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Gyromètres optiques

par Jean-Claude RADIX


Ingénieur civil des Télécommunications
Professeur indépendant

1. Rappels sur les interférences d’ondes ............................................... R 1 945 - 2


1.1 Ondes planes ............................................................................................... — 2
1.2 Interférences entre deux ondes planes synchrones ................................. — 3
1.3 Interférences entre deux ondes planes de fréquences voisines.............. — 4
1.4 Le phénomène laser .................................................................................... — 5
1.4.1 Absorption, émission spontanée et émission stimulée .................. — 5
1.4.2 Conditions d’existence du phénomène laser ................................... — 5
2. Gyrométrie optique ................................................................................. — 5
2.1 Définition du problème ............................................................................... — 5
2.2 Comparaison des trajets optiques ............................................................. — 6
2.3 Gyrométrie par comparaison de phase ..................................................... — 6
2.3.1 Cas où la propagation a lieu dans un milieu d’indice de réfraction
unité ..................................................................................................... — 6
2.3.2 Cas où la propagation a lieu dans un milieu d’indice de réfraction
n — 7
2.4 Gyrométrie par laser ................................................................................... — 8
3. Gyromètre laser........................................................................................ — 8
3.1 Constitution.................................................................................................. — 8
3.2 La zone aveugle et son antidote, l’activation ............................................ — 10
3.3 Intérêt des gyromètres laser....................................................................... — 10
3.4 Performances ............................................................................................... — 10
3.5 Gyromètre laser triaxe ................................................................................ — 11
3.6 Exemples de capteurs ................................................................................. — 11
3.6.1 Gyromètre laser SAGEM GLS 32 ...................................................... — 11
3.6.2 Gyromètre laser triaxe Sextant Avionique PIXYZ 14....................... — 12
4. Gyromètres à fibres optiques ............................................................... — 12
4.1 Résultats préliminaires (rappels)................................................................ — 12
4.2 Schéma de principe..................................................................................... — 13
4.3 Modulation en boucle ouverte ................................................................... — 13
4.4 Modulation en boucle fermée (exemple) .................................................. — 14
4.5 Performances ............................................................................................... — 15
4.6 Exemples de matériels ................................................................................ — 15
4.6.1 Gyromètre FOG-P1-A1 de SFIM Industries Deutschland Gmbh..... — 15
4.6.2 Gyromètre FOG 70 et FOG 120 de Photonetics................................ — 15
4.6.3 Gyro-compas marine « Octans » de Photonetics............................. — 15
Références bibliographiques ......................................................................... — 16

L ’expérience et la théorie montrent que l’observation de phénomènes opti-


ques permet d’effectuer des mesures de rotations absolues. Cette possi-
bilité, connue depuis 1913, s’est récemment concrétisée par la mise au point
de gyromètres optiques.
Leur principe de fonctionnement fait intervenir d’importants chapitres de phy-
sique théorique : mécanique quantique pour le phénomène laser, relativité
générale pour l’observation de la propagation de rayons lumineux à partir d’un
laboratoire en rotation.

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Il s’ensuit, notamment pour l’ingénieur travaillant sur les techniques inertielles


classiques, une certaine difficulté pour comprendre comment fonctionnent ces
appareils, et cela d’autant plus que leur mode de fonctionnement peut faire
intervenir des notions classiques d’optique ondulatoire (interférences) qui ne lui
sont généralement pas familières.
L’objet de cet article est précisément de lui venir en aide, en rassemblant les
notions de base nécessaires à la compréhension du gyromètre laser et du gyro-
mètre à fibre optique et en effectuant une description sommaire de ces appareils
et de leurs performances.
Nota : le lecteur pourra utilement se reporter à l’article Mécanique quantique dans le traité Sciences fon-
damentales.

1. Rappels sur
les interférences d’ondes y y1 y2

O
1.1 Ondes planes M1 M2 x

∆x
■ Nous appelons onde plane se déplaçant dans la direction x tout
phénomène physique décrit par la fonction :

y (t, x ) = f  t – ---
x Figure 1 – Propagation d’une onde plane
v
avec t temps,
x abscisse du point où le phénomène est observé, L’argument ϕ du sinus est appelé phase instantanée de l’onde.
v vitesse de déplacement de l’onde, ou célérité, ● Supposons x fixé :
dans la direction x ; il s’agit d’une constante.
(t → t + T ) ⇒ y invariant.
À des instants particuliers (t1 , t2), nous avons :
y décrit donc un phénomène périodique dans le temps, de période T

y (t1 , x ) = y1(x ) = f  t 1 – -----
x et de fréquence f = 1/T.
v
● Supposons t fixé :

y (t2 , x ) = y2(x ) = f  t 2 – ---
x
v (x → x + Tv ) ⇒ y invariant.
∆ y décrit donc un phénomène périodique dans l’espace, de
où le signe = signifie « égal à, par définition ».
période λ :
En posant :
∆ v
∆x λ = Tv = ---
t 2 – t1 ∆
= -------- > 0 f
v
λ est la longueur d’onde.
nous obtenons :
● En fonction de la fréquence f, la fonction (1) devient :
x ∆x x x – ∆x
t2 – ---- = t1 + -------- – ---- = t1 – ------------------
v v v v
y = sin 2πf  t – ---- = sin 2π  ft – ----
x x
et, par suite : v λ
Dans ces conditions, nous avons :
x – ∆x
y2 (x ) = f  t 2 – ---- = f  t 1 – ------------------ = y1 (x – ∆x )
x
v v
ϕ = 2πf  t – ----
x
La représentation graphique de y (t, x ), pour diverses valeurs v
fixées de t, se déplace donc dans la direction x à la vitesse v d’où :
(figure 1).
d ϕ ∆
-------- = 2πf = ω (2)
■ Une onde est dite sinusoïdale lorsque f est une fonction sinu-  d t  x = Cte
soïdale, par exemple :
La relation (2) permet de considérer la pulsation ω comme la
y = sin -------  t – ----
2π x
(1)
T v vitesse de variation de ϕ, en un point donné. Elle justifie, de plus, les

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définitions de la pulsation et de la fréquence instantanées d’une


onde de phase ϕ :
y
∂ϕ
ω (t ) ∆
= -------
∂t
v∆t = nλ
ω(t)
f (t ) ∆
= ------------

Enfin, la fréquence et la pulsation de l’onde (1) peuvent être obte- A (0)
A(∆t) x
nues en considérant sa propagation pendant une durée ∆t donnant λ
lieu à f ∆t alternances (figure 2) :

nombre n d′alternances ∆ϕ ⁄ 2π Figure 2 – Propagation d’une onde sinusoïdale pendant Dt secondes


f = ---------------------------------------------------------------------------- = --------------------
∆t ∆t
d’où :
ω = ∆ϕ /∆t

1.2 Interférences entre deux ondes planes α α


synchrones 2 i
2

Nota : le lecteur se reportera à l’article Optique ondulatoire. Interférences. Diffraction. O'


O
Polarisation dans le traité Sciences fondamentales.
La figure 3 explique la formation de zones obscures et de zones H λ/2
x cos α/2
claires lorsque se superposent deux ondes planes lumineuses de 1
même célérité c et de même fréquence f.
Plaçons un écran plan E perpendiculaire à la direction moyenne 2 M
de propagation OO’. En admettant l’addition des amplitudes lumi-
neuses (correspondant à la fonction y du paragraphe 1.1), nous pré- H'
voyons la formation de franges alternativement claires et sombres,
ces franges restant fixes par rapport à E. 1 et 2 définissent les directions de propagation des ondes.
Les perpendiculaires à ces directions de propagation représentent
■ La considération du motif représenté à droite de la figure 3 per- des plans équiphases ; par exemple :
met de calculer la distance appelée interfrange i séparant deux - trait plein correspond à y maximal ;
zones claires (ou deux zones sombres) ; nous avons en effet : - trait pointillé correspond à y minimal

