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RÉSUMÉ:
Le préambule du cours présentera l’apport des sciences humaines et sociales
dans la formation en architecture et en urbanisme.
La première partie du cours comprend l’exposé des notions de société : relations
sociales, faits sociaux et culture. Elle traitera de la dimension sociale de
l’espace, montrant que la limite de l’espace est doublement sociale et que
l’orientation permet d’organiser et de qualifier socialement l’espace.
Par ailleurs, la partie suivante du cours, montrera que l’espace, champ
d’intervention professionnel de l’architecte, doit être saisie dans son imbrication
entre ses dimensions spatiale, sociale et culturelle. Ainsi, les relations
dialectiques entre l’espace et la société sont abordées à la troisième partie du
cours, à travers trois exemples d’études. Ces études illustrent l’influence des
empreintes sociales et des valeurs culturelles sur l’espace, mais aussi, elles
montrent les effets des changements spatiaux sur le fonctionnement social.
Enfin, la dernière partie du cours se présente sous forme d’atelier qui exercera
l’étudiant à la méthodologie et aux techniques de la recherche, à la
documentation bibliographique, à l’analyse de texte et à la pratique de l’exposé.
2018-2019
Cours initiation aà l’anthropologie et aux sciences sociales (premieà re anneé e architecture)
PLAN
INTRODUCTION 5
PREMIERE PARTIE : INITIATION A LA SOCIOLOGIE DE L’ESPACE 8
CHAPITRE 1 : DEFINITION DE LA SOCIOLOGIE 8
I- Qu’est ce que la sociologie ?................................................................................................8
II- Des outils pour appréhender concrètement les faits sociaux ?..........................................9
III- Les grands courants de la sociologie classique...............................................................10
CHAPITRE 2 : Qu’est-ce que la sociologie de l’espace 13
I- Tentative de définition de la sociologie urbaine...............................................................13
II- Spécificité de la sociologie urbaine (l’imbrication entre le social et le spatial)..............13
III- La ville objet de recherche de la sociologie urbaine :.....................................................13
IV- Quelques approches sociales de l’espace :.......................................................................15
CHAPITRE 3 : La notion d’ « acteur » et la production sociale des espaces 18
I- La notion d’acteur social...................................................................................................18
II- Qu’est-ce qu’un acteur urbain ?.......................................................................................19
III- L’interaction entre les acteurs urbains et la production des espaces de la ville.............19
IV- Les acteurs urbains et leurs visions de la ville..................................................................21
DEUXIEME PARTIE : INITIATION A L’ANTHROPOLOGIE 23
DE L’ESPACE 23
CHAPITRE 1 : DEFINITION DE L’ANTHROPOLOGIE 23
I- Qu’est ce que l’anthropologie ?.........................................................................................23
II- Les grands courants de l’anthropologie............................................................................24
CHAPITRE 2 : DEFINITION DE L’ANTHROPOLOGIE DE L’ESPACE 25
I- OBJET d’étude et objectif..................................................................................................25
II- DOMAINES D'INVESTIGATIONS.................................................................................25
CHAPITRE 3: L’anthropologie de l’espace domestique 27
I- Pourquoi s’intéresse –t- on à l’espace domestique ?........................................................27
II- Les caractéristiques de l’espace domestique ?..................................................................27
TROISIEME PARTIE : EXEMPLES D’ETUDES DE L’INTERACTION : SOCIETE –
ESPACE – CULTURE 31
INTRODUCTION :Comment les sciences sociales aborde-t-elle la question de l’espace ? 31
CHAPITRE 1:EXEMPLE D’ÉTUDE N°1 : 32
L’ Etude de la ville arabo-musulmane de Tunis : expression d’un code social / stratégie et
enjeux de création 32
I- La typologie et la structure urbaines islamiques classiques.............................................32
II- Organisation spatiale de la médina : Expression d’un code social.................................33
III- Choc colonial et déstructuration des villes islamiques traditionnelles...........................38
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Cours initiation aà l’anthropologie et aux sciences sociales (premieà re anneé e architecture)
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Cours initiation aà l’anthropologie et aux sciences sociales (premieà re anneé e architecture)
BIBLIOGRAPHIE :
- ABDELKEFI Jallel, La médina de Tunis : espace historique, édition Alif, 1989, 280 pages.
- BERRY CHIKHAOUI Isabelle et DEBOULET Agnés, Les compétences des citadins dans le
monde arabe : Penser, faire et transformer la ville, collection Hommes et sociétés, édition
Karthala, 2000, 408 pages.
-BOUHDIBA Abdelwaheb et CHEVALIER Dominique (sous la direction), La ville arabe
dans l’islam, histoire et mutations, Actes du 2ème colloque de l’ATP « Espace socio-culturels et
croissance urbaine dans le monde Arabe », Crathage –Amilcar, 12-18 Mars 1979, imprimerie
Al Asria, Tunis, 1982, 573 pages.
- BILILI TEMIM Leila, Histoire de familles, mariages, répudiations et vie quotidienne à
Tunis. 1875- 1930, édition Script, Tunis, 1999,280 pages.
- CLAVEL Maïté, Sociologie de l’urbain, Série Ethnosociologie, collection Anthropos,
2dition Economica, Paris, 2002, 124 pages.
-DORTIER Jean François (sous la direction), Le Dictionnaire des sciences humaines, édition
Sciences Humaines, PUF, 2004, 857 pages.
- MAUSS Marcel, Sociologie et Anthropologie, Paris, PUF, 1967.
- SANTELLI Serge, Le creuset méditerranéen : Tunis, collection la ville, les éditions du demi
cercle/ CNRS éditions, Paris, 1995, 128 pages.
- STAZAK Jean François, L’espace domestique : pour une géographie de l’intérieur, in
Annales de géographie, t110, n°620, 2OO1, pp 339-363.
- ZANNAD Traki , Symboliques corporelles et espaces musulmans, collection Horizon
maghrébin, édition Cérès Productions, Tunis, 1984, 155 pages.
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Cours initiation aà l’anthropologie et aux sciences sociales (premieà re anneé e architecture)
INTRODUCTION
L’espace qu’il soit architectural, urbain ou géographique, fait intervenir trois dimensions
essentielles :
1-La matière sous ses trois formes : solide, liquide et gazeuse. (exemple : la masse d’air
nécessaire pour un bâtiment). Cette matière consiste également en un ensemble de dispositif
technique et bâti que nos sociétés mettent au service des populations et des hommes, il s’agit
des maisons où nous habitons, des rues …
2-Les représentations mentales qui intègrent la dimension abstraite de l’existence
humaine, c’est-à-dire les idées, les émotions, les théories, les perceptions, etc.
En effet, l’homme se met en relation avec l’espace par le biais d’un phénomène que les
psychologues appellent la perception. A partir de ce moment (c’est à dire le moment où
l’homme perçoit l’espace dans lequel il se trouve) il se développe une réaction entre l’homme
et l’espace sachant qu’il va donner un sens à cet espace. Autrement dit, les homme perçoivent
l’espace et se le représentent dans le sens où ils font une construction des images mentales de
cet espace.
