collection
collection
COURS collection
COURS
LMD
S
Droits fondamentaux LMD
et libertés publiques 2018 Collection dirigée par Bernard Beignier
Droits
Ce cours, à jour au 1er août 2018, rassemble l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur les droits
R
de l’homme, de leur invention à leur protection juridique actuelle. Il couvre l’ensemble :
– des sources des droits : civil, pénal, international, européens, constitutionnel,
fondamentaux et
administratif ;
– des aspects de chaque droit ou liberté : historique, textes, jurisprudence, débats ;
– des développements relatifs aux enjeux de sociétés : données personnelles, garde à
libertés publiques
vue, biométrie, internet, vie privée, étrangers, sectes, hospitalisations psychiatriques,
et libertés publiques
Droits fondamentaux
droit des médias, bioéthique, lanceurs d’alerte…
U
Le programme comprend :
– l’histoire des droits de l’homme ;
– les systèmes de protection des droits ; • Cours
– les droits fondamentaux : droit à la vie, à la mort, à l’intégrité physique, liberté sexuelle,
liberté d’expression, identité ;
• Thèmes de travaux dirigés
– les libertés publiques : liberté individuelle, opinion, religion, éducation, réunion,
association, syndicats, droits politiques, liberté d’aller et venir, droit de propriété,
5e édition
libertés économiques et droits sociaux ; Préface de
O
– les droits de catégories spécifiques : droits de l’enfant, des étrangers, des personnes
handicapées, des malades, des détenus.
Jean-Paul Costa
Il comporte un index des 2 100 jurisprudences citées, ainsi qu’un index des matières
et des auteurs.
X. Bioy
Ce cours s’adresse à tous ceux qui veulent connaître les droits de l’homme, plus
particulièrement les étudiants de L3 Droit, des Instituts d’études judiciaires (CRFPA,
C
ENM, métiers de la sécurité), de master Carrières judiciaires et master Droit public, des
Instituts d’études politiques et des préparations de concours administratifs (ENA, IRA,
Xavier Bioy
Juridictions administratives).
Il est issu de l’expérience d’enseignement dans ces formations de Xavier BIOY, professeur
agrégé de droit à l’Université Toulouse 1 Capitole, responsable de l’axe « Libertés »
de l’Institut Maurice Hauriou, codirecteur du master « Droit des libertés ».
www.lextenso-editions.fr
ISBN 978-2-275-06063-7 42 €
Commentaire d’arrêt
Cass. soc., 21 septembre 2017, nº 16-20270 et 16-20277
Marc Cottereau, Doctorant, Institut Maurice Hauriou
Cour de cassation
Chambre sociale
Audience publique du jeudi 21 septembre 2017
Nº de pourvoi : 16-20270 16-20277
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :
Vu la connexité, joint les pourvois nº 16-20270 et 16-20277 ;
Sur la demande de mise hors de cause :
Met hors de cause, sur sa demande, la société Adecco experts recrutements, devenue Adecco ;
Attendu, selon l’arrêt attaqué, que M. X... a été mis à disposition de la société SCC services, aux
droits de laquelle vient la société SCC, du 10 juillet 2012 au 31 décembre 2013, par la société
Adecco, en qualité de technicien de proximité informatique, dans le cadre d’une succession de
missions temporaires et de renouvellement conclus pour accroissement temporaire d’activité ;
qu’avant l’expiration de sa dernière mission, le salarié a saisi la formation de référé de la juridiction
prud’homale pour, notamment, faire valoir les droits correspondant à un contrat de travail à durée
indéterminée et obtenir la poursuite de la relation contractuelle ; que par ordonnance du
27 décembre 2013, la formation de référé de la juridiction prud’homale a dit n’y avoir lieu à référé
sur les demandes relatives à la requalification en contrat à durée indéterminée, mais a ordonné la
poursuite de la relation contractuelle jusqu’à ce qu’il soit statué au fond sur la demande de requali-
fication en contrat à durée indéterminée ; que le salarié a saisi la juridiction prud’homale de
897
DROITS FONDAMENTAUX ET LIBERTÉS PUBLIQUES
898
Les libertés économiques et les droits sociaux
entre les parties, par la Cour d’appel de Rennes ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause
et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant lesdits arrêts et, pour être fait droit, les
renvoie devant la Cour d’appel d’Angers.