λ⁄4 i α
---------------- = --- tan ---- (3)
α 2 2 Figure 3 – Superposition de deux ondes lumineuses planes,
cos 2 ---- synchrones, dont les directions de propagation forment un angle a
très petit devant 1 radian
Compte tenu de α << 1 rad, cette relation devient :
λ
i ≈ ---- (4)
α
α étant exprimé en radians dans cette dernière relation. d
O O'
Exemple : pour λ = 0,6 µm et α = 1’ on obtient :
i ≈ 2 mm . H A' H''
x

Nous comprenons maintenant la raison du choix de α très petit :


α
il permet, malgré la petitesse de λ, de rendre i assez facilement 2 M
observable. P' A P

■ Considérons (figure 4) deux maximums d’ondes (1) et (2) passant


simultanément au point O, et évaluons les trajets MH et MH’ parcou- H'
rus par ces maximums pour arriver en un point M de l’écran E.
L’examen de la figure 4 nous conduit aux relations donnant la dif- (1) (2) E
férence de trajet optique ∆p entre les deux ondes :

∆ α Figure 4 – Étude des trajets MH et MH’


∆p = MH – MH’ = MH – MH’’ = HH’’ = P’P cos ----
2

α α α Lorsque α << 1 rad, nous obtenons finalement :


= 2 x tan ---- cos ---- = 2 x sin ----
2 2 2

De plus, on a : ∆p = MH – MH’ ≈ x α (5)
α α
MH + MH’ = 2 MA’ = 2 MA cos ---- = 2 d cos ----
2 2 MH + MH’ ≈ 2 d (6)

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■ Considérons deux ondes sinusoïdales dont les valeurs au point O L’application de la formule (8) et le fait de négliger le terme en
sont égales à sin 2π t /T ; elles sont donc de même amplitude et de α ∆f /c permettent de mettre (10) sous la forme :
même fréquence.
∆f d ∆f + f 0 αx 
a = 2 sin 2π  f 0 t – ------------- cos 2π  ------ t – -------------------------------
Compte tenu des trajets MH et MH’, leur addition au point M d
- (11)
conduit à l’amplitude a : c ⁄ f0 2 2c 

a = sin 2π  ----- – ----------- + sin 2π  ----- – -------------


t MH t MH′
(7)
T λ T λ En chaque point M, nous sommes en présence d’un signal de
fréquence f0 , dont l’amplitude est modulée avec la fréquence
L’application de la formule classique :
∆f /2 ; il en résulte une modulation d’intensité (proportionnelle
p+q p–q au carré de l’amplitude) à la fréquence ∆f.
sin p + sin q = 2 sin --------------- cos -------------- (8)
2 2
permet de mettre la relation (7) sous la forme : ■ La considération de l’argument du cosinus de l’expression (11)
conduit aux résultats suivants :
a = 2 sin 2π  ----- – -------------------------------- cos 2π --------------------------------
t MH + MH′ MH – MH′
T 2λ 2λ a) à un instant donné, deux maximums d’intensité sont distants
de n ∆x (n entier) avec :
soit, compte tenu des relations (5) et (6) :
f 0 α ∆x
------------------ = 1
2 sin 2π  ----- – ----
t d xα c
a = T λ  cos π -------
λ
soit















(9)
indépendant indépendant c⁄f λ
de x de t ∆x = ------------0- = ----
α α
nous retrouvons l’expression (4) de l’interfrange i ;
En chaque point M, nous obtenons donc un signal : b) l’amplitude traduite par le cosinus de l’expression (11) repré-
— de fréquence 1/T ; sente un phénomène ondulatoire, se déplaçant suivant l’axe x avec
— d’amplitude 2cos (π x α /λ ) ; aux valeurs ± 1 de ce cosinus la célérité v :
correspondent des maximums d’intensité lumineuse ; cela nous
∆x c ∆f ∆f
permet de retrouver l’interfrange [relation (4)] : v =  ------- = ---- ------ = λ ------ (12)
∆t argument α f 0 α
i ≈ λ /α constant

La différence de fréquences ∆f implique donc un défilement des


franges, sur l’écran, à la vitesse λ ∆f /α.

Exemple : f0 = 5 × 10 14 Hz ; c = 3 × 10 8 m/s ; α = 1’ ; ∆f = 8 Hz
1.3 Interférences entre deux ondes planes conduisent à :
de fréquences voisines λ = 0,6 µm,
i = 2 mm,
■ Considérons maintenant deux ondes sinusoïdales dont les v = 16 mm/s.
valeurs au point O sont :

∆f Ces phénomènes interviennent directement dans le principe de


sin 2π  f 0 + ------- t
 2 fonctionnement du gyromètre laser. Nous verrons en effet (§ 3)
qu’une vitesse de défilement de franges, constituant le signal de
et sortie de l’appareil, y est détectée par un capteur photoélectrique.
∆f
sin 2π  f 0 – ------- t Notons que cette vitesse de défilement est proportionnelle à la
 2 dérivée ψ̇ , par rapport au temps, de la différence ψ des phases des
deux ondes, en un point donné. Cette différence de phases, dont la
Ces ondes admettent la même amplitude « 1 » et une différence
moitié apparaît dans l’argument du cosinus de la relation (11),
de fréquences :
admet en effet pour expression :
∆f << f 0
∆ d ∆f + f 0 αx
Compte tenu des trajets MH et MH’ leur addition au point M ψ = ϕ+ – ϕ– = 2π t ∆f – -------------------------------
- (13)
conduit à l’amplitude a : c
d’où
∆f ∆ ∂ψ
f 0 + ------ ψ̇ = -------- = 2π ∆f
 ∆f  2 ∂t
(14)
a = sin 2π  f 0 + ------- t – ------------------- MH
2 c
Des relations (12) et (14), nous tirons la vitesse de défilement des
franges v :
∆f λ
f 0 – ------ v = ------------ ψ̇
∆f
+ sin 2π  f 0 – ------- t – ------------------ MH′
2 2π α
(10)
 2 c
où λ /2πα est une constante.
∆f Cette relation, explicitant la proportionnalité de v à ψ̇ , traduit le
Les facteurs  f 0 ± ------- /c sont en effet égaux aux inverses des lon-
 2 fait qu’une interférence est essentiellement due à une différence de
gueurs d’onde. phase entre des signaux, en chaque point du champ d’expérience.

