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Plasticité en mise en forme

Métaux à froid
par Eric FELDER
Ingénieur civil des Mines de Paris, Docteur ès Sciences
Maître de recherches au Centre de mise en forme des matériaux (CEMEF)
École des Mines de Paris, CNRS de Sophia-Antipolis

1. Introduction à l’élastoplasticité .......................................................... M 3 004 — 2


1.1 Modèle rhéologique .................................................................................... — 2
1.2 Composante élastique................................................................................. — 2
1.3 Loi de comportement élastoplastique ....................................................... — 2
2. Prise en compte de l’écrouissage........................................................ — 3
2.1 Écrouissage isotrope ................................................................................... — 3
2.2 Généralisation : prise en compte de l’écrouissage cinématique............. — 4
3. Anisotropie plastique ............................................................................. — 5
3.1 Origine physique et caractérisation expérimentale.................................. — 5
3.2 Approche classique de Hill (1948) .............................................................. — 6
3.3 Généralisation dans le cas de la contrainte plane .................................... — 7
4. Comportements plastiques sensibles à la pression
hydrostatique ............................................................................................ — 8
4.1 Analyse microscopique de l’endommagement ductile et critères
macroscopiques........................................................................................... — 8
4.2 Critères macroscopiques ............................................................................ — 10
4.3 Couplage plasticité-endommagement....................................................... — 11
4.4 Plasticité compressible................................................................................ — 14

Pour en savoir plus ........................................................................................... Doc. M 3 006

’objectif de cette partie est de tenir compte de manière plus réaliste du com-
L portement des métaux à froid décrits dans le dossier [M 3 002] : élasticité,
écrouissage, anisotropie plastique et sensibilité à la pression hydrostatique, soit
dans les phases d’endommagement des produits massifs, soit pour les produits
issus de la métallurgie des poudres.
Par rapport au dossier [M 3 003], nous abandonnerons donc l’hypothèse E∞ et
les hypothèses du paragraphe 1 (sauf le principe du travail maximal), mais de
manière séparée. Nous ne discuterons pas en détail les modèles les plus élabo-
rés combinant tous ces aspects qui, en pratique, sont plus ou moins liés : par
exemple, l’anisotropie du matériau implique, a priori, anisotropie élastique et
plastique.
Cette partie est illustrée par divers exemples relatifs au cas des métaux en
feuilles, domaine où ces notions sont particulièrement importantes et utilisées.
(0)

Le tableau des notations et symboles figure en fin de dossier.

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PLASTICITÉ EN MISE EN FORME __________________________________________________________________________________________________________

1. Introduction ε
à l’élastoplasticité
εe εp

–σ σ
1.1 Modèle rhéologique
Le ressort représente la composante élastique, le pattin frottant la composante
Dans l’analyse uni-axiale de la traction, nous avons vu que la plastique, la vitesse de déformation totale est la somme des deux vitesses de
déformation totale est la somme d’une déformation élastique réver- déformation.
sible et d’une déformation plastique irréversible (24) du dossier [42].
Figure 1 – Modèle rhéologique pour l’élastoplasticité
Cette situation est schématisée sur la figure 1 par un modèle
rhéologique où un ressort assure la composante élastique et un
patin glissant (lorsqu’un seuil en contrainte est atteint) la déforma-
tion plastique. 1.3 Loi de comportement élastoplastique
Remarquons que si, dans ce modèle analogique, la déformation
totale est, à chaque instant, la somme d’une déformation élastique
On suppose que, à chaque instant et en tout point du matériau, la
et d’une déformation plastique, la vitesse de déformation totale est
vitesse de déformation est la somme d’une vitesse de déformation
également, à chaque instant, la somme d’une vitesse de déforma-
élastique et d’une vitesse de déformation plastique, conformément
tion élastique et d’une vitesse de déformation plastique, ce qui est
à (1).
illustré figure 1.
Comme la loi de plasticité relie vitesse de déformation et con- L’écriture en vitesse de (2) ou (4) pose quelques problèmes,
trainte, c’est à partir de cette remarque que nous généralisons à un puisqu’elle nécessite d’écrire la dérivée du tenseur des contraintes
état de contrainte quelconque le comportement mono-axial en ou déviateur des contraintes et que cette dérivée doit être objective,
adoptant la décomposition suivante du tenseur des vitesses de c’est-à-dire indépendante du choix du référentiel [46]. Cette difficulté
déformation : est discutée en détail, par exemple dans [47].
Nous allons ici donner une formulation possible [47]. Au champ
ε̇ = ε̇ e + ε̇ p (1) de vitesse, on associe le tenseur des vitesses de rotation Ṙ de l’élé-
ment de matière par la formule :
Il nous faut en outre généraliser au cas tridimensionnel les rela-
tions élastiques mono-axiales (24) du dossier [42].
⎛ ∂v i ∂ v j ⎞
Ṙ ij = 1
--- ⎜ ------- – --------⎟ = – Ṙ ji i=1−3;j=1−3 (5)
2 ⎝ ∂x j ∂x i ⎠
1.2 Composante élastique
Par construction, ce tenseur est antisymétrique (sa matrice trans-
posée est égale à son opposée – Ṙ ) et les termes de la diagonale
Pour un matériau isotrope, la généralisation de (24) du dossier sont nuls. On définit, en toute généralité, la composante élastique
[42] conduit à la formule : de la déformation par les relations en vitesse [5] :

1+ν ν 1+ν ν ⎛ e ṗ
ε e = ------------ σ – --- ( σ ii )1 ou ε ije = ------------ σ ij – --- ( σ ii )δ ij (2) ⎜ θ̇ = – ------e
E E E E ⎜ K 1 + ν dJ σ ν
ou ε̇ e = ------------ ---------- – --- ( σ̇ ii )1 (6)
⎜ d s E dt E
1
⎜ ė e = ------- J
Il est commode en élastoplasticité de décomposer la déformation - ---------
⎝ 2G dt
élastique en sa composante hydrostatique liée à la variation de volu-
mique θ (a priori purement élastique, puisque la déformation plasti-
que est incompressible) et une composante déviatorique e, à partir
de la relation (3) du dossier [42] : dJ s dJ σ
avec --------- = ṡ – Ṙ . s + s . Ṙ - = σ̇ – Ṙ . σ + σ . Ṙ
---------
dt dt
⎧ θ = ε ii
e e

⎪ La dérivée de s, ainsi introduite, est appelée la « dérivée de


⎨ θe (3) Jauman ».
⎪ e e = ε e – ⎛⎝ -----⎞⎠ 1
⎩ 3 Le domaine élastique est défini par le critère de plasticité f(σ) < 0.
La vitesse de déformation plastique vérifie alors :
Les relations (2) se transforment alors dans les suivantes, plus
simples et immédiatement inversibles :
⎧ ⎧f(σ) < 0
⎪ ⎪
p
⎛ θ e = – ------ E ⎪ 0 si ⎨ ∂f
avec K e = ------------------------ ⎪ ⎪f(σ) = 0 et ------ : σ̇ < 0
⎜ 3 ( 1 – 2ν ) ε̇ p = ⎨ (7)
⎜ Ke ⎩ ∂σ

(4) ⎪
1 E
⎜ e e = -------- s avec G = --------------------- ⎪ ∂f ∂f
⎝ ⎪ λ ------ λ0 si f(σ) = 0 et ------ : σ̇  0
2G 2(1 + ν) ⎩ ∂σ ∂σ

avec G module de cisaillement élastique,


Elle ne peut se produire que si le critère est vérifié : f(σ) = 0 et si la
Ke module de compressibilité déjà défini (27) du vitesse de contrainte σ̇ est dirigée vers l’extérieur du domaine élas-
dossier [42]. tique.

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σ
Frontière σ'I Frontière
d'écoulement d'écoulement
300
àt=0 à l'instant t
σ' 200
100
R0
Rt 0
0,05 0,1 0,15 0,2 ε
– 100
– 200

σ'III σ'II – 300

a évolution de la frontière b courbe de traction-compression σ-ε :


d'écoulement Absence d'effet Bauschinger.
(Section droite par le plan (π)
σI + σII + σIII = 0)
Figure 2 – Représentation de l’écrouissage
isotrope pour le critère de von Mises

2. Prise en compte La généralisation la plus simple des résultats de traction consiste


à supposer que la contrainte d’écoulement plastique σ0 évolue
de l’écrouissage comme la contrainte de traction et ne dépend que de ε .
Exemple : Ainsi, par exemple, la forme (10) (du dossier [16]) du cri-
tère de plasticité de von Mises s’écrit :
L’écrouissage du matériau est induit par la multiplication dans
f ( s ,ε ) = 3s : s – 2σ 02 ( ε ) (9)
le matériau des dislocations engendrées par le champ de con-
trainte pour accommoder la déformation plastique et qui modi-
fient la frontière d’écoulement, c’est-à-dire les états de Géométriquement, cela signifie qu’en chaque point de l’écoule-
contrainte permettant de poursuivre la déformation plastique. ment, la frontière d’écoulement subit une homothétie et se dilate
donc de manière isotrope dans toutes les directions : la section
droite reste un cercle centré sur l’origine et de rayon croissant pro-
portionnellement à σ 0 ( ε ) (figure 2 a).
En traction, cela conduit au moins, dans un premier temps, à une
Ainsi, par exemple, pour le formage des tôles en contrainte plane, la
élévation de la contrainte d’écoulement plastique. Nous allons pré- frontière d’écoulement des contraintes principales reste une ellipse
ciser les deux grandes classes de modèles utilisés pour décrire cette centrée sur l’origine des contraintes et dont les axes se dilatent, le rap-
évolution et généraliser la relation (25) du dossier [42] relative à une port de leur longueur restant constant (figure 3).
histoire de déformation très particulière, la « traction ».

Une conséquence directe de cette hypothèse de comporte-


ment est que, si le métal passe d’une traction à une compres-
2.1 Écrouissage isotrope sion, la contrainte seuil en compression est l’opposée de la
contrainte finale de traction. On dit que le matériau ne présente
pas d’effet Bauschinger.

