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ALBINA Rudy

AZANCOT Nathan

LES MÉCANISMES D’ÉVITEMENT


D’ENGAGEMENT DE LA RESPONSABILITÉ
PÉNALE DES PERSONNES MORALES

Sujet d’étude réalisé dans le cadre du cours


Droit pénal des entités

Séminaire de recherche enseigné par M. Jean-Claude PLANQUE


Master 2 Droit de la matière pénale

Année universitaire 2019-2020

1
« Force est de constater que les attitudes face au risque sont contrastées. De
l’impuissance à identifier, anticiper ou gérer le risque à la définition d’actions
pertinentes, le risques constitue une préoccupation majeure que l’entreprise doit
intégrer dans le quotidien de son activité. Le risque peut, en effet, inhiber son
développement ou constituer un stimulant de l’action ».
G. DEHARO.

« Les réformateurs du Code pénal avaient-ils, en créant la responsabilité pénale


des personnes morales, à l’image du roi Nabuchodonosor, rêvé d’une statue
immense à l’aspect terrible, censée faire trembler les nouveaux responsables
pénaux ? Ce qui est incontestable c’est que ce mécanisme de responsabilité est
affecté d’une faiblesse susceptible de le rendre aussi vulnérable, et donc inutile,
que le colosse du songe du roi babylonien »
J-C. PLANQUE

2
SOMMAIRE

PARTIE 1. LES MECANISMES D’ÉVITEMENT A PRIORI LE


DÉCLENCHEMENT DES POURSUITES.

SECTION 1. LA CARTOPGRAPHIE INTELLIGENTE DES RISQUES


PENAUX.

SECTION 2. LA DELEGATION ET DE LA SUBDELEGATION DE


POUVOIR.

PARTIE 2. LES MECANISMES D’EVITEMENT A POSTERIORI LE


DECLENCHEMENT DES POURSUITES.

SECTION 1. LA DISOLUTION PROVOQUÉE DE LA PERSONNE


MORALE.

SECTION 2. LA RESTRUCTURATION D’ENTREPRISE.

CONCLUSION

BIBLIOGRAPHIE

TABLE DES JURISPRUDENCES

ANNEXES

TABLE DES MATIÈRES.

3
PRINCIPALES ABRÉVIATIONS

AJ Pénal Actualité juridique pénal


al. Alinéa
art. Article
Ass. Plén. Assemblée plénière
Bull. civ. Bulletin des arrêts de la Cour de cassation, chambre civile
C. pén. Code pénal
C. Trav Code du travail
CA. Cour d’appel
Circ. Circulaire.
Circ. CRIM Circulaire émanent de la direction des affaires criminelles et des grâces.
Crim. Cour de cassation, chambre criminelle
Chron Chronique
Cons. Const. Conseil constitutionnel
D. Recueil Dalloz
DP. Recueil Dalloz Périodique
Dr. pénal Revue Droit pénal
Dr. Soc. Revue Droit social
éd. Éditions
Gaz. Pal Gazette du Palais
Ibid. Dans le même ouvrage
Id. Chez le même auteur
infra. ci-dessous (dans le texte)
JCP. P Juris
JCP.G La Semaine Juridique
Op. cit Ouvrage précédemment cité
Ord. Ordonnance
p. Page
pp. Pages
préc Précédemment vu
Rép. Pén. Répertoire de droit pénal et de procédure pénale Dalloz
Rev. Pénit Revue de droit pénitentiaire.
Rép. trav. Répertoire de droit du travail Dalloz
V. Voir

4
INTRODUCTION

Au cours des années 18401 nos sociétés ont vu s’opérer une transformation de notre
modèle économique. A cette époque notre société passe d’une croissance économique
essentiellement fondée sur l’agriculture et l’artisanat, à une production commerciale et
industrielle. Mais cette transformation2 n’est pas sans incidences profondes sur des domaines
connexes tels que, la vie des affaires, la concurrence, la sécurité au travail ou encore
l’environnement.3 Autant de domaines qu’aujourd’hui le droit pénal vient règlementer et le
cas échéant sanctionner, lorsqu’une valeur sociale est atteinte par le fait des êtres moraux. C’est
dire que la complexification de l’environnement économique a engendré la complexification
de l’environnement juridique des entreprises. A ce dernier titre le droit de l’environnement en
matière industrielle et le droit du travail en matière de santé et de sécurité sont des domaines
qui ont connu une effervescence législative incontestables.

S’agissant du droit de l’environnement, quelle que soit la nature de l’activité industrielle les
entreprises sont soumises au même régime de police environnementale relatif aux installations
classées pour la protection de l’environnement4. On constate, à leur endroit une règlementation
pénale foisonnante. A titre d’exemple on peut se reporter à une ordonnance du 11 janvier 2012,
5
permettant de transposer une directive de 2008 concernant la protection pénale de
l’environnement.6 Cette ordonnance prévoit, pour les personnes morales, toute une série de
peines effectives et dissuasives.

S’agissant du risque pénal en droit du travail. Le domaine de la santé et de la sécurité au travail


a connu un mouvement de pénalisation fort. Si il est rare que le juge condamne un employeur
à une peine de prison, on constate en revanche, une tendance de plus en plus nette à
l’augmentation des peines d’amende à l’endroit et du chef d’entreprise et de la personne morale.

1
J. KOMLOS, « Penser la révolution industrielle », Histoire, économie, et société, 1996, 15e année, n° 4, pp. 615-
629 ; J.-P. DEMOULE, « La révolution néolithique », Sciences Humaines, 2011/6, n° 227, p. 10.
2
K. POLANYI, « La Grande Transformation », Éditions Petite Bibliothèque Payo, n° 39, Paris, 1963.
3
B. ROBERT et G. SCHMEDER, « Division du travail, changement technique et croissance. Un retour à Adam
Smith », rev. française d'économie, volume 5, n°1, 1990, pp. 125-194.
4
J.-P. BOIVIN, « Les installations classées, traité pratique de droit de l’environnement industriel », Le Moniteur,
avr. 2018.
5
Ord. n° 2012-34 portant simplification, réforme et harmonisation des dispositions de police administrative et de
police judiciaire du code de l’environnement, 11 janv. 2012.
6
Cir. intermin., DGPR/DGCCRF/DGT/DGDDI du 25 juin 2013 relative aux contrôles des substances et produits
chimiques (BO du MEDDE n°13/2013 du 25 juill. 2013).

5
L’une des particularités du droit pénal du travail, c’est d’agir sur deux terrains, celui des
infractions spéciales prévues par le code du travail et celui des infractions dites générales
prévues par le code pénal.
S’agissant des premières, il s’agit du domaine de la santé et de la sécurité au travail. On trouve
des délits7 mais aussi des contraventions8. En principe, ces infractions sont de type formel c’est-
à-dire qu’elles sont constituées indépendamment de tout résultat, de tout dommage subi par les
salariés. Il n’est donc pas nécessaire qu’un accident du travail se produise pour que ces
infractions soient constituées. L’objectif du législateur est de prévenir et d’éviter les atteintes à
l’intégrité physique du salarié ainsi que les accidents du travail dans l’entreprise. S’agissant des
secondes, il s’agit principalement des atteintes involontaires à la vie ou à l’intégrité physique
des personnes mais pas seulement puisque le Code pénal sanctionne également le risque d’une
atteinte à l’intégrité physique. Le délit formel d’exposition d’autrui à un risque grave offre une
parfaite représentation de cette volonté affichée du législateur d’agir sur un terrain préventif au
sein même de l’entreprise9. C’est dire que le risque pénal en matière de droit du travail est
permanent et que la nécessité, pour les êtres moraux, de respecter la législation en matière de
santé et de sécurité n’a jamais semblé plus impérative10.

Partant de ces seuls constats, le risque que la personne morale s’expose à des poursuites pénales
est multiplié. MM. COLLARD et ROQUILLY considère ce risque à l’aune de qu’ils appellent
un « risque juridique ». 11 Ce risque juridique désigne le fait de s’exposer à des conséquences
légales du fait d’un défaut de conformité à la loi ou au règlement.
Pour une personne morale, en droit pénal, ce risque s’analyse d’abord à l’aune des peine prévues
par le Code pénal aux articles 131- 37 et suivant dudit Code; Qu’elles aient une nature
patrimoniale ou extra patrimoniale, ces peines sont nécessairement préjudiciables à la valeur de
l’entreprise.

Tout d’abord, au plan patrimonial on trouve la peine d’amende12. L’alinéa 1er de l’article 131-
38 du Code pénal dispose que le taux maximum de l’amende applicable aux personnes morales

7
Art. L. 4741-3 du C. trav ; Art. L. 4741-1 du C. trav.
8
Art. R.4741-1 du C. trav et R. 4741-3 du C. trav.
9
J-Y. CHEVALIER, « Chronique de Droit pénal et procédure pénale », rev. jur. Ouest, Naut pol, 1995, p. 406.
10
V. COHEN-DONSIMONI, « L’entreprise face à l’émergence du délit de risque causé à autrui », AJP 2016, p.
356.
11
C. COLLARD et C. ROQUILLY, « Les risques juridiques et leur cartographie : proposition de méthodologie »,
la revue des sciences de Gestion, Direction et Gestion n°263-264, p. 46
12
H. MATSOPOULOU, « Responsabilité pénale des personnes morales : Sanctions applicables aux personnes
morales », RDS 2019, pp. 147-2015.

6
est égal au quintuple de celui prévu pour les personnes physiques par la loi qui réprime
l’infraction. De surcroît, l‘Article 55 de la loi Perben II13 a inséré à l’alinéa 2 de cet article la
possibilité, lorsqu’aucune peine d’amende n’est prévue à l’encontre des personnes physiques,
d’infliger une amende d’un million d’euros.
A côté de ces peines patrimoniales, on trouve les peines d’affichage ou de diffusion de la
décision14. Cette sanction est très souvent prononcée dans les textes spéciaux parmi lesquelles
le marchandage, le travail dissimulé ou encore certaines infractions en matière
d’environnement15. On peut également citer l’exclusion des marchés publics pour une durée
définitive. Enfin, on peut faire un cas à part de la peine de dissolution qui visent les conditions
d’existences de la personne morale et que l’on assimile souvent à la mort des personnes
physiques. C’est dire que les conséquences pour la personne morale du fait de la réalisation de
ce risque juridique sont très importantes.