3-l’organisation sociale dans la mesure où les hommes vivent dans des réseaux structurés
(famille, groupe professionnel, groupe ethnique, une nation, le monde, etc...)
(3) Espace
abstrait :
Remarque : toutes les recherches faites par les théoriciens tournent autour du
fonctionnement de ce triangle. En effet, chaque discipline essaie de comprendre quel est le
pôle le plus important dans la définition de l’espace : est-ce le pôle (1), (2) ou (3) ?
Par exemple :
-la psychologie dans ses recherches concernant l’espace, part de la dimension n° (2).
-La géographie se base sur la dimension n° (1)
-Les écrivains, les philosophes quant à eux essaient de déterminer le sens de l’espace tout
en s’appuyant sur la 3ème dimension.
L’espace en tant qu’environnement est donc à la fois une infrastructure matérielle, une
réalité sociologique et culturelle et une dimension symbolique et psychologique.
L’étude de l’espace ainsi définie est nécessairement pluridisciplinaire, elle inclut donc
l’ensemble des sciences de l’ingénieur (architecture, génie civile, etc.) et l’ensemble des
sciences humaines économiques et sociales. Le champ sociologique s’attache tout
particulièrement à étudier la dynamique sociale entre les différents intervenants dans la
production et la reproduction de cet environnement spatial qu’autant de celle de ses usagers.
L’anthropologie sociale et l’ethnologie permettent de saisir les spécificités et les identités
culturelles des habitants qui utilisent cet espace afin de comprendre la signification de ses
éléments architecturaux ou urbain au niveau de leur vécu.
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L’histoire aussi ouvre des perspectives d’analyse importante dans la mesure où elle permet
d’interpréter les différentes identités des groupes sociaux et leur évolution dans le temps.
Enfin, la science économique s’attache à montrer les déterminants qui conditionnent toute
production de l’espace en s’appuyant surtout sur les notions de valeur, de force productive, de
mode de production …
Cette pluridisciplinarité n’est pas seulement le résultat d’une interprétation des sciences
sociales, mais elle est aussi un pont entre le domaine des sciences de l’ingénieur de
l’architecte et le domaine des sciences de l’homme.
Ce pont n’a pas pour seul but la compréhension de l’espace qui nous entoure, mais il nous
permet aussi d’agir sur lui en vue de le transformer selon une approche scientifique et globale.
Une approche claire et globale de « l’espace construit » devrait permettre aux architectes
de concevoir, d’imaginer et de créer un environnement urbain qui soit le plus socio-
dynamique possible. Elle devrait les doter de compétences pour concevoir des objets spatiaux,
à leur identité culturelle et à leur évolution dans le temps.
Qu’est-ce que l’espace ?
Selon le Larousse, l’espace est « l’étendue indéfinie qui contient et entoure tous les
objets ». Dans cette définition le terme le plus important est sans doute « indéfinie » (par
exemple : les oiseaux volent dans l’espace indéfini ). Celui-ci peut d’ailleurs s’étendre dans
son acceptation mathématique (c’est-à-dire qu’on ne peut limiter et qui est synonyme d’infini
puisque l’espace apparaît dans ce domaine comme « un ensemble de points, de vecteurs, etc.,
muni d’une structure, spécial ».) ou dans son acceptation banale (« qu’on ne peut définir »).
Cependant, bien que ce terme est devenu récemment d’un emploi généralisé, souvent excessif
et dénué de rigueur, il constitue la raison d’être d’un certain nombre de disciplines comme par
exemple :
-les études spatiales qui se consacrent aux objets expédiés par l’homme au-delà de
l’atmosphère ;
-l’astronomie et l’astrophysique qui étudient la constitution, la position et les mouvements
des corps dans l’espace céleste (l’espace infini) ;
-les sciences de la terre, et en particulier : la géologie, la géographie …
-l’aménagement et l’urbanisme qui traitent de l’intervention volontaire et organiser de
l’homme pour « disposer avec ordre » (aménager) hommes, activités et équipements sur une
portion de la surface terrestre, et pour assurer une évolution et un développement des villes à
la fois harmonieux et efficace ;
-l’architecture, c’est-à-dire la conception, la réalisation et la décoration des édifices ;
-les arts plastiques, telles la peinture où l’espace (à travers la perspective en particulier)
tient un grand rôle.
Sachant que la discipline qui nous intéresse le plus c’est l’aménagement et l’urbanisme, il
devient important, à ce niveau de la définition de l’espace, de dépasser la question de savoir
ce qu’est l’espace en général, pour aborder une autre question précise et plus rattachée à
l’objet de notre cours : c’est quoi un espace urbain ?
Qu’est-ce que l’espace urbain ?
Nous entendons par « espace urbain » l’ensemble des dispositifs techniques et bâties que
nos sociétés ont mis et mettent au service des populations urbaines. Il s’agit des maisons où
nous habitons, des rues dans lesquelles nous marchons, des autoroutes sur lesquelles nous
circulons, de tous les autres réseaux de transports, de tous les réseaux énergétiques qui
produisent et acheminent la force dont nous avons besoins pour faire marcher nos machines,
de tous les réseaux communicationnels qui nous permettent de transmettre et de recevoir des
informations à distance, etc.
C’est tout l’univers du construit et du bâti, c’est tous ce que les hommes et les femmes ont
rajouté à leur environnement naturel.
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produisent à un moment donné dans la société et à mettre en relation ce fait social avec
d’autres caractéristiques sociales. Le fait d’être marié ou célibataire, ou le fait d’appartenir à
tel ou tel groupe social, a-t-il une influence sur la fréquence du suicide dans une société ?
Le sociologue étudie donc la vie sociale sous un angle différent de celui des autres
sciences sociales, il se pose d’autres questions.
Tous les sociologues n’ont pas la même conception de la sociologie
La difficulté à définir la sociologie tient à ce que tous les sociologues n’ont pas la même
conception de la sociologie. Deux définitions classiques s’opposent, celle de DURKHEIM et
celle de WEBER.
La sociologie explique les faits sociaux par d’autres faits sociaux :
Pour Emile DURKHEIM la spécificité de la sociologie est d’expliquer les faits sociaux
par d’autres faits sociaux. Les faits sociaux « consistent en des manières d’agir, de penser et
de sentir, extérieures à l’individu, et qui sont douées d’un pouvoir de coercition en vertu
duquel ils s’imposent à lui » (E.DURKHEIM, Les règles de la méthode sociologique, 1895).
Ainsi, par exemple, le suicide est un fait social qui s’explique par d’autres faits sociaux
(l’appartenance à une catégorie sociale, la situation de famille, etc.…). Dans cette approche la
société exerce une influence sur le comportement de l’individu même si cette influence
n’exclut pas que l’individu conserve une certaine autonomie. C’est ainsi que même si le
célibat est un facteur de suicide, tous les célibataires ne se suicident pas.
La sociologie compréhensive :
Max WEBER propose une approche de la sociologie différente. Pour Max WEBER
l’essence du social est l’interaction entre les acteurs sociaux : la collision entre deux cyclistes
par exemple, est un simple événement au même titre qu’un phénomène de la nature. Serait
une activité sociale , la tentative d’éviter l’autre et les injures, la bagarre ou l’arrangement à
l’amiable qui suivrait la collision. N’importe quel contact entre les hommes n’est pas de
caractère social, seul l’est le comportement propre qui s’oriente significativement d’après le
comportement d’autrui (WEBER, Economie et société).
