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Les fondamentaux de l’hygiène, de la sécurité et des

conditions de travail dans les collectivités territoriales et


leur établissements publics

Séance 1 : Les enjeux et le cadre juridique de la prévention des


risques liés à l’hygiène, la sécurité et les conditions de travail dans
les collectivités territoriales et leurs établissements publics

Fiche de connaissances
Le décret n° 2012-170 du 3 février 2012, tout en modifiant le décret n° 85-603 du 10 juin 1985
relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive
dans la fonction publique territoriale a profondément réformé, en augmentant le niveau
d’exigence et de contrôle, les dispositifs de prévention des risques professionnels qui doivent
impérativement être mis en place dans chaque collectivité ou établissement sous statut de la
loin° 84-53 du 26 janvier 1984, portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique
territoriale

Pourtant, à ce jour, nombreuses encore sont les collectivités ou établissements qui n’ont pas
rempli cette obligation ou qui l’ont remplie de manière trop formelle. Ainsi, les outils qui ont
vocation à servir de supports en rendant vivante, évolutive et proche des réalités de réalisation
du travail l’instauration d’un traitement réel des risques, sont fréquemment sous ou mal utilisés
(Registres obligatoires et document unique d’évaluation des risques professionnels - Duerp).

Or, lorsque le risque survient dramatiquement, la tendance constante des tribunaux est de
condamner de plus en plus sévèrement les protagonistes.

Au-delà de cette évolution sociétale de fond, la réalisation du risque en milieu professionnel


étant de moins en moins acceptée, l’identification de nouveaux risques et les contraintes
consécutives pour les employeurs territoriaux se sont multipliées (analyse obligatoires de qualité
de l’air et mesure des ondes électromagnétiques dans les locaux de travail pour citer des
exemples récents).

Par ailleurs, l’exigence juridique de protection de la santé mentale des agents modifie, en
introduisant un volet nouveau souvent éloigné des qualifications des préventeurs en place,
radicalement les dispositifs de préventions existants. Cette exigence nouvelle requiert
l’acquisition de champs de compétences supplémentaires pour l’ensemble des acteurs.

En outre, les enjeux économiques de la prévention pour les collectivités ne sont pas
négligeables, les deux causes principales d’absentéisme reconnues étant les troubles musculo-
squelettiques -TMS et les risques psychosociaux - RPS.

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1. Les enjeux
Si le nombre de décès direct par accident du travail s’est stabilisé autour de 550 par an en
France, soit 5 fois moins qu’en 1971, cette évolution d’apparence favorable ne rend pas
compte de la réalité complexe de l’impact des risques dans l’environnement professionnel qui,
outre près de 700 000 accidents déclarés chaque année, se traduit par diverses conséquences
lourdes : invalidité, maladies d’origine professionnelle évolutives etc.
1.1 Un enjeu éthique et social
Loin de la fatalité voire de la punition divine qui prévalait dans les interprétations jusqu’au
XXème siècle, le risque est devenu un objet étudié, calculé et anticipé et de moins en moins
accepté lorsqu’il survient : défibrillateurs, détecteurs de fumées et autres équipements de
sécurité envahissent l’environnement privé, collectif et professionnel ; la judiciarisation est
devenue quasi systématique lorsque qu’une responsabilité est imputable. L’article L 4122-1 du
code du travail (applicable aux agents territoriaux) dispose que chaque travailleur doit
prendre soin de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celle des autres personnes concernées
par ses actes ou omissions ; et la première formation obligatoire d’un agent public au moment
de sa prise de poste concerne la sécurité. Par ailleurs, l’éthique sociétale actuelle, au sens de
l’idéal de vie à atteindre, n’accepte plus la matérialisation du risque par l’accident. Cela s’est
matérialisé, en droit positif, par une législation, une réglementation, des décisions
juridictionnelles qui couvrent toute la sphère professionnelle et érige la prévention en obligation
à la fois collective et individuelle.

1.2 Un enjeu financier


Les évolutions de la prévention ont permis une réduction de moitié en 50 ans des accidents,
mais le montant des prises en charge directes n’a pas décru et de nouvelles problématiques
sont apparues notamment la hausse des coûts indirects comme les maladies professionnelles
et l’absentéisme. Des indicateurs fins permettent ainsi de mieux quantifier, par exemple, les
conséquences économiques des troubles musculo-squelettiques (TMS) et des risques
psychosociaux (RPS). L’absentéisme au sein des collectivités locales et de leurs établissements
publics, qui varie de 6 à 10 % selon la taille de la structure, est devenu un indicateur de premier
plan objet d’attention fine et de pilotage méticuleux.
La prévention des risques, tant physiques que psychiques, est désormais comprise comme
facteur d’efficience dans un contexte de masse salariale contrainte.

2. Le cadre juridique
Dans la fonction publique territoriale les dispositions du code du travail s’appliquent aux
principes généraux et à la démarche de prévention ainsi qu’aux règles particulières de sécurité
au travail. La structuration et l’organisation quant à elle est encadrée par le décret n° 85-603
du 10 juin 1985 relatif à l’hygiène et à la sécurité dans la fonction publique territoriale, modifié.
Enfin la jurisprudence vient préciser les conditions d’application de ce corps de règles.

2.1 L’application du code du travail à la fonction publique


territoriale
Certaines obligations de premier plan, notamment l’instauration d’une traçabilité de
l’identification des risques par le document unique ou de la fiche individuelle d’exposition
relèvent de ce seul code.

