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Pourquoi une cinquième édition
d’Interpréter pour traduire de Danica
Seleskovitch et Marianne Lederer ?

Marianne Lederer
Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle (ESIT)

La première publication d’Interpréter pour traduire date de 1984. Les textes qui y
sont réunis jettent les fondements de la Théorie Interprétative de la Traduction,
une théorie cohérente expliquant le processus de l’interprétation et de la traduc-
tion. Les avancées des sciences cognitives ont peu à peu confirmé les constata-
tions pragmatiques des auteurs, ce qui justifie cette cinquième édition par les
Belles Lettres.

Mots clés: théorie interprétative de la traduction, sens, signification,


déverbalisation, équivalence, correspondance

1. Introduction

La première parution d’Interpréter pour traduire date de 1984. Il s’agit d’un recueil
d’articles de Danica Seleskovitch et Marianne Lederer, respectivement parus de
1970 à 1983, qui jettent les fondements de la théorie interprétative de la traduc-
tion et ont été d’abord publiés dans diverses revues. L’ouvrage a ensuite été réédité
plusieurs fois, jusqu’à sa récente et cinquième parution fin 2014 dans la nouvelle
collection Traductologiques, créée par J.-R. Ladmiral et J.-Y. Masson chez l’éditeur
Les Belles Lettres.
Voyons ce qui explique l’actualité de ces textes, justification de leur réédition.

2. La genèse de la théorie

La théorie de la traduction présentée dans ce recueil d’articles s’opposait à l’époque


de leur première parution, aux conceptions purement linguistiques de la traduc-
tion. En 1981, Danica Seleskovitch écrivait :

Forum 14:1 (2016), 64–78.  doi 10.1075/forum.14.1.04led


issn 1598–7647 / e-issn 2451–909x © John Benjamins Publishing Company
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La traduction ne gagnera droit de cité en tant que discipline scientifique que si


elle se recentre sur l’interaction entre les formules linguistiques et des contenus
mnésiques qui leur sont extérieurs et si l’on admet qu’aucune analyse des signes
eux-mêmes ne peut fournir la clé du sens. (2014, 363–4)

D. Seleskovitch et moi, sa première disciple, étions interprètes de conférence, et


toutes deux autodidactes en linguistique ; or ce que nous lisions de Saussure, de
Martinet, de Jakobson ou de Mounin pour nous éclairer sur le phénomène tra-
duction ne correspondait pas à notre expérience professionnelle. La pratique de
l’interprétation nous prouvait que la traduction (écrite comme orale) n’apparte-
nait pas au domaine de la langue mais à celui de la communication. Dès 1976, D.
Seleskovitch s’est attachée à « distinguer la langue de son emploi et à remettre en
question sa primauté sur la parole » (2014, 87) et insiste sur le fait que « le discours
est tout autant une création constante que l’application de significations linguis-
tiques » (88).
Les réflexions reprises dans Interpréter pour traduire découlent donc d’abord
de notre expérience de l’interprétation, puis de nos recherches appuyées sur cer-
tains des acquis de la psychologie génétique et de la neuropsychologie. Nous étions
convaincues que le traducteur devait être placé au centre du processus de la tra-
duction ; nous nous intéressions non pas à la langue, mais à ce que le traducteur,
l’interprète transmettaient à travers elle. Cet intérêt se reflète dans le titre de cer-
tains articles, tels ‘Transcoder ou réexprimer‘, ou encore ‘Interpréter un discours
n’est pas traduire une langue’.
Le principe fondamental sur lequel nous fondions nos recherches est que le
processus de la traduction s’apparente à celui de l’énonciation et de la compréhen-
sion d’une parole en communication unilingue. Le fait que l’interprète réexprime
immédiatement dans une autre langue le vouloir dire des locuteurs permet d’ob-
server en temps réel le processus de compréhension alors que suivre le phénomène
dans une seule et même langue est beaucoup plus difficile, vu l’évanescence de la
chaine sonore. Rappelons à ce propos que le courant interactionniste ou conver-
sationnel qui étudie les échanges verbaux n’a vu le jour aux États-Unis qu’au début
des années 1980, et un peu plus tard encore en France.
Nous avons constaté, d’abord sur notre propre pratique puis sur de nombreux
enregistrements effectués en réunions internationales multilingues, que «  l’opé-
ration traduisante comprend trois temps – compréhension du discours original,
déverbalisation des unités de sens, expression de ces unités dans un nouveau dis-
cours» (Seleskovitch [1976] 2014, 118). En fait, la déverbalisation, disparition de
l’enveloppe linguistique, « marque l’aboutissement de la compréhension en même
temps que l’amorce de la reformulation » (Plassard 2015, 99), cette dernière étant
l’expression dans la langue d’arrivée par l’interprète ou le traducteur du sens