Dans cette approche, la question centrale qui se pose au sociologue est de savoir quel sens
donner à une activité sociale. Comment l’interpréter. Pour cela, il importe de se demander
quelle signification l’acteur social donne à sa relation avec l’autre. Il s’agit de comprendre la
subjectivité de l’acteur social en interrelation avec d’autres acteurs sociaux, c’est pourquoi on
parle à son propos de sociologie compréhensive.
II- Des outils pour appréhender concrètement les faits sociaux ?
Pour connaître la réalité sociale, le sociologue dispose de différentes méthodes qui
peuvent souvent se conjuguer. Selon la nature des informations dont il dispose, le traitement
des données peut relever soit des méthodes qualitatives, soit des méthodes quantitatives.
Examinons quelques exemples de modalités permettant au sociologue de regrouper des
informations sur la réalité sociale.
L’observation participante :
L’immersion d’un observateur dans un groupe où il participe aux activités du groupe dans
le but de mieux comprendre les comportements au sein de ce groupe. Cette démarche a
surtout été pratiquée par des ethnologues pour l’étude des société primitive, mais elle
s’applique aussi à l’étude des sociétés contemporaines : par exemple un sociologue peut
s’intégrer à une secte pour étudier les mécanismes de pouvoir au sein de celle-ci.
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Le comportement individuel est ainsi dit rationnel, c'est-à-dire il vise une satisfaction
maximum en fonction de ses ressources et ses contraintes.
On peut dire que le risque encouru à s’engager dans un investissement scolaire varie selon
la classe sociale. L’enfant et sa famille choisissent de s’engager, ou pas, dans une stratégie
d’investissement scolaire selon leurs attentes et leurs motivations.
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Durkheim considère qu’il existe quatre catégories de l’esprit sous-jacentes à l’organisation sociale des sociétés
sans écriture : la force énergétique, le lieu spatial, le moment temporel, et l’agencement de l’ensemble, qui en
assure les correspondances et la pérennité.
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vertu d’une contrainte physique comme un corps agirait sur un autre corps mais par la
connaissance que nous en prenons (….) ; il y a là un genre de pensée ou de perception
collective qu’on pourrait appeler une donnée immédiate de la conscience sociale » (1970, p
182-183). Il convient de s’attacher aux représentations collectives de l’espace qui renvoient
aux sentiments communs » de la société. Or la production de l’espace urbain est le résultat
d’une action collective.
Cette théorie s’applique d’abord au marché foncier. Le niveau de prix du sol, urbain ou
rural, est un puissant déterminant de la répartition des groupes sociaux dans l’espace. Il se
répercute sur les prix immobiliers et les loyers. Ainsi, l’explication des prix fonciers se révèle
fondamentale. Cependant il existe dans l’espace urbain des phénomènes qui dépassent la
théorie économique classique de l’ajustement offre- demande. Non seulement les prix
fonciers sont déterminés par l’anticipation des acheteurs et des vendeurs (ce qu’on pourra
faire de tel ou tel terrain), mais ils reposent également sur un prix d’opinion qui renvoie à la
représentation de l’espace qu’en ont les acteurs (par exemple ce que peut devenir tel ou tel
quartier). En outre l’intervention publique de l’état ou des collectivités locales modifie
considérablement les conditions du marché dans la mesure où elle contribue à transformer
substantiellement la nature du sol. Ainsi, l’équipement d’une ville en réseaux de transport la
désenclave et la valorise.
Maurice Halbwachs, évoque les actes d’expropriation des biens individuelles opérés par
les acteurs publics à Paris entre 1854 et 1870 ; Il pense que ces actions émanent d’une logique
et une politique publique qui vise à améliorer la circulation, l’hygiène, à réprimer les
manifestations populaires et à favoriser le retour de la bourgeoisie. Pour Halbwachs, une
telle action répond sans la savoir à des besoins et à la pression collective.
En effet, si Maurice Halbwachs s’intéresse autant à la morphologie sociale, c’est qu’il
pense que derrière les formes générales (importance, étendue, localisation, etc.) d'un
phénomène, il y a " un monde de représentations et d'états affectifs ", " des pensées, une vie
psychologique "; " toutes les formes [...] ne nous intéressent que parce qu'elles sont
étroitement liées à la vie sociale, qui consiste toute entière en représentations et tendances ".
Ainsi, " la morphologie sociale part de l'extérieur. Mais ce n'est pour elle qu'un point de
départ. Par ce chemin étroit, c'est au cœur même de la réalité sociale que nous pénétrons ",
" la morphologie sociale, comme la sociologie, porte avant tout sur des représentations
collectives " (Halbwachs Morphologie sociale, colin, 1970, p. 10, 11, 13 et 18).
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R. Boudon distingue trois phases importantes dans l’analyse d’une théorie de l’action :
Cours initiation aà l’anthropologie et aux sciences sociales (premieà re anneé e architecture)
Le contexte de l’action :
le cadre dans lequel
II- Qu’est-ce qu’un acteur urbain ?
Quand on parle de la dynamique et des transformations de l’espace urbain, on se pose en même temps
la question de l'origine de ce phénomène. Et la réponse, on la cherche parmi les individus et les institutions
qui sont censés être intéressés par la ville et ses enjeux.
Remarque : Il existe aussi dans une ville un certain nombre d’autres acteurs qui sont impliqués dans la
dynamique urbaine par le biais des compétences, des jugements, des savoirs ou des représentations qu’ils
ont sur ou de la ville. C’est le cas de l’habitant, du politique ou de l’expert qui sont intéressés, chacun à sa
manière et en fonction de sa « spécialité », par les processus et les changements urbains.
III- L’interaction entre les acteurs urbains et la production des espaces de la ville
L’interaction des acteurs urbains :
Entre les différents types d’acteurs urbains précédemment cités, il s’établit des relations déterminées
qui vont retentir sur le mode de gestion de la ville, les formes d'intégration des comportements et les
processus de participation des personnes formant la collectivité urbaine.
Il n’y a pas un acteur urbain qui a le privilège exclusif de l’action et de la réaction vis à vis de la
transformation de l’espace urbain, mais tous les acteurs urbains devraient interagir les uns avec les autres.
Le concept de l’action en sociologie
1- La notion d’action sociale selon Weber
Pour Weber le sociologue doit principalement
s’efforcer de saisir la signification que donne un
individu à son action. C’est la raison pour laquelle la
démarche qu’il préconise est dite compréhensive. Elle
vise à comprendre les motifs qui poussent l’individu à
adopter tel type de comportement.
Weber distingue quatre formes d’actions sociales : il
s’agit de divers modèles d’action possibles pour un
individu.
- L’action traditionnelle : s’appuie sur les
2
I J. LECOIN « Quelle planification urbaine pour le XXIe siècle ? » -in Les cahiers de l'IAURIF –n°104-105 août 1993
Ces professionnels mettent l'accent sur la forme, l'espace de la ville, sa structure architecturale, sa
morphologie et sur le rapport entre les espaces bâtis et non bâtis. Ils s'intéressent aussi à l'esthétique du
cadre de vie, l'adaptation des projets à leur site et à l'articulation de la ville avec son environnement.