Si le risque d’une condamnation pénale implique une perte de valeur pour l’entreprise, ce risque
est d’autant plus présent que depuis le renouveau du code pénal en matière de responsabilité
pénale des personnes morales a été opéré un changement de paradigme. En effet, sous l’égide
du principe de spécialité, l’heure n’était déjà plus à l’impunité pénale des personnes morales,
mais depuis l’entrée en vigueur de la loi dite Perben II16qui est venu consacrer le principe de
généralité de la responsabilité pénale des personnes morales c’est encore plus vrai.
Pour autant c’est la loi Fauchon17 qui a véritablement propulser la responsabilité pénale de la
personne morale tout en allégeant la responsabilité pénale des personnes physiques18. C’est dire
que cette dernière loi a créé une véritable responsabilité pénale de substitution, en cas de faute
légère commise par l’auteur indirect personne physique.
A ce dernier titre on peut citer l’intérêt récent des sociétés mères en cas de défaillance de leurs
filiales. En effet, on peut citer l’apport de la loi du 12 juillet 2010. Cette loi dite, « Loi Grenelle
II 19» contient un apport singulier puisqu’elle instaure un cas de responsabilité pénale sui

13
L. n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant sur l’adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
14
Art. 131-39 du C. pén. ; L’affichage va consister en l’apposition de la décision dans un local déterminé pendant
un délai maximum de deux mois. La diffusion de la décision quant à elle peut s’entendre d’une publication fait
soit par la voie de la presse écrite ou du Journal officiel soit par un ou plusieurs services de communication au
public par voie électronique.
15
H. MATSOPOULOU, op.cit.
16
Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité.
17
Loi n°2000-647 du 10 juillet 2000 tendant à préciser la définition des délits non-intentionnels.
18
D. BRACH-THIEL et A. JACOBS, La responsabilité pénale de la personne morale – Enjeux et avenir,
l’Harmattan, p.13.
19
L. n° 2010-788 du 12 juillet 2010 portant engagement national pour l’environnement.

7
generis des sociétés mères en cas de dommage environnemental causé par une de ses filiales
placées en liquidation judiciaire. Elle s’inspire d’une célèbre affaire : l’affaire
« METALEUROP NORD » du 19 avril 200520 dans laquelle les juges ont, dans le silence des
textes autorisé la société mère à venir en aide financière à sa filiale placée en liquidation
judiciaire pour réparer à sa place le préjudice écologique qu’elle avait causé. L’Article 227 de
la loi Grenelle II est aujourd’hui repris dans le Code de commerce21 pour prévoir expressément
cette possibilité. Mais la loi Grenelle II va plus loin et institue une responsabilité pénale de plein
22
droit lorsqu’est établie une faute caractérisée de la société mère ayant contribué à
l’insuffisance d’actif de sa filiale.

Ainsi, quels sont les outils dont disposent les personnes morales pour éviter de voir engager
leur responsabilité pénale ?

Face à ce « risque pénale »23 , les personnes morales ont su redoubler d’ingéniosité pour mettre
en place des mécanismes d’évitement d’engagement de leur responsabilité pénale. Ces derniers
peuvent se définir comme - les stratégies juridiques, mises en place par les êtres moraux, pour
empêcher toute mise en œuvre de leur responsabilité pénale ,sur le fondement de l’article 121-
2 du Code pénal24. Strictement entendu, il s’agit d’éviter la commission d’infractions au sein
de l’entreprise. Mais dans une acception plus large il peut aussi s’agir d’éviter purement et
simplement une condamnation pénale alors qu’une infraction a effectivement été réalisée. Ces
mécanismes étant multiples, il convient d’opérer une première distinction entre les stratégies
juridiques mises en place avant le déclenchement de l’action publique (PARTIE 1) et les
stratégies juridique mises en place après le déclenchement de l’action publique (PARTIE 2).
Avant le déclenchement des poursuites, les stratégies juridiques procèdent d’action de
prévention visant à neutraliser les faits générateurs de responsabilité pénal des personnes
morales. Il s’agit de se prémunir contre le risque que des infractions pénales soient commises
dans l’entreprise. Après le déclenchement des poursuites, les stratégies juridiques procèdent de

20
Cass. com., 19 avr. 2005, n° 05-10.094.
21
Art. 223 -3-1, C. com.
22
M.-P. BLIN-FRANCHOMME, « Le droit économique au soutien de la protection de l’environnement : les
apports de la loi Grenelle 2 à la gouvernance des entreprises et des consommateurs », rev. jur. env., n° 35, 2010,
no 1, p. 129‑176.
23
Le risque juridique d’une mise en oeuvre de la responsabilité pénale.
24
Art. 121-2, C. pén.

8
véritables subterfuges visant à annihiler la mise en œuvre effective de la responsabilité pénale
par le juge judiciaire alors qu’une procédure pénale est en cours.

9
PARTIE 1 – LES MECANISMES D’ÉVITEMENT DE LA RESPONSABILITÉ
PÉNALE DES PERSONNES MORALES A PRIORI LE DÉCLENCHEMENT DES
POURSUITES.

L’approche stratégique du risque pénal dans les instances décisionnelles procède, nous
l’avons d’une logique moins juridique sinon managériale, voire d’une logique sui generis, au
confluant des deux précédentes25. En effet, certains n’hésitent pas à affirmer que ce n’est qu’au
prix d’une approche cognitive complète que les dirigeants et managers pourront dominer le
risque que des infractions soient commises par l’entreprise morale. Pourtant, les comportements
des entreprises face au risque ne sont pas homogènes. Certaines sont impuissantes à les
identifier, les anticiper ou les gérer quand d’autres sont d’ores et déjà capables de définir des
plans d’action. De nos jours, le risque incarne une préoccupation majeure que l’entreprise doit
assimiler dans la vie quotidienne de son activité car celui-ci peut paralyser son développement
ou au contraire « constituer un stimulant de l’action26 ». Pour imager la versatilité des effets du
risque on peut reprendre la métaphore utilisée par le directeur juridique du Groupe Carrefour,
dans une contribution intitulée « De Forest Gump à Scapin27 » dans laquelle il fait part de deux
approches du risque par les entreprises : La première est assimilable à l’attitude de Scapin qui
anticipe toujours le pire pour n’avoir que de bonnes surprises. La seconde est assimilable à
l’attitude de Forest Gump quand il ouvre sa boîte de chocolats : « On ne sait jamais sur quoi on
va tomber ». On voit bien ici l’image d’une entreprise soumise à l’irrésistibilité de l’aléa
juridique que peut constituer le risque pénal. Il semble donc qu’une démarche de rationalisation
de l’aléa soit la bienvenue au sein des entreprises car elle pourrait bien venir pallier la
survenance du risque pénal. Il s’agira d’abord d’étudier la cartographie intelligente des risques
(SECTION 1) en tant que stratégie de recueil et d’exploitation d’une information pertinente sur
le risque pénal. Ensuite, il s’agira de d’observer la gestion du risque pénal peut être effective à
l’aune d’une approche renouvelée de la délégation et de la subdélégation de pouvoir (Section
2)

25
LASCOUMES Pierre, « La formalisation juridique du risque industriel en matière de protection de
l’environnement », Sociologie du travail, 31, 1989, no 3, p. 318
26
Ibid.
27
Alain. GAUVIN « De Forest Gump à Scapin, la gestion du risque pénal par les directions juridiques des
multinationales », Actualité juridique pénal, 2012, p. 23

10
SECTION 1 – LA CARTOGRAPHIE INTELLIGENTE DES RISQUES PENAUX.

Certains auteurs n’ont pas hésité à considérer que le droit ne parvient pas à décourager
mais surtout à prévenir les atteintes à la législation pénale du travail ou encore à
28
l’environnement . On assiste aujourd’hui à une perte de terrain de la prévention pénal sur
un objet aussi particulier que le risque : Non parce que ce risque n’est pas connu, la preuve en
est qu’il existe une importante règlementation de celui-ci mais bien parce qu’il devient difficile
pour les entreprises et notamment pour le secteur industriel de les gérer et surtout de prévenir
leur survenance.

En outre, le durcissement dans la réglementation- notamment pénale- du secteur industriel et la


multiplication des audits manifeste la nécessité, pour les entreprises, de se mettre en conformité
avec une règlementation dont elles ne maitrisent pas toujours le contenu technique et qui,
conséquemment, les mets dans une position d’impuissance face à la prévention de ce risque.

Heureusement, il semblerait qu’une nouvelle voie s’ouvre au travers le prisme d’une culture du
risque dans l’entreprise. Elle repose sur la mise en œuvre coordonnées de moyens juridiques
spécifiques dans des conditions matérielles adéquates. C’est dire que ce mécanisme assure une
collaboration étroite entre les juristes et les dirigeants sociaux. Elle a pour but de satisfaire à un
objectif de prévention du risque juridique qui soit optimale.

Le concept « d’intelligence juridique29 » s’inscrit dans une telle approche stratégique. Ce


concept, tel que théorisé par M le professeur Bernard WARSUFELD a pour point d’encrage la
combinaison d’un accès optimal à l’information d’une part et son exploitation d’autre part.