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1.4 Le phénomène laser


E1
Nota : le lecteur se reportera aux articles Lasers dans les traités Sciences fondamentales hν hν
et Électronique.
E0
a b c
1.4.1 Absorption, émission spontanée et émission
stimulée a absorption
b émission spontanée
Rappelons trois types d’interaction entre : c émission stimulée, avec conservation de la phase
— un rayonnement de fréquence ν associé à un photon d’énergie
hν (h étant la constante de Planck) ;
— un atome, présentant les niveaux d’énergie E1 et E0 , Figure 5 – Représentation schématique d’une interaction
atome-photon
avec E1 > E0 et E1 – E0 = hν.
La figure 5 résume la situation :
— l’absorption du photon fait passer un électron du niveau E0 au
niveau E1 (figure 5a ) ;
— émission spontanée (figure 5b ) : un électron descend du E2
niveau E1 au niveau E0 , un photon hν est émis ; l’onde associée à ce
Transition non radiative
photon admet une phase quelconque ; autrement dit, si n photons Pompage
sont émis simultanément, leurs phases relatives sont réparties au
hasard entre 0 et 360o ; E1 N1
— émission stimulée (figure 5c ) : un photon, associé à une onde
de phase ϕ, est absorbé ; simultanément, un électron passe du E0 N0
niveau E1 au niveau E0 et deux photons sont émis, présentant la
même phase ϕ que le photon incident.
Figure 6 – Représentation de trois niveaux d’énergie permettant
La nécessité de ce phénomène a été démontrée par Einstein en
l’apparition du phénomène laser
1917 à partir de considérations d’ordre thermodynamique. Il fut
appliqué :
— en 1950, à l’amplification des micro-ondes ;
— en 1960, à l’amplification des ondes lumineuses. — lorsque le nombre N1 d’électrons en E1 est supérieur au nom-
bre N0 d’électrons en E0 , passage d’électrons de E1 en E0 , d’où
Les termes de maser et de laser, correspondant à ces expériences, émission et surtout amplification de lumière, avec conservation de
signifient : la phase.
Microwaves  Un régime permanent peut alors être obtenu, à la fréquence de
 Amplification by Stimulated Emission of Radiation. résonance de la cavité, à condition que les pertes de rayonnement
Light  soient compensées par l’amplification de lumière [6].
L’expérience montre que les rayonnements ainsi générés présen-
1.4.2 Conditions d’existence du phénomène laser tent une fréquence très bien définie ; les raies obtenues sont en effet
plus fines que ne le laisseraient présager les propriétés de réso-
nance de la cavité.
La possibilité du phénomène laser et l’émission éventuelle d’un
rayon laser sont liées aux conditions nécessaires suivantes :
■ Existence d’un milieu (dans le cas du gyromètre laser, c’est un
gaz) possédant au moins trois niveaux d’énergie E0 , E1 , E2 .
E0 et E1 correspondent à des énergies très bien définies ; par
2. Gyrométrie optique
contre, E2 présente une certaine largeur, dans l’échelle des énergies
(figure 6).
2.1 Définition du problème
■ Existence d’un procédé, dit de pompage, impliquant un apport
d’énergie faisant passer un grand nombre d’électrons du niveau E0 Considérons un observateur physicien se trouvant à bord d’un
au niveau E2 . laboratoire (ou d’un véhicule) en mouvement par rapport à l’espace
Dans le cas des gyromètres laser, le pompage est obtenu par voie absolu. Deux procédés s’offrent à lui pour mesurer la rotation ins-
électrique : le gaz est ionisé par des électrodes soumises à une dif- tantanée de ce laboratoire : la mécanique rationnelle et l’optique.
férence de potentiel de l’ordre de 1 000 à 2 000 V.
■ Mécanique rationnelle : par l’existence des forces d’inerties
■ Existence d’un phénomène de résonance correspondant à des (centrifuges, gyroscopiques), cette voie conduit à la réalisation de
ondes lumineuses, dont la fréquence est (E1 – E0)/h. gyromètres mécaniques, décrits par des lois classiques (Galilée,
Dans le cas des gyromètres laser, une cavité résonnante est for- Newton...).
mée par un ensemble de miroirs de haute qualité. ■ Optique : cette voie, par l’influence de la rotation du laboratoire
Ces conditions étant remplies, le phénomène suivant peut (et par suite des instruments utilisés) sur l’interaction instrument-
intervenir : lumière, conduit à la réalisation des gyromètres à fibres optiques et
— passage d’un grand nombre d’électrons, de E0 en E2 , sous à celle des gyromètres laser.
l’influence du pompage ; Les lois physiques permettant de comprendre ces phénomènes
— passage, sans émission de rayonnement, d’un grand nombre sont celles de la relativité générale (Einstein, Langevin...). Cepen-
d’électrons de E2 vers E1 ; la transition est dite non radiative ; dant, leur application [3] et [4] a montré que les perturbations

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optiques imputables au mouvement en question sont, en première


approximation, précisément les mêmes que celles qui peuvent être
déduites de la cinématique non relativiste.
C
D

2.2 Comparaison des trajets optiques Ω


O
Avec Aronowitz ([5] p. 133), admettons la possibilité d’effectuer
nos raisonnements sur des trajets optiques ayant des formes cir- α R
culaires ; cette hypothèse facilite la représentation de ces trajets
(figure 7).
A' A
Considérons-nous comme des physiciens au repos dans l’espace
absolu, observant le mouvement angulaire d’un bloc de quartz dans
lequel un rayon lumineux effectue un tel trajet circulaire. Les trajets optiques sont représentés sur des cercles de rayons
La rotation Ω (à vitesse constante) du bloc a lieu autour du point différents, pour faciliter l’observation
fixe O, dans le plan de la figure 7 ; différents cas sont à envisager.
a) Le bloc est immobile : le rayon lumineux effectue un trajet Figure 7 – Comparaison des trois trajets optiques
fermé ACDA de longueur 2πR, R étant le rayon du cercle décrit.
La durée correspondante est :
2π R Les équations (15), (19) et (20) forment un système linéaire réso-
t = ------------ (15)
c luble en (t, ∆’t, α ), d’où nous tirons :
b) Le bloc est animé d’un mouvement de rotation dans le 2 2
2π R Ω 2π R Ω
même sens que celui du rayon lumineux (figure 7, partie ∆’t = ------------------------------ ≈ --------------------
-
c ( c + RΩ ) c
2
externe). Ce rayon, pour revenir au même point lié au bloc, doit par-
courir une distance supérieure à 2πR ; en effet, au cours du mouve-
ment, le point d’émission A s’est déplacé en A’. Appelons α l’angle RΩ
= t --------- << t
AOA’ dont a tourné le bloc pendant la durée (t + ∆t ) du mouvement ; c
Ω étant la rotation absolue du bloc autour de O, nous obtenons : d’où :
α = Ω (t + ∆ t ) 2π R
(16) α ≈ Ωt = Ω ------------
c
2πR + αR = c (t + ∆t ) (17)
Le défaut de trajet optique, par rapport au cas a, est donc très
Les équations (15), (16) et (17) forment un système linéaire réso- voisin de :
luble en (t, ∆t, α ), d’où nous tirons : 2
2π R Ω 2S
αR = --------------------- = -------- Ω
2 c c
2π R Ω
∆t = -----------------------------
( c – RΩ ) c Nous retrouvons des relations formellement identiques à celles
obtenues en b.
2
2π R Ω
≈ - puisque c >> RΩ
--------------------
2
c
La comparaison des cas b et c montre cependant une diffé-
soit : rence entre les trajets optiques parcourus par les rayons
RΩ lumineux :
∆t = t --------- << t
c 4π R 4S
2
∆p = 2 α R = --------------- Ω = -------- Ω (21)
 nous avons en effet --------- < ---------------------
RΩ 6 c c
 3 × 10 
c 8

d’où :
2π R 2.3 Gyrométrie par comparaison de phase
α ≈ Ωt ------------ Ω (18)
c
Le supplément de trajet optique dû à la rotation α est donc très
voisin de :
2.3.1 Cas où la propagation a lieu
2
dans un milieu d’indice de réfraction unité
2π R 2S
αR = --------------- Ω = -------- Ω
c c La relation (21) met en évidence une méthode de mesure de Ω,
avec S surface limitée par le cercle décrit. par l’intermédiaire de la différence de marche ∆p. Cette idée a été
exploitée successivement par les physiciens Sagnac (en 1913,
c) Le bloc est animé d’un mouvement de rotation dans le sens en laboratoire, avec S petit et Ω grand) [22] et Michelson (en 1925
opposé à celui du rayon lumineux (figure 7, partie interne). Ce avec S grand et Ω égal à la composante verticale de la rotation ter-
rayon, pour revenir au même point lié au bloc, doit parcourir une restre) [27].
distance ADCA’ inférieure à 2πR. La durée de ce mouvement étant
Dans les deux cas, la mesure de ∆p est effectuée par interféro-
(t – ∆’t ), nous avons :
métrie et s’exprime en nombre n de longueurs d’onde :
α = Ω (t – ∆’t ) (19)
∆p ∆p
n = -------- = -------- f (22)
2πR – α’R = c (t – ∆’t ) (20) λ c

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Exemple : choisissons des valeurs numériques correspon- appliquée aux propagations horaire et anti-horaire, conduit aux
dant, par leur ordre de grandeur, à l’expérience de Michelson : équations suivantes :