Proposition de corrigé
Introduction
M. X., requérant a été mis à disposition de la société SCC services par la société Adecco, en
qualité de technicien de proximité informatique, dans le cadre d’une succession de missions
temporaires et de renouvellements conclus pour accroissement temporaire d’activité. Avant
l’expiration de sa dernière mission, le salarié a saisi la formation de référé de la juridiction prud’-
homale pour, notamment, obtenir la requalification de son contrat en CDI d’une part et la pour-
suite de la relation contractuelle d’autre part. Tout en affirmant que le référé n’était pas justifié,
la juridiction prud’homale, par ordonnance du 27 décembre 2013, ordonna tout de même la pour-
suite des relations de travail jusqu’au prononcé de la décision au fond sur la demande de requa-
lification en CDI. Par des jugements en date des 15 mai et 7 juillet 2014, le conseil de prud’-
hommes a ordonné la requalification de la relation de travail en CDI et a condamné l’employeur
au paiement de diverses sommes. Elle a au surplus ordonné la poursuite des relations de travail.
Saisi en appel de l’ordonnance de référé, la Cour d’appel a infirmé la décision du juge de
première instance en ce qu’il ordonnait la poursuite des relations de travail (arrêt du 5 septembre
2014). Toutefois, dans sa décision au fond, la Cour d’appel confirma la requalification. La Cour a
estimé que le salarié intérimaire avait agi avant le terme de sa mission dans le but de faire
respecter son droit au maintien du salarié dans l’emploi suite à la violation des dispositions rela-
tives aux conditions restrictives de recours au travail temporaire. Elle considéra donc que la
cessation des relations de travail s’apparentait à un licenciement irrégulier et, parce que ce licen-
ciement irrégulier viole une liberté fondamentale, le salarié obtint sa réintégration dans son
emploi. L’affaire fut portée à la connaissance de la Cour de cassation.
Elle dut alors statuer sur la légalité du licenciement et dans le cas d’une irrégularité, elle devait
se prononcer sur les conséquences de cette dernière. Elle dut notamment se demander si la
Cour d’appel pouvait reconnaître la nullité du licenciement comme l’a fait ? Ce qui est directement
en jeu dans cette affaire n’est autre que le statut du droit à l’emploi (article 5 du Préambule
de 1946). S’agit-il d’une liberté fondamentale justifiant la nullité du licenciement dans le cas
d’une irrégularité ou non ? La Chambre sociale de la Cour de cassation cassa l’arrêt d’appel au
motif que le droit à l’emploi ne constitue pas une liberté fondamentale justifiant la nullité du
licenciement. Le licenciement de M. X. ouvre droit à réparation, mais il ne justifie pas sa réinté-
gration. La Cour d’appel a commis une erreur de droit en considérant que le droit à l’emploi est
une liberté fondamentale. Ainsi, alors que la liberté de témoigner1, le droit d’ester en justice2, droit
de grève3 ou encore le droit de retrait4 sont des libertés fondamentales au sens de la Chambre
sociale, la liberté de se vêtir5 et le principe de non-discrimination en fonction de l’âge6 et mainte-
nant le droit à l’emploi, qui est un droit social, ne sont pas considérés comme fondamentaux. Leur
non-respect ne peut donc donner lieu à l’annulation d’un licenciement, mais seulement à l’octroi
d’une indemnisation pour le préjudice subi. L’arrêt du 21 sept. 2017 vient élargir cette liste des
899
DROITS FONDAMENTAUX ET LIBERTÉS PUBLIQUES
droits et libertés non fondamentaux. Cet arrêt est un arrêt relativement classique évitant d’ail-
leurs une dissonance jurisprudentielle (I) : pour la Cour de cassation, le Conseil d’État et le
Conseil constitutionnel, le droit à l’emploi n’est pas un droit ou une liberté fondamentale. Par
contre, là où ça devient intéressant, c’est que la décision de la Chambre sociale de la Cour de
cassation semble pouvoir s’appliquer à l’ensemble des droits-créances et non au seul droit à
l’emploi (II).