La cartographie des risques juridiques s’est rapidement imposée comme « une étape
préparatoire importante aux décisions de maîtrise des risques30. » ou encore comme « un
élément clé de la méthodologie de leur gestion »31

28
M.-B. LAHORGUE, « La prévention des risques industriels à l’épreuve du droit pénal », rev. jur. env.,
2014/HSO1, volume 39, pp 129- 146.
29
B. WARSUFELD, « L’intelligence juridique : une nouvelle approche pour les praticiens du droit », dossier
spécial Le Monde du Droit, 15 avr. 2010, n° 43.
30
AMRAE, La cartographie, un outil de gestion des risques, Economica, Paris, 1996, 226.p
31
F. VERDUN., « Cartographie des risques RH », Les cahiers du DRH, N°169, oct. 2010, pp. 19-27

11
La cartographie des risques procède selon MM. COLLARD et ROQUILLY32 d’une double
démarche : « La première consiste à analyser chaque maillon de la chaîne afin d’identifier les
éventuels risques juridiques pour ensuite évaluer la valeur susceptible d’être détruite ; la
seconde, à l’inverse, prend pour point de départ la valeur potentiellement détruite, pour ensuite
remonter la chaîne de valeur en vue de déterminer quels risques juridiques pourraient être en
être la cause. »

Une pratique de plus en plus usitée par les entreprises et qui témoigne d’une démarche active
et pour le moins intelligente des instances décisionnelles dans l’appréhension de ce risque, c’est
l’audit pénal. L’intérêt de cette pratique est de vérifier la conformité d’une entreprise avec la
règlementation en vigueur.
On comprend bien l’intérêt subsidiaire d’une telle démarche devant un juge car la seule
circonstance d’un audit constitue un élément de preuve et conséquemment un moyen de défense
attestant la bonne foi de l’exploitant pour souligner le caractère non intentionnel de l’infraction
ou encore l’absence de négligence dans le respect et le suivi de la règlementation. Néanmoins
cet intérêt est subsidiaire car utile seulement a postériori l’échec de l’entreprise dans la
neutralisation de ce risque.

S’agissant de l’intérêt premier qu’augure la démarche d’audit, on peut citer un exemple d’audit
environnemental intelligent développer dans les travaux de M. Benabdeli33 Khéloufi, qui selon
ce dernier constitue « un outil de base déterminant pour la protection de l’environnement en
milieu industriel ». Néanmoins il convient de rappeler que la démarche concrète qu’il propose
dans ses travaux s’applique essentiellement pour les pays émergents du Maghreb à l’époque où
il écrit (année 2008). Il sera toutefois intéressant de constater que sa réflexion s’insère dans
une démarche de prévention des risques industriels qui elle-même s’inscrit dans une dynamique
de développement durable. Pour autant et abstraction faite de ces circonstances particulières,
son approche du risque industriel à l’aune d’un audit environnemental intelligent conserve toute
sa pertinence lorsqu’on s’attèle à l’étude d’une approche du risque en général car elle traduit

32
C. COLLARD et C. ROQUILLY, « Les risques juridiques et leur cartographie : proposition de méthodologie »,
la revue des sciences de Gestion, Direction et Gestion n°263-264, p. 46
33
K., BENABDELI, Apport de la politique environnementale à l’amélioration du risque industriel, 1ère journée
nationale sur la sécurité industrielle et la gestion des risques majeurs 26-27 mars 2008 et K. BENABDELI et D.
HARRACHE, « Quels indicateurs du développement durable en milieu industriel pour conforter la gestion du
risque ? », Vie sciences de l’entreprise, n° 179-180, 2008, no 2, p. 9-21.

12
parfaitement la volonté de faire de la gestion du risque un outil et non plus une circonstance
subie par les opérateurs économiques.

Cet audit recoupe : Une description de la structure c’est-à-dire sa localisation, l’occupation de


l’espace et l’agencement des installations, l’organisation des ateliers et des ressources
humaines. Un diagnostic des installations c’est-à-dire concrètement l’identification et
l’évaluation des nuisances à toutes les étapes de leur fonctionnement. Un bilan des déchets
quantitatif soit l’évaluation qualitative et quantitative de tous les types de déchets (bilan de
consommation, condition de gestion des déchets, entrée et sortie). Des mesures de « réduction
des nuisances » au niveau du processus de production, des équipements et installations, des
matières premières et des déchets, de la consommation en énergie et en eau). Enfin, la dernière
étape de cet audit comprend un volet formation du personnel qui doit coïncider avec le retour
d’expériences et la sensibilisation du personnel en interne.

Toutefois, l’audit seul apparaîtrait comme manifestement insuffisant car une cartographie des
risques ne donne pas en soi les moyens aux entreprises pour agir et prévenir le risque. En effet,
l’audit permet seulement d’identifier les risques juridiques visés dans les textes et au mieux une
mise en conformité au moment T. Seul, il manque d’efficacité et doit, dans une nouvelle
approche de ce risque par la gouvernance d’entreprise, être seulement perçu comme la première
étape d’un processus plus dynamique et coordonné faisant intervenir d’autres outils à l’image
d’un véritable système. Ce processus semble avoir été conceptualisé dans la notion
d’intelligence juridique34.

Tout droit héritée de celle d’intelligence économique, l’intelligence juridique est définie par le
professeur Bertrand Warsufeld comme « l’ensemble des techniques et des moyens permettant
à un acteur public ou privé de connaître l’environnement juridique dont il est tributaire, d’en
identifier les risques et les opportunités potentielles, d’agir sur son évolution et de disposer des
informations et des instruments juridiques aptes à réaliser ses objectifs stratégiques35. »

Il distingue plusieurs moyens et techniques permettant de connaître cet environnement


juridique. Tout d’abord, on trouve la veille législative et règlementaire. Celle-ci doit être
performante et doit permettre d’identifier la règle applicable à l’entreprise. In concreto, trouve

34
B . WARSUFELD, Op. cit
35
B. WARSUFEL, « L’intelligence juridique, complément nécessaire de l’intelligence économique : à quoi sert
l’intelligence économique ? », rev. de l’association de Sciences-PO, Rue Saint-Guillaume, n° 162, mars-avril
2011, p. 26.

13
cette technique très couramment dans les grandes entreprises. C’est dire que chacun des juristes
d’entreprise affiliés à un pôle particulier du service juridique d’une entreprise s’adonne à
surveiller l’évolution d’une règlementation relative à un risque en particulier par lequel
l’entreprise/industrie est concerné. Cette démarche est à l’image de l’audit pénal un préalable
nécessaire à toute autre action tendant à la prévention des risques : il s’agit avant tout de
recueillir de l’information en amont.

En outre, la connaissance de l’environnement juridique demeure perfectible en l’absence de ce


que le professeur Bernard Warsufeld appelle la maîtrise technique de la règlementation et
l’appréciation de son degré d’exigence eu égard à la hiérarchie des normes : Cette exigence
renvoie immédiatement aux écueils rencontrés dans l’interprétation des textes. En effet, la
rédaction de la règlementation est souvent lacunaire et imprécise. Dans les deux démarches,
nous sommes toujours dans le recueil d’information. Ainsi, cette étape vient optimiser la
connaissance de l’environnement juridique. Toutefois on note que cette deuxième étape
(maîtrise du contenu technique de la règlementation eu égard à la hiérarchie des normes) permet
à l’entreprise d’investir une prévention ciblée et par conséquent plus performante.

La mise en perspective économique, technique et sociale des efforts à mettre en œuvre. Elle
permettra à l’entreprise de se positionner sur son degré de conformité et de situer les efforts
qu’elle doit déployer pour l’atteindre. L’effort technique correspond aux moyens matériels dans
lesquels l’entreprise devra investir. L’effort social s’intéresse à la limitation des effets de
l’activité sur la société et notamment sur l’environnement que l’entreprise devra mettre en
œuvre respectivement à la politique environnementale que l’entreprise s’est donnée. Enfin,
l’effort financier correspond aux dépenses qu’engendrera la mise en conformité de l’entreprise.
Ici, l’entreprise ne se situe plus dans le recueil purement formel et technique de l’information,
mais consiste en une étude d’impact du coût de la conformité. Son but est de cibler l’ensemble
des moyens à mettre en œuvre pour, in fine, se trouver en conformité avec la réglementation.

L’avant dernière démarche préconisée par le professeur B. Warsufeld est d’effectuer une
stratégie juridique en vue de faire coïncider la règle de l’activité à l’entreprise. Cette démarche
est finalement l’ultime démarche venant parachever le travail de collecte d’information et de
mise en perspective. Elle a pour objectif la mise en conformité de l’entreprise avec la
règlementation en vigueur avant toute poursuite, toute survenance d’un risque ou toute gestion
de crise.

14
Enfin et allant au-delà de l’impératif de mise en conformité, le professeur B. Asfeld, y a intégré
l’analyse des risques pris en cas d’impossibilité- notamment financière- à effectuer la mise en
conformité. Ici, il s’agit notamment pour l’entreprise d’évaluer les risques juridiques (risques
de condamnations judiciaires et administratives) et particulièrement les risques financiers
inhérents à ces risques juridiques.

Cette approche renouvelée de l’aléa dans l’entreprise est une très bonne façon de gérer les
risques juridiques du secteur économique de l’industrie non seulement eu égard à ses
conséquences dommageables pour l’environnement mais également eu égard à la gestion des
risques en matière de santé et de sécurité.

Pourtant et à ce dernier titre, il convient de citer un second outil, beaucoup plus traditionnel
mais que l’on peut revisiter pour l’appliquer dans une logique de neutralisation du risque pénale
dans l’entreprise à savoir : la délégation de pouvoir.

SECTION 2 – LA DÉLÉGATION DE POUVOIR ET LA SUBDÉLÉGATION DE


POUVOIR.

La délégation de pouvoir est l’acte par lequel une autorité dirigeante (assemblée générale,
conseil d’administration, bureau ou membre du bureau) – appelé le délégant- se dessaisit d’une
partie de ses pouvoirs au profit d’une autorité subordonnée (conseil d’administration,
administrateur, membre du bureau ou directeur salarié)- appelé le délégataire36.

Il est constant que la délégation de pouvoir procède d’une déconcentration des pouvoirs du chef
d’entreprise vers ses préposés. Elle fût admise pour la première fois par la chambre criminelle
dans un arrêt de principe du 28 juin 190237. Il est d’ailleurs intéressant de constater qu’elle est
intervenue pour la première fois dans le domaine de l’hygiène et de la sécurité avant de
s’étendre à d’autre domaine.