S = 20 ha = 2 × 10 5 m 2, p+ = 2πR + RΩt + = c+t+

c = 3 × 10 8 m/s, p – = 2πR – RΩt – = c –t –

f =5× 10 14 Hz, Au 1er ordre en RΩ /c+ ou RΩ /c– , nous avons donc :

Ω= 10 o/h ≈ 50 × 10 –6 rad/s ; t+ = ----------------------- = ------------ -------------------- = ------------  1 + ----------


2π R 2π R 1 2π R RΩ
(25)
c + – RΩ c+ RΩ c+ c+
Nous trouvons [relations (21) et (22)] : 1 – ----------
c+
5 –6 et :
4 SΩ
- f ≈4 × 2 × 10 × 50 × 10 1
n = ------------- -------------------------------------------------------------------- × 5 × 10 14 ≈ --- (23)
= ------------  1 – ----------
2 16 4 2π R RΩ
c 9 × 10 t – = ............
c–  c– 
(26)

Nous comprenons maintenant la raison pour laquelle Michelson Par ailleurs, la relation (24), appliquée à la composition des
fut obligé d’utiliser des parcours de très grandes dimensions pour vitesses c /n et RΩ, conduit à :
mettre en évidence la rotation instantanée absolue de la Terre par
voie optique : la sensibilité du procédé, traduite par les relations (21) c
--- + RΩ
c+ = -------------------------- ≈ ---  1 + --------- n – --------- ----
et (22), est très faible. n c RΩ RΩ 1
Il est cependant possible de concevoir de telles mesures de vites- c n c c n
--- RΩ
ses absolues, de l’ordre du degré par heure, en utilisant un circuit de n
1 + -------------- 2
dimension raisonnable (comme dans l’expérience de Sagnac) par- c
couru un très grand nombre de fois : cela constitue le principe de
Nous obtenons ainsi, au premier ordre en RΩ /c, les relations
fonctionnement des gyromètres à fibres optiques (§ 4).
suivantes :
∆c
c+ = --- + RΩ  1 – ------2- ≡ --- + ∆c = --- (1 + n ------- )
c 1 c c
(27)
n n n n c
2.3.2 Cas où la propagation a lieu
∆c
c– = --- + RΩ  1 – ------2- ≡ --- + ∆c = --- (1 – n ------- )
dans un milieu d’indice de réfraction n c 1 c c
(28)
n n n n c
Dans un tel milieu (en particulier dans une fibre optique), la Portons ces expressions dans les relations (25) et (26) ; en tenant
vitesse de propagation de la lumière est égale à c /n ; les résultats compte du fait que ∆c /c est également du premier ordre, nous
obtenus au paragraphe 2.3.1 semblent donc devoir être sérieuse- obtenons :
ment remis en question. Par un raisonnement un peu plus détaillé,
2π R ∆c RΩ
nous allons pressentir qu’il n’en est rien et que la différence des t + = ------------ (1 – n ------- )(1 + --------- n )
c⁄n c c
temps de propagation, dans les sens horaire et anti-horaire, ne soit :
dépend pas de cet indice n.
2π R ∆c RΩ
Considérons-nous comme un physicien lié à un repère inertiel, t + = ------------ n (1 – n ------- + --------- n )
c c c
donc n’étant pas doué de rotation vis-à-vis des directions des astres et de même :
lointains. Nous étudions les phénomènes intervenant dans une
expérience d’interférométrie réalisée sur le plateau tournant ; pour
2π R ∆c RΩ
t – = ------------ n (1 + n ------- – --------- n )
calculer la vitesse de propagation des rayons lumineux RL horaire et c c c
anti-horaire, par rapport à notre laboratoire, nous utilisons : d’où :
∆ 4π R RΩ ∆c
— la vitesse relative vr des RL par rapport au milieu : ∆t = t + – t – = ------------ n (--------- n – n ------- ) (29)
c c c
v r = ± c /n
En tenant compte, d’après les relations (27) et (28), de :
— la vitesse d’entraînement due à la rotation du plateau : 1
∆c = RΩ (1 – ------2- )
n
ve = RΩ
la relation (29) finalement devient :
— la loi relativiste de composition des vitesses : 4π R RΩ n n RΩ
∆t = ------------ n ( --------- n – --- RΩ + --- ---------
-)
c c c c n2
vr + ve
va = ------------------------ (24) soit :
vr ve 2
1 + ------------ - 4π R 4S
c
2
2
- Ω = -------
∆t = -------------- 2
- Ω
c c
Appelons (t+ , t – ) les durées de trajet, sur un tour, et (c+ , c– ) les
vitesses de propagation que nous observons, respectivement pour Nous constatons ainsi que la différence des durées de par-
les trajets horaire et anti-horaire. cours horaire et anti-horaire ne dépend pas de l’indice de réfrac-
Compte tenu du fait que nous cherchons des phénomènes du pre- tion n.
mier ordre en RΩ /c, nous négligeons les corrections de Lorentz Le déphasage correspondant, dans le cas d’un signal de fré-
accompagnant toute transformation de coordonnées entre les triè- quence f, est :
dres respectivement liés au plateau et à notre laboratoire inertiel ; 8π S
en effet, ces corrections sont du deuxième ordre en (v /c = RΩ /c ).
φ S = 2πf ∆t = -----------
2
- fΩ (30)
c
Dans ces conditions, la relation : Nous retrouvons une relation comparable à (21), indépen-
(trajet) = (vitesse) × (durée) dante de n.

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Ce résultat, concernant les observations d’un physicien lié à un


laboratoire inertiel, est partiel ; pour une étude plus complète, on se où S
---- représente un facteur géométrique.
p
reportera aux références [15], [16], [25], [28].

Évaluons, pour fixer les idées, l’ordre de grandeur de la stabi-


lité nécessaire à la symétrie des trajets optiques, dans le cas de
2.4 Gyrométrie par laser la réalisation d’un gyromètre de classe de précision 10–2 o/h.
Des équivalences 1 impulsion/s = 1’’/s = 1o/h
Le principe de fonctionnement des gyromètres laser est fondé sur et de la relation (32), nous tirons, avec p = 0,3 m et une fré-
l’exploitation de la condition (nécessaire) de résonance de la cavité quence f = 5 · 1014 Hz :
optique utilisée ; cette condition se traduit de la façon suivante, en
appelant p le trajet optique du circuit : 0,3
|∆p | = -----------------------
14
× 10–2 = 0,6 × 10–17 m
c 5 × 10
p = nλ = n --- (31)
f Cet ordre de grandeur est à l’origine de bien des problèmes
où n est un nombre entier constant, au cours d’une expérience. pratiques rencontrés par les fabricants de gyromètres laser.

■ Si, pour une raison quelconque, p varie de ∆p, la constance de n


et de c implique une variation ∆f reliée à ∆p par la relation :
∆p ∆f
-------- = – ------
p f
(32) 3. Gyromètre laser
obtenue par différentiation logarithmique de la relation (31).
Or, nous savons (§ 1.3) qu’une expérience d’interférométrie avec 3.1 Constitution
des ondes lumineuses de fréquences et de directions voisines per-
met de mettre en évidence la différence de fréquences ∆f en L’appareillage comporte une partie optique (figure 8) et une partie
question ; ∆f est en effet égale à la fréquence de variation d’intensité électronique (figure 9).
résultante, en un point donné du champ d’expérience.
■ Trajet optique
Exemple : reprenons des valeurs numériques correspondant Il est de forme triangulaire (figure 8a ) ou carrée. La forme trian-
à celles choisies au paragraphe 2.3.1, en remplaçant toutefois gulaire ne nécessite que trois miroirs, la forme carrée conduit à un
les 20 hectares de Michelson par la valeur S = 100 cm 2. Nous facteur géométrique S /p [§ 2.4, équation (33)] plus favorable.
obtenons, d’après la relation (21) :

∆p 4Ω 1 f
|∆f | = f ----------- = f --------- π R2 ------------- = --- 2 ΩR ≈ 9 Hz
p c 2 πR c
Ainsi, pour des dimensions raisonnables, nous obtenons une MC
sensibilité de l’ordre du hertz par degré et par heure.

