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Synthèse contributive 2
Synthèse contributive
Juillet 2007
Juillet 2007
3 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
Ce document se base sur les réflexions des ateliers Quartiers Durables, organisés par le PUCA
en 2006, mais également sur les différentes méthodes d’actions durables ainsi que les études
et leurs critiques attenantes. Il fait également état de la législation actuellement en vigueur,
susceptible de mettre en œuvre des actions de développement durable à l’échelle du quartier.
Le PUCA souhaite contribuer à la réflexion sur le sujet, en éclairant les questionnements
permettant de définir les axes de travail généraux sur lesquels devront porter les réponses des
équipes souhaitant participer au futur programme de recherche sur le développement durable
à l’échelle des quartiers.
Cette synthèse a été élaborée par Luc Bousquet, chargé de projet au PUCA, et Franck
Faucheux, chargé de projet au PUCA, avec l’aide d’Alexandre Boissier, architecte
Sommaire :
1 Ces quartiers que l’on dit durables .............................................................. 5
1.1 De quel quartier parle-t-on ?...................................................................................5
1.2 Quelle caractérisation ? ..........................................................................................6
1.3 Vous avez dit quartier durable ? .............................................................................6
1.4 Deux termes aux contours flous : problèmes de définition. ....................................8
1.5 Le Quartiers durable : ...........................................................................................14
1.6 Construire un savoir partageable et diffusable. ....................................................14
1.7 Questions pour des quartiers durables. ................................................................15
1.8 Définir un projet local, quels indicateurs et quelle diagnostic ?.............................19
2 Le soi-disant retard français ...................................................................... 19
2.1 Proto-Type-Quartier : typologie des quartiers durables. .......................................20
2.1.1 Le proto-quartier.....................................................................................................................20
2.1.2 Le prototype du quartier durable............................................................................................20
2.1.3 Le quartier type. .....................................................................................................................21
2.2 Comment sortir de l’exemplarité non reproductible des quartiers durables ? .......21
2.2.1 La dynamique du développement durable à l’échelle du quartier.........................................21
2.2.2 Quelle méthodologie peut-être durable ? ..............................................................................22
2.2.3 Existe-t-il un consensus européen ?......................................................................................22
3 Les quartiers durable dans le texte ........................................................... 26
3.1 Les chartes internationales...................................................................................26
3.1.1 L’action 21..............................................................................................................................26
3.1.2 La charte d’Aalborg. ...............................................................................................................27
3.1.3 La charte de Leipzig sur la ville européenne durable............................................................29
3.1.4 Projets territoriaux de développement durable et Agendas 21 locaux..................................31
3.2 Les lois françaises ................................................................................................33
3.2.1 La loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) ................................................................33
3.2.2 Les nouveaux outils et la modification des outils existants liés à la loi SRU : ......................34
3.2.3 La loi relative à la démocratie de proximité ...........................................................................38
3.2.4 La loi Libertés et responsabilités locales ...............................................................................38
3.3 Notre arsenal juridique est-il adapté au développement durable ? .......................39
3.3.1 Faut-il modifier certaines lois ? ..............................................................................................39
3.3.2 Les questions normatives. .....................................................................................................39
3.3.3 Comment modifier le financement des opérations d’aménagement durable ?.....................40
4 Petites méthodes pour les quartiers durables. .......................................... 40
4.1 Les 11 objectifs pour l’aménagement urbain ........................................................40
4.2 Les écomaires. .....................................................................................................43
4.2.1 Urbanisme et aménagement..................................................................................................43
4.2.2 Qualité environnementale du tissu urbain : ...........................................................................43
4.2.3 Développement sociale et économique :...............................................................................43
4.2.4 Gouvernance et pilotage :......................................................................................................44
4.3 Les Sustainable Communities. .............................................................................44
4.3.1 Une vision pour des sustainable communities.......................................................................44
4.3.2 : l’accord de Bristol.................................................................................................................45
4.3.3 Les huit caractéristiques des sustainable communities :.......................................................45
4.4 Synthèse et croisement de trois méthodes d’actions durables. ............................47
5 Quand on ne sait pas où l’on va, il faut y aller et le plus vite possible. .... 50
6 Bibliographie. ............................................................................................. 53
5 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
pour mettre à l’épreuve les questions que c’est à dire être établi d’une manière
soulève la pérennisation d’un processus de habituelle dans un endroit.
développement local. Autrement dit, comment Cela sous-entend que l’on s’intéresse à
passer du singulier de l’expérimentation à des la construction d’une fraction du cadre de vie
conceptions partagées qui perfusent le droit qui finalement est découpé selon trois
commun ? niveaux : le cadre de vie intime (l’habitat), le
L’enjeu serait d’engager un cadre de vie quotidien (le quartier), le cadre de
renouvellement des méthodes de travail et des vie social (la ville ou le territoire).
processus de projet, favorisant l’émergence de L’intérêt de cette première définition
logiques d’actions propres à la « durabilité » tient à sa relative imprécision qui signifie qu’il
du développement durable, comme processus faut se pencher sur l’articulation et les
maîtrisé, plus que comme une réponse à interactions entre ces trois niveaux. Par
l’urgence environnementale. exemple, l’augmentation des surfaces du cadre
Que recouvre la notion de quartier de vie intime aura conduit à des formes de
durable quand finalement les deux termes privatisation de la vie quotidienne, souvent au
posent l’un et l’autre un problème de détriment du quartier dont les rôles
définition ? Quand ils renvoient à des enjeux fonctionnels s’affaiblissaient au profit de la
majeurs spatio-temporels complexes, quand représentation. De la même façon, la
l’histoire récente s’est accélérée au point de spécialisation des espaces urbains peut amener
rendre obsolètes et inopérantes des définitions une restriction de la place du quartier, ouvrant
traditionnelles. le cadre de vie quotidienne à des espaces plus
Trois questions principales se posent à extensifs. Peut-on parler de la même façon des
nous : quartiers centraux et des quartiers nouveaux
• Comment préciser les contours de ces issus de la péri urbanisation ? Comment se
notions floues que sont le « quartier » et la recompose le rapport entre des quartiers
« durabilité ». d’habitat collectif et des quartiers
• En fonction de nouvelles structurations pavillonnaires ? Qui les habitent, comment les
de l’espace et des pratiques qui s’y rapports sociaux s’y recomposent ?
développent, quels sont les modes de
gouvernance urbaine à développer à l’échelle
du quartier ? 1.3 Vous avez dit quartier
• Quels sont les objectifs réellement durable ?
assignables aux divers acteurs urbains qui On peut penser au primat du politique comme
travaillent à cette échelle et selon quelles substrat de l’action, comme intégration du
modalités de coopération ? « durable » à une conception globale de la
société et de son devenir, comme manière de
Nous nous attacherons à développer dans un définir le cadre d’une « communauté de
premier temps ces trois questionnements, afin destins », comme manière d’articuler des
de préciser ensuite les principaux axes de niveaux de territoires dont le quartier n’est
travail qui permettront de soutenir et d‘éclairer qu’un segment aux contours improbables.
les travaux actuellement menés dans les Voici pour ce qui devrait être… Mais, face au
territoires. changement, le politique montre bien des
incertitudes quant à son rapport au temps. Les
1.2 Quelle caractérisation ? mutations sociales et sociétales des vingt
En première approche très imparfaite, les dernières années auront si importantes que le
quartiers sont définis comme des « unités de passé ne suffit plus à éclairer le présent et que
vie locale », comme un ensemble les changements sont si importants et si
suffisamment grand pour que les besoins de rapides, que l’avenir, même à moyen terme,
base de la vie quotidienne soient remplis : se est illisible. L’incertain crée des situations
nourrir, se loger, se divertir ; en bref, résider anxiogènes, pour les « gens » (c’est une façon
7 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
Ce choix du politique dénote d’un vrai 1.4 Deux termes aux contours
courage, d’une déstabilisation souhaitée, flous : problèmes de définition.
puisque à quelques exceptions près et à des
Il est toujours difficile d’associer deux mots,
degrés divers, les acteurs présents autour de la
table étaient des techniciens. Le « durable » surtout lorsque chacun d’eux revêt un
caractère polysémique et qu’ils sont l’objet de
est entré de plain-pied dans le discours
politique depuis quelques années. Pourtant, il glissements sémantiques multiples tant au
niveau du sens commun que des définitions
est difficile d’en repérer un sens partagé, y
compris dans les représentations qui émergent savantes.