L’état d’écrouissage du matériau n’évoluant que du fait de sa


déformation plastique, on généralise naturellement la définition de
la vitesse de déformation généralisée (25) du dossier [16], en l’affec-
tant à la composante plastique des vitesses de déformation, et on
définit ensuite la déformation généralisée comme son intégrale, σII
tout au long de l’histoire de l’élément de matière entre l’instant ini-
tial (u = 0) et l’instant courant u = t : ε3
ε2
ε1


1/2 t
2
ε = ⎛ --- ε̇ ijp ε̇ ijp⎞
˙ ˙
et ε = ε ( u ) du (8)
⎝3 ⎠ 0
σI

L’intégrale se fait tout au long de la trajectoire de l’élément de


ε1 ε2 ε3
matière et la vitesse de déformation généralisée est donc la dérivée
particulaire de la déformation généralisée. On obtient ainsi, en tout
point de l’écoulement, un scalaire positif et non décroissant, indé-
pendant du choix du repère et qui étend à une histoire quelconque
de déformation la notion de déformation plastique εp définie dans Figure 3 – Évolution de la frontière d’écoulement en contraintes
l’essai de traction par la relation (22) du dossier [42]. planes pour un écrouissage isotrope

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Remarque : Pour symétriser l’aspect contrainte et déforma-


σ σ'I Frontière
tion, on introduit souvent dans la plasticité à froid une grandeur d'écoulement
qui est l’équivalent, en terme de contrainte, de la déformation à l'instant t
Frontière
généralisée définie précédemment. C’est la « contrainte 300
d'écoulement
généralisée » (ou « contrainte de von Mises ») définie par la àt=0
200 σ'
formule :
100 Rt
1/2 R0 X
0
σ = ⎛ --- s : s⎞
3 0,05 0,1 0,15 0,2 ε
⎝2 ⎠
(10)
– 100

2 2 2 1/2 – 200
⎛ ( σ 11 – σ 22 ) + ( σ 22 – σ 33 ) + ( σ 33 – σ 11 ) ⎞
2 + 3σ 2 + 3σ 2 ⎟
= ⎜ ------------------------------------------------------------------------------------------------------------- + 3σ 12 σ'III σ'II
23 13 – 300
⎝ 2 ⎠
a courbe de traction- b évolution de la frontière
compression σ – ε : d'écoulement (section droite
Cette contrainte généralisée permet une autre définition du critère effet Bauschinger par le plan (π) σI + σII + σIII = 0)
de plasticité de von Mises. Ainsi, avec cette notation, l’état de con-
trainte vérifie le critère de plasticité lorsque la contrainte généralisée
Figure 4 – Prise en compte de l’« écrouissage cinématique » (critère
est égale à la contrainte d’écoulement plastique :
de von Mises généralisé)

σ = σ0 ( ε ) (11)
(figure 4 b). Ce modèle suppose donc que l’écrouissage total est
La loi d’écoulement (6) s’obtient alors par dérivation de la con- une combinaison linéaire de l’écrouissage cinématique et de
trainte équivalente : l’écrouissage isotrope. Il est utilisé par Aliaga [67] dans le cadre de
la simulation numérique d’opérations de trempe de pièces forgées
⎧ ⎧ σ < σ0 en acier. Le tenseur X, dont la trace est nulle, est appelé « tenseur
⎪ ⎪ cinématique ». On généralise alors le critère de plasticité de von
⎪ 0 si ⎨ ˙ Mises et la contrainte généralisée sous la forme :
⎪ ⎪ σ = σ 0 et σ < 0
ε̇ p = ⎨ ⎩ (12)
⎪ 3
1/2
⎪ ∂σ ˙ f = 3 ( s – X ) : ( s – X ) – 2σ 02 ( ε ) ou σ = ⎛ --- ( s – X ) : ( s – X )⎞ (13)
⎪ ------ ε si σ = σ 0 et σ˙  0 ⎝2 ⎠
⎩ ∂σ
La vitesse de déformation plastique s’obtient par dérivation de f
ou σ par rapport à s. Dans une telle formulation, on dissocie la
notion de contrainte d’écoulement plastique σ 0 ( ε ) , définissant le
2.2 Généralisation : prise en compte rayon de la section droite du cylindre d’écoulement de la contrainte
de traction σ ( ε ) que l’on suppose de la forme :
de l’écrouissage cinématique
σ ( ε ) = Re + H ( ε ) (14)
L’hypothèse d’écrouissage isotrope n’est pas toujours totalement
satisfaisante, notamment dans le cas où la vitesse de déformation Les équations régissant l’évolution du vecteur cinématique et de
change fortement de direction. la composante d’écrouissage isotrope σ 0 ( ε ) , à partir de l’évolution
de la contrainte de traction sont les suivantes :
Un cas simple est celui d’un essai mécanique où l’on change le signe
de la sollicitation : traction-compression, par exemple. ⎧ σ 0 ( ε ) = R e + ( 1 – β )H ( ε )
On observe alors, qu’après retour dans le domaine élastique, la ⎪
⎨ 2 dH p 0β1 (15)
limite d’élasticité en compression est en valeur absolue plus faible que ⎪ Ẋ = --- β -------- ε̇
la contrainte finale observée juste avant décharge : c’est un des effets ⎩ 3 dε
Bauschinger (figure 4 a).
Ce modèle dépend d’un coefficient scalaire et sans dimension β
Physiquement, ce phénomène correspond au fait que la déforma- compris entre 0 et 1, qui est le coefficient pondérateur de
tion oriente la population de dislocations stockée dans le matériau, l’« écrouissage cinématique ». Pour 0 ou 1, l’écrouissage est pure-
cette orientation s’opposant principalement à la poursuite de la ment isotrope ou cinématique ; dans l’intermédiaire, il est mixte.
déformation selon la même direction.
On peut visualiser simplement l’effet du paramètre β en appli-
D’un point de vue mécanique, la modélisation la plus simple de ce quant les équations (13)-(15) au cas d’un essai de traction jusqu’à la
phénomène, due à Prager [48], consiste à supposer que, en chaque déformation ε 1 suivi d’une compression. Des calculs simples mon-
point de l’écoulement et à chaque instant, la frontière d’écoulement trent alors que la contrainte σ ( ε ) et les composantes non nulles de
tend à se déplacer dans une direction fixée par la vitesse de défor- X valent :
mation. Si bien, qu’après une déformation finie, la frontière n’est
plus symétrique par rapport à l’origine des contraintes : son centre
s’est translaté du vecteur X (figure 4 b). Ce déplacement est appelé ⎧ σ = Re + H ( ε )

« écrouissage cinématique ». ⎨ 2β 0 < ε < ε 1 ( traction )
Prager a développé un modèle d’écrouissage purement cinémati- ⎪ X 11 = – 2X 22 = – 2X 33 = ------- H ( ε )
⎩ 3
que, c’est-à-dire que la frontière d’écoulement, en chaque point de (16)
l’écoulement, ne subit qu’une translation sans changer de forme. ⎧ σ = – R e – H ( ε ) + 2βH ( ε 1 )
Un modèle plus général et relativement simple a été proposé par ⎪
⎨ 2β ε > ε 1 ( compression )
Hughes [49]. Il consiste à supposer, à la fois, une expansion isotrope ⎪ X 11 = – 2X 22 = – 2X 33 = ------- ( 2H ( ε 1 ) – H ( ε ) )
de la frontière d’écoulement et un déplacement de son centre ⎩ 3

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300
σ σα
Direction
εI
nominale x3
200

Direction εII = rα εIII = – εIrα /(1+rα)


travers x2
100 α
M
Direction de laminage x1
ε
0 0,05 0,1 0,15 0,2
0
β=1 Figure 6 – Caractérisation par traction uniaxiale de l’anisotropie
plastique d’une tôle
β = 0,8
– 100
β = 0,6
Ces exemples correspondent au cas de l’« anisotropie
β = 0,4 orthotrope », le seul pris en compte en pratique, où l’anisotropie
– 200 possède trois plans de symétrie orthogonaux deux à deux ; leur
β = 0,2 intersection correspond aux axes d’anisotropie que nous noterons
Mx1, Mx2 et Mx3 (figure 6).
β=0
– 300 D’un point de vue expérimental, cette caractérisation est surtout
effectuée à l’aide d’essais de traction effectués sur des éprouvettes
Figure 5 – Courbes d’écrouissage en traction/compression uniaxiale, plates découpées selon diverses directions repérées par l’angle α,
selon le modèle d’écrouissage mixte de Hughes pour différentes entre l’axe de traction de l’éprouvette et la direction de laminage.
valeurs du coefficient β Soient L0, b0 et e0, longueur, largeur et épaisseur de la partie utile
de l’éprouvette dans son état initial et L1, b1 et e1 : leur valeur finale.
On mesure ainsi [30] :
La figure 5 illustre bien l’effet du choix du paramètre β qui ne peut
— la limite d’élasticité σα (mesure assez délicate) ; l’isotropie
être identifié qu’en renversant le sens de la déformation. Ainsi, des
dans le plan correspond au cas où σα est constant. En pratique, ses
essais de micro-pliage-dépliage sur des tôles pour emboutissage,
variations relatives sont faibles ;
où la déformation maximale après pliage atteint 40 %, montrent que
le comportement de tôles d’acier et d’alliage d’aluminium peut être — le coefficient de Lankford rα, rapport entre les déformations
représenté avec β ∼ 0,13 et 0,18 respectivement [10], ce qui montre plastiques, dans le sens travers de l’éprouvette εII, et selon l’épais-
que la composante isotrope de l’écrouissage est dominante. seur εIII :

Néanmoins, la prise en compte de cette composante semble L1 b1 e1 ε II ε II


indispensable pour obtenir une bonne prévision des contraintes ε I = ln ⎛ ------⎞ ε II = ln ⎛ ------⎞ ε III = ln ⎛ ------⎞ - = – ---------------- (17)
r α = -------
⎝L ⎠ ⎝b ⎠ ⎝e ⎠ ε III ε I + ε II
résiduelles après mise en forme. 0 0 0

La dernière expression est déduite de l’incompressibilité qui


assure que la somme des déformations est nulle. L’isotropie impli-
3. Anisotropie plastique que rα = 1 (§ 3.4 du dossier [16]). En pratique, ce rapport peut être
assez notablement supérieur à 1 pour des tôles d’acier doux
(figure 7) et inférieur à 1 pour des tôles en alliage d’aluminium.
Une dernière caractérisation courante est la mesure de la con-
3.1 Origine physique et caractérisation trainte de bi-expansion isotrope, c’est-à-dire la valeur de la limite
d’élasticité σb pour un état de contrainte plane telle que σ1 = σ2 et
expérimentale σ12 = 0, par exemple par un essai d’expansion axisymétrique
hydraulique (essai Jovignot). Pour un matériau insensible à la pres-
sion hydrostatique, σb est aussi égale à la limite d’élasticité en trac-
Un alliage métallurgique est rarement isotrope, notamment après tion selon l’axe Mx3, normal au plan de la tôle.
mise en forme, puisqu’il subit des sollicitations mécaniques (et ther-
Dans le cas isotrope σb = σα = Cte (figures 3 et 8 du dossier [16]).
miques) qui, très souvent, sont orientées dans la même direction
par rapport à la matière. Ces sollicitations produisent donc une tex- On définit, en outre, deux paramètres à partir des valeurs de rα
ture morphologique (allongement des grains selon certaines direc- pour α = 0˚, 45˚ et 90˚, les valeurs les plus couramment mesurées :
tions, développement d’un fibrage par morcellement des
inclusions) et cristallographique (orientation préférentielle des
grains selon certaines directions). ⎧ r 0 ° + 2r 45° + r 90°
⎪ r = -----------------------------------------
- anisotropie normale
⎪ 4
Ainsi, un produit tréfilé ou filé possédera, généralement, une ⎨ (18)
limite d’élasticité et un allongement à la rupture différent selon que ⎪ r 0° – 2r 45° + r 90°
⎪ ∆r = ------------------------------------------ anisotropie transverse
la direction de traction est orientée suivant l’axe du produit ou une ⎩ 2
direction située dans le plan perpendiculaire.
Un exemple plus complexe et très étudié est celui des produits lami- Une schématisation courante du comportement consiste à adop-
nés où les propriétés dans la direction de laminage (Mx1), la direction ter une hypothèse d’anisotropie normale pure, selon laquelle la tôle
travers (Mx2), ou la direction perpendiculaire au plan de la tôle (Mx3) est isotrope dans son plan. Ceci implique que r α ∼ r et que
sont généralement différentes (figure 6). ∆r << r .