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déverbalisé, tel qu’il aurait été exprimé en communication unilingue. Je reviendrai


un peu plus bas sur la notion de déverbalisation.
Interpréter pour traduire, c’est donc comprendre à travers les mots, puis for-
muler un sens déverbalisé. Nous affirmons dans cet ouvrage, à l’aide de nombreux
exemples authentiques, que le passage de segments d’un discours ou d’un texte à
une pensée non verbale et de celle-ci à un autre discours ou texte est indépendant
des langues ; il s’ensuit que, pour nous, le processus de base est le même, quelles
que soient les paires de langues, quels que soient les genres de textes et quelques
soient les différentes techniques mises en œuvre pour la réexpression. C’est ce
qu’affirme D. Seleskovitch en 1981 à propos de la différence entre la paire de lan-
gues français/allemand (mais qui vaut tout autant pour d’autres langues) :
Vu sous l’angle du processus, il serait absurde d’affirmer que l’allemand ne peut
pas être compris aussi vite que le français parce qu’il a des emboitements syn-
taxiques ou parce qu’il place le verbe ou la négation à la fin de la phrase ; c’est une
question de connaissance de l’allemand et non de syntaxe. Au plan des techniques,
les différences de structure doivent être prises en compte. (…) L’imbrication des
phrases allemandes ne pose aucun problème de compréhension à celui qui sait
l’allemand, les structures emboitées doivent par contre être scindées en français,
sinon l’expression ne serait plus intelligible. (2014, 260–261)

Cette position a choqué et probablement choque encore ceux pour qui la traduc-
tion reste une opération de contact de langues.
Il n’est pas exagéré de dire que la théorie interprétative de la traduction avan-
cée dans les divers articles qui figurent dans cet ouvrage a été pionnière par rapport
à la pragmatique, à la psychologie expérimentale et aux sciences cognitives, qui
sont venues plus tard corroborer ce que certains ont longtemps considéré comme
de simples intuitions1 subjectives de notre part, bien que nous nous appuyions à
l’époque, en plus de notre expérience d’interprètes de conférence, sur la psycho-
logie génétique de J. Piaget et sur les observations cliniques du neuropsychologue
J. Barbizet .

3. La compréhension de la langue et la compréhension des discours

A l’époque, l’étude de la compréhension se limitait à celle de la langue et des di-


verses modalités du système. Le processus de la compréhension des discours (traité

1.  Voir F. Rastier  : «  L’intuition peut refléter une réalité objective. Leurs insuffisances bien
connues ne les empêchent pas d’être utiles, voire indispensables, à l’activité scientifique ; ce que
tentent pourtant de dénier certains préjugés scientistes. « (1987,107)

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dans la première partie du recueil) n’intéressait guère les chercheurs. Il a, depuis,


fait l’objet de nombreux travaux, qui ont généralement confirmé nos observations :
– à propos de l’importance du contexte et du savoir préalable
Les traducteurs et les interprètes professionnels savaient d’expérience qu’en l’ab-
sence de contexte et sans apport à la langue seule de connaissances extralinguis-
tiques, il était impossible de traduire. Nos études empiriques ont démontré, et ce
avant les psychologues et les psycholinguistes (citons parmi les premiers, W. Levelt
et G. Flores d’Arcais 1978, T. Van Dijk et W.Kintch 1983), que la compréhension
dépend autant sinon plus du contexte et du savoir préalable du récepteur que de
ses connaissances linguistiques. J’écrivais en 1973 que « la langue n’apporte que
le début du savoir  » (2014,16) et un peu plus loin  : «  Toutes les connaissances
extra-linguistiques que l’on possède servent à interpréter la signification des mots
articulés en phrases pour en retirer un sens. Plus les connaissances sont étendues,
plus le sens de l’énoncé prend de précision. » (17)
– à propos de la nécessaire coopération du lecteur/auditeur
Nous avons établi avant P. Grice, U. Eco, D. Sperber et D. Wilson la nécessaire
coopération de l’auditeur à la compréhension du discours, ou celle du lecteur à la
compréhension du texte : « Il faut que l’orateur suppose un savoir partagé [avec
son auditeur] pour que son dire apporte l’information qu’il désire communiquer »
(2014, 23), écrivais-je dans ‘Transcoder ou réexprimer’ en 1973
– à propos de polysémie et d’ambiguïté
Nous insistons à maintes reprises dans cet ouvrage sur le fait que la polysémie des
mots n’apparait pas dans les discours et les textes. En général, ceux-ci ne révèlent
d’ambiguïté qu’à seconde lecture. En 1982, D. Seleskovitch dans ‘Les niveaux de
traduction’, écrit :
Que la langue dont le discours est fait soit plurivoque et polysémique, nul ne le
conteste ; mais le compris de celui qui s’intéresse aux paroles qui lui sont adres-
sées est, à de rares exceptions près, aussi univoque que le vouloir-dire de celui qui
parle, c’est-à-dire que la réalité visée à travers les mots prononcés. (2014, 411)

Cette constatation faite sur l’interprétation a été confirmée, dans le cadre des re-
cherches sur la machine à traduire, par T. Winograd (1983): cet auteur affirme
que, contrairement à la machine, l’esprit humain élimine inconsciemment la po-
lysémie et l’ambiguïté linguistique en s’appuyant sur le contexte et sur la situation.
Par ailleurs, les travaux de T.A. van Dijk et W. Kintsch (1883, 22 et 134) démon-
trent que le sens se comprend d’abord et s’analyse ensuite. Le sens apparait en