7. Cass. soc., 13 mars 2001, nº 99-45735. « Mais attendu que la rupture du contrat de travail à l’initiative de l’employeur est
soumise à la procédure de licenciement prévue par les articles L. 122-14 et suivants du Code du travail et n’ouvre droit pour le
salarié, dès lors qu’aucun texte n’interdit, ou ne restreint la faculté de l’employeur, de le licencier, qu’à des réparations de
nature indemnitaire ; qu’il en résulte que le juge ne peut, en l’absence de disposition le prévoyant et à défaut de violation d’une
liberté fondamentale, annuler un licenciement ».
8. F. GAUDU, « Les nullités du licenciement et le “principe” pas de nullité sans texte », Droit social, 2010, p. 151 et s.
9. Cass. soc., 6 fév. 2013, nº 11-11740.
900
Les libertés économiques et les droits sociaux
travail était en réalité une mesure de rétorsion de la part de l’employeur découlant de la seule saisine
de la juridiction ». Pour ce faire, il ne suffit pas de montrer qu’il y a eu des démarches en vue d’un
licenciement ou une décision de rupture pour justifier du lien de causalité. Il faut prouver que ces
démarches ou cette rupture découlent directement de la saisine du juge en vue de la requalifica-
tion et que les mesures de l’employeur sont bien de nature à limiter ou empêcher la possibilité
pour le salarié d’agir en justice.
10. CC, 10 juin 1998, nº 98-401 DC, Loi d’orientation et d’incitation relative à la réduction du temps de travail.
11. C. RAPOPORT, « L’opposabilité des “droits-créances” constitutionnels en droit public français ».
12. X. PRETOT, « Les bases constitutionnelles du droit social », Droit social, nº 3/1991, pp. 187-199.
13. C. RAPOPORT, « L’opposabilité des “droits-créances” constitutionnels en droit public français », Diane ROMAN nomme cette ligne
de défense en faveur d’une autolimitation du juge en matière de droit sociaux « l’argument démocratique ». Diane ROMAN, « La
justiciabilité des droits sociaux ou les enjeux de l’édification d’un État de droit social », La Revue des Droits de l’Homme, 2012-1,
Dossier thématique : La justiciabilité des droits sociaux.
14. CE sect., 28 fév. 2001, Casanovas.
15. CE, ord., 3 mai 2002, Association de réinsertion sociale du Limousin.
16. G .GLÉNARD, « Les critères d’identification d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice adminis-
trative », AJDA 2003, p. 2008 et s.
17. Cons. const. 27 juillet 1982, nº 82-141 DC, Liberté de communication audiovisuelle, cons. 5.
901
DROITS FONDAMENTAUX ET LIBERTÉS PUBLIQUES
des opinions », garantie par l’article 11 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen
de 1789 »18. L’ordonnance Fofana du Conseil d’État semble confirmer cette lecture19. Certains OVC
serviront donc à limiter le pouvoir du législateur ou seront appréhendés comme des normes de
conciliation alors que d’autres enfin serviront à renforcer une liberté ou un droit constitutionnel.
« C’est dans cette seconde catégorie que le juge administratif pourra extraire une liberté
fondamentale »20.
18. G. GLÉNARD, op. cit. « L’objectif de valeur constitutionnelle n’équivaut à une liberté fondamentale qu’en ce qu’il se rattache à la
liberté de communication ».
19. CE, ord., 22 mai 2002, Fofana.
20. G. GLÉNARD, op. cit.
21. L. GAY, « La notion de “droits-créances” à l’épreuve du contrôle de constitutionnalité », Cahiers du Conseil constitutionnel,
2004, nº 16.
