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deUBERA
L'art des
généralités
THÉORIES DE L'ABSTRACTION
Aubier I Philosophie
L'Art des généralités
Dans la même collection
Aubier r
».r, Paris, 1999
y -7007-3355-X
Introduction
Alexandre d'Aphrodise
Professeur (ôiôàaxaXoç) de philosophie aristotélicienne
à l'époque de Septime Sévère et d'Antonin-Caracalla, aux
quels il dédie le De fato, Alexandre d'Aphrodise (probable
ment Aphrodise de Carie) a dû naître au début de la seconde
moitié du IIe siècle. Qu'il ait été titulaire d'une chaire
impériale de philosophie aristotélicienne à Athènes ou d'une
chaire municipale dans une autre ville de l'Empire (ce qui
parait moins vraisemblable, « même si l'école péripatéti
cienne du Lycée s'était éteinte depuis longtemps »), et quels
qu'aient été ses maîtres effectifs (Herminus, qu'il dit avoir
écouté, Sosigénès, qu'il présente en ces termes, ou l'un des
deux « Aristote » - Aristoclès de Messine ou Aristote de
Mytilène -, vers lesquels certaine correction d'un passage
du De intellectu par Zeller a orienté la critique), Alexandre a
toujours été considéré comme un des interprètes les plus
autorisés d' Aristote de Stagire. Parmi ses nombreuses
œuvres préservées en grec ou en arabe, certaines ont joué un
rôle capital dans le réseau de problématiques lié à la ques
tion de l'abstraction : le riepl <|njxrjç. bien sûr, mais aussi, et
surtout, les Quaestiones (conservées en grec) et plusieurs
questions ou traités transmis en arabe. L'hypothèse que nous
suivrons ici, et nous efforcerons de vérifier, est que ces
« questions » ont profondément influencé les doctrines phi
losophiques de Porphyre et de Boèce, avant de peser décisi-
vement, par la suite, sur ce qui a pu apparaître comme l'une
des innovations philosophiques les plus importantes d'Avi-
cenne : la doctrine dite de l'« indifférence de l'essence ».
Porphyre
Né en Syrie en 233 ou 234, mort à Rome vers 310 après
J.-C., Porphyre, « le Vieillard de Tyr », selon l'expression
INTRODUCTION 17
Boèce
Mort vers 524, au terme d'une carrière politique à la
cour du roi ostrogoth Théodoric, Anicius Manlius Severinus
Boethius a laissé une œuvre abondante de traducteur et de
commentateur (sur laquelle nous reviendrons au chapitre il).
Situer cette œuvre dans l'histoire de la philosophie n'est pas
facile, compte tenu de la place légitimement accordée par
l'historiographie aux œuvres non « aristotéliciennes ». : la
Consolation de Philosophie ou les Opuscules théologiques.
On peut, cependant, le faire si, avec S. Gersh, on remarque
que Boèce « lisait » Platon et Aristote « à la manière d'un
néoplatonicien athénien ou Alexandrin du Ve siècle»9.
Qu'est-ce à dire ? Selon Gersh, trois choses : (a) que Boèce
Le problème de l'abstraction
dans la tradition postaristotélicienne
Aristote « are not always clear about the distinction between mathe
matical universals and mathematical objects » ; 2. « ... at crucial
points, invoking truths about universals to justify what seem to be
claims about mathematical objects and vice versa ».
ALEXANDRE D'APHRODISE 39
Abstraction et abstractionnisme
51. Cf., sur ce point, In Parmenidem, lib. II, éd. C. Steel (Ancient
and Medieval Philosophy. De Wulf-Mansion Centre, Series 1, III),
Leuven, University Press-Leiden, E.J. Brill, 1982, p. 90, 79-92, 44, et
ibid., lib. IV, p. 218, 86-223, 79.
ALEXANDRE D'APHRODISE 57
L 'argument d 'Alexandre
Le traité arabe Dietrich n°3 (noté par la suite « traité
3») et la quaestio (grecque) 1.11, parallèle au traité 3,
d'Alexandre contiennent, on l'a dit, une longue exégèse de
De anima I, 1, 402b7. Dans ces textes, Alexandre utilise un
argument remarquable, que nous appellerons l'« argument
de la suppression », que l'on retrouve aussi comme argu
ment du auvavaipelaGai, Le. « codisparition » ou « coanéan-
tissement », chez Porphyre et dans le néoplatonisme. L'ori
gine aristotélicienne de l'argument est évidente. Aristote
l'utilise dans les Topiques, à propos du rapport entre genres,
i
ALEXANDRE D'APHRODISE 65
Le débat Sharples-Lloyd
La quaestio 1.11 (dans les versions grecques 1.11a et
1 .1 lb) se conclut sur un paragraphe de quelques lignes (noté
par la suite PFS2) rejeté comme inauthentique par Lloyd,
qui ne peut admettre du point de vue d'Alexandre la thèse
antiaristotélicienne (notée par la suite ThPFS2) qu'il semble
véhiculer en accordant « à la nature universelle une inaccep
table priorité sur le particulier ». L'interprétation de Lloyd
ayant été critiquée par Sharples, et la quaestio 1.11 ayant
fait l'objet d'une abondante littérature, il est souhaitable de
reprendre ici l'ensemble du dossier.
La première version de la quaestio 1.11 (= 1.11a)
contient une seule solution (= S2) au problème posé (Que
signifie la parole d'Aristote dans le premier livre de
L'Âme : « L'animal pris universellement (tô ôè Cûov xb
xaGôXou) ou bien n'est rien ou bien est postérieur (vate-
pov) » ; Sharples, p. 50 : « What is meant by the saying in
the first book On the Soul [that] "the living creature that is
universal is either nothing or posterior"64. » Une autre
solution (=S1), non exposée, est simplement mentionnée
comme figurant dans le commentaire (aujourd'hui perdu)
d'Alexandre sur le De anima. La seconde version de 1.11
(= 1.1 lb) donne, en revanche, les deux solutions in extenso
(tout en confirmant au passage l'existence de S1 dans le
commentaire sur le De anima). Selon Sharples, ces deux
Un imbroglio herméneutique :
l'explication finale de 402b7 dans la quaestio 1.11
77. Cf. Aristote, Cat. 2b7-8 : « [...] l'espèce est plus substance
que le genre, car elle est plus proche de la substance première [êyyiov
y&p toc TTptiTrjc ovalaç ècrnv]. »
90 L' ART DES GÉNÉRALITÉS