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premier à la conscience ; l’analyse linguistique qui permet de constater polysémie


ou ambiguïté intervient éventuellement après.
Aujourd’hui, les scientifiques qui étudient la conscience, démontrent que,
quelles que soient les perceptions, le cerveau humain n’a jamais conscience que
d’une seule interprétation à la fois. S. Dehaene, qui occupe au Collège de France la
chaire de psychologie cognitive expérimentale, écrit dans son ouvrage paru en 2014,
Le Code de la conscience : « Le monde ne nous offre que des opportunités brutes aux
interprétations hasardeuses. La conscience résout ces dilemmes en portant à notre
attention, à chaque instant, une seule parmi les milliers d’interprétations possibles
du monde. » (2014,13) constatation qui vaut bien entendu aussi pour le langage.
A propos de compréhension, les cognitivistes ont retravaillé le processus d’assi-
milation/accommodation de Piaget (ils rebaptisent ‘structure interne’ ses schèmes
mentaux) qui nous apportait des données utiles à notre explication de la compré-
hension. En 1973, dans la partie ‘Enseignement de l’interprétation’, j’expliquais
le processus en m’appuyant sur l’idée piagétienne d’assimilation/accommodation:
Bien des lois scientifiques peuvent être mises en parallèle avec des observations
que l’on peut faire dans la vie courante : il est possible de comprendre pourquoi
une fusée à réaction a besoin non seulement de carburant, mais aussi de com-
burant en observant un feu : il a besoin bien sûr de buches, mais aussi d’un petit
souffle d’air qui lui apporte de l’oxygène ; et l’on peut par la même occasion, mais
par un raisonnement inverse, comprendre le mécanisme du four à coke, qui évite
la combustion du charbon. (2014, 318–19)

Et en 1976, D. Seleskovitch résumait l’idée ainsi : « le bagage cognitif de l’inter-


prète peut l’aider à comprendre un sujet traité par les traits d’analogie qu’il pré-
sente avec les connaissances qui sont les siennes. » (2014,379)
L’exemple que je donnais d’une analogie facilitant la compréhension est au-
jourd’hui daté mais l’idée a été beaucoup plus tard reprise par des chercheurs fort
sérieux : en 2002, G. Fauconnier et M. Turner, dans leur ouvrage sur l’intégration
conceptuelle, The Way We Think - Conceptual Blending and the Mind’s Hidden
complexities, réhabilitaient l’analogie et la métaphore dans la pensée humaine. Par
ailleurs, D. Hofstadter, professeur de sciences cognitives à l’Université d’Indiana et
E. Sander, professeur de psychologie à l’Université Paris 8, insistent sur le fait que
l’analogie, les associations d’idées, sont à la base de toute compréhension. Dans
L’Analogie – Cœur de la pensé paru en 2013, ils écrivent que « nos concepts sont
sélectivement évoqués à tout moment par les analogies qu’établit sans cesse notre
cerveau afin d’interpréter ce qui est nouveau et inconnu dans des termes anciens
et connus. » (2013,9) (On retrouve là le principe piagétien d’assimilation/accom-
modation). Et plus loin, ils ajoutent que les analogies permettent à la personne qui
les a construites

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de penser et d’agir dans des situations jamais rencontrées auparavant, la nantis-


sent de nouvelles catégories à foison, enrichissent ces catégories en les étendant
sans cesse, guident sa perception des situations grâce à leurs encodages à divers
niveaux d’abstraction de ce qui a lieu dans l’environnement, et l’aident à effectuer
des sauts mentaux imprévisibles et puissants. (2013,169)