des débats du groupe. Pour mieux comprendre
la diversité des points de vue, il convient de La présentation du quartier par le Petit
Robert est illustrative de l’incertitude et de la
revenir sur l’introduction du terme dans le
champ du politique, d’en produire une pluralité de sens. Au fond, la définition la plus
stable est juridico administrative. C’est la
généalogie. Puisque nous sommes dans une
phase de défrichement, les questions sont plus division administrative d’une ville, quand, par
exemple, un quartier parisien est le ressort
nombreuses que les réponses. L’incertain et
l’inachevé sont présents à tous les étages… d’un commissariat de police et que les
arrondissements sont divisés en quatre
Mais est-ce bien grave, puisque ces deux
quartiers. C’est l’entrée la plus abstraite, la
notions sont évidemment indissociables de
plus éloignée des pratiques et des usages des
celle de durée ? S’inscrire dans la durée, est-ce
habitants. Au-delà de ce formalisme, la suite
une simple réassurance pour le présent ou une
de la définition est nettement plus
manière d’admettre les déstabilisations du
impressionniste : « partie ayant sa
futur et la volonté de les anticiper en
physionomie propre et une certaine unité ».
construisant un présent acceptable
On ne peut guère faire plus flou…
(soutenable) dans une double mutation : celle
Alors, le mot quartier nécessite un
de « l’être ensemble » (nouvel enjeu
qualificatif.
démocratique), et celle du pari d’une nouvelle
On parle de quartier « populeux »
relation à l’environnement ?
(populaires) et de quartier bourgeois dans le
cadre d’une distinction classiste. Ce n’est pas
Nous sommes à la croisée des chemins,
de physionomie dont il s’agit, mais des
lorsqu’il faut faire le bilan (solder ?), d’une
caractéristiques des populations qui occupent
société industrielle qui produit de moins en
le lieu. Alors le quartier est autant un espace
moins de régulations collectives et qui
de proximité sociale que de p r o x i m i t é
pourtant reste, pour certains, le modèle du
spatiale. De ces proximités émanent des
« paradis perdu »2, que l’on parle de la valeur
façons d’être, des manières de faire, des
travail, de la sociabilité populaire, de la force
comportements collectifs, des références
du nombre et de l’identité collective pour les
communes et donc l’élaboration de normes
catégories populaires.
d’usage qui concernent la rotation des
opérations quotidiennes. C’est l’expression
d’une culture p a r t a g é e qui scande
l’organisation d’une vie sociale. En bref, c’est
la description archétypique du quartier
populaire traditionnel qui traduisait les
références d’une culture de classe qui se
2 :Cette relation au temps long (passé et avenir) pourrait faire l’objet fondait sur la place occupée dans la sphère de
de plus amples développements. Nous n’en donnons, ici que la production. Ce quartier-là n’est pas
quelques expressions. C’est d’abord une crise la crise de l’héritage
quand le passé n’éclaire plus l’expérience du présent. Cette crise qui dissociable des modes d’organisation
touche à la fois ceux qui transmettent, qui ne semblent plus exister constitutifs de la société industrielle. C’est ce
au-delà d’eux-mêmes, et ceux qui ne reçoivent plus les éléments modèle qui s’étiole au cours des trente
d’une culture commune permettant de construire une place sociale,
des appartenances communes définissant des façons d’être. dernières années. Mais, s’il perd de sa force
9 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
réelle, il garde une forte charge symbolique, les adapter à une situation. Alors, la vie de
comme une sorte de paradis perdu, comme un quartier peut être considérée comme une
marqueur de la disparition de références production secondaire, une manière de
communes, comme l’expression d’une maximiser l’usage de ce qui est donné à
rupture, d’une crise de l’héritage et de l’entrée consommer… Cette organisation du quartier
dans une société plus incertaine, dans ses obéirait presque aux règles de la tragédie
fondements et dans la lisibilité de son avenir. classique. Unité de lieu, lorsque les habitants
Le passé n’éclaire plus un présent complexe ; partagent une vision commune des limites du
le flou du présent rend difficilement lisibles quartier et des lieux qui le structurent ; unité
l’avenir et la rapidité des mouvements, le de temps lorsque le rythme de la vie est
développement de cet ensemble de produits scandé par temps du travail (« l’usine est la
nouveaux qui transforment fondamentalement mesure de toute chose » : J.P. Brunet, « Saint-
des rapports au temps et à l’espace. Cela Denis la rouge »), unité d’action, lorsque les
mériterait de plus ample développement, mais rôles sont définis par des conceptions
il faut retenir que la notion de quartier évolue communes : les enfants nourris au « sirop de
étroitement avec une organisation sociale et la rue », les mères qui développent leurs
sociétale. Cela interroge à l’évidence la capacités à faire, du mieux possible, « avec ce
notion de quartier durable. que l’on a », des hommes qui cherchent à
garantir collectivement « leur dignité de
La proximité spatiale et culturelle dans ce type producteur ». La comparaison se limite au
de quartier s’accompagne d’une proximité de triptyque, car cette vie sociale, certes difficile,
fonctions. Le commerce en est une belle n’a rien d’une tragédie. Elle recèle aussi des
illustration. « L’épicerie du coin » était aussi petits bonheurs, la construction d’une distance
le club des ménagères, un lieu ironique par rapport aux mondes des autres et
d’approvisionnement, mais aussi un lieu où se à ses impositions culturelles, comme
construit une chronique collective par la protection commune.
circulation informelle de l’information et
l’expression de jugements sur les autres : Cette organisation du quartier aura eu sa
« tient, il y a encore le fils machin qui vient, durée, le temps que l’émergence du
avec dans son cabas, six bouteilles étoilées ! « consensus fordiste », la croyance partagée
C’est pas malheureux de voir ça ! Il va y avoir dans le progrès et la modernité ne rompent pas
de l’ambiance ce soir ! »… Pour le monde des ce modèle traditionnel. La fonctionnalité de la
hommes, le bistrot de quartier jouait un rôle production de masse perfuse l’organisation de
comparable, lorsqu’il n’était pas de coutume la ville, quand il faut ouvrir des débouchés à
de « prendre l’apéro à la maison ». « On y de nouvelles consommations, faire des
retrouvait les copains, on échangeait sur les catégories dominées des acteurs
boîtes (usines) »… « Le dimanche, on faisait consommateurs des nouveaux biens offerts.
la connaissance du beau-frère d’untel qui était C’est le temps des Z.U.P, quand dans le cadre
invité pour le repas de midi »… Contrôle d’un triptyque « masse, urgence, économie »,
social, certes, mais aussi sociabilité de la il fallait offrir des débouchés à la production
contrainte qui s’exprime également dans une de masse. Il fallait constituer un espace
manière d’appréhender la relation entre un domestique cohérent apte à recevoir les
espace collectif et un espace intime. nouveaux équipements de l’industrie blanche
L’exiguïté des logements renvoyait vers (machine à laver, réfrigérateur…) et de
l’extérieur, un certain nombre un certain l’industrie brune (télévision…) ; mais aussi
nombre de fonctions quotidiennes. Le collectif ces nouvelles lignes de meubles reproductifs
s’imposait, les usages communs déterminaient en séries, immortalisées par le formica. En
des normes et comportements. La vie de même temps que se développaient de
quartier représentait finalement une adaptation nouveaux quartiers, offrant une nouvelle
à un système de contraintes, une manière de qualité de l’espace domestique, naissaient, à
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 10
leurs marges, les supermarchés qui allaient processus de production. En contrepoint, des
profondément transformer les habitudes de grands ensembles « du Français moyen »,
consommation qui deviennent plus anonymes. naissent des quartiers résidentiels dont, pour
On peut s’offrir un rôti dans la semaine, sans des catégories supérieures, Parly 2 en est un
risquer la critique « de vouloir passer pour un archétype. A chaque fois, c’est d’une
nouveau riche ». C’est aussi le moment où le spatialisation des différences sociales dont il
whisky remplace le « vin bouché » des s’agit, comme reflet d’un système de places3
grandes occasions, une expérience qui ne qu’impose une organisation économique.
flatte pas toujours le goût, mais qui témoigne
de l’ouverture des moyens de consommations, On parle de quartiers d’activités, de
d’un accès nouveau à des biens qui sortent des quartiers d’affaires, de q u a r t i e r s
habitudes. Ce sont là des exemples d’une résidentiels, dans le cadre d’une spécialisation
grande banalité, mais qui témoignent de segmentée de la ville, une ville toujours plus
mutations profondes. La principale tient à la fonctionnelle, une ville extensive, où la
privatisation de la vie quotidienne, à rotation des opérations quotidiennes s’ouvre à
l’intériorisation des conduites collectives, de des territoires disjoints que l’on gagne grâce
la famille et des réseaux amicaux. Pour aux transports et aux infrastructures. Avant on
rependre l’analyse de Michel Verret dans parlait de commerces, aujourd’hui il faut
« l’espace ouvrier », à propos de ce parler de commerces de proximité pour parler
changement : « les ouvriers ont gagné un des lieux d’approvisionnement d’un qu’un
espace domestique cohérent, un espace quartier. Qualifier c’est finalement rendre
protecteur pour la famille. Ils y ont perdu la compte de la complexité d’un rapport à
ville ». Il aura fallu faire le tour des bonheurs l’espace. La spécialisation des lieux, c’est
de l’intérieur pour qu’apparaisse d’un coup la aussi la disjonction des formes de sociabilité ;
vacuité d’un l’espace collectif qui n’était plus un gain de liberté individuelle, mais aussi
normé par l’usage… l’abolition d’un contrôle social producteur de
normes communes et donc de socialisation.
