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Conduite à tenir thérapeutique manuelle :

Les techniques neuromusculaires


D. Bonneau
Institut Supérieur de Thérapeutique Manuelle - 23, avenue des Lierres - 84000 Avignon
www.medecinemanuelle.fr

La thérapeutique manuelle est une des possi- contre-indication à toute manipulation forcée
bilités de prises en charges des conséquen- avec impulsion.
ces cliniques d’un traumatisme sportif du ra-
chis cervical. En ce qui concerne les techniques tendino-
musculaires, la connaissance du mode de
Elle ne remplace pas l’immobilisation par col- régulation de la contraction musculaire est
lier, les antalgiques, les anti-inflammatoires, l’étape fondamentale.
les décontracturants, la rééducation dans les
traumatismes du rachis cervical, mais elle En effet, les inhibitions réciproque et autogé-
offre un complément sédatif autant que cura- nique sont à la base de ces méthodes. Les
tif trop souvent méconnu dans l’évolution de fuseaux neuromusculaires et les organes
ces pathologies. neurotendineux de Golgi sont les capteurs
privilégiés par ces techniques, sans oublier
Elle trouve donc exceptionnellement sa place les récepteurs de la peau, omniprésents, qui
en phase traumatique aiguë car la présence potentialisent l’action mécanique autant que
de manifestations de contractures musculai- neurovégétative.
res à l’origine des restrictions de mobilité ar-
ticulaires traduisent des lésions ligamentaires Par ailleurs, les manipulations articulaires, qui
qui imposent un temps de cicatrisation in- représentent pour certains l’essentiel de la
compressible. médecine manuelle, agissent essentiellement
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

sur les récepteurs ligamentaires, capteurs de


Passée cette phase aiguë de cicatrisation, fin d’amplitude. Lors de la réalisation des ma-
l’approche des pathologies post-traumatiques nipulations avec impulsion, appelée ancien-
du rachis cervical est comparable à celle pra- nement techniques de haute vélocité et de
tiquée lors de l’abord des atteintes mécani- basse amplitude, la perception d’un bruit
ques micro-traumatiques rachidiennes. audible sous la forme d’un claquement traduit
le phénomène de cavitation.
Mais elle doit tenir compte de la spécificité de
certaines atteintes disco-ligamentaires trau- Cette cavitation traduit la rapidité et la préci-
matiques qui peuvent évoluer de manière dé- sion de la technique et la précision. Mais la
létère et comme toute hypermobilité est une sollicitation du segment intervertébral peut

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aussi être effectuée par des manœuvres vi- tème de pré-flambage, prévient toute défor-
bratoires, de glisser articulaire, de traction- mation aléatoire lors d’un traumatisme axial,
décompression, dont la douceur élargit les et autorise la mise en place d’un contrôle ac-
indications. tif visco-élastique en position ventrale : le
rempart convexitaire.
Ces notions sont primordiales à considérer au
niveau du rachis cervical, zone anatomique En position dorsale, le plan musculaire profond
où les risques d’accidents des manipulations assure le rôle de raidisseur de l’ensemble.
ont des conséquences potentiellement gra-
ves, d’autant que l’étiologie initiale est trau- La disposition en situation centrale de la
matique, souvent complexe. charpente squelettique semi-rigide et d’un
enveloppement musculaire périphérique (dont
Mais avant tout, un rappel de l’anatomie com- la contraction augmente la résistance) répond
préhensive du rachis cervical est nécessaire incomplètement au concept de poutre com-
pour en connaître les particularités dont vont posite, définie par l’association de deux ou
découler les manœuvres thérapeutiques. plusieurs matériaux différents unis solidaire-
ment et qui partagent les efforts en fonction
de leur module d’élasticité (module d’Young)
Les bases d’anatomie et leur moment d’inertie.
compréhensive du rachis
Cette première étape de rigidification accom-
cervical [2, 19]
plie, il est nécessaire de mettre en place les
éléments moteurs capables d’orienter la bou-
Le rachis cervical supporte le dernier maillon
du pendule inversé, siège de l’intégrateur le crânienne et ses capteurs dans les trois
central des données transmises par les cap- plans de l’espace.
teurs vestibulaires, visuels.
Si l’on considère qu’il existe huit solides
Ces informations sont comparées aux signaux (sept vertèbres cervicales et le crâne) à mo-
fournis par les propriocepteurs musculaires biliser, il est indispensable de limiter les de-
sous occipitaux et leur cohérence rend l’équi- grés de liberté intersegmentaires pour ne
libre possible dans sa réalisation mais aussi pas risquer une dislocation du modèle d’où
lors de sa perception (absence de vertige). le découplage des programmes régionaux à
l’étage cervical.
On peut aisément comprendre qu’un trauma-
tisme du rachis cervical tel le coup de fléau Le rachis cervical inférieur dispose d’une
puisse perturber cette situation. orientation zygapophysaire oblique caudale-
ment et latéralement autorisant une rotation
Le choix du modèle mécanique d’une tige po- et une latéroflexion homonyme, gage d’une
lysegmentée, superposition de mobiles empi- stabilité suffisante.
lés et unis par un système hyperstatique
néanmoins trivialement assimilé à un systè- Le programme de la jonction cervico-occipi-
me tripodal lui confère une mobilité impor- tale est donc d’assumer le réglage ultime du
tante au prix d’une instabilité potentielle. positionnement céphalique afin de maintenir
les capteurs endocrâniens en position hori-
Afin de pallier cette faiblesse l’existence zontale, quelle que soit l’orientation du seg-
d’une courbure à concavité postérieure, sys- ment sous-jacent.

