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© L'HARMATTAN, 2011
5-7, rue de l'École-Polytechnique ; 75005 Paris
http://www.librairieharmattan.com
diffusion.harmattan@wanadoo.fr
harmattan1@wanadoo.fr
ISBN : 978-2-296-56211-0
EAN : 9782296562110
50 VOIX
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SOMMAIRE
Un iconoclaste ? Pour sûr. Sinon le Pr Abdou Traoré, dit Diop, aurait confié
à plus méritant la préface de ce recueil d’épîtres édifiantes sur notre histoire
immédiate. Un génie ? On peut ne pas aimer l’homme, sa brutale franchise
et ses mots assassins. Mais là aussi, nous avons sans aucun doute affaire à un
surdoué, voire à « un torrent d’idées à absolument canaliser », comme il fut dit
de Jacques Attali. Enfin, un résistant ? Indiscutablement, c’est ce qui qualifie
le plus l’agrégé en médecine qui a fait sienne la devise du poète Abdellatif
Laâbi : donc « plonger le bistouri partout où l’homme a mal ». En somme,
une insurrection contre la souffrance de l’Homme.
Et comme l’arc d’aucun génie ne se limite à une seule corde, à ses rares
moments de détente, la guitare sous ses longs doigts, le toubib enchaîne les
notes dopantes du gambari ou celles lascives du takamba, quand il ne bat pas
le pays pour reconstituer, le temps d’une danse ou d’une nostalgie, l’orchestre
mythique de la région natale : le Super Biton National. La guitare rembarrée,
revoilà Diop sur un autre front : la création artistique. Des recueils de nou-
velles primés à l’international, des scénarios de film, le combat long et parfois
ingrat pour l’exception culturelle à travers, par exemple, le festival des Arts et
des Masques de Markala, désormais institutionnalisé.
Toutes ces activités, le chirurgien les mène de front avec un activisme po-
litique qui lui confère toute la légitimité d’aujourd’hui. Le cœur à gauche et la
patrie en tête, il prend très tôt le maquis, celui des idées pour un pays meilleur
et partageux, mais surtout celui, bien plus prenant, de l’action. Il adhère ainsi
au Parti Malien du Travail (PMT), un parti politique clandestin, et fera par-
tie, vers la fin des années 1980, de la coopérative Jamana. Avec d’autres, dont
l’ami de trente ans, Alpha Oumar Konaré, il anime l’emblématique parution
Les Échos. Le microcosme s’habitue très vite à la rubrique « Dix questions
à » que le professeur anime. Celle-ci débusque les écarts de gouvernance et
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ABDOU TRAORÉ DIT DIOP
dénonce les abus du prince. En fait, elle est l’ancêtre des épîtres contenues
dans ce livre.
La filiation est donc claire et logique et le message est que la lutte continue.
Pour que l’autre moitié ne meure plus. Pour que les limites soient marquées
et intégrées entre la gouvernance démocratique et la chefferie de canton. Pour
que les gouvernants soient rendus comptables de leurs actes. Pour qu’enfin
la sanglante rupture de Mars 1991 que le Mali a connue débouche sur une
démocratie fluide et prévisible. En ces temps où se discutent les réformes
institutionnelles, ce livre ne pouvait mieux tomber. Ce n’est peut-être pas
fortuit. Car le Pr Diop, ancien député et grand catalyseur du contre-pouvoir
citoyen, est tout autant la boîte noire d’un passé pas si lointain que la sonnette
d’alarme face aux dérives du projet démocratique.
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PREMIÈRE ÉPîTRE AUX DÉMOCRATES
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ABDOU TRAORÉ DIT DIOP
signataires. Aux autres, nous disons que la porte reste largement ouverte
pour ce débat sur la construction d’un État moderne, anti-unanimiste, libre,
républicain.
