pays permet
aux États-Unis de contrôler, et même dominer, d’amples territoires et leurs ressources.

Francesc Casadó

La rencontre tenue en mars entre le président Jair Bolsonaro et son homologue Donald Trump
a signifié la réalisation des propositions ministérielles réalisées pour les cent premiers jours du
gouvernement carioca :

1) se réunir avec Trump à la Maison Blanche pour établir les bases de l’Accord d’association
Brésil-États-Unis, spécialement en matière de défense et sur la crise au Venezuela.

2) réaliser une visite officielle en Israël, toujours latente et compliquée après l’annonce du
transfert de l’ambassade de Tel Aviv à Jérusalem.
3) entamer une procédure de révision du Mercosur pour en flexibiliser les règles de manière à
favoriser les intérêts idéologiques et économiques des gouvernements conservateurs de la
région et, surtout, à ouvrir des chemins légaux pour une négociation bilatérale avec les États-
Unis.

4) appliquer l’exemption de visas aux citoyens étatsuniens et canadiens, qui serait ensuite
étendue au Japon et à l’Australie, un accord qui n’est pas réciproque !

Le rendez-vous des deux présidents se distingue pour les accords signés en technologie et
sécurité. Le pays amazonien a donné des garanties pour un usage non-militaire du centre
Alcántara dans l’État du Maranhao, pour le lancement de satellites et de missiles d’entreprises
étatsuniennes. En matière de défense, la surprise fut l’annonce par Trump que le Brésil sera
reconnu comme « allié de l’OTAN ». La réaction des partenaires de l’organisation fut de
rejeter l’entrée du Brésil dans l’OTAN ; l’Allemagne a rappelé que seuls des pays européens
pouvaient entrer dans le Traité de Washington et, il y a plusieurs mois, le président français
avait suggéré que le nouvel exécutif d’extrême droite au Brésil mettait en danger les accords
entre le Mercosur et l’Europe.

Trump peut reconnaître le pays carioca comme « un allié non-OTAN », cette condition
permettant que l’exécutif brésilien accède de manière préférentielle à l’achat de matériels de
guerre US et reçoive des formations militaires. La Colombie est déjà « un partenaire global »
depuis que l’ex-président Santos l’a annoncé l’année dernière ; l’Argentine le fut déjà en 1998
par le président Clinton. L’adhésion de ces pays permet aux États-Unis de contrôler, et même
dominer, d’amples territoires et leurs ressources. Le président argentin Mauricio Macri a
autorisé, sans l’accord explicite du Parlement, l’installation de plusieurs bases militaires US
dans des zones riches en hydrocarbures et en ressources aquifères. La droite latino-américaine
et des Caraïbes semble décidée à faire partie d’un empire non territorial dont la capitale serait
Washington.

Avant la rencontre publique des deux présidents, le ministre des Relations extérieures du
Brésil, Ernesto Araujo, a tenu une réunion avec l’amiral Craig Faller, chef du Commando Sud
des États-Unis, pendant laquelle fut traitée la future coopération en matière de défense,
marquant ainsi une nouvelle étape d’alliances bilatérales qui met fin au système actuel de
relations basées sur la paix régionale.

Le Commando Sud a été créé sous l’ombrelle de la doctrine Monroe exprimée dans sa
maxime : « L’Amérique aux Américains ». Cette déclaration de principe qui, au 19e siècle,
dénonçait le colonialisme européen, s’est efforcé ensuite à placer tout un continent dans l’aire
d’influence des États-Unis. La nouvelle relation asymétrique nord-sud fut le facteur essentiel
de l’apparition la Doctrine de Sécurité Nationale, Washington s’octroyant ainsi le droit de
préserver l’ordre économique et politique régional pendant la guerre froide grâce aux
dictatures militaires. Aujourd’hui, les États-Unis, en tant que leader de l’OTAN, défendent
leur hégémonie géopolitique face aux intérêts de la Chine par une nouvelle gouvernance dans
laquelle les Nord-américains préfèrent l’aliénation du reste des nations propre au modèle de
globalisation, alors que le géant asiatique dit respecter la souveraineté interne de chaque pays
et la construction de ses propres systèmes économiques.
La doctrine Monroe menace le Venezuela, Cuba et le Nicaragua d’une nouvelle étape de la
guerre froide. L’anticommunisme comme arme utilisée par le putschiste Guaidó, élevé à la
présidence depuis le Bureau ovale de la Maison Blanche contre le gouvernement progressiste
de Nicolás Maduro, ou le discours d’extrême-droite de Bolsonaro affirmant que « le
Venezuela ne peut pas continuer de cette manière. Ce peuple doit être libéré et nous croyons
et espérons, évidemment, le soutien étatsunien pour que cet objectif soit réalisé ».

Quant à Cuba, elle est menacée par l’imminente activation du Titre III de la loi Helms-Burton
par Washington. Cette norme prévoit la dénonciation auprès de tribunaux étatsuniens de toute
entreprise qui investit dans des terrains ou des immeubles sur l’île caribéenne appartenant à
des citoyens US qui ont été expropriés lors de la révolution castriste, ou qui plus tard ont
acquis la nationalité US. Cette norme a été approuvée par le Démocrate Bill Clinton en 1996
et, grâce à elle, sortent renforcés les principes fondamentaux de la doctrine Monroe : le
nationalisme économique et le protectionnisme réactionnaire. Trump défend avec véhémence
toutes ces mesures à cause « de l’interférence de nations étrangères dans cet hémisphère et
dans nos affaires. Les États-Unis ont récemment renforcé leurs lois pour mieux pouvoir
scruter les investissements étrangers pour raisons de défense devant les menaces à la
sécurité ».

Ceux qui sont vraiment lésés par l’application de la loi Helms-Burton seront Cuba et l’Union
Européenne, car de nombreuses entreprises européennes utilisent des biens expropriés mais
légalement acquis. Au cas où cette normative devait prospérer, le Vieux continent prévient
qu’il ouvrira une dispute devant l’Organisation mondiale du commerce et activera devant les
cours européennes des règles pouvant bloquer les sentences étatsuniennes.

Traduit par Jac Forton


Prise d’assaut contre l’ambassade du
Venezuela à Washington, épreuve du feu
pour le multilatéralisme

Soutenue par le département d’État US, l’opposition vénézuélienne a annoncé qu’elle


prendrait le contrôle de l’ambassade de Washington cette semaine. D’immédiat, un
groupe de solidarité s’est réuni à l’ambassade et a fait une déclaration basée sur les
droits et la souveraineté du Venezuela en vertu de la Convention de Vienne. Celle-ci a
été signée par près d’un millier de personnes en seulement quelques jours.

Alex Anfruns

Cette déclaration est signée par un Collectif de Protection de l’Ambassade, qui s’est
rapidement constitué en rassemblant plusieurs groupes pacifistes dont Answer Coalition,
Codepink ou encore Popular Resistance. Un jour avant la prise d’assaut annoncée, Kevin
Zeese, un de ses porte-paroles, expliquait que les membres du collectif « ne sont pas intimidés
parce que ils ne sont pas en train d’enfreindre la moindre loi ». De surcroît, dans un autre
message, Zeese rappelait qu’une tentative du Département d’État signifierait une « violation
du droit international, et que des arrestations des membres du collectif seraient « illégales » et
passibles de poursuites légales, car ces personnes se sont installées avec l’autorisation des
autorités vénézuéliennes. Craignant l’action imminente des forces de l’ordre, le collectif a
appelé les militants pacifistes de tout le pays à se rassembler et à aller défendre l’ambassade
pendant tout le weekend.
Depuis le début de l’année, ces offensives, qui cherchent à priver le gouvernement de Nicolas
Maduro de ses réseaux diplomatiques à l’étranger, ont gagné en intensité en pariant sur l’effet
que ces actions provoqueraient à l’échelle internationale. Il y a deux mois, le 23 février,
quelques membres de l’opposition vénézuélienne avaient tenté en vain d’expulser Mme
Claudia Salerno, ambassadrice du Venezuela à Bruxelles, après avoir revendiqué la légitimité
de Juan Guaido et de ses représentants. Cela s’est produit la même semaine où deux autres
attaques ont eu lieu contre l’ambassade du Venezuela au Costa Rica et en Équateur. En mars
dernier, le représentant de Guaidó avait déjà pris le contrôle du consulat du Venezuela à New
York et de deux immeubles appartenant au ministère de la défense vénézuélien. C’est à ce
moment-là qu’il avait désigné le trophée manquant à sa collection : la prise de l’ambassade à
Washington.