– à propos de déverbalisation
Je reviens au concept fort discuté de déverbalisation, c’est-à-dire de la dissociation
du langage et de la pensée. Avant les neuropsychologues, D. Seleskovitch a posé
que la pensée ne dépend pas du langage, bien que celui-ci l’aide à se préciser et à
se développer. Le terme ‘déverbalisation’ se trouve pour la première fois en 1976
dans ‘De l’expérience aux concepts’ (2014, 118) mais elle avait déjà mis le doigt sur
le phénomène dès son premier livre paru en 1968.
Elle a détecté la déverbalisation à partir de sa pratique de l’interprétation
consécutive, mais aussi à partir de réflexions sur la mémoire: nous retenons dans
notre mémoire à long terme les faits, les notions, les abstractions, mais non les
mots qui convoyaient ces faits, ces notions, ces abstractions. Pour nous, par consé-
quent, langage et pensée sont bien deux phénomènes distincts. Et si la traduction
est possible, c’est bien parce qu’il y a séparation des mots et du sens dans le cerveau
du traducteur !
Des neuropsychologues, dont J. Barbizet dès 1968, dans leurs études sur
l’aphasie en particulier, ont démontré l’existence dans le cerveau d’une aire du
langage spécifique qui, lorsqu’elle est atteinte, rend les sujets incapables de parler,
alors qu’ils conservent leurs capacités cognitives, un argument fort en faveur de la
dissociation du langage et de la pensée qui a été repris sous diverses formes et avec
diverses argumentations, entre autres par S. Pinker en 1994, ou par D. Laplane en
1997 et en 2005. Par ailleurs, de nombreuses études ont été faites sur des bébés, des
singes, des oiseaux, qui semblent montrer que le langage n’est pas indispensable à
un comportement raisonné (Weiskrantz 1988). Les neurosciences, avec les avan-
cées technologiques (IRM, tomographie par émission de positrons, etc.) affinent
la connaissance du fonctionnement du cerveau et vont aujourd’hui dans le même
sens. Alors que l’aire du langage est bien délimitée, on peut suivre aujourd’hui le
cheminement des pensées (et non les pensées elles-mêmes) dans les circuits neu-
roniques qui parcourent l’ensemble du cerveau.
Le Monde du 3 décembre 2014, dans son supplément Science & Médecine,
publie un article très sérieux intitulé «  Transmission de pensée par connexion
directe entre cerveaux  ». La lecture des pensées est effectuée grâce à un casque
d’encéphalographie, la transmission par internet et la restitution dans l’autre cer-
veau par un appareil de stimulation magnétique transcrânienne…Autant dire
que le système ne sera pas commercialisé demain ! Mais la raison pour laquelle

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l’information vaut d’être mentionnée, c’est qu’il s’agit bien de communication non
verbale.
– à propos d’explicite et d’implicite
Toujours s’agissant de déverbalisation, j’ai, dans mon article ‘Implicite et explicite’
(1976), baptisé de ‘principe de la synecdoque’ le fait que la plupart des signifiants
mais aussi des énoncés explicites ne font jamais que désigner un tout composé non
seulement de l’explicite linguistique mais aussi d’une part d’implicite qui le com-
plète. Voici ce que j’écris :
Tout énoncé, par l’implicite conceptuel auquel il renvoie, est plus large que sa for-
mulation ne l’est en langue. Plus la compréhension de l’implicite est vaste, mieux
le sens se libère de la signification linguistique. (2014, 52)

De son côté, Seleskovitch, dans ‘Les mécanismes du langage vus à travers la tra-
duction’ (1979), insiste sur le fait que «l’apport de connaissances banales est im-
plicite dans les échanges quotidiens et se fait souvent à notre insu, mais il survient
obligatoirement chaque fois qu’il y a communication effective par le truchement
de la langue. » (2014, 350). La formulation explicite de tout texte est toujours ac-
compagnée du côté du locuteur d’un implicite, dont il s’attend qu’il sera comblé
par le récepteur, ce qui est le cas lorsque ce dernier dispose du bagage cognitif
pertinent.
C’est à peu près à cette époque que Seleskovitch découvre l’ouvrage de J. Searle
Expression and Meaning (1979), qui confirme certaines de ses idées sur ce que lui
appelle les ‘actes de parole’. Un peu plus tard (1985) parait en français Lector in
fabula de U. Eco. L’idée de l’existence dans tout discours d’un non-dit mais néan-
moins compris était dans l’air du temps, mais n’avait pas encore été appliquée à
l’interprétation ou à la traduction.
Cet implicite, ou plutôt les inférences effectuées par les récepteurs du discours,
ont un peu plus tard été étudiées très en détail, pour la communication unilingue,
par D. Sperber et D. Wilson dans leur ouvrage Relevance – Communication and
Cognition (1986) et par d’autres qui les ont suivis pour la traduction. Mais on peut
déplorer que, dans la mesure où les mêmes idées n’ont pas recours aux mêmes
explicites dans les différentes langues, les traductologues soient encore fort peu
nombreux à avoir mesuré la portée de ce phénomène pour la traduction, alors
qu’il explique les équivalences de textes et infirme clairement la possibilité d’une
traduction littérale généralisée

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4. La réexpression

J’en viens au traitement de la reformulation dans Interpréter pour traduire. On nous


a reproché de développer l’aspect compréhension au détriment du volet reformu-
lation. D. Seleskovitch constate pourtant en 1977 que «  des langues différentes
ne construisent pas les mêmes messages avec les mêmes pièces sémantiques.»
(2014,140). Une langue laisse implicite ce qui est souvent explicité dans l’autre
et vice versa. C’est donc à la reformulation aussi bien qu’à la compréhension que
s’applique le principe de la synecdoque.
Par ailleurs, s’agissant toujours de reformulation, nous sommes encore une
fois, à mon sens, novatrices dans nos observations de la traduction, car nous avons
très tôt opéré une distinction entre les correspondances qui sont des faits de langue
et les équivalences, termes que nous appliquons au discours. Dans l’introduction à
la première édition de Interpréter pour traduire, nous écrivions :
Les correspondances établies entre les langues ne sont pas applicables sans dis-
crimination à la traduction des textes ou des discours. Ceux-ci contiennent des
idées qui apparaissent grâce à la complémentarité des connaissances non linguis-
tiques et linguistiques du couple auteur-lecteur, que les langues à elles seules ne
contiennent pas. On ne réexprime pas les idées comme on traduit les langues.
Pour fournir des équivalences aux textes, il faut une opération interprétative qui se
concentre sur les idées exprimées par les énoncés plutôt que sur les énoncés eux-
mêmes. (2014,3)