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Le décret n° 85-603 du 10 juin 1985, précité, modifié notamment par le décret n° 2012-170 du
3 février 2012 est venu dans son article 3, préciser les dispositions de code du travail applicables
:
« En application de l’article 108-1 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée, dans les services des
collectivités et établissements mentionnes à l’article 1er, les règles applicables en matière de
santé et de sécurité sont, sous réserve des dispositions du présent décret, celles définies aux
livres Ier à V de la quatrième partie du code du travail et par les décrets pris pour leur
application, ainsi que par l’article L. 717-9 du code rural et de la pêche maritime [ dispositions
applicables aux chantiers forestiers et sylvicoles] ».
Ne s’appliquent donc pas à la fonction publique territoriale les dispositions figurant aux livres VI
à VIII de cette même quatrième partie du code du travail. Celles-ci concernent l’organisation
de la prévention pour le secteur privé, son contrôle, et les sanctions pénales en cas de
manquement. Ces matières sont régies par le statut de la fonction publique : son titre Ier (loi n°
83-634 du 13 juillet 1983, portant droits et obligations des fonctionnaires et notamment ses
articles 8 bis, 21 bis, 22bis et 23) le statut spécifique à la fonction publique territoriale (loi n° 84-
53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale
et notamment ses articles 33, 33-1 et 108-1 à 108-4) le décret d’application du 10 juin 1985
(précité) en matière d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail et différents arrêtés
ministériels.
Il existe, en outre, des dérogations partielles à l’application du code du travail dans la fonction
publique territoriale. Ainsi :
- les services départementaux d’incendie et de secours (Sdis) possèdent leur propre
comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) quels que soient leurs
effectifs ; et l’exercice du droit de retrait est limité lors des missions opérationnelles de secours
aux personnes et aux biens ;
- les cadres d’emploi de la filière police municipale et celui de gardes champêtres sont
régis par un arrêté de 2001 qui limite l’exercice du droit de retrait lors des missions
opérationnelles (arrêté du 15 mars 2001 portant détermination des missions de sécurité des
personnes et des biens incompatibles avec l'exercice du droit de retrait dans la fonction
publique territoriale NOR : FPPA0110020A).
L’obligation générale de sécurité :
Le code du travail fonde l'obligation générale de sécurité qui incombe à l'employeur vis-à-vis
de ses salariés dans l’article L. 4121-1 :
« L'employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé
physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail, y compris
ceux mentionnés à l'article L. 4161-1 [les facteurs de risques professionnels] ;
2° des actions d'information et de formation ;
3° la mise en place d'une organisation et de moyens adaptés.
L'employeur veille à l'adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des
circonstances et tendre à l'amélioration des situations existantes. »
Cet article fonde l'obligation qui est faite à l'employeur d'établir un document unique
d’évaluation des risques professionnels, clé de voute du dispositif de prévention (article R.
4121-1).

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2.2 Le décret du 10 juin 1985 : organisation et moyens incombant à
l’autorité territoriale
La fonction publique territoriale fait l’objet de dispositions spécifiques.
L’organisation, les attributions et les moyens des différents acteurs de la prévention dans les
collectivités et leurs établissements sont précisés par le décret du 10 juin 1985 (précité) « relatif
à l'hygiène et à la sécurité du travail ainsi qu'à la médecine professionnelle et préventive dans
la fonction publique territoriale » qui définit de manière spécifique les acteurs de la prévention
et leurs missions : autorité territoriale, encadrement, agents, agents chargés de la prévention,
agents chargés d'une fonction d'inspection, comité technique (CT), comité d'hygiène, de
sécurité et des conditions de travail (CHSCT), service de médecine préventive, ...
Une circulaire d’application détaillée du 12 octobre 2012 (NOR : INTB1209800C) précise de
manière exhaustive les modalités pratiques de mise en œuvre et permet de s’approprier le
dispositif.
2. 3 La jurisprudence : l’obligation de sécurité de résultat
Depuis une quinzaine d’années, la jurisprudence vise à inciter fortement l'employeur à prendre
les mesures indispensables de prévention des risques. En droit du travail ce principe général de
prévention mis à la charge de l'employeur crée une obligation de sécurité de résultat
beaucoup plus contraignante que l'obligation de moyens renforcée qui prévalait auparavant.
Par les arrêts « Amiante » de février 2002, la Cour de cassation a eu à qualifier l’obligation de
sécurité de l’employeur en obligation de résultat notamment en ce qui concerne les maladies
professionnelles contractées par le salarié du fait des produits fabriqués ou utilisés
Cette jurisprudence a été, par la suite, étendue aux accidents du travail (Cass. soc., 11 avril
2002, n° 00-1653).
Pour résumer :

L’employeur doit prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger
la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent :

• des actions de prévention des risques professionnels et de la pénibilité au travail ;


• des actions d’information et de formation ;
• la mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.

Il veille également à l’adaptation de ces mesures (article L. 4121-1 du code du travail)

Il s’agit d’une obligation de sécurité de résultat. Si l’employeur manque à cette obligation, sa


responsabilité peut alors être engagée et l’absence de faute ne l’exonère pas de sa
responsabilité.