902
Les libertés économiques et les droits sociaux
positive qui découlerait de l’application d’un droit dit « défensif » tels que la liberté de religion ou
la liberté d’expression22. L’idée en effet est que pour être effectifs, les droits et libertés n’impli-
quent pas seulement une abstention de la part de l’État, mais, dans certains cas, une action parti-
culière. Le respect d’un droit implique pour l’État d’en aménager son exercice ce qui peut se
traduire bien souvent par la mise en place d’une simple réglementation de l’activité voire même,
la mise en place de politiques publiques d’une part et la création d’institution de protection d’autre
part23. Une obligation positive est un aménagement adéquat permettant de « créer le cadre néces-
saire à l’exercice du droit fondamental invoqué »24.
Deuxièmement, un droit défensif qu’une juridiction aurait dégagée à partir de ce droit-créance
n’est pas lui-même un droit-créance. Dès lors, si un droit-créance n’est pas un droit ou une
liberté fondamental au sens de la Chambre sociale, rien n’empêche qu’un droit ou une liberté
consacré par une juridiction sur la base des articles 5, 10 et 13 du Préambule de 1946 puisse
être considérée comme fondamental et ainsi permettre une nullité virtuelle. Au regard de notre
interprétation de l’arrêt de la Chambre sociale et de sa note explicative, alors la Cour de cassation
ne reconnaîtra pas que le droit d’obtenir des conditions matérielles minimales pour notre développe-
ment personnel (article 10) est un droit fondamental. Toutefois, rien ne l’empêchera de considérer
que le droit de mener une vie familiale normale est une liberté fondamentale. Cette liberté
reconnue à l’article 8 de la Convention EDH a aussi été consacrée par le Conseil d’État25 et le
Conseil constitutionnel26 sur la base de l’article 10 du Préambule de 1946. Or, bien que le fonde-
ment de ce droit soit l’article 10, il ne s’agit pas d’un droit-créance, mais d’un droit défensif27. Il
pourra donc servir de point d’ancrage à l’annulation d’un licenciement si la Cour de cassation
accepte toutefois de le considérer comme fondamental.
22. L. GAY, « La notion de “droits-créances” à l’épreuve du contrôle de constitutionnalité », Cahiers du Conseil constitutionnel,
2004, nº 16.
23. X. BIOY, Droits fondamentaux et libertés publiques, Paris, LGDJ, coll. Cours, 4e éd., p. 140.
24. D. CAPITANT, Les effets juridiques des droits fondamentaux en Allemagne, Paris, LGDJ, 2001, p. 207.
25. CE, Ass., 8 déc. 1978, Gisti.
26. CC., nº 93-325 DC, 13 août 1993, Maîtrise de l’immigration, cons. 70.
27. « Il s’agit bel et bien de permettre à l’individu de créer et de développer des relations familiales, à l’abri de restrictions non
justifiées de la puissance publique ». L. GAY, « La notion de “droits-créances” à l’épreuve du contrôle de constitutionnalité »,
op. cit.
28. Nous déduisons cela d’une analyse a contrario des écrits de Frédéric GUIOMARD qui affirmait que le fait de ne pas reconnaître
le caractère fondamental de la liberté de se vêtir ne « saurait surprendre » en raison du fait qu’aucun « texte du droit international
ou de valeur constitutionnelle ne la mentionne ». Frédéric GUIOMARD, « L’entreprise et le bermuda (à propos d’un arrêt un peu
“short”) », Rec. Dalloz 2003, p. 2718 et s.
29. « Vu les articles 6 et 10 de la convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales ». Cass. soc.,
29 oct. 2013, nº 12-22447.
903
DROITS FONDAMENTAUX ET LIBERTÉS PUBLIQUES
supra-législative30. Ainsi, concernant la liberté de témoigner la Chambre sociale s’appuie sur les
articles 6 et 10 de la Convention pour reconnaître que la liberté de témoigner est une liberté
fondamentale. Elle aurait aussi pu s’appuyer sur l’article 11 de la DDHC et la décision du Conseil
constitutionnel du 20 janvier 2005 qui consacre la valeur constitutionnelle du droit à un procès
équitable31. À l’inverse, concernant la non-discrimination en fonction de l’âge, la Chambre sociale
refuse de la considérer comme une liberté fondamentale car elle n’est pas consacrée par une
norme supra-législative. Toutefois, il s’avère que cette explication, si elle paraissait a priori perti-
nente, semble avoir été remise en cause par cet arrêt du 21 sept. 2017.