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Conduite à tenir thérapeutique manuelle

La réponse biomécanique optimale est le car- Le rachis cervical inférieur


dan qui dissocie les deux axes de travail et
admet l’existence d’activateurs uni-direction- Il possède des disques intervertébraux.
nels mono-segmentaires gage d’une haute L’orientation des surfaces articulaires dont
précision dans leur action. l’axe est oblique en bas et en arrière permet de
comprendre que les mouvements de rotation
s’associent à une latéroflexion homolatérale.
Le modèle articulaire : “Les deux
rachis cervicaux”
L’appareil musculaire
Le rachis cervical supérieur
Le système de mobilisation du rachis cervical
Il est dépourvu de disque intervertébral. repose sur un procédé biomécanique sophis-
tiqué associant :
- d’une part, des muscles mono- ou pauci-ar-
Articulation C0-C1 (occiput-atlas) ticulaires à court bras de levier, situés à
proximité immédiate du segment à mobili-
Double condylaire associée permettant des ser qui ont pour but d’une part d’initialiser et
mouvements principaux de flexion-extension d’orienter le mouvement mais aussi et sur-
(15°) et accessoirement quelques degrés tout de le contrôler en tant que capteur
d’inclinaison latérale et de rotation. Cette ro- visco-élastique adaptatif (groupe transver-
tation a la particularité de s’associer à une saire-épineux).
translation et à une inclinaison controlatérale - d’autre part, des muscles poly-articulaires à
due à la mise en tension du ligament occipito- long bras de levier, qui donnent la force et la
odontoïdien latéral. puissance au mouvement.

Le programme fonctionnel des muscles du


Articulation C1-C2 (atlas-axis) rachis peut être contenu dans un cahier des
charges où dominent trois objectifs.
Il existe trois articulations mécaniquement
liées :
- entre l’odontoïde (cylindre plein) maintenue Stabiliser la colonne vertébrale
par le ligament transverse et l’arc antérieur
de l’atlas (cylindre creux) se trouve consti- La poly-segmentation de cette tige lui confère
tué une trochoïde simple ; une souplesse et une adaptabilité aux forces
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- entre les faces inférieures des masses laté- qui lui sont appliquées. La pré-orientation des
rales de l’atlas et les surfaces articulaires courbures apporte une meilleure résistance à
supérieures de l’axis, la situation bioméca- la compression axiale (loi d’Euler).
nique est plus complexe puisque ces deux
surfaces sont convexes. Ainsi, lors d’une ro- Mais, poly-segmentation et sinuosité de cette
tation vers la droite, la face inférieure gau- poutre entraînent pour corollaire fragilité et
che de la masse latérale de l’atlas avancera instabilité de cet empilement de vertèbres.
et suivra un trajet curviligne à concavité in-
férieure. Le mouvement de rotation autour Afin de pallier cette faiblesse, la mise en place
de l’axe de l’odontoïde est hélicoïdal et son d’une courbure à concavité dorsale oriente
pas est inversé en rotation droite et gauche. toute déformation aléatoire lors d’un trauma-

3 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

tisme axial et autorise la mise en place d’un de l’affection d’un mouvement dans un des
contrôle actif viscoélastique en situation ven- plans de l’espace. Cette conformation permet,
trale, le rempart convexitaire. certes, une inversion du mouvement initial,
mais surtout en contrôle l’amplitude, la vi-
Parmi les autres solutions proposées, ont été tesse et l’harmonie grâce aux mécanismes
retenues le principe de serrage et de frettage neurophysiologiques de réglage tels la boucle
comme en architecture navale afin de stabili- gamma, l’inhibition réciproque…
ser un mât par les étais et les haubans.
Les muscles cervico-céphaliques, en fonction
Le positionnement des muscles au contact de la situation de leurs insertions possèdent
direct des vertèbres et l’orientation de leurs une composante d’action principale dans un
fibres, globalement parallèles à l’axe de la des plans de l’espace, et une ou deux autres
tige, crée une composante d’impaction verti- accessoires dans les autres plans.
cale des différents segments.
La balance antéro-postérieure de flexion-ex-
En outre, lors de leur contraction la présence tension est complétée par la possibilité :
des fascias transforme l’augmentation de vo- - en fonctionnement unilatéral d’engendrer
lume due à la globulisation musculaire en une des mouvements d’inclinaison latérale,
composante de force perpendiculaire à l’axe - et en fonctionnement bilatéral conjugué,
de la colonne, produisant ainsi un effet raidis- des mouvements de rotation.
seur à l’ensemble, limitant les phénomènes
de cisaillement antéro-postérieur et latéral. La rotation est assurée par des couples équi-
librés, c’est-à-dire, que deux composantes de
sens contraire agissent sur les mobiles :
Mobiliser ce squelette axial - couple de rotation de la tête : sterno-cléido-
mastoïdien d’un côté, splénius capitis et
En biomécanique, mobiliser un solide par rap- cervicis de l’autre.
port à un autre nécessite le respect de règles
fondamentales où l’amplitude du déplace- On peut admettre aisément que la vision est un
ment est fonction de la masse des solides, de sens à privilégier en thérapie manuelle neuro-
la situation de l’axe et du plan du mouvement, musculaire, privilège que l’on utilise en cou-
de l’intensité et l’orientation de la force, de plant systématiquement la poursuite visuelle
son point d’application (type de levier) et de aux manœuvres musculaires volontaires.
sa distance par rapport à l’axe.
Mais compte tenu du rôle des scalènes, mus-
La longueur du bras de levier est donc essen- cles cervico-costaux dans l’inspiration acces-
tielle pour évaluer la force et l’amplitude. Le soire, la respiration doit être intégrée, elle
sens du déplacement dépend du positionne- aussi, lors la réalisation de ces techniques.
ment du point de terminaison du muscle par
rapport au centre instantané de rotation.
Coupler à la vision
D’où la disposition périphérique sur le sque-
lette céphalique de ces insertions. Intégrer dans le système oculocéphalogyre, la
rotation de la tête est étroitement lié au sys-
Le muscle est un activateur unidirectionnel tème visuel. L’appareil visuel comporte chez
qui impose la présence d’un antagoniste lors l’homme deux capteurs oculaires décalés