■ Une manière équivalente de présenter ce résultat consiste à noter


l’équivalence entre les deux relations : Tube capillaire

fréquence ∆f ↔ vitesse de rotation Ω Cathode Bloc rigide


et
E
nombre d’alternances obtenues pendant la durée M3

E
t+τ
τ ↔ l’intégrale Ωdt . MA
t
Prisme
+ + 90° + ε
Anodes Dispositif
Le capteur utilisant ce principe peut donc être considéré optoélectronique
comme un gyromètre si l’on effectue une mesure de ∆f, ou
comme un gyromètre intégrateur si l’on effectue un comptage a partie optique d’un gyromètre laser triangulaire
d’alternances.

■ Dans l’exemple précédent, à chaque alternance correspond :

(1 Hz) 3 (1 s) ~ (1o/h) 3 (1 s) 2ε/n

= (1’’/s) 3 (1 s) = 1’’ d’angle


n
(le symbole ~ signifie équivalent à). 90° + ε
Cette sensibilité est traduite par la relation : b détail des trajets lumineux dans le prisme, d’indice de réfraction n
∆p f 4 SΩ 4f S
|∆f | = f ----------- = --- -------------- = ------ ---- Ω (33)
p p c c p Figure 8 – Partie optique d’un gyromètre laser

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Activation Asservissement de longueur


de cavité-ALC

,
Détecteur de
position angulaire

Générateur Amplification
de couple tension

Réseau Oscillateur
correcteur ALC
Alimentation
haute tension
Démodulateur

Alimentation en
courant

Détecteur Sortie +
optoélectronique Préampli- Logique
Trigger
ficateur de sortie
Sortie –
Chaîne de lecture
Figure 9 – Diagramme fonctionnel relatif
à l’électronique d’un gyromètre laser [10]

● Ce trajet est constitué par un tube capillaire (quelques millimè-


tres de diamètre) foré dans un matériau (par exemple le Cervit [9])
d’une grande stabilité dimensionnelle (coefficient de dilatation Réponse du laser Puissance du laser
linéique de l’ordre de 10–7 K–1) et imperméable au mélange gazeux
remplissant le tube capillaire.
s1 s2
● Ce mélange est constitué à partir d’hélium et de néon sous une
pression de 3 à 5 mm Hg (400 à 700 Pa). L’ionisation est produite par
une cathode et deux anodes permettant d’obtenir deux circuits ioni-
ques présentant une grande symétrie ; cette symétrie est renforcée
par une alimentation anodique équilibrée en courant (quelques
milliampères) ; la longueur d’onde obtenue, voisine de 0,6 µm,
correspond au rouge-orangé.
● La réflexion des rayons lumineux est effectuée par des miroirs
multicouches de haute qualité conduisant à des pertes d’énergie ,1 ,opt ,2 ,x
extrêmement faibles. Ces miroirs sont souvent fixés par adhérence
moléculaire, ce qui permet d’éviter les problèmes de dégazage qui
seraient posés par des colles [9]. Figure 10 – Principe de fonctionnement de l’asservissement
L’un de ces miroirs (MC) est concave (rayon de courbure de de la cavité à sa valeur optimale conduisant au maximum
l’ordre de quelques mètres), ce qui permet d’améliorer la focalisa- de puissance
tion dans la cavité formée par les capillaires.
Un autre miroir (MA, miroir asservi) est placé sur un élément
piézo-électrique commandé de manière à conserver le maximum de Enfin, le troisième miroir M3 présente un très faible facteur de
puissance lumineuse, ce qui correspond à un mode propre particu- transmission permettant d’extraire une petite partie de l’énergie
lier et une fréquence moyenne très bien définie. La longueur du lumineuse circulant dans chacun des sens du trajet optique.
trajet optique admet ainsi des variations inférieures au centième de Les rayons correspondants sont traités par un prisme présentant
longueur d’onde. un angle dièdre légèrement supérieur à 90o, ce qui permet d’obtenir
Le principe de cet asservissement consiste à ajouter, sur la (figure 8b ) des directions très voisines pour les faisceaux émer-
commande de l’élément piézo-électrique, un signal sinusoïdal qui gents, correspondant à chacun des sens de propagation ; on se
module la puissance du laser ; cette modulation est ensuite détec- trouve ainsi (§ 1.2 et 1.3) dans de bonnes conditions pour analyser
tée, filtrée et démodulée (figure 9), pour fournir un signal de valeur le défilement des franges correspondant à une vitesse de rotation
moyenne fonction de la position de la commande, vis-à-vis du maxi- absolue Ω suivant un axe E perpendiculaire au plan de la figure 8 ;
mum possible de puissance laser (figure 10) : cet axe (géométrique) est appelé axe d’entrée de l’appareil.
L’observation des franges est effectuée par un dispositif optoélec-
— si , = , 1 < , opt , le signal « puissance obtenue » prend la
tronique capable de compter ces alternances de régions claires ou
valeur s1 , en phase avec la modulation (m ) ; sombres et de déterminer leur sens de déplacement.
— si , = , 2 > , opt , le signal « puissance obtenue » prend la À chacune de ces alternances correspond un quantum angulaire
valeur s2 , en opposition de phase avec (m ). (de l’ordre de quelques secondes d’angle) affecté d’un signe. La
Après démodulation, le signal de sortie s permet ainsi d’asservir somme algébrique de ces quanta constitue le signal de sortie du
, à , opt . gyromètre intégrateur laser.

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■ Difficultés de réalisation du gyromètre laser. Le principe