Quelques années plus tard, M. Snell-Hornby, dans son ouvrage de 1988, loin de
reprendre la division effectuée par la théorie interprétative entre correspondances
linguistiques et équivalences discursives, critique le terme et le concept d’équiva-
lence. L’usage mal défini qui en est fait est critiquable, mais M. Snell-Hornby ne
prend pas conscience de l’utilité d’une démarcation terminologique entre ce qui
est de la langue et ce qui relève du discours :
In this study, the view is also taken that equivalence is unsuitable as a basic con-
cept in translation theory: the term equivalence, apart from being imprecise and
ill-defined (even after a heated debate of over twenty years) presents an illusion of
symmetry between languages which hardly exists beyond the level of vague ap-
proximations and which distorts the basic problems of translation.
 (1988/1995, 22)

Je comprends mal que les traductologues, qu’ils s’intéressent au processus ou au


produit, n’aient pas pris conscience de l’intérêt que présente cette distinction pour
l’étude de la traduction. Cette séparation entre ce qui est de la langue et ce qui
ressortît au discours est pourtant essentielle ; son absence, due au manque de pré-
cision du concept, a donné naissance, comme l’indique Snell-Hornby elle-même,

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à bien des discussions qui auraient pu être évitées à propos d’équivalence en tra-
duction …
Ceci dit, le volet reformulation, pour les textes de manière générale mais plus
particulièrement pour les textes littéraires, n’a véritablement été développé qu’à
partir des années 1990 par un autre disciple de D. Seleskovitch, F. Israël.

5. Le sens

J’en viens au sens, notion bien floue elle aussi et qui donne lieu à nombre de contro-
verses.
On nous a reproché de ne traiter que du sens purement notionnel que l’on ex-
trairait facilement des textes pragmatiques, alors que certains textes, et plus parti-
culièrement les textes littéraires déclenchent chez le lecteur des effets émotionnels ou
esthétiques. Il est vrai que, nos recherches portant essentiellement sur des discours
ou des textes pragmatiques, nous avons tardé à inclure dans le ‘sens’, en plus du
notionnel, le caractère émotionnel/esthétique qui transparait aussi parfois dans ces
textes ou discours. En 1979, D. Seleskovitch l’exclut encore expressément du cadre
de la théorie interprétative. Elle écrit : « (le côté esthétique de la littérature pose des
problèmes spécifiques de forme qui doivent être traités séparément).2 » (2014, 147)
Cependant, sous l’influence de certains de ses doctorants, son attitude change
peu à peu et en 1988, c’est-à-dire quelques années après la publication d’Interpréter
pour traduire, elle reconnait que la forme peut affecter le sens :
It is often believed that the difficulties met in translating literary works are due to
the necessity of reproducing an author’s style; but style stems from sense as much
as it contributes to sense; whatever the style of a written or oral utterance, as long
as it is meant as a message, that style will be part of the sense to be conveyed. It will
be reflected in the other language by style that is not a conversion of the original
style but by the expression of the translator’s understanding of sense (1988, 88)

Depuis, lorsque nous discutons de ‘sens’, nous adjoignons toujours au substantif


les adjectifs ‘notionnel et émotionnel’ ou ‘esthétique’.
Qu’est-ce donc que le sens dont nous parlons ?
En 1976, D. Seleskovitch en définit la constitution ; elle affirme:
que le sens est un vouloir dire extérieur à la langue (antérieur à l’expression chez
le sujet parlant, postérieur à la réception du discours chez le sujet percevant), que
l’émission de ce sens nécessite l’association d’une idée non verbale à l’indication

2.  Remarquez les parenthèses, qui semblent montrer qu’il s’agit d’un aspect qui ne l’intéresse
guère.

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sémiotique (parole ou geste, peu importe en soi le support qui se manifeste de


façon perceptible !) et que la réexpression du sens exige une action délibérée du
sujet percevant. (2014, 87)

Dans ‘Transcoder ou réexprimer’ (1973), je précise la façon dont le sens apparait :


Pour que le sens du dire soit celui que veut l’auteur, il faut que celui-ci ait cor-
rectement jugé du savoir de ceux auxquels il s’adresse et qu’il ait proportionné
en conséquence l’explicite de sa formulation par rapport à ce qu’il laisse non-dit.
Il faut aussi que le lecteur sache que l’explicitation linguistique ne couvre qu’une
partie du message. Qu’il s’agisse de l’information fournie par le journal, ou de la
lecture d’un essai philosophique, la connaissance que l’on associe toujours à la
perception peut être approximative ou même fausse (si le savoir sur lequel on se
fonde est insuffisant), tout comme le dire de l’auteur est parfois flou (s’il a insuf-
fisamment analysé sa pensée ou mal jugé de ceux auxquels il s’adresse). Pourtant,
dans la majeure partie des cas de communication courante, le sens se réalise spon-
tanément, le dire correspond au vouloir-dire et le compris aussi. (2014, 19–20)

On en revient à l’indispensable coopération entre l’auteur et le lecteur.