Etendue de l’obligation de sécurité de résultat :


L’obligation de sécurité de résultat est donc désormais étrangère à toute notion de faute, la
réalisation du risque suffit à faire condamner l’employeur. Elle n’implique pas une
connaissance du danger. En outre, le manquement à cette obligation a le caractère d'une
faute inexcusable lorsque l'employeur :
- avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié,
- et qu'il n'a pas pris les mesures nécessaires pour l'en préserver.
Cette exigence ne vise pas une connaissance effective du danger. La jurisprudence se réfère
à cet égard à un entrepreneur avisé ou averti et le risque doit avoir été raisonnablement
prévisible. La conscience du danger paraît donc devoir découler de « l’évidence même des

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choses », c’est la raison pour laquelle la Cour de cassation recourt parfois à une double
négation, « l’employeur ne pouvait pas ne pas avoir conscience du danger qu’il faisait courir
à son salarié ».
Les cas de présomption de faute de l’employeur : la faute inexcusable est par ailleurs
présumée dans deux cas :
- le manque de formation à la sécurité renforcée prévue à l'article L. 4154-2 du code du
travail ;
- lors de la survenance d'un accident dont le risque avait été signalé par les intéressés
ou un membre du CHSCT à l'employeur.
A titre d’illustrations, voici différents cas de mise en cause de la responsabilité pénale en
matière de santé et de sécurité au travail révélant un manquement dans les obligations de
prévention.
Organisation de la prévention
La défaillance dans l’organisation générale de la prévention et l’absence de mesures
particulières adaptées, si elles sont considérées comme causes d’un accident du travail,
engagent alors la responsabilité de l’employeur.
Le manquement de l’employeur ou du chef d’établissement à l’obligation d’organisation qui
relève de ses attributions, est jugé fautif et entraîne l’engagement de sa responsabilité pénale.
La complexité des fonctions exercées par un chef d’établissement, à la fois techniques et
administratives, ne sauraient l’empêcher d’organiser, en détail, la sécurité du travail dans le
secteur d’activité dont il a la responsabilité.
Ainsi, le défaut d’organisation peut résulter du fait que le chef d’établissement ait négligé de
déléguer ses pouvoirs à une personne qui, sur place, aurait été en mesure de faire respecter
la réglementation relative à l’hygiène et à la sécurité. Il peut également résulter d’une
délégation inefficace.
Défaut de délégation de pouvoir
La responsabilité d’un employeur a été retenue au motif que, assurant la direction de
nombreux chantiers sur tout le territoire et résidant loin de celui sur lequel s’est produit
l’accident, il n’avait pas investi un préposé de l’autorité et de la compétence nécessaires pour
veiller à la sécurité sur le chantier en cause (Cass. crim., 22 mai 1973, n° 72-90777).
Il appartient au maire d’une commune de veiller au respect de la réglementation dans les
locaux qui sont la propriété communale, que les locaux soient professionnels ou ouverts au
public, et de maintenir ceux-ci dans un état tel que la sécurité y soit toujours assurée. A défaut
de pouvoir lui-même exécuter cette obligation, il lui incombe d’organiser les services
municipaux de telle sorte qu’elle soit dévolue à un membre du conseil municipal ou à un
membre du personnel communal compétent pour l’assurer. (Cass. crim., 14 janvier 1993, n° 92-
85536)
Le défaut de délégation de pouvoirs dans un service de l’Etat, rendu nécessaire par la
configuration de ce service, a été jugé comme une carence d’organisation cause d’un
accident de chantier, de sorte que le directeur départemental de l’Equipement voit sa
responsabilité personnelle engagée (Cass. crim., 20 février 2007, n° 05-87570).

Subdélégation
Le prévenu, tout en se reconnaissant dans l’impossibilité de contrôler les deux mille personnes
placées sous son autorité, n’a cependant mis en œuvre aucune subdélégation formelle ou
effective de manière à assurer l’organisation efficace de la sécurité alors que les structures

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complexes et étoffées de son entreprise lui commandaient de consentir une délégation de
pouvoirs à un ou plusieurs de ses collaborateurs, dans des conditions conformes aux exigences
de la prévention des risques professionnels du personnel, à partir du moment où il n’était plus
en mesure de veiller lui-même au respect des consignes de sécurité (Cass. crim., 28 février 1995,
n° 94-82577).

Délégation exclusive
La délégation de pouvoirs à un préposé pourvu par le chef d’entreprise de la compétence,
de l’autorité et des moyens nécessaires pour veiller efficacement à l’observation des
dispositions légales et réglementaires en vigueur ainsi que la subdélégation éventuelle doivent
être exclusives. La pluralité de délégations pour un même objet équivaut à leur absence, car
il est en effet ainsi impossible de savoir qui était véritablement chargé de ce contrôle, les
deux délégations étant concurrentes. Le chef d’entreprise doit donc être en mesure de
démontrer qu’il s’est déchargé de la responsabilité personnelle qui lui incombe en tant que
chef d’entreprise (Cass. crim., 23 janvier 1997, n° 95-85788).

Validité de la délégation
Le chef d’entreprise ou l’employeur est tenu d’assurer le respect des règles d’hygiène et de
sécurité et ne peut s’exonérer de sa responsabilité, en cas d’infraction, qu’en démontrant qu’il
a délégué ses pouvoirs à un préposé désigné par lui et doté de la compétence, de l’autorité
ainsi que des moyens nécessaires pour veiller efficacement à l’observation des dispositions en
vigueur. La délégation de pouvoirs ne peut valablement être consentie à un coordonnateur
de chantier qui exerce une fonction de conseil non décisionnelle et ne dispose ni de l’autorité
ni des moyens nécessaires (Cass. crim., 8 avril 2008, n° 07-80535).