des gyromètres laser est connu au moins depuis 1960 ; cependant,
la production en série n’est intervenue chez Honeywell, premier pro- m
ducteur mondial, qu’en 1982, après un développement ayant coûté
50 millions de dollars.
Les difficultés de réalisation de cet appareil sont notamment
dues :
— aux propriétés du matériau de base entrant dans la fabrication –ΩL
du circuit optique ; ce matériau, nécessairement très stable, est éga-
lement très dur et très cassant, ce qui implique pour l’usinage l’utili- 0 ΩL Ωx
sation d’outillages spéciaux ;
— à la nécessité de réaliser des miroirs présentant un excellent
pouvoir de réflexion et conservant cette qualité en dépit de l’in-
fluence du rayonnement laser qu’il réfléchit ;
— à la fixation des miroirs sur le bloc rigide du circuit optique, à
cause des risques de contamination du gaz de la cavité par les gaz
dégagés par les colles. Ω est la composante (constante) de rotation instantanée absolue du
bloc optique, suivant l’axe d’entrée de l’appareil ;
m est la mesure de Ω
3.2 La zone aveugle et son antidote,
l’activation Figure 11 – Allure d’une courbe d’étalonnage de gyromètre laser
sans activation
Il est assez fréquent, notamment en électronique, de constater la
synchronisation de deux oscillateurs de fréquences propres très
voisines, sous l’effet d’un couplage.
Ce phénomène existe dans les gyromètres laser et conduit, en 3.3 Intérêt des gyromètres laser
régime permanent, à des courbes d’étalonnages non linéaires du
type représenté sur la figure 11. Cette courbe met en évidence un ■ Par rapport aux gyromètres mécaniques, les gyromètres laser
seuil Ω L au-dessous duquel les ondes + et – sont synchronisées, ce se situent de la manière suivante :
qui implique la fixité des franges et de la somme des quanta obte-
nus. Pour des gyromètres dont la sensibilité espérée est une fraction — meilleure stabilité du facteur d’échelle, en faveur du gyro-
de degré par heure, ce seuil Ω L peut atteindre l’ordre de un degré mètre laser, dans un rapport de l’ordre de 10 à 100 ; cette supériorité
par seconde. est due à la plus grande permanence des propriétés optiques, utili-
sées dans le gyromètre laser, que magnétiques, utilisées dans les
L’origine physique de ce blocage (lock-in ) des oscillations tient à moteurs-couples des gyromètres mécaniques ;
ce qu’une partie de chacun des rayonnements se déplaçant dans un — le gyromètre laser présente une meilleure dynamique (rapport
sens donné est renvoyée dans l’autre sens ; ce renvoi est notam- de la plus grande à la plus petite vitesse angulaire mesurée) due à la
ment dû aux irrégularités de surface des miroirs et aux variations différence des phénomènes physiques pouvant donner lieu à
d’indice de ces miroirs. Ce phénomène est représenté par le terme saturation : comptage de franges dans le gyromètre laser, aiman-
générique de rétrodiffusion (back-scattering ). tation d’un matériau magnétique dans le cas du gyromètre méca-
■ Un artifice, appelé activation permet de pallier les inconvé- nique ;
nients traduits par la courbe de la figure 10 ; ce procédé (figure 9) — les accélérations du boîtier n’ont aucune influence sur le phé-
consiste à faire travailler le gyromètre en permanence ou, à la nomène optique intervenant dans le gyromètre laser ; par contre,
rigueur, pendant la majeure partie du temps, dans la zone linéaire les gyromètres mécaniques présentent une certaine sensibilité aux
de sa courbe d’étalonnage traduisant m (Ω ). accélérations (certains d’entre eux sont d’ailleurs utilisés comme
La méthode la plus simple à concevoir, et qui fut finalement adop- accéléromètres !) ;
tée, consiste à animer le bloc optique d’un mouvement angulaire — très grande fiabilité du gyromètre laser, due à l’absence de
impliquant suffisamment souvent la condition : pièces en mouvement et au plus petit nombre d’éléments entrant
dans la réalisation de l’appareil.
| Ω | >> Ω L
Deux possibilités peuvent être envisagées : ■ En revanche, le gyromètre mécanique présente, à performan-
ces égales, un encombrement plus faible. De plus, dans le domaine
a) Introduction d’une vitesse supplémentaire (par exemple 60 o/s des très hautes sensibilités (10–4 à 10–5 o/h), il n’est actuellement,
[7]), de signe constant. Deux problèmes se posent alors : semble-t-il, pas concurrencé par le gyromètre laser, dont les perfor-
— celui de l’estimation de la rotation ajoutée, indépendamment mances sont limitées à 10–3 o/h.
de la mesure gyrométrique ;
— celui de la stabilité du facteur d‘échelle permettant d’effectuer
une mesure convenable de cette rotation.
3.4 Performances
b) Introduction d’une vitesse oscillante, par exemple d’une fré-
quence de l’ordre de 200 Hz et d’une amplitude de l’ordre d’une cen-
Les erreurs de mesure des gyromètres laser peuvent être repré-
taine de degrés par seconde. Dans ce type de solution, le
sentées par des modèles mathématiques beaucoup plus simples
mouvement angulaire supplémentaire (quelques minutes d’angle)
que ceux intervenant dans l’étude des gyromètres classiques. Cela
et la vitesse angulaire supplémentaire admettent une valeur
résulte essentiellement de l’insensibilité des gyromètres laser aux
moyenne nulle, ce qui évite les problèmes rencontrés en a.
accélérations (§ 3.3).
■ Une version sophistiquée de cette méthode, appelée superacti-
vation consiste à ajouter au signal à mesurer une composante de ■ La description de l’erreur d’un gyromètre laser fait intervenir :
vitesse angulaire aléatoire. On vérifie alors qu’il en résulte un terme a) une erreur de zéro, due à des différences de propriétés physi-
d’erreur de mesure de la vitesse angulaire, décroissant en 1/ t ques pour les ondes circulant en sens inverse dans le mélange
(§ 3.3). gazeux ionisé ; en effet, des déplacements d’ions, d’électrons et

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d’atomes neutres impliquent (par effet Fizeau) une modification de


la vitesse des rayons lumineux vis-à-vis du bloc optique ([5] p. 146) ;
cette perturbation dépend généralement de l’ambiance (tempéra- A
ture, champ magnétique) ;
A4 A3
b) une erreur imputable au blocage, pallié par la superactivation,
croissant en 1/ t au niveau des vitesses mesurées ou en t au A5 F A2
niveau des angles mesurés ;
E
c) une erreur de facteur d’échelle, beaucoup plus faible que dans Piézo- C A6
le cas des gyromètres mécaniques, due à une stabilité imparfaite électrique
des propriétés physiques des éléments de l’appareil. D A1
L’amplitude de ces défauts diminue lorsqu’augmente la taille du Piézo-
gyromètre considéré ; leur ordre de grandeur est fixé par le électrique
tableau 1. B
Cathode Piézo-
électrique

A1 à A6 anodes
Tableau 1 – Erreurs de mesure des gyromètres laser, AàF miroirs
en fonction du périmètre du trajet optique [Doc. SFENA]
Stabilité Figure 12 – Structure d’un gyromètre laser triaxe [12]
Périmètre Facteur Erreur Erreur du
(cm) d’échelle de zéro en t facteur
d’échelle
(valeur
g m (Hz/( o/s)) ( o/h) ( o/h) relative) Les inconnues (B, C, D ) peuvent être déduites des écarts (∆1, ∆2,
∆3) par inversion de la relation précédente :
12 9,2 645 1 à 10 0,1 10–4
21 16 1 130 0,05 à 1 0,02 10–5 B –1 1 1 ∆1
1
33 25,4 1 770 0,005 à 0,05 0,003 3 × 10–6 C = ------------ 1 –1 1 ∆2
2 2
D 1 1 –1 ∆3
45 34,6 2 420
5 × 10–4 5 × 10–4 10–6
58 45 3 150 Nous nous trouvons ainsi ramenés au problème de l’asservis-
sement de la longueur de trois trajets optiques relatifs à trois gyro-
mètres laser « triaxe ».

■ Signalons enfin que les gyromètres laser se caractérisent par une ■ Les avantages de cette structure sont essentiellement :
mise en route rapide (quelques secondes), une très grande fiabilité — une réduction (de 12 à 6) du nombre des miroirs ;
(MTBF — temps moyen de bon fonctionnement — atteignant
100 000 h), une grande résistance aux chocs et aux accélérations. — une réduction (de 3 à 1) du nombre de systèmes d’activation et
du nombre de cathodes ;
— une réduction (de 30 %) de l’encombrement ;
— une meilleure stabilité angulaire parmi les trois voies de
3.5 Gyromètre laser triaxe mesure ;
— une réduction (de 30 %) du coût global.
■ Cette structure (figure 12) utilise une propriété géométrique du
tétraèdre régulier : cette figure est formée par trois carrés dont les
plans sont deux à deux orthogonaux. Il en résulte la possibilité
d’intégrer, dans un même bloc, les trajets optiques de trois gyromè- 3.6 Exemples de capteurs
tres laser dont les axes d’entrée sont deux à deux orthogonaux.
Les six sommets de ce tétraèdre régulier peuvent être considérés
comme les milieux des six faces d’un cube ; les six miroirs utilisés Les valeurs numériques relatives à la précision des capteurs
sont respectivement parallèles à ces faces ; chaque miroir intervient gyroscopiques doivent être considérées comme des ordres de
donc sur deux trajets optiques. Trois d’entre eux (B, C, D, sur la grandeur ; en effet, leurs performances réelles sont fonction des
figure 12) sont commandés par un élément piézo-électrique per- conditions d’utilisation.
mettant le réglage des longueurs des trois trajets optiques.
Les trajets optiques no 1 (CDEF), no 2 (BDAF), no 3 (BCAE) sont
respectivement modifiés par les éléments piézo-électriques (C, D), 3.6.1 Gyromètre laser SAGEM GLS 32
(B, D), (B, C). Appelons (B, C, D ) les déplacements respectivement
imposés aux miroirs (B, C, D). Un raisonnement simple de géomé-
La Sagem intègre dans ses systèmes de guidage et de naviga-
trie élémentaire montre qu’il en résulte, pour les trajets (no 1, no 2,
tion trois types de gyrolaser de classe inertielle, de périmètres 8,
no 3) des variations de longueur (∆1, ∆2, ∆3) vérifiant sensiblement :
16 et 32 cm. Les appareils fournissent directement une informa-
tion d’angle sous forme d’incréments. L’incrément d’angle est
∆1 0 1 1 B fonction de la longueur d’onde optique et du périmètre du gyro-
∆2 = 2 1 0 1 C scope.
∆3 1 1 0 D La figure 13 montre un tel gyromètre laser.