Contrairement au cas européen, où des actions de renversement du droit international sur le


sol des pays concernés seraient perçues négativement par les autorités, soucieuses de leur
image face à l’opinion publique (1), la vision trumpiste du monde qui prévaut aux US cherche
à la défier ouvertement par le biais d’incessantes provocations. L’arrestation de Julian
Assange, après que le gouvernement équatorien ait décidé de revenir sur l’asile qu’il lui
accordait depuis sept ans dans son ambassade à Londres, prouve que les États-Unis sont
déterminés à détruire le système du droit international en creusant les fissures qui existent à
l’intérieur des pays. C’est ainsi que le terme « allié » a perdu tout son sens dans le contexte
actuel, et l’obéissance aveugle devient la valeur suprême. Le dialogue, la médiation, l’écoute,
l’échange de points de vue et le respect d’autrui, gages de civilité, sont jetés à la poubelle sans
ménagement. La vision du monde managériale à la Trump est conforme à la défense des
intérêts US. Mais, comme le dicton espagnol le rappelle sagement, l’urgence a toujours été
mauvaise conseillère…

Départ de l’OEA et nouveau souffle des pays non alignés

Cette prise symbolique devait survenir peu avant que le Venezuela abandonne l’Organisation
des États Américains (l’OEA), comme cela est prévu dans l’ordre du jour de ce samedi 27
avril. En effet, en 2017 la vice-présidente vénézuélienne Delcy Rodriguez avait manifesté sa
volonté de quitter cet organisme suite aux multiples tentatives d’exclure ce pays, qui se sont à
chaque fois soldées par un vote insuffisant de ses pays membres. Lors des sessions spéciales
au conseil permanent de l’OEA, l’agenda unilatéral anti-Venezuela de son secrétaire général
Luis Almagro a essuyé de nombreux revers, mettant en évidence son activisme presque
obsessionnel en faveur des intérêts US. Le 10 avril dernier, la reconnaissance d’un nouvel «
ambassadeur du Venezuela à l’OEA » envoyé par Guaido, a encore provoqué le rejet d’une
dizaine de pays membres.

Ce 27 avril sera également l’occasion d’une journée de mobilisation pour le chavisme et


l’opposition, pour des raisons opposées. Les premiers en feront une journée de résistance et de
défense de la souveraineté nationale, tandis que les seconds célébreront un pas en avant dans
l’architecture de son gouvernement parallèle, soutenu par une toute fragile béquille dorée
made in Washington.
Le pays connaît un siège de plus en plus étroit, depuis que le président Obama a signé en
janvier 2015 un décret considérant le Venezuela comme « une menace extraordinaire à la
sécurité des Etats-Unis » (2). Les sanctions infligées à des hauts fonctionnaires vénézuéliens
et la confiscation de 11 milliards de dollars appartenant à CITGO, la filiale de PDVSA basée
aux US, sont la continuation d’une même et unique politique étrangère étasunienne, menée
depuis la fameuse doctrine Monroe : dominer les pays latino-américains en les empêchant de
tisser des liens de coopération entre eux et avec d’autres puissances.

Jusqu’ici, la recette du coup d’État pour le Venezuela s’est heurtée à une réalité têtue : le
soutien du peuple à sa tradition d’indépendance politique, incarnée dans les forces armées
bolivariennes. L’action hors la loi de ce secteur putschiste de l’opposition vénézuélienne à
l’étranger, et notamment sur le sol étasunien, pourrait ainsi déclencher un nouvel élan de
solidarité avec le Venezuela.

Mais la mémoire de la période des années 70 devrait également nous alerter. Dans le cadre du
Plan Condor, la persécution et l’assassinat des opposants politiques, notamment du Chili
d’Allende, par les agents de Pinochet avait dépassé les frontières avant que l’administration
US ne décide de les freiner. C’est ainsi que le 21 septembre 1976, un attentat à la voiture
piégée avait ciblé l’ancien ambassadeur et ministre d’Allende, Orlando Letelier, assassiné
dans les rues de Washington aux côtés de son assistante. (3)

Quoi qu’il en soit, le peuple vénézuélien est la dernière préoccupation des gouvernements qui
ont reconnu Guaidó comme leur nouvelle mascotte. Ces attaques à la souveraineté du
Venezuela contribuent à dégrader davantage la situation des Vénézuéliens de la diaspora, car
les représentants de Guaidó ne possèdent pas la moindre compétence dans l’aide à la gestion
des intérêts commerciaux et dans les services consulaires pour les citoyens vénézuéliens. La
reconnaissance de Juan Guaidó par environ 50 pays n’est qu’une coquille vide destinée à
nourrir l’illusion d’une alternative politique au chavisme.

Pendant ce temps-là, le gouvernement vénézuélien continue à renforcer et à développer ses


liens avec d’importants alliés sur le plan international, tels que la Russie ou encore la Turquie.
La récente tournée du ministre des affaires étrangères, Jorge Arreaza, en Europe, au Moyen
Orient et en Afrique, ainsi que son action résolue au sein du Mouvement des Pays non
Alignés, sont une preuve palpable de cette « défense du multilatéralisme » et de la
« diplomatie de la paix ». Le Venezuela n’est pas seul !

Notes :

1) Cela ne veut pas dire pour autant que les objectifs des puissances européennes ainsi que leur modus
operandi diffèrent véritablement. Un document déclassifié de l’agence étasunienne d’intelligence
montre que les pays européens ont montré de l’intérêt à reproduire le schéma de répression à vaste
échelle que les Etats-Unis ont déployé dans les années 70 dans les pays latino-américains, via le « Plan
Condor ». Voir aussi notre entretien avec M. Almada.
2) « Il y a une volonté délibérée de cacher ce qui se passe au Venezuela », entretien avec
l’ambassadeur de la République bolivarienne du Venezuela pour l’UE, mars 2015.
3) Pour approfondir sur les dessous de cette affaire, lire l’ouvrage Les années Condor – Comment
Pinochet et ses alliés ont propagé le terrorisme sur trois continents, par John Dinges (Éditions La
Découverte)

Photo : Embassy Protection Collective


DOSSIER SPECIAL FRACKING

L'empire du "fracking" se positionne autour du Venezuela :


Colombie, Guyana, Brésil, Argentine, tous ont été pris dans la
spiral du fracking.
Les populations essayent de s'organiser contre cette méthode
de déprédation, fait illustré par les articles que nous vous
présentons ici.
Loin d'être un problème exclusif de l'Amérique latine, la
fracturation hydraulique -appelée "extraction non-
conventionnelle" ou "puits verts" par les experts marketing des
groupes pétroliers- est désormais une menace planétaire.
Le Venezuela et la guerre de l’empire contre les Peuples :
les vautours du "fracking"

L’objectif annoncé des vautours est de venir en « aide humanitaire urgente aux victimes
du socialisme chaviste et d’appliquer massivement dans le sol de la République
bolivarienne la technique d’exploitation pétrolière connue sous le terme de "fracking" ».
Il s’agit là d’une ancienne et prédatrice méthode d’exploitation d’hydrocarbures qui
« optimise » le séchage plus ou moins efficace des réservoirs par le « simple fait » d’injecter
des millions de litres d’eau à haute pression. Cela provoque la pénurie d’eau potable
accessible aux populations. Il est primordial de préciser qu’à cette eau est mélangée plus
d’une centaine de produits chimiques, dont l’acide chlorhydrique et autres substances
cancérigènes, qui finiront tôt ou tard dans les aquifères/nappes phréatiques,
empoisonnant les captations d’eau des villes et villages.

Paulo Correia

Reçus à bras ouverts, notamment par les gouvernements limitrophes de Jair Bolsonaro au Brésil
et de Iván Duque Márquez en Colombie, les géants de l’exploration pétrolière n’en peuvent
plus d’impatience. Déjà présents pour la plupart sur le territoire vénézuélien, ils sont contrariés
par la campagne de Nicolás Maduro, lancée en 2015, contre les méthodes prédatrices de
fracturation hydraulique. Celle-ci les empêche jusqu’à présent de mener « librement » leurs
opérations. Cette technique est aussi connue sous le nom de « extraction de gaz et pétrole de
schiste par fracturation hydraulique » ou "fracking" en anglais -que je traduirais par viol de la
Terre.
L’objectif annoncé des vautours est de venir en « aide humanitaire urgente aux victimes du
socialisme chaviste et d'appliquer massivement dans le sol de la République bolivarienne la
technique du "fracking" » -autant dire une méthode assassine ! Il s’agit là d’une ancienne et
prédatrice méthode d’exploitation d’hydrocarbures qui « optimise » le séchage plus ou moins
efficace des réservoirs par le « simple fait » d’injecter des millions de litres d’eau à haute
pression. Cela provoque la pénurie d’eau potable accessible aux populations. Il est primordial
de préciser qu’à cette eau est mélangée plus d’une centaine de produits chimiques, dont l’acide
chlorhydrique et autres substances cancérigènes, qui finiront tôt ou tard dans les
aquifères/nappes phréatiques, empoisonnant les captations d’eau des villes et villages.