Planification et coordination des actions


• Travail isolé
Un technicien frigoriste, salarié d'une société de maintenance, est intervenu seul dans la
chambre froide d'un magasin où il a trouvé la mort du fait d’une intoxication par le gaz fréon.
Le chef de l'entreprise extérieure aurait dû prévoir des mesures de sécurité particulières pour
éviter que le salarié se retrouve dans un isolement prolongé, d'où sa condamnation au visa de
l'article R 4512-13 du Code du travail selon lequel lorsque l'opération est réalisée de nuit ou
dans un lieu isolé ou à un moment où l'activité de l'entreprise utilisatrice est interrompue, le
chef de l'entreprise extérieure prend les mesures nécessaires pour qu'aucun salarié ne travaille
isolément en un point où il ne pourrait être secouru à bref délai en cas d'accident (Cass. crim.,
25 novembre 2008, n° 08-81995).
• Manque de coordination
Un électricien du service entretien d'une usine effectuait un branchement électrique au-dessus
d'un réservoir pendant que des ouvriers du service fabrication, en méconnaissance de la
première intervention, nettoyaient ce même réservoir avec de l'eau sous pression à 95°. Un jet
d'eau et de vapeur brûlante jaillissant du réservoir par un trou dont le couvercle de protection
s'était soulevé l'a mortellement blessé. Ce défaut de coordination entre services réalisant des
opérations dangereuses est retenu comme le motif de condamnation du directeur d'usine
pour homicide involontaire (Cass. crim., 13 décembre 1994, n° 94-80456).

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Evaluation des risques professionnels
Le défaut d’évaluation des risques, surtout en situation à risque particulier représentée par la
conduite d’engin, n’est pas une faute simple, elle est une faute caractérisée qui ne saurait
exonérer l’employeur de sa responsabilité.
Défaut d’évaluation des risques
A été retenue la responsabilité du directeur pour avoir contrevenu aux prescriptions des articles
R 231-66 à R.231-68 et R 233-1 du Code du travail (ancien) en ne prenant pas les mesures
d'organisation appropriées ou les moyens adéquats afin d'éviter le recours à la manutention
manuelle de charges par les travailleurs ou, lorsque la manutention manuelle ne peut être
évitée, d'évaluer les risques et d'organiser les postes de travail de façon à éviter et réduire ces
risques et veiller à ce que les travailleurs reçoivent des indications estimatives et des
informations précises sur le poids de la charge et sur la position de son centre de gravité ou de
son côté le plus lourd, et en troisième lieu , étant responsable d'une entreprise extérieure (Cass.
crim., 27 novembre 2001, n° 00-86968).

Sous-évaluation des risques


A été reconnue la responsabilité d’un gérant de société qui, compte tenu de ses fonctions, de
ses compétences, ainsi que du pouvoir et des moyens dont il disposait, n’avait pas accompli
les diligences normales qui lui incombaient. La fausse manœuvre retenue à la charge de son
salarié avait ici été rendue possible par un défaut de surveillance et d'organisation du chantier
à même de lui être imputé et susceptible d'entrer dans les prévisions de l'article 121-3, alinéa
4, du Code pénal (Cass. crim., 11 janv. 2005, n° 04-84196).

Définition des taches, des procédures et des consignes

Défaut de procédure et consignes insuffisantes


Un chauffeur qui circulait à pied sur une aire de chargement a eu deux membres broyés par
la roue d’un enjambeur. Le directeur de l’agence est déclaré coupable de coups et blessures
involontaires pour n’avoir pas pris les mesures de prévention qu’imposait le caractère
particulièrement dangereux des manœuvres des enjambeurs dont les conducteurs ne
peuvent voir ni entendre ce qui se passe au sol. Les consignes édictées afin d’éviter la
circulation des piétons durant ces manœuvres étaient insuffisantes, tandis qu’aucune
procédure ne permettait au conducteur de l’engin de s’assurer que les chauffeurs descendus
de leurs camions avaient quitté l’aire de manœuvre. Enfin, ces consignes insuffisantes étaient
en outre ignorées et fréquemment transgressées en l’absence de contrôle de leur application
effective (Cass. crim., 14 octobre 1997, n° 96-83356)

Absence de procédure sérieuse


Une presse avait reçu un choc affectant son fonctionnement. En principe, il appartenait au
service de maintenance de l’entreprise de procéder à la réparation et seul ce service disposait
du pouvoir de remettre en marche la machine. Or, en l’espèce, ce sont des ouvriers non-
spécialistes de l’entreprise qui avaient réparé superficiellement la presse et décidé de sa
remise en marche, ce qui fut à l’origine d’un accident. Il apparaît qu'il n'existait pas de
procédure sérieuse et efficace de réparation et de remise en service des machines
dangereuses par un personnel qualifié ; qu'il régnait une désorganisation certaine des services
et une gestion approximative de la sécurité ; que ces carences, imputables au chef
d'entreprise, avaient permis les interventions malencontreuses des deux régleurs puis la remise

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en service de la machine sans l'intervention du service de la maintenance (Cass. crim., 31 mars
1998, n° 97-83123).