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4. Gyromètres à fibres
optiques

4.1 Résultats préliminaires (rappels)


■ La figure 15 représente un diagramme de Fresnel montrant la
composition des vecteurs AB et BC correspondant à deux signaux
lumineux synchrones présentant un déphasage φ constant.
Le vecteur résultant AC admet une amplitude :
φ φ
AC = 2 AH = 2 AB cos --- ≡ 2a cos ---
2 2
Dans une expérience d’interférométrie, les détecteurs sont sensi-
Figure 13 – Gyromètre laser SAGEM GLS 32 bles à l’intensité du signal lumineux résultant ; cette intensité est
proportionnelle, en chaque point, au carré de l’amplitude de AC. La
sortie du détecteur interférométrique est donc de la forme :
φ C
i = C cos2 --- = ---- (1 + cosφ ) (34)
2 2
Nous sommes en présence d’un signal 2π– périodique en φ
(figure 16).
La figure 17 nous montre un signal V (t ) composé d’une succes-
sion de créneaux positifs et négatifs, de largeur τ ; nous vérifions
immédiatement la relation :
V ( t – τ ) = – V (t )
d’où :
V ( t ) – V ( t – τ ) = 2 V (t ) (35)

H
a
φ/2 φ
A a B

Figure 15 – Composition des deux vecteurs synchrones AB et BC

Figure 14 – Gyromètre laser triaxe Sextant Avionique PIXYZ


i C

3.6.2 Gyromètre laser triaxe Sextant Avionique


PIXYZ 14

La figure 14 montre un tel gyromètre avec les caractéristiques


suivantes :
0 p φ
— périmètre optique : 14 cm ;
— masse : 0,4 kg ; Figure 16 – Réponse d’un détecteur interférométrique
— activation : 700 Hz – 100 o/s ;
— une impulsion représente 3,6” ;
— domaine de mesure : 500 o/s ; V (t )
— dérive aléatoire : 0,1 o/ h ;
— biais global < 3 o/h ;
— défaut de facteur d’échelle 2 × 10–4.
t
τ
Sextant Avionique propose également le gyromètre laser
triaxe PIXYZ 22 présentant des dérives de quelques millièmes
de degré par heure.
Figure 17 – Définition de V (t )

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Source de
lumière
(diode laser)
Coupleur Coupleur
Polarisateur Spires
C1 C2
Modulateur

Détecteur
Retardateur
Figure 18 – Schéma de principe
d’un gyromètre à fibre optique

4.2 Schéma de principe


V (t )
La figure 18 donne une première idée de la constitution d’un
gyromètre à fibre optique. Par rapport au matériel de Sagnac, les a
principales différences sont :
— la source lumineuse (« petite lampe électrique » chez Sagnac)
est constituée par une diode laser ou une diode superluminescente ; t
— l’effet Sagnac est augmenté par addition des déphasages obte- φ
nus sur un grand nombre de spires (1 000 à 10 000) ;
— la stabilité des déphasages est améliorée considérablement Ω≠0
par la polarisation imposée aux ondes horaire et anti-horaire ; φ
— la sensibilité du système de mesure interférométrique (λ /10 M+
chez Sagnac) est considérablement améliorée (jusqu’à λ /108) par c
modulation des signaux (§ 2.3) ;
φS
— le détecteur est une diode photoélectrique.
t i
Une propriété essentielle du montage est la similitude des condi-
tions de propagation des ondes horaire et anti-horaire ; en effet,
toute perturbation (thermique, électrique...) affectant également les M–
deux sens de propagation induit une différence de phase égale à Ω=0 b
zéro.
Ces multiples perfectionnements laissent espérer la possibilité de s (t )
réaliser des capteurs, de dimensions raisonnables, dont la précision
est de l’ordre de quelques centièmes de degrés par heure (§ 3).

d
4.3 Modulation en boucle ouverte Ω ≠0

La figure 16 précise le caractère inconfortable de la réponse natu- rappels relatifs au cas « Ω = 0 »


relle d’un capteur de rotation basé sur l’exploitation directe de l’effet Ω=0
rappels relatifs au cas « Ω ≠ 0 » t
Sagnac ; en effet, cette réponse, quadratique à bas niveau, est alors
non-linéaire et de sensibilité infime.
Figure 19 – Modulation en boucle ouverte
■ Une linéarisation et une augmentation de sensibilité peu-
vent être obtenues de la manière suivante :
— un élément retardateur de phase (figure 18) est placé à l’entrée
du circuit anti-horaire, et donc à la sortie du circuit horaire ; cet élé- L’action du retardateur sur les signaux se traduit donc globale-
ment agit par modification locale de l’indice de réfraction du circuit ment par une différence de phases cumulée égale, d’après la rela-
optique ; tion (35), à :
— un modulateur applique une tension V (t ) au retardateur, pro- k [V (t ) – V (t – τ )] = 2kV (t ) (36)
voquant ainsi un retard de phase additionnel aux ondes (horaire et ■ Le dispositif (modulateur + retardateur) de la figure 18 permet
anti-horaire) traversant ce retardateur. Le signal V (t ) a la forme indi- donc de moduler le signal interférométrique par le signal V (t )
quée sur la figure 17, la durée τ étant égale à la durée de propa- représenté sur la figure 17.
gation des ondes lumineuses dans la bobine de fibre.
La figure 19 montre comment l’utilisation de cette modulation
■ Dans le but d’étudier la somme des signaux lumineux à permet de placer les points de fonctionnement de l’interféromètre
l’instant t, au niveau du coupleur C2, considérons leur entrée dans le sur les parties sensiblement linéaires de sa fonction-réponse i (φ ).
circuit des spires, à l’instant (t – τ ) : ● En l’absence de mouvement angulaire par rapport aux direc-
— le signal anti-horaire passe immédiatement dans le retardateur tions des astres lointains (cas où V = 0), les différences de phases
et subit un déphasage kV (t – τ ), k étant une constante ; il poursuit ± kV (t ) placent les points de fonctionnement en M+ et M– et condui-
son chemin et arrive en C2 à l’instant t ; sent à une intensité lumineuse constante.
— le signal horaire traverse les spires, pour arriver au retardateur ● En présence d’un tel mouvement angulaire, à la vitesse
pratiquement à l’instant t, où il subit un déphasage kV (t ), k étant la constante V , les points de fonctionnement se placent de part et
constante précédemment définie. d’autre de M+ et de M– ; il en résulte une modulation de l’intensité

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fournie par l’interféromètre ; l’amplitude des créneaux ainsi obtenus


est sensiblement proportionnelle à Ω, tout au moins quand |Ω | est
petit. Ω
La figure 19 explicite le principe de cette modulation.
Effet Sagnac
Mesure
φS
4.4 Modulation en boucle fermée φc
(exemple) Modulateur- ε
retardateur
– Interféromètre