CONCLUSION:
La production de l’espace urbain est une pratique pluridisciplinaire
Progressivement, l'urbanisme est devenu une pratique pluridisciplinaire. Aux architectes sont venus se
joindre divers ingénieurs (dont ceux spécialisés dans les problèmes de voirie), puis des sociologues, des
hygiénistes, des géographes, des économistes, des juristes, des paysagistes, etc. Ainsi ont été créés des
bureaux d'études, la plupart privés, avant que ne soient formés, dans des municipalités importantes ou dans
des groupements urbains régionaux, des agences d'urbanisme. À ces intervenants viennent utilement
s'associer, se joindre, les décideurs politiques souvent éclairés par la consultation des citoyens concernés.
5
(Kaufmann J.-P, La Chaleur du foyer Analyse du repli domestique, Paris, Klincksieck, 192 pages ; et
Rosselin. C, Entrée, entrer. Approche anthropologique d’un espace du logement, in Espaces et Sociétés
78, p.83-96, 1995.
l’espace le plus approprié le plus chargé, celui qui porte le plus d’émotions et affects de souvenirs et
espoirs. Le lien fort entre identité et territoire explique que l’espace domestique participe de la
« conscience individuelle »6. Associé à la sphère privée, à la famille et au
Corps, cet espace physique concourt à la composition du territoire d’intimité et donc la construction du
soi. S’est sans doute pourquoi l’odeur de la maison a une telle présence dans les souvenirs d’enfance.
Après avoir dit ce qu’est l’espace domestique, il n’est pas inutile d’ajouter ce qu’il n’est pas
nécessairement. Il n’est pas forcément fixe une tente, une caravane peuvent en tenir lieu. Il n’est pas
forcément permanent comme le prouvent la hutte ou l’iglou, Il n’est pas indispensable ou accessible à
tous : certains vivent à l’hôtel d’autres sous les ponts. Il n’est pas toujours différencié du milieu extérieur :
il peut être matériellement très ouvert et sa limite peut être symbolique ; il ne vise pas nécessairement à
protéger physiquement du milieu extérieur. Un tapis jeté sur le sol peut, à lui seul, constituer un espace
domestique.
La dualité structurelle de l’espace domestique
L’espace domestique est à la fois signifié et signifiant objet et sujet. En effet d’un côté l’espace
domestique est un miroir dans lequel on peut voir les structures et les valeurs essentielles d’une société
donnée. La structuration de la famille, les oppositions de genre, les normes sexuelles, les formes de
production économique, les conceptions du privé et du public la vision du monde, les rapports au milieu,
les goûts et les dégoûts, les idéologies etc. ; se traduisent de façon souvent transparente dans l’organisation
et l’aspect de l’espace domestique. Il constitue toutefois une excellente entrée pour comprendre une
société, une civilisation et aussi un espace.
L’espace domestique joue, aussi, un rôle déterminant, non seulement dans l’organisation et le
déroulement de la vie quotidienne, mais aussi dans l’acquisition de multiples normes et valeurs. L’espace
domestique est aussi celui de l’enfance et donc de l’apprentissage. C’est là que « la vraie vie commence »
comme le dit la publicité : elle commence enfermée, protégée, toute tiède dans le giron de la maison. Au-
delà par son organisation même l’espace domestique permet ou interdit certaines activités ou
comportements. Il est un élément central de la reproduction sociale. L’espace domestique impose et
transmet les normes sociales et particulièrement des normes spatiales géographiques. La maison natale
inscrit en nous la hiérarchie des diverses façons d’habiter : c’est à la maison et par la maison que on
apprend que l’espace possède des limites, qu’il est différencié, qu’il se prête à la ségrégation et à l’accès
réservé, qu’il se négocie et se constitue en territoires, qu’il s’aménage selon certaines valeurs (privé/
public, ordre/désordre, propre/sale, masculin/féminin, jour/nuit etc.)
Delà l’expression « Dis-moi où tu habites, je te dirai qui tu es » possède, donc, deux significations : Je
mets beaucoup de moi-même dans ma maison et on me connaît mieux si on la visite ; je suis pour une part
déterminé, porté par les espaces domestiques dans lesquels je vis et j’ai vécu.
Néanmoins, ma liberté d’aménager mon espace privé, et d’y mettre un sens reste tributaire des normes
et des valeurs morales, juridiques, esthétique et social de ma société. Ainsi, je peux élever ou abattre des
cloisons, décider de l’affectation fonctionnelle ou personnelle des pièces, décorer selon mon goût, placer
les meubles selon mes idées …etc. mais, mes choix personnels ne sont pas indépendants de normes ou des
valeurs que je respecte plus ou moins consciemment et volontairement, par exemple les normes en matière
d’intimité et de pudeur peuvent imposer de mettre des rideaux opaques aux fenêtres ou de ne pas en
mettre.
Conclusion :
En conclusion, et quoi qu’il en soit, les choix d’aménagement de mon espace domestique sont bien les
miens et mes décisions personnelles se traduisent directement dans l’organisation de cet espace.
6
Tuan Y.F, Segmented Worlds and Self Group Life and Self-consciousness Minneapolis, University of
Minnesota Press, 1982, 227pages.
Evidemment si le foyer abrite plusieurs personnes, l’affectation des pièces, les choix d’aménagement
intérieur font l’objet de négociations au cours desquelles l’homme, la femme et l’enfant ne pèsent pas du
même poids.
L’habitant de l’espace domestique est un acteur impliqué dans l’aménagement de celui-ci.
Et les questions qu’on se pose désormais sont : Comment s’organise l’espace intérieur ? Qui fait quoi ?
Quel endroit t à quel moment ? Comment est-il meublé, décoré ? A quoi servent les pièces ?
TROISIEME PARTIE : EXEMPLES D’ETUDES DE
L’INTERACTION : SOCIETE – ESPACE – CULTURE
INTRODUCTION :Comment les sciences sociales aborde-t-elle la question
de l’espace ?
La sociologie de l’espace tend à comprendre les rapports d'interaction et de transformation
qui existent entre les formes d'organisation de la société et les formes d'aménagement des
espaces habités.
L'étude de la première de ces formes, celles qu'une société prend dans l'espace est appelée
morphologie sociale depuis Marcel Mauss, Maurice Halbwachs ou Jean Brunhes'; L'étude de
la seconde, celle des formes de la ville avec son habitat, ses monuments, ses décors, et en
général tous ses aménagements, s'appelle morphologie spatiale.
La connaissance de la réalité des interactions entre une morphologie sociale et une
morphologie spatiale permet d'une part de favoriser la vie sociale dans les villes existantes,
d'autre part de mieux concevoir les nouveaux ensembles urbains ou architecturaux
(programmation). De telles recherches sont à la fois descriptives, compréhensives et
programmatiques.
