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Nédoncelle Maurice. G. Roupnel, La Nouvelle Siloë, 1945. In: Revue des Sciences Religieuses, tome 21, fascicule 3-4, 1947.
pp. 284-286;
https://www.persee.fr/doc/rscir_0035-2217_1947_num_21_3_1844_t1_0284_0000_2
de toutes les voix de l'univers» (p. 174), une intériorité, une monade.
Et l'extériorité sensible n'est que pauvreté d'un être égaré dans les pistes
de surface sans avoir trouvé encore son véritable fonds. Toutefois, cette
vie sensible a un but, qui est de servir à l'extension de nos rapports;
elle ne crée pas la spiritualité, mais elle peut en étendre le champ. Notre
monade est donc, à tous égards, « le lieu particulier d'une synthèse
universelle» (p. 188).
Reprenant sans le dire le terme par lequel Hamelin désignait Dieu,
M. Roupnel aborde le problème de la « conscience universelle », de celle
du moins qui est telle sans restrictions et qui est créatrice de notre
univers par amour. Être qui contient nos êtres, elle n'en est pas la somme.
Il semble ici que la perspective se retourne et que le monde entier soit
une imitation de l'Un suprême, une image de Dieu. Toute indigente
dans l'atome physique, la créature est pourtant déjà vouée au progrès et
elle se charge à ses niveaux supérieurs d'expérience et d'invention dans
l'habitude même, qui est le gage de l'immortalité.
Ce livre étrange, qui commençait par la science, se termine en
effusions poétiques et en prière au Dieu crucifié. Parfois, en le lisant,
nous songeons à Nicolas de Cues ou à G. Bruno. Nous y trouvons un
esprit indépendant, qui se veut chrétien sans avoir pu encore assimiler
tous les dogmes (par exemple celui de l'enfer) . Je ne sais pas si la
Weltanschauung de M. Roupnel satisfera tous les croyants et tous les
philosophes, mais une chose est certaine: elle ne laissera indifférent aucun
de ceux qui savent encore estimer une réflexion personnelle et pure, qui
a su réviser sans cesse ses propres formulations. C'est un effort
extrêmement subtil et émouvant pour traduire la métaphysique de notre monde
dans l'être même des individualités concrètes. J'y aperçois, pour ma part,
une oscillation entre l'un et le multiple et un primat ontologique de
l'habitude qui me déconcertent quelquefois. Mais quelle que soit la réponse
que me donnerait M. Roupnel s'il était encore parmi nous, je ne peux
que rendre hommage à la riche spontanéité de sa pensée et à l'élan de son
âme: toutes choses dont l'atomisme n'a pas toujours donné l'exemple en
philosophie. M. Nédoncelle.