La figure 19 fait pressentir les limitations du montage en boucle


ouverte étudié au paragraphe 2.3 : faible dynamique et défaut de
linéarité. Amplificateur
avec gain élevé
Ces inconvénients sont simplement dus au fait que les points de
fonctionnement du montage, sur la réponse i (φ ) (figure 19c ), ne
doivent pas trop s’écarter des points d’inflexion M+ et M– . Figure 20 – Principe du montage interférométrique en boucle fermée
Un procédé classique permet de lever ce type de difficulté : il
consiste à faire fonctionner le montage « en appareil de zéro », ce
qui conduit à des points de fonctionnement pratiquement confon-
dus avec M+ ou M– .
■ Le principe utilisé est traduit par la figure 20 : un déphasage kV (t )
commandé φc s’oppose au déphasage de Sagnac φ S , de telle sorte dθ dθ
2p
que la mesure interférométrique porte sur la différence :
ε = φ S – φc (37)
Le caractère très petit de ε vient du fait que ce signal est l’erreur
de l’asservissement de φ c à φ S .
■ Le montage « serrodyne » est un exemple d’application de
ce principe. Il exploite opportunément deux circonstances particu- φc
lières :
0
— si l’on ne prend pas de précaution, les déphasages mesurés τ τ 2T t
risquent de n’être définis qu’à 2π radians près ;
— il y a intérêt à « digitaliser » le montage de manière à ce qu’il [ ]
k V (t ) − V (t − τ ) + n ⋅ 2π
fournisse des impulsions (+) ou (–), chacune de ces impulsions
représentant une microrotation de module bien déterminé ; ce
quantum de rotation a pour expression : 0
t

δθ = E
∆t
p (t )dt (38)
φS
Zéro

p (t ) est la composante de rotation instantanée absolue du gyro- 0


mètre, sur son axe d’entrée (orthogonal aux plans définis par les t
spires).
Ces impulsions ont une signification identique à celles fournies L’asservissement de φc à φS provoque l’émission d’impulsions
par les gyromètres laser. représentant chacune une microrotation dθ

■ La figure 21 montre le principe de fonctionnement de ce


montage en boucle fermée, dans le cas où la vitesse angulaire Ω Figure 21 – Exemple de modulation en boucle fermée
est constante. La constance de Ω implique la constance de φ S et par
suite celle de φ c , compte tenu de l’asservissement de φ c à φ S.
Pour obtenir un tel déphasage φ c constant avec l’ensemble modu-
lateur + retardateur, nous devons appliquer au retardateur un signal La cadence de sortie de ces impulsions est, avec la relation (30) :
« en escalier », dont chaque marche a une largeur τ et la hauteur
voulue pour produire le déphasage φ c opposé à φ S . 1 φS 1 8π Sf 4 Sf
F = ---- = ----------- - Ω = ----------
- = ------------ -------------- -Ω (40)
Quand la marche supérieure atteint la valeur 2π, le montage réagit T 2π τ 2π τ c 2 τc
2

de la manière suivante :
Cette cadence mesure donc la vitesse angulaire Ω ; de plus, nous
— émission d’une impulsion ; avons :
— annulation du déphasage φ c . 2
τc Lc
Calculons l’angle δθ correspondant à l’émission d’une telle δθ = ΩT = ------------- = ------------- (41)
impulsion ; appelons T la durée séparant deux émissions (cette 4 Sf 4 Sf
durée est constante, puisque la vitesse mesurée est elle-même L est la longueur de fibre optique correspondant à l’ensemble des
constante). Nous avons : spires ; S est la surface résultant également de l’ensemble des
spires.

T = τ (nombre de marches entre deux impulsions) = τ ------- (39)
φc Dans la mesure où toutes les spires ont même diamètre, le quo-
tient L /S est indépendant du nombre de ces spires, de telle sorte que
φ c est la hauteur d’une marche, égale au déphasage φ S de Sagnac. nous pouvons calculer l’ordre de grandeur de δθ en ne considérant

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qu’une seule spire. Avec une spire de diamètre égal à 10 cm, nous
obtenons (toujours avec f = 5 · 1014 Hz) :
8
π × 0,1 × 3 · 10
δθ = ---------------------------------------------------------------- . 1,2 secondes d’arc
0,01 14
4 × π × ------------ × 5 · 10
4
Appelons d le diamètre d’une spire ; la relation (41) peut être
approximativement traduite par :

π dc c λ
δθ = --------------
- = ------ = ---
πd f
2 fd d
λ : longueur d’onde, dans le vide, du signal lumineux utilisé.

4.5 Performances Figure 22 – Gyromètre à fibre optique de SFIM IDG

La précision des gyromètres à fibre optique est souvent caractéri-


— erreur sur le facteur d’échelle : inférieure à 500 p.p.m. ;
sée par quatre paramètres :
— écart-type du biais : 10 o/h ;
— le domaine de mesure (D ) ; — durée du démarrage : inférieure à 1 s.
— le défaut de facteur d’échelle (ε ), dû aux manques de stabilité ;
— le biais (b ), erreur absolue en vitesse angulaire, dû au manque
de réciprocité entre les trajets optiques horaire et anti-horaire ; 4.6.2 Gyromètres FOG 70 et FOG 120
— l’erreur aléatoire, due au bruit thermique dans le détecteur ; de Photonetics
cette erreur est traduite :
• soit par un écart-type (σ ) d’erreur angulaire, croissant avec la Le tableau 3 donne les caractéristiques de ces deux gyromètres.
racine carrée du temps,
• soit par une densité spectrale de variance d 2 de l’erreur en
vitesse.
Le tableau 2 donne l’ordre de grandeur de ces paramètres, dans Tableau 3 – Caractéristiques des gyromètres
le cas de diverses réalisations [14]. de Photonetics
Caractéristiques FOG 70 FOG 120
Stabilité du biais,
Tableau 2 – Valeurs des paramètres de précision
en fonctionnement 0,02 o/h 0,003 o/h
des gyromètres à fibre optique
Influence de la température
(– 40 oC à 80 oC) sur le biais 0,1 o/h 0,01 o/h
D ε b σ
Constructeur
(o/s) ( o/ h ) ( o/ h ) Erreur aléatoire 0,005 o/ h 0,001 o/ h
Domaine de mesure ± 1 000 o/s ± 1 000 o/s
British
Aerospace 1.000 2 · 10–4 5 0,05
Une impulsion représente 0,1” 0,01”
Hitachi Cable 100 10–2 (max) Stabilité du facteur d’échelle 10–4 0,5 · 10–4
Limited 10 (max)
φ 70 mm φ 120 mm
Japan Aviation Dimensions
Electronic 600 2 · 10–4 (σ ) 3 (max) × 25 mm × 28 mm
Industry Limited
Masse 0,46 kg 0,7 kg
Litton 2 · 10–5 (max) 0,02 (σ ) 0,0035
Mitsubishi 64,5 7,5 · 10–4 (σ ) 0,4 (max)
Photonetics propose également un triaxe « Calipso », avec 3 axes
d’entrée deux à deux orthogonaux, dont la précision correspond au
FOG 70.
4.6 Exemples de matériels
4.6.3 Gyro-compas marine « Octans »
4.6.1 Gyromètre FOG-P1-A1 de SFIM Industries de Photonetics
Deutschland Gmbh
Ses caractéristiques sont les suivantes :
La figure 22 montre, en exemple, un gyromètre à fibre optique de — précision en cap : (0,5o) / (cos (latitude)) (écart-type) ;
SFIM IDG, qui a les caractéristiques suivantes : — précision en roulis et en tangage : 0,3o (écart-type) ;
— encombrement : 118 × 84,4 × 70 mm3 ; — vitesse angulaire maximale appliquée au boîtier : ± 500 o/s ;
— masse : 0,650 kg ; — durée de l’initialisation : 30 min en statique, 60 min à la mer ;
— domaine de mesure : 900 o/s ; — dimensions : 296 × 136 × 136 (mm)3 ;
— une impulsion représente 0,1” ; — masse : 6 kg.

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