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1,000
εI ??? strain
0,84
0,900
r0º = 1
0,800 0,73

0,700
0,63

0,600
Major strain

0,52
0,500

0,400 0,42

0,300
0,31
0,200
0,21
0,100

0,000 0,11
– 0,540 – 0,480 – 0,420 – 0,360 – 0,300 – 0,240 – 0,180 – 0,120 0,060 0,000
εII 0,00

La carte dans l'éprouvette illustre bien le phénomène de striction décrit au § 2.1 du dossier [42]. L'alignement des points dans le plan (εII, εI) au voisinage
d'une droite située sous la droite du cas isotrope (r0º = 1 soit ⏐εII⏐= εI/ 2 montre que le coefficient de Lankford est à peu près indépendant de la déformation
imposée au métal et supérieur à 1⏐εII⏐> εI/ 2 (α = 0°, v = 0,17 mm/s L0 = 20 mm ; b0 = 10 mm) [10].

Figure 7 – Distribution des déformations principales (εI, εII) mesurée grâce au système de corrélation d’image ARAMIS en chaque point d’une
éprouvette de traction après rupture (acier doux E220BH ; 0,68 mm, r = 1 ,62 )

On voit que si les axes principaux de contrainte coïncident avec


La grandeur r caractérise alors la résistance à la variation les axes d’anisotropie, les axes principaux de vitesse de déforma-
d’épaisseur de la tôle en contraintes planes, concept très impor- tion coïncident encore avec les axes principaux de contrainte.
tant pour leur formage.
Des calculs élémentaires [30] basés sur (19) et (20) permettent
d’exprimer les grandeurs mesurées expérimentalement en fonction
de 5 paramètres du modèle : F, G, H, N et σ0 :
3.2 Approche classique de Hill (1948) –1 ⁄ 2
⎧ σ α = σ 0 ( F sin α + G cos α + H + ( 2N – F – G – 4H ) sin α cos α )
2 2 2 2


H + ( 2N – F – G – 4H ) sin α cos α 2 2
⎪r = ----------------------------------------------------------------------------------------------
-
⎨α F sin2 α + G cos2 α
(21)
Le modèle le plus ancien, et encore le plus utilisé de par sa facilité ⎪
d’emploi, est dû à Hill [30]. Il correspond à une généralisation du cri- ⎪ σ b = σ 0 ( F + G ) –1 ⁄ 2
tère de von Mises (11), dit « critère de Hill » [48], écrite dans les axes ⎩
d’anisotropie sous la forme suivante (très légèrement différente, On en déduit une expression possible des nombres sans dimen-
mais équivalente à la forme originale) : sion, de σ0 et de σb, en fonction des valeurs de rα et σα pour α = 0˚,
45˚ et 90˚ :
f ( σ ) = F ( σ 22 – σ 33 ) 2 + G ( σ 11 – σ 33 ) 2 + H ( σ 11 – σ 22 ) 2 r 0° r 0°
1 F+G
2 + 2Mσ 2 + 2Nσ 2 – σ 2
(19) F = ------------------------------- G = ---------------- H = ---------------- N = -------------- ( 1 + 2r 45° ) σ 0 = σ 0°
+ 2Lσ 23 1 + r 1 + r 2
13 12 0 r 90° ( 1 + r 0° ) 0° 0°
(22)
1/2
La loi d’écoulement s’en déduit aussitôt, par application de la ⎛ r 90° ( 1 + r 0° )⎞
règle de normalité : → σ b = σ 0 ⎜ --------------------------------⎟
⎝ r 0° + r 90° ⎠
p
⎧ ε̇ 11 = λ ( G ( σ 11 – σ 33 ) + H ( σ 11 – σ 22 ) ) Ces formules permettent aisément de retrouver le cas isotrope en
⎪ p prenant rα = 1 et de vérifier qu’on retrouve alors le critère de von
⎪ ε̇ 22 = λ ( F ( σ 22 – σ 33 ) – H ( σ 11 – σ 22 ) ) Mises (11) sous une forme équivalente.

⎪ ε̇ p = λ ( – F ( σ 22 – σ 33 ) – G ( σ 11 – σ 33 ) ) La formulation (22) privilégie la valeur de limite d’élasticité mesu-
⎪ 33 rée en traction à 0˚, ce qui est une limitation à une telle formulation.
⎨ p λ0 (20)
⎪ ε̇ 23 = 2λLσ 23 En effet, le modèle ne décrit qu’assez imparfaitement les résultats
⎪ p observés couramment, car en calant le jeu de valeurs de F, G, H, N
⎪ ε̇ 13 = 2λMσ 13 et σ0 selon (22), la variation théorique de σα est, généralement, plus

⎪ ε̇ p importante que la variation expérimentale et la valeur de σb n’est
⎩ 12 = 2λNσ 12
pas forcément estimée avec une bonne précision.

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La simplicité du modèle fait néanmoins qu’il reste, de loin, le


plus utilisé pour les tôles laminées, comme pour d’autres types σII
de produits (pièces de fonderie, par exemple). r=5
En outre, pour les tôles, on peut optimiser son application en B'
choisissant le jeu de paramètres de manière à tenir compte à la σ0 A
fois des valeurs de rα et σα. r =1
B

Ce modèle notamment est très utilisé en formage de tôles où le C


σ0 σI
champ de contrainte est approximativement plan. Son expression A'
est alors : A
B
f ( σ ) = ( F + H )σ 22
2 + ( G + H )σ 2 – 2Hσ σ + 2Nσ 2 – σ 2
11 11 22 12 0 (23)
La loi d’écoulement s’en déduit aussitôt par application de la règle
de normalité : a frontière d'écoulement b état de contrainte en emboutissage
L'augmentation de r durcit la tôle dans la zone en expansion (point B) et favorise
⎧ ε̇ p = λ ( ( G + H )σ 11 – Hσ 22 )
⎪ 11 donc le rétreint de la zone périphérique (point A), ce qui réduit la déformation et
⎪ p l'amincissement en B de la tôle et, ainsi, ses risques de rupture.
⎪ ε̇ 22 = λ ( ( F + H )σ 22 – Hσ 11 )
⎨ λ0 (24)
⎪ ε̇ p p
= – ( ε̇ 11 p
+ ε̇ 22 ) Figure 8 – Évolution avec le coefficient d’anisotropie normale r de
⎪ 33
⎪ ε̇ p = 2λNσ 12 la frontière d’écoulement plastique en contrainte plane et
⎩ 12 conséquences sur l’emboutissage
Le cas de l’anisotropie normale conduit à des formules particuliè-
rement simples. On peut alors se placer en axes principaux de con-
trainte, car le plan est isotrope. Le jeu de coefficients s’exprime alors : Cette formule est intéressante, car elle permet de construire un
1/2 modèle d’écrouissage (§ 2.1) en définissant une déformation géné-
( 1 + 2r ) (1 + r )
F = G = ----------------- H = ----------------- N = --------------------- σ b = σ 0 ⎛ -----------------⎞
1 r ralisée par intégration le long de la trajectoire du point matériel.
(25)
⎝ 2 ⎠ Ainsi, on déduit aisément de (28) l’expression de la déformation
(1 + r ) (1 + r ) (1 + r )
généralisée en fonction de la déformation (rationnelle) principale εI
Le critère de plasticité s’écrit ensuite, en axes principaux de (cf. § 4), pour diverses histoires de contrainte :
contraintes :
1/2
1/2 ⎧ ( 2 ( 1 + r ) ) εI σ I = σ II bi-expansion
2r 2 – σ 2 ou σ – σ = ⎛ σ 2 – ------------
f ( σ ) = σ I2 – ------------- σ I σ II + σ II
2r 2⎞
σ σ + σ II – σ0 (26) ⎪
0 0 ⎝ I 1 + r- I II ⎠ ⎪ 1+r
1+r
⎪ ------------------------- ε I ε̇ IIp = 0 déformation plane
⎪ 1/2
La contrainte σ0 s’identifie alors à la contrainte d’écoulement de la ε = ⎨ (1 + r ) (29)
tôle dans son plan σα. La forme (26) est bien une forme équivalente ⎪ ⎛ 2 ( 1 + r )⎞
1/2
p
au cas isotrope (10) quand r = 1 . Géométriquement, l’expression ⎪ ⎝ ---------------------⎠ ε I σ I = – σ II rétreint pur ( ε̇ III = 0)
(26) montre que la frontière d’écoulement d’une tôle isotrope dans ⎪ 1 + 2r
⎪ε σ II = σ III = 0 traction uniaxiale
son plan est une ellipse d’axes, les première et deuxième bissectri- ⎩ I
ces des axes (σI,σII) (figure 8 a). Quand r augmente, l’ellipse s’apla-
tit, son petit axe diminue légèrement et son grand axe augmente,
phénomène illustré par l’évolution avec r de la contrainte de bi-
expansion σb selon les relations (25). 3.3 Généralisation dans le cas
L’analyse de l’état de contrainte dans une opération d’emboutis- de la contrainte plane
sage (figure 8 b) montre que l’augmentation de r facilite l’écoule-
ment de la matière dans les zones périphériques en rétreint
(point A) et diminue la déformation et l’amincissement de la tôle, Divers travaux postérieurs, dus en particulier à Hill, ont tenté
donc ses risques de rupture, dans la zone centrale (point B) où le d’améliorer la description de l’anisotropie plastique, principale-
poinçon provoque son expansion. ment dans le cas du formage des tôles. Ces travaux se sont
La loi d’écoulement s’écrit alors : donc concentrés sur la formulation de critères de plasticité ani-
sotropes en contraintes planes. L’un des modèles les plus utili-
⎧ p r sés est le critère de Hill, formulé en 1979 (Hill79) [51], qui
⎪ ε̇ I = λ ⎛ σ I – ------------- σ II⎞
⎪ ⎝ ⎠ généralise le critère Hill48 sous une forme non quadratique,
1+r
⎪ avec un exposant m non entier, mais en conservant au critère la
⎪ p ⎛ r ⎞ propriété d’homogénéité.
⎨ ε̇ II = λ ⎝ σ II – ------------- σ I⎠ λ0 (27)
⎪ 1+r