En effet, la Cour reconnaît que le droit à l’emploi a une valeur constitutionnelle tout en affirmant
que cette position dans la hiérarchie des normes n’est pas suffisante pour le considérer comme
fondamental. A contrario, cela signifie alors que la reconnaissance supra-législative d’un droit ou
d’une liberté est une condition nécessaire à la fondamentalité, mais pas une condition suffisante.
Cet arrêt du 21 sept. 2017 ne fait que confirmer une analyse que l’on aurait déjà pu tirer de
l’arrêt du 28 mai 2003 concernant la liberté de se vêtir. En effet, bien que cette liberté ne soit
pas explicitement consacrée par une norme supra-législative, elle peut tout même être la consé-
quence d’une lecture combinée des articles 2 et 4 de la DDHC. Si la liberté est sacrée (article 2) et
qu’elle consiste à pouvoir tout ce qui ne nuit pas à autrui (liberté négative – article 4), alors il va
sans dire que la liberté de se vêtir peut être directement rattachée à la DDHC. Dès lors, il est
raisonnable de se demander s’il n’existe pas un autre critère permettant à la Cour de statuer
sur la fondamentalité d’un droit ? Utilise-t-elle plutôt un faisceau d’indices ? Dans le cas où elle
n’utilise ni l’un ni l’autre, prend-elle au moins en considération les conséquences des possibles
concrétisations qui lui sont ouvertes pour faire son choix (même si cela n’apparaît pas dans sa
motivation) ?
S’il est vrai que la Cour n’indique pas explicitement pour quelles raisons une liberté quelconque
est une liberté fondamentale, il est tout de même possible de dégager certains éléments permet-
tant de se faire une idée de la notion de fondamentalité propre à la Chambre sociale. Il nous
semble ainsi qu’un droit est fondamental au sens de Chambre sociale s’il possède une valeur
surpa-législative et s’il a une valeur essentielle. Ainsi, parce que la liberté de se vêtir n’est pas une
liberté essentielle, elle n’est pas une liberté fondamentale. Toutefois, si on s’en tient à ces deux
critères, il semble difficile d’expliquer pourquoi le droit à l’emploi n’est pas une liberté fondamen-
tale. Il faudrait se contenter, au mieux, d’une explication instrumentale : la Chambre sociale
refuse de considérer que le droit à l’emploi est une liberté fondamentale afin de ne pas créer de
dissonance jurisprudentielle. Une telle explication implique par contre de rendre le raisonnement
de la Cour de cassation tributaire de celui du Conseil d’État et du Conseil constitutionnel. Pour
éviter une telle conclusion, il apparaît qu’un troisième critère est nécessaire afin de rationaliser
au mieux la démarche de la Cour de cassation. Ainsi, la valeur supra-législative et le caractère
essentiel du droit ou de la liberté en question ne sont pas suffisants pour qualifier un droit ou
une liberté de fondamental, il faut encore que ce droit ou cette liberté soit suffisamment précis
pour être invocable. La notion de liberté fondamentale de la Chambre sociale se rapprocherait
alors de celle du Conseil d’État en matière de référé liberté32 même si similarité ne signifie pas
identité. Pour le Conseil d’État, en effet, la liberté en question doit avoir une valeur
30. « Le principe de non-discrimination en raison de l’âge ne constitue pas une liberté fondamentale consacrée par le préam-
bule de la Constitution du 27 octobre 1946 ni par la Constitution du 4 octobre 1958 ». Cass. soc. 15 nov. 2017, nº 16-14281.
31. Elle aurait aussi pu s’appuyer sur l’article 11 de la DDHC et la décision du Conseil constitutionnel du 20 janvier 2005 qui
consacre la valeur constitutionnelle du droit à un procès équitable (CC, 20 janvier 2005, nº 2004-510 DC, Loi relative aux compé-
tences du tribunal d’instance, de la juridiction de proximité et du tribunal de grande instance).