Certes, il y a eu aussi des réactions négatives de la part de certains milieux,
en parfait décalage avec les préoccupations des citoyens de ce pays, et qui
confondent allègrement leurs intérêts particuliers avec ceux de la nation. Ils
sont tombés dans les attaques personnelles, armant les mains de plumitifs
besogneux dont pas un seul n’a pris la peine de venir s’informer auprès des
auteurs du manifeste avant de se fendre en propos de caniveaux dans les
colonnes de leurs journaux. Ceux-là sont en retard d’un combat. Car notre
lutte n’est pas une lutte de personne, mais une lutte pour le respect des
principes, des règles, des lois, de l’équité, c’est-à-dire de l’égal accès à la chance
pour tous nos concitoyens.
Ne vous laissez donc pas divertir !
Mais ne vous laissez pas intimider non plus ! Notre démocratie que l’on
tente de dévoyer aujourd’hui ne nous a pas été octroyée ! Elle a été conquise
par une lutte âpre où les meilleurs d’entre nous ont laissé leur vie. Souvenez-
vous-en !
Faisons en sorte qu’en leur mémoire et pour notre devenir, ce pays ne soit
jamais une république bananière !
Le mouvement n’en est qu’à ses débuts ! Mais rappelez-vous la théorie
de l’effet papillon, dont un simple battement d’ailes pourrait déclencher une
tornade à l’autre bout du monde.
Continuez donc à vous informer sur le Manifeste pour la démocratie !
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DEUXIÈME ÉPîTRE AUX DÉMOCRATES
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Je voudrais dire à ces frères et sœurs en politique qu’il faut, selon les
Bamanan, « s’intéresser d’abord à son point de trébuchement avant de s’inté-
resser à son point de chute ». Et à ce sujet, je voudrais leur rappeler deux ou
trois choses qui me paraissent très importantes.
La première, c’est que le premier ennemi d’un parti politique est le déficit
de démocratie interne. Aucune forteresse de mensonge ou de propagande ne
peut maintenir les militants de façon indéfinie dans les carcans d’un parti
politique quel qu’il soit. La réalité, dans la plupart de nos partis politiques,
c’est la marginalisation, l’infantilisation, voire le mépris dont les militants
sont l’objet : ils constituent la masse corvéable quand il s’agit d’aller crier les
slogans creux et d’aller voter, mais leur avis n’est pas demandé quand il s’agit
de prendre des décisions importantes, comme celle de nouer des alliances
opportunistes permettant aux leaders de se tailler des postes de rente au sein
du pouvoir. C’est cela qui fragilise un parti politique et non un simple docu-
ment comme le manifeste appelant à renforcer la démocratie.
La deuxième chose qu’il me paraît important d’évoquer est intimement
liée à la première : le déficit de démocratie interne, de communication, d’ani-
mation politique est effectivement un facteur de risque pour tout parti poli-
tique. L’autre facteur qui s’associe au précédent pour lui conférer un caractère
exponentiel est précisément l’incapacité des partis politiques à se concerter,
à dialoguer, à se regrouper. Oui, beaucoup d’entre eux imploseront pour la
simple raison qu’ils n’ont aucun atout qui puisse leur donner une viabilité
durable. Car le Mali, manifestement, n’a que faire de 117 partis politiques. Et
comme, toujours selon les Bamanan, « la colonne de selles se rompt toujours
au niveau de son point de faiblesse »… Vous remarquerez avec moi que le
problème n’est donc pas le manifeste. Mais le manifeste peut être la solution.
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TROISIÈME ÉPîTRE AUX DÉMOCRATES
En 2002, la plupart des partis politiques maliens ont noué alliance avec
Amadou Toumani Touré qui était candidat indépendant à l’élection présiden-
tielle au Mali. L’auteur, en tant que militant du mouvement démocratique ayant
précisément œuvré pour l’avènement de la démocratie pluraliste, dénonce ce qu’il
considère comme une renonciation des partis politiques à leur mission d’anima-
tion politique et analyse les raisons de cette démission. Le message véhiculé par le
Manifeste pour la démocratie trouve ici un souffle nouveau.