⎪ ε̇ p = – λ ⎛ σ I + σ II⎞
------------------ Nous ne donnerons ici que les formules équivalentes à (26) et (28)
⎪ III ⎝ ⎠
⎩ 1+r relatives à sa forme plane dans le cas d’une tôle avec une anisotropie
purement normale et de contrainte d’écoulement σ0 dans son plan :
On démontre alors que l’expression de la puissance dissipée en
volume peut s’exprimer selon la formule (33) (dossier [16]) du cas 1/m
⎧ σ – σ = ⎛ ---------------------1
isotrope, à condition de globaliser la définition de la vitesse de [ σ I + σ II m + ( 1 + 2r ) σ I – σ II m ]⎞ – σ0 (30)
⎪ 0 ⎝ ⎠
déformation généralisée selon la relation : ⎪ 2 ( 1 +r)
1/2
⎨ 1 ⁄ (m – 1) (m – 1) ⁄ m
⎪ ˙ ( 2 ( 1 + r ))1 / m ⎛ p p m
1+r 2r p m ⁄ ( m – 1 ) ⎛ ε̇ I – ε̇ II ⎞ ⎞
ε = ----------------------------- ⎛⎝ ( ε̇ Ip ) 2 + ( ε̇ IIp ) 2 + ------------- ε̇ Ip ε̇ IIp ⎞⎠
˙
(28) ⎪ ε = ----------------------------------- ⎜ ε̇ Ip + ε̇ II + ⎜ -------------------------⎟ ⎟
( 1 + 2r ) 1 / 2 1+r ⎩ 2 ⎝ ⎝ ( 1 + 2r ) ⎠ ⎠

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Ce modèle permet de parfaitement représenter la contrainte de Cette approche est donc plus souple que le critère quadratique,
bi-expansion, en choisissant l’exposant m selon la formule : mais ne permet pas encore de décrire parfaitement les résultats
expérimentaux.
ln [ 2 ( 1 + r ) ] Leacock [51] en fait une analyse critique et propose une géné-
m = ---------------------------------- (31)
ln ( 2σ b ⁄ σ 0 ) ralisation, assez technique.

La recherche de critères non quadratiques performants pouvant


À noter que, pour les tôles d’aluminium 2024 T3, l’exposant
décrire une anisotropie plane a fait l’objet de divers travaux récents.
identifié est de l’ordre de m = 1,75, donc assez proche de 2.

Il faut noter, qu’en contraintes planes, l’utilisation de la repré-


sentation de Mohr (§ 1.2 du dossier [42]) permet de se placer Il existe, par ailleurs, un autre type d’approche tout à fait différent
facilement en axes principaux de contraintes en introduisant [53] et [54]. Il consiste à identifier, par diffraction des rayons X, la
l’angle α, l’angle entre la première direction principale de con- texture cristallographique du matériau, puis à construire sa loi de
trainte σI et l’axe Mx1 d’anisotropie. comportement plastique à partir du modèle polycristallin élaboré
Cette technique avait déjà été utilisée par Hill [30] et Rice [50] par Hill et Bishop vers 1951. On obtient ainsi un critère et une loi
pour formuler des critères de plasticité anisotrope en déforma- d’écoulement anisotropes assez complexes, puisque résultant du
tion plane. système de glissements de l’agrégat de cristaux considéré.
Une démarche intéressante consiste alors à représenter de
Leacock a fait récemment une revue critique de ces travaux [51]. manière approchée ce comportement par un critère anisotrope
Parmi ces travaux, il étudie plus particulièrement le critère élaboré macroscopique. Ce modèle appliqué à une forme tridimensionnelle
par Hill en 1990 [52] qui présente le double avantage d’améliorer la du critère non quadratique de Hill79 donne des résultats assez satis-
représentation des données expérimentales en généralisant la faisants et aisément utilisables.
forme (19) de Hill48 et en n’introduisant qu’un paramètre supplé-
mentaire, l’exposant non entier m. Il permet, en outre, un ajuste-
ment facile des paramètres du modèle aux données
expérimentales. Ce critère introduit un exposant m non entier, 3
paramètres sans dimensions A, B et C et la contrainte de bi-expan-
4. Comportements plastiques
sion σb : sensibles à la pression
f ( σ ) = σ I + σ II m + A m σ I – σ II m hydrostatique
(32)
+ σ I2 + σ II
2 (m ⁄ 2) – 1 [ B ( σ 2 2 ) + C ( σ – σ ) 2 cos 2α ] cos 2α – ( 2σ ) m
– σ II
I I II b
Si la pression hydrostatique ne conditionne pas directement la
La loi d’écoulement s’en déduit par la règle de normalité. Hill a déformation plastique des alliages métalliques élaborés de manière
montré que les grandeurs relatives aux essais de traction dans le classique, elle influence le développement de l’endommagement,
plan de la tôle s’expriment facilement : lors de leur déformation plastique, comme nous l’avons vu au § 2.2
du dossier [42].
–1⁄m
⎧ σ α = 2σ b ( 1 + A + B cos 2α + C cos 2α )
m 2
Ces points étant très importants pour la prévision de la qualité des

⎨ 1 + 2r = A m + 0 ,5B cos 2α + ( 0 ,5 + 1 ⁄ m )C cos2 2α (33) pièces mises en forme, nous allons les présenter de manière assez
⎪ α -------------------------------------------------------------------------------------------------------------------- détaillée. Par ailleurs, la pression hydrostatique joue un grand rôle
⎩ 1 + 0 ,5B cos 2α + ( 0 ,5 – 1 ⁄ m )C cos2 2α
dans le comportement et l’évolution de la densité des produits issus
de la métallurgie des poudres.
On en déduit que l’exposant m et le paramètre A s’expriment
simplement :

⎧ ln ( 2 + 2r 45° ) 4.1 Analyse microscopique


⎪ m = ------------------------------------
-
⎪ de l’endommagement ductile
⎨ ln ( 2σ b ⁄ σ 45° ) (34)
⎪ 1/m et critères macroscopiques
⎪ A = ( 1 + 2r 45° )

Par contre, les deux autres paramètres peuvent être calés, soit sur L’observation fine du processus d’endommagement des maté-
les valeurs du coefficient de Lankford, soit sur celles de la limite riaux métalliques, lors de leur déformation plastique, met en évi-
d’élasticité en traction : dence que les phénomènes microscopiques sous-jacents sont,
généralement, directement liés à la présence d’inclusions. Plus pré-
m m cisément, on peut identifier trois stades successifs
⎧ 1 2σ b 2σ b
⎪ B = --- ⎛⎝ ----------⎞⎠ – ⎛⎝ -----------⎞⎠ d’endommagement :
⎪ 2 σ 0° σ 90°
⎨ m m m — apparition de trous microscopiques dans la matrice, ou dans
⎪ 1 ⎛ 2σ b⎞ ⎛ 2σ b ⎞ ⎛ 2σ b ⎞ les inclusions, au voisinage de l’interface, ou à l’interface ;
⎪ C = --- ⎝ ----------⎠ + ⎝ -----------⎠ – 2 ⎝ -----------⎠
⎩ 2 σ 0° σ 90° σ 45° — croissance de ces trous ;
(35)
2 ( r 90° + r 0° ) [ 1 – r 45° ( 1 – m ⁄ 2 ) ] — coalescence des trous, formation de fissures et rupture
⎧ B = -----------------------------------------------------------------------------------
- macroscopique par cisaillement des languettes résiduelles inter-
⎪ r 90° + r 0° + r 0° r 90° ( 2 – m )
⎪ trous.

⎪ m [ 2r 0° r 90° + r 45° ( r 0° + r 90° ) ] La théorie de la plasticité permet d’expliquer les deux premiers
⎪ C = – ---------------------------------------------------------------------------- stades et, par cette analyse, de suggérer des critères d’endommage-
⎩ r 90° + r 0° + r 0° r 90° ( m – 2 ) ment ductile permettant de l’estimer.

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α r0
D=
2
e•r0

30
1 20

10
0 σ0i /σ0m
1 2
1 2 3 4 5 ρ• 3
– s0
–1

La vitesse de dilatation est directement proportionnelle à la vitesse de déformation


de la matrice et croît de manière exponentielle avec la triaxialité des contraintes ζ,
Figure 9 – Évolution du facteur α caractérisant la déformation d’une rapport de l'opposé de la pression hydrostatique avec la contrainte d'écoulement.
inclusion en fonction du rapport des contraintes d’écoulement de
l’inclusion σ0i et de la matrice σ0m [1] ; α > (<) 0 : l’inclusion se déforme
Figure 10 – Évolution de la vitesse de dilation relative du rayon d’un
plus (moins) que la matrice ; α = − 1 : l’inclusion reste rigide
trou sphérique en fonction de la vitesse de déformation et de la
pression hydrostatique réduite régnant à grande distance dans la
matrice
■ Stade 1
Supposons l’adhésion entre les inclusions et la matrice suffisam-
ment forte pour permettre leur déformation sans rupture de l’inter-
face. Baqué [1] a construit un modèle mécanique simple permettant Dans tous les cas, le modèle montre que la présence de
de préciser comment l’hétérogénéité de propriétés mécaniques per- l’inclusion, si sa dureté est significativement différente de celle
turbe le champ de déformation au voisinage d’une inclusion. de la matrice, perturbe localement le champ de déformation de
L’inclusion est supposée sphérique, de rayon ri et RPP, de contrainte la matrice, ce qui tend à accélérer l’apparition des décohésions
d’écoulement σ0i. Elle est située dans une matrice RPP de contrainte et trous microscopiques.
d’écoulement σ0m et de rayon R >> ri. Au rayon R, on suppose que la En pratique, on en conclut que l’apparition de porosités et
matrice est soumise à un champ de vitesse v∞ et se déforme selon un trous microscopiques est fixée par un niveau critique de défor-
champ de vitesses de déformation ε̇ ∞ . Ce champ définit, à une pres- mation plastique de la matrice, niveau associé à un niveau de
sion hydrostatique arbitraire près p∞, un champ de contrainte σ∞ et un déformation plastique beaucoup plus élevé au voisinage des
déviateur s∞ selon ((26) du dossier [16]) constants. inclusions.
σ∞ est donc en équilibre et vérifie, pour tout champ de vitesse
incompressible, le théorème des puissances virtuelles (18) du dos- ■ Stade 2
sier [42] sous la forme suivante :
Un trou étant supposé formé dans la matrice, McClintock [55] et

s∞
2σ 0m


˙∞

= -------------- ε̇ ∞ →
r=R
( σ ∞ . n ) . v* dS =
rR

s ∞ : ε̇ * dV (36)
Rice et Tracey [56] ont étudié l’effet du champ de contrainte à grande
distance, associé à une déformation plastique sur son évolution
géométrique. Le modèle de Rice et Tracey est très proche du modèle
Moyennant certaines hypothèses de convergence sur l’intégrale précédent : il considère un trou sphérique de rayon r0 situé dans une
lorsque R → ∞, on déduit de (36) et du théorème de la borne supé- matrice RPP de rayon R et de contrainte d’écoulement σ0.
rieure ((44) du dossier [16]) que le champ de vitesse solution mini- Le champ de contrainte pour r  R est uniforme, de valeur σ∞. Il lui
mise la fonctionnelle : correspond des champs de vitesse v∞ et de vitesse de déformation ε̇ m .
Le théorème des puissances virtuelles (18) du dossier [42], appliqué à