On parle de quartiers anciens et de quartiers
nouveaux, donc d’une histoire, qui d’ailleurs On parle de quartiers centraux et de quartiers
ne recoupe pas forcément les distinctions périphériques. Cette distinction d’ordre
classistes évoquées précédemment. Selon les spatial croise souvent la distinction temporelle
moments, et les temps historiques, les (ancien et nouveau). Elle détermine également
quartiers nouveaux représentent une ressource une hiérarchie et une relation au pouvoir : à la
pour les catégories sociales aisées notion de centralité s’attache la représentation
(l’hausmannisation qui fait de Paris une ville du pouvoir et de son épaisseur historique, de
propre, une ville lumière, symbole d’une ses lieux symboliques. Mais, le formalisme de
bourgeoisie triomphante). Plus tard, les grands cette opposition ne s’impose pas à tous les
ensembles et les Z.U.P. créent les conditions espaces centraux. La variabilité est grande
d’accès à la modernité des catégories selon le temps et les types d’espace. Des
populaires et des classes moyennes quartiers anciens, à l’habitat dégradé, abritent
naissantes… En même temps, une forme des populations socialement défavorisées,
dominante crée son contraire. quand la rénovation urbaine fait son œuvre, ils
L’hausmannisation a pour corollaire la 3 : Ceci mériterait de plus amples développements. Nous voulons
densification des quartiers populaires de l’Est simplement mettre l’accent sur une translation entre classe et place.
Simplement, le premier terme réfère à une catégorie
parisien, le développement de la « zone des d’appartenance, à une identité commune et donc à une culture
fortifs » et la naissance de la banlieue partagée. Le second réfère plus à l’individualisation consubstantielle
industrieuse. Mais, c’est dans la cristallisation au passage à la société de consommation, d’une société de
« l’être » et de l’appartenance à une société de « l’avoir pour être ».
de ces deux pôles que se marquent, sur le Ce n’est pas la notion de quartier qui est en cause, mais la manière
territoire, les hiérarchies induites par un dont il peut être approprié, la façon dont on peut se positionne en
termes de vie sociale, la façon dont « on le consomme »…
11 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
deviennent une ressource pour des populations document fondateur du D.S.Q. : « C’est
privilégiées. En témoigne la « boboisation » quartiers où s’invente la ville », une
des quartiers de l’Est parisien (le faubourg dévalorisation du terme de quartier qui
Saint-Antoine, la Folie Méricourt…). De plus devait pourtant ramener une charge positive à
en plus d’études sociodémographiques des lieux qualifiés par des termes
pointent une tendance à la (re) gentryfication technocratiques, aussi problématiques que les
des centres anciens. formes urbaines développées que la vacuité
des espaces publics et de voisinage proposés.
Cependant, le rapport à la centralité varie en Ceci tient à la conjonction entre cet
fonction des besoins d’une histoire familiale. urbanisme, largement inspiré des
L’exemple qui suit nous semble illustratif des caractéristiques de la production de masse, de
évolutions du rapport à la centralité en la croyance en une modernité salvatrice et le
fonction du cycle de vie. Etudiant puis développement d’une société de
débutant dans une carrière professionnelle on consommation ouvrant à une individualisation
recherche la proximité des lieux d’activités, des conduites et des comportements. Les
mais aussi des lieux de mouvements de la sociabilités se privatisent et s’éclatent dans
ville, d’un rapport à la culture et aux loisirs. différents espaces de la ville. La proximité, les
La vie familiale, le bien-être des enfants contraintes d’usage du voisinage ne
conduit souvent à rechercher à la périphérie un structurent plus la vie collective. L a
espace vaste et confortable pour la famille et proximité ne s’impose plus au cœur des
un voisinage de proximité sociale. Les relations sociales. D’un collectif imposé,
lotissements de type « Breguet » ou fondé sur une « sociabilité de la
« Kaufmann et Broad » en sont très illustratifs, contrainte », on doit passer à « un collectif
comme la recherche d’une maison dans le d’adhésion », construire de nouvelles
périurbains, dans un environnement naturel modalités de l’être ensemble, fondatrices de
valorisé (« désir urbain de nature »). Mais il l’identité commune, tant en ce qui concerne
n’est pas rare que, lorsque les enfants sont l’appartenance au lieu qu’en ce qui
élevés, qu’ils quittent le domicile parental, ces concerne l’image que l’on donne aux autres
familles favorisées cherchent à retrouver lieux de la ville. Comment inscrire le
l’espace de centralité. Le rapport à la centralité quartier dans un réseau spatial qui est
peut-être choisi, même s’il est souvent subi, aujourd’hui le substrat de la rotation des
pour d’autres catégories de la population. Le opérations quotidiennes ?
rapport au quartier périphérique est
évidemment fort différent entre le choix et Mais, si l’on explore de contexte des petites
l’assignation à résidence. Depuis, maintenant villes et des villes moyennes, les
trente ans (les premiers projets « habitat et vie développements récents créent une autre
sociale »), la périphérie des villes est d’abord géographie de la spatialisation des différences
considérée comme l’espace de l’anomie et des sociales. L’accession à la propriété des
dysfonctionnements urbains. Au risque de la classes moyennes s’effectue (s’est effectuée)
provocation, s’il existe, aujourd’hui, une sur des communes immédiatement
politique urbaine durable, c’est « la politique périphériques. Alors, les quartiers centraux
de la ville », dans la succession de ses deviennent, au moins transitoirement, des
tâtonnements, pour des espaces exclus de lieux à structure de population bipolaire
l’urbanité et qui ont bien du mal à y revenir. marquée : d’un côté, des quartiers fortement
Des espaces décrits comme invivable où valorisés depuis longtemps, comme héritage
pourtant des gens vivent. Des espaces de d’un passé « heureux » ; de l’autre, des
souffrance pour ceux qui les habitent, des quartiers populaires qui deviennent des lieux
quartiers de craintes pour les habitants des d’exclusion. C’est souvent le destin des villes
quartiers voisins qui craignent l’invasion de industrielles où se développait une mono
« hordes barbares »… Il reste du titre du industrie, qui ont connu un apogée et qui sont
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 12
aujourd’hui en prise avec une crise produit des effets sur la géographie électorale.
approfondie de mutation. Citer une ville, c’est En témoignent les derniers résultats des
prendre le risque supplémentaire de la élections cantonales pour les cantons qui
stigmatisation. Chacun trouvera un exemple entrent dans la sphère d’influence des
dans son espace de travail et de recherche. centralités urbaines. Ces changements
Citons la fin des lainières, la fin de certains politiques sont aussi l’expression de mutations
sites de production automobile, la fin des sociologiques, un différentiel entre la ruralité
activités de mégisserie dans des petites villes déclinante et le « désir urbain de nature »4.
du sud-ouest…
On parle moins souvent de « q u a r t i e r
Le mouvement de déconcentration des centres, sensible » ou plutôt si, mais pour décrire un
entamé depuis trente ans se prolonge par le espace aux prises avec des difficultés, des
mouvement de péri urbanisation qui se craintes et une insécurité généralisée, pas pour
caractérise par l’extension territoriale de la décrire une relation affective au territoire, qui
domination de la ville, particulièrement des fonde une géographie d’habitant, qui définit
métropoles régionales. C’est la péri des limites, désigne les lieux qui construisent
urbanisation, un terme qui reflète des réalités de l’identité collective ou se renforce
bien différentes selon les territoires et les l’interconnaissance.