Voir vidéo

La méthode utilise un début de forage vertical ou conventionnel, de profondeur variable jusqu’à


2 km, auquel est appliqué au niveau du réservoir une déviation importante du puits, devenant
en ce point -kick off point ou point de départ- un puits horizontal ou non conventionnel, foré
jusqu’à 3 km de long. Le contact à l’horizontal avec les formations géologiques huilières est
fortement allongé par rapport à la méthode conventionnelle -normalement sur des roches
poreuses-, mais comme la roche réservoir est ici plus compacte, elle a besoin d’être fracturée
sur plusieurs interventions dans toute sa longueur. Pour rendre l’extraction possible, beaucoup
plus de puits sont nécessaires, ce qui signifie l’application d’un grand nombre d’injections
chimiques.

L’extérieur des tuyauteries du puits est injecté et revêtu de ciment. Pour créer un contact des
tuyaux avec la roche productive à fracturer, il faut déflagrer des charges explosives au bout du
puits. Les industriels clament la propreté de la méthode arguant le puits entouré par du ciment,
mais ce n’est cependant la réalité dans la zone productive, cible des explosifs et du "fracking"
où des failles et autres discontinuités géologiques peuvent emmener les produits de la
fracturation et contaminer les nappes d’eau souterraines. De plus, le revêtement du puits en
ciment n’est sûrement pas éternel, ce qui engendrera des contaminations plus importantes à
moyen et/ou à long terme. L’erreur humaine lors d’opérations si complexes techniquement n’est
jamais improbable.

Dans le processus de fracturation des roches, une partie piégée du gaz -le méthane, CH4- finit
par s’échapper dans l’atmosphère. Alors qu’en France l’agriculture/sylviculture est la principale
responsable des émissions de ce puissant gaz à effet de serre -25 fois plus puissant que le CO2-
, les scientifiques ont commencé à réaliser l’énorme sous-estimation planétaire d’émissions de
méthane en provenance des puits de pétrole et de gaz de schiste.
CH₄ (ppb) Données : AEE

2000

1800

1600

1400

1200

1000

800

600

1970
1750
1770
1790
1810
1830
1850
1870
1890
1910
1930
1950

1980
1984
1988
1992
1996
2000
2004
2008
2012
2016
Graphique 1 – Concentration atmosphérique de CH4 en parties par milliard (ppb)

S’ajoutent les réactions des composants acides avec les roches carbonatées qui produisent du
CO2 -dioxyde de carbone-, tout cela en amont du raffinage et de la combustion finale
d’hydrocarbures dans nos industries, nos voitures.

-Bonjour la lutte contre le réchauffement climatique. Merci à l’empire de ce beau cadeau, une
sorte de legs aux générations futures -une multitude de poisons répandus dans l’atmosphère, la
mer, les rivières, le sol et un changement mortifère du climat assuré.

Quand Emmanuel Macron et une bonne partie des pays de l’UE valident un usurpateur comme
Juan Guaidó dans une posture suiviste de Donald Trump -président du pays siège de la majorité
des entreprises prédatrices usagères du "fracking" à grande échelle-, ce sont les techniques de
fracturation hydraulique qu’ils valident et tous les graves inconvénients, empoisonnements qui
en découlent.

Le poids et l’influence des groupes pétroliers sur les gouvernements du vieux continent sont si
forts que ces derniers se plient volontairement sous un honteux asservissement à ces entreprises
massacreuses sans scrupules. Et ne croyez pas que les vampires ne vont revenir à la charge en
France pour nous aider à devenir « producteurs de malheur = gaz de schiste ». L’argumentation
se revêt constamment de points exclusivement positifs, taisant détériorations, dégradations et
saccages cependant systématiquement induits : créer des emplois, faire croître l’investissement,
l’autonomie énergétique… stop à ce baratin ! Halte à la destruction de notre unique, singulière
et bien aimée planète Terre !

L’impact du "fracking" à la base de l’actuelle crise vénézuélienne

La production de pétrole de l’Arabie saoudite est, depuis quelques années, étirée à sa limite
maximale. Afin de baisser les cours pétrolifères les États-Unis d’Amérique ont décidé en 2011,
à la suite des printemps arabes, d’envahir les marchés avec leur propre production, celle des
réserves stratégiques -à grande profondeur, dans les roches-mères à huile, plus compactes,
seulement exploitables par fracturation hydraulique.
Les USA sont aujourd’hui premier producteur mondial de brut, surpassant la Russie et l’Arabie
saoudite avec environ 12 millions de barils par jour. Ils sont aussi tout en haut de la liste pour
le gaz naturel avec 734 milliards de mètres cubes -m³- en 2017.

Production nord-américaine de brut en


millions de barils/jour Données : EIA
12
11
10
9
8
7
6
5
2010
2000
2001
2002
2003
2004
2005
2006
2007
2008
2009

2011
2012
2013
2014
2015
2016
2017
2018
Graphique 2 – La production s’envole, la planète crève

Les responsables des politiques US ont ainsi fait usage de cette arme de destruction massive
environnementale au détriment de la santé de leurs concitoyens [1], [2]. Inonder les marchés
avec leur production permet aujourd’hui d’imposer l’interdiction d’achat du pétrole iranien et
de fragiliser les pays qui dépendent de la vente de brut.

Production de "pétrole de schiste" des


USA en millions de barils/jour Données :
EIA

Eagle Ford (TX) Spraberry (TX Permian)


Bakken (ND & MT) Wolfcamp (TX & NM Permian)
Bonespring (TX & NM Permian) Niobrara-Codell (CO & WY)
Mississippian (OK) Austin Chalk (LA & TX)
Woodford (OK) Rest of US 'tight oil'
2,000
1,500
1,000
0,500
0,000
01-juil.-11

01-juil.-17
01-juil.-10

01-juil.-12

01-juil.-13

01-juil.-14

01-juil.-15

01-juil.-16

01-juil.-18
01-janv.-10

01-janv.-11

01-janv.-12

01-janv.-13

01-janv.-14

01-janv.-15

01-janv.-16

01-janv.-17

01-janv.-18

01-janv.-19

Graphique 3 – Tight oil = shale oil = pétrole "serré" de schiste


L’objectif ultime de cette méthode correspond à déstabiliser un maximum de pays à potentiel
pétrolifère avec des guerres, la mise en place de gouvernements ultra-libéraux et diffuser le
pillage partout. La chute des cours a été multifactorielle -ralentissement de l’économie chinoise,
accès aux marchés du pétrole iranien en 2016- mais elle se doit surtout à l’augmentation de la
production nord-américaine.

Prix du Brent en Europe ($/baril) Données : EIA


140

120

100

80

60

40

20

0
juil.-2005

juil.-2016
janv.-2000

nov.-2001

août-2004

mai-2007
avr.-2008
juin-2006

janv.-2011

nov.-2012

août-2015

mai-2018
juin-2017
sept.-2003

sept.-2014
oct.-2002

févr.-2010

oct.-2013
mars-2009
déc.-2000

déc.-2011

Graphique 4 –L’arme de destruction massive -le "fracking"- et la chute des cours du brut

Comme conséquence nous avons constaté la dégringolade des économies brésilienne et


vénézuélienne, qui ont entraîné le coup d’État au Brésil contre Dilma Rousseff en 2015/2016
et le début des problèmes économiques du gouvernement de Nicolás Maduro en 2013/2015,
exacerbés par le sabotage généralisé des impérialistes occidentaux [3]. Certains oseraient
prétendre ce fait fortuit : il s’agit des deux États qui consacraient le plus de recettes pétrolières
à des mesures sociales, contre la pauvreté et pour l’accès de tous à une vie digne.

L’exemple « vautouresque » du pillage de l’Angola

En tant qu’ex-géologue diagraphiste et ex-ingénieur de données de forage, je vais essayer de


résumer nos actes à Cabinda, sur plateforme en mer profonde (426 m) dans le bloc 14 -mon
chez moi de 2006 à 2008. L’enclave de Cabinda -entre la République Démocratique du Congo
et le Congo Brazzaville- est responsable de plus de 50 % des exportations angolaises de pétrole.
La production de brut en Angola avoisine 1,5 million de barils par jour.
Vue aérienne de l’enclave de Cabinda, Angola

Le consortium CABGOC -détenu par l’américain Chevron + les partenaires européens Total +
Eni + Galp + l’angolais étatique Sonangol- contrôle les opérations d’extraction pétrolière à
Cabinda. Je décris ici une fraction infime des opérations sur le bloc 14.

CABGOC -Cabinda Gulf Oil Company- a foré une série de puits conventionnels à 90 km de la
côte angolaise dans le bassin du Congo. Au centre de cette multitude de puits, ils ont construit
en 2006 une méga plateforme collectrice -« CPT » ou « Compliant Piled Tower », un
investissement de 2,2 milliards de dollars-, qui pompe et dégaze les hydrocarbures produits par
tous ces puits.