∫ la matrice et au champ constant σ∞ (donc à l’équilibre), s’écrit alors, en


σ r < ri
˙ ⎧ 0i
( σ 0 ε * – s ∞ : ε̇ * ) dV avec σ 0 = ⎨ σ ∞
r > r i et v* → v pour r → ∞ (37) appelant n la normale extérieure à la matrice en r = R et intérieure au
R→∞ ⎩ 0m
trou en r = r0 et v* un champ de vitesse incompressible :
Baqué a considéré des champs approchés v* dépendant linéaire-
ment d’un paramètre α et de la forme :
⎧ ( 1 + α )v
∞ r < ri ⎧ v ( r ) → 0 pour
1 r→∞
∫ r=R
( σ ∞ . n ) . v* dS + ∫ r = r0
( σ ∞ . n ) . v* dS = ∫ r0  r  R
s ∞ : ε̇ * dV (39)
v* = ⎨ ⎨ 1 (38)
⎩ v ∞ + αv 1 r  ri ⎩ v ( ri ) = v ∞ ( ri ) Rice déduit de la relation précédente et du théorème de la borne
1 supérieure ((44) du dossier [16]) que le champ de vitesse solution
v est un champ incompressible, déduit d’un potentiel de type
minimise la fonctionnelle :
polynomial. On note que v* induit une vitesse de déformation uni-
forme dans l’inclusion, égale à (1 + α), la vitesse de déformation de
la matrice loin de l’inclusion.
La minimisation de la fonctionnelle (38) fournit une estimation de
∫ r0  r  R → ∞
˙
( σ 0 ε * – s ∞ : ε̇ * ) dV + ∫ r = r0
( σ ∞ . n ) . v* dS
(40)
la valeur optimale de α, en fonction du rapport des contraintes
d’écoulement σ0i /σ0m (figure 9) : v* → v∞ pour r → ∞
— une inclusion plus molle que la matrice se déforme plus, mais Du fait de l’intégrale à la surface du trou, toutes les composantes
le rapport des vitesses de déformation est, au plus, égal à 3 pour du tenseur des contraintes σ∞ ont une influence sur le champ solu-
une inclusion incompressible, mais sans consistance ; tion. Ainsi, à la suite de McClintock, Rice et Tracey mettent en évi-
— à l’opposé, une matrice plus dure que la matrice se déforme dence que la pression hydrostatique p∞ a un rôle fondamental : la
moins et une inclusion de dureté supérieure à 1,5 la dureté de la vitesse relative de dilatation du trou ṙ˙0 ⁄ r 0 est proportionnelle à la
˙∞
matrice reste rigide. À noter que si l’inclusion est fragile, les con- vitesse de déformation à grande distance de la matrice ε et croît

exponentiellement avec ζ = − p /σ0, facteur sans dimension appelé
traintes exercées par la matrice, du fait de sa déformation sur une
telle inclusion rigide, peuvent la fragmenter. « triaxialité des contraintes » (figure 10).

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On a ainsi une bonne explication mécanique de l’effet de la pres-


sion de confinement sur la croissance de l’endommagement observé
eR
en traction sous pression fluide (figure 4 du dossier [42]). Tous les
modèles d’endommagement ductile intègrent cette conclusion. Calage
Tant pour le stade 1 que pour le stade 2, on a supposé le compor- sur point
0,8
tement des constituants rigide parfaitement plastique. Le caractère
9
abrupt des conclusions serait atténué par un écrouissage ou une
Cockcroft-
viscosité des constituants qui tend à homogénéiser le champ de 5
13
1 Latham
déformation et retarde alors la rupture. Ainsi la vitesse de crois- 6 0,4
14 15 2
sance des trous dans une matrice viscoplastique diminue quand 7 8 11
10 12 4
l’indice de viscosité m augmente [69]. La méthode d’approche est 3
similaire (cf. § 1 du dossier [18]).

– 0,4 – 0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0


z = – p /s0
4.2 Critères macroscopiques Expérience (cont. planes)
Expériences (axisymétrie)

D’un point de vue pratique, avec les moyens informatiques


a critère de Latham et Cockroft :
actuels et disponibles, même à échéance de plusieurs années, il est Bon accord avec les points 5 – 8 correspondants à l'apparition
à peu près impossible de pouvoir simuler de manière réaliste le dans des essais de compression de fissures à la surface du plan
comportement du matériau en intégrant une description très équatorial de cylindres de diverses géométries ; le critère est
détaillée de sa micro-structure. On utilise donc, le plus souvent, des très pessimiste pour des éprouvettes de traction axisymétriques
critères dépendant de un ou plusieurs paramètres évoluant avec lisses (1) ou avec des entailles plus ou moins marquées (2-3)
l’histoire de déformation plastique du matériau.
Le critère caractérise l’état d’endommagement du matériau et
quand il atteint une valeur critique, cet endommagement se mani- εR
feste par l’apparition de fissures qui s’étendent jusqu’à produire
éventuellement la rupture de la pièce.
Dans l’approche la plus ancienne, déformation et endommage- 0,8
ment sont découplés, c’est-à-dire que tant que le critère n’atteint pas 9 tmax = C
sa valeur critique, les propriétés mécaniques du matériau, en parti- 13
culier son critère et sa loi d’écoulement, ne sont pas affectées par 5 1
6 0,4
son endommagement. Un modèle de couplage déformation- 15
2
7 11
endommagement est présenté au § 4.3. 8 10 12 14 4 3
D’un point de vue numérique, deux stratégies sont possibles :
Point de calage
— soit calculer la valeur du critère et, à partir de la carte de ses
– 0,4 – 0,2 0,0 0,2 0,4 0,6 0,8 1,0
valeurs, apprécier ainsi l’ampleur des fissurations possibles ;
ζ = – p/σ0
— soit utiliser une technique de « kill élément » (disponible, par
exemple, sur les codes FORGE) selon laquelle la consistance d’un expérience (cont. planes)
élément est amenée brutalement à 0 quand le critère y atteint sa expériences (axisymétrie)
valeur critique. Cette approche permet de calculer la géométrie des
fissures, mais il faut souligner que les résultats sont très dépendants b critère de cission maximale critique :
de la taille du maillage utilisé, point qui sera rediscuté au § 4.3. Bon accord avec la rupture en contraintes planes.
Dans tous les cas, la fiabilité des prévisions dépend, au premier Traction de plaque avec sillon transversal 4
Compression de cylindres 5 – 8
chef, de la pertinence du critère utilisé, point toujours soumis à dis-
Cisaillement 10 – 11
cussion, puisque la pertinence est certainement fonction de la
Traction de plaque avec trou circulaire 12
nature et de l’état du matériau. Par ailleurs, il importe d’identifier à Traction d'éprouvette plate 13
l’aide d’essais les paramètres d’un critère pour chaque matériau étu- Traction de tubes 14
dié et de constituer ainsi des banques de données « matériaux »,
tâche difficile, ingrate et de longue haleine.
Figure 11 – Test expérimental du critère de Latham et Cokroft et du
Une discussion critique intéressante a été publiée récemment par critère de cission maximale critique Alliage 2024-T351 courbe
Wierzbicki et al. [57] concernant l’alliage d’aluminium 2024-T351. d’écrouissage σ 0 = 744ε 0 ,153 MPa (alliage supposé isotrope) [57]
Sept critères disponibles, dans divers codes de calcul, y sont con-
frontés aux résultats d’une série assez complète d’essais sur des
éprouvettes axisymétriques, ou des éprouvettes sollicitées en con-
très pessimistes pour la plupart des autres conditions d’essai
trainte plane.
(figure 11).
Nous n’allons pas présenter en détail cet article, mais simplement
certaines conclusions particulièrement intéressantes. ■ Un critère ancien, formulé vers 1968, est le critère de Latham et
Cockroft selon lequel l’endommagement est directement propor-
■ Un critère naturel et implémenté naturellement dans les codes de tionnel à l’intégrale de la contrainte de traction maximale du maté-
calcul est la déformation généralisée, la fissuration apparaissant riau pondérée par la vitesse de déformation :
lorsqu’elle atteint une valeur critique.
En fait, les essais montrent que la déformation généralisée à la
rupture ε R dépend fortement de l’essai considéré et caler la valeur
Q = ∫ ˙
Max J ( σ J , 0 )ε dt (41)
critique sur la valeur la plus basse observée ε R ∼ 0 ,17 (essai 3 relatif Ce critère est facile à implémenter et ne dépend que d’un paramè-
à la traction d’une éprouvette axisymétrique avec entaille très fer- tre, sa valeur critique. Par ailleurs, il est réputé assez fiable pour pré-
mée, donc très forte triaxialité ζ ∼ 0,93) conduit à des conclusions voir la fissuration sur les surfaces libres des pièces de forge,

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problème que l’on étudie expérimentalement à l’aide d’essais de ou comportant des entailles plus ou moins marqués (2-3), la triaxia-
compression sur des cylindres de diverses géométries (essais 5-8 lité augmente quand l’angle de l’entaille diminue et la déformation
de la figure 11 et/ou soumis à diverses conditions de frottement sur à la rupture décroît (figure 11). Or la rupture démarre sur l’axe de
les tas) : le bombement de la surface latérale induit des contraintes l’éprouvette où ε̇ rr = ε̇ ϕϕ : pour un matériau isotrope σrr = σϕϕ et, à
circonférentielles de tension dans le plan équatorial de l’éprouvette une pression hydrostatique près, l’état de contrainte est équivalent
et sa fissuration. à celui de la traction uniaxiale : le critère de plasticité peut toujours
Sa validité est testée en [57] sous la forme suivante, légèrement s’écrire : f = σzz − σrr − σ0 ; il est équivalent à un critère de cission
différente de la forme primitive (41). Pour de telles configurations, maximale et la déformation à la rupture devrait selon (44) être indé-
cette forme est, sur le plan théorique, équivalente au critère sur les pendante de la géométrie de l’éprouvette.
déformations principales de rupture : εIR > 0 et εIIR < 0, critère véri- Ceci montre, qu’en pratique, il faut compléter le critère de cission
fié, en général, dans la partie de gauche du diagramme des courbes maximale par un critère du type :
limites de formage des tôles ([70] et figure 7) :
ε R = h ( ζ ) ∼ C 3 exp ( – C 4 ζ ) (46)