catégories sociales concernées. L’écart est
grand entre un « désir urbain de nature » et la C’est pourtant bien dans le quartier vécu que
recherche d’un foncier compatible avec des se construisent des singularités, que se forge
ressources. L’écart est grand entre des une identité par rapport aux autres quartiers de
lotissements intégrés et des pavillons qui la ville, que se construit un système d’usages
s’installent aux marges d’un village, quand la fondé sur des valeurs partagées. C’est bien
vie familiale nécessite deux voitures pour se au travers de l’usage que se construit une
rendre au travail, accompagner les enfants à appropriation par des habitants, qu’émergent
diverses activités, allez s’approvisionner dans des processus d’adaptation aux réalités d’une
les zones de chalandise… « Le bonheur est vie sociale, y compris, dans une composante
dans le pré… A condition que les ressources de compréhension et d’intérêt pour le devenir
de la ville ne soient pas trop éloignées… ». de la planète… Cette compréhension se
Cet essaimage de la ville vers le rural, du point combine avec des histoires singulières, qui se
de vue des modes de vie, d’une culture, de la croisent pour construire un être ensemble
demande transforme profondément d’intérêts communs qui ne sont plus
l’organisation des territoires. Si l’absence de préconstruits par des identités d’appartenances
contiguïté, la disjonction de certains collectives, mais qui sont à constituer au gré
lotissements d’avec un cœur de bourg rendent des opportunités et des événements. C’est bien
parfois difficile de parler ces regroupements là un enjeu politique, un enjeu
de maisons comme des quartiers. Et pourtant, démocratique, une nouvelle relation entre le
ces nouvelles productions sont problématiques singulier et le pluriel, une inversion des
quant à une conception durable. L’étalement termes, car le pluriel ne s’impose plus au
de la ville, et son corollaire d’allongement des singulier, il se construit par des agrégations
distances entre l’habitat et le travail, la mise à fugaces, transitoires, temporaires, autour
distance des lieux de chalandise annulent très d’objets cernés, d’histoires qui ont un début et
rapidement les gains que peut apporter une une fin, mais qui, en se cumulant créent une
conception écologiquement satisfaisante. La Histoire, une chronique du lieu. Alors, le
consommation de carburant annule les effets
d’une gestion fine des énergies domestiques,
4 :Nous avons, par exemple, réalisé ce constat, sur les communes
tant en ce qui concerne l’économie
du Pays de Dinan, qui entrent dans les sphères urbaines de Rennes
domestique que le bilan des rejets de CO2… ou de Saint-Brieuc. Les références changent, comme les enjeux
Cette nouvelle spatialisation du peuplement d’une élection. Un nouveau personnel politique émerge, porteur
d’une nouvelle demande sociale.
13 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
durable n’est-il pas le substrat qui assure la urbaines. Mais, les modes de financement
succession des changements et la rotation sociaux de cette forme d’accession sociale à la
des initiatives ? En fait, le temps long doit propriété favorisent les grandes familles. Et
permettre la succession des présents, donc parfois, le voisin étranger que l’on souhaitait
l’appropriation et l’adaptation à une situation fuir est là, de l’autre côté de la haie de
du moment tout en préservant l’avenir des laurier… La somme des logements ne fait pas
futures générations. L’enjeu politique se quartier car souvent, les lieux de rencontres
situe bien dans ce double rapport au n’existent pas. Une image de ces quartiers me
temps : celui de l’immédiateté, d’une semble faire sens : l’alignement des
organisation collective des pratiques et des balançoires aux couleurs verte et orange, au
usages ; celui de la durée pour préserver des fond des parcelles et l’absence de jeux
possibles pour les générations à venir. collectifs pour les enfants. Les effets
politiques directement lisibles dans ces
Nous pourrions poursuivre cet inventaire à la « quartiers » sont mesurables à la force et à
Prévert, mais déjà, la déclinaison des l’enracinement du vote extrême.
qualifications témoigne de la pluralité de la
notion de quartier, une pluralité qui s’inscrit Cette notion d’être ensemble et de la
dans la diversité historique et l’état sociétal du participation à un espace plus vaste devrait
moment, dans une diversité spatiale entre être au cœur de la conception politique du
centralité et périphérie puis péri quartier. Comme espace de vie, le quartier est
urbanisation… dans une diversité de un lieu de relation, donc de citoyenneté active.
peuplement (ségrégation spatiale), dans une Il n’est pourtant pas un lieu de référence pour
diversité d’usages en fonction de la l’organisation de la démocratie représentative
localisation (accessibilité, transports, distance qui s’articule à d’autres niveaux de territoires
aux pôles d’activité et aux secteurs de (au moins la ville), même si on tente la mise
chalandise, service urbain)… Il n’est pas en place de budgets participatifs dont l’échelle
inutile de rappeler ici, qu’en termes de bilan est le quartier. C’est la question des limites et
en CO2 les bénéfices d’une maison des échelles qui sont posées. Il s’agit de
écologiquement satisfaisante sont prendre en compte l’emboîtement et la
pratiquement annulés par des parcours porosité des espaces. Le quartier n’est pas un
journaliers importants. Mais au-delà, les espace clos qui définit lui-même ses
habitants périurbains doivent souvent faire le frontières. Il est aussi travaillé par les lieux qui
deuil des illusions et des bénéfices l’entourent, qui agissent aussi sur sa plasticité,
symboliques escomptés d’un accès à la sur son image. La prise en compte d’une
propriété et à la maison individuelle, quand, hiérarchie des espaces dans sa complexité est
petit à petit, se révèlent les nouvelles une condition de l’insertion durable de
contraintes du quotidien, lorsque la seconde nouveaux quartiers durables, dans une logique
voiture est nécessaire, pour faire les courses, de politique globale. Ceci interroge le rôle de
accompagner les enfants à des activités l’expérimentation, du modèle et des limites
diverses… Finalement, le barbecue du qui le définissent. Le problème est
dimanche est d’un coût élevé… Les généralement de passer à l’étape supérieure :
désillusions sont d’autant plus fortes que comment l’expérience perfuse le droit
l’exiguïté des ressources conduit à limiter les commun, impose nouvelle une conception de
désirs, à abdiquer de la maison rêvée. l’organisation sociale, une nouvelle manière
L’histoire du PAP (accession sociale à la de penser le sociétal. La frontière est ténue
propriété) est très édifiante. En raccourci, ces entre le modèle productif de changement et
lotissements de logements peu chers, mais de l’expérience close où finalement la réussite
faible qualité de vie, ont été occupés par des est une manière de dire à l’environnement :
catégories moyennes fuyant les espaces « regardez comme vous êtes laids et
stigmatisés des premières périphéries ringards ». C’est là un enjeu démocratique
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 14
fondamental. Car si les quartiers peuvent moins prendre en compte des phénomènes
être un support de mutations pour tous, ils plus globaux, plus transversaux. C’est plus
peuvent être aussi « une nouvelle frontière souvent le résultat qui fait l’objet de la
sociale », l’affirmation spatiale de diffusion de l’expérience que le processus qui
différences sociales, avec en plus la y conduit. Pourtant, c’est bien dans les
culpabilité qui s’attache à ceux qui abîment manières de faire, dans les processus, dans les
la planète. systèmes d’acteurs qui se constituent, que se
trouvent les occasions d’échanges et de
capitalisation. La notion de capitalisation est
1.5 Le Quartiers durable : essentielle pour se situer dans la perspective
Si les mots « Quartier » et « Durable » ont des du durable. Elle réfère à la notion d’héritage,
définitions difficiles à établir, ces termes sont tant en termes d’acquis que de « droit
encore plus piégés quand on les regroupe. Il d’inventaire » quand l’héritage est conçu dans
faut donc trouver le dénominateur commun sa double composante : valorisation de ceux
permettant de s’accorder sur ces notions. qui transmettent (exister au-delà de soi-même)
Puisque le terme de « Quartier » a fait l’objet offrir un substrat à ceux qui reçoivent pour
d’une première définition en guise consolider le présent et envisager l’avenir.
d’introduction, c’est à la notion de « Durable » C’est une manière de recomposer une relation
qu’il faut apporter son attention. « Durable » au temps long dans une société qui semble
est une mauvaise traduction de l’anglais parfois condamnée à un « présent perpétuel ».