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Conduite à tenir thérapeutique manuelle

transversalement, permettant ainsi la vision On peut aisément comprendre qu’un trauma-


binoculaire et stéréoscopique. tisme tel le coup de fléau cervical puisse per-
turber cette fonction.
Le couplage mécanique et optique des globes
doit être rigoureux pour assurer la concor- Le phénomène visuel est l’élément directeur
dance des axes optiques et la fusion point par de cette mobilité œil-tête, mais la présence
point des images pour la stéréoscopie. Nous de deux vestibules, capteurs d’accélération
avons deux yeux, mais nous voyons, dans les angulaire et linéaire, permet de donner l’anti-
conditions normales, qu’une seule image. cipation nécessaire à la précision du servo-
Les éléments récepteurs (135 000 cones par mécanisme.
m/m²) sont concentrés au niveau de la ma-
cula qui fournit les 8/10e de l’acuité visuelle. En effet, le système nerveux connaissant l’ac-
célération et la vitesse du mobile céphalique,
Le meilleur rendement du système de pour- peut ajuster exactement le couplage œil-tête
suite est donné dans la plage des 30° au- en fonction des paramètres de localisation ou
delà desquels la stéréoscopie n’est plus pos- de déplacement de l’objet à poursuivre. De ce
sible, en raison de la présence du nez et à des fait, le couplage œil-vestibule est réellement
phénomènes de parallaxe. Il existe donc une physiologique.
solution technique qui consiste à déplacer
conjointement l’appareil oculaire et le mobile
dans lequel il se trouve : la tête.
Les techniques articulaires
L’asservissement œil-tête constitue un des
systèmes les plus sophistiqués de l’appareil Les manipulations avec impulsions
moteur et nécessite donc un déplacement en [1, 6, 7, 8, 12, 13, 14, 15, 18, 20, 24]
X et Y de la tête, correspondant au sens de
déplacement des yeux. Ce terme remplace depuis les années 1980
(FIMM) les termes de manipulation avec hau-
Cette mobilité est donnée par la jonction crâ- te vélocité et faible amplitude (HVLA).
nio-rachidienne qui permet une mobilité hori-
zontale dans l’articulation atlas-axis et verti- La manipulation avec impulsion est une mo-
cale dans l’articulation occipital-atlas, bilisation passive d’une articulation périphéri-
réalisant un véritable cardan, ayant deux axes que ou intervertébrale qui se compose d’un
de rotation orthogonaux, matérialisés et une premier temps de mise en tension des struc-
troisième rotation à axe instantané. Ce cardan tures ligamentaires de contention, puis dans
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occipito-cervical permet un ajustement mi- un deuxième temps une impulsion brève, for-
crométrique des deux axes d’exploration vi- cée de très faible amplitude mais réalisée
suelle vertical et horizontal par le jeu des avec une grande vitesse.
muscles occipito-atloïdo-axoïdien.
La perception habituelle d’un claquement tra-
Les trente degrés d’exploration sont donnés duit le phénomène de cavitation, formation
par cette jonction et au-delà intervient le instable d’une bulle de gaz par le passage de
système de rotation du couple sterno-cléi- la phase dissoute à la phase gazeuse et ce à
do-mastoïdien/splénius qui agit sur l’ensem- température constante lors de la baisse bru-
ble du rachis cervical en autorisant une rota- tale de la pression.
tion de 90°.

5 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Robert Maigne a parfaitement codifié les indi-


cations et les modalités de réalisation aux
différents étages rachidiens.

Il a défini la loi de la non-douleur et du mou-


vement contraire.

Yvon Lesage nous a enseigné les principes et


les techniques de manipulation des articula-
tions périphériques.

Ils ont décrit l’étoile de Maigne et Lesage qui


permet de visualiser les amplitudes libres, et
celles qui sont limitées, bloquées et/ou dou- Fig. 1 : Schéma en étoile de Maigne et Lesage
loureuses.

Il est intéressant de comparer le concept de


lésion ostéopathique et cette étoile. Les manipulations sans impulsions
Une lésion ostéopathique se définit par les ou techniques non forcées [10, 21, 22]
amplitudes libres, ainsi pour un ostéopathe le
schéma en étoile sous-jacent (fig. 1) exprime Elle s’applique tant au niveau du rachis que
une lésion en flexion, rotation et latéroflexion des articulations périphériques.
(sidebending) droite soit une FRS droite. En
technique ostéopathique dite directe, l’appli- Pour chaque articulation, on décrit des mou-
cation de la force se fait dans le sens de la vements principaux ou majeurs et des mou-
limitation du mouvement. On peut utiliser des vements accessoires ou mineurs.
manipulations avec ou sans impulsion ainsi
que des techniques neuromusculaires dites Les mouvements principaux sont liés aux ty-
myotensives contre la résistance appelée la pes d’articulations, leurs degrés de liberté et
barrière motrice. leurs axes de travail.

Parmi les techniques ostéopathiques indirec- Ils se définissent dans les trois plans de
tes ou fonctionnelles, la méthode de position- l’espace :
nement de Jones est la plus connue. Le - Rotation médiale et latérale dans le plan
“sens” du traitement s’effectue dans les am- transversal ou horizontal,
plitudes qui sont libres. - Abduction et adduction dans le plan frontal,
- Flexion et extension dans le plan sagittal,
Dans le concept de médecine manuelle défini
par Robert Maigne, l’établissement du sché- Les mouvements accessoires ou mineurs dé-
ma en étoile témoigne d’une limitation dou- coulent des repères tridimensionnels x, y et z.
loureuse de l’extension, de la flexion gauche En effet, autour de ces axes, deux types de
et de la rotation gauche. Ainsi, la manipulation déplacement peuvent se produire, l’un linéai-
s’effectue dans les secteurs libres et non dou- re par une translation (tx, ty , tz), l’autre angu-
loureux soit en flexion, rotation et lateroflexion laire par la rotation (wx, wy, wz).
droite, gage de sécurité et d’efficacité.

-( 6
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Les mobilisations et manipulations sans im- Les techniques


pulsion tirent leur efficacité de leur action sur neuromusculaires [3, 4, 5, 9, 11,
ces mouvements accessoires. 13, 23]
De très nombreuses techniques sont décrites
En ce qui concerne les techniques neuro-
depuis Menell, et nous avons pris le parti de
musculaires, la connaissance du mode de
développer les techniques qui favorisent le
fonctionnement de la contraction musculaire,
glissement articulaire, car dans notre expé-
tant aux niveaux des capteurs spécialisés
rience, elles nous paraissent non seulement
efficaces mais aussi simples à réaliser et, en que des voies et des centres, apporte un cer-
plus, souvent élégantes. tain nombre de réponse aux interrogations
posées par les résultats de techniques prati-
Sur le plan biomécanique, on décrit plusieurs quées (réflexe myotatique, inhibition récipro-
types de déplacement articulaire, soit le rou- que, boucle gamma…).
lement (fig. 2), soit le glissement (fig. 3) en
fonction des forces de frottement des surfa- L’étirement post-isométrique s’applique pré-
ces en contact. férentielle à un muscle douloureux et hypo-
extensible. Cette technique est indispensable
En fonctionnement articulaire physiologique, en regard des muscles du squelette axial.
le glissement articulaire est de règle, résultat
d’un centrage parfait des surfaces articulai- La pression glissée la remplace très souvent,
res, d’une lubrification articulaire optimale, agissant sur la peau, le fascia, l’aponévrose et
d’une mobilisation par des couples musculai- les fibres musculaires.
res équilibrés.