Absence de plan de prévention


Lors d’un chantier organisé par une société faisant intervenir six entreprises extérieures, un
salarié de l’une d’entre elles a été victime d’une électrocution mortelle ; c’est le chef de
l’établissement de la société utilisatrice qui a été reconnu coupable à la fois d’homicide
involontaire et d’infraction aux règles de sécurité pour les motifs suivants : concernant les
travaux électriques, pour lesquels les précautions doivent être importantes, ont été relevées
des défaillances, imprudences et négligences imputables au prévenu. La société utilisatrice
aurait dû mettre en œuvre la procédure de « consignation de l’installation » hors ou sous
tension ; or la signalisation était confuse ; la mention « cellule désaffectée pour travaux » a pu
faire croire à la victime que l’installation était hors service et qu’elle pouvait y intervenir. De
plus, l’accès aux pièces sous tension aurait dû également être rendu impossible par la pose de
cadenas et de pancartes de condamnation, ce qui n’avait pas été fait. Enfin, dans une telle
situation de co-activité, le plan de prévention obligatoire aurait pu permettre d’estimer les
risques et d’éviter le défaut d’organisation et les consignes défectueuses causes de l’accident
(Cass., crim., 11 mai 1999, n° 98-81073).
La responsabilité pénale de l’entreprise utilisatrice et de l'entreprise extérieure est engagée à
l'occasion de travaux en hauteur lors d'une opération de maintenance électrique réalisée
dans un théâtre municipal pour défaut d'élaboration du plan de prévention prescrit par
l’article R 4512-7, 2° du Code du travail, dans lequel auraient pu être définis les moyens de
nature à éviter la chute de la victime (Cass. crim., 12 mai 1998, n° 97-82188 – Voir
également : Cass. crim., 27 novembre 2001, n° 00-86968 - Cass. crim., 3 avril 2002, n° 01-
83160 - Cass. crim., 30 mai 2007, n° 06-87564).

Inobservation des règles de sécurité


Un employé municipal, se trouvant sur une échelle pour réaliser la pose d'un portique pour la
foire-exposition, a été blessé à la suite d'une chute de six mètres de hauteur. L’ingénieur en
chef responsable du service technique de la ville est reconnu coupable de blessures
involontaires car il était chargé de la coordination et de l'installation de la foire exposition et
disposait, dans ce cadre, de la compétence, du pouvoir et des moyens nécessaires à sa
mission. Or, en méconnaissance des dispositions réglementaires qui s'imposaient pour de tels
travaux en application du décret du 10 juin 1985 relatif à l'hygiène et à la sécurité du travail
dans la fonction publique territoriale, le prévenu n'a prévu ni l'utilisation d'une nacelle, ni
l'installation d'échafaudages ou même d'une plate-forme, dispositifs de protection de nature
à empêcher tout risque de chute, ce qui caractérise la violation manifestement délibérée
d’une obligation particulière de sécurité prévue par la loi ou le règlement (Cass. crim., 3
décembre 2002, n° 01-85109).

Suivi et contrôle des mesures de prévention


Défaut de suivi de l’application des consignes
• Défaut de vérification de l’application effective des consignes.
Alors qu’il exécutait des travaux de peinture sur un transformateur électrique, un ouvrier a été
mortellement blessé par une décharge électrique. Le chef d’établissement est reconnu
coupable de l'infraction consistant à n'avoir pas emprunté la procédure écrite prévue par
l'article 172 du décret du 8 janvier 1965 pour obtenir la coupure du courant électrique dans la

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ligne à haute tension à proximité de laquelle les travaux devaient être effectués. Mais, d’autre
part, c’est aussi le chef de chantier concerné de l’entreprise qui est poursuivi et condamné
car il avait en charge, de par sa fonction, la surveillance des travaux et le contrôle de
l’application effective des mesures de sécurité ; or, en l’espèce, il avait été négligent en ne
s’assurant pas que le courant avait été coupé avant l’exécution des travaux (Cass. crim., 21
juin 1977, n° 76-93682).
Un technicien contrôleur de travaux de la ville de Rennes a été victime d’un accident de
service lors d’une opération de vérification d’un ouvrage dont la maîtrise d’œuvre avait été
confiée à une société : il avait accédé à une trappe du réseau d’assainissement réservé au
matériel ; le déclenchement inopiné du mécanisme de fermeture de la vanne avait coincé
l’agent contre l’échelle utilisée et l’avait grièvement blessé. La responsabilité du Directeur des
services techniques a été retenue étant considéré qu’il avait compétence pour mettre en
œuvre les règles d’hygiène et de sécurité dans ses services et qu’il lui appartenait, au-delà
même des questions spécifiques de formation, de s’assurer personnellement ou de mettre en
œuvre des dispositifs permettant de s’assurer du respect sur les chantiers des règles d’hygiène
et de sécurité (Cass crim., 22 février 1995, n° 94-80810).
Suite à l’accident dont a été victime le conducteur d’une machine qui a eu la main amputée
lors d’une intervention sur une machine restée en mouvement, le dirigeant de l’entreprise
condamné pour délit de blessures involontaires faisait valoir que la victime avait
volontairement ouvert les portes de protection sans nécessité, la protection étant munie d’un
hublot translucide permettant un contrôle visuel. Toutefois, si la consigne écrite prescrivait de
ne procéder au nettoyage des machines qu’à l’arrêt de celles-ci, il appartenait au chef
d’entreprise de veiller à l’application effective des consignes écrites de sécurité (Cass., crim.,
19 novembre 1996, n° 95-85945).
• Instruction non conforme aux consignes
Le chef d'équipe qui a donné instruction à son subordonné de monter sur une toiture
constituée de plaques de fibrociment alors que si ce dernier disposait d'un dispositif de sécurité
individuel, celui-ci était sans utilité faute de points d'ancrage ou de ligne de vie, a manqué à
une élémentaire prudence et aux prescriptions du décret du 8 janvier 1965 en ses articles 156
et 159, ce dernier texte visant particulièrement les travaux sur toiture en aggloméré à base de
ciment, imposant pour ces types de travaux des mesures particulières (Cour d’appel de
Rennes, 30 janvier 2003, n° 02/00893).