On forait souvent des « puits injecteurs » autour de chaque puits producteur afin de maintenir
un différentiel de pression dans le champ et ainsi s’assurer que l’or noir se « dirige » dans les
puits producteurs. Si à la fin de la stabilisation d’un puits producteur, sa mise en production ne
fournissait pas de débit, alors à ce stade on voyait arriver les représentants d'Halliburton avec
leur bateau-container -le "Frac boat"- qui pompaient vers l’intérieur du puits une solution fluide
à base d'acide chlorhydrique et toute une panoplie de produits chimiques prêts pour la suite,
déjà sur place, gérés par la compagnie des fluides/boues de forage.
Le "Frac boat" avant le "Frac job", Bassin du Congo, Cabinda, Angola

Cette soupe fluide acide/toxique incorporait une espèce de billes de sable -« proppants »,
« agents de soutènement » en français- permettant de maintenir ouvertes les micro-fractures de
la roche réservoir, créées par l’injection acide à haute pression, amenant le fluide carboné piégé
dans la roche à fluer dans le puits -dans le mélange gaz/huile, à grande profondeur/haute
pression plusieurs composantes de la fraction gazeuse sont à l’état liquide.

Mon poste consistait à aider à monitorer les opérations de forage dans leur ensemble. C'est à ce
stade que j'ai compris être complice d'opérations de fracturation hydraulique acide. Et il en est
ainsi sans cesse, d'un puits vers un autre, pour obtenir le maintien de production à un certain
niveau et bien "presser" le réservoir jusqu'à la dernière goutte exploitable. Le pétrole était
contenu dans des roches sableuses, poreuses et donc, théoriquement, non cibles de "fracking".
Question pertinente, piste pour d’autres travaux d’investigation : les grands « majors » pétroliers
sont-ils aujourd’hui en train d’utiliser cette méthode dans tous les champs pétrolifères
planétaires ?… !
La merveilleuse Cabinda : terre tropicale, Peuple généreux, terre de misère

Souvent, les ouvriers de Cabinda -les « Cabindas »- m’approchaient et commentaient : « C’est


quand même fou, il n’y a pas si longtemps qu’on a foré ce puits et il faut déjà intervenir pour le
nettoyer ». Ce n’était pas du nettoyage de puits qu’on effectuait, mais du pressage de réservoir
à coup d’acide ! J’ai ainsi réalisé l’incompréhension des ouvriers locaux de la réelle nature de
nos actes. Verrouiller le savoir c’est aussi maintenir la population dans l’ignorance et loin des
sentiments légitimes de révolte.

Régulièrement, d’autres épisodes de fuites diverses, souillant immanquablement les zones


côtières, étaient relatés par les « Cabindas », qui se plaignaient de la qualité ou du manque de
poissons, ne pouvant plus pêcher ni nourrir leur famille [4].
J’entendais souvent au téléphone interne de la plateforme le mot « overboard » -« par-dessus
bord »- et ce n’était pas que de l’eau que l’on jetait…

Les navires pétroliers arrivaient directement des USA à un grand bateau d’emmagasinement
« FPSO » -une plateforme de stockage et dégazage d’hydrocarbures voisine de la méga tour
« CPT »- et repartaient dans un ballet frénétiquement incessant de vaisseaux. La « CPT »,
nommée « BBLT » -Benguela, Belize, Lobito, Tomboco, homonymes de quatre villes
angolaises- était constituée d’une tour de dégazage qui produisait une flamme gigantesque ne
s’interrompant jamais. La structure mesure 512 mètres du fond marin à la pointe de la tour de
forage.
La tour BBLT et le dégazage permanent

Les vautours se fichaient royalement de ces obscènes quantités de gaz brûlé -alors que les
Angolais en campagne n'ont même pas de gaz pour cuisiner leurs aliments-, ils n’étaient là que
pour le pétrole à raffiner sur le sol américain et ensuite permettre le plein des méga-voitures
hyper voraces en essence, destinées aux méga-embouteillages qui noircissent le ciel nord-
américain et font exploser en stress les mères et pères qui passent une bonne partie de leur temps
dans ces enfers démesurés -les bouchons- au lieu de vivre du bon temps avec leurs enfants en
famille.

Quid du désastre environnemental et tous ces produits acides, cancérigènes répandus dans la
mer/nature. Quid du réchauffement climatique et le "gaz-pillage" ! J'ai honte d'avoir participé
à ça !

L’empire du "fracking" se répand

Alors imaginons cette méthode à terre. Cela se déroule en ce moment en Colombie malgré une
forte opposition populaire [articles bientôt sur Investig’Action], en Argentine -Patagonie le
"eldorado du fracking" pour Total, Shell, Exxon à « Vaca Muerta » [5]-, en Pologne -le premier
producteur de gaz de schiste en Europe-, en Angleterre -alors qu’en Écosse se déroule une
polémique juridico-politique autour de ce sujet [6]-, aux Pays-Bas, en Hongrie, en Autriche, et
partout où la démocratie cède au capital néolibéral.

Un projet au Portugal risque de voir le jour dans un an, au détriment de la loi qui interdit
l’exploration et la production non-conventionnelles. L’entreprise « Australis Oil & Gas » dont
un des multiples actionnaires est la banque JP Morgan, dispose d’une année pour présenter une
étude d’impact environnemental et a déjà commencé à déployer une campagne de
désinformation chez les Lusitaniens.
En France les lobbies pétroliers, toujours très actifs, n’ont pas perdu de vue le Bassin de Paris,
le Sud-Est, les Cévennes, Cahors, etc. La loi interdit actuellement l’usage de cette technique en
France où personne n’est choqué d’importer du pétrole et du gaz de schiste américains [7].

Le géant de la pétrochimie Ineos -au centre de la polémique écossaise-, propriété du capitaliste


le plus riche du Royaume-Uni -Jim Ratcliffe- va investir 3 milliards d’euros dans la création
d’un site industriel sur le port d’Anvers en Belgique, qui sera approvisionné principalement par
du gaz de schiste [8]. Les russes Gazprom et les norvégiens Statoil exploitent des gisements
aux USA en utilisant la fracturation hydraulique. La Chine avec les premières réserves
mondiales de gaz de schiste au monde -31 500 milliards de m³-, entre dans la course du
"fracking". Le site de Sud-Sichuan dans le Sud-Ouest chinois a produit en 2018 autour de 4,2
milliards de m³ de gaz.

Y aurait-il une lueur d’espoir quelque part dans le monde ?

Le Peuple, toujours le Peuple ! Il n’y a que lui pour stopper le désastre environnemental
annoncé. L’information est et sera la clé vertueuse de la légitime volonté populaire. Il faut croire
que les symboles qui représentent le combat environnemental, comme la jeune suédoise Greta
Thunberg [9] et le combat social révolutionnaire du mouvement français des Gilets Jaunes [10],
[11], soient l’étincèle qui donnera naissance à une nouvelle société juste et digne.

Pour une vie saine, stoppons les vautours du "fracking" !

Références et Notes :

Données du graphique 1 : https://www.eea.europa.eu/data-and-maps/indicators/atmospheric-


greenhouse-gas-concentrations-6/assessment

Données des graphiques 2, 3, 4 : https://www.eia.gov/

[1]-https://www.bbc.com/news/science-environment-39032748
[2]-https://www.commondreams.org/news/2011/12/01/what-killed-dunkard-creek-residents-
pennsylvania-and-west-virginia-say-fracking
[3]-https://www.investigaction.net/fr/comprendre-le-blocus-contre-le-venezuela-2e-partie-les-faits/
[4]-http://pt.rfi.fr/angola/20171117-angola-chevron-em-tribunal-por-derrame-em-cabinda
[5]-http://www.opsur.org.ar/blog/2019/03/04/en-argentine-la-patagonie-est-le-nouvel-eldorado-du-
gaz-de-schiste/
[6]-https://www.bbc.com/news/uk-scotland-scotland-politics-47709231
[7]-https://www.bastamag.net/Mauvaise-nouvelle-pour-le-climat-la-France-commence-a-importer-du-
gaz-de
[8]-https://www.lecho.be/entreprises/chimie/sans-le-gaz-de-schiste-nous-ne-pourrions-pas-investir-3-
milliards-a-anvers-ineos/10087660.html
[9]-https://www.investigaction.net/fr/vous-les-adultes-vous-chiez-sur-notre-avenir-portrait-de-greta-
thunberg/
[10]-https://www.investigaction.net/fr/gilets-jaunes-la-revolution-davril/
[11]-https://www.investigaction.net/fr/tous-au-rond-point/
Le grand dégât de la fracturation hydraulique en Colombie

