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Histoire.

REPÈRES POUR NE PAS RELATIVISER NI BANALISER LES GÉNOCIDES


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Données sur lesquelles tous les historiens s’accordent, sauf les négationnistes :
- Quelques repères chronologiques (en 2005) :
 destruction des amérindiens des deux Amériques : 500 ans en moyenne ;
 traite des noirs et esclavagisme : 350 ans en moyenne (paroxysme : 1750-1850) ;
 communisme soviétique et de Mongolie : 70 ans en moyenne (selon les régions) ;
 fascisme espagnol : 38 ans ;
 fascisme mussolinien : 21 ans dans le sud, 23 dans le nord de l’Italie ;
 national-socialisme hitlérien : 12 ans (dont 3 ans de "Solution finale") ;
 communisme de Corée du Nord : depuis 63 ans ;
 communisme chinois : depuis 59 ans (communisme de marché depuis 17 ans) ;
 communisme des pays de l’Est et Baltes, de Cuba, d’Indochine : 45 ans.

- Quelques repères géographiques et démographiques :


 destruction des amérindiens : 20 millions de morts (moyenne : 40.000 morts par an) ;
 traite des noirs et esclavagisme : environ 18 millions (dont 5 millions de morts en route) ;
 camps communistes (Goulag soviétique, Laogaï chinois et autres pays) : 624, auxquels il
faut ajouter les zones de déportation et de détention ;
 personnes déportées et détenues :environ 180 millions ;
 personnes décédées soit en déportation, soit du fait des famines sciemment provoquées
pour soumettre les populations : environ 80 millions ;
 camps nazis : 22, auxquels il faut ajouter les kommandos et les zones de concentration
urbaines (ghettos) ou rurales (notamment à l’Est) ;
 personnes déportées et/ou détenues : environ 15 millions ;
 personnes décédées soit en déportation, soit du fait des conditions de vie sciemment
imposées par l’occupant : environ 22 millions (surtout à l’Est).

- Quelques repères éthiques et juridiques :