Fig. 2 : Roulement articulaire lorsque les forces de frottement sont élevées :
déplacement en translation du centre de rotation.
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Fig. 3 : Glissement-patinage articulaire lorsque les forces de frottement sont nulles.

7 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Le raccourcissement musculaire est indis- Le muscle possède quatre états :


pensable, d’autant qu’il s’applique essentiel- • Deux physiologiques, qualifiés d’intrinsèques
lement sur un muscle douloureux et normo- car ils sont sous la dépendance du contrôle
extensible, en l’absence de pathologie conscient de la motricité volontaire :
articulaire ou tendineuse associée. - l’état contracté,
- l’état relâché.
Le décordage axial est très utile, agissant • Deux états, dits extrinsèques, imposent la
électivement sur le complexe supra et inter­ mise en jeu d’une force extérieure, celle du
épineux. thérapeute :
- l’état étiré,
- l’état raccourci.
Principes des techniques
Ce sont ces deux derniers états qui sont privi-
neuromusculaires légiés en thérapeutique manuelle, car ils per-
mettent, de manière élective, une réinitialisa-
Elles reposent sur les mécanismes de régula-
tion des capteurs musculaires.
tion de la contraction musculaire.
En effet, lors de l’étirement, la stimulation du
“Le muscle crie la douleur de l’articulation qui
fuseau neuromusculaire est optimale, alors
souffre.” que, durant le raccourcissement maximal, il
est mis totalement au repos.
Il est doté d’un capteur de raideur, le fuseau
neuromusculaire dont l’étirement est le sti- Le fonctionnement de l’innervation réciproque
mulus privilégié. permet de comprendre que la mise en rac-
courcissement d’un muscle a un effet potenti-
À son extrémité se positionne un capteur de alisé par la mise en étirement maximal de
force, l’organe neurotendineux de Golgi, qui l’antagoniste. Le facteur temps est primordial,
analyse les efforts transmis au levier squelet- potentialisant l’effet. La position de raccourcis-
tique sur lequel il se fixe. sement maximal est maintenue 90 secondes.

Le muscle est un activateur unidirectionnel Il existe trois types de techniques neuromus-


qui ne possède pas de marche arrière. Cette culaires :
situation nécessite, pour assurer la réversibi- • Les techniques basées sur l’étirement lon-
lité de l’action, de lui adjoindre un muscle gitudinal tendinocorporéal :
antagoniste. Mais ce dernier ne se contente - étirement post-isométrique,
pas de réaliser cette rétroaction, car il contrô- - pression glissée.
le aussi la bonne marche du mouvement pro- • Les techniques basées sur l’étirement
grammé se réservant à tout moment la possi- transversal tendinocorporéal :
bilité de freiner ce dernier. - décordage interépineux axial,
- décordage musculaire appendiculaire pé-
La régulation de ce système dépend donc de riphérique :
la boucle Gamma et son fonctionnement fon- . métamérique,
damental, le réflexe myotatique, est quoti- . méri-articulaire.
diennement utilisé par tout médecin dans la • La technique basée sur le raccourcissement
recherche des réflexes ostéo-tendineux. longitudinal tendino-corporéal.

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Conduite à tenir thérapeutique manuelle

L’étirement post-isométrique appliquée sur le segment mobile par le théra-


peute. Le vecteur de cette résistance est di-
Appelée aussi myotensif, cette méthode dé- rectement appliqué dans le sens inverse du
rive du contracter-relacher, employé en réé- mouvement provoqué par le muscle que l’on
ducation. Le but est d’étirer et décontracter le veut étirer. Cette contraction est maintenue
muscle spasmé. durant six secondes.

Cette technique s’applique en priorité à une Au terme de cette contraction, après un temps
pathologie musculaire douloureuse associée mort d’une à deux secondes, nécessaire au
à une restriction de mobilité en rapport avec relâchement de l’ensemble des fibres mus-
la contracture musculaire. culaires, le muscle est amené à la position
d’étirement identifiée par la perception d’une
L’application la plus classique est la myalgie résistance appelée barrière motrice. Cet éti-
du syndrome cellulo-teno-myalgique de Mai- rement est maintenu une douzaine de secon-
gne, il trouve naturellement sa place dans le des, sans à-coup.
syndrome myofascial qui se caractérise par
une douleur projetée, le plus souvent dans les Une nouvelle contraction est demandée, sui-
dermatomes correspondant aux racines mo- vie d’un étirement, puis renouvelée jusqu’au
trices du muscle en cause. Cette particularité gain d’amplitude désirée.
la distingue de la douleur strictement unimé-
tamérique témoin d’une dysfonction segmen- Les variantes sont nombreuses et se différen-
taire vertébrale. cient par le nombre de cycles et leur durée.

Le praticien réalise un examen programmé On peut utiliser la respiration en demandant


régional à la recherche d’une limitation d’am- au patient d’inspirer lentement durant la
plitude articulaire d’origine musculaire. Ce contraction isométrique et de souffler durant
qui sous-entend d’éliminer une cause ostéo- la période d’étirement.
cartilagineuse dégénérative, inflammatoire
ou traumatique par l’imagerie et la biologie.
Application aux extenseurs du
Le contexte post-traumatique oriente vers segment thoraco-cervico-céphalique
une cause cicatricielle d’origine capsulo­
ligamentaire. Les muscles concernés sont l’ensemble des
extenseurs, qui possèdent en outre des com-
En pratique, après avoir identifié le muscle ou posantes d’action dans les autres paramètres
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

le plus souvent un groupe de muscles agonis- tels que la rotation ou la latéroflexion en mode
tes, on demande au patient d’effectuer une de fonctionnement unilatéral. Cette technique
contraction isométrique (sans déplacement met donc en jeu les deux côtés du rachis.
des leviers articulaires), dont l’intensité de la
force est faible.
Trapèze
Il est inutile que le patient développe une
force importante, l’objectif est de mettre en Insertion : ligne courbe occipitale supérieure,
jeu la boucle neuromusculaire et non de “fati- septum nuchae, processus épineux et liga-
guer” le muscle. Une résistance manuelle est ment interépineux jusqu’à T12.