La Maison Blanche a un plan géostratégique qui utilise le pétrole comme arme de pression
contre les pays du Sud, tandis qu’elle prétend abandonner la dépendance de l’importation
de brut des États du Moyen Orient qui varie entre 40 et 45 %.
Rodrigo Bernardo Ortega

Convertis en premier producteur, les États-Unis cherchent à stabiliser les prix et à réactiver leur
économie, en crise depuis quelques années. Le projet inclut : la diminution de la dépendance
des importations ; le renforcement des échanges commerciaux avec le Canada -illustré par le
nouvel oléoduc Keystone XL- ; la pressurisation des pays tiers par différentes voies afin de
généraliser l’implantation du "fracking" comme méthode d’exploitation. Ainsi le gouvernement
du président Trump a trouvé en Colombie l’endroit idéal pour mener à bien son plan de
déprédation et, en l’entreprise Ecopetrol -l’entreprise étatique colombienne d’hydrocarbures-,
un allié inconditionnel. Tout cela sans se soucier des dégâts environnementaux provoqués par
l’usage de cette technique.
Le désastre provoqué par l’entreprise Ecopetrol dans le territoire de « La Fortuna » à
Barrancabermeja, Colombie, avec le déversement de 550 barils de pétrole, confirme une fois
de plus le profond dégât social, économique et environnemental par l’extraction de ressources
du sous-sol. Selon les investigations préliminaires, 25 Km du fleuve Sogamoso sont
contaminés, plus 49 corps d’eau. Au moins 2 500 animaux ont péri et 9 personnes ont des
problèmes de santé à cause du déversement. Ne parlons pas des centaines de pêcheurs qui n’ont
plus de subsistances. Parallèlement très graves sont les dommages environnementaux qui, selon
des spécialistes, ne pourront pas être rattrapés avant 20 ans, et uniquement partiellement, donc
avec des séquelles permanentes [1]. Ce triste spectacle montre les conséquences catastrophiques
de la surexploitation de minéraux et d’hydrocarbures. Derrière l’évidente responsabilité du
gouvernement colombien sont les entreprises nord-américaines et canadiennes qui cherchent le
profit au détriment de la nature et de l'hygiène de vie elle-même.
En plus de ce scénario désolant, le ministère de l’environnement a ouvert la voie en 2017 au
"fracking" dans notre pays. Cette technique basée dans la production de pétrole et de gaz de
gisements non-conventionnels symbolise le climax de dégradation dont l’Être Humain est
capable. En effet, la fracturation hydraulique -la désignation formelle de cette méthode-
correspond en peu de mots à l’installation de tuyauteries de plus de 2 km vers le bas et 3 km
vers le côté, qui vont rompre les roches contenant du pétrole, en utilisant de l’eau à haute
pression. Néanmoins, étant donné l’infrastructure et la profondeur, l’action de l’eau n’est pas
suffisamment forte, devenant efficace seulement via l’utilisation de plus de 130 produits
chimiques mélangés à du sable. Le principal problème de cette technique est la possibilité de
contamination définitive des eaux souterraines par le biais d’infiltrations [2]. De même, le
produit qui sort des fractures rocheuses est hautement contaminé et susceptible d’arriver en
surface.
Cependant, la vice-ministre de l’énergie Rutty Paola Ortiz nous offre l’explication sournoise
selon laquelle la Colombie pourrait augmenter les réserves de brut de trois milliards de barils.
Comme si le monde allait être sauvé après une telle annonce [3]. Bien au contraire, la
fracturation hydraulique est une pratique qui provoque des risques environnementaux
imminents. En 2016 « au pays de l’oncle Sam », l’Agence de Protection Environnementale
Nord-américaine a effectué une étude prouvant une dégradation importante de la qualité et
disponibilité d’eau potable. En effet, des estimations indiquent l’utilisation de 23 millions de
litres d’eau -mélangée avec des produits chimiques- par mois en un seul puits de "fracking". Le
tout pour extraire une ressource de plus en plus dévaluée. C’est pour ces raisons que la
procédure d’extraction est si dispendieuse en termes environnementaux et économiques, mais
elle est aussi inutile car les gains en baisse ne se concentrent qu’entre les mains de quelques-
uns.
Nous devrions cependant demander aux défenseurs du "fracking" : si cette technique produit
des effets secondaires moindres, alors quelle est la raison qui conduit les pays comme la France,
l’Allemagne, la Belgique et la Suisse à appliquer des grandes restrictions ou même la
prohibition définitive ? La réponse est évidente : parce que c’est une méthode déprédatrice de
la nature, dont les effets ne peuvent être contrôlés. C’est ainsi que des millions de dollars sont
investis en avocats et scientifiques qui cherchent à dissimuler la vérité. Selon des estimations,
la quantité d’eau qui sert à rompre les roches est équivalente à la consommation domestique de
2 à 7 millions de personnes par an [4]. Une absurdité totale. Autrement dit, les multinationales
pétrolières, responsables des dommages environnementaux provoqués par les techniques
d’extraction conventionnelles, veulent maintenant tuer en assoiffant des millions de familles
dans le monde entier pour produire du brut empoisonné.
Le coupable de toute cette logique démente n’est autre que le gouvernement nord-américain
qui a produit des lois sur mesure pour les multinationales, afin d’exploiter les ressources des
pays pauvres qui, comme le nôtre, n’a pas une classe politique compétente capable de défendre
la souveraineté -entendue ici comme protection et soin du territoire national. Il existe plus d’un
million de puits non-conventionnels dans le monde, sources de secousses, de pénurie d’eau et
de contaminations irréversibles. Dans les épisodes de ce triste feuilleton il y a toujours un acteur
en commun : une quelconque entreprise des USA. En fait, le scénario géopolitique actuel est
dominé par l’hégémonie d’un nouveau protagoniste dans la production d’hydrocarbures. Par le
passé nous avons eu les gouvernements de l’Arabie saoudite et de l’Irak comme principaux
exportateurs de brut. Aujourd’hui, avec 13 millions de barils par jour, le premier producteur de
pétrole est les États-Unis [5]. Une partie de leur « succès » se doit à l’usage de la fracturation
hydraulique comme méthode d’extraction. Responsable des dommages provoqués en surface
et infligés à l’eau de son pays, le gouvernement nord-américain veut propager ce mal dans le
monde à travers de puissants groupes, prêts à payer d’énormes pots-de-vin aux gouvernements
corrompus.
La Maison Blanche a un plan géostratégique qui utilise le pétrole comme arme de pression
contre les pays du Sud, tandis qu’elle prétend abandonner la dépendance de l’importation de
brut des États du Moyen Orient qui varie entre 40 et 45 %.

Convertis en premier producteur, les États-Unis cherchent à stabiliser les prix et à réactiver leur
économie, en crise depuis quelques années. Le projet inclut : la diminution de la dépendance
des importations ; le renforcement des échanges commerciaux avec le Canada -illustré par le
nouvel oléoduc Keystone XL- ; la pressurisation des pays tiers par différentes voies afin de
généraliser l’implantation du "fracking" comme méthode d’exploitation. Ainsi le gouvernement
du président Trump a trouvé en Colombie l’endroit idéal pour mener à bien son plan de
déprédation et, en l’entreprise Ecopetrol -l’entreprise étatique colombienne d’hydrocarbures-,
un allié inconditionnel. Tout cela sans se soucier des dégâts environnementaux provoqués par
l’usage de cette technique.
En effet, les premiers impacts environnementaux commencent déjà à être ressentis dans le pays.
Sur le hameau de Pita Limón, à San Martín, département de Cesar, ont été détectées des traces
d’une substance huileuse dans des puits d’eau potable [7]. Il n’est donc pas surprenant d’y
trouver à proximité une plateforme de l’entreprise Conoco Philips, qui utilise le "fracking" pour
extraire des hydrocarbures dans le secteur. La multinationale texane a nié toute responsabilité
dans la contamination de l’eau et a assuré que cela est la cause d’autres facteurs étrangers à leur
activité de fracturation hydraulique. Toutefois, tous les faits indiquent que San Martín est la
première commune colombienne affectée par l’exploitation non-conventionnelle de pétrole.
Si on ajoute au gaspillage d’eau la contamination chimique et les séismes induits, le "fracking"
signifie en outre un problème de santé publique. Ont été recensés des nombreux cas planétaires
de dommages sensoriels, respiratoires et neurologiques suite à la consommation d’eau
contaminée avec des substances comme le plomb, le mercure, le radon, le formol, l’acide
chlorhydrique entre autres produits chimiques [8]. Consécutivement à la composition du fluide
qui entre dans le puits, les rejets/retours sont encore plus contaminés, car ils constituent un
mélange de métaux lourds, d'hydrocarbures et même de matériaux radioactifs présents dans le
sous-sol.
Les entreprises de "fracking" stockent cette eau hautement contaminée -et impossible à
réutiliser- dans des « bassins latrines ». C’est comme cacher les ordures sous le tapis. Cette
action est inutile et dangereuse car il est prouvé que « l’eau » contenue dans ces bassins
s’infiltre, contaminant les aquifères potables : un vrai attentat contre la nature.