D. Seleskovitch, quant à elle, dans, son introduction à Comprendre le langage,
Actes du Colloque international qui s’est tenu en 1980 à son instigation, aborde la
question de façon pragmatique :
Le sens d’un énoncé se définit par les mêmes moyens que les signifiés de la langue.
Dans un cas comme dans l’autre, on procède par constat. Les signifiés tirent-ils
leur objectivité du fait qu’ils recueillent le consensus de tous les membres d’une
collectivité ? Le sens est alors tout aussi objectif, car en général ceux à qui s’adresse
une parole en situation en comprennent aussi aisément et aussi exactement le sens
qu’ils comprennent la langue dans laquelle il est émis. (1981,13)

Enfin, dans ‘la compréhension d’une pensée à travers son expression’ (1982), elle
distingue, à propos du sens
trois plages sur lesquelles l’attention peut se fixer. La première est celle du sens
qu’un émetteur veut communiquer à autrui et qui est saisi spontanément par ce-
lui qui l’écoute avec le désir de le comprendre. Cette première plage inclut tous
les implicites charriés par les compléments cognitifs [déjà mentionnés] et exclut
tout ce qui chez l’émetteur n’est pas délibéré. La deuxième plage est celle de la
forme, support matériel du discours et de ses attributs sémantiques. Enfin il y a la
plage des intentions, du vouloir, de l’effet que le sujet parlant cherche à produire,
consciemment ou inconsciemment et de l’interprétation que l’auditeur donne à
ses motifs et à ses buts. (2014, 412)

Nous savons tous en effet que même les déclarations les plus factuelles publiées
dans les journaux peuvent, elles-aussi, donner lieu à la recherche des intentions de

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l’auteur. Cependant dans ce cas, il ne s’agit jamais que de simples hypothèses de


sens qui ne seront pas traduites.
D. Seleskovitch résume là, brièvement, la délimitation du sens selon la théorie
interprétative. Aujourd’hui, de nombreux travaux portent sur l’influence que peut
exercer sur le traducteur le fait qu’il s’inscrit dans une société et dans un système
culturel donné et que si, en traduisant, il fait le choix conscient de rester objectif, il
arrive aussi parfois que l’idéologie de son temps lui fasse prendre parti. Le rapport
entre idéologie et traduction n’a pas été exploré par la théorie interprétative de
la traduction, mais fait aujourd’hui l’objet de nombreuses recherches. La théorie
interprétative, quant à elle, explique les erreurs, les errements, les défauts métho-
dologiques éventuels des traducteurs mais elle s’en sert pour décrire le processus
idéal pour la mise en œuvre duquel le traducteur possède une excellente maitrise
de ses langues de travail, dispose pour chaque texte à traduire des connaissances
extralinguistiques pertinentes et, ayant compris le texte, réussit à en exprimer idio-
matiquement le sens (notionnel et émotionnel) dans sa langue maternelle de façon
à réussir une convergence aussi parfaite que possible des deux textes.

6. Les retombées de la théorie interprétative sur le langage

Un mot encore à propos des retombées sur le langage de nos recherches sur l’inter-
prétation et la traduction. Elles sont traitées dans la troisième partie de l’ouvrage et
j’y ai fait allusion à plusieurs reprises à propos de traduction, car pour nous, la tra-
duction et l’interprétation sont des processus mentaux qui permettent d’étudier
le langage : « Le traductologue (…) prétend décrire les mécanismes de la compré-
hension en décrivant les mécanismes de la traduction.» (Seleskovitch [1979] 2014,
358) De mon côté, j’avançe en 1978 qu’étant donné que l’interprétation « implique
de nombreuses et complexes activité mentales, elle semble pouvoir ouvrir une voie
prometteuse à l’étude des processus de pensée qui jouent dans la compréhension
et dans l’expression du langage. » (2014,344)
J’ai déjà donné toute une série d’indications sur les retombées sur le langage
de nos études de l’interprétation et de la traduction. J’ajoute quelques points qui
n’ont pas encore été mentionnés :
Dans ‘la traduction simultanée, poste d’observation du langage’, article tiré de
l’étude empirique de l’interprétation simultanée effectuée pour ma thèse d’État
(1981), je démontre que la compréhension du langage n’est pas linéaire, qu’elle
ne s’effectue pas mot après mot, mais qu’elle surgit par petites unités de sens, seg-
ments d’énoncés dont la longueur varie selon les connaissances préalables des ré-
cepteurs. Cette constatation est confirmée par F. Smith à propos de la lecture :

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Pourquoi une cinquième édition d’Interpréter pour traduire 75

