N ous avons vu Octave devenir Auguste; il devint die u. La reconnoissance et la flatterie
lui érigerent des statues, des temples, et des aute~, en Espagne. 11 est vrai que. tout 'y pros- péra sous ses auspices; non seulement il étouffa le:S discordes qui troubloient la tranquillité des provinces et des villes, mais il sut encore réprimer la cupidité des gouverneurs par des lois sages qui les forcerent d' etre équitables. La justice et la prévoyance de ce grand homme se démentirent ou se tromperent dans le choix qu'il fit de son successeur. Le gouvernement de Tibere, d'abord favorable a l'Es- pagne, la couvrit de deuil par la suite. Plongé dans 1'abyme de ses plaisirs, . troublé par ses crimes et ses terreurs _. ce tyran ayoit-ºublié_pendant :Qlusieurs années d'envoyer des gouverneurs dans cette province; il n'en fut averti que par le soulevement qu'y exciterent les cruautés du proconsul Serenus et du préteur Pison, et les vexations des préfets. Les opprimés obtirent du sénat 1'eiil du premier; le second, digne ami de 1'empereur, fut absous. En vain l'adulátion tachoit-elle de désarmer Tibere; les éloges luí répugnoient, il. ne vouloit qu~ de l'or. To\lt délateur d'un homme riche obtenoit les récompenses et les dis- tinctions qui jusqu'alors n'avoient été accordées qu'au mérite. Dans ces accusations odieuses la calomnie témoignoit, et la mort servoit de preuves. Tacite 1 raconte celle de Sextus Marius, le plus opulent des Espagnols, qui ayant voulu soustraire ses richesses ala rapacité de 1'em- pereur, l'innocence et la beauté de sa filie a sa luxure, fut accusé d'inceste, et précipté de la roche tarpéienne. Quoique par la condamnation de Marius ses biens appartinssent au peuple, Tibere se les appropria. Ce monstre fut étouffé. Caligula lui succéda : son avarice peu satisfaite des énormes , exactions dont il accabloit l'Espagne, 1~ suggéra l'envie d'aller lui-meme la dévorer; et il étoit en chemin quand il fut obligé de s'arre ter dans les Gaules. On pourroit s'étonner que sous le regne du parricide Néron, fléau du genre humain, l'Espagne ait été gouvernée avec une sévere équité : elle en fut redevable a Galba, et lui témoigna sa reconnoissance en le proclamant empereur. Sa mort violente~ celle de ses deux compétiteurs 2 , ayant ~pplani lechemin du tróne aVespasien, le sort des Espagnols s'améliora_; ils jouirent dans les provinces des memes privileges que les peuples du Latium. Vespasien fut assez ferme pour résister aux clameurs de cette populace militaire dont il falloit sans cesse payer le silence o u les suftrages, qui se croyoit en droit d'óter la couronne parcequ'elle avoit- usurpé celui de la donner. Loin de commettre des crimes pour enrichir. ses soldats, il mit 1'ordre dans les finan ces, la discipline dans les camps. Les trésors qu'il laissa a son fils Titus furent la source de la réputation de bonté et de générosité que ce prince acquit, et qu'il auroit eu de la peine a soutenir. L'affre?-x Domitien corro~pit tout le bien qu'avoient fait son pere et son frere. Il fut bientót puní de sa cruauté. N'ayant point laissé d'héritier,
( 1) Annal., lib. VI, cap. 19; Dion, lib. XLVIII; vie de Tibere. (2) Othon et Vitellius. Voy.Suétone, vie des Césars~ l. VII, c. 9·