POURKIER Aline. L'hérésiologie aux premiers siècles du christianisme, nouveau genre littéraire. In: Troïka. Parcours antiques.
Mélanges offerts à Michel Woronoff, volume 1. Besançon : Institut des Sciences et Techniques de l'Antiquité, 2007. pp. 389-
398. (Collection « ISTA », 1079)
http://www.persee.fr/doc/ista_0000-0000_2007_ant_1079_1_2680
Aline Pourkier
Université de Bourgogne
Ce qu'il faut d'abord souligner, c'est la grande unité de ce genre littéraire qui
s'est constitué à partir de Justin, vers 145, est arrivé au IVème siècle à son akmè avec
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p. 48-54) et que la controverse n'est pas encore entièrement close, je l'appellerai Ps. Hippolyte pour éviter
au lecteur un surcroît de complications. D'après P. Nautin, il se nommerait Josipe. Ce Ps. Hippolyte
auteur de l'Elenchos est à distinguer du Ps. Hippolyte mentionné par Raniero CANTALAMESSA dans son
article "Les homélies pascales de Méliton de Sardes et du Pseudo-Hippolyte et les extraits de Théodote",
in Epektasis, Mélanges patristiques offerts au Cardinal Jean Daniélou publiés par Jacques Fontaine et
Charles Kannengiesser, Paris, 1972, p. 263-271.
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2 Ces chiffres sont arrondis et forcément approximatifs puisqu'ils dépendent des différents éditeurs. Mais ils
donnent une idée de la grande variété existant entre les différents auteurs. Les éditions utilisées sont les
suivantes ; Irénée de Lyon, Contre les hérésies. Livres I, II, III, IV, V, par A. Rousseau et L. Doutreleau,
Sources Chrétiennes 263, 264, 293, 294, 210, 211, 100, 152, 153, Paris, 1965-1982;
Hippolytus Werke ; III. Refutatio omnium haeresium, hrsg. von P. Wendland, GCS 26, Leipzig, 1916 ;
Llippolyte, Contre les hérésies, Fragment, par P. Nautin, Paris, 1949; Pseudo-Tertullien, Adversus
omnes haereses, par A. Kroymann, in Tertulliani Opéra, Pars III, CSEL 47, Vienne, 1906, p. 213-226 ;
réimprimé dans le CCI, 2, Turnhout, 1954, p. 1400-1410; Sancti Filastrii Episcopi Brixiensis,
Diversarum Hereseon Liber, par F. Marx, CSEL 38, Vienne, 1898 ; Epiphanius ; I Ancoratus. Panarion
(haer. 1-33), hrsg. von K. Holl, GCS 25, Leipzig, 1915; Epiphanius; II. Panarion (haer. 34-64),
hrsg. von K. Iioll, GCS 31, Leipzig, 1922 ; 2. bearbeitete Auflage hrsg. von J. Dummer, Berlin, 1980 ;
Epiphanius; III. Panarion (haer. 65-80). De Fide, hrsg. von K. Holl, GCS 37, Leipzig, 1933;
2. bearbeitete Auflage hrsg. von J. Dummer, Berlin, 1985.
savons par Photius3 qu'Hippolyte dans son Syntagma voulait écrire un résumé de
l'œuvre d'Irénée ; de fait, le Syntagma devait être beaucoup plus court que Y Adversus
haereses si l'on en juge par ce qu'il en reste et ce qu'on a pu en reconstituer4. Au
contraire Irénée, l'auteur de YElenchos et, bien plus encore, Epiphane ont voulu faire
des œuvres exhaustives, de grandes dimensions. Epiphane en particulier cherchait à
être le plus complet possible et livrait dans leur totalité les renseignements qu'il avait
pu recueillir. C'est même l'un des traits particuliers de son hérésiologie.
La variété de ces œuvres se manifeste aussi lorsque l'on examine les listes des
sectes et les "Préfaces" des différents hérésiologues. Irénée, en effet, ne mentionne dans
son catalogue aucune hérésie antérieure au Christ. D'autres, comme Justin, le
Ps.Hippolyte ou Hippolyte, font entrer dans leurs listes quelques haireseis juives ou
samaritaines. Epiphane, enfin, qui représente un cas extrême en ce domaine, ne dénom¬
bre pas moins de vingt hérésies préchrétiennes à partir d'Adam, incluant dans cette
liste, entre autres, les sectes philosophiques grecques. Pourquoi cette originalité
d'Epiphane ? C'est qu'en fait son intention est totalisante. Il désire, à travers son
Panarion, rendre compte des déviations de l'humanité entière depuis le premier
homme (sa notion de l'"hérésie", hairesis, est donc très large ; elle représente en fait
toute secte dont la doctrine s'écarte de celle de la grande Eglise du IVèrae siècle). Voici
comment il expose son but dans la deuxième Préface du Panarion : "Notre prétention
se réduit à traiter des différentes doctrines et gnoses, de la foi en Dieu et de l'incroyance
des hérésies et perversions de la pensée humaine qui ont été répandues dans le monde
par des hommes dévoyés depuis que l'homme a été "façonné" sur la terre jusqu'à notre
époque, c'est-à-dire en l'an XI de Valentinien et Valens et l'an VII de Gratien"5. Ce
faisant, Epiphane est amené à couvrir à travers ses premières "hérésies" toute une partie
de l'histoire de l'humanité, celle de ses débuts, depuis Adam jusqu'à l'époque d'Esdras.
Il le fait essentiellement à partir de la Bible et en mettant en relief les progrès des
hommes dans le domaine de la foi et de la religion. Pareille entreprise est propre à
Epiphane. On ne retrouve pas chez les autres hérésiologues d'exposé historique de ce
genre. Du même ordre est la valeur symbolique, dans son ouvrage, du chiffre de
quatre-vingts hérésies, qui là encore est propre à Epiphane et sur lequel il s'explique
dans sa première Préface ; les hérésies, comme les concubines du Cantique des
Cantiques (6, 8-9) sont au nombre de quatre-vingts, "mais", dit-il, '"unique après les
13 El.
14 Cf. X,P. 30-34
Nautin,
(éd.op.Wendland,
cit., 1947,p.p.285-293).
51-53.
23 Pan.
24 Panarion
57, 4,57,114,(ibid.,
1-3 (éd.
p. 349,
Holl,24).
GCS 31, p. 348, 17, 18, 20 (2 fois), 21) ; 57, 4, 5 (GCS 31, p. 349, 2).