9 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Terminaison  : bord supérieur de l’épine de Splénius capitis


la scapula, acromion, bord supérieur de la
clavicule. Insertion  : moitié inférieure du septum nu-
chae, processus épineux de C7 à T3, liga-
Innervation : nerf accessoire (contingent spi- ments interépineux correspondants.
nal de C1 à C5).
Terminaison : moitié latérale de la ligne cour-
Action : bascule de la scapula, extenseur du be occipitale supérieure, face latérale de la
RC lors de la contraction bilatérale, latéro-flé- mastoïde.
chisseur homolatéral et rotateur controlatéral
en contraction unilatérale.
Splénius cervicis

Insertion : processus épineux de T3 à T5.

Terminaison : processus transverses de C1 à


C2 (parfois C3).

Ces deux muscles sont innervés par des ra-


meaux latéraux des branches dorsales des
5 premiers nerfs spinaux.

Fig. 4 : Muscle trapèze

Splénius capitis et cervicis

L’orientation globale des fibres des splénius


dans le sens caudo-crânial est oblique crâ-
nialement et latéralement.
Fig. 5 : Muscles semispinalis capitis à gauche
Ce groupe comprend deux muscles : et splenius capitis et cervicis à droite

-( 10
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Semi-spinalis capitis : appelé par les de le distinguer des fascicules superficiels du


classiques “grand complexus”. transversaire épineux.

Insertion : processus transverse de C3 à T5, Nous décrivons séparément les insertions de


la partie cervicale et de la partie thoracique,
Constitution : on lui décrit 2 parties : bien qu’il n’y ait pas de limite nette :
. Médiale, appelée biventer cervicis
Origine T3 à T5, • Semi-spinalis cervicis :
. Latérale, appelée aussi muscle complexus Insertion : processus transverses de T2 à T6
Origine C3 à T3
Terminaison : processus épineux de C2 à C6.
Terminaison : entre les lignes courbes – Occi-
pitales supérieure et inférieure.
• semi-spinalis thoracis :
Origine : processus transverses de T11 à T7,
Semi-spinalis cervicis et thoracis (m. semi- Terminaison : processus épineux de T4 à C7.
spinalis)

Ce muscle regroupe une dizaine de fais-


ceaux : l’obliquité différente des fibres permet
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Fig. 6 : EPI des extenseurs du rachis cervical :


les différents temps

11 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Sous-occipitaux Grand droit postérieur de la tête

Insertion : moitié latérale de la ligne nucale


inférieure de l’occipital

Terminaison : processus épineux de l’axis


Innervation : branche dorsale du premier nerf
cervical

Action : extenseur et rotateur homolatéral de


la tête

Oblique supérieur de la tête

Insertion  : partie latérale des lignes nucales


supérieure et inférieure

Terminaison : processus transverse de l’atlas


Innervation : branche dorsale du premier nerf
cervical

Action : extenseur et latérofléchisseur homo-


latéral de la tête

Fig. 7 : Muscles sous-occipîtaux


Oblique inférieur de la tête

Insertion : processus transverse de l’atlas

Terminaison : processus épineux de l’axis


Innervation : branche dorsale du premier nerf
Petit droit postérieur de la tête cervical

Insertion : moitié médiale de la ligne nucale Action : rotateur homolatéral de l’atlas et de


inférieure de l’occipital la tête (couplage CO-C1)

Terminaison : tubercule postérieur de l’atlas Les muscles sous occipitaux dits du “triangle
Innervation : branche dorsale du premier nerf de Tillaux” occupent une place primordiale en
cervical thérapeutique manuelle, car ce sont eux qui
assurent le réglage ultime et d’une extrême
Action : extenseur de la tête finesse de tous les déséquilibres de la jonc-
tion crânio-cervicale, qu’ils soient ascendant

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Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Fig. 8 : EPI centré sur les muscles droits postérieurs de la tête : Position de départ à gauche et d’arrivée à droite.

ou descendant. Ce cardan sous-occipital mé- Sterno-cléido-mastoïdien


rite dans son étude articulaire, musculaire et
ligamentaire, une place privilégiée Insertion : mastoïde

Terminaison : clavicule et sternum


Les rotateurs du rachis cervical
supérieur et de la tête Innervation : nerf accessoire (spinal) et plexus
cervical (C1 à C4)
La rotation de la tête est couplée à celle des
yeux, imposant d’associer le regard lors du Action : fléchisseur du RC, latérofléchisseur
travail isométrique pour potentialiser l’action homolatéral et rotateur controlatéral
de la technique.

Les deux muscles de force sont le splénius


capitis homolatéral et le sterno-cleido-mas-
toïdien controlatéral. Le point remarquable est
le positionnement du splénius cervicis qui, se
fixant sur le processus transverse de l’atlas et
de l’axis, entraînent simultanément ces deux
vertèbres pour éviter tout cisaillement.
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

Le muscle qui apporte la finesse et la préci-


sion est l’oblique inférieur de la tête qui en-
traîne la rotation du mobile solidaire atlas-
occiput.

Lors de la réalisation de cette manœuvre, il


est important de s’assurer que la rotation se
fasse au niveau du rachis cervical supérieur
en contrôlant le mouvement pour que le dé-
placement du menton se fasse sur une droite
parallèle à la ligne biacromiale. Fig. 9 : Sterno-cleido-mastoïdien

13 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Fig. 10 : EPI des rotateurs de la tête

Ainsi lors de la réalisation de la technique on


laisse le déplacement se faire, entraînant un
déplacement arciforme du menton qui peut
toucher l’acromion.

