Atelier M. Debbi
S7
Fiche de lecture
La production de l’espace: H
enri Lefebvre
En 1960, il signe le manifeste des 121 pour le droit à l'insoumission dans la
guerre d'Algérie.
Etude de l’oeuvre:
conception, et par la suite, a une vie sociale qui se déroule réellement dans
l’espace?
Lefèbvre tente de montrer l'unité théorique entre l'espace physique,
l'espace mental et l'espace social. Chaque société produit un espace issu du
néo-capitalisme en rendant l'espace un " monde de la marchandise ", avec
une logique et des stratégies à l'échelle mondiale en même temps que la
puissance de l'argent et celle de l'Etat politique. Cet espace abstrait s'appuie
sur les énormes réseaux des banques, des centres d'affaires, etc. Et aussi
l'espace des autoroutes, des aérodromes, des centres d'informations et de
communication. Dans cet espace, la ville, berceau de l'accumulation, lieu de
la richesse, sujet de l'histoire, centre de l'espace historique a éclaté.
La thèse centrale de Lefebvre est que « le mode de production organise –
produit – en même temps que certains rapports sociaux – son espace et son
temps. C’est ainsi qu’il s’accomplit ». L’espace (social) est un produit
(social). L’espace ainsi produit sert aussi d’instrument à la pensée comme à
l’action. Il est, en même temps qu’un moyen de production, un moyen de
contrôle donc de domination et de puissance.
Wijdane Esseffah
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Pourtant, Lefebvre indique un manque, une absence : « la réflexion
épistémologico-philosophique n’a pas donné un axe à une science de
l’espace qui se cherche depuis longtemps à travers d’innombrables
publications et divers travaux. Les multiples sciences qui traitent de
l’espace. Leurs recherches aboutissent soit à des descriptions, soit des
fragmentations et des découpages de l’espace, sans jamais atteindre le
moment analytique, encore moins le théorique. Elles établissent des
inventaires de ce qui existe dans l’espace, dans le meilleur des cas il s’agit
d’un discours sur l’espace, mais jamais d’une connaissance de l’espace » .
Rien, en tout cas, qui ne rende compte de son idée selon laquelle « l’espace
social n’est pas une chose parmi les choses, un produit quelconque parmi les
produits : il enveloppe les choses produites. Il résulte d’une suite et d’un
ensemble d’opérations, et ne peut se réduire à un simple objet. Effet
d’actions passées, il permet des actions, en suggère ou en interdit »
La triplicité de l'espace:
l’idée de la triplicité de l’espace, c’est-à-dire la distinction à faire entre
l’espace perçu, l’espace conçu et l’espace vécu. Une distinction qui doit se
manier avec beaucoup de précaution. Elle repose sur:
1- Les représentations de l’espace à l’ordre qu’ils imposent et par là, à des
connaissances, à des signes, à des codes étant ainsi l’espace conçu, celui des
savants : des planificateurs, des urbanistes,identifiant le vécu et le perçu au
conçu. C’est « l’espace dominant dans une société ».
2– L'espace vécu est issu de la pratique spatiale qui à son tour englobe
production et reproduction:. La pratique spatiale d’une société secrète son
espace, elle le produit lentement et sûrement en le dominant et en se
l’appropriant. Par conséquent, la pratique spatiale d’une société se découvre
en déchiffrant son espace. Elle associe étroitement dans l’espace perçu la
réalité quotidienne (l’emploi du temps) et la réalité urbaine (les parcours et
réseaux reliant les lieux du travail, de la vie « privée », des loisirs. C’est
pourquoi aussi « la compétence et la performance spatiales propres à
chaque membre de cette société ne peuvent s’apprécier qu'en fréquentant et
appréhendant l'espace individuellement.
Wijdane Esseffah
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3- L'espace diverge toutefois de son idée de conception initiale et de sa
pratique sociale la plus courante à un espace de représentation où
s'expriment quant à eux des symbolismes complexes, liés au côté clandestin
et souterrain de la vie sociale, mais aussi à l’art, qui pourrait éventuellement
se définir non pas comme code de l’espace mais comme code des espaces de
représentation. C’est l’espace vécu à travers les images et les symboles qui
l’accompagnent, par l’intermédiaire des « habitants », des « usagers »,
mais aussi de certains artistes et peut-être de ceux qui décrivent et pensent
seulement décrire : les écrivains, les philosophes. C’est l’espace dominé et
subi, que l’imagination tente de s’approprier et de modifier. Il recouvre
ainsi l’espace physique en utilisant symboliquement ses objets.
Le soubassement théorique Marxiste de Lefèbvre:
Dans une approche marxiste, il décrivait l’espace de son époque comme
aliéné par le mode de production capitaliste bureaucratique et
l’impossibilité pour les usagers de maîtriser les propriétés de leurs espaces
de vie . Si la manière d’aménager l’espace a considérablement changé avec
le temps. La réflexion sur la production de l’espace, particulièrement de la
ville, et son lien avec le capitalisme, demeure une référence. Si elle mérite
d’être confrontée avec des évolutions récentes, elle permet de bien poser les
cadres d’une réflexion sur la ville en train de se faire.