Le dégât environnemental du "fracking"

Pour revenir au sujet de santé, quelques recherches ont suggéré des résultats inquiétants. Elles
ont établi qu’au moins 25 % des substances utilisées dans les forages de puits peuvent
provoquer un cancer et des malformations génétiques, 37 % de ces empoisonnements affectent
le système endocrinien, 40 % peuvent entraîner certaines allergies de la peau et 50 % frappent
de façon irréversible le système nerveux [9]. Avec ces risques, le dégât du "fracking" est
holistique = global. Cette façon indiscriminée de forer le sous-sol en injectant du poison qui
menace de contaminer l’eau potable, qui stérilise des milliers d’hectares de sol et qui
endommage la santé des personnes, a fourni des preuves plus que suffisantes pour qu’on en
finisse une fois pour toutes avec cette méthode. Nous savons aussi que les perforations libèrent
dans l’atmosphère du gaz méthane et contribuent ainsi à l’accélération du réchauffement
climatique.
Malgré tous les arguments économiques et environnementaux qui contredisent la supposée
vertu du "fracking", il existe un groupe de multinationales cherchant à profiter d’un contexte
politique « pro-fracking » en Colombie. Au-delà de Conoco Philips -à qui a été adjugé 33 714
hectares pour exploiter des hydrocarbures-, il y a l’entreprise canadienne Drummond -dont les
permis sont presque prêts pour l’usage de "fracking" à Cesar et dans les abords de la « Sierra
Nevada de Santa Marta », territoire des indigènes d’ethnie Wiwa, Wayúu et Yupka. D’autre
part, l’entreprise Parex Resources, également du Canada, qui exploite des puits conventionnels
à Arauca, vise à amplifier son spectre d’actions. Y sont aussi impliqués les intérêts de la plus
grande entreprise pétrolière au monde, l’américain Exxon Mobil, coupable de plusieurs
désastres environnementaux [10]. Ces deux derniers groupes sont associés avec l’entreprise
colombienne Ecopetrol, responsable de l’affreux crime environnemental cité en début d’article.
Or le directeur exécutif d’Ecopetrol, Juan Carlos Echeverry, a dit « si le "fracking" devient
interdit en Colombie, alors nous partirons au Brésil ou au Venezuela ou là on où nous laisse
faire ». Cette posture arrogante et insensée nous donne l’aperçu d’un scénario auquel des
millions de personnes seront confrontés lors de l’exploitation d’hydrocarbures, et obéit à la
volonté du gouvernement qui, en omettant des évidences scientifiques, a choisi comme
d’habitude de se plier sans aucune réserve aux directives de Washington.
La pression est si élevée que Ecopetrol n’a même pas hésité à débuter les essais nécessaires
pour pouvoir livrer aux multinationales de nombreux hectares voués à l’exploitation
d’hydrocarbures. Que dire d'une attitude impériale des États-Unis, dédaignant les nombreux et
graves inconvénients d'un modèle pour l'exporter et lui assurer un avenir certain ? [11].
Le plan stratégique des USA consiste à ouvrir une multitude de puits de "fracking" ailleurs dans
le monde, afin d’équilibrer les dommages dans son propre territoire, faisant ainsi taire les
critiques de groupes écologistes. En d’autres termes, nous sommes probablement en train
d’assister à la première ère de « l’impérialisme du "fracking" », celle de « l’accumulation par
dépossession » caractérisée par l’académicien David Harvey. Cela signifie la protection du
système capitaliste par la privatisation et l’accaparement de la terre.
Il est par conséquent nécessaire d’appeler à la raison. Si l’extraction de brut avec la méthode
conventionnelle est dévastatrice pour l’environnement, le "fracking" est une technique bien plus
nocive. Il s'agit assurément d'un attentat, une forme claire de terrorisme. L'inquiétude est
justifiée en constatant un pays tel la Colombie, riche d'une grande biodiversité, voir ses
ressources naturelles totalement au service de multinationales. Il est impératif d’affirmer que
les entreprises utilisant le "fracking" doivent abandonner le territoire colombien car la
catastrophe peut devenir irrépressible. Si on tient compte de l’avis des experts, l’avenir de cette
technique devrait être considéré négatif pour deux raisons : 1- Quand le prix du pétrole est en
dessous des 80 dollars, les gains sont réduits par rapport aux énormes investissements, 2- Les
profonds préjudices environnementaux provoqués.
Non au fracking en Colombie !
Notes :
[1]-http://www.vanguardia.com/santander/barrancabermeja/428554-nueve-personas-afectadas-y-2460-
animales-muertos-deja-derrame-de-cr
[2]- https://www.youtube.com/watch?v=RPDtD0lP1l0
[3]-https://www.elespectador.com/noticias/medio-ambiente/ministerio-de-ambiente-permite-el-
fracking-en-colombia-articulo-709782
[4]-http://www.nofrackingmexico.org/que-es-el-fracking/
[5]-https://elpais.com/economia/2015/07/10/actualidad/1436539995_579371.html
[6]-http://elsalmoncontracorriente.es/?El-fracking-como-arma-estrategica
[7]-http://sostenibilidad.semana.com/impacto/articulo/fracking-en-colombia-denuncian-
contaminacion-de-agua-en-san-martin-cesar/39500
[8]-https://birongo.aporrea.org/actualidad/a183277.html
[9]- http://www.nofrackingmexico.org/que-es-el-fracking/
[10]-https://www.las2orillas.co/las-5-gigantes-petroleras-que-arrodillaron-al-gobierno-para-permitir-
el-fracking/
[11]-https://magnet.xataka.com/en-diez-minutos/el-imperio-del-fracking-asi-ha-vuelto-estados-unidos-
a-la-cabeza-de-la-produccion-del-petroleo
Traduit du castillan par Paulo Correia
Source : La Otra Opinión
La guerre contre le Venezuela emploie
aussi les réseaux sociaux comme une arme

La fabrication incessante sur les réseaux sociaux de fausses informations concernant le


Venezuela répond à une volonté politique bien définie : augmenter -à partir des États-
Unis- les justifications nécessaires qui permettront ensuite de réclamer une intervention
militaire contre Caracas.

Odette Diaz Romero

L’agressivité verbale de la droite pour diaboliser le Gouvernement légitime du Venezuela va


de pair avec l’intensification de la manipulation médiatique. Elles ne peuvent pas exister l’une
sans l’autre. Les informations mensongères comme arme de guerre au niveau planétaire sont
actuellement utilisées par Washington pour élaborer un discours qui lui permettra d’appliquer
des mesures fortes, que se soient des sanctions financières ou judiciaires, ou encore une
ingérence plus poussée dans les affaires internes d’un pays.

Il ne faut pas oublier que c’est à partir de « fake news » ou fausses nouvelles, comme par
exemple les soi-disant « bombardements » de la Place Verte de Tripoli, en Libye,
bombardements que l’on mis sur le dos du « régime » de Muhamad el Khadafi, ou, autre
exemple, les « armes de destruction massive » en Iraq, ou, encore, l’ « attaque chimique » de
Al Assad en Syrie, que la Maison Blanche a pu justifier son intervention dans ces pays et se
présenter en « maître du monde qui vient restaurer la paix ».
Tous ces indices préparant une intervention militaire sont présents dans le scénario qui est en
train de se mettre en place au Venezuela. Pour le moment, l’objectif de Washington est de
mettre en évidence – par des moyens non-conventionnels – la dangerosité de l’Exécutif
bolivarien de Caracas et montrer qu’il y a urgence à « changer de régime ».

Le harcèlement que ce discours fait subir au Venezuela n’est pas, évidemment, une nouveauté
: il fait partie de l’arsenal médiatique et politique global qui sert à imposer aux yeux du public
l’image d’un « État en pleine déconfiture » qui s’appuie sur le « terrorisme d’État » comme
voudraient le prouver les fausses nouvelles se faisant l’écho de tortures et de persécutions
contre l’opposition.

Internet, lieu privilégié des États-Unis pour fomenter des coups d’État

Les critiques virulentes des présidents nord-américains contre le Venezuela – d’abord celles
de Barack Obama, puis celles de Donald Trump- ainsi que celles d’autres acteurs politiques
comme le sénateur Marco Rubio, ne sont pas un virus qui finira par l’emporter, que ces
hommes parviennent ou non à leurs fins.