Les latérofléchisseurs du cou

La plupart des muscles du rachis cervical


Fig. 11 : Détail sur le déplacement possède une composante principale d’action
horizontal du menton dans un des plans de l’espace, mais du fait de
leurs points d’insertions, de l’orientation des
facettes articulaires, et selon leur contraction
homo ou bilatérale, ils ont une action secon-
Les rotateurs du rachis moyen et daire dans les autres plans.
inférieur
Ainsi le sterno-cléido-mastoïdien associe une
L’orientation des facettes articulaires entraîne rotation et une latéroflexion controlatérale
un couplage homolatéral de la latéroflexion et comme le scalène ventral que nous détaillons
de la rotation. dans notre exemple en image (fig. 13).

-( 14
Conduite à tenir thérapeutique manuelle
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

Fig. 12 : EPI des rotateurs du rachis cervical moyen et inférieur

15 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Fig. 13 : EPI des latérofléchisseurs du cou

Scalène ventral Scalène moyen

Insertion  : tubercule ventral du processus Insertion  : tubercule ventral du processus


transverse de C3 à C6 transverse de C2 à C7

Terminaison : tubercule de la première côte Terminaison : face supérieure de la 1re côte

Innervation : branche ventrale des nerfs spi- Innervation : branche ventrale des nerfs spi-
naux de C3 à C5 naux de C3 à C5

Action : latérofléchisseur homolatéral et rota- Action : latérofléchisseur homolatéral et rota-


teur controlatéral, inspirateur accessoire teur controlatéral, inspirateur accessoire

-( 16
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Scalène dorsal scapula, alors que les fibres issues de C4 ont


une direction oblique pour se terminer le plus
Insertion  : tubercule ventral du processus latéralement sur l’angle de la scapula.
transverse de C3 à C5
Innervation : C3, C4, C5 nerf dorsal de la
Terminaison : face supérieure de la première scapula
et deuxième cote
Action : élévation de la scapula, latérofléchis-
Innervation : branche ventrale des nerfs spi- seur et rotateur homolatéral du RC
naux de C3 à C5

Action : latérofléchisseur homolatéral et rota- Le rempart convexitaire


teur controlatéral, inspirateur accessoire
Spécifique aux courbures lordotiques cervi-
L’élévateur de la scapula est lui aussi impli- cale et lombaire, cette structure se comporte
qué dans latéroflexion homolatérale. Il se dis- comme un ressort à lame amortissant les
tingue des précédents par la rotation homola- contraintes verticales subies par le rachis
térale qu’il induit. cervical.

L’étirement s’effectue dans les suites immé-


Elévateur de la scapula diates de celui des extenseurs du segment
thoraco-cervico-céphalique.
Insertion : processus transverse de C1 à C4
(tubercule dorsal de C3 et C4) Le remodelage de la lordose est fondamental
pour obtenir un résultat optimal.
Terminaison : bord médial de la scapula, entre
son angle supérieur et la racine de l’épine. Une place particulière est dédiée au muscle
Les fibres de ce muscle subissent une torsion, digastrique qui bénéficie de cet étirement et
puisque la fibre issue de C1 a un trajet verti- qui est souvent impliqué dans les traumatis-
cal et superficiel vers le bord médial de la mes par fléau cervical (fig. 16).
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

Fig. 14 : EPI de l’élévateur de la scapula

17 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Fig. 15 : Les muscles du rempart convexitaire

Grand droit antérieur du cou Chef supéro-latéral :

Insertion crâniale  : processus basilaire de Insertion crâniale  : tubercule ventral de


l’occipital l’atlas.

Insertion caudale  : processus transverse de Insertion caudale  : processus transverse de


C3 à C6 C3, C4, C5

Long du cou Petit droit antérieur :

Chef longitudinal : Insertion crâniale  : processus basilaire de


l’occipital
Insertion crâniale : corps vertébral de C2 à C4
Insertion caudale  : processus transverse de
Insertion caudale : corps vertébral de C5 à C4, l’atlas
et processus transverse de C4, C5, C6

Petit droit latéral :


Chef inféro-latéral :
Insertion crâniale  : processus jugulaire de
Insertion crâniale  : processus transverse de l’occipital
C5, C6, C7
Insertion caudale : processus transverse de
Insertion caudale : corps vertébral de T1 à T4 l’atlas

-( 18
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Fig. 16 : EPI du rempart convexitaire avec modelage de la lordose

Pression glissée

Il est parfois utile d’associer en fin de l’étire-


ment post-isométrique une pression glissée
en regard du muscle traité.

Cette manœuvre associe une action superfi-


© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

cielle cutanée, proche du massage réflexe, et


une action profonde sur la contracture mus-
culaire.

La réalisation de cette manœuvre s’effectue


selon le protocole suivant : Après avoir palpé
Fig. 17 : Le digastrique en profondeur le ou les muscles péri-articu-

19 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

laires de l’articulation lésée et mis en éviden- latéralis, centre du système nerveux sympa-
ce une zone contracturée douloureuse (après thique) et de C4 à T1 pour l’innervation
avoir pris soin d’éliminer par échographie, en somatique.
cas de doute une autre atteinte tel un héma-
tome récent), le muscle est mis en position La réalisation de cette technique est précé-
d’étirement et le praticien exerce des pres- dée d’un diagnostic palpatoire, doux et léger,
sions glissées profondes, dans le sens des à la recherche d’une modification de la struc-
fibres, en insistant sur la zone de contracture, ture du tissu sous-cutané traduisant un dys-
jusqu’à l’obtention de l’atténuation objective fonctionnement sous-jacent. On recherche la
de la contracture. L’amélioration subjective vertèbre qui “sort” témoin, au niveau cervical,
par le patient est parfois vécue comme une d’une attitude antalgique en rectitude avec
“douleur qui fait du bien” ! perte de la lordose physiologique. L’efficacité
étant appréciée par la modification de la tex-
ture du conjonctif sous-cutané et, bien en-
tendu, de la perception de la vertèbre “ren-
trée”, due à la restauration de la lordose
physiologique.

La technique demande beaucoup de dextéri-


té, le geste utilise soit l’inter-phalangienne
proximale de l’index soit la pulpe distale des
doigts dans les zones plus “sensibles”.