La sociologie de l’espace permet d'intervenir par l'aménagement architectural et urbain à
toutes les échelles (rénovation, transformations, construction, décoration, animation).7
Cette discipline consiste à l’étude de l’ensemble des rapports entre espaces construits et
société. Ce domaine de la sociologie examine aussi bien ce qui conditionne la production
sociale des différents espaces dans une société donnée, les processus qui conduisent à leur
réalisation, que la manière dont les espaces sont habités, recréés par les pratiques et
l’imaginaire de ceux qui les habitent, et comment ils peuvent agir sur les conduites et les
représentations individuelles et collectives.8
La sociologie ainsi, considère l'espace non pas comme une toile de fond, mais comme une
production sociale spécifique et le support d'usages eux-mêmes spécifiques.
Pour mieux appréhender cette relation entre espace société et culture, la sociologie et
l’anthropologie ont cherché à bâtir un échafaudage théorique et un appareil conceptuel que
nous allons présenter à travers les trois études suivantes :
7
Wikipedia
8
Sociologie de l’urbain, Maïté CLAVEL
CHAPITRE 1:EXEMPLE D’ÉTUDE N°1 :
L’ Etude de la ville arabo-musulmane de Tunis : expression d’un code
social / stratégie et enjeux de création
Un grand nombre des analyses et des conclusions que nous avons énoncées ne recouvrent
que les réalités historiques, sociales et urbaines occidentales. La civilisation et les formations
sociales arabo-musulmanes ont suivi un itinéraire différent qui nécessite qu'on aborde leur
contexte urbain d'une manière distincte aussi bien du point de vue analytique que
méthodologique.
I- La typologie et la structure urbaines islamiques classiques
Les premiers voyageurs et les premiers géographes qui se sont intéressés au monde
musulman, ont vu dans les villes qu’ils visitaient ou décrivaient un ensemble incohérent et
anarchique. Cette vision européo-centriste de « l’ordre urbain » qui ne voit rationalité,
cohérence et hygiène que dans les villes à plan orthogonal, a été évidemment bousculée par
les transformations politiques et culturelles survenues suite à la décolonisation et à
l’émergence d’aires culturelles anciennement dominées.
La ville musulmane, autrefois traitée d’inorganique et d’anarchique, va petit à petit
révéler qu’elle possède une typologie et une morphologie urbaines particulières, qu’elle
fonctionne selon une logique et une organisation urbaine tout simplement différente de celles
d’autres villes.
De toutes les cités islamiques avec chacune sa particularité régionale, son histoire et
son site, on peut affirmer faire ressortir des composantes urbaines qui sont autant de
constantes et qui nous font dire qu’il existe un plan-type de la cité islamique dont les éléments
essentiels sont les suivants :
* Enceintes et portes de la cité :
L’entité urbaine islamique se présente comme un tout bien délimitée et ceinturé à
l’extérieur d’une enceinte ou remparts interrompus seulement par de véritables « portes
urbaines » qui ouvrent sur un paysage rural sinon semi-rural. La silhouette urbaine de la ville
musulmane donne cette impression de l’espace clos et convergeant vers un pôle central.
* La Grande Mosquée ou mosquée de la « Khûtba » (du vendredi) :
Toutes les descriptions des villes musulmanes ont mis l’accent sur un aspect ayant trait à
la vie religieuse de la cité, c’est la centralité de la Mosquée, qui ne signifie pas nécessairement
le centre géographique de l’espace urbain. Autour de la mosquée gravite le monde des lettrés,
savants et étudiants.
Université et médersas s’agglutinent à ce pôle religieux pour associer au cultuel le
culturel.
La proximité avec la Grande Mosquée confère aux espaces limitrophes des lettres
d’anoblissement déterminant ainsi la valeur des localisations et leur ordonnancement.
La contiguïté de tel métier et de tel souk avec la mosquée dépend donc de son degré
d’impureté et de pureté, tel que le Coran ou les hadiths le laissent entendre.
* Les pôles de production (ou souks) et de pouvoir :
Les souks se déploient donc à proximité de la Grande Mosquée, spécialisés par métiers.
Certains métiers « polluants », dévalorisés socialement et économiquement, comme ceux des
forgerons, des tanneurs, des teinturiers et des potiers sont relégués à la périphérie. Par contre,
les marchands de parfums et d’encens jouxteront le lieu de prière, puis viendront les
tisserands de soie et les orfèvres travaillant l’or et les pierres précieuses.
Chaque souk porte le nom de la corporation artisanale qui l’occupe. Cette dernière a ses
propres règles, que nul « maâllem » (le maître) ou « sanaâ » (apprenti) n’oseraient enfreindre.
L’« amin »(syndic) et le « muhtassib » (contrôleur) dirigent la corporation et veillent à la
qualité et à la conformité du produit aux normes. Souvent les corporations entretiennent des
relations avec des confréries religieuses, redoublant les liens puissants entre le souk et la
mosquée.
Cette structure urbaine faite de voies principales piétonnes sur lesquelles s’accrochent des
pôles d’activité commerciales et artisanales, débouche sur une forteresse ou une Kasbah
espace du pouvoir politique, administratif et militaire.
* L’espace résidentiel :
L’essentiel de la cité islamique est occupé par un tissu d’habitat alvéolaire et dense qui
s’articule à un réseau de rues et de ruelles ramifié et plus ou moins irrégulier.
Les zones vouées à la fonction résidentielle, sont nettement séparées des artères
principales, et sont constituées d’unités d’habitations communément appelées : maisons
arabes.
Chaque unité est composée d’un patio autour duquel s’ordonnent des pièces. La maison
est fermée sur la rue, l’entrée en chicane préserve l’intimité familiale, et les toits-terrasses
servent au séchage du linge, des denrées et facilitent les contacts entre voisins.
Ce tissu d’habitat intègre de même des équipements de quartier qui se répètent dans les
différentes « Houma » (quartier) : mosquée de quartier (mesjed), fontaines, bain maure
(hammam), école coranique (kuttab), moulins, fours, etc...
* Les jardins et les fondouks :
L ’importance de l’espace végétal pour la cité islamique s’explique probablement par la
tradition coranique qui associe le jardin à la projection du Paradis sur terre. La recherche du
confort climatique dans une zone aride et désertique a dû jouer aussi un rôle dans cette
recherche, au coeur et aux abords de la cité, de la présence de la végétation et de l’eau.
Ces deux facteurs, d’ordre spirituel et matériel, ont favorisé le développement de jardins
potagers et maraîchers dans les zones périphériques de la cité d’une part, et de jardins
familiaux intra-muros, d’autre part.
En outre, la ville islamique abrite à proximité de ses portes des « fondouks », à la fois
dépôts de marchandises et hôtels.
II- Organisation spatiale de la médina : Expression d’un code social
Dans son ouvrage « Le creuset méditerranéen : Tunis » 9, Serge SANTELLI nous apprend
que le choix du site de Tunis s’est fait dans une double stratégie : militaire et urbaine. En effet
l’existence d’une falaise naturelle, doublée de la présence du lac Sedjoumi, offrait une défense
naturelle non négligeable d’un côté. D’un autre côté Thunes présentait , lors de sa conquête
une agglomération ruinée et presque inhabitée, une structure urbaine neutre, banale, sans tracé
majeur pouvant inspirer ou orienter la fondation d’une nouvelle ville arabe.
