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Femmes, Genre,
Histoire
5 (1997)
Guerres civiles
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Catherine LEVY
La journée du 8 mars 1965 à Alger
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Référence électronique
Catherine LEVY, « La journée du 8 mars 1965 à Alger », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés [En ligne], 5 | 1997, mis
en ligne le 01 janvier 2005, consulté le 29 mars 2016. URL : http://clio.revues.org/415 ; DOI : 10.4000/clio.415
Catherine LEVY
Trois années se sont écoulées depuis l'accession à l'indépendance de l'Algérie. Pendant l'été
1962, un mouvement d'occupation par des paysans et des ouvriers des propriétés agricoles
et industrielles laissées vacantes par le départ des colons français avait ouvert la possibilité
d'instaurer une organisation économique et sociale nouvelle. Si ce mouvement avait été
général, seuls les salariés des anciens domaines coloniaux et les ouvriers des propriétaires
français avaient pu reprendre à leur compte les entreprises ; les paysans sans terre avaient été
expulsés des terres appartenant à de riches propriétaires algériens. En mars 1963, des décrets,
dits de l'autogestion, officialisent l'occupation et la gestion collective des terres et des quelques
usines des anciens colons. Mais la situation économique et sociale du pays était difficile. Le
chômage était endémique dans les grandes villes et la majorité de la paysannerie vivait dans
des conditions très misérables.
Les femmes qui avaient pris leur part dans la lutte de libération demeuraient confinées dans
les tâches domestiques. Celles qui avaient quelque instruction et des diplômes pouvaient
trouver des emplois dans les services publics, malgré la « préférence masculine ». Elles
travaillaient pour la plupart dans les Postes, l'EGA (électricité et gaz), l'enseignement et les
hôpitaux ; mais pour la majorité d'entre elles, analphabètes (comme 90% de la population
au moment de l'indépendance), et souvent femmes de chômeurs, il n'y avait ni revenus, ni
possibilité d'acquérir une formation. La campagne d'alphabétisation qui était au programme
du gouvernement, comme bien d'autres campagnes, n'était guère existante. Seules, les veuves
de « chouhadas » (martyrs) pouvaient obtenir ce que l'on nomme maintenant des « petits
boulots » ; ainsi des ateliers de confection, dépendants du Ministère de la santé, étaient
Il fallut attendre la manifestation du 8 mars 1965 pour mesurer l'ampleur des revendications
des femmes, à Alger. La journée avait été déclarée journée officielle de la femme. Il semblait
alors qu'elles avaient accordé un délai de grâce au gouvernement et qu'elles avaient jugé que
trois années passées sans que rien de nouveau n'ait été élaboré ni mis en pratique soit un temps
suffisant pour réclamer leurs droits.
Quand la masse du cortège arriva devant le port, les femmes jetèrent, pratiquement toutes,
leurs voiles à la mer. Tout le monde ne put rentrer au Majestic et comme le président Ben
Bella était en retard pour le meeting final, les femmes commencèrent à casser les chaises pour
faire de la place et permettre à celles qui étaient encore dehors de venir. Puis Ben Bella arriva,
mais quand il entama son discours de solidarité avec les femmes du tiers-monde une rumeur
Le lendemain, plus de 50 femmes, portant des traces de violences physiques, arrivaient au local
syndical de Bal-el-oued pour demander de l'aide : elles étaient répudiées. Ni le syndicat, local
et national, ni l'Union des femmes, ni le parti FLN ne prirent en considération la situation de ces
femmes, qui furent livrées à elles-mêmes. La presse ne relata que la manifestation « officielle »
sans mentionner ni les incidents de parcours, ni le meeting, et encore moins ses conséquences.
Le congrès de l'UGTA qui se tint du 23 au 27 mars 1965, malgré la présence d'une vingtaine
de femmes déléguées, refusa d'aborder le problème.
Il fallut attendre les années quatre-vingts pour voir promulguer le Code de la famille qui
entérinait, sous la forme d'une loi, l'inégalité de fait entre les hommes et les femmes. Considéré
sans doute comme un « résidu », ce mouvement populaire de revendications n'est inscrit dans
aucune histoire de l'Algérie indépendante.
Référence électronique
Catherine LEVY, « La journée du 8 mars 1965 à Alger », Clio. Histoire‚ femmes et sociétés [En ligne],
5 | 1997, mis en ligne le 01 janvier 2005, consulté le 29 mars 2016. URL : http://clio.revues.org/415 ;
DOI : 10.4000/clio.415
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