« sustainable » (to sustain : supporter, C’est une manière de s’inscrire dans une
soutenir, préserver). La traduction de ce terme dynamique du temps, d’envisager le
influe désormais sur les politiques qui en durable comme un espace d’inventions
découlent. Ainsi, le terme de durable donne successives, y compris si l’on doit revenir
une fausse idée de pérennité et surtout gomme sur la croyance en un progrès qui ne
la valeur pus active du terme anglo-saxon en pourrait passer que par formes
gommant la notion de processus au profit du quantitatives de la croissance, dans une
résultat. sorte d’enchaînement inéluctable, dont les
Avec le terme « développement durable », inflexions de la courbe ascendante ne
nous restons forcément prisonnier de la notion seraient que des accidents de parcours.
de croissance qui pose l’hypothèse que le
développement perdurera. Pourtant, on assiste Evidemment, l’inscription dans la durée pose
aujourd’hui à la montée d’idées contraires de la question des conditions de diffusion des
la part de ceux qui pensent impossible le fait expériences. Et c’est bien d’abord l’expérience
de se développer indéfiniment. De ce point de en tant que telle qui doit être diffusée avant le
vue, la notion d’évolution paraît plus opérante. produit. C’est une manière d’éviter l’écueil de
la stricte communication sur le produit qui
renvoie au modèle et à la technicité qu’il
1.6 Construire un savoir cristallise ou qui réfère à des groupes qui se
partageable et diffusable. sont constitués autour d’un entre soi fort, des
valeurs partagées, le développement de
Il faut d’abord évoquer un serpent de mer : la revendications. Or, si on envisage la question
difficulté que rencontrent des opérations du point de vue du politique, c’est bien des
expérimentales à perfuser le droit commun, conditions de prise de décision, de la capacité
donc à être reconnues dans leur qualité de à transformer des processus de conception
novation. C’est une situation générale ; les (système d’acteurs, participation des
expériences sont nombreuses, mais elles se habitants), de la manière d’envisager la place
limitent le plus souvent aux contingences du quartier dans un système territorial plus
d’une approche thématique, aux limites de la vaste, de la manière d’articuler un projet à
« monographie de territoire » qui tend, par d’autres enjeux sociétaux, comme la question
principe, à survaloriser des singularités et à
15 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
de la ségrégation spatiale, des problèmes de cause. Car, s’il est nécessaire de se soucier de
mixité sociale, d’accès à l’espace public, de la l’avenir de la planète, il convient aussi de
question de l’équité, dont on doit parler. prendre en compte de nouvelles demandes
d’habiter, liées aux transformations sociétales
Et ce n’est pas si facile, surtout pour les importantes que connaît notre société.
politiques, qui, dans un contexte d’inquiétude
et de difficultés, cherchent la réassurance de Il faut souligner encore une fois le paradoxe
la technique comme socle de stabilité. Il existe entre l’individualisation des conduites et des
parfois la tentation de surfer sur la valeur comportements et les nécessités d’une prise en
communicante du développement durable. On charge collective du destin de la planète. Dans
constate, qu’assez souvent, la mise en place ce cadre, la question des transports collectifs
d’un agenda 21 est confiée d’abord à un se pose de manière cruciale en termes de bilan
organisme de communication. Même si quant à des c o m p o r tements
l’implication des habitants est recherchée, elle environnementaux satisfaisants. Les gains
se pose plus comme une technique que comme énergétiques réalisés dans une construction ne
un enjeu démocratique pérenne. L’échange sur sont-ils pas remis en cause par une distance
les conditions de mobilisation, de importante, entre le domicile et le travail,
participation, doit faire l’objet de couverte en voiture ? Cette question interpelle
confrontations qui organisent une volonté le politique au cœur sa fonction essentielle de
démocratique à un niveau territorial plus large. « création des conditions de l’être ensemble ».
La question du durable y participe
évidemment. Elle peut même être un substrat
1.7 Q u e s t i o n s pour des vers de nouvelles manières de « faire
quartiers durables. société ». Ainsi envisager, la gestion politique
Le durable a un coût, les retours sur du durable, appelle une approche globale de la
investissement peuvent être longs (mais question et permet d’éviter le repli sur la
nécessaires dans des objectifs globaux comme réassurance d’une approche technique
l’émission de CO2). Si le politique le pose supposée stable.
comme un enjeu essentiel, il doit en même
temps permettre à tous d’en bénéficier et La posture politique ainsi exprimée renforce
surtout de participer à un projet commun. l’idée de la constitution d’une expérience
C’est dans l’articulation de ces deux termes commune sur le processus. C’est d’abord
que se gère l’enjeu démocratique, pour faire définir des objectifs et un sens commun. C’est
pièce à des discours entendus, qui émanent ensuite définir des façons de faire dans une
souvent des techniciens de la maîtrise mutualisation d’expériences qui concernent la
d’ouvrage, qui veulent que le durable soit une mobilisation des acteurs, la constitution de
utopie sympathique, mais peu réaliste. On ne diagnostics partagés, la reconnaissance d’une
sait d’ailleurs pas très bien si cette posture de intelligence d’habitants. C’est un appel à sortir
retrait tient aux craintes de surcoûts dans le des approches segmentées qui marquent, par
financement des opérations ou à la remise en exemple, l’histoire de la « politique de la
cause d’un confort fondé sur des savoirs faire ville ». Elles témoignent de la difficulté de
éprouvés. Bien sûr, personne ne proposera constituer un lexique commun qui permettrait
aujourd’hui de construire un bâtiment une synthèse des compétences. Un exemple :
dispendieux en énergie, fortement producteur parler de quartier durable implique la
de CO2 ! Des évolutions techniques sont mobilisation des acteurs des politiques
prises en compte, intégrées aux procédures de sociales dans le projet, pas seulement pour
construction. Mais, les craintes que suscitent gérer des procédures ou faire passer messages,
le durable sont d’un autre ordre. Les acteurs mais pour exprimer des convictions fondées
ressentent qu’insidieusement, c’est l’ensemble sur des analyses de la vie sociale et des
des façons de concevoir la ville qui est en rapports sociaux. Pour atteindre cet objectif,
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 16
descriptions plus fines, mais il s’agit de faire reconnaissance de leurs utilités propres. La
référence à la fois à la notion d’usage et de dégradation de la notion de quartier tient à des
valeur des quartiers. désignations, par l’extérieur de leurs identités.
Trente années de politique de la ville (eh oui,
Sur la notion d’usage, il nous semble qu’elle les premiers plans H.V.S. ont déjà trente ans !)
peut constituer une nouvelle approche du ont prouvé combien la stigmatisation des
concept de mixité sociale dont la polysémie et « quartiers » se superposait, comme une
la gloire médiatique trouble le sens. Il n’est souffrance supplémentaire, au cumul des
plus guère possible de développer un discours handicaps sociaux.
politique sans qu’il n’y soit fait référence ;
plus souvent dans le cadre d’une imprécation Si l’enjeu est de redéfinir une valeur des
que d’un objectif. quartiers : faire partager ce projet est bien de
la responsabilité du politique. Cette prise en
L’usage doit être considéré comme manière compte de l’objet par le politique interroge,
d’adapter un espace à une situation. En ce au-delà du diagnostic, des modalités de
sens, la « consommation de la ville » est « l’être ensemble », quand il ne s’agit plus
invention. Ces inventions dépendent d’un seulement d’imposer de nouvelles normes,
statut social et des valeurs qui s’y attachent, mais d’entrer dans un processus de
mais aussi d’une situation générationnelle, socialisation qui permet de les faire siennes.
d’origines ethniques. Ainsi, les combinaisons C’est la reconnaissance d’un « habitant
sont multiples. Elles se singularisent, mais acteur » et le que quartier mais aussi la ville en
aussi s’interpénètrent ou se confrontent dans sont les scènes. Les décors changent, mais
une ville et des quartiers où se jouent à la fois c’est la même pièce qui se joue. En
consensus, échanges des arts de faire, mais poursuivant la métaphore théâtrale, le
aussi confrontations et conflits, du fait de la politique est le metteur en scène qui permet
diversité des usages, d’écarts sociaux que chacun donne le meilleur de soi, mais en
grandissants et de superposition à ses écarts, fonction du rôle assigné aux autres acteurs. Il
de hiérarchies spatiales qui font que la ville s’agit de convaincre, d’expliquer des enjeux,
n’est pas accessible à tous, au moins pas dans d’animer des démarches qui constituent le
les mêmes conditions et souvent pas autour projet collectif et les manières de faire
des mêmes désirs. La question est posée de la ensemble qui permettront de tendre vers un
compétence (de la valeur) et de la spécificité objectif.
des quartiers, en ce qu’ils imposent et/ou
permettent ; mais aussi sur la manière dont ils Faire comprendre que l’objectif est ici et
se fédèrent. N’est-ce pas finalement le rôle de ailleurs incite à poser les termes de l’échange.