Une double action fondatrice fut, par la suite, prise : fixer les limites périphériques et
l’emplacement de la mosquée comme centre religieux. Ce qui permis de définir la relation de
9
SANTELLI Serge , Le creuset méditerranéen : Tunis, collection la ville, les éditions du demi-cercle/ CNRS
éditions, Paris, 1995, p 10.
la ville arabe au monde rurale et extérieur prima bord, et de donner sens à touts les éléments
de la ville (Souks, parcours principaux, portes,…) en deuxième lieu.
Pour récapituler la description vue plus haut de la morphologie spatiale de la médina de
Tunis : On a constaté d’abord une séparation rigoureuse des espaces de résidence et de travail.
Effectivement, les activités d’artisanats et de commerce sont concentrées dans les souks et les
foundouks qui constituent un espace économique distinct de l’espace résidentiel. Ensuite, on a
rappelé qu’autour de la Grande Mosquée d’El Zitouna s’étale le noyau économique central
opposant les souks de l’artisanat noble aux souks des activités polluantes. Ainsi, cette
séparation et cette localisation préférentielle des activités économiques dans le tissu urbain
apparaissent comme une caractéristique essentielle de l’organisation urbaine de la médina.
A ce propos, et en étudiant cette organisation spatiale caractérisant la vieille ville, Jean
Despois nous dit que « les médinas sont faites de pâtés de maisons tranchés par un dédale de
rues étroites tortueuses, et creusés de nombreuses impasses. Cet aspect confus, quelque peu
anarchique du réseau des rues paraît bien résulter de l’insuffisance passée des organisations
municipales et des usurpations tolérées aux dépens des espaces qui font partie du domaine
public»10. En se basant sur cette description on ne peut pas s’empêcher d’ignorer l’insistance
de l’auteur sur la confusion spatiale et la faiblesse institutionnelle spécifiques aux médinas.
Car pour comprendre l’organisation spatiale de la ville ancienne de Tunis au XIXéme siècle,
on ne peut faire l’économie d’une explication sur « l’urbanisme musulman ». Les cités
musulmanes créations artificielles ou spontanées, ont dû répondre aux nécessités de
l’existence de ceux qui les ont habitées.
Robert Brunschvig, quant à lui, se demandait comment « une ville musulmane aux voies
tortueuses et compliquées, à allure parfois de labyrinthe, aux demeures claquemurées, qui se
complait aux culs-de-sac, aux replis d’ombre, aux coins secrets »11. Dédales, labyrinthes,
culs-de-sac, replis d’ombre, coins secrets, voies tortueuses, toutes ces images traduisent
l’étonnement du chercheur devant l’absence apparente d’organisation de l’espace. Dans cette
perspective, les médinas relèveraient d’un urbanisme pragmatique certes, mais négateur de
tout principe d’organisation. L’absence de principe serait évidente lorsque l’analyse est
conduite par comparaison avec la ville européenne.
En réalité, cette méthode comparative ne pouvait être que réductrice car elle enfermait la
recherche dans des présupposés de valeurs : l’intention esthétique préalable qui caractérise la
ville européenne serait une condition indispensable à la bonne organisation de l’espace.
A ce propos Allain Charre affirme que : « les figures géométriques parfaites des plans
romains, résultats formels d’une conceptualisation implacable opérée par les arpenteurs
relèvent d’un dessin esthétique »12 et ce dessin a pour objectif « de rapprocher le plus possible
la ville d’un plan formel idéal. »13 Certes ce modèle européen avait de quoi subjuguer, mais
cela implique-t-il que l’urbanisme produit par les arabes islamisés n’avait connu ni principes
d’organisation ni idéal formel ?
Pour répondre à ce questionnement, Jacques Berques explique (dans son ouvrage « la cité
venue d’en haut ») l’importance de la prégnance de l’Islam sur la ville. Sur la base de son
explication on peut postuler donc que la médina puise ses principes d’organisation dans « le
coran, les hadiths et le fiqh qui constituent (c’est-à-dire) une tradition, patron culturel idéal
10
J. Despois cité par J. Abdelkefi, « La médina de Tunis. Espace historique », Presses du CNRS, Paris, 1989, p.
39.
11
R. Brunschvig cité par J. Abdelkefi (1989), Idem.
12
A. Charre cité par J. Abdelkefi (1989), Ibid, p. 40.
13
A. Charre cité par J. Abdelkefi (1989), Idem.
»14. Dans cette perspective, la notion à la fois du sacré et de l’interdit, contient un principe
d’intimité qui génère en matière d’organisation spatiale, en dehors de toute autre règle écrite
et de tout dessin préétabli, des espaces clos, refermés sur eux mêmes, et dans lesquels le
regard ne pénètre pas.
Ainsi, le fait urbain médina est donc régi par les règles d’un urbanisme traditionnel qui
n’obéit pas à un texte fondateur comme dans la ville européenne, mais au seul principe
d’intimité « le haram »15 inscrit dans la loi religieuse, transmis par la coutume et respecté par
un accord tacite entre les citadins. Autrement dit, les caractéristiques de l’organisation spatiale
de la ville arabe expriment des modes vies et des comportements individuels ou collectifs
dont la référence est islamique ; on retiendra :
-l’utilisation par toutes les catégories sociales de la même unité architecturale de base, la
maison à patio, modèle unique que Jacques Revault distribue selon quatre types correspondant
à une hiérarchie des fortunes : habitation commune, maison bourgeoise, grande demeure,
palais. Mais que l’habitat soit une simple demeure ou un palais, on peut observer « une
communauté de plan et de style »16.
-La deuxième caractéristique réside dans l’assemblage en grappe de maisons à patio qui
s’adossent les unes aux autres. Aucune servitude ne préside à cet assemblage, si ce n’est
l’interdit de troubler l’intimité familiale du voisin. L’urbanisme musulman ne connaît ni la
règle de l’alignement ni celle de prospects : les murs sont mitoyens et les façades sur les
rues, bien souvent aveugles, sont parfois proches à se toucher et former ainsi un passage sous
voûte, un sabbat. La figure n°23 montre comment s’organise la grappe : les maisons, sur la
rue, enserrent celles qui constituent le noyau résidentiel. On accède à celle-ci par une impasse,
de sorte que l’intimité des maisons intérieures soit protégée. Selon Jelal Abdelkefi, il s’agit
de « l’urbanisme d’intimité »17 qui exclut toute forme d’espace public.
-La troisième caractéristique est la place qu’occupe la « grande mosquée » dans
l’ensemble du tissu urbain de la médina. En effet, si tous les chemins mènent à « Jemaa El
Zitouna », le plan de la ville ne se présente pas sous forme radioconcentrique. La croissance
urbaine de Tunis ne s’est pas réalisée en anneaux concentriques autour du lieu du culte
comme cela s’est produit dans de nombreuses villes de moyen âge européen. Au contraire,
elle s’est développée le long des axes est-ouest et nord-sud qui se coupent à angle droit à
l’emplacement de la grande mosquée. D’ailleurs, c’est en parlant de cette mosquée que J.