∫ Max J ( σ J ,0 ) ˙ Ce critère est proche du critère dit « CrachFEM ductile ». Il est ici
1 3
Q = - ε dt = C 1 ↔ ε IR + --- ε IIR = --- C 1
------------------------------- (42) simplifié et ne comporte que deux paramètres C3 et C4, qui s’estiment
σ0 2 4 facilement à partir des résultats des essais de forte triaxialité, dans
l’article 13 (proche de l’éprouvette axisymétrique lisse 1), 2 et 3.
On peut montrer [57] que la forme (42) du critère de Latham et
Le critère définitif consiste à prendre la valeur minimale de la
Cockroft prévoit en contrainte plane la relation suivante entre
déformation à la rupture selon les critères (44) et (46). Une telle
triaxialité et déformation généralisée à la rupture :
démarche rend bien compte de l’ensemble des résultats des essais
reportés sur la figure 11.
3 ⎛ 3ζ + ( 12 – 27ς 2 ) 1 / 2
ε R = ------- --------------------------------------------------⎞ C (43) Des autres critères, on peut simplement dire qu’ils ne semblent
8 ⎝ 1 + ζ ( 12 – 27ς 2 ) 1 / 2⎠ 1
pas apporter, dans ce cas d’espèce, un progrès significatif : leur for-
mulation est généralement beaucoup plus complexe et ils introdui-
Cette relation est effectivement bien vérifiée pour les essais de
sent plusieurs paramètres dont l’estimation, à partir des résultats
compression (figure 11 a) où la triaxialité ζ est négative, mais con-
expérimentaux, n’est pas toujours simple.
duit à des résultats très pessimistes pour les états de contrainte de
triaxialité nulle et positive. Malgré cette multiplication de paramètres, quatre en général, on
ne note pas d’amélioration significative.
Le dernier critère que nous commenterons est également ancien,
car il s’agit du critère de cission maximale (cf. figure 1 du dossier
[42]) :
σJ – σK 4.3 Couplage plasticité-endommagement
τ max = Max J ,K ⎛ -------------------⎞ (44)
⎝ 2 ⎠
Dans cette démarche, on tient compte de l’effet de l’endommage-
Ce critère est simple à implémenter et ne dépend que d’un para-
ment progressif du matériau sur sa déformation plastique, ce qui
mètre, la valeur critique de la cission maximale. En contraintes pla-
précipite la rupture. Nous allons présenter l’approche classique de
nes, le lieu représentatif du critère dans le plan (σI,σII) est un
Lemaître [59] dont l’implémentation informatique est relativement
hexagone équivalent à l’hexagone du critère de Tresca en contrain-
simple et disponible dans les grands codes du type FORGE.
tes planes (figure 2 b du dossier [16]).
Il existe des approches plus complexes sur le plan informatique,
Si le matériau suit le critère de von Mises isotrope (8) du dossier
par exemple dérivées de la mécanique des poudres (cf. § 4.4).
[16] en s’écrouissant selon une loi puissance (relation (43) du dos-
sier [42] avec ε0 = 0), des calculs simples montrent que, si le rapport ■ Loi d’endommagement de Lemaître
des vitesses de déformation principales η est constant, la déforma-
tion à la rupture et la triaxialité ont les expression paramétriques Ce modèle est fondé sur l’approche de la mécanique de l’endom-
suivantes : magement continu [59] où l’apparition, la croissance et la coales-
cence de microcavités sont représentées par l’évolution d’une
σ I + σ II –1⁄2 p variable continue macroscopique notée D qui représente la densité
1 η ε̇ II
⎧ ζ = ------------------ = ------- 1 – --------------------- η = -----
- surfacique de microcavités et de vides dans une section de l’élé-
⎪ 3σ 3 ( 1 + η )2 ε̇ Ip
⎪ ment de volume :

⎪ ⎧ [ 1 + η + η2 ]1 / 2
1/n
1 Ad
⎨ ⎪ C 2 ⎛ --------------------------------------⎞ – ---  η  1 (45) D = -------  1 (47)
⎪ ⎪ ⎝ 2+η ⎠ 2 A
⎪ εR = ⎨ 1/n
⎪ ⎪ ⎛[1 + η + η ] ⎞ 2 1 / 2 1 avec Ad aire de la surface occupée par les cavités,
⎪ ⎪ C 2 ⎝ --------------------------------------⎠ – 2  η  – ---
⎩ ⎩ 1–η 2 A aire de la surface totale considérée (figure 12).

Le paramètre libre C2 étant calé (sans difficulté) sur l’essai de


cisaillement 10 où η = − 1 et ζ = 0, le critère de cission maximale cri-
tique permet de prévoir remarquablement bien, au moins pour Ad : surface
l’alliage d’aluminium considéré, l’évolution de la déformation à la endommagée
rupture avec la triaxialité pour les essais de déformation en con- (cavités)
trainte planes (figure 11 b).
Par ailleurs, l’interprétation de l’effet du chemin de déformation
sur la courbe limite de formage (εIIR, εIR) suggère fortement que n
l’état de contrainte à la rupture vérifie un critère de cission maxi- A : surface
male, en première approximation [58]. totale
Il faut noter toutefois, qu’en déformation axisymétrique, le critère
de cission maximale critique ne rend pas compte de l’influence de la Figure 12 – Coupe de l’élément de volume montrant un élément de
triaxialité. En effet, pour des éprouvettes axisymétriques lisses (1) surface endommagé

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Si D = 0, le matériau est sain et n’a subi aucun endommagement. mation où D est supposé négligeable. On peut aussi, dans les zones
D = 1 correspond à la rupture complète du matériau. de striction des éprouvettes de traction, estimer l’endommagement
Il en résulte l’existence d’un tenseur des contraintes effectives ou à partir d’essais de micro-dureté [60].
réelles σr, appliqué au matériau, qui est une amplification du ten-
seur des contraintes macroscopique (apparent) σ appliqué au Une démarche plus globale, à partir de l’essai de traction et sa
matériau : simulation numérique, est possible. Nous allons la présenter rapide-
σ ment dans un cas d’espèce.
σ r = ------------- (48)
1–D Exemple d’application à la simulation numérique
Dans le domaine élastique, le report de σr dans la relation d’élas- Nous considérons ici, à titre d’exemple, la courbe force-déplacement
ticité (2) conduit à la loi d’élasticité du matériau endommagé : d’une éprouvette en alliage d’aluminium 5754 (figure 13). Les paramè-
tres de sa loi d’écrouissage (sans endommagement) sont déduits
1+ν ν selon la méthode habituelle (§ 2.1 du dossier [42]) du début de la
ε e = ------------ σ – ----------- ( σ ii )1 où Eapp = E(1 − D) (49)
E app E app courbe (tableau 1).
La simulation numérique de l’essai met bien en évidence l’écart
L’endommagement du matériau se manifeste donc par une baisse entre les résultats du calcul et les résultats expérimentaux dans la par-
apparente de son module d’élasticité. La loi d’écoulement plastique tie terminale de l’essai, si on ne prend pas en compte l’endommage-
n’est pas modifiée, mais, en vertu de (48), l’écoulement plastique se ment. Elle permet ensuite d’estimer un jeu de paramètres décrivant
produit quand la contrainte équivalente macroscopique (10) vérifie : l’évolution de l’endommagement (tableau 1) et minimisant l’écart
σ = ( 1 – D )σ 0 (50) entre calcul et expérience (figure 13).
On note que pour cet alliage l’endommagement démarre sur une
Tout se passe donc comme si la contrainte d’écoulement est dimi- déformation de 0,163, soit une valeur nettement inférieure à la défor-
nuée par l’endommagement. C’est par cette équation que l’endom- mation initiant la striction dans un matériau ne s’endommageant pas.
magement conditionne l’écoulement plastique du matériau. Dans ces simulations, on utilise la technique de « kill element » décrite
■ Dans le cadre de la thermodynamique des processus irréversi- au début du § 4.2.
bles [33], la variable d’endommagement D représente une variable Une difficulté apparaît nettement sur la figure 13 : la taille du
d’état interne. L’énergie élastique du matériau dépendant de D en maillage a une forte influence sur le stade terminal de la courbe calcu-
vertu de (49), sa dérivée par rapport à D définit une force Y qui con- lée et l’allongement à la rupture. En pratique, les phénomènes de rup-
ditionne son évolution. Elle a la forme suivante en fonction de la ture sont dépendants de la micro structure (§ 4.1) et se situent à une
contrainte équivalente et du rapport p ⁄ σ qui représente l’opposé échelle caractéristique, pour les alliages métalliques, de la distance
de la triaxialité des contraintes : moyenne entre inclusions. Il importe donc de caler la taille des mailles
sur cette longueur caractéristique  . Ici, une taille de maille de 0,2 mm
σ2 2 p 2
Y = – ----------------------------- --- ( 1 + ν ) + 3 ( 1 – 2ν ) ⎛ ----⎞
semble fournir les meilleurs résultats.
(51)
2E ( 1 – D ) 2 3 ⎝ σ⎠
Lemaître [59] a proposé la loi suivante d’évolution de D en fonc-
tion de la force Y et de la vitesse de déformation équivalente :
3
Force de traction (kN)

⎧ 0 pour ε < εD

Ḋ = ⎨ ⎛ Y ⎞ q ˙ (52) 2,5
⎪ ⎝ – -------⎠ ε pour ε  εD
⎩ Sd
2
avec q et Sd paramètres caractérisant l’évolution de
l’endommagement dans le matériau,
εD déformation équivalente à partir de laquelle 1,5
l’endommagement apparaît.
Connaissant l’évolution du dommage D, il est nécessaire de défi- 1
nir un critère de rupture correspondant à l’amorçage d’une fissure
macroscopique visible à l’œil nu. 0,5

Un critère classique, très utilisé en pratique, consiste à définir 0


une valeur critique du dommage Dc au-delà de laquelle la fis- 0 1 2 3 4 5 6 7 8
sure macroscopique résultant de la coalescence des microcavi- Déplacement (mm)
tés se propage.
Dc varie, en général, selon la ductilité du matériau, entre 0,2 Expérience (sens 0º)
(pour les alliages d’aluminium) et 0,7 (pour les aciers ductiles). Sans endommagement
Avec endommagement (TM = 0,2 mm)
On peut évaluer l’endommagement D et sa loi d’évolution de Avec endommagement (TM = 0,3 mm)
diverses manières : Avec endommagement (TM = 0,4 mm)
— soit à partir de la relation (49) en effectuant une série de char-
Alliage d'aluminium 5754 (1 mm - caractéristiques mécaniques dans le tableau 1).
ges et décharges dans un essai de traction et en déterminant l’évo- L'effet de la taille de maille est normal pour toute formulation locale de
lution du module d’Young apparent Eapp = E(1 − D) ; l'endommagement et, dans une certaine mesure, traduit le fait que
— soit à partir de la relation (50) en comparant la contrainte géné- l'endommagement se développe à une certaine longueur caractéristique, de l'ordre
ralisée à l’évolution de la contrainte d’écoulement sans endomma- de la distance moyenne entre inclusions.
gement. Une telle démarche est possible sur les essais de la figure 4
du dossier [42] où la courbe enveloppe correspond à la courbe Figure 13 – Effet de la taille du maillage TM sur la courbe de traction
d’écrouissage sans endommagement. Le plus souvent celle-ci est d’une éprouvette plate simulée numériquement (code FORGE)
obtenue par extrapolation de la loi d’écrouissage en début de défor- (géométrie zone utile de l’éprouvette L0 = 20 mm ; b0 = 10 mm)