Ces divers personnages sont les architectes du système de sécurité nationale des États-Unis.
Pour eux, Internet est une arme privilégiée pour atteindre les buts fixés par le Gouvernement
de leur pays. Leurs opérations pour influencer l’opinion publique ne sont pas des attaques à
courte vue contre l’ennemi du moment. Une enquête réalisée par le site web « Mission
Vérité », révèle que le Département de la Défense des États-Unis a créé le programme
« Réseaux Sociaux et Communication Stratégique » dans un double but : « identifier et
neutraliser les campagnes de désinformation et tromper l’ennemi par de fausses informations
afin de réduire la capacité de l’adversaire à manipuler l’outil informatique ».

Ce projet, conçu en 2011 et terminé – semble-t-il- en 2015 après avoir essuyé une vague de
critiques- fait l’objet d’analyses approfondies de la part des spécialistes en la matière qui
assurent que les structures de ce programme fonctionnent à plein, comme à l’époque de sa
création.

Cependant, ces outils conçus par le Pentagone datent d’avant la mise en action du « Centre de
Communications Stratégiques Contre le Terrorisme » (CSCC), qui, lui, utilise ouvertement
Internet comme mécanisme pour neutraliser la « propagande ennemie ».

Selon les propres mots de son fondateur, Richard LeBaron – ambassadeur à la retraite- : » le
CSCC utilise les connaissances de la diplomatie pour influencer les réseaux sociaux tout
comme les équipes SEAL (les Forces Spéciales de la Marine de Guerre) se spécialisent en
actions contre-terroristes au niveau tactique ».

Le Centre compte trois équipes pluridisciplinaires : Renseignement et Analyse, Plans et


Opérations, et Digital Outreach Team, l’équipe chargée de la planification, de l’élaboration et
de l’exécution des campagnes graphiques et de leur suivi.
LeBaron a, à plusieurs reprises, insisté sur le fait que, grâce à Twitter, la capacité d’interaction
des experts de cette dernière équipe peut se faire pratiquement en temps réel et parvient à
s’immiscer profondément dans les conversations entre « extrémistes » aux quatre coins de la
planète.

« Nos combattants sont des guerriers cybernétiques professionnels employés par le


Gouvernement des États-Unis ou recrutés dans des pays tiers. De plus, ce sont des guérilleros
passionnés par leur travail et qui poursuivent des objectifs définis avec une précision toute
militaire et des outils spécialisés ». Telle est la définition que LeBaron lui-même a donné de
son équipe de travail.

Ces réseaux opèrent à plein dans le cas du Venezuela : leurs campagnes sont d’abord perçues
comme une sorte de chaos organique engendré par des « mordus » de l’Internet, quand, en
réalité, il s’agit d’opérations soutenues ou même dirigées par des organismes d’État et des
institutions dont la hiérarchie perpendiculaire, du haut vers le bas, est fermement établie et
respectée.

Le Venezuela : cible des « fake news »

Face à ces mécanismes de siège technologique, le mouvement « Connectés au Venezuela » a


réalisé une étude pour savoir comment est vue la réalité nationale a l’extérieur du pays. À ce
jour plus de trois mille 600 fausses informations ont déjà été recensées concernant le
Venezuela.

Le manager de ce média social, Erick Lozano, a mis en garde contre la stratégie qui est mise
en place par les réseaux sociaux afin de créer une idée générale négative au sujet de la vie
quotidienne des gens au Venezuela, le but final étant de justifier l’argument de la dite « crise
humanitaire » que l’opposition de droite est en train de créer elle-même de toutes pièces.

À ce sujet, il ressort que les « fake news » sont devenues un phénomène planétaire en raison
de leurs retombées économiques et, explique Erick Lozano, les visualisations et les clips des
utilisateurs de portails digitaux engendrent de très importants bénéfices, raison suffisante pour
que les corporations possédant ces sites n’hésitent pas à mettre en ligne des informations qui
sont parfois bien loin de la réalité.

Avec la campagne de la droite locale, encouragée par l’administration Trump, et dont


l’objectif est de renverser le président de la République, Nicolás Maduro, l’un des principaux
montages imaginés au début de cette année fut l’incendie des camions qui étaient censés
apporter de l’aide humanitaire et devaient traverser le 23 février la frontière entre la Colombie
et le Venezuela.

Le but de cet incendie était d’en faire rejaillir la responsabilité sur les autorités de Caracas et
la Garde Nationale Bolivarienne, ce qui aurait justifié un coup d’État que Washington se
serait empressé d’encourager.
Ce show médiatique, conçu par les équipes de « guerriers informatiques » dans leurs bureaux
nord-américains, trouva sa concrétisation sur le territoire colombien de Cúcuta, preuve, s’il en
est besoin, que les réseaux sociaux ne sont pas exactement des endroits de joutes théoriques.

Ce sont les États-Unis qui dirigèrent cette campagne. Ce faisant, ils se mirent en marge des
règles traditionnelles régissant les médias. Plus encore : ils opérèrent contre les propres
normes des plateformes sociales et même, peut-on dire, contre le minimum de principes de
base dont devraient faire preuve les hommes politiques et les parlements du monde entier.

Cette utilisation des « fake news » contre le Venezuela, suppose non seulement la corruption
d’hommes politiques qui n’hésitent pas un instant à employer le mensonge pour parvenir à
leurs fins, mais elle nous fait également voir comment une désinformation planifiée à l’avance
est utilisée pour allumer la mèche qui déclenchera la guerre, les incendiaires étant ceux qui
ont tout intérêt à produire les réactions politiques qui leur conviennent et qui, pour ce faire,
sont prêts à créer la zizanie dans le monde virtuel. Et dans le monde réel aussi.

Source : Prensa Latina


Le dur combat contre le "fracking" en Colombie

Les coûts environnementaux et humains résultants de cette forme d’exploitation ne sont


en rien justifiables, encore moins si le profit va directement dans la poche de quelques
entreprises étrangères, ce qui autorise au gouvernement colombien les annonces
d’augmentation de l’investissement étranger. Comment une administration peut parler
de bénéfices à la population avec de tels projets tandis que partout où cette technique est
employée, les dégâts naturels sont si néfastes ?

2/11/2018, Rodrigo Bernardo Ortega


L’action du "fracking" en Colombie. Le lézard est le logo de l’entreprise pétrolière
colombienne « Ecopetrol », ancienne « Empresa Colombiana de Petróleos » [NdT]

En tant que candidat à l’élection présidentielle de 2018, l’actuel président colombien, Iván
Duque, n’a jamais assumé de position critique de l’usage du "fracking" comme alternative à
l’accroissement des réserves d’hydrocarbures. Bien au contraire, Duque s’est montré prêt à
valider cette technique comme partie intégrante du développement de ce qu’il a nommé
« l’économie orange ». Cet euphémisme a été utile pour occulter le vrai plan de son
gouvernement : l’exploitation de ressources naturelles et la réduction d’impôts des classes
privilégiées au détriment des classes moyennes.

Balsa de agua y desechos = bassin d’eau et de rejets ; deposito de agua = château d’eau ;
pizarra = ardoise = schiste faiblement métamorphisé ; arroyo = cours d’eau/ruisseau

En effet la nouvelle ministre des Mines, María Fernanda Suárez, a garanti qu’un de ses
principaux objectifs sera de « convaincre le président Duque que le "fracking" peut s’employer
de façon sûre et responsable » [1]. Selon ladite ministre, l’emploi de cette technique permettrait
l’augmentation des réserves de gaz et de pétrole de 19 et 8 ans respectivement.

La question centrale est alors : « Quelles seraient les conséquences de l’augmentation de ces
ressources ? », car le gouvernement actuel veut vendre ce procédé comme étant la nouvelle
trouvaille de la réactivation de l’économie des hydrocarbures, mais dédaigne parallèlement les
terribles séquelles répertoriées un peu partout [2].

Le dernier débat à ce sujet concernait l’installation de lourdes machines dans trois provinces de
Boyacá par l’agence nationale d’hydrocarbures en juin 2018. Les rumeurs de l’arrivée du
"fracking" dans ce département ont de suite déclenché des manifestations afin d’empêcher toute
action sans consultation populaire. Le gouvernement a ainsi été obligé de stopper les activités
de l’agence pétrolière [3].
L’entreprise a réfuté l’emploi du "fracking" dans la région en prétendant que l’équipement lourd
servirait juste pour « obtenir des informations sur le sous-sol ». La suspicion est cependant
fondée car les plans de l’entreprise polonaise Geofizyka Torún n’ont pas été communiqués.
Selon des recueils d’information, la firme étrangère a été engagée par l’agence Nationale
d’Hydrocarbures pour réaliser des études sismiques dans la région et non pas pour l’exploitation
de pétrole. Pourquoi réaliser des études sismiques sinon pour évaluer le potentiel d’un territoire
en hydrocarbures ? Cela signifie que nous sommes en présence d’une phase d’exploration qui
a, en but ultime, testé les conditions techniques qui permettent d’exploiter du pétrole et du gaz
par "fracking".