Berques l’assimile à « un cœur » puisqu’il la décrit comme la « mosquée du vendredi et
université vers laquelle tout conflue et de laquelle tout reflue »18. Cependant, malgré la
position urbaine importante révélée dans cette dernière citation, il ne faut pas confondre entre
centralité religieuse et forme spatiale.
L’analyse géographique montre que le plan de la médina n’est pas une projection
mécanique de la structure théocratique de la société musulmane, sachant qu’une telle
projection devrait impliquer une certaine reconnaissance d’un ordre préalable à la ville. A ce
propos Dominique Chevalier, lorsqu’il a abordé la question des villes des pays arabes, il les a
présentés comme « une projection spatiale des structures sociales de base, projection où
l’Islam inscrit son appel et son esthétique pendant plus d’un millénaire d’histoire et de
civilisation. »19.
14
J. Berques cité par J. Abdelkefi, (1989), Idem.
15
« Le haram » c’est-à-dire le sacré et l’interdit.
16
J. Revault, cité par J. Abdelkefi (1989), Op. Cit, p. 43.
17
J. Abdelkefi (1989), Idem.
18
J. Berques, cité par J. Abdelkefi (1989), Ibid, p. 50.
19
C. Dominique cité par Abdelkefi (1989), Ibid, p. 40.
Figure n° : L’organisation d’un noyau résidentiel de la médina de Tunis
20
F. Stambouli et A. Zghal cité par J. Abdelkefi (1989), Ibid, p. 46.
21
J. Poncet cité par J. Abdelkefi (1989), Idem.
22
J. Abdelkefi (1989), Idem.
grecque, avec la réalité sociale et littéraire de laquelle l’Islam ne possède aucun point de
contact ; il n’est rien qu’il ne possède moins qu’une conception de l’homme le posant comme
dramatis persona».23
Effectivement, à l’inverse de l’espace privé24 qui prend une extrême importance, l’espace
public dans la médina ne prend quelque ampleur que dans son centre, là où se trouve la quasi
totalité des fonctions de centralité, chacune d’entre elles ayant ses rythmes horaires de
fonctionnement bien déterminés, chaque espace ayant sa signification collective, ses pratiques
et ses rites de travail, de prière, de chalandise.
III- Choc colonial et déstructuration des villes islamiques traditionnelles
1. La désarticulation sociale économique et culturelle
Le système social dont faisait partie intégrante la ville islamique traditionnelle était resté
jusqu’à la fin du 19è siècle relativement cohérent, articulé et orienté vers l’intérieur.
Mais l’Occident et le capitalisme mondial, en phase de développement et d’ascension,
n’allaient pas tarder à intervenir dans cette région du monde et imposaient des modèles
culturels et socio-économiques qui allaient avoir des conséquences profondes sur les sociétés
traditionnelles musulmanes de l’époque.
La recherche par l’Europe de nouveaux marchés afin d’écouler ses marchandises et de
sources de matières premières pour son industrie, allait entraîner des mutations irréversibles
dans l’économie urbaine des médinas touchés par le choc colonial.
L’artisanat qui était organisé sur la base des corporations soumises à une hiérarchie stricte
et qui utilisait des techniques rudimentaires et archaïques, se trouvait avec la colonisation en
face de la concurrence brutale et sans précédent des produits manufacturés venant des
différentes métropoles coloniales occidentales.
Cette irruption des articles et produits européens manufacturés ont eu pour conséquence la
ruine et le déclassement de l’artisanat traditionnel, donc le dépérissement du nerf vital de
l’économie urbaine de la médina.
Dans les campagnes, l’économie rurale soumise à des opérations brutales d’expropriation
des agriculteurs autochtones et/ou à une modernisation des techniques d’exploitation
importées par les colons européens, n’a pas échappé, elle aussi, au processus colonial de
désarticulation. C’est pourquoi on voyait s’exacerber un mouvement intense de migrations
vers les villes où commençaient à s’installer les premières entreprises européennes. Cette
poussée migratoire, due essentiellement à une crise sociale et économique des campagnes,
n’allait pas trouver dans les villes, et tout particulièrement dans le secteur moderne de
l’économie coloniale, des postes d’emploi suffisants. Cet exode rural eut pour corollaire
gourbivillisation des périphéries et la « ruralisation des médinas ».
La colonisation introduit l’espace urbain des capitales musulmanes à une morphologie
nouvelle ségrégative et désarticulée que concrétisent généralement trois aires distinctes : la
ville européenne, la médina et les gourbivilles (zones d’habitat précaire ou bidonvilles).
2. La désarticulation urbaine:
C’est donc à la fin du 19è siècle et au début du 20è siècle que se produisent dans les villes
du monde musulman de grandes transformations qui ont accéléré leur désarticulation
morphologique et la sclérose de leurs traditions urbaines et culturelles, au bénéfice de
l’expansion du modèle urbain européen.
Associé au modernisme, ce type de développement occidental de la ville et de la société
entraîne une confrontation entre le moderne et le traditionnel. Une bipolarité qui s’inscrira
23
G-E. Von Grunebaum cité par J. Abdelkefi (1989), Idem.
24
Selon C. Chaline : « Une analyse de l’affectation actuelle des sols dans la médina de Tunis indique que 69%de
la superficie va aux usagers résidentiels, incluant des cours intérieures, 12.5% aux voiries y compris les
impasses qui naguère était en partie privées, 7% aux activités religieuses et le reste allant aux services et activités
économiques ». C. Chaline (1996), Op. Cit, p. 35.
désormais dans le processus de développement des villes du monde musulman tout au long de
notre siècle.
Ainsi s’impose inexorablement le germe d’un tissu urbain de nature différente qui s’étend
rapidement avec la ville coloniale. Ce premier dédoublement de la ville qui marque la rupture
plus ou moins volontaire avec la population indigène sa société et sa culture, amorce le début
du dépérissement de la médina.
3. Les premiers aménagements :
Dans le mouvement de planification urbaine amorcé au début du 20è siècle dans le
monde, les villes musulmanes ont eu évidemment leur part. C’est dans la majorité des cas, à
l’initiative des puissances coloniales, qu’on a cherché à faire pénétrer les colonies dans « la
civilisation moderne » en leur imposant un réseau urbain organisé de manière à bouleverser
l’équilibre et la hiérarchie des médinas traditionnelles.
Le système urbain islamique possédait une cohérence propre qui ne cadrait point avec la
conception et la « rationalité » urbaines des architectes et ingénieurs débarquant de la
métropole coloniale. Souvent, la réalité urbaine des médinas a été associée au « désordre
urbain » et à l’absence de normes modernes de confort, d’hygiène et de salubrité. On a donc
cherché dans les plans d’urbanisme, soit à les éviter, soit à les faire traverser par de grands
axes de communication.
En outre, la dégradation de la vieille ville s’accéléra avec la destruction du système social
et de l’économie urbaine qui en sous-tendaient l’équilibre.
Il apparaît donc que les plans d’aménagement proposés pour les villes islamiques durant la
période coloniale reposent tous sur le postulat que la seule référence en matière de modèle de
ville reste la référence occidentale.
En effet, considérer le mélange de fonctions, la coexistence de modes de transport
hétérogènes, la fourmilière des marchands ambulants, le labyrinthe des rues non comme des
signes du chaos mais plutôt comme des réalités urbaines et culturelles spécifiques, signifiait
aller à l’encontre de la doctrine urbaine occidentale dominante de l’époque.