Dans un premier temps, on repère le proces-


sus épineux et sa face latérale (la droite pour
le praticien droitier) sur laquelle on applique
la base de la deuxième phalange de l’index, la
métacarpo-phalangienne est en extension les
inter-phalangiennes en flexion. Tout en main-
tenant une pression sur la face latérale de
l’épineuse on remonte crânialement jusqu’à
Fig. 18 : Pression glissée de l’élévateur de la scapula
la perception de l’espace interépineux et son
environnement cutanéo-tendino-musculaire.

À ce moment-là, on majore la pression de


droite à gauche, perpendiculairement à l’axe
rachidien, on met en tension trois secondes et
Le décordage on accentue brièvement la pression pour pas-
ser en “pont” dans l’espace en réalisant le mé-
Le décordage interépineux ou axial canisme sec d’une lame de canif qui se replie.

Il s’applique en regard du segment rachidien L’acquisition du doigt “canif” requiert une


impliqué dans le territoire d’innervation du pratique quotidienne, permettant en outre
segment cervical soit de C7 À T7 pour l’inner- l’obtention d’un cal dorsal interphalangien
vation neurovégétative (tractus intermédio- proximal (fig. 4).

-( 20
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

déconseillée dans les radiculites aiguës, on


“décorde” les muscles dépendant de l’étage
métamérique en cause
- Le décordage péri-articulaire :
Dans les pathologies articulaires périphéri-
ques, on décorde certains des tendons des
muscles moteurs de l’articulation atteinte.

Le raccourcissement musculaire
Fig. 19 : Décordage inter-épineux du rachis cervical
Cette technique dérive de la méthode décrite
par L.H.J. Jones : Strain and counterstrain.

La technique originale découle de l’examen


ostéopathique. La mise en évidence de la lé-
Le décordage musculaire ou sion définie par la restriction de la mobilité
appendiculaire périphérique articulaire est complétée par la recherche
palpatoire manuelle d’un point sensible ap-
Comparable au précédent, il consiste à la réa- pelé par l’auteur “tender point”.
lisation d’un étirement transversal, bref et
rapide du tendon musculaire, le plus proche Une fois le point localisé, le thérapeute re-
possible de l’insertion osseuse. cherche la position de confort maximal qui
permet de faire disparaître la douleur du point
ou de l’atténuer de 2/3 son intensité. Cette
position de confort est maintenue durant
90  secondes, sans aucune participation du
patient.

La technique que nous proposons ne s’appli-


que pas à une lésion ostéopathique mais ex-
clusivement à un point douloureux musculaire.

Cette méthode s’utilise préférentiellement en


cas de douleur sans limitation articulaire, si-
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

Fig. 20 : Décordage de l’élévateur de la scapula tuation que l’on rencontre fréquemment en
fin de séance, après avoir réalisé un étirement
post-isométrique.

Le choix du muscle à traiter repose sur l’exa-


Cette technique peur se moduler selon la pa- men clinique et la mise en évidence de points
thologie incriminée : sensibles, du repérage des cordons myalgi-
- Le décordage métamérique : ques, en respectant soigneusement lors de la
Dans les pathologies radiculaires séquellai- réalisation de la technique, la direction des
res, en effet cette méthode est fortement fibres musculaires.

21 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Après repérage du point douloureux muscu- que le temps expiratoire induit un effet para-
laire, tout en maintenant la pression digitale, sympathicomimétique, propriété qu’il est bon
on recherche la position idéale de raccourcis- de favoriser pour obtenir une sédation mus-
sement du muscle en cause. culaire optimale.

Cette position doit apporter une diminution Il semblerait que cette variante, moins chro-
nette de la douleur (au moins des deux tiers). nophage soit moins stable dans le temps.
On conserve la position de sédation durant
90  secondes. Le retour doit être totalement
passif et réalisé avec lenteur et douceur (fig. 3). Raccourcissement du trapèze
Un contrôle immédiat de la sensibilité du Décubitus, rachis cervical en extension
point, qui doit avoir diminué au moins des Prise palmaire des deux coudes
deux tiers de son intensité, permet de juger Appui thoracique de la tête du patient en re-
de l’efficacité de la technique. gard du vertex

Mais cette technique peut être employée


dans le cadre de séquelles douloureuses sié-
Raccourcissement des droits
geant sur un ligament ou un épaississement
capsulaire post-traumatique. postérieurs de la tête

Une variante consiste en la réalisation du rac- Décubitus, prise mentonnière


courcissement maximum sur trois temps res- Appui thoracique du vertex
piratoires  : Le patient inspire lentement du- Impaction et extension focalisée sur le rachis
rant cinq secondes puis expire lentement cervical supérieur et la tête
durant cinq secondes et marque une apnée
expiratoire durant cinq nouvelles secondes.
Raccourcissement de l’oblique
Ce cycle est renouvelé trois fois soit 45 se- supérieur de la tête
condes au total.
Décubitus
Il est bon de rappeler que le temps inspira- Extension du rachis cervical supérieur
toire a un effet sympathomimétique, alors Discrète latéroflexion homolatérale

-( 22
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Raccourcissement de l’oblique
inférieur de la tête

Décubitus
Rotation homolatérale de la tête de l’ordre
de 30°
Réglage fin en jouant sur l’extension

Les muscles du “triangle de Tillaux” occupent


une place primordiale en médecine manuelle,
car ce sont eux qui assurent le réglage ultime
(d’une extrême finesse) de tous les déséquili-
bres qu’ils soient ascendants ou descendants.
Ce cardan sous-occipital mérite dans son
étude articulaire, musculaire et ligamentaire,
une place privilégiée.
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

23 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Fig. 21 : Raccourcissement du digastrique

La surprise des points sous Chaque faisceau est constitué de quatre fas-
occipitaux : Le digastrique ? cicules à l’étage thoracique, et trois aux éta-
ges cervical et lombaire.
Dans de rares cas, la recherche de la position
de non-douleur et de confort maximal s’ob-
tient en flexion du rachis cervical supérieur, A l’étage thoracique
rotation homo ou controlatéral avec une dis-
crète latéroflexion. Cette position rapproche On distingue les quatre éléments de façon
mandibule et os hyoïde évoquant l’implication constante qu’entre T1 et T10.
du digastrique dans cette pathologie.