Si l’on essaie de lire un texte lettre à lettre ou mot à mot, on ne peut espérer com-
prendre. Il faut lire, à chaque fixation, la plus grande partie du texte possible, en
lui trouvant un sens. […] Un lecteur ne peut pas comprendre s’il lit moins de 200
mots à la minute car, dans ce cas, il perçoit les mots comme des unités isolées et
non comme des séquences chargées de sens. (1986, 42)

On comprend par unités de sens, mais celles-ci n’ont pas toujours besoin de sup-
port verbal complet. Dans ‘Les anticipations de la compréhension’ (1978), D.
Seleskovitch décrit les cas où l’auditeur comprend ce que veut dire le locuteur
avant que celui-ci ait terminé sa phrase. Il s’agit là d’un phénomène que nous
connaissons tous dans la vie courante et qui se produit aussi en interprétation. Un
collègue interprète-chercheur, Ghelly Chernov (2004) s’est longuement penché
sur la redondance des discours et sur les anticipations du sens, pointant la com-
binaison d’inférences linguistiques et cognitives faites par l’auditeur du discours.
Conclusion : les mots du discours n’ont pas toujours tous l’importance que cer-
tains leur donnent car ils sont parfois rendus superflus par le déjà-dit, le contexte,
la situation et les connaissances de l’auditeur/lecteur.

7. La pédagogie

Dans ce qui précède, j’ai abordé le contenu du premier chapitre « Qu’est-ce que
traduire ? », ainsi que celui du troisième chapitre « La traduction et le langage ».
Impossible de passer sous silence le deuxième chapitre intitulé « L’enseignement
de l’interprétation » qui pose les bases d’une pédagogie inexistante à l’époque.
L’article portant sur les ‘ Principes et méthodes de l’enseignement de l’inter-
prétation’ est une version améliorée de l’exposé fait par Danica Seleskovitch en
1965 lors du premier colloque de l’AIIC sur l’enseignement de l’interprétation.
A une époque où l’interprétation en tant que profession n’en était encore qu’à ses
débuts et où s’ouvraient quasiment tous les jours des ‘écoles d’interprètes’ attirées
par des débouchés prometteurs, l’enseignement était souvent dispensé par des
professeurs de langues sans expérience de l’interprétation ou, au mieux, par des
professionnels de l’interprétation sans expérience de l’enseignement. Consciente
du problème, D. Seleskovitch proposait dès 1965 un plan de cours sur deux années
au niveau appelé aujourd’hui Master. Exercices pratiques et principes théoriques
s’y mêlaient harmonieusement. Elle écrit:
Les explications théoriques et les exercices progressent du facile au difficile et
doivent permettre aux étudiants de passer, du niveau où ils se trouvaient à leur
entrée à l’école, à un plan de connaissances générales, de capacité intellectuelle,

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76 Marianne Lederer

de connaissances linguistiques et surtout de savoir-faire correspondant à celui de


bons interprètes de conférence. (2014, 223)

Les quatre articles qui composent ce chapitre représentent une première esquisse
de La Pédagogie raisonnéede l’interprétation, ouvrage qui nous a été commandé en
1989 par le Service Commun Interprétation Conférence (SCIC) de la Commission
européenne, et dont une version élargie est parue à sa demande en 2002.

8. Conclusion

Interpréter pour traduire est écrit sans jargon, dans un langage clair et simple.
C’est aussi un souci de clarté qui nous a poussées à normaliser notre termi-
nologie. En effet, nos étudiants se heurtaient souvent, lors de la lecture d’ouvrages
traductologiques, à des difficultés de compréhension provenant du flou de cer-
tains termes fréquemment utilisés dans cette littérature. C’est ainsi que nous avons
été amenées à faire une distinction nette, dès la deuxième édition d’Interpréter
pour traduire en 1986, entre ‘langue’ et ‘discours’, entre ‘signification linguistique’
(meaning) et ‘sens des discours’ (sense) et évidemment, comme je l’ai dit plus haut,
entre ‘correspondance’ et ‘équivalence’. Il est permis de se demander si bien des in-
compréhensions, et même des controverses entre traductologues du monde entier
ne seraient pas évitées, si ces distinctions étaient adoptées par tous !
Depuis la première parution de l’ouvrage en 1984, qui décrit les grandes étapes
du processus, la traductologie a pris son essor  ; certains modèles ont étudié le
processus de la traduction plus en détail ou sous d’autres aspects. Aucun de ces
modèles, cependant, ne contredit ni n’invalide la théorie avancée dans Interpréter
pour traduire. En revanche, la théorie a été enrichie et élargie vers la traduction
écrite par J. Delisle, puis vers la traduction littéraire par F. Israël, vers l’interpréta-
tion en Langue des Signes par Ph. Séro-Guillaume, et de nombreux ouvrages ont
été publiés après 1984, qui s’appuient sur la théorie interprétative pour étudier des
aspects particuliers de la traduction. Je pense entre autres à Théorie du langage –
Théorie de la traduction de C. Laplace (1994), à La Traduction des jeux de mots de
J. Henry (2003), à Lire pour traduire de F. Plassard (2007), à la Poétique du récit
traduit de G. Roux-Faucard (2008). D’autres vont bientôt suivre dans la collection
des Cahiers Champollion chez Lettres Modernes Minard qui, après la disparition
du regretté Michel Minard, a été reprise par les Classiques Garnier.
La théorie que propose ce recueil est une théorie explicative, d’où d’ailleurs le
fait qu’elle a conquis les praticiens et qu’elle a en outre des retombées précises et
très bénéfiques sur la pédagogie de la traduction, puisqu’elle décrit et expose aux