La nouvelle morphologie de l’agglomération de Tunis nous présente alors une triple ville
composé de l’ancien tissu médinois, de la ville basse moderne et des gourbivilles. Ces
derniers sont nées en rupture avec l’urbanisme de la cité , ils sont le produit d’une injustice
exercée antérieurement sur la population rurale, comme l’explique Jalel ABDELKEFI. C’est
une forme de réponse à cette stratégie de renfermement et d’exclusion sociale sur laquelle a
été fondé la Médina de Tunis.
4. Que faire des médinas?
A partir des années 50 les gouvernements des capitales du monde musulman sont devenus,
en principe, maîtres de leurs choix politiques et de leur urbanisation. Ils ont donc été
confrontés à des médinas densifiées, sur-occupées et sous intégrées socialement et
fonctionnellement.
En un premier temps, la réaction des élites nationalistes ne se distingue pas de l’approche
européo-centriste qui a associé l’inertie et les dysfonctionnements des villes islamiques à
l’arriération et au sous-développement.
Et ce n’est que plus tard, au cours des années 70, qu’on a enregistré un renversement de la
problématique et de la méthodologie d’approche de la réalité urbaine du centre historique
islamique. Cette nouvelle optique, expérimentée au cours des trois dernières décennies, va
envisager trois options majeures d’aménagement des médinas :
*La restauration et la conservation qui accordaient la priorité aux édifices de valeur
historique et architecturale. La critique souvent avancée à ce type d’intervention est le risque
de « muséification » des médinas et de transfert de la population résidente.
* La réhabilitation du tissu traditionnel en le dédensifiant c’est-à-dire en relogeant une
partie de la population présente. On reproche à ce traitement son illusion de voir renaître des
modes de vie et des pratiques sociales séculaires et disparues à jamais.
* La requalification fonctionnelle : consiste en une intervention sur ce qui fait la centralité
de la ville tout en repensant le rôle de la médina au sein du fonctionnement global de
l’agglomération contemporaine. Introduction d’activités nouvelles, désenclavement et
réaffectation de certains édifices de la médina sont proposés dans ce sens.
En conclusion, on peut affirmer qu’en dépit des problèmes qu’a rencontré et que
rencontrent les centres historiques des villes du monde musulman, il apparaît que ceux-ci
présentent, encore souvent, certaines conditions et certains atouts susceptibles de favoriser
leur réanimation et leur revalorisation.
CHAPITRE 2 :EXEMPLE D’ÉTUDE N°2 :
L’ Etude du jeu des acteurs et leur impact sur l’aménagement des espaces
urbains : le cas du projet d’embellissement de l’avenue H. Bourguiba de
Tunis
I- Présentation de l’avenue H-Bourguiba
Le terre
3 voies 3 voies
Cette première version du projet a suscité plusieurs réticences et protestations dont une
pétition qui a été signée par des intellectuels, des cadres supérieurs, des figures connues et de
simples citoyens et présentée au maire de Tunis pour demander l’abandon de ce projet. Une
lettre adressée aux députés de la nation a également tenté de créer un rapport de force
favorable aux contestataires du projet et de son commanditaire la municipalité de Tunis.
En effet, pour justifier leur opposition à la première variante du projet, les acteurs se sont
basés sur un ensemble d’arguments qui expriment l’importance de l’avenue Bourguiba
comme artère principal du centre ville caractérisé par :
-Son attractivité
-Son intérêt architectural et monumental
-Sa valeur historique et culturelle
-Son reflet de la mémoire collective des tunisiens
Cette mobilisation a eu pour effet de modifier les orientations du projet initial, traduisant
ainsi ce nouveau rapport de force. La dernière version se présente donc comme « un choix
intermédiaire entre rénovation complète et le maintien de structure du centre ville. La décision
fut donc prise de conserver la physionomie ancienne de l’avenue moyennant certaines
adaptations qui concernent le maintien de l’allée centrale tout en diminuant de la largeur des
trottoirs pour atteindre une dimension minimale de 8 mètres et maximale de 12 mètres. En
définitif, les trottoirs auront une largeur de 12 mètres, le terre plein central de 18 mètres au
lieu de 29,5 mètres et la circulation automobile sera maintenue latéralement sur trois voies de
chaque coté, cette option nécessite la transplantation de deux rangées de ficus sur les trottoirs
latéraux.
Exercer l’étudiant à la pratique de l’exposé. Le travail dans cet atelier s’étalera sur tout le second
semestre, l’étudiant apprendra à formuler correctement un thème, à analyser des textes, à établir une
bibliographie suffisante avec des références correctement formulées et à concevoir un exposé clair,
cohérent et détaillé.
Objet et objectif de cette 4ème partie du cours :
La conclusion qu’on peut tirer de ce cours est que l’espace, champ d’intervention professionnel de
l’architecte, doit être saisie dans son imbrication entre ses dimensions spatiale, sociale et culturelle.
(L’urbain est une interaction entre Espace, Société et Culture). Justement, le contenu de cette partie du
cours est alimenté voire enrichi par les travaux et les apports collectifs des étudiants dans le cadre de
réalisation des exposés et d’analyse de textes, leur permettant d’approfondir davantage cette idée
d’imbrication entre société/espace/culture. Ajoutons qu’un des objectifs des exposés et des études consiste
permettre aux étudiant de faire des recherches sur l’ensemble des notions et des concepts qu’ils ont
rencontré dans ce cours afin de mieux saisir leur contenu scientifique et assimiler leur apport dans leur
formation académique. Finalement nous estimons que l’exercice sur les exposés et les analyses de textes
offrira aux étudiants l’occasion de mettre en pratique les connaissances théoriques acquises dans cette
dernière partie du cours en ce qui concerne :
- L’initiation à la méthodologie de recherche,
- l’initiation à la recherche documentaire,
- la technique de l’analyse de texte.
- et la valorisation d’un discours oral à travers la communication d’un message clair précis et cohérent
Conclusion :
L’homme et l’environnement ne peuvent plus désormais être considérés comme des entités closes,
étrangères l’une de l’autre ; entre elles s’établit une relation qui est structurée par leur influence
réciproque.
C’est précisément l’étude de cette interdépendance où les aménagements sont considérés comme un des
modes d’organisation de la vie sociale qui fait l’objet de la sociologie de l’urbain.
Les processus étudiés tout au long de ce cours nous ont éclairés sur leur dimension signifiante : pour
comprendre les situations, il faut saisir, d’une part, l’importance de la structuration de l’espace et, d’autre
part, la manière dont il est vécu par les gens.
Ainsi, l’espace ne peut être réduit à servir seulement de décor ou de moule aux phénomènes sociaux.
La preuve est qu’une autre direction de l’analyse des rapports entre espaces et sociétés s’attache à
comprendre comment les espaces contribuent à façonner, modifier des modes de vie, des pratiques
collectives des représentations individuelles ou sociales, comment ils permettent ou empêchent certains
comportements, contribuent à développer ou à mutiler l’imaginaire, comment ils peuvent susciter émotions
et sentiments.