 l’horreur n’est pas une question de nombres ;
 théoriquement, les Droits de l’Homme ne se divisent pas ;
 les crimes soviétiques sont exclus de la définition du « crime contre l’humanité », adoptée en
1945 à Nürnberg, puisque seules les discriminations raciales ou religieuses, et non pas sociales,
figurent parmi les causes admises de ces crimes : "persécution, assassinat, extermination,
réduction en esclavage, déportation et tout autre acte inhumain commis contre toute population
civile, avant ou pendant la guerre, au nom d'un état pratiquant une politique d'hégémonie
idéologique pour des motifs raciaux ou religieux, que ces actes ou persécutions, aient
constitué ou non une violation du droit interne du pays où ils ont été perpétrés".
 Ian SODRABS, dit "Latsis", directeur de la police politique bolchévique, avait pourtant clairement
affirmé dans la "Pravda" du 23 août 1918 que : "Notre action ne vise pas des personnes : nous
exterminerons l'aristocratie, la bourgeoisie et les paysans réfractaires en tant que classes. Ne
cherchez pas, dans nos enquêtes, des documents ou des preuves de ce que l'accusé aurait fait,
en actes ou en paroles, contre les autorités de la République Socialiste Fédérative Soviétique de
Russie. Ce n'est pas la question : la question, c'est à quelle classe il appartient, quelle est son
origine, son éducation, ses opinions, sa profession", mais à Nürnberg, seuls les nazis se trouvent
du côté des accusés : les staliniens sont du côté des juges ;
 à part quelques négationnistes, personne ne nie plus les crimes qui ont été commis ;
 le négationnisme est précisément défini par la loi : il s’agit bien de la négation de crimes prouvés
par la recherche historique ;
 le négationnisme est légalement un délit lorsqu’il concerne les crimes commis par les nazis et
seulement dans ce cas ;
 le négationnisme des crimes communistes a longtemps été un phénomène massif dans la
recherche, le débat politique et les média ; il n’a jamais été juridiquement pénalisé ; par contre,
ceux qui le contestaient ont été systématiquement traités de réactionnaires, de fascistes ou de
conservateurs ;
 depuis le procès d’Eichmann en 1961, la singularité historique du génocide juif, dénommé
"Holocauste" ou "Shoah", a été définie et admise historiquement ;
 jusqu’en 1986 des recherches sur les causes communes des génocides sont librement menées
en Occident dans l’optique d’une dénonciation globale, au nom des Droits de l’Homme, de la
notion de "totalitarisme", définie par Hannah ARENDT et par Carl FRIEDRICH ("Dictature et
autocratie totalitaire", 1956). Ces études trouvent à la base des communismes, des libéralismes
et des fascismes, le même moule idéologique "naturaliste", qui applique aux sociétés humaines
les règles par lesquelles Charles DARWIN expliquait l’évolution du monde animal et végétal ;
 ce moule, parfois surnommé "darwinisme social" (bien que DARWIN n’ait jamais été sociologue)
définit certaines catégories de citoyens comme "improductifs", "inutiles", "parasites" ou "nuisibles",
et légitime leur "élimination" selon des critères de définition économiques dans les libéralismes,
sociaux dans les communismes, et ethniques dans les racismes et les fascismes ;
 ces études comparatives ne réduisent en rien la terrible singularité de l’Holocauste, mais les
penseurs occidentaux séduits par le marxisme ou par le libéralisme (ce sont souvent les mêmes,
plus âgés), se montrent de plus en plus exaspérés par les comparaisons entre leurs doctrines
préférées et le nazisme, qui affinent la notion de "darwinisme social" dégagée par les études
comparatives ; ils cherchent un moyen idéologique de séparer radicalement, et pour toujours, le
nazisme des autres"darwinismes sociaux " , notion qu’ils cherchent d’ailleurs à décrédibiliser ;
 en 1986, dans un contexte où l’idéologie communiste est en sévère perte de vitesse, la parution
de "Politische Schriften" de Jürgen HABERMAS nie la notion de "totalitarisme" (ou bien la dilue
jusqu’à la publicité ou aux religions), explique le génocide des juifs par des causes exclusivement
allemandes, polonaises, tchèques, hongroises ou roumaines, peuples dont l’identité nationale
elle-même serait pétrie d’antisémitisme, et surtout récuse toute ressemblance philosophique entre
les communismes, les libéralismes et les fascismes ;
 naturellement, en occident, une pléïade de penseurs sympathisants soit du libéralisme, soit du
marxisme, ou bien nostalgiques de l’époque où l’on pouvait être communiste sans complexes, se
rallient avec enthousiasme à l’école HABERMAS, affirmant que "comparer, c’est banaliser
Auschwitz" et rangeant quiconque ose comparer les totalitarismes parmi les "conservateurs", les
"fascistes" ou les "négationnistes" ;
 pendant ce temps, dans l’Europe centrale et orientale libérée du communisme (mais livrée à
l’ultra- libéralisme), l’ouverture des archives permet de stopper le négationnisme des crimes
communistes, et incite les historiens à se lancer dans des études comparatives, dans l’optique
d’une dénonciation universaliste, au nom des Droits de l’Homme, de la notion de "totalitarisme" ;
 ainsi se construit en Europe une "mémoire fragmentée" et même antagoniste, "ouest" rallié à
l’école HABERMAS, "est" rallié au comparatisme. A l’ouest, l’"hypermnésie" concernant les crimes
nazis et l’"amnésie" relative concernant les autres génocides (J.F. REVEL), provoque une mise en
compétition des mémoires, qu’illustre la dérive antisémite de l’humoriste français et antillais
DIEUDONNÉ, sensible à la mémoire de l’esclavagisme. Il en résulte une banalisation de TOUS les
génocides et une perte de vue de l’universalité des Droits de l’Homme, pour le plus grand profit
des négationnistes de tous bords et des adversaires non-déclarés de la démocratie.
Le dernier siècle du second millénaire s'est terminé sur un océan d'incertitudes qui n'est pas
sans relation avec l'écroulement des mystifications idéologiques qui ont si longtemps profité aux
prédateurs et aux génocidaires de tout poil.
Mais peut-être cet océan permettra-t-il de ne plus confondre "utopies" et "totalitarisme", pour
pouvoir retrouver cette veine d'espérances humanistes qui, depuis le temps des pharaons en passant par
Pythagore, Platon, Gémisthe PLETHONOS, Iannis BESSARION, Iannis LASCARIS, Giordano BRUNO, Francis
BACON, Thomas MORE, Baruh SPINOZA, François de VOLTAIRE, J.J.ROUSSEAU ou Jules VERNE, a
toujours permis à l'humanité de rêver librement d'abord, pour réaliser librement ensuite. Quoi qu’il en
soit, c’est le chanteur arménien Charles AZNAVOUR qui a trouvé l’antidote aux mystifications et à la
fragmentation des mémoires, en disant : "Tout homme devrait faire siens tous les génocides".▲

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