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(0)
déformation à peu près homogène comprise entre 0,24 et 0,27, ce
Tableau 1 – Caractéristiques d’écrouissage et qui est normal puisque la déformation est inférieure à la déforma-
d’endommagement d’une tôle en alliage d’aluminium 5754 tion initiant la striction 0,3 (tableau 1) ; les écarts à l’homogénéité
(1 mm) identifiées par simulation numérique de l’essai de aux extrémités sont induits par la zone d’élargissement de l’éprou-
traction d’éprouvettes plates (figure 13) ( r = 0 ,64 ) . Selon vette qui se déforme également, mais de manière moins marquée ;
la théorie classique (sans endommagement), la striction — l’endommagement se développe dans la partie centrale de la
zone utile (figure 14 c) et y concentre les déformations
diffuse démarre pour ε = n – ε 0 ∼ 0 ,3 [10]
(figure 14 b), comme sur l’éprouvette réelle (figure 14 d).
Loi d’écrouissage Au total, à la rupture, la déformation maximale est de l’ordre de
(relation (43) du Caractéristiques d’endommagement 0,5.
dossier [42]
K (MPa) n ε0 εD Sd (MPa) q Dc Ce type de modèle est utilisé notamment pour simuler la découpe
des métaux en feuilles [61]. Toutefois, selon les relations (51) et (52),
442 0,304 0,005 9 0,163 89,9 0,142 0,183
l’endommagement se développe de la même manière, quel que soit
le signe de la pression hydrostatique. Ceci est directement lié au fait
que, selon ce modèle, le moteur de l’endommagement est la densité
d’énergie élastique stockée dans le matériau, la déformation plasti-
■ Des approches, en cours de développements, introduisent une
que étant à l’origine de son extension.
description non locale de l’endommagement qui permet de rendre
les résultats des calculs indépendants de la taille du maillage. La
Afin de décrire de manière plus réaliste l’endommagement duc-
longueur caractéristique  étant incluse dans la loi d’endommage-
ment, une telle formulation permet de découpler les aspects physi- tile, qui est très faible dans les états de contrainte fortement com-
ques du problème des aspects proprement numériques. pressifs, le modèle de Lemaître est implémenté dans le code FPRGE
sous la forme suivante :
La figure 14 compare la carte des déformations généralisées dans
l’éprouvette au déplacement correspondant à la rupture selon le cal-
cul et selon l’expérience. On peut ainsi apprécier la pertinence phy- ⎧ 0 pour ε < εD ou p>0
sique de la loi d’endommagement identifiée : ⎪
Ḋ = ⎨ ⎛ Y ⎞ q ˙ (53)
— en l’absence d’endommagement (figure 14 a), on observe, sur ⎪ ⎝ – -------⎠ ε pour ε  εD et p0
la plus grande partie de la zone utile de l’éprouvette, une zone de ⎩ Sd

Mises strain
0,274303 0,516745 0,182988
(Logarithm)
0,43792
0,46507 0,164689
0,246673
0,38228
0,413396 0,14639
0,219442

0,32883
0,128091
0,192012 0,351721

0,109793 0,27399
0,164582 0,310047

0,0914938 0,21935
0,137151 0,258372

0,0731951 0,16471
0,109721 0,206698

0,0548963
0,0822909 0,11006
0,155023
0,0365975
0,0548806 0,05542
0,103349
0,0182988
0,0274303 0,00078
0,0516745
0
0
0

a carte des déformations b carte des déformations c carte de l'endommagement d carte de déformations
généralisées pour un calcul généralisées pour un calcul associé à b selon le calcul généralisées dans
ne prenant pas en compte prenant en compte l'éprouvette après rupture
l'endommagement l'endommagement

Figure 14 – Simulation numérique (code FORGE) de l’essai de traction d’une éprouvette plate en alliage d’aluminium 5754
(1 mm – caractéristiques mécaniques dans le tableau 1). Cartes des déformations généralisées et de l’endommagement et comparaison
à l’expérience [10]

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4.4 Plasticité compressible Dans cette relation, a et b sont des fonctions positives de la den-
sité relative qui tendent respectivement vers 1 et 0 lorsque la den-
sité relative tend vers 1. On obtient alors le critère de von Mises (10)
■ Concepts généraux du dossier [16] ce qui permet de conclure que σ0 est la contrainte
Nous ne tiendrons pas compte ici, pour simplifier la présentation, d’écoulement plastique du matériau totalement dense, a(dr)σ0 étant
de la composante élastique des déformations. la valeur critique de la contrainte équivalent à triaxialité nulle p = 0
On considère un matériau, de masse volumique à l’état massif ou (par exemple en torsion). On en conclut que a ( d r )  1 . La règle de
totalement dense ρM. On décrit la déformation irréversible de ce normalité (57) fournit aussitôt :
matériau soit à partir d’un état granulaire (b), soit à partir d’un état ⎧ ˙
initial présentant en petites quantités des petites porosités (c). 3ε
⎪ ė = ------------------------ s

Cette distinction tient au fait que, empiriquement, les deux types ⎪ 2a ( d r )σ 0
de comportement que nous allons décrire semblent plus adaptés à f(s, p) = 0 → ⎨
⎪ ḋ r ˙
ces deux situations, alors que d’un point de vue formel, ils reposent b ( d r )ε
sur les mêmes concepts de base. Soit fp la fraction volumique de ⎪ ----- = – θ̇ = -------------------- - p
⎪ dr a ( d r )σ 0
vide ou porosité dans le matériau et ρ sa masse volumique dans cet ⎩
état ; on définit la densité relative dr , grandeur comprise entre 0 et 1, (60)
par la relation : ⎧
⎪s = 2 a ( d r )σ 0
--- --------------------- ė
ρ ḋ r ρ̇ ḟ p ⎪ 3 ˙
d r = ------- = 1 – f p  1 → ----- = --- = – -------------- = – θ̇ (54) ⎪ ε 2 θ̇ 2
1/2
ε = ⎛ --- ė : ė + -----⎞
dr ρ ˙
ρM 1 – fp ou ⎨ avec
⎝3
⎪ a ( d r )σ 0 b⎠
La vitesse de variation relative de la densité relative est donc ⎪–p = --------------------- θ̇
égale à l’opposé de θ̇ , la vitesse de variation relative de volume ⎪ b ( d r )ε
˙

reliée au champ de vitesse par la relation (6) du dossier [42]. Il s’agit
d’un comportement plastique compressible amenant une variation Le critère étant une fonction homogène, on peut introduire une
de la masse volumique et de fp, la puissance de déformation étant vitesse de déformation équivalente qui permet d’éliminer le multi-
donnée par la relation (17) du dossier [42]. Le champ de contraintes plicateur plastique et d’exprimer la puissance de déformation selon
étant défini par s et p, il est commode d’introduire le déviateur des la relation (33) du dossier [16] où σ0 est remplacé par a(dr)σ0.
vitesses de déformation ė : Cette loi de comportement est donc bien une généralisation de la
⎧ θ̇ = ε̇ ii loi de von Mises : on voit d’après la relation (59) qu’une pression
⎪ hydrostatique positive augmente la densité relative, alors qu’une
⎨ θ̇
(55) pression hydrostatique négative a l’effet inverse. On identifie les
⎪ ė = ε̇ – ⎛ ---⎞ 1
⎩ ⎝ 3⎠ deux fonctions a et b à l’aide des résultats d’essais de déformation
dans des configurations simples [68].
Avec ces notations, la puissance de déformation (17) du dossier
[42] s’écrit : Par exemple, pour des essais de compactage d’éprouvettes de
volume initial V0 sous contrainte purement hydrostatique p. On a alors
Ẇ u = σ : ε̇ = s : ė – pθ̇ = s : ė + pḋ r ⁄ d r (56) selon (58), b(dr) = (a(dr)σ0 /p)2, la variation de densité relative étant dr /
Les lois de comportement standard (isotropes) vérifient le principe dr0 = V0 /V.
du travail maximal et s’obtiennent donc à partir d’un critère de plasti- Un autre essai est la compaction uniaxiale d’un bloc cylindrique (hau-
cité compressible de la forme f(s,p) et de la règle de normalité : teur initiale h0) dans un conteneur. Sous réserve que le frottement sur les
⎧ parois du conteneur soit faible, la vitesse de déformation, la contrainte de
∂f ( s , p )
⎪ ė = λ -------------------- compaction et la variation de densité relative vérifient selon (59) :
⎪ ∂s
f ( s , p ) = 0 → ⎨ ḋ λ0 (57) ⎛4
1/2
⎪ ----- = – θ̇ = λ ∂-------------------
r f(s, p)
⎛ 0 0 ⎧ 1 ⎞
- 0 ⎞ ⎪ σ zz = s zz – p = – ⎜ --- + -------------⎟ a ( d r )σ 0
⎪ dr ∂p ⎜ ⎟ ⎝
⎩ 0 ⎟ →⎪
9 b ( d r )⎠
ε̇ = ⎜ 0 0 ⎨ (61)
⎜ ⎟
⎜ 0 0 1 dh ⎪ dr h0
Une forme équivalente est une formulation de f avec comme varia- --- ------- ⎟ ⎪ ------- = ------
bles p et la contrainte équivalente. On a alors pour un corps isotrope : ⎝ h dt ⎠ ⎩ d r0 h
⎧ 3λ ∂f ( σ , p )
⎪ ė = ------- -------------------- s À titre d’exemple, divers essais montrent que le comportement à
⎪ 2σ ∂σ froid de poudres de fer, de cuivre et d’aluminium est bien représenté
f(σ, p) = 0 → ⎨ λ0 (58)
⎪ ḋ r ∂f ( σ , p ) par les deux fonctions [62] :
- = – θ̇ = λ --------------------
⎪ ----
⎩ d r ∂p a ( d r ) = d r2 ,5 b(dr) = 6(1 − dr)1,028 d r  0 ,65 (62)
Les théorèmes de borne supérieure et inférieure (§ 4 du
En conclusion, cette loi de comportement est actuellement très utili-
dossier [16]) s’appliquent donc à ces matériaux, avec une légère
sée pour modéliser le compactage des poudres métalliques. Elle sert,
modification : les champs de vitesse ne sont plus restreints à être
en outre, de modèle pour le comportement de la phase solides des
incompressibles et les discontinuités de vitesse interne ne sont plus
alliages métalliques semi-liquides déformés à des températures inter-
forcément tangentielles, la variation de la composante normale
médiaires entre le liquidas et le solidus (rhéocoulée, zone pâteuse des
étant reliée à celle de la densité relative.
produits mis en forme par fonderie ou coulée continue [71]).
■ Comportement des milieux granulaires ou poreux À chaud, on complète la description en supposant que la con-
Cette loi de comportement a été proposée vers 1978 par Oyane et trainte d’écoulement du matériau massif σ0 est fonction de la
Coll. [62]. Elle correspond au critère : vitesse de déformation (cf. dossier [18]) et en tenant compte de la
tension superficielle : elle agit comme une pression interne sur le
f ( s , p ) = 3s : s + 2b ( d r )p 2 – 2a 2 ( d r )σ 02 (59) matériau et produit le frittage à haute température des poudres
métalliques en l’absence de contraintes appliquées au matériau,
⎧a(1) = 1
avec ⎨ phénomène négligeable à basse température ou à haute tempéra-
⎩b(1) = 0 ture lorsque les contraintes appliquées sont élevées [63] et [68].