On sait que depuis une jurisprudence séculaire il incombe au chef d’entreprise de veiller au
respect de la règlementation- notamment pénale- au sein de son entreprise38. Pour autant, dans

36
B. GUILLAUME, « Délégation de pouvoir : l’outil de maîtrise des risques juridiques", juris associations, 2014,
n°491, p.26
37
Cass. crim., 28 juin 1902, Bull.crim, n° 237.
38
Cass. crim., 2 déc. 1882, Bull. crim. 1882, n° 265.

15
les grandes entreprises on comprend très bien qu’il puisse être difficile de parvenir à cet objectif.
La finalité de cette délégation de pouvoirs pour le chef d’entreprise est de déléguer tout ce qu’il
n’est pas en mesure de contrôler lui-même. On comprend aussitôt la nécessité de procéder à
une délégation de pouvoir pour s’assurer le respect effectif, par la personne morale de la
règlementation de son activité- notamment pénale.

Ce faisant il s’agit de fonder l’utilité de la délégation pouvoir sur un critère quantitatif et non
seulement qualitatif. C’est dire que si, initialement la délégation de pouvoir avait pour objectif
affiché l’efficacité économique par la répartition des pouvoirs – pour ne pas dire par la division
du travail- elle n’en demeure pas moins un outil potentiel de rationalisation du risque juridique
dans l’entreprise. En effet, le contrôle de la règlementation ainsi dévolu à différents acteurs
extérieurs aux dirigeants, va permettre d’assurer une application effective de la loi.

En effet on pourrait très bien imaginer qu’une entreprise de petite taille qui a une activité
dangereuse pour la santé de ses salariés ou encore susceptible d’engendrer des conséquences
pour l’environnement au titre de pollutions (atmosphériques, des sols, de l’eau) puissent avoir
un intérêt direct à la délégation de pouvoir. De la même manière la pénalisation de l’employeur
à l’endroit de la santé et de la sécurité de ses salariés constitue un autre argument en faveur de
la déconcentration de ses pouvoirs, de sa responsabilité et in extenso de son devoir de gestion
du risque juridique.

Toutefois c’est un mécanisme fortement encadré puisqu’elle opère indéniablement un transfert


de responsabilité pénale du délégant vers sont délégataire. Il convient d’abord de s’assurer
qu’elle ne soit pas interdite notamment dans les statuts même de l’entreprise. Ensuite il est
indispensable, d’une part, que le déléguant dispose du/ des pouvoirs qu’il délègue.

La jurisprudence a pris soin de fixer les règles, les conditions et les effets de la délégation de
pouvoirs à travers différents arrêts. Le délégataire doit avoir accepté par le délégataire.39
L’acceptation n’est valable que si elle intervient en parfaite connaissance de cause et de façon
éclairée. Ainsi, les dirigeants doivent nécessairement informer leurs délégataires et cela de
manière précise et complète sur le contenu de celle-ci et ses effets40. Lorsqu’une délégation
intervient en matière de santé et de sécurité, la jurisprudence estime que le délégataire doit avoir
les connaissances techniques nécessaires pour faire appliquer, par le personnel placé sous ses

39
Cass. crim., 23 mai 2007, n°06-87.590, Bull. crim n°138
40
Cass. crim., 30 avr. 2002, n°01-84.405 ; Cass. crim., 08 oct. 2002, n°02-82.752.

16
ordres, les prescriptions en matière de santé et de sécurité41 Il y a forte à penser que cela vaut
également en matière d’ingénierie lorsqu’il s’agit de mettre en conformité des installations
industrielles avec la règlementation. En effet, la jurisprudence exige que le délégataire ait les
connaissances juridiques suffisante pour assurer sa mission. C’est ainsi que la jurisprudence a
pu considérer que ce n’était pas le cas d’un chef d’équipe qui appréciait simplement les mesures
de sécurité en fonction de son expérience et non en référence au texte législatif ou
règlementaire42. Ainsi, appert la nécessité pour les dirigeants de bien former leurs délégataires
sur le risque juridique qu’ils seront amenés à endiguer. A ce titre, les dirigeants devront pouvoir
vérifier la compétence du salarié avant de le désigner comme délégataire. Enfin, le délégataire
doit disposer du pouvoir de commandement afin d’obtenir des salariés placés sous sa
surveillance qu’ils respectent la règlementation.43 Ce faisant il doit être investi d’une fraction
du pouvoir de direction.

Pour aller plus loin dans cette logique de gestion du risque juridique, on pourrait considérer le
principe de la délégation de pouvoir, en tant que mode de gestion du risque juridique à l’aune
de la subdélégation de pouvoirs. En effet, ni la jurisprudence, ni le législateur est venu limiter
le champ matériel de la délégation44 ou subdélégation de sorte qu’on pourrait avoir un recours
à ce mécanisme de manière très large. La seule condition étant que le dirigeant doit avoir
autorisé une telle subdélégation45

Nous venons de voir qu’une approche managériale du risque pénal dans l’entreprise augure de
formidables mécanismes d’évitement de la responsabilité pénale des personnes morales a priori
le déclenchement de l’action publique. En effet, l’identification du risque et son anticipation
permette à l’entreprise de prévenir la commission d’infractions dans l’entreprise. De surcroît
l’approche renouvelée du mécanisme de la délégation de pouvoir et de la subdélégation de
pouvoir permet d’empêcher la survenance de ce risque en confiant à différents acteurs
personnes physique la tâche d’en assurer la surveillance, la gestion. Pour autant, une fois que
ce risque pénal s’est réalisé, que des poursuites sont déclenchées, alors il existe d’autres

41
Cass. crim., 21 oct. 1975, bull. Crim, n°222.
42
Cass. crim, 28 fevr. 1983, n°82-90.364
43
Cass. Crim., 29 oct. 1985, n°84-95.559 ; Crim., 8 mars, n°87-83.883.
44
N. CATALA, « De la responsabilité pénale des chefs d’entreprise en matière d’hygiène et de sécurité du travail,
JCP éd. E 1976, II, 12010.
45
Cass. crim. 8 février 1983, n)82-92-364, Bull.crim, n°48 ; Cass. crim.31 janv. 1984, Fouassier, inédit.

17
mécanismes d’évitement d’engagement de la responsabilité pénale des personnes morales qui
semblent avoir été trouvés dans la faiblesse même du texte de l’article 121-2 du Code pénal

18
PARTIE 2 – DES MECANISMES D’EVITEMENT A POSTERIORI LE
DECLENCHEMENT DE L’ACTION PUBLIQUE.

Les mécanismes d’évitements d’engagement de la responsabilité des personnes morales


à postériori le déclenchement de l’action publique, trouvent leur origine dans les conditions
propres à la mise en œuvre de la responsabilité pénale des personnes morales de l’article 121-
2 du Code pénal. En effet, il est constant que pour engager la responsabilité pénale d’une entité
ayant la personnalité morale, celle-ci doit exister. Cette existence correspondant avec l’acte de
naissance de celle-ci c’est-à-dire et pour exemple l’accomplissement des formalités au registre
du commerce et des sociétés pour les sociétés commerciales et la déclaration à la préfecture
pour les associations. En l’absence l’accomplissement de telles formalités, la personne morale
n’existe pas, elle n’a pas de personnalité juridique de sorte que le mécanisme d’engagement de
la responsabilité pénale des personnes morales de la lettre de l’article 121-2 du Code pénal est
inopérant. Dès lors on trouve des stratégies de la part des entités ayant la personnalité morale
pour échapper à leur responsabilité pénale ; stratégies que l’on peut confondre avec de
véritables mécanismes d’évitement d’engagement de la responsabilité pénale des personnes
morales à l’aune d’une disparition de la personnalité morale par la dissolution (I). Puis il
existera des mécanismes d’évitements mais qui eux auront également pour but de causer la
disparition de la personnalité morale par une confusion ou une séparation de patrimoine au
travers d’une restructuration d’entreprise. (II)

SECTION 1. – LA DISSOLUTION PROVOQUEE DE LA PERSONNE MORALE.

Il est constant que la lettre de l’article 121-2 du Code pénal subordonne la mise en œuvre
de la responsabilité des personnes morales à l’existence de leur personnalité juridique, mais
c’est aussi et surtout une brèche que les personnes morales peuvent s’approprier pour organiser
l’évitement de leur responsabilité pénale par une dissolution.

En effet, la dissolution de la personne morale est assimilable au décès ou au suicide de la


personne physique. Ainsi et eu égard à ses effets, nous serions tentés d’assimiler les effets de
la dissolution de la personne morale aux effets du décès de la personne physique sur l’action
publique. En effet, le décès d’une personne physique met un terme à l’action publique puisqu’il
s’agit là d’une cause d’extinction de l’action publique au sens de l’article 6 du Code de

19
procédure pénale.46 C’est dire que la dissolution de la personnalité juridique permettrait
d’éviter les poursuites pénales.

Il existe plusieurs causes de dissolution de droit commun, dont l’arrivée du terme, la réalisation
ou l’extinction de l’objet social, l’annulation du contrat de société, la dissolution anticipée
décidée par les associés ou encore la dissolution judiciaire pour juste motif, notamment pour
mésentente entre associés paralysant le fonctionnement de la société47.

La dissolution d’une société doit nécessairement être publiée, cette dissolution n’a d’effet à
l’égard des tiers qu’après sa publication cependant ce n’est pas l’accomplissement des
formalités de publicité qui met fin à la personnalité morale de la société mais seulement la
clôture de liquidation. En tout état de cause la dissolution provoque la disparition de la
personnalité juridique.

On comprend que, dans une perspective stratégique, celle des deux qui intéressera celui qui
souhaite faire échapper son entreprise aux poursuites pénales est la dissolution provoquée48. Il
s’agit d’un un mécanisme que nous retrouvons dans la lettre de l’article 1844-7 du Code civil49,
dans ce cas précis : la société prend fin par la dissolution anticipée décidée par les associés. Il
s’agit de celle organisée par ceux qui ont décidé de créer la personne morale soit de manière
très large les dirigeants et/ou leurs associés.

