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Quant aux salariés et aux indépendants, les clubs Enfin, dans une dernière catégorie, nous avons recensé
et fédérations oublient trop souvent de contrôler le neuf affaires où des alertes – pas toujours de nature
bulletin no 2 du casier judiciaire, facilitant ainsi la à être caractérisées sur le plan pénal – ont été prises
réitération des faits et la multiplication des victimes à la légère avant que l’éducateur ne commette des
(lire « Le fléau des entraîneurs récidivistes »). agressions. Par exemple, un entraîneur passant la nuit
seul dans une chambre avec un athlète. Ou encore
Le maintien en poste
ayant pour habitude de prendre sa douche, nu, au
Deuxième donnée inquiétante : dans 78 % des cas milieu des enfants d’un club. Dans ces cas-là, les
recensés, l’agresseur a soit poursuivi son activité professionnels de la protection de l’enfance – brigade
malgré une procédure judiciaire en cours, soit retrouvé des mineurs et associations contre les violences
un poste dans le milieu sportif après une condamnation sexuelles – recommandent d’alerter les autorités.
pour une infraction à caractère sexuel. Une situation • La fuite
qui augmente le péril de la récidive et fait courir des
Dans dix-huit cas, soit près d’un quart de nos affaires,
risques aux jeunes sportifs.
on observe un déplacement de l’agresseur. D’une
Pourtant, un article de loi stipule précisément qu’une région ou d’un club à l’autre, ces mouvements sont
personne condamnée pour un crime ou un délit à une façon de passer sous le radar, dans un système
caractère sexuel ne peut entraîner des athlètes ou où la chaîne de transmission de l’information déraille
encadrer une activité sportive (lire « Des agresseurs facilement. Dans la majorité de cas, ces « fuites » ont
toujours en poste »). Il s’agit de l’article 212-9 du code été la source de récidives.
du sport. Au cours de l’enquête, nous avons découvert • Les responsables
que la plupart des dirigeants sportifs ne connaissaient
De nombreux acteurs n’ont pas pris leurs
pas ce fameux code et son ensemble de lois et décrets
responsabilités, laissant un délinquant sexuel passer
applicables au domaine du sport. Que ce soit dans
entre les mailles du filet. Dans 53 % des cas, les
les clubs de villages ou les bureaux des ligues et des
défaillances viennent de la justice.
fédérations nationales.
Des situations interpellent : comment se fait-il
Absence de signalement aux autorités
qu’une personne condamnée pour des délits ou
Dans près d’un quart des cas recensés, des personnes crimes sexuels commis sur des mineurs ne fasse pas
ou des institutions ont été alertées de faits précis sans systématiquement l’objet d’une interdiction d’exercer
en informer la justice, comme l’exige pourtant la loi. auprès d’enfants ? Pourquoi le suivi socio-judiciaire ne
Dans la majorité des cas, les responsables de cette dure-t-il parfois que quelques années ? Quels critères
omerta n’ont pas été inquiétés pour avoir couvert conduisent à ce qu’une condamnation pour des délits
des infractions à caractère sexuel (lire « Le silence ou crimes sexuels disparaisse parfois très rapidement
coupable des autorités »). des différents extraits du casier judiciaire ?
Soutien de l’agresseur Viennent ensuite les clubs, à l’origine de
Dans dix-sept affaires, le club, la fédération, la dysfonctionnements dans 35 % des cas. Notre
collectivité locale ou l’école ont pris fait et cause pour enquête révèle que les informations ne remontent
l’agresseur. Une défense souvent accompagnée d’un pas toujours jusqu’aux fédérations, la préfecture ou
mépris pour la parole des victimes, voire de tentatives la justice, souvent par volonté de protéger le club
d’intimidation. Des condamnations pour des faits de d’un scandale. De plus, les dirigeants sportifs, qu’ils
violences sexuelles ou des décisions de justice ont soient bénévoles ou professionnels, sont rarement
parfois été remises en cause, certains soutiens allant formés sur les violences sexuelles ou la législation
même jusqu’à invoquer l’erreur judiciaire. en vigueur. Résultat : ils se retrouvent totalement
Négligence de signaux forts démunis lorsqu’une affaire éclate.
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Le journal MEDIAPART est édité par la Société Editrice de Mediapart (SAS). Téléphone : + 33 (0) 1 44 68 99 08
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