Pour Henri Lefebvre, qui reprend cette distinction de Karl Marx, la
production a un sens étroit et un sens large. Le sens étroit est celui de la
production matérielle des biens et des marchandises. Le sens large inclut à
la fois l’espace-produit et l’espace-producteur. Il n’y a pas sur ce point de
spécificité de l’espace. Ce sens large souligne simplement la dimension
rétroactive de toute production : les effets peuvent rétroagir sur les causes
qui les ont provoqués.
Lefebvre apporte la définition de Gramsci de l'hégémonie pour analyser
l'action de la bourgeoisie par rapport à l’espace et pour décrire l’avenir de la
classe ouvrière dans la création d'une nouvelle société (et d'un nouvel
espace); "[L'hégémonie] implique plus qu'une influence, plus encore que le
recours permanent à la violence répressive. Elle s'exerce sur la société en
tant que ensemble, culture et savoir inclus, et généralement par la
médiation humaine: politiques, les dirigeants politiques, les partis, ainsi
que bon nombre d'intellectuels et d'experts. Il s'exerce, donc, à la fois sur
les institutions et les idées. La classe dirigeante cherche à maintenir son
hégémonie par tous les moyens disponibles, et la connaissance en est un ».
Cette définition implique une relation étroite entre la connaissance et le
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pouvoir, dans laquelle la connaissance cherche mais refuse de reconnaître
ce pouvoir. L'espace a un rôle déterminant connaissances et actions dans le
mode de production existant et la préservation des hégémonie. L'hégémonie
utilise l'espace à l'aide des connaissances produites et de l'expertise
technique du système capitaliste.
La contradiction:
La domination de la sphère politique et le manque de chevauchement entre
différents domaines ne permettent pas de projets communs ni de continuité
théorique entre différents domaines et échelles existent . Différentes
échelles du territoire sont remises à différentes entités; tandis que les
architectes sont préoccupés par l'habitat, les urbanistes se concentrent sur
la échelles métropolitaines et régionales. Pour cette raison, une théorie
unitaire est nécessaire pour aborder les couches multiples et contradictions
résultant de la production d'espace; «… Le but est de découvrir ou de
construire une unité théorique entre des «champs» appréhendés
séparément, tout comme les molécules, les forces électromagnétiques et
gravitationnelles sont en physique. Les domaines qui nous concernent sont,
premièrement, la nature physique, le Cosmos; deuxièmement, le mental, y
compris logique et abstractions formelles; et, troisièmement, le social. ». À
cause de l'inextricable relation entre les forces matérielles, les processus
sociaux et la production de connaissances, une théorie unitaire de l'espace à
produire, moment historique critique et transformateur est nécessaire .
Les phénomènes urbains doivent être compris comme faisant partie d'un
tout, en relation avec leurs contextes sociaux, économiques et politiques. En
regardant l'urbain, on peut mieux comprendre les contradictions d'une
société et le type d'espace que l'on envisage reflète ce genre de société. Par
conséquent, toute intention de construire une fondation pour une science de
l'espace doit contempler l'imagination humaine. Afin de visualiser l'espace
véritable, Lefebvre souligne que la société doit surmonter sa tendance à la
fragmentation, à la séparation et à la désintégration caractéristique du
mode de production actuel et des connaissances acquises dans ce cadre.
Lefebvre voit que pour construire un véritable espace, les relations de
pouvoir de la société socialiste doivent être fondamentalement modifiées et
la politique de tous les jours la vie doit être reformulée. Le temps et l'espace
doivent être révolutionnés. Pour la société pour entreprendre une
Wijdane Esseffah
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transformation profonde, non seulement l'économie, la politique et
l'idéologie doivent être transformés. Il est également essentiel de mettre fin
à la façon dont la vie quotidienne elle-même est conçue et menée; "La
révolution du futur mettra fin au quotidien, elle inaugurera prodigalité et
brisera notre enchaînement, violemment ou pacifiquement selon le cas »
Par conséquent, l'espace doit être considéré comme et envisagé pour être
gouverné localement et de manière autonome. Nous devons réaliser - et
c'est de mon point de vue ce que Lefebvre entend par «la révolution absolue
est notre image de soi» - qu'une gouvernance participative est notre droit
en tant que citoyens de cette planète et que nous valons la peine de vivre une
vie significative, saine et donc vie heureuse ensemble. Nous devons établir
un comportement en fonction de ces pensées qui mènera finalement à la
création d'installations adaptées à nos besoins respectifs. Nous, dans ce
mondialisme abusif, apprenons de jour en jour que ce dont nous avons
besoin, c'est de notre connexion émotionnelle les uns avec les autres afin de
ne pas nous sentir dénués de sens.. Donc, je dis, créons cet espace!