Néanmoins on constate qu’elle requiert une procédure fastidieuse la rendant peu effective et
courante en pratique. En effet, la jurisprudence a reconnu qu’il fallait, pour que cette dissolution
soit opposable aux tiers, qu’elle ait fait l’objet d’une publication au Registre du Commerce et
des sociétés (RCS)50.

En tout état de cause, l’effectivité de la dissolution est relative dans le temps selon qu’elle
intervient avant ou après la décision de condamnation. Dans le cas de la décision intervenant
de façon postérieure à la dissolution, cela ne semble rien changer puisque l’article 6 du Code

46
L. n° 57-1426 du 31 décembre 1957 portant institution d'un code de procédure pénale, JORF 19 janv. 1958.
47
V. MAGNIER, « Droit des sociétés » Droit privé, 7e éd., 2015.
48
J.-C. PLANQUE, « Sociétés - Comment limiter le recours aux techniques d'évitement de la responsabilité́ pénale
des personnes morales ? », droit pén., n° 11, étude 25, nov. 2018.
49
L. n° 78-9 du 4 janvier 1978 modifiant le titre IX du livre III du code civil.
50
Cass. com., 15 nov. 2017, n° 16-19425.

20
de procédure pénale précise que la dissolution n’est pas une cause d’extinction de l’action
publique, donc on peut toujours poursuivre pendant la liquidation, c’est un principe qui a
d’ailleurs largement été reconnu en jurisprudence.51 En revanche, on peut relever que l’article
L.480-6 du Code de l’urbanisme52 évoque « l’extinction de l’action publique résultant du décès
du prévenu, de la dissolution de la personne morale mise en cause ou de l’amnistie ». La
difficulté provenant du fait que plusieurs textes législatifs prévoient que la dissolution d’une
personne morale n’entraîne pas immédiatement la disparition de la personnalité qui survit pour
les besoins de la liquidation.

La dissolution de la personne morale, menée après liquidation va permettre d’empêcher


l’exécution de peines au sens de l’article 133-1 du Code pénal53 disposant que :

« Le décès du condamné ou la dissolution de la personne morale, sauf dans le cas où la


dissolution est prononcée par la juridiction pénale, la grâce et l'amnistie, empêchent ou
arrêtent l'exécution de la peine. Toutefois, il peut être procédé au recouvrement de l'amende et
des frais de justice ainsi qu'à l'exécution de la confiscation après le décès du condamné ou
après la dissolution de la personne morale jusqu'à la clôture des opérations de liquidation. »

Les énonciations de cet article expriment des solutions qui existaient déjà dans notre
législation54, cela représentait notamment la traduction de principe tels que la personnalité des
peines, corolaire du principe de responsabilité personnelle.
En effet, le principe de la responsabilité personnelle impose de constater l’extinction de l’action
publique en cas de décès du prévenu,55 de ce fait dans la même logique il existerait une
extinction de l’action publique en cas de dissolution de la personne morale.56 Cependant et
comme nous l’avons démontré, le droit positif ne retient pas ce type de logique au profit de la
continuité des poursuites pendant la période de liquidation.

Cependant, la règle à la lettre de l’article 133-1 du Code pénal ne concerne absolument pas le
cas d’une dissolution qui ne serait pas intervenue par décision des associés mais par décisions

51
Cass. com., 13 févr. 1996, Bull. crim. n° 52.
52
D. n° 73-1022 1973-11-08, JORF 13 nov. 1973.
53
L. n° 92-683 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal.
54
R. MERLE, « Traité de droit criminel », 6ème édition, 1984, 1068 p.
55
Cons. Constit., 16 juin 1999, n° 99-411.
56
Cass. Crim., 3 fév. 1965, Bull. Crim., n°32.

21
judiciaires. Dans ce cas toutes les peines se poursuivent au sens de l’article 131-39 1° du Code
pénal.57 Et c’est ce que l’on va d’ailleurs retrouver en jurisprudence où aucune disposition
n’interdit de prononcer une peine d’amende à l’encontre d’une personne morale placée en
liquidation judiciaire, tant qu’elle n’est pas dissoute.58 A noter que le terme de « dissolution »
n’est pas forcément le plus approprié dans le sens où la clôture de liquidation parait plus précis
en ce qu’elle marque la fin d’un processus susceptible de durer un certain temps.59

Or, cela ne présente que très peu d’intérêt dans notre cas puisque la principale peine que l’on
va chercher à éviter, s’agit bien évidemment de l’amende qui est le principal risque financier
dans le cas du soulèvement de sa responsabilité pénale.

La liquidation est une période très particulière dans la disparition de la personne morale, elle
permet de régler le passif et convertis les éléments d’actif en argent afin de pouvoir procéder
au partage entre associés d’actifs net subsistant.60

La lettre de l’article 133-1 du Code pénal met en parallèle le décès de la personne physique et
la dissolution ce qui semble se rapprocher d’un certain « terme de l’existence sociale »61, on
pourrait penser qu’il existe une véritable limite chronologique sur les actes effectués et les
besoins de la liquidation.

Il est à noter que la dissolution de la société ou du groupement d’intérêt économique n’entraine


pas une disparition brutale du groupement. En effet, elle ouvre simplement une période de
liquidation.62 Il s’agit d’un genre de personnalité réduite car elle est nécessaire à la vie passé.63
De ce fait on aurait pu penser que le droit des sociétés ne prévoyait que la survie de la
personnalité morale dans le cadre des besoins de la liquidation, ce qui ne supposerait ainsi en
aucun cas le fait d’englober la commission d’infraction, ce qui est totalement faux, puisque les
éventuelles amendes font également parties de l’accomplissement de ces actes expliquant que
la société reste dotée de la personnalité morale même après dissolution.64

57
L. n° 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance.
58
Cass. Crim., 7 mai 2018 n° 17-82.887.
59
J.-Y. MARECHAL, « Responsabilité pénale des personnes morales », 2019
60
P. CONTE, « Synthèse Droit pénal des sociétés », 2019
61
Guyon op. cit n°197
62
P. MERLE Droit commercial : sociétés commerciales 2019
63
GAVALDA « La personnalité morale des sociétés en voie de liquidation » 1961 p.253
64
I URBAN - PARLEANI « Les limites chronologies à la mise en jeu de la responsabilité pénale des personnes
morales » 1993

22
Ce qui reste largement explicable par la nature de la tâche qu’est la liquidation, l’amende restera
considérée comme une « dette sociale » à l’égard de l’Etat qui subira le même sort que le reste
des créanciers de la société en liquidation. De ce fait, on retiendra en vertu de l’article 1844-3
du Code civil65 que la personnalité juridique subsiste bel et bien pour la liquidation.

Il découle donc de cette logique un principe largement repris en jurisprudence selon lequel il
n’est absolument pas interdit de poursuivre une société après sa dissolution sur une procédure
pénale engagée antérieurement contre la personne morale.66 Ce mécanisme d’évitement est
donc largement insuffisant, il ne permet pas d’éviter un quelconque soulèvement de
responsabilité, à l’inverse, des techniques de restructuration d’entreprise qui permettent un
évitement plus effective de l’engament de la responsabilité pénale des personnes morales.

SECTION 2 - LA RESTRUCTURATION D’ENTREPRISE

Là où le cas d’une dissolution provoquée par les décisions d’associés avait le défaut temporel
de la période de liquidation qui empêchait l’extinction de l’action publique par le retardement
de la disparition de la personnalité juridique, les techniques de restructuration d’entreprise, ont
quant à elle, l’avantage de ne pas ouvrir de période de liquidation67. C’est pourquoi on assiste
à un mécanisme bien plus enclin à éviter le soulèvement de la responsabilité pénale, cependant,
cela mène à une certaine lutte à l’encontre de ces disparitions frauduleuses.

Dans le cas de restructuration d’entreprise, on retrouve le cas de l’article L.236-1 du Code de


commerce qui vient définir juridiquement ces mécanismes comme « Une ou plusieurs sociétés
peuvent, par voie de fusion, transmettre leur patrimoine à une société existante ou à une
nouvelle société qu'elles constituent. Une société peut aussi, par voie de scission, transmettre
son patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou à plusieurs sociétés nouvelles ». 68

A travers cet article on distinguera trois types de restructurations. On distinguera le cas d’une
fusion simple au sens « stricto sensu » qui consistera à mélanger deux sociétés pour n’en faire

65
Loi n° 78-9 du 4 janvier 1978 modifiant le titre IX du livre III du code civil
66
CA Nîmes 20 avril 2001 n°01/00332
67
JCP G. 13 mars 2012 doctrine 91 P.1
68
Loi n°66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales

23
qu’une, ce qui matériellement suppose la mise en commun de deux entreprises ou plus
conduisant à la création à la création d’une nouvelle entité.

Il existera également le cas d’une fusion acquisition qui en est une dérive supposant que l’on
va laisser subsister une des personnes morales et l'autre viendra se fondre dans la première.
Cela aura notamment pour effet de faire disparaitre sa personnalité morale pour ne laisser que
celle de la société absorbante.

La fusion acquisition a l’intérêt bien connu d’accroitre sa compétitivité et de provoquer une


augmentation de sa rentabilité en créant notamment une diversification du risque et réduction
des coûts grâce à une plus grande diversité de produits proposés qui complètent la gamme déjà
existante à moindres frais.

Pour procéder à cette fusion acquisition, il faut dans un premier temps passer par un audit sur
le passif et l’actif de la société absorbé, puis on passe à la nomination d’un commissaire à la
fusion (à l’exception des procédures de fusions simplifiée que l’on retrouve à l’article L.236-
11 du code de commerce), puis on dépose le projet de fusion au Registre du commerce et des
sociétés.69

Il convient de préciser que l’article L.236-4 du code de commerce70 dispose que la fusion prend
effet « soit à la date d’immatriculation au registre du commerce et des sociétés, en cas de
création d’une ou plusieurs sociétés nouvelles, de la nouvelle société ou de la dernière d’entre
elles ; soit à la date de la dernière assemblée générale ayant approuvé l’opération sauf si le
contrat prévoit que l’opération prend effet à une autre date. »

De ce fait, une condamnation définitive pourrait intervenir avant l’une de ces dates et s’il s’agit
d’une peine patrimoniale comme l’amende, celle-ci constituera une dette qui se transmettra
avec le patrimoine de la société absorbé.71

Tandis que la scission, est défini comme l'opération par laquelle une société transmet son
patrimoine à plusieurs sociétés existantes ou à plusieurs sociétés nouvelles. L'apport partiel

69
C. Gerschel – Cours de droit fiscal dispensé à l’Université d’Evry Val d’Essonne
70
Loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce
71
Cass. Crim. 14 oct. 2003 n° 02-86.376

24
d'actif consiste pour une société à apporter à une autre, nouvelle ou existante, une partie de ses
éléments d'actif.

Cette opération peut être conventionnellement soumise au régime des scissions. à l’inverse aura
pour objet de partager le patrimoine de la société́ scindée entre, au minimum, deux sociétés.72
De la même façon dans le cas présent, il s’agira cette fois de partager le patrimoine de la société
scindée entre au minimum deux sociétés qui auront été prévus à cet effet.73

Ainsi, l'opération donne lieu à l'établissement d'un projet de scission selon les mêmes modalités
que le projet de fusion. Comme la fusion, la scission est décidée dans les conditions requises
pour la modification des statuts et soumise à la ratification des assemblées spéciales
d'actionnaires.
La scission fait également l'objet d'un rapport écrit du conseil d'administration ou du directoire.
Les modalités d'information des actionnaires sont identiques à celles prévues en cas de fusion
au regard de l’article L.236-9 du code de commerce.74

Puis, lorsque la scission intervient au profit de sociétés nouvelles, chacune d'elles peut être
constituée sans autre apport que celui de la société scindée. Dans ce cas de figure, et si les
actions de chacune des sociétés nouvelles sont attribuées aux actionnaires de la société scindée
proportionnellement à leurs droits dans le capital de cette société, l'intervention d'un
commissaire à la scission n'a pas lieu et le conseil d'administration ou le directoire est dispensé
d'établir un rapport écrit. 75

Le projet de statuts des sociétés nouvelles est approuvé uniquement par l'assemblée générale
extraordinaire de la société scindée au regard de l’article L.236-17 du code de commerce. 76 Les
sociétés bénéficiaires des apports résultant de la scission sont débitrices solidaires des
obligataires et des créanciers non obligataires de la société scindée, au lieu et place de celle-ci,
sans que cette substitution emporte novation à leur égard conformément à l’art L.236-20 du
code de commerce.77

72
Dalloz Avocats – Fiches d’orientations « Scission et apport partiel d’actif » Juillet 2019
73
J.C PLANQUE « Sociétés - Comment limiter le recours aux techniques d'évitement de la responsabilité́ pénale
des personnes morales ? » 2018
74
Loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce
75
P. Yves-Chabert La figure de la scission partielle en droit français Rev. sociétés 2005. p.759
76
Loi n° 2003-7 du 3 janvier 2003 modifiant le livre VIII du code de commerce
77
Ibid.

25
Par exception à ce principe, il peut être stipulé que les sociétés issues de la scission ne seront
tenues que de la partie du passif de la société scindée mise à la charge respective et sans
solidarité entre elles. Dans ce cas, les créanciers non obligataires des sociétés participantes
peuvent former opposition à la scission dans les mêmes conditions qu'en cas de fusion.78

Bien que ces mécanismes revêtent une apparence différente, l’aspect juridique dans notre cas
reste le même puisqu’on assistera à la transmission ou à la division d’un patrimoine et se posera
finalement la question du statut de la responsabilité pénale si elle doit ou non être considérée
comme transmise dans le cas d’une transmission de patrimoine.

Puisqu’en matière civile, la société absorbante est considéré comme l’ayant cause de la société
dissoute, elle est considérée presque comme l’héritière de la personne morale « défunte », a ce
titre on estime que l’effet dévolutif du patrimoine la désigne comme un responsable de
substitution.79 Cependant, en matière pénale la logique est bien différente.

En effet, on retrouve à la lettre de l’article 236-3 du Code de commerce que la fusion ou la


scission doit entrainer la dissolution sans liquidation des sociétés qui disparaissent ce qui
implique l’extinction de l’action et donc par voie de conséquence l’arrêt pur et simple des
poursuites engagées contre cette dernière sans possibilité de se reporter sur la société
absorbante.80
Ainsi, cette prise de position relève de principes profondément ancrés dans notre système pénal
qui a causé certaines contradictions jurisprudentielles.

Le raisonnement est finalement très simple, comme énoncé précédemment l’article L.121-2 du
Code pénal permet de soulever la responsabilité pénale d’une personne morale au travers d’un
faisceau d’indices relevés par une infraction pénale commis par un organe ou un représentant
pour le compte de l’entreprise.81

78
B. Lecourt « Fusions et scissions de sociétés : transposition en droit français de la directive de simplification»
Rev. sociétés 2011. 654
79
P. Morvan, note. Cass. Crim. 20 juin 2000 Dr soc 2000 p 1151
80
Loi n° 2019-744 du 19 juillet 2019 de simplification, de clarification et d'actualisation du droit des sociétés
81
Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité

26
Cependant, dans le cas d’une restructuration d’entreprise comme une fusion absorption, la
question se pose finalement de savoir si une amende peut être infligée à la société absorbante
alors que les faits causés par l’amende étaient commis par la société absorbée avant la fusion et
l’amende déclarée après.
Puisqu’en effet, cela va très clairement à l’encontre de grands principes pénaux notamment
celui que l’on retrouve à la lettre de l’article L.121-1 du Code pénal82 disposant que « nul n’est
pénalement responsable que de son propre fait ».

Si l’on est responsable que de son propre fait, il serait donc logiquement impossible de se voir
responsable d’un fait qui a été commis par une personne morale qui était distincte lors de la
commission des faits. Cela poserait un très grave problème sur le plan temporel.
Cependant, le transfert universel du patrimoine de la société absorbée à l'absorbante pourrait
remettre en cause cette solution.
Et c’est pourtant précisément ce que la jurisprudence de la Haute Cour retenait, puisqu’en vertu
du principe de « personnalité » au regard de la responsabilité de la peine, la société absorbante
n'aurait donc pas à répondre des infractions commises pour le compte de la société absorbée. 83

De ce fait, et en toute logique, le juge ne saurait condamner la société absorbante à verser des
dommages et intérêts à une partie civile puisqu’on ne saurait imputer la faute en amont à la
société absorbante.84
Même le fond de l’article 236-3 du Code de commerce a un fondement jurisprudentiel puisqu’il
a été défini que la fusion faisant perdre son existence juridique à la société absorbée, l’action
publique devait de fait être éteinte à son égard.85

Donc, jusqu’ici la jurisprudence suivait un raisonnement relativement logique jusqu’à ce que


la Cour de Justice de l’Union européenne viennent remettre en question ce raisonnement.

En effet, selon elle, la fusion-absorption en entraînant la transmission à la société absorbante


de la responsabilité pénale de la société absorbée par l’obligation de payer une amende infligée
après la fusion pour des infractions commises par la société absorbée avant la fusion. 86

82
Loi n° 92-683 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal
83
Cass. Crim 20 juin 2000 Bull. Crim n° 237 p. 702 n° 99-86.742
84
Cass. Crim 23 avril 2013 Bull. Crim n° 12-83.244 n° 12-81.937
85
Cass Crim 9 septembre 2009 n°08-87312
86
CJUE 5 mars 2015 aff. 343/13, 5e ch., Modelo Continente Hipermercados SA

27
Il avait été estimé que les dispositions pénales portugaises ne répondait pas aux directives du
Conseil de l’Europe, notamment la directive 78/855/CEE87. En effet, au sens de cette directive
le patrimoine « actif » ainsi que le patrimoine « passif » revenait à prendre en compte le cas
d’une responsabilité pénale dans le « passif » du patrimoine de la société qui de ce fait était
transmis à la société absorbante.

Dans le cas présent, les juges européens avaient considéré que la société absorbante était
responsable pénalement pour les infractions commises par la société absorbée avant la
réalisation de la fusion absorption.88
Cette disposition étant donc tout à fait « contra legem », cela pose un véritablement problème
de transposition, puisque le droit pénal français suivait la même logique que le droit pénal
portugais.

Puis, la Cour de cassation a fini par répondre sur cette question et a par la même occasion
complètement écarté le raisonnement de la CJUE dans un arrêt rendu par la Cour de cassation
le 25 octobre 2016.89
Ce cas nous présentait la situation d’une société qui s’était pourvue en cassation sur le
fondement de la décision de la CJUE de 2015. Et c’est sur ce point que la Cour de cassation a
cassé l’arrêt estimant que « des poursuites pénales devaient être engagées à l’encontre de la
société absorbante pour des faits commis par la société absorbée avant que cette dernière perde
son existence juridique ».90

La Cour de cassation a donc complètement exclu la directive estimant qu’elle ne devait pas
impacter le droit français, il s’agit d’un raisonnement assez complexe. Dans un premier temps
la Cour de cassation a estimé que cette directive était complètement dépourvue d’effet direct à
l’encontre des particuliers. Et c’est un raisonnement que nous retrouvons notamment dans une
longue continuité jurisprudentielle91.

87
Troisième directive 78/855/CEE du Conseil, du 9 octobre 1978, fondée sur l'article 54 paragraphe 3 sous g) du
traité et concernant les fusions des sociétés anonymes
88
F. Lefebvre « Fusion-absorption : le sort des infractions commises avant l’opération ? Quid de la responsabilité
de la société absorbante ? » 06/05/2015
89
Cass. Crim. 25 octobre 2016 n°16-80.366
90
Ibid
91
CJCE 26 févr. 1986 Affaire 152/84

28
De ce fait, dans l’affaire jugée par la CJUE la décision avait été utilisée comme moyen à
l’encontre de la partie adverse, ce qui n’est donc pas possible puisque la décision de la CJUE
n’avait pas été transposée, donc elle ne saurait aggraver la responsabilité pénale d’une personne
au regard du principe de légalité des délits et des peines au regard du principe énoncé par
l’article 111-3 du Code pénal92.