À tout cela s’ajoute le fait qu’en Colombie existent déjà 48 blocs de gisements non-
conventionnels, parmi lesquels 9 se placent dans le département de Boyacá [4]. La présence des
entreprises pétrolières a de suite éveillé la suspicion de la population des 14 communes du
département qui, à travers le président départemental Carlos Amaya du parti écologiste, a
déclaré que « jamais le fracking ne sera utilisé dans le département » car la colonne vertébrale
de sa politique est l’environnement et la gestion des ressources naturelles.

En effet, la polémique est fondée car les travaux d’exploration ont été réalisés à proximité du
lac Tota, avec des conséquences préjudiciables du point de vue socio-environnemental et
archéologique. Au-delà des considérations émises par les entreprises et leur apparente intention
de « connaître les caractéristiques du sous-sol », il est clair que l’objectif fondamental est
d’analyser la possibilité d’usage de la fracturation hydraulique au plus vite. Formulé
différemment : les études sismiques amènent juste à établir le début du "fracking" approuvé de
longue date par le gouvernement. D’où l’importance de la résistance citoyenne.
Le conflit social à Boyacá, déclenché par l’exploitation pétrolière, peut prendre une nouvelle
tournure d’après l’intérêt médiatique à l’Est du département, dans la province de Sugamuxi.
Depuis 2012, à cet endroit, l’entreprise française « Maurel & Prom » effectue des travaux
d’exploration pétrolière. Ils ont foré deux puits dans les communes de Tota et Pesca, un projet
nommé « Aire d’Intérêt Exploratoire Muisca » [5].
En dépit de la forte opposition populaire, la compagnie française poursuit les travaux et a
demandé au gouvernement la modification de son permis environnemental afin d’augmenter
son influence dans la région. Le problème de fond est en lien avec la localisation dans ce secteur
de 410 sources qui servent de captage d’eau potable pour 7 000 habitants de la province de
Sugamuxi. Si le nouveau permis était accordé, les conséquences seraient catastrophiques pour
une population qui a déjà commencé à subir les désagréments et inconvénients des études
sismiques et de la déforestation.

Manifestation contre la fracturation hydraulique : Ni ici, ni là-bas, ni aujourd’hui, ni jamais

En contre-point des manifestations populaires, Ecopetrol a essayé de négocier avec les paysans
et les habitants de Boyacá un ensemble de mécanismes qui permette l’exploration de ressources
sans générer une atteinte socio-environnementale. Néanmoins cette proposition est une
contradiction en soi car toute exploitation d’hydrocarbures génère un impact environnemental
qui se transforme en problème de santé publique.

La seule alternative viable pour les paysans est celle de l’abandon des territoires par les
entreprises, amenant par la suite le début des processus de récupération des terres. Sous la
nouvelle administration permissive, avec le consentement et le soutien d’Ecopetrol, les
entreprises étrangères et leurs mesquins intérêts économiques n’abandonneront jamais cette
activité si rentable. Cependant il subsiste une forte opposition à ces plans, mentionnée par les
médias officiels. Mais est-ce suffisant ? Il est par conséquent nécessaire de divulguer au
maximum les dénonciations des habitants de la région.

Selon la porte-parole du collectif pour la défense de la province de Sugamuxi, Patricia Corredor,


les opérations de prospection sismique génèrent des séquelles irréversibles dans les territoires.
Par exemple, 210 sources d’eau ont séché et 70 familles ont perdu leur foyer à cause de
fissurations importantes. Les paysans qui ont vu les sources d’eau sécher ne peuvent plus
arroser les champs, ce qui amène à une perte de dynamisme d’un des axes économiques
fondamentaux de la région de Boyacá, l’agriculture [6]. Comme résultat, un fort mouvement de
contestation sociale a vu le jour, promptement réprimé par la force publique.

La problématique est encore plus complexe si nous prenons en compte la feuille de route du
nouveau ministre de la défense qui cherche à « réguler la protestation sociale ». Cela signifie
réprimander toute sorte de manifestation contraire au gouvernement actuel. Scénario
préoccupant car le droit de manifester est le seul mécanisme effectif dont disposent les
communautés locales afin de rendre visibles leurs problèmes. Par contre si le gouvernement
insiste à contraindre tout mouvement anti-fracking, un grave problème se pose aux défenseurs
des droits de l’Homme.

Le "fracking" est arrivé

Comme l’a énoncé l’organisation « No al fracking en Colombia », cette technique provoque


des sérieux dysfonctionnements dans l’écosystème, notamment la réduction du volume des
ressources hydriques -foyer potentiel de conflits socio-environnementaux- contre l’effort des
secteurs locaux, qui cherchent à distribuer l’eau dans le pays de façon équitable et durable [7].

Deux approches sont ainsi en opposition : l’exploitation des ressources à tout va en bénéfice
des affaires privées dont les profits ne sont jamais assez importants pour couvrir les dégâts ;
l’usage responsable de l’eau et de la gestion environnementale comme principe d’un rapport
équilibré avec la nature. Les manifestations se déroulent à Boyacá mais aussi dans cent
communes, potentielles cibles de "fracking". Le cas le plus frappant est la surenchère entre
Ecopetrol et la communauté indigène des U’wa, qui veut l’entreprise en dehors de ses territoires
ancestraux. Ce site protégé au Nord de Santander cherche à empêcher l’entreprise
d’hydrocarbures d’intervenir avec ses projets dans les zones classées [8]. À l’instar de cette
situation, il y a des milliers d’exemples de collectifs citoyens qui sont en opposition à
l’exploitation d’hydrocarbures et qui petit à petit commencent à avoir l’attention des médias.
Gisements d’hydrocarbures "non-conventionnels" = "extraits par fracturations hydraulique",
en Colombie, 2017
La reconnaissance due aux opposants du "fracking" est de tel ordre que dans le Congrès de la
République colombienne existe un projet de loi interdisant l’usage de cette technique dans le
pays. L’objectif est d’empêcher l’exploration et l’exploitation de gisements non-conventionnels
et d’initier un processus de transition selon lequel la Colombie puisse cesser d’utiliser les
combustibles fossiles. Le projet compte avec le soutien du parti « Decentes », du « Polo
Democratico » et de la « Allianza Verde », mais aussi de certains cadres du parti « U », le
« Liberal » et le « Conservador ». Cette proposition est une riposte au gouvernement de Duque,
ce qui en fait un véritable conflit politique [9].

La situation est complexe en raison des majorités au Congrès du parti gouvernemental, -


« Centro Democratico », le parti pro-fracking-, raison de plus pour utiliser d’autres moyens et
mécanismes de lutte. La situation à Boyacá donne de l’espoir dans l’action citoyenne contre le
"fracking" en Colombie.

LA LUTTE SE POURSUIT !

Traduit du castillan par Paulo Correia

Source : La Otra Opinión

Notes :

[1]-https://www.elespectador.com/noticias/nacional/es-posible-hacer-fracking-de-manera-responsable-
ministra-de-minas-articulo-805901
[2]-http://laotraopinion.net/recursos-naturales/petroleoygas/el-gran-dano-del-fracking-a-colombia/
[3]-https://www.dinero.com/pais/articulo/boyaca-debate-la-llegada-del-fracking-a-su-territorio/259594
[4]-https://www.elespectador.com/noticias/medio-ambiente/hay-o-no-hay-fracking-en-boyaca-crece-la
polemica-articulo-795479
[5]-https://sostenibilidad.semana.com/medio-ambiente/articulo/sogamoso-y-el-proyecto-petrolero-que-
incendiaria-a-boyaca/36724
[6]-https://www.elcampesino.co/los-mas-afectados-con-la-sismica-y-el-fracking-son-los-campesinos/
[7]-https://redjusticiaambientalcolombia.files.wordpress.com/2017/03/2017-03-14-carta-presidente
santosfinalconlogos.pdf
[8]-https://www.elespectador.com/noticias/economia/los-uwas-no-quieren-ecopetrol-sus-territorios-
ancestral-articulo-644102
[9]-https://www.elespectador.com/noticias/politica/radican-proyecto-de-ley-para-prohibir-fracking-en-
colombia-articulo-803549
LE JOURNAL NOTRE AMERIQUE

MAI 2019

N° 43 / ANNEE V

REDACTEUR EN CHEF :

ALEX ANFRUNS

TRADUCTEUR/TRICE :

PAULO CORREIA, REMI GROMELLE, JAC FORTON

CORRECTEUR :

REMI GROMELLE

REMERCIEMENTS:

REPORTERRE, PRENSA LATINA, LA OTRA OPINION

GRAPHISME & MISE EN PAGE :

BAM

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