l’espace public ? La question du quartier se Autrement dit, je peux participer au futur de la
pose donc dans cette hiérarchie, du libre accès planète, mais que puis-je en attendre, pour moi
et de la confrontation dans l’espace public et et ma famille ? Comment cela se traduit-il
de lieux où se joue de la connivence, de la dans mon quotidien, dans ma vie propre ?
reconnaissance mutuelle de valeurs Comment prend-on en considération la
communes. De ce point de vue, l’entrée par revendication générale d’individualisation ?
l’usage est intéressante, entre des lieux ouverts Comment est-il possible de recomposer, à
dont la crainte serait l’identification et des partir de cela de nouvelles modalités de l’être
espaces où se négocie un entre soi, plus ensemble et pour ce qui nous préoccupe
restreint, fondé sur des proximités de comment faire du quartier un espace d’action
références et donc de pratiques. La collective ? Finalement, comment sortir d’un
compétence des quartiers est donc à géométrie processus, à l’œuvre depuis longtemps : la
variable. Si les usages s’y différencient, ce ne privatisation de la vie quotidienne ?
doit pas être l’occasion de la composition d’un
classement sur leurs valeurs supposées mais la
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 18
Si on admet que les identités collectives ont d’empreinte sociale pour envisager le durable
perdu de leur force dans l’organisation de la comme un espace d’expériences renouvelées.
vie collective, comme support de sociabilité,
souvent lié à un système de contrainte soutenu On se demande, si le temps n’est pas venu de
par des identités d’appartenance prédéfinies, sortir d’une culture du « clé en main », au
que l’individualisation est vécue comme un profit de celle de l’inachevé. Qu’il s’agisse des
gain de liberté ; la question est posée de grands ensembles, puis des lotissements la
comment réarmer les notions d’égalité et de logique est finalement la même. Voici un
fraternité ? Comment passer de formes de produit, arrangez-vous avec ! C’est d’abord la
sociabilités contraintes mais protectrices à des culture de l’objet qui prévaut, avec la
sociabilités d’adhésion et de participation à un cristallisation d’une culture dominante que
projet ? Car, pour certains, la liberté gagner l’espace d’adaptation et d’invention. On peut,
n’est que théorique et la perte de protection par exemple, s’interroger sur les possibilités
certaine, en l’absence de solidarités de d’adaptation d’un logement et d’un quartier au
groupes et de territoires. C’est là un enjeu cycle de vie d’une famille. Comment, dans un
démocratique essentiel, un objectif durable… logement social, peut-on gérer l’évolution des
comportements des individus au sein de la
Puisque les permanences des groupes, des famille ? Est-il possible de gérer une demande
rôles et des places qui organisaient la vie d’autonomie plus grande d’un jeune qui n’a
sociale et les relations se sont estompées, guère de possibilité de l’acquérir par une
comment construire les événements décohabitation ? Dans un pavillon en
nécessaires à l’adhésion au collectif. Le terme propriété, on peut parfois s’arranger avec un
d’événement nous semble intéressant comme « aménagement bricolé en sous-sol », mais
support de la recomposition d’un « être qu’en fait-on quand les enfants doivent quitter
ensemble ». Il tient compte des temporalités le territoire pour faire des études longues, ou
mouvantes d’une société en mutation. intégrer un emploi à la hauteur d’une
L’approche événementielle prend en compte qualification obtenue ? Est-il possible
des temporalités incertaines, d’événements qui d’accueillir d’autres jeunes qui ne seront que
naissent et meurent qui parfois perdure. On passagers sur un territoire, dans quel type de
peut entrer dans une action collective puis en relation d’échange ? C’est une manière
sortir, lorsqu’on considère qu’il faut passer à d’intégrer la notion de transition dans un
autre chose, que l’engagement a épuisé des rapport au temps et à l’espace. C’est une
bénéfices individuels et collectifs. Alors, manière de poser la question du « passager »
comment faire en sorte qu’un ensemble sur un territoire. Trop souvent, le droit à
d’initiatives partielles constitue une trace et l’identité dépend de la permanence de la
donc un héritage commun ? Agréger les effets présence sur un territoire. Au risque de la
des initiatives est un objectif politique qui provocation, et en prenant en compte la
impose l’entrée dans une culture de volatilité des engagements n’y a-t-il pas une
« l’évaluation permanente ». C’est une possibilité de considérer que des citoyennetés
manière de référer au double sens de l’histoire territoriales peuvent l’être à « durée
entre des événements finis et des déterminée » ? La responsabilité du politique
permanences. C’est à la fois tenir compte d’un est d’inscrire les transitions spatio-temporelles
contexte de fluidité des conduites et des dans la durée. Etre « passager » dans un
comportements, d’une vision plus éthérée de quartier, dans le cadre d’une trajectoire
l’engagement et de construire une logique professionnelle, qui appelle la mobilité ne
pérenne. C’est le sens qu’il faut accorder à la devait pas confiner à des formes
notion de trace. C’est à la fois une volonté de d’extraterritorialité… Arriver dans un
construire un présent actif, une référence pour territoire sans en être… Il est à noter que les
les initiatives du futur. On parle d’empreinte jeunes, comme débutants des cursus
écologique, nous proposons de parler aussi professionnels et résidentiels, sont souvent
19 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
responsabilités : les politiques, les maîtres Une fois encore, mettre en place la
d’ouvrages, les architectes, les gestionnaires, prise en compte de l’avis de l’ensemble des
les usager et les autres acteurs. Tous ces personnes touchées par l’aménagement d’un
acteurs ont des préjugés, mais ils évoluent à quartier est indispensable. Si la concertation
condition de créer des lieux et des conditions est correctement préparée, elle interpelle la
propice à la discussion, à la participation société civile de façon très concrète la faisant
collective et à la médiatisation du projet. Les ainsi réagir. La question urbaine doit
situations de médiation sont plus importantes trouver sa place dans le dialogue entre le
que les aspects techniques qui finalement politique et le citoyen.
n’ont d’obstacles que financiers et culturels.
Les expériences de type associatif, comme
celle que mènent l’association « Robins des 2.2.3 E x i s t e - t - i l u n c o n s e n s u s
villes » basé à Lyon, sont à prendre en européen ?7
compte : plusieurs associations inscrites sous Pour pouvoir mettre en place les objectifs du
le régime de la loi de 1901 œuvre pour développent durable à l’échelle européenne,
faciliter des relations entres les divers acteurs encore faut-il faire en sorte que tous les
de la villes (notamment par le biais de membres de l’union s’accordent sur ce que
sensibilisation des citoyens), ainsi que pour doivent être les actions prioritaires du
développer des réflexions autours des enjeux développement durable. Au travers d’une
liés au projet urbain. étude comparative des diverses approches
C’est peut-être en mettant en place des étatiques du développement durable, nous
ateliers de réflexion sur le thème de la qualité pourrons voir si une action communautaire est
environnementale qu’il faut agir. envisageable.
Il faut se demander quels sont les
moyens à mettre en œuvre pour réussir à faire Ce panorama rend compte des différents états
participer l’ensemble des acteurs sociaux aux d’esprits avec lesquels les pays européens
mêmes projets. Il faut trouver une manière de abordent les questions de renouvellement
soutenir les initiatives des habitants et les faire urbain durable. On voit à quel point le
participer aux prises de décisions les Royaume-Uni aborde ces questions par l’angle
consternant. Il ne faut pas oublier non plus que communautaire tandis que l’Allemagne a une
le bailleur est un acteur de la vie sociale. C’est approche techniquement réalisable et les pays
pourquoi il faut garder une vision dynamique scandinaves une approche éco-systémique. Le
des quartiers, et ne pas les considérer texte écrit par le pôle de recherche de l’IEP
uniquement comme des objets statiques. synthétise les questions que se posent les
différentes villes européennes et permet de
2.2.2 Quelle méthodologie peut-être faire émerger un modèle urbain (si tant est que
durable ? cette dernière notion soit opérante) œuvrant
Malgré la jeunesse de la démarche durable à pour la prise en compte du développement
l’échelle des quartiers, on voit naître plusieurs durable dans les opérations de renouvellement
méthodes, tentatives méthodologiques, des agglomérations. La recherche de l’IEP
expertises,… sur ce thème. En suivant ces commence par montrer comment la
premiers exemples, il faut envisager de planification urbaine est passée de la charte
modifier les outils qui nous servent à mener d’Athènes à la charte d’Aalborg. La première
des opérations d’aménagement. Mettre en est l’œuvre de Le Corbusier à la suite du
œuvre une démarche durable sur leurs CIAM (Congrès International d’Architecture
territoires est à envisager, en insistant
d’avantage sur la concertation avec les
habitants. Il faut aussi chercher à renforcer les
7 Nous prendrons ici appui sur les travaux du pôle intégré de
recherche et d’enseignement PROSES (Programme Science,
interactions entre les différentes échelles environnement, société) de l’Institut d’Etudes Politique : Les Villes
d’interventions. européennes faces au développement durable : une floraison
d’initiatives sur fond de désengagement politique, Chahier8.