32. G. GLÉNARD, « Les critères d’indentification d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice adminis-
trative », AJDA 2003, p. 2008 et s.
904
Les libertés économiques et les droits sociaux
supra-décrétale33, avoir un objet éminemment important et être suffisamment précis pour être invo-
cable, c’est-à-dire ne pas être une simple déclaration d’intention34.
33. « Peut être qualifié de fondamental au sens de l’article L. 521-2, soutient-elle, un droit ou une liberté consacré par la Consti-
tution, au premier chef, voire une Convention internationale, une loi ou un principe général du droit ». I. DE SILVA, concl. sur CE,
Sect., 30 octobre 2001, Tliba, RFDA 2002, p. 329 et s. Ce critère formel n’est pas très contraignant, ce qui fait dire à GLÉNARD
qu’en pratique, « le juge administratif dispose d’une marge d’appréciation quasiment illimitée ». G. GLÉNARD, « Les critères
d’indentification d’une liberté fondamentale au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative », op. cit.
34. « C’est notamment en fonction de la formulation de la règle que vous pourrez vous déterminer. Lorsque le droit est formulé
en termes très généraux, ou implique une obligation de l’État dont on cerne difficilement les contours ou encore s’apparente à
une déclaration d’intention [...], il est fort improbable que vous puissiez reconnaître l’existence d’une atteinte grave et person-
nelle à celui-ci ». I. DE SILVA, concl. sur CE, Sect., 30 octobre 2001, Tliba, op. cit.
905
COURS
collection
collection
COURS collection
COURS
LMD
S
Droits fondamentaux LMD
et libertés publiques 2018 Collection dirigée par Bernard Beignier
Droits
Ce cours, à jour au 1er août 2018, rassemble l’essentiel de ce qu’il faut savoir sur les droits
R
de l’homme, de leur invention à leur protection juridique actuelle. Il couvre l’ensemble :
– des sources des droits : civil, pénal, international, européens, constitutionnel,
fondamentaux et
administratif ;
– des aspects de chaque droit ou liberté : historique, textes, jurisprudence, débats ;
– des développements relatifs aux enjeux de sociétés : données personnelles, garde à
libertés publiques
vue, biométrie, internet, vie privée, étrangers, sectes, hospitalisations psychiatriques,
et libertés publiques
Droits fondamentaux
droit des médias, bioéthique, lanceurs d’alerte…
U
Le programme comprend :
– l’histoire des droits de l’homme ;
– les systèmes de protection des droits ; • Cours
– les droits fondamentaux : droit à la vie, à la mort, à l’intégrité physique, liberté sexuelle,
liberté d’expression, identité ;
• Thèmes de travaux dirigés
– les libertés publiques : liberté individuelle, opinion, religion, éducation, réunion,
association, syndicats, droits politiques, liberté d’aller et venir, droit de propriété,
5e édition
libertés économiques et droits sociaux ; Préface de
O
– les droits de catégories spécifiques : droits de l’enfant, des étrangers, des personnes
handicapées, des malades, des détenus.
Jean-Paul Costa
Il comporte un index des 2 100 jurisprudences citées, ainsi qu’un index des matières
et des auteurs.
X. Bioy
Ce cours s’adresse à tous ceux qui veulent connaître les droits de l’homme, plus
particulièrement les étudiants de L3 Droit, des Instituts d’études judiciaires (CRFPA,
C
ENM, métiers de la sécurité), de master Carrières judiciaires et master Droit public, des
Instituts d’études politiques et des préparations de concours administratifs (ENA, IRA,
Xavier Bioy
Juridictions administratives).
Il est issu de l’expérience d’enseignement dans ces formations de Xavier BIOY, professeur
agrégé de droit à l’Université Toulouse 1 Capitole, responsable de l’axe « Libertés »
de l’Institut Maurice Hauriou, codirecteur du master « Droit des libertés ».
www.lextenso-editions.fr
ISBN 978-2-275-06063-7 42 €