Défaut de surveillance
• Défaut de port d’un équipement de protection individuelle
Le prévenu est poursuivi pour avoir causé la mort d'un ouvrier de la société dont il était alors le
gérant, par manquement aux obligations découlant des articles R 233-43 et R 233-44 du Code
du travail (ancien) relatifs à l'information et à la formation des travailleurs utilisant des
équipements de protection individuelle. En effet, le salarié mortellement blessé qui participait
à l'abattage d'arbres, ne portait pas de casque de protection au moment de l'accident, ce
dont il se déduit que le chef d'entreprise n'avait pas donné de consignes précises de sécurité
à ses ouvriers ni assuré leur formation quant au port des dispositifs de protection (Cass. crim.,
27 février 1996, n° 95-82369).
• Défaut de surveillance des opérations
Un ouvrier ayant fait une chute mortelle d’une nacelle fixée au crochet d’une grue suite à une
brusque manœuvre, les juges ont retenu d’une part la responsabilité du PDG pour homicide
involontaire par inobservation de la réglementation sur le travail en hauteur et non-délégation
de la responsabilité du chantier à un collaborateur suffisamment averti des problèmes de

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sécurité et possédant la compétence nécessaire. D’autre part, les juges ont également retenu
la responsabilité du chef de chantier et du grutier pour homicide involontaire. Le premier, en
rapport avec sa fonction d’encadrement, pour négligence dans la surveillance du chantier et
pour avoir laissé se dérouler une opération reconnue comme dangereuse. Le deuxième, en
rapport avec sa fonction d’opérateur qualifié, pour imprudence dans la réalisation d’une
opération connue comme dangereuse par tout grutier professionnel et expérimenté (Cass.
crim., 26 janvier 1982).
Un mur de soutènement s’est effondré sur deux ouvriers d’une société de travaux publics alors
qu’ils procédaient à la réfection d’un chemin, pour le compte d’une commune sous la maîtrise
d’œuvre d’une Direction départementale de l’équipement. L’un des ouvriers est décédé et
l’autre a subi une incapacité totale de travail inférieure à trois mois. Le Directeur
départemental de l’équipement et un contrôleur de la DDE ont été condamnés à 1 an de
prison avec sursis et 1500 € d’amende, des chefs d’homicide involontaire et blessures
involontaires. Le contrôleur qui avait fait un relevé de l’inclinaison du mur révélant que ce
dernier avait bougé, n’a pas réagi ; il n’a pas non plus tenu compte des inquiétudes sur la
stabilité de l’ouvrage dont lui avait fait part le propriétaire du mur et n’a pas tiré les
conséquences des observations et informations dont il disposait alors qu’il lui appartenait soit
de faire procéder à un sondage, soit d’arrêter les travaux. Le Directeur départemental de
l’équipement, son supérieur hiérarchique, dont la fonction était de superviser la réalisation du
projet, a commis la même faute. En outre, il s’est abstenu de faire effectuer le contrôle du mur
au motif que les frais auraient été trop importants au regard du coût du chantier (Cass. crim.,
28 mars 2006, n° 05-81208).

Information et formation à la sécurité des agents

Parmi les négligences fautives souvent reprochées à des employeurs figure le fait de ne pas
avoir délivré une formation spécifique et appropriée à la victime de l’accident, ainsi que
l’exigent les articles R. 4141-13 et 14 du Code du travail.
• Fiches de formation insuffisamment précises
Dans le cas d’un ouvrier décédé suite à une intervention manuelle sur une machine en
mouvement, a été retenu le motif selon lequel les fiches de formation sécurité produites étaient
particulièrement générales et ne comportaient ni date, ni signature : d’où l’importance d’être
en mesure d’apporter la preuve qu’une formation à la sécurité concrète et appropriée a bien
été effectivement dispensée (Cass. crim., 8 septembre 1998, n° 97-85559).
• Formation insuffisante
La responsabilité du directeur d’exploitation a été retenue pour homicide involontaire dans le
cas d’un salarié en poste de travail accroupi à la limite de la chaussée sur la bande d’arrêt
d’urgence (B A U) heurté à la tête par le garde-boue arrière droit d’un véhicule poids-lourd,
alors qu’aucune mesure de sécurité, active ou passive, par pré-signalisation ou balisage
ponctuel n’était en place au lieu de l’accident, et que ce directeur d’exploitation ne pouvait
justifier que la victime avait participé à une réunion d’information sur la sécurité ou suivi une
formation particulière, notamment sur les risques spécifiques à une intervention de courte
durée sur des chantiers fixes ou mobiles (Cass. crim., 30 octobre 1995, n° 94-84863).
Le directeur d’une usine chimique a été condamné à la suite de la mort de l’adjoint du chef
de quart et aux blessures de deux opérateurs extérieurs provoquées par une explosion due à
la mauvaise application par les victimes de la procédure d’arrêt d’urgence après une panne
informatique alors que les victimes n’avaient reçu qu’une seule journée de formation au

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système numérique de commande centralisée, formation qui aurait exigé plusieurs semaines
(Cass. crim., 12 février 1996, n° 94-85455).
Un chaudronnier a été blessé par la chute d’une benne de 500 kg alors qu’à l’aide d’un palan
électrique, il tentait de la soulever au moyen d’élingues. La responsabilité du gérant de la
société est retenue dès lors « que l'article R 233-2, al. 1 a) b) c) du Code du travail dispose que
le chef d'établissement doit informer de manière appropriée les travailleurs chargés de la mise
en œuvre ou de la maintenance des équipements de travail, des conditions d'utilisation ou de
maintenance de ces équipements de travail, des instructions les concernant, de la conduite
à tenir face aux situations anormales prévisibles » et que la victime « n'avait pas bénéficié
d'enseignement spécifique sur la méthode de levage pour le cas notamment où comme en
l'espèce aucun crochet ni aucune aspérité n'empêchaient un glissement des élingues sous
l'effet des forces en œuvre » (Cass crim., 17 janvier 2006, n° 05-84056).
Une société est reconnue coupable, en sa qualité de personne morale, d'homicide
involontaire alors que l’un de ses ouvriers, après avoir détecté une fuite d'huile, a pris seul
l'initiative de procéder au démontage de la valve fixée sous le vérin du bras de levage de
l'engin, alors qu'il n'avait aucune compétence pour procéder à des réparations et alors que
les lacunes de la formation dispensée jusqu'alors au personnel de la société sont révélées par
les propositions faites par le CHSCT d'interdiction absolue d'intervenir sur un élément
mécanique, hydraulique ou électrique sans l'accord d'une personne habilitée et de lister les
personnes habilitées (Cass. crim., 16 mars 2010, n° 09-82041).
• Défaut de formation de travailleurs intérimaires
Est coupable du délit de blessures involontaires le chef d’une entreprise utilisatrice qui a omis
de donner une formation pratique et appropriée à un salarié intérimaire, ce dernier ayant été
victime d’un accident du travail en violation des dispositions de l’article L 4142-2 du Code du
travail qui impose au chef de l’entreprise utilisatrice la même obligation de formation à la
sécurité pour les travailleurs temporaires qu’il utilise que pour ses propres salariés, tandis que
tous les travailleurs temporaires affectés à des postes présentant des risques doivent bénéficier
d’une formation renforcée à la sécurité ainsi que d’un accueil et d’une information adaptés
(Cass. crim., 15 janvier 1991, n° 89-86352).
• Défaut de formation à des tâches simples
Le chef d’une entreprise a été condamné pour blessures involontaires pour n’avoir pas assuré
une formation à la sécurité suffisante à la victime blessée lors d’une opération de manutention
de ballots empilés : l’obligation de formation à la sécurité est générale et systématique, son
contenu devant être adapté à chaque situation et à ses risques, même dans le cas où il s’agit
de gestes simples (Cass. crim., 21 septembre 1999, n° 99-81023).
• Défaut de qualification
Le capitaine d’un vaisseau, commandant d’une base aéronavale, a été reconnu coupable
d’homicide involontaire pour avoir fait exécuter des travaux de couverture par ses services
techniques non qualifiés pour ce type d’intervention en hauteur, et non par une entreprise
civile rompue à ces problèmes de sécurité (Cass. crim., 9 décembre 1997, n° 96-85958).

Respect de la réglementation technique


• Conformité des équipements de travail
Un employé a eu le pouce sectionné par le disque d'une tronçonneuse sur laquelle il usinait
une pièce de métal. Pour retenir la culpabilité de l’employeur, la Cour de cassation énonce
que la tronçonneuse mise en service avant 1981, qui entrait dans la catégorie « des machines-
outils à instruments tranchants tournant à grande vitesse », ne comportait pas les dispositifs de
protection exigés par le Code du travail : la partie non travaillante de la meule de découpe

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n'était pas complètement protégée, tandis qu'aucun dispositif n'avait été mis en place pour
empêcher que les ouvriers ne puissent toucher involontairement la partie travaillante, un carter
n'ayant été installé à cet effet qu'après l'accident. La circonstance que le salarié n'ait pas fait
un usage de la machine conforme à sa destination, n'est pas de nature à exonérer le prévenu
de sa responsabilité dès lors que cette faute n'a pas été la cause exclusive du dommage (Cass.
crim., 30 juin 1998, n° 97-84263).
A la suite d’un accident mortel causé par la chute de la flèche d'une grue, la responsabilité
du vendeur et de l’employeur est retenue : le premier pour avoir vendu un équipement de
travail sans avoir respecté la procédure de certification prévue par l'article R 4313-68 du Code
du travail et sans avoir remis le certificat de conformité prévu par l'article R 4313-66 du même
code ; le second pour avoir mis en service l'appareil sans avoir procédé au préalable aux
vérifications réglementaires (Cass. crim., 24 février 1998, n° 97-80902).
Une machine est devenue non-conforme par la pose de poignée sur une trappe permettant
l'accès direct à ladite machine en mouvement. En raison des dysfonctionnements fréquents
de cette machine, les opérateurs, alors que l'accès à la presse était en principe interdit en
dehors de la maintenance, ouvraient la trappe d'accès pour débloquer le moule dans le
temps du cycle de fonctionnement et éviter que la machine ne se mette en défaut. Ont été
reconnus responsables le directeur du site, le chef du service technique, en charge de
l'entretien préventif et curatif des machines, l’animateur de sécurité et la personne en charge
de contrôler la sécurité qui avaient parfaitement connaissance des conditions de
fonctionnement de la machine (Cass, crim., 30 septembre 2003, n° 02-87666).
Le directeur d’un établissement est reconnu coupable du délit d'homicide involontaire pour
avoir mis à la disposition d’un salarié un équipement de travail vétuste, défectueux et mal
entretenu, présentant notamment un défaut d'efficacité et un déséquilibre des freins, ainsi
qu'un défaut de fonctionnement du dispositif d’arrêt du moteur (Cass. crim., 2 mai 2007, n° 05-
86596).
• Prévalence des équipements collectifs
Il est constant, en droit, qu'en application des dispositions des articles R 4323-62, R 4323-58 et R
4323-63 du Code du travail, le principe fondamental en matière de travail en hauteur est la
prévalence des équipements permettant une protection collective sur ceux assurant une
protection individuelle. Ainsi est retenue la culpabilité de l'employeur en ce qu'il a opté pour
l'utilisation d'une échelle avec équipement de protection individuelle comprenant un harnais
et une « ligne de vie » alors qu'une installation collective de type nacelle était possible et que
la tâche à accomplir à douze mètres de hauteur, qui imposait momentanément une
suspension dans le vide, présentait des risques de chute pouvant être mortels (Cass. crim., 31
août 2011, n° 10-88093).

Conseil, animation et expertise en prévention des risques


La jurisprudence relative à l’appréciation de la responsabilité pénale des préventeurs et des
organismes de santé et de sécurité au travail est à présent bien établie :
• leur responsabilité ne peut être établie sur la base du non-respect des règles du Code
du travail qui vise l’employeur ou son préposé qui a reçu délégation de pouvoirs en
matière d’hygiène et de sécurité ;
• elle peut cependant être relevée pour négligence grave à l’origine d’un accident ou
d’une maladie professionnelle : en tant qu’auteurs indirects potentiels du dommage, la
faute qui peut être reprochée aux personnes exerçant une fonction de prévention, doit

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• être une faute caractérisée qui exposait autrui à un risque d’une particulière gravité qu’il
ne pouvait ignorer.

Par le terme générique de préventeurs, on entend notamment les fonctions de conseillers en


prévention, animateurs de sécurité, chefs de service de sécurité ou de prévention des risques
professionnels, techniciens et ingénieurs de sécurité, consultants et experts, bureaux d’étude
et de contrôle, médecins du travail ou médecins de prévention et infirmier(ère)s du travail,
intervenants en prévention des risques professionnels, coordonnateurs de chantiers, conseillers
en transport de matières dangereuses…

Non responsabilité en qualité d’employeur ou de délégataire


La responsabilité d’une personne, en matière d’application de la réglementation du travail,
ne peut être retenue sa fonction de conseiller ne lui conférant aucun pouvoir de
commandement et rendant impossible toute délégation de pouvoir (Cass. crim., 28 novembre
1996, n° 95-83103).
Il en est de même d’un coordonnateur de chantier qui n'avait ni qualité ni compétence ni
moyen ni délégation ne peut se voir reprocher le non-respect de la réglementation du Code
du travail, en l’espèce sur la conformité des appareils élévateurs utilisés (Cass. crim., 8 avril
2008, n° 07-80535).

Responsabilité pour faute directe


Est retenue la responsabilité d’un bureau d’étude extérieur à l’entreprise qui a fourni des
calculs incomplets ayant entraîné l’effondrement d’un talus et la mort de plusieurs ouvriers
(Cass. crim., 3 septembre 1996, n° 95-83211).
Il en est également ainsi d’un coordonnateur de chantier à la suite d’un grave accident
intervenu par suite de l'effondrement de prédalles en béton composant la couverture d'un
poste de transformation électrique ; la réalisation des prédalles en question relevait pleinement
de la co-activité du chantier et entraient bien dans ses missions de coordination consistant à
s'assurer du respect des principes et des règles de prévention particulières aux opérations de
bâtiment et de génie civil (Cass. crim., 16 septembre 2008, n° 06-82.369).
Est également retenue la responsabilité d’un coordonnateur de sécurité à la suite du décès
d'un enfant occasionné par la chute d'un panneau d'affichage, descellé pour pouvoir être
déplacé, en fonction de l'avancement des travaux, par les salariés des diverses entreprises
intervenant pour la réhabilitation d'une salle de sports municipale. En laissant ledit panneau en
appui instable contre un mur dans l'enceinte d'un chantier dont il avait omis d'interdire l'accès
au public, le prévenu a commis une faute caractérisée exposant autrui à un risque d'une
particulière gravité qu'il ne pouvait ignorer. Il lui incombe en effet d'anticiper les situations de
risque pouvant résulter notamment des dispositions prises par les entreprises intervenant sur le
chantier (Cass. crim., 9 juin 2009, n°08-82847).

2.4 Les autres sources


Si le code du travail et le statut constituent les piliers structurants du dispositif de prévention, le
recours à d’autres sources écrites juridiques est souvent nécessaire.
Ainsi l’ensemble de la réglementation relative aux établissements recevant du public (ERP)
relève du code de la construction et de l’habitation et du code de l’urbanisme.
Les normes alimentaires applicables notamment aux restaurants administratifs et cantines
relèvent du droit européen depuis le 1er janvier 2006 (« paquet hygiène »).

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Les normes, documents de nature technique, n’ont en principe pas de caractère obligatoire
mais peuvent le devenir par un texte ou par les décisions de justice.
Il convient, également, de citer les protocoles signés entre le ministère chargé de la Fonction
publique et les organisations syndicales relatives à la qualité de vie au travail et à la prévention
des risques psychosociaux. A ce titre on pourra utilement se référer à la circulaire du 28 mars
2017 relative au plan d’action pluriannuel pour une meilleure prise en compte de la santé et
la sécurité au travail dans la fonction publique (NOR : RDFF1709837C).

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