Puis, la Cour de cassation a déclaré que l’article 121-1 du Code pénal ne s’interprète que comme
interdisant que des poursuites pénales soient engagées à l’encontre de la société absorbante au
regard de faits commis par la société absorbée, il retient donc la logique de la dernière
jurisprudence en date sur ces faits.
De cette façon et en raisonnent de la sorte, la Cour de cassation a fait primer le principe qui a
été déclaré à valeur constitutionnelle par une décision du Conseil constitutionnel93 qu’est la
responsabilité pénale personnelle.94

Ce qui semble finalement logique puisque l’article 62 alinéa 395 de la Constitution impose aux
juridictions nationales de respecter les décisions du Conseil constitutionnel. Or, suivre le
raisonnement de la CJUE serait revenu à ne pas respecter la valeur constitutionnelle de ce
principe de personnalité de la responsabilité pénale et aurait même pu faire l’objet d’une QPC.
Et c’est en cela que les techniques de restructuration d’entreprises permettent un évitement de
la responsabilité bien plus efficient que le cas des simples dissolutions.

En outre, la doctrine a souligné que cette solution interdisant de mettre en cause pénalement la
société absorbante pour des infractions reprochées à la société absorbée était très handicapante
puisqu’elle permet à une société poursuivie d’échapper à sa responsabilité pénale par l’effet
d’une absorption frauduleuse par une autre société.96

D’autant plus que le Conseil d’Etat a adopté un point de vue différent de celle de la chambre
criminelle dans un arrêt du 22 novembre 200097 dans lequel il a pu être admis que l’ancien
Conseil des marchés financiers puisse prononcer une sanction pécuniaire contre une société

92
Loi n° 92-683 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal
93
Cons. Constit. 16 Juin 1999 n° 99-411
94
H. MATSOPOULOU JCP G. n°11 13 mars 2017
95
LOI constitutionnelle n° 2008-724 du 23 juillet 2008 de modernisation des institutions de la Ve République
96
D. Vich-y-Llado, « La responsabilité pénale des personnes morales en cas de fusion » : JCP E 2001, p838
97
JurisData n°2000-142475 ; D2001, p.237, note M. Boizard et p. 160, note 1. t

29
absorbante pour des manquements commis par la société absorbée, cette solution qui ne va pas
à l’encontre de l’article 121-1 du code pénal ni de la personnalité des peines.

Arrêt cependant largement remis en cause sur sa contradiction face au principe de responsabilité
personnelle faisant obstacle au regard de la portée punitive et du caractère de sanction
complémentaire que revêt également la publication, à ce que l’autorité disciplinaire ordonne la
publication de la sanction pécuniaire infligée à une société en raison des manquements commis
par une autre société qu’elle a entre-temps absorbée.98

Et c’est d’ailleurs un raisonnement que nous retrouvons par le biais de la chambre commerciale
de la cour de cassation qui admet également des solutions similaires en droit de la concurrence
notamment.99
Raisonnement que nous retrouvons également dans le cas des amendes purement civiles
encourues pour des pratiques anticoncurrentielles peuvent être prononcées contre une société
ayant absorbé celle à qui les manquements sont imputables selon une décision du conseil
constitutionnel.100

Cependant, il est à démontrer qu’une véritable lutte existe à l’encontre de ces mécanismes
d’évitements qui sont considérés comme frauduleux.

En effet, le droit positif permet d’offrir plusieurs stratégies pour lutter contre la fraude « post
delictum », c’est-à-dire postérieure à la commission de l’infraction. Et certaines infractions
permettent dans ce cas de pouvoir rattraper la responsabilité pénale par d’autres fondements.

On pourrait dans un premier temps se fonder sur la qualification du recel profit101 au sens de
l’article 321-1 du Code pénal,102 n’étant en aucun cas freiné par la disparition qui aurait pu
entrainer l’absence de constitution de la première infraction préalable à la constitution du

98
CE, 17 déc. 2008 : JurisData n°2008-074658
99
Cass. Com. 20 novembre 2001 n°99-16.776
100
Cons. Constit. 18 mai 2016 n°2016-542
101
Rapp. L. Gamet, Le principe de personnalité des peines à l'épreuve des fusions et des scissions de sociétés :
JCP G 2001, I, 345, n° 4.
102
Loi n° 92-685 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des
crimes et délits contre les biens

30
recel,103 puisque l'action publique se trouve éteinte en raison de la fusion-absorption de la
société poursuivie.
Cette circonstance ne permet pas ou plus de réprimer pénalement cette société. Mais elle
n'enlève pas aux faits leur caractère délictueux. C'est pourquoi elle n'empêcherait pas des
poursuites contre la société absorbante pour recel.104

Cependant, si la société scindée ne tire aucun « profit » de l’infraction commise avant la


scission, cette disparition tiendra complètement en échec la répression.
Autrement dit, dans le même esprit et concernant le cas des fusions-absorptions, on pourrait
imaginer la possibilité de constituer l’infraction de complicité à l’égard de la société absorbante
au sens de l’article 121-7 du Code pénal.105 En effet, si la société absorbante avait
« connaissance » des intentions frauduleuses on peut estimer qu’elle a « facilité » à commettre
l’infraction. Cependant il est fort à constater que sa constitution reste très difficile au regard du
lien très étroit qui reste assez compliqué à démontrer puisqu’il nécessitera très généralement
une délinquance de groupe qui exclura les infractions purement isolées et les infractions non
intentionnelles.106

Ce qui réduit tout de même relativement les champs des possibilités puisque la délinquance de
groupe reste un cas relativement isolé, les entreprises auront plus généralement des poursuites
à leurs encontre pour des infractions propres à leur personnalité tel que le délit d’initié, ou des
infractions non intentionnels tels que l’homicide involontaire. Dans ce type de cas il ne sera pas
possible de voir la complicité admise.

A défaut de constituer l’infraction de complicité, il serait intéressant de se pencher sur


l’infraction de blanchiment défini à l’article 324-1 du Code pénal107, on retrouve les solutions
envisagées à propos du recel quant à l'existence d'une infraction d'origine punissable sans qu'il
importe que l'auteur de cette infraction soit poursuivi ou susceptible d'être sanctionné.
La caractérisation de l’infraction se fait par tout moyen, la justification mensongère de l'origine
des biens ou des revenus de l'auteur d'un crime ou d'un délit ayant procuré à celui-ci un profit

103
Rapp. Cass. crim., 16 juill. 1964 : Bull. crim. 1964, n° 241
104
P. Conte, Droit pénal spécial : Litec, 3e éd., 2007, n° 626.
105
Loi n° 92-683 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal
106
J.C PLANQUE « Sociétés - Comment limiter le recours aux techniques d'évitement de la responsabilité́ pénale
des personnes morales ? » 2018
107
Loi n° 92-685 du 22 juillet 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des
crimes et délits contre les biens

31
direct ou indirect. Il convient de noter que le moyen concerné n'est pas nécessairement
frauduleux.108

C'est pour cela qu’il est possible de penser qu’une éventuelle fusion même non frauduleuse
pourrait constituer le blanchiment au regard des dispositions du Code pénal justifiant une
origine mensongère des fonds pour lesquels la société absorbée est poursuivie. A fortiori, si la
fraude est avérée cela facilitera la caractérisation de l’infraction.

Puis enfin, il serait intéressant de se pencher sur le cas du contrôle judiciaire. En effet, l’article
706-45 du Code de procédure pénale109 prévoit la possibilité de prononcer l’obligation de verser
des suretés pour réparer le dommage des victimes. Cependant, il est également précisé à l’article
142 du Code de procédure pénale110 que « Lorsque la personne mise en examen est astreinte à
fournir un cautionnement ou à constituer des sûretés, ce cautionnement ou ces sûretés
garantissent : 1° La représentation de la personne mise en examen, du prévenu ou de l'accusé
à tous les actes de la procédure et pour l'exécution du jugement, ainsi que, le cas échéant,
l'exécution des autres obligations qui lui ont été imposées ».

Donc finalement les suretés prévues dans le cadre du contrôle judiciaire pourraient servir à
garantir la représentation de la personne morale. De ce fait en cas de disparition programmée
(ou non) dans le cadre d’une scission, d’une fusion, ou même d’une dissolution pourrait causer
une grosse perte financière alors que généralement c’est justement cette conséquence que va
chercher à éviter la société.

108
A. GALLOIS – Etude La responsabilité pénale de la société absorbante en cas de fusion-absorption
frauduleuse Avril 2010
109
Loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 portant adaptation de la justice aux évolutions de la criminalité
110
Loi n° 57-1426 du 31 décembre 1957 portant institution d'un code de procédure pénale (titre préliminaire et
livre Ier)

32
CONCLUSION

La prolifération et le durcissement de la législation pénale ne sont pas toujours de nature à


prévenir les infractions mais constitue à tout le moins un risque pénal de condamnation soit un
risque juridique. il semblerait que la règlementation pénale de l’entreprise puisse bénéficier
d’une nouvelle approche par les opérateurs économique. Cette appréhension renouvelée du
risque pénal prend place dans une culture du risque juridique au sein de l’entreprise. Les
entreprises vont pouvoir se doter d’une approche managériale du risque. Située au confluant
des sciences de gestion et du droit, elle a pour but de soustraire les personnes morales à la
fatalité d’une mise en œuvre de leur responsabilité pénale avant tout déclenchement de l’action
publique.
Les mécanismes d’évitements d’engagement de la responsabilité des personnes morales à
postériori le déclenchement de l’action publique, trouvent leur origine dans les conditions
propres à la mise en œuvre de l’article 121-2 du Code pénal. En effet, il est constant que pour
engager la responsabilité pénale d’une entité ayant la personnalité morale, celle-ci doit exister.
Dès lors on trouve des stratégies de la part des entités ayant la personnalité morale, qui exploite
cette condition de manière frauduleuse soit dans le but d’échapper à leur responsabilité pénale ;
stratégies que l’on peut confondre avec de véritables mécanismes d’évitement d’engagement
de la responsabilité pénale des personnes morales à l’aune d’une disparition de la personnalité
morale ou encore d’une restructuration d’entreprise.