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■ Comportement d’un milieu poreux et application à l’étude de


l’endommagement ductile La figure 15 présente des résultats théoriques de l’évolution
de la masse volumique de barres lors de passes successives
Gurson a proposé vers 1977 une loi de comportement macrosco- d’étirages et les résultats expérimentaux obtenus par Coffin et
pique pour modéliser la déformation plastique d’alliages métal- Rogers vers 1967.
liques contenant des vides ou porosités de forme sphérique. Cette Il faut noter que le modèle de Gurson-Tvergaard ne spécifie
loi a été généralisée par Tvergaard [64] sous la forme suivante : en aucune manière comment les porosités peuvent apparaître
2 dans le matériau, mais simplement leur évolution. Il faut donc
σ 3 p
f ( σ , p ) = ⎛ ------⎞ + 2q 1 f p cosh ⎛ --- q 2 ------⎞ – 1 – q 3 f p2 (63) estimer la fraction initiale de porosités et les auteurs disent
⎝σ ⎠ ⎝2 ⎠
0 σ 0 introduire des valeurs initiales, d’ailleurs très faibles (4-7 · 10−4),
conformes aux observations faites sur les matériaux étudiés.
Dans cette relation, la variable d’état du matériau est la fraction Le calcul met bien en évidence la diminution de masse volu-
volumique de porosité fp ; pour fp = 0, on retrouve le critère de von mique quand la réduction par passe diminue, l’angle de la filière
Mises (9). Mais on note que le critère n’est pas une fonction et le nombre de passes augmentent. Dans l’ensemble, il
homogène, ce qui rend la manipulation mathématique de ce com- retrouve bien les bons ordres de grandeur.
portement plus difficile. L’application des relations (58) donne aussi-
tôt la loi d’écoulement associée :
⎧ λ
⎪ ė = ------ s
⎪ σ0
f ( σ , p ) = 0 → ⎨ ḟ λ  0 (64)
3 p
- = θ̇ = – q 1 q 2 f p λ sinh ⎛ --- q 2 ------⎞
⎪ -------------
p
⎪1 – f ⎝2 σ 0⎠ r (103 kg/m3)
⎩ p
8,92
On voit que, pour une triaxialité positive, la fraction volumique de
porosité augmente de manière exponentielle avec la triaxialité, évo- a = 5o
lution, très proche de l’évolution théorique pour une cavité isolée 8,90
dans un milieu infini (figure 10).
Pour une triaxialité négative, c’est-à-dire une pression positive, la
fraction de porosité diminue. 8,88
Expérience : TPCu
Coffin and Rogers (1967)
Le critère formulé initialement par Gurson correspond au jeu de
paramètres : q1 = q2 = q3 = 1. La généralisation a été introduite par α = 15o
8,86 13 % RPP
Tvergard pour améliorer l’accord avec l’expérience. Ainsi, un jeu de
valeurs possibles est : q1 ∼ 1,4, q2 ∼ 1,1 et le plus souvent on prend
0 20 40 60 80
q 3 = q 12 [65]. Divers modèles s’efforcent de décrire l’évolution des
Réduction en aire
paramètres avec la forme des porosités, l’état de contrainte et la cumulée R = 1 – A1 /A 0 (%)
rhéologie de la matrice [66].
α = 5∞ α = 15∞
Deux démarches sont possibles :
— soit résoudre les équations (63) et (64) pour, par exemple, sui- a Influence de l'angle α de la filière
vre de fortes évolutions de porosité et ainsi analyser les conditions Cuivre n = 0,32 fp0 =7.10 – 4
de rupture ductile. Cette approche est délicate à implémenter dans
les codes de calculs ;
r (103 kg/m3)
— dans le cas de faibles porosités, négliger l’effet de la porosité
sur l’écoulement plastique et estimer son évolution à partir du
champ de contraintes et vitesses du matériau sans porosité (critère 2,708 13% RPP
de von Mises et loi d’écoulement associée), par exemple à l’aide de
la relation suivante, obtenue à partir de (64) en reportant le multipli- 10%
cateur plastique (26) du dossier [16] : 2,704

ḟ p 3q 1 q 2 ˙ 3 p
- = – ----------------- ε sinh ⎛ --- q 2 ------⎞
----------------------- (65) 8,5%
2 ⎝2 σ ⎠ 2,700
( 1 – f p )f p 0

Cette dernière approche découplée est beaucoup plus simple. 2,696


Saleh et Coll. [66] ont ainsi analysé la variation de masse volumique 0 20 40 60 80
de barres lors d’une succession de passes d’étirage (déformation Réduction en aire
plane). Le champ de contrainte et de vitesse est la solution analyti- cumulée R = 1 – A1 /A0 (%)
que de Nadai de l’écoulement convergent dans une filière conique
de demi-angle α pour un frottement de Tresca [30], modifiée pour Expérience : 6061 – T6 Al. 8,5% RPP
tenir compte du travail redondant à l’entrée et à la sortie de la zone Coffin and Rogers (1967)
de déformation.
b Influence de la réduction par passe (RPP)
Il est bien connu que, dans le plan de symétrie de l’opération, la Alliage d'aluminium n=0,27 fp0=4.10-4
contrainte axiale à la sortie de la zone de déformation est d’autant
plus grande que la zone de déformation est plus élancée (rapport
hauteur sur longueur plus grand), c’est-à-dire que la réduction est
plus faible et l’angle α plus grand. Ce phénomène concerne aussi le Figure 15 – Évolution théorique selon le modèle de Gurson-Tvergaard
filage à faible réduction et est à l’origine de la formation de porosi- de la masse volumique ρ de barres étirées, lors de passes successives
tés internes et, si le matériau n’est pas assez ductile, du défaut et comparaison à l’expérience
d’écœurement (central bursting defect) en filage [72] et de la rupture (porosités supposées initialement équiaxes ; q 3 = q 12 frottement m = 0 ,02 )
de la barre en étirage. [66]

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Notations et Indices Notations et Indices


Symboles Unités Désignation Symboles Unités Désignation

Notations pf Pa pression de fluide

b m largeur d’éprouvette de flexion, q1 , q2 , q 3 – coefficients de la loi de


de tôle en laminage comportement de Gurson-
Tvergard
dr – densité relative (rapport densité
du matériau sur densité Q (QI) N, N · m vecteur force généralisée
maximale du matériau)
P N force de flexion
c J · kg−1 · K−1 capacité thermique massique
q̇ ( q̇  ) m· s−1, rad · s−1 vecteur vitesse généralisée
C m−1 courbure d’une section d’une
éprouvette de flexion R m rayon de la partie utile de
l’éprouvette (traction, torsion)
D – variable d’endommagement
R (Ri) N résultante
ė ( ė ij ) s−1 tenseur déviateur des vitesses
de déformations ˙ (R )
R ij s−1 tenseur des vitesses de rotation
e m épaisseur de tube rα – coefficient d’anisotropie de
Lankford (traction selon une
fp – fraction volumique de porosités direction faisant un angle α
du matériau avec la direction de laminage)
E Pa module d’Young Orϕz – coordonnées polaires
F N force de traction, de laminage Re Pa limite d’élasticité du matériau

f(σ) – critère de plasticité Rm Pa résistance du matériau

g(τ) – critère de glissement interfacial s (sij) Pa déviateur des contraintes

H (εp) Pa évolution de la contrainte de S0 m2 aire initiale de la section utile de


traction avec la déformation l’éprouvette de traction
plastique
SR m2 aire de la section de rupture de
HV – dureté Vickers l’éprouvette de traction

k Pa cission maximale du métal t s temps

K Pa · sm consistance en cisaillement T (Ti) Pa vecteur contrainte

Ke Pa module de compressibilité T K température absolue


élastique
x (xi) m vecteur position
Kσ Pa−1 index de plasticité de
transformation X (Xij) Pa tenseur d’écrouissage
cinématique
L m longueur de la partie utile de
l’éprouvette (traction, torsion) U J · kg−1 énergie interne massique

m – indice de viscosité U (Ui) m vecteur déplacement

m – coefficient de frottement v (vi) m· s−1 vecteur vitesse


de Tresca
vn m · s−1 module de la composante
M N·m moment de flexion normale de la vitesse

n – indice d’écrouissage vt (vt1,vt2) m · s−1 composante tangentielle


de la vitesse
n (ni) – normale unitaire définissant
une facette, normale unitaire vref m · s−1 vitesse de référence
extérieure au volume Ω (vitesse d’outil)
p Pa pression hydrostatique V (Vi) m · s−1 vecteur vitesse de translation
Indices Indices
e : élastique e : élastique
p : plastique p : plastique
1 : métal 1 : métal
2 : outil 2 : outil
f : frottement f : frottement
u : par unité de volume u : par unité de volume
s : par unité d’aire de surface s : par unité d’aire de surface

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Notations et Indices Notations et Indices


Symboles Unités Désignation Symboles Unités Désignation
˙
W W puissance ε̇ ( ε̇ ij ) s−1 tenseur des vitesses de
déformation
α K−1 coefficient de dilatation
thermique linéaire λ, λ′ (Pa · s)−1 multiplicateurs plastiques
α s−m coefficient de frottement de µ – coefficient de frottement de
Norton-Hoff Coulomb
β – coefficient du modèle ν – coefficient de Poisson
d’écrouissage mixte de Hughes
ρ kg · m−3 masse volumique
β̃ K−1 coefficient de thermodépendance
de la contrainte d’écoulement ρM kg · m−3 masse volumique maximale
du matériau
χ – fraction volumique de nouvelle
phase θ = ln(V/V0) – déformation volumique (∼ ∆V/V0
pour petites variations)
γ – cisaillement
σ (σij) Pa tenseur des contraintes
γ̇ s−1 vitesse de cisaillement
σ Pa contrainte normale
Γ N·m couple de torsion, de laminage
σ0 Pa contrainte d’écoulement
Γ (Γi) N·m moment résultant plastique du matériau

∆v (∆v) m · s−1 discontinuité de vitesse (intensité) σn Pa contrainte nominale en traction

ε – déformation rationnelle totale σ1 Pa · sm consistance (en traction)


en traction
σα Pa contrainte de traction dans
εn – allongement relatif de la direction faisant un angle α
l’éprouvette de traction avec la direction de laminage
ε0 – coefficient de prédéformation (loi σb Pa contrainte d’écoulement
de Krupkowski) en bi-expansion
εR – déformation à la rupture σ Pa contrainte équivalente

εp – déformation plastique en traction Σ % striction (en traction)

εe – déformation élastique en traction τ Pa cission


ε (εij) – tenseur des (petites) déformations ζ – triaxialité des contraintes, − p/σ0
ε – déformation généralisée ω rad · s−1 vitesse angulaire
˙
ε s−1 vitesse de déformation généralisée ω (ωi) rad · s−1 vecteur vitesse de rotation

Indices Indices
e : élastique e : élastique
p : plastique p : plastique
1 : métal 1 : métal
2 : outil 2 : outil
f : frottement f : frottement
u : par unité de volume u : par unité de volume
s : par unité d’aire de surface s : par unité d’aire de surface

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