J’aimerais commencer ce nouveau message par une petite histoire. Une his-
toire qu’aimait beaucoup raconter Billy Graham, ce grand télévangéliste amé-
ricain pendant ses campagnes d’évangélisation.
Il s’agit, disons, de la parabole de l’enfant à la main coincée dans un bocal.
Un gosse se prit donc un jour la main dans un vase de très grande valeur. Et
malgré tous les efforts de la famille pour la libérer, la main resta solidement
coincée. Tout en se demandant ce qui pouvait emprisonner cette main dans
le vase, son père, en désespoir de cause, lui dit : « Écoute, mon fils, ouvre ton
poing, serre tes doigts les uns contre les autres, étends-les tout droit comme
ça et essaie de sortir la main. » L’enfant répondit : « Tu plaisantes, papa ! Si
j’ouvre ma main, je vais perdre la pièce de dollar que je tiens là-dedans ! »
La plupart de nos partis politiques vivent exactement la même situation
que cet enfant. Ils sont prisonniers d’une situation absurde dans laquelle ils se
sont fourvoyés eux-mêmes : celle de renoncer à leur mission première, l’ani-
mation politique, au profit d’un homme qui se dit résolument indépendant,
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ABDOU TRAORÉ DIT DIOP
même s’il aime rappeler à l’occasion qu’il est un soldat (statut auquel il a
pourtant renoncé en se portant candidat à la présidentielle).
Le Mali vit dans un désert politique. Et c’est ce que le Manifeste pour la
Démocratie a dénoncé. Et c’est ce que bon nombre d’entre vous ont compris,
en s’engageant en toute liberté pour porter le nombre de signataires à plus de
800 personnes aujourd’hui et en créant déjà une dizaine de comités ADJ à
travers le territoire.
Je dis bien « désert politique », même si, paradoxalement, plus d’une
centaine de partis politiques pullulent sur la place publique dans notre pays.
Mais, au risque de me répéter, je dis que de par leur abdication bassement
monnayée, ils ont autant d’efficacité qu’un eunuque dans un harem de jeunes
filles vierges. Et pourtant, il faudra bien qu’ils sortent de cette impasse.
D’abord parce qu’ils croient tous tenir le bon bout, le pactole, alors
qu’en fait, ils ne tiennent que des miettes, l’essentiel étant dans les mains de
quelques-uns de leurs barons défroqués dont le contrôle leur a échappé depuis
belle lurette et qui ne sont aujourd’hui que de pâles fondés de pouvoir des
indépendants du Mouvement Citoyen du général ATT. Oui, l’essentiel est
ailleurs, et c’est bien pourquoi la majorité d’entre eux ne se donnent même
plus la peine d’intervenir dans les affaires de la nation, même quand elles sont
aussi cruciales que la rébellion du Nord, que la question de l’École, que les
récurrentes crises alimentaires !
Ensuite parce qu’ils risquent fort de se voir infliger une correction élec-
torale sans précédent. À force de tromper le pouvoir et de troquer leurs mili-
tants, nombre d’entre eux ne se rendent même pas compte que leurs bases leur
échappent jour après jour.
Enfin les partis politiques sont sommés par leur conscience de se libérer
de cette servitude parce que des Maliens ont fait le sacrifice de leur vie en
mai 1991 pour qu’ils puissent eux exister librement aujourd’hui. Le carré des
Martyrs à Niaréla n’est pas un cénotaphe érigé pour les besoins d’un film de
mauvais goût. C’est pour rappeler à tous le chemin de l’honneur et le sens de
l’engagement d’un peuple.
Et maintenant, j’aimerais terminer par cette citation que notre compa-
triote Dialla Konaté, brillant intellectuel officiant aux USA, a fait sienne :
« La différence entre votre passé et votre futur, c’est ce que vous êtes en train
de réaliser maintenant. »
Faites passer ce mot à vos familles politiques et à nos concitoyens !