33
BIBLIOGRAPHIE
1. Ouvrages généraux :

1.1 Traités et manuels

- AMALFITANO. Antonio, La responsabilité pénale des personnes morales en Europe :


une recherche pour la construction d’un modèle commun, le Harmattan 2015.

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procédure pénale en droit du travail et de la sécurité sociale, LexisNexis, éd. 5ème, 2012,
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- DEBOVE. F et FALLETI, Précis de droit pénal et de procédure pénale, 7ème éditions,


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- E. DREYER, Droit pénal général, 5ème édition, 2019.

- MAGNIER. V, Droit des sociétés, Droit privé, 7e éd., 2015.

1.2 Dictionnaires/encyclopédies/répertoires

- BERNARDINI, Répertoire Pénal, voir Personne morale, Dalloz 2010, n°7.

- G. Cornu, Vocabulaire juridique, Association Henri Capitant, Puf, 2011.

34
2. Ouvrages spéciaux :

2.1 Monographies et thèses.

- PLANQUE. J.-C, « La détermination de la personne morale pénalement responsable »,


le Harmattan, 2003.

2.2 Mélanges, actes de colloque et autres ouvrages collectifs.

- BENABDELI. K, Apport de la politique environnementale à l’amélioration du risque


industriel, 1ère journée nationale sur la sécurité industrielle et la gestion des risques
majeurs 26-27 mars 2008

3. Chroniques, articles et études doctrinales :

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- BLIN-FRANCHOMME. M.-P, « Le droit économique au soutien de la protection de


l’environnement : les apports de la loi Grenelle 2 à la gouvernance des entreprises et des
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- BOIVIN. J.-P, « Les installations classées, traité pratique de droit de l’environnement


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35
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- COHEN-DONSIMONI. V, « L’entreprise face à l’émergence du délit de risque causé à


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proposition de méthodologie », la revue des sciences de Gestion, Direction et Gestion
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http://www.juristes-environnement.com/article_detail.php?id=1092, consulté pour la
dernière fois le 25 novembre 2019.

38
TABLE DES JURISPRUDENCES

• Assimilation aux entreprises la responsabilité d’infraction trés spécifique à la


personnalité morale telles que les infractions fiscales : Cass. crim., 19 juill.
1907 : Bull. crim. n° 333,

• Existence d’une extinction de l’action publique en cas de dissolution de la


personne morale : Cass crim 3 février 1965 Bull. Crim. N°32

• Sur les connaissances rtechniques nécessaires du délégataires : Cass. crim., 21


oct. 1975, bull. Crim, n°222.

• Assimilation aux entreprises la responsabilité d’infractions très spécifique à


la personnalité morale telles que les infractions douanières : Cass. crim., 28
mai 1980 : Bull. crim. n° 160

• Sur les connaissances juridiques nécessaires aux bénéficiaires d’une


délégation de pouvoir : Cass. crim, 28 fevr. 1983, n°82-90.364

• Une directive est complètement dépourvue d’effet direct à l’encontre des


particuliers : CJCE 26 févr. 1986 Affaire 152/84

• L’établissement d’une obligation de prudence ou de sécurité de nature


législative ou règlementaire est une condition préalable : CA., Aix-en-
Provence, 22 nov.1995 : D. 1996. 405.

• Etablissement de la possibilité de poursuivre pénalement même en période de


liquidation : Cass. com., 13 févr. 1996, n° 288 P, Amoretti c/ SIBM

39
● Impossibilité d’assimiler une infraction même retardé dont l’origine se situait
avant 1994 : Cass. crim., 18 mai 1999 : Bull. crim. n° 99

● Le principe de la responsabilité personnelle impose de constater l’extinction


de l’action publique en cas de décès du prévenu : Cons. Constit. 16 juin 1999
n° 99-411

● Impossibilité de soulever la responsabilité d’infraction née avant 1994 pour la


responsabilité sur le fondement de L.121-2 du code penal : Cass. crim., 23 févr.
2000, n° 99-83.928 : JurisData n° 2000-001416 ; Bull. crim. n° 85

● On estime que l’effet dévolutif du patrimoine désigne la société absorbante


comme un responsable de substitution : Cass. Crim 20 juin 2000 Bull. Crim n°
237 p. 702 n° 99-86.742

● Il n’est absolument pas interdit de poursuivre une société après sa dissolution


sur une procédure pénale engagée antérieurement contre la personne morale :
CA Nîmes 20 avril 2001 n°01/00332

● Aucune condamnation définitive pourrait intervenir avant la date de


l’immatriculation au RCS et s’il s’agit d’une peine patrimoniale comme
l’amende, celle-ci constituera une dette qui se transmettra avec le patrimoine
de la société absorbé : Cass. Crim. 14 oct. 2003 n° 02-86.376

● Instauration d’un cas de responsabilité pénale sui generis des sociétés mères
en cas de dommage environnemental causé par une de ses filiales placées en
liquidation judiciaire : Cass. Com., 19 avril 2005, n°05-10.09

● Sur l’acceptation du délégataire de la délégation de pouvoir : Cass. crim., 23 mai


2007, n°06-87.590, Bull. crim n°138

40
● Contradiction face au principe de responsabilité personnelle faisant obstacle
au regard de la portée punitive et du caractère de sanction complémentaire
que revêt également la publication : CE, 17 déc. 2008 : JurisData n°2008-
074658

● La fusion faisant perdre son existence juridique à la société absorbée, l’action


publique devait de fait être éteinte à son égard : Cass Crim 9 septembre 2009
n°08-87312

● Responsabilité de l’état pouvant être engagé en cas de faute dans une activité
pouvant être délégué par le service public : Cass. Crim., 7 sept. 2010 n° 10-
82.119.

● La responsabilité suppose un fait commis par un organe ou un représentant


ainsi que pour le compte de l’entreprise : Cass. Crim 29 mars 2011 n° 11-90.007

● Le juge ne saurait condamner la société absorbante à verser des dommages et


intérêts à une partie civile puisqu’on ne saurait imputer la faute en amont à
la société absorbante : Cass. Crim 23 avril 2013 Bull. Crim n° 12-83.244 n° 12-
81.937

● La fusion-absorption en entraînant la transmission à la société absorbante de


la responsabilité pénale de la société absorbée par l’obligation de payer une
amende infligée après la fusion pour des infractions commises par la société
absorbée avant la fusion : CJUE 5 mars 2015 aff. 343/13, 5e ch., Modelo
Continente Hipermercados SA

● Amendes purement civiles encourues pour des pratiques anticoncurrentielles


peuvent être prononcées contre une société ayant absorbé celle à qui les
manquements sont imputables : Cons. Constit. 18 mai 2016 n°2016-542

41
● Opposabilité aux tiers d’une dissolution à partir de la publicité : Cour de
cassation, chambre commerciale, 15 novembre 2017, N°16-19425

• Aucune disposition n’interdit de prononcer une peine d’amende à l’encontre


d’une personne morale placée en liquidation judiciaire, tant qu’elle n’est pas
dissoute : Cass. Crim. 7 mai 2018 n° 17-82.887

• Aucune disposition n’interdit de prononcer une peine d’amende à l’encontre


d’une personne morale placée en liquidation judiciaire, tant qu’elle n’est pas
dissoute : Cass. Crim. 7 mai 2018 n° 17-82.887

42
ANNEXES

Annexes 1. Niveau de maturité de l’organisation d’une entreprise face au risque.

Sources : F. LEANDRI, « Structurer sa gestion des risques », le club des experts, avril 2013,
RGPD. Consultable sur : https://www.daf-mag.fr/DAF-Magazine/Article/Structurer-sa-
gestion-des-risques-45332-1.htm#iqlpLRTJ7vfOi9D5.97, consulté pour la dernière fois le 24
nov. 2019.

43
Annexes 2-Effets d’une fusions-absorption sur les sociétés absorbées et les sociétés
absorbantes.

Sources : Consultable sur : http://public.iutenligne.net/comptabilite/comptabilite-des-


societes/antraigue_januario/CTA-SOC-15/Chapitre-03/index.html , consulté pour la dernière
fois le 24 nov. 2019.

44
Annexe 3 – Les étapes de la dissolution volontaire.

Sources : Consultable sur : https://agence-juridique.com/articles/liquidation-entreprise-guide-


pratique , consulté pour la dernière fois le 24 nov. 2019.

45
TABLE DES MATIÈRES

SOMMAIRE ………………………………………………………………..………………P3

ABREVIATIONS…………………………………………………………………………..P4

INTRODUCTION……………………………………………………………......................P5

PARTIE 1. LES MECANISMES D’ÉVITEMENT A PRIORI LE DÉCLENCHEMENT


DES POURSUITES……………………………….…….....................................................P10

SECTION 1. LA CARTOGRAPHIE DES RISQUES PENAUX………………………..P11

SECTION 2. LA DELEGATION ET LA SUBDELEGATION DE POUVOIR


………………………..……………………………………………………………………..P15

PARTIE 2. LES MECANISMES D’EVITEMENT A POSTERIORI LE


DECLENCHEMENT DES POURSUITES………………………………………………P19

SECTION 1. LA DISOLUTION PROVOQUÉE DE LA PERSONNE


MORALE……………………………………………………………………......................P19

SECTION 2. LA RESTRUCTURATION D’ENTREPRISE……….…………………P23

CONCLUSION ……………………………………………………………………………P34

BIBLIOGRAPHIE …………………………………………………………......................P35

TABLE DES JURISPRUDENCES……………………………………………………….P40

ANNEXES………………………………………………………………………………….P44

TABLE DES MATIÈRES…………………………………………………………............P46

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