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étudiants les différentes composantes du processus qu’ils seront amenés à mettre


en œuvre dans leur carrière professionnelle.
Et tous les jours, s’il en est encore besoin, les recherches en sciences du lan-
gage, en psychologie cognitive, en neurosciences viennent vérifier les constata-
tions résumées dans l’ouvrage qui sort à nouveau aujourd’hui et que j’espère avoir
donné envie de lire ou de relire à tous ceux qui s’intéressent non seulement à la
traduction orale (l’interprétation) et à la traduction écrite mais aussi aux rapports
entre langue et pensée.

Références

Chernov, Ghelly V. 2004. Inference and Anticipation in Simultaneous interpreting. Amsterdam:


John Benjamins.
Dehaene, Stanislas. 2014. Le Code de la conscience. Paris: Odile Jacob.
Fauconnier, Gilles and Mark Turner. 2002. The Way We Think - Conceptual Blending and the
Mind’s Hidden complexities. New York: Basic Books.
Hofstadter, Douglas et Emmanuel Sander. 2013. L’Analogie – Cœur de la pensée. Paris : Odile
Jacob. Publié en anglais à la même date, sous le titre : Surfaces and Essences : Analogy as the
Fuel and Fire of Thinking.
Henry, Jacqueline. 2003. La Traduction des jeux de mots. Paris : PSN.
Israël, Fortunato. 1990. « Traduction littéraire et théorie du sens ». In Etudes traductologiques, éd
par Marianne Lederer, 29–43. Paris : Lettres Modernes Minard.
Laplace, Colette. 1994. Théorie du Langage – Théorie de la traduction. Paris : Didier Erudition.
Laplane, Dominique. 1997. La pensée d’outre- mots – la pensée sans langage et la relation pensée-
langage. Paris. Institut Sanofi-Synthélabo.
Laplane, Dominique. 2005. Penser, c’est-à-dire  ? Enquête neurophilosophique. Paris: Armand
Colin.
Lederer, Marianne. 1981. La traduction simultanée – Fondements théoriques. Paris: Lettres
Modernes Minard.
Pinker, Steven. 1994. The Language Instinct – The New Science of Language and Mind. London:
Penguin Books.
Plassard, Freddie. 2007. Lire pour traduire. Paris : PSN.
Plassard, Freddie. 2015. « Déverbalisation et traduction écrite. » FORUM 13 (2): 95–128.
Rastier, François. 1987. Sémantique interpretative. Paris: PUF.
Riesbeck, Christopher K. and Roger C. Schank. 1978. “Comprehension by Computer  :
Expectation-based Analysis of Sentences in Context” in Studies in the Perception of
Language, ed. by Willem J.M. Levelt, and Giovanni B. Flores d’Arcais, 247–294. New York:
John Wiley & Sons.
Roux-Faucard, Geneviève. 2008. Poétique du récit traduit. Paris : Lettres Modernes Minard.
Searle, John. 1979. Expression and Meaning – Studies in the Theory of Speech Acts. Cambridge
University Press.
Seleskovitch, Danica. 1968. L’Interprète dans les conférences internationales. Paris  : Lettres
Modernes Minard.

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Seleskovitch, Danica. 1981. “Introduction”, in Comprendre le langage, éd. par Jacques Barbizet,
Maurice Pergnier et Danica Seleskovitch, 9–15. Paris : Didier Érudition.
Seleskovitch, Danica 1987. “Technical and literary translation, a Unifying View” ITI Conference
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Seleskovitch, Danica et Marianne Lederer. 1989/2002. Pédagogie raisonnée de l’interprétation.
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Oxford: Clarendon Press.
Winograd, Terry. 1983. Language as a Cognitive Process, vol. 1. Reading, Mass. : Addison-Wesley.

Abstract

Interpréter pour traduire, first published in 1984, laid the foundation of the interpretive theory
of translation. A number of its findings are today being validated by cognitive scientists. The
fact that it remains quite topical explains why it was republished in 2014 by Les Belles Lettres.

Keywords: interpretive theory of translation, sense, meaning, de-verbalization,


equivalence, correspondance

Adresse de l’auteur
Marianne Lederer
2, square Jean-Baptiste Colbert
FR 92340 Bourg-la-Reine
France
marlederer@wanadoo.fr

Notes biographiques
Marianne Lederer is Professeur émérite at Université Paris 3 – Sorbonne Nouvelle (ESIT).

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