À très bientôt !
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QUATRIÈME ÉPîTRE AUX DÉMOCRATES
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ont rarement le courage d’aller à l’encontre des idées reçues, rarement l’audace
d’aller à l’abordage des intérêts des « insiders », ces cartels de la prédation qui
infestent les systèmes politiques de nos pays pour en privatiser les ressources et
socialiser les charges. Et c’est cette trahison des clercs, sous-tendue par la véna-
lité ou l’incompétence, qui réduit nos pays à se vautrer dans un mimétisme
affligeant qui ne peut être que cause de régression. Et c’est ainsi que malgré les
prélèvements impitoyables opérées sur les citoyens, malgré les aides massives
injectées par les partenaires, malgré les taux de croissance flatteurs dont on
nous gratifie de temps à autres, malgré les institutions-vitrines de toutes sortes
mises en place, nous restons à la traîne du monde.
Oui, le projet démocratique dans nos pays se réduit à un formalisme
démocratique, à une illusion démocratique, dont l’entretien dans l’esprit des
populations vaut bien quelques rafistolages périodiques de façade davantage
pour plaire aux partenaires externes que pour la construction d’une véritable
société démocratique. Et pour ce genre de boulot, partout sur le continent
africain, nous ne manquons malheureusement pas de scribes de service qui
viennent défendre l’indéfendable. Et qui rappellent étrangement ces « dignes
et tristes farceurs » de Jacques Prévert.
Et c’est parce qu’il se moule parfaitement dans ce cadre que nous récu-
sons le rapport du CARI qui, loin de proposer des réformes susceptibles de
consolider la démocratie, n’avance que des mesures propres à défendre les
intérêts sordides d’une « élite » politique par le renforcement de la prédation
des populations maliennes.
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COMMENT MEURT L’AUTRE MOITIÉ DU MALI
dont la seule qualité évoquée est celle de professeur. L’on ne sait dans quel
domaine ils exercent leurs compétences, ce qui laisse planer un sentiment de
malaise sur la pertinence de leur présence dans le Comité.
Par ailleurs, nous affirmons que le choix porté sur M. Daba Diawara
comme président d’un tel comité est discutable. Un tel choix aurait largement
gagné en crédibilité s’il avait porté sur un expert indépendant (un universi-
taire par exemple). Or en tant que chef d’un parti politique, M. Diawara ne
peut pas être crédité d’indépendance dans le cadre d’une telle mission.
2. Comment ont été adoptées les deux centaines de recommandations
issues des travaux du comité d’experts ?
Le CARI fait une impasse remarquable sur la question. Or il est très im-
portant de connaître cette procédure pour s’assurer que les recommandations
(qui vont engager l’avenir de tout un peuple) reflètent effectivement les avis
les plus partagés au sein du comité.
3. Comment ont été gérées les questions éthiques ?
Cette question est d’autant plus importante que M. Soumana Sako,
ancien Premier ministre du Mali, vient d’apporter un démenti formel aux
allégations du président du CARI qui avait déclaré sur une radio étrangère
que tous les anciens Premiers ministres avaient été approchés par le Comité.
Mais à sa décharge il faut souligner que le Comité n’a pas inscrit le nom de
Sako sur la liste des personnalités auditionnées. L’on peut donc fermer un
œil (mais seulement un œil !) sur cette anecdote, en concluant à un lapsus.
L’erreur est humaine, après tout !
Mais ce qu’il y a de plus inquiétant sur le plan éthique, c’est le flou artis-
tique observé autour des conditions d’audition des différentes personnalités,
surtout issues de partis politiques ou d’organisations de la société civile. On
ne sait pas si elles ont été invitées intuitu personæ ou si elles ont été dûment
mandatées par leurs structures. Le détail est de taille, car une fois de plus, nul
ne sait si les avis émis par ces personnalités reflètent eux aussi les opinions
réelles de leurs structures respectives.
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COMMENT MEURT L’AUTRE MOITIÉ DU MALI
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voit dans nombre de pays qui ne se portent pas plus mal que nous ! Le temps
est venu de se désaliéner franchement des idées reçues, de la routine : elles
sont peut-être confortables à court terme, mais meurtrières à long terme.
Et c’est cette vision et/ou ce courage politique qui ont manqué au CARI.
Le Comité a tellement tenu à rester sur les sentiers battus qu’il propose en plus
la création d’un Sénat. Que vaut un Sénat en dehors du fédéralisme ou d’une
décentralisation assurant une véritable autonomie de gestion à des régions
tenues par des conseils élus par les populations ? Dans ces conditions, qu’est-
ce un sénat, sinon une autre succursale du pouvoir central, sinon qu’un autre
poste budgétaire à satisfaire inutilement au détriment des besoins essentiels
des populations ?
La démocratie n’a certes pas de prix, mais elle a un coût. Et ce coût pèse
de plus en plus lourd sur la tête des populations pour lesquelles le rapport du
CARI constitue un « grand bond en arrière », selon le mot de Serge Halimi.
Nous terminons cette réflexion par la question du maintien de l’article 30,
qui a donné lieu à un tapage médiatique de fort mauvais goût à notre avis.
Parce que nous ne voyons pas en quoi le fait de respecter une clause
constitutionnelle doit donner lieu à des éloges, quand bien même des voyous
politiques ont osé violer dans d’autres pays leur serment. Ceux qui respectent
le leur ne font après tout que leur devoir de citoyen.
Parce que nous pensons, par ailleurs, que le rapport CARI ne ferme pas le
débat : contrairement à ce que d’aucuns claironnent urbi et orbi, nous pensons
que les dispositions proposées peuvent largement être battues en brèche et
permettre à un ancien président de se porter candidat. Mais cela est un autre
sujet de débat que nous aborderons en temps opportun.
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CINQUIÈME ÉPîTRE AUX DÉMOCRATES
Ceci est une épître particulière : l’auteur essaie de démontrer que les progrès
sociaux sont le fruit d’une quête permanente qui doit constituer un engagement
constant pour chaque militant du mouvement démocratique et pour tout homme
tout court.
La légende dit qu’Isaac Newton se reposait sous un arbre quand soudain, une
pomme lui tomba sur la tête. Et Newton de se poser la question de savoir
pourquoi donc la pomme était tombée et pourquoi donc les objets tombaient
toujours de haut en bas. Bien sûr, avant lui, beaucoup de gens avaient déjà dû
recevoir des pommes et autres objets sur la tête, au point d’en avoir des bosses.
Des gens satisfaits, très satisfaits de leur sort, de l’environnement ambiant, de
la marche du monde. Et bien sûr, ils ne s’étaient pas posé de question. Dans
le meilleur des cas, ils s’en étaient peut-être posé quelques-unes, mais avaient
dû, dès les premiers écueils, battre sagement en retraite : pourquoi diable se
triturer la cervelle et se compliquer la vie quand on est si satisfait ?
Mais Newton, lui, n’était pas satisfait. Il chercha, et chercha encore, et
finalement trouva que deux corps libres dans l’espace s’attirent avec une force
proportionnelle au produit de leurs masses et inversement proportionnelle
au carré de la distance qui les sépare. La loi de la gravitation universelle était
née. Elle s’ajoutera à bien d’autres trouvailles, provenant de la quête d’autres
insatisfaits qui refusèrent la facilité des évidences, parfois au péril de leur vie.
Et c’est de ces refus que naquit le nouveau monde qui nous fait bénéficier
aujourd’hui des avions, des vaccins, de la télévision, de l’ordinateur, du télé-
phone cellulaire…
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