Court lamellaire
Raccourcissement du multifidus
- Le plus latéral : il franchit un espace inter-
Les points douloureux résiduels du rachis vertébral
cervical moyen et inférieur semblent corres- - Insertion crâniale  : face inférieure de la
pondre aux faisceaux du multifidus expliquant lame
que la sédation de la douleur s’obtient en pro- - Insertion caudale : face dorsale du proces-
voquant une extension rotation et lateroflexion sus transverse
controlatérale.

Rappelons que le muscle transversaire épi- Long lamellaire, il franchit deux espaces in-
neux multifidus est constitué de 23 faisceaux tervertébraux
disposés dans le sens crânio-caudal comme
les tuiles d’un toit. Il s’étend sur toute la hau- - Insertion crâniale  : face inférieure de la
teur de la colonne vertébrale, appliqué contre lame, médialement au précédent
les lames vertébrales.
- Insertion caudale : processus transverse

-( 24
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Court épineux, il franchit trois espaces in-


tervertébraux

- Insertion crâniale : base du processus épi-


neux
- Insertion caudale : processus transverse

Long épineux, il franchit quatre à six espa-


ces intervertébraux

- Insertion crâniale : processus épineux


- Insertion caudale  : sommet du processus
transverse
Fig. 22 : Multifidus thoracique

A l’étage cervical

Il existe une plus grande variabilité dans la


structure des faisceaux :
- Le court lamellaire n’existe pas,
- Le long lamellaire est inconstant au niveau
de C2-C3.

Décubitus

Rachis cervical en extension dont le sommet


est situé en regard du point douloureux
Fig. 24 : Raccourcissement du multifidus cervico-
Rotation controlatérale au point douloureux
thoracique
Réglage fin en latéroflexion controlatérale
Impaction par un appui sternal sur le vertex
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

Fig. 23 : Raccourcissement du multifidus cervical

25 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

Mais selon le muscle ou le faisceau en cause,


il est nécessaire de moduler la position.

Raccourcissement des scalènes

Les trois scalènes n’ont pas la même direc-


tion expliquant que si la latéroflexion est tou-
Raccourcissement des muscles du jours homolatérale, la rotation est différente
rempart convexitaire pour le ventral (controlatérale) que pour le
dorsal (homolatérale).
Il est important de toujours rechercher les
points résiduels ventraux dans la pathologie
mécanique du rachis cervical notamment lors Décubitus
des récidives.
Latéroflexion homolatérale du rachis cervical
Habituellement le point sensible disparaît en avec discrète composante de rotation contro-
flexion et en rotation et en latéroflexion ho- latérale
molatérale. Impaction du vertex

Fig. 25 : Raccourcissement du scalène ventral

-( 26
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Les techniques cutanées La phase thérapeutique consiste en la réali-


complémentaires sation de traits tirés éffectués avec la pulpe
distale du médius et de l’annulaire selon un
protocole précis associant la réalisation de
Le massage réflexe [5] construction de base lombosacrée, complétée
en fonction de la pathologie par les suites.
Nombreuses sont les variantes qui trouvent
leur origine dans les pays germaniques. Là
aussi les notions de métamère et de conver-
gences cutanées viscéro-somatiques sont La manœuvre réflexe sous-
impliquées dans les explications des résultats occipitale : La technique MOM [16, 17]
obtenus.
Elle est une des “princesses” des techniques
Cette technique consiste à la réalisation de utilisées dans l’universalité des thérapies ma-
traits cutanés (traits tirés) effectués avec la nuelles.
pulpe distale des doigts afin d’obtenir une
réaction de rubéfaction voire de dermogra- Considérée par certain comme une harmoni-
phisme sur les territoires cutanés en projec- sation du quatrième ventricule, pour d’autre
tion métamérique avec l’organe ou le seg- comme une normalisation de l’atlas, elle est
ment de membre à traiter. Cela produit un avant tout un des meilleurs moyens de sti-
effet parasympathomimétique muler trois points fondamentaux en méde-
cine chinoise, régulateur du système neuro-
végétatif.

Points que l’on traite aussi en Shiatsu.

Elle consiste à solliciter les capteurs cutanés


et selon l’intensité de l’appui réaliser un mas-
sage sous-occipital.

Mode de réalisation

Positionnement des deux mains symétriques


à la jonction cervico-occipitale :
© Sauramps Médical. La photocopie non autorisée est un délit.

- Index à l’aplomb de la mastoïde


. Poussée vers l’avant pour provoquer une
extension C0-C1
La phase diagnostique recherche là aussi, - Medius sur “la bosse” du semi-spinalis
une modification visible de la peau et du tissu capitis
sous cutané, ainsi qu’une modification de la . Accroche de l’occiput et traction axiale pa-
texture des différents plans, que l’on rattache rallèle au plan de la table
en fonction de la localisation à une pathologie - Annulaires se rejoignent sur la ligne mé-
aidée certes de la cartographie mais surtout diane
enrichie des compléments d’examen clinique . Poussée vers l’arrière pour provoquer une
et complémentaire corrélé à l’interrogatoire. flexion C0-C1

27 )-
Médecine du sport et thérapies manuelles

ment utilisé dans les comptes rendus de ra-


diographie.

Cette méthode est un des moyens de


conserver.

Le sujet inspire sur une période de 5 secon-


des en réalisant une flexion du rachis et ex-
pire sur la même durée en ramenant le rachis
en extension, modelant ce dernier sur une
bouteille enveloppée d’une serviette.

L’auto-rééducation
La méthode du pigeon
Les mêmes causes reproduisant les mêmes
effets, il est logique d’enseigner à nos pa- L’objectif est de maintenir les résultats obte-
tients les moyens de prévenir les perturba- nus au décours de la séance de thérapeutique
tions générées par notre mode de vie. manuelle afin de limiter les récidives.

Le sujet réalise un double menton tout en ins-


Le modelage de la lordose pirant sur 5 secondes puis expire en regar-
dant vers le haut et vers l’arrière en réalisant
Signe précoce de “vieillissement” du rachis, une extension rachidienne maximale.
la perte de la courbure est un terme fréquem- Double menton à l’inspiration.

Fig. 26 : Modelage de la lordose cervicale

-( 28
Conduite à tenir thérapeutique manuelle

Fig. 27 : Double menton suivi d’un mouvement d’extension - Doppelinnstellung danach Streckbewegung

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29 )-

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