23 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
Moderne) d’Athènes de 1933, la seconde est le pour une approche scientifique des notions de
fruit de la réflexion des villes européenne développement durable. Cela passe souvent
présente de la conférence d’Aalborg sur les par une labélisation –écologique– d’un certain
villes durables en 1994. nombre de produits et services. Un système
La charte d’Athènes est un pur produit d’éco-taxes est également mis en place. Au
de l’hygénisme fonctionnaliste des années 30’. delà de l’aspect de stigmatisation du pollueur-
La place dévolue à la voiture y est payeur, cette éco-fiscalité permet de mettre en
prépondérante, de même que le principe de la place un certain nombre de « réflexes » éco-
table rase, le zonage urbain, la reproductibilité citoyens (si tant est qu’un réflexe puisse-être
d’un style international (prémisse de acquis). Aux Pays-Bas, cela abouti à la mise
l’architecture générique), la rationalisation en place par certaine ville de mesures de leurs
géométrique de l’espace urbain et une dé- empruntes écologiques, c’est à dire mesurer la
densification de la ville pour augmenter les surface nécessaire à faire vivre
apports en lumière naturelle et la ventilation convenablement leurs populations (nourriture,
naturelle. La charte d’Aalborg propose au enfouissement des déchets, production
contraire de développer un urbanisme tourné énergétique…)
vers un renouveau des usages de la voirie par
la diversification des modes de déplacement, La logique de mise en place de « sustainable
une mise en valeur du patrimoine urbain et lifestyles », autrement dit « modes de vie
architecturale, une mixité fonctionnelle, durables », semble être poussé à bout en
politique, et sociale, un tracé urbain singulier Suède puisque le royaume a mis en place un
et adapté au site en prenant également en certain nombre de principe de prévention. Les
compte les avis des résidents et une questions de santé sont analysées suivant les
densification de l’espace urbain afin de lutté différents modes de vie. Certains d’entre eux
contre le mitage du territoire. sont considéré comme « plus sains ou plus
De même, la charte d’Aalborg, écologique » que d’autre. Les politiques de
propose de sortir du « tout hygiène » des quelques municipalités suédoises sont
modernes en mettant en place une gestion des évaluées au travers de ce prisme
eaux pluviales à ciel ouvert et en mettant fin à thérapeutique. Cela permet de prendre en
l’engazonnement des l’espaces verts et en compte la réelle force de levier des leviers des
rendant les sols de plus en plus perméable. actions publiques locales.
Pour mettre en place les principes Il en va de même pour les actions de
découlant du développement durable, les participation de la population au sein des
approches des différents membres de l’UE agendas 21 locaux : lorsque ces derniers sont
sont différentes : substantiellement financer par les instances
• Le Royaume-Uni envisage le étatiques, ce qui est le cas en Suède, ils
collectivisme comme étant la base de l’action peuvent être facteur de réorientation des
de défense des intérêts collectifs. On assiste comportements consuméristes en faveur du
finalement à la monter en puissance du développement durable. Ce type de démarche
pouvoir décisionnel des populations s’inscrit dans le cadre du respect des cycles
autochtones. Mais il est à noter que cette écologique de la loi « éco-cycles » qui existe
autonomisation décisionnelle des associations depuis le début des années 90’ en Suède.
d’habitants ou de consommateurs pousse
souvent les pouvoirs publics à se désengager La prise en compte de l’ambiance intérieure et
d’un certain type d’espace démocratique pour de la pollution des espaces confinés fait
mieux réduire les coûts de la démocratie parties des démarches originales mises en
locale. œuvres par les autorités scandinaves. De
• Les pays comme l’Allemagne, même, l’adaptation des lieux publics et des
l’Autriche, la Suisse, les Pays-Bas, le transports publics aux personnes à mobilités
Danemark et les pays scandinaves ont opté réduites mais aussi aux personnes âgées et aux
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 24
enfants est un point fortement mis en valeur Ecopolis, propose quant à lui un modèle idéal
par les instances publiques. prenant en compte un maximum d’éléments de
planification écologique. On trouve également
Les mesures incitatives en faveur du dans plusieurs pays européens des études sur
développement de « modes de vie la planification ayant particulièrement attrait à
écologiques », responsables et moins l’établissement des réseaux de transport et des
consuméristes sont pléthores dans le monde pôles poly-nodaux. La multiplication des
même si leurs impactes réels sont variables centres d’activités humaines semble se
d’un état à l’autre. Ainsi la journée sans achat développer. On parle de plus en plus de
en France est d’un intérêt très relatif alors que polycentrisme pour exprimer le fait qu’il faut
le Global Action Plan (GAP) semble apporté inciter les populations à s’installer à proximité
aux « Ecoteam » qui désirent le mettre en immédiate d’un nœud de transport, de service,
place une méthodologie la plus efficace d’activités, de loisirs et de réseau afin de lutter
possible pour réduire les consommations contre l’étalement urbain et permettre des
domestique de ressources naturelle et les économies de transport. Diffuser cette
productions de déchets ménagés. L’un des typologie urbaine revient à réorienter les
avantages majeur des GAP est la mise en questions liées aux établissements humains en
réseau des résultats des différentes équipes et zones péri-urbaines. L’habitat diffus
les échanges qui en découlent. pavillonnaire mitant le paysage doit évoluer
vers une plus grande densification. Cela se
Une démarche volontariste de planification traduit en Allemagne par le concept de ville
permet à certain état de réduire fortement leurs compacte.
consommations énergétiques liées aux
transports. C’est le mouvement de rénovation Le concept de densification urbaine qui en
des processus d’aménagements urbains qui se découle est de plus en plus prôné par les
développe depuis plusieurs années dans les aménageurs et les collectivités territoriales. En
pays rhénans. Cela passe par : plus de la réduction des déplacements
« automobiles, l’optique est de considérer de
• La planification croisée du réseau de plus en plus le territoire comme une ressource
transports en commun et des extensions rare, à préserver. On retrouve cette conception
urbaines, de l’aménagement aux Pays-bas, pays où la
• La densification urbaine le long des densité est depuis longtemps déjà un enjeu
infrastructures de transport collectif existantes, majeur de l’aménagement du territoire. Mais
• Le déploiement des transports en si les questions de densité urbaine sont
commun (ferroviaires) à l’échelle des régions indispensables dans une approche de
urbaines (comme à Karlsruhe), l’urbanisme durable (notamment pour un gain
• L’organisation polycentrique de la certain d’économie d’énergie liée aux
ville, transports), elles ne peuvent être suffisante
• L’aménagement de trames vertes, qui pour faire une ville durable.
canalisent l’urbanisation tout en offrant un
support pour des cheminements doux, des La notion de ville renouvelée visant à la
espaces récréatifs et différents « services reconquête de l’urbain est indissociable de la
écologiques » (comme l’auto épuration de notion précédente. Cette reconquête passe par
l’eau, de l’aire, le maintien de la biodiversité, une réhabilitation écologique et sociale du bâti
la limitation des risques d’inondation, etc.) » ancien afin de reprendre possession de lieux
Les Pays-Bas agissent depuis 1988 qui ne semblent pas propice à un changement
dans ce sens avec le système « ABC » qui d’usage. La ville doit être, comme elle l’a
guide l’implantation des entreprises en longtemps été, le territoire de la réutilisation
fonction de leurs activités et de leurs besoins des tissus urbains, du foncier et de
de mobilité. Le travail de Sybrand Tjallingii, l’immobilier. L’objectif étant, pour reprendre
25 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
indispensable pour augmenter l’efficacité de plus jeunes est un point central dans l’action
ceux-ci. D’autres réseaux, comme ceux des en faveur des quartiers les plus déshérités.
eaux de l’électricité, du gaz, etc. sont à • Encourager la mise en place d’un
améliorer pour prendre en compte de système de transports urbains performant
développement durable. Cette amélioration et à un prix abordable. Une politique de
des réseaux et de leur gestion ne peut transport urbain en faveur des quartiers
s’envisager dans une lutte en faveur de défavorisés trop souvent mal desservis est à
l’augmentation du rendement énergétique, mettre en place pour permettre leur intégration
sans sont corollaire qu’est la lutte contre sociale au sein de la cité toute entière.
l’étalement urbain. Il est demandé aux villes
de permettre à un maximum de solutions La charte de Leipzig permet aux états de
innovantes de voir le jour pour prendre en reconnaître l’importance des villes dans la
compte l’enjeu qu’est la réduction des mise en place de politique durable. Cette prise
émissions de CO_. en compte de l’échelle urbaine sans pour
• Politique d’innovation active dans le autant signifier un désengagement de l’état
domaine de l’éducation et de la formation. dans les politiques urbaines est l’un des
En matière d’enseignement et de avantages certains de cette charte. Celle-ci
connaissance, la ville est le lieu où se propage préconise même un renforcement des
le plus rapidement toutes formes de savoir. La concertations décisionnelles entre état,
ville et la politique urbaine de développement collectivités, acteurs économiques, et
doit permettre aux divers acteurs du domaine habitants. Les leviers financiers à actionner
de l’éducation de se rencontrer. Faciliter le sont mis en avant afin de permettre d’agir en
dialogue interculturel est primordiale au sein faveur du développement durable dans les
des communautés urbaines. villes le plus rapidement possible. Les points
• Accorder un intérêt particulier aux pouvant être le plus efficacement généralisé
quartiers urbains défavorisés dans le dans une optique de développement durable
contexte de l’ensemble des villes sont clairement soulignés malgré l’aspect
concernées. Constat est fait des disparités au répétitifs de certain des items abordés. Si
sein même d’une ville (disparités sociales et l’action en faveur des quartiers les plus
économiques en tête). Ces inégalités sont sensibles semble être la préoccupation
l’une des sources de troubles à l’endroit du majeure des ministres des états membres de
maintient de la sécurité. Pour résorber les l’union européenne, il semble que l’action en
grandes difficultés dont certain quartier sont faveur des autres secteurs de la ville soit
victimes, une politique de dialogue entre les quelque peut délasser. Il faut se méfier de
institutions, les habitants et les autres acteurs cette volonté d’agir trop tournée vers une
économiques, est indispensable. seule catégorie sociale qui risquerai de
• Pérenniser les stratégies de mise en stigmatiser –et donc paupériser– les
valeur des qualités urbanisitques. Cela populations que l’on souhaite au contraire voir
consite à mettre en œuvre des actions de s’épanouir.
rénovation architecturale et urbaine de
manière à revaloriser les quartiers défavorisés.
• Renforcement de l’économie locale
et de la politique locale de marché du
travail. La revitalisation des quartiers les plus
déshérités passe par une création d’emplois au
sein même des zones en difficultés et un
développement de l’économie locale.
• Politique active d’enseignement et de
formation en faveur des enfants et des
jeunes. L’enseignement et la formation des
31 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
réalisés par le CERTU en mars 2006 dans les Mise en place du Projet d’Aménagement
fiches pratiques sur le PLU. Durable (PADD) dans le Plan Local d
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 38
Les biens affectés au logement des étudiants 3.3 Notre arsenal juridique est-il
appartenant à l’Etat seront transférés de plein adapté au développement
droit à titre gratuit aux collectivités et
durable ?
groupements auxquels la compétence aura été
transférée. Après cet aperçu des textes de loi les plus
• « En matière d ’ u r b a n i s m e , important pour l’élaboration de projet urbain
durable, certaines questions se posent :
l’instruction gratuite par les services
déconcentrés de l’Etat des demandes de
permis de construire ne concernera désormais 3.3.1 Faut-il modifier certaines lois ?
plus que les communes et groupements de
moins de 10.000 habitants. Par ailleurs, Les questions que se posent certains
l’obligation d’obtenir l’accord du ministre professionnels viennent du faite que les
compétent pour la démolition des logements opérations se revendiquant du développement
relevant de la loi de 1948 a été supprimée par durable ne sont pas évalués uniformément. De
plus, les indicateurs sensés permettre cet
le Sénat. »
évaluation semblent assez mal choisis et ne
• « Dans le domaine du patrimoine, la permettent pas une évaluation comparative
loi organise la décentralisation de quantifiable. Les professionnels semblent
l’inventaire général du patrimoine culturel et également mettre en avant la non-adaptation
permet le transfert de la propriété de certains du droit français face au développement
monuments historiques aux collectivités durable. En effet, le permis de construire se
territoriales qui en font la demande. » limite à l’urbanisme et non aux objectifs
• « La loi autorise les départements à techniques qui sont pourtant obligatoirement
utiliser le produit de la taxe des espaces présent dans la prise en compte du
naturels sensibles pour l’acquisition, développement durable.
l’aménagement et la gestion des espaces, sites Aujourd’hui, il existe un corpus
et itinéraires figurant au plan départemental juridique cohérent, en matière d’adaptabilité
relatif aux sports de nature. » de la règle de droit, mais il persiste sur ces
• « L’article 122 de la loi étend aux questions un problème de culture de la règle
départements et aux régions le droit reconnu de droit, notamment de la part des politiques.
aux communes d’organiser des Cette question du déficit culturel en matière de
« référendums consultatifs » sur toutes droit est à mettre en lien avec la question du
affaires de leurs compétences. En outre il renversement de la création du droit posé lors
autorise les EPCI à organiser de telles des ateliers Quartiers Durables de l’automne
consultations sur toutes les questions de leur 2006. Des montages juridiques sont à mettre
ressort, sans limitation aux opérations en place si l’on souhaite voir au sein d’une
d’aménagement. Enfin, il ouvre aux électeurs même opération des logements en accession à
la possibilité de proposer aux conseils de la propriété et des logements en locations.
toutes les collectivités territoriales et des La mise en place d’une synergie de
EPCI, d’organiser une consultation sur toute projet autour du développement durable est
affaire de la compétence de l’assemblée rendu difficile par les termes même de la loi
délibérante. Par ailleurs, il est prévu que les 85-704 du 12 juillet 1985 relative à la maîtrise
personnes inscrites sur les listes électorales d’ouvrage publique et à ses rapports avec la
municipales seront consultées sur maîtrise d’œuvre privée dite loi M.O.P.
l’opportunité de la fusion de communes
(article 123). » 3.3.2 Les questions normatives.
Les questions normatives ne semblent pas être
celles à poser en parallèle aux enjeux soulevés
par le développement durable. En effet, elles
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 40
ne permettent pas suffisamment d’innover au français doivent d’ors et déjà être posé pour
moment où un saut d’échelle s’impose. Il faut assurer la bonne marche de ce futur grenelle.
parvenir à passer de la norme à une logique du
« corps de règles » afin de parvenir à créer un
cahier des charges, support de négociation de
l’ensemble des acteurs.
4 Petites méthodes
pour les quartiers
3.3.3 C o m m e n t modifier le durables.
financement des opérations
d’aménagement durable ? Il existe à l’heure actuelle pléthore de guides
Nous savons qu’actuellement le financement méthodologiques ayant pour but de permettre
des aménagements urbain est en grande partie de faire de l’aménagement urbain durable.
le fait du secteur public. Cela ne pauserai pas Tous n’ont pas le même objectif : certain ce
de problème si les propriétaires fonciers des veulent directement opérationnel, d’autre
terrains bordant les aménagements ne orientent les décisions à prendre en matière
dégageait pas de tels plus-values. Par exemple, d’aménagement. Ces documents n’ont pas non
on sait que le coût de la construction du tram plus la même qualité ni le même intérêt. C’est
parisien équivaut aux plus-values qu’ont pour cela que nous avons choisi de porter
réalisés les propriétaires du voisinage. Dès particulièrement notre regard sur trois
lors, il faut se demander comment faire en méthodes : les 11 objectifs pour
sorte de d’utiliser cette spéculation foncière et l’aménagement urbain durable, la charte de
immobilière pour le bien de la collectivité. l’association des écomaires, les 8 critères des
Faire participer les propriétaires au sustainable communities. Ces documents
financement des aménagements urbains fait méthodologiques ont en commun de proposer
parti des solutions à envisager. Le tout étant des orientations en faveur du développement
de savoir comment cette participation doit durable sans pour autant exiger l’application
avoir lieu. d’un protocole à vocation universel. C’est
également par ce qu’elles sont à la fois
Le Ministère de l’écologie et du précises et qu’elles laissent une grande marche
développement durable a, depuis l’élection de de manœuvre à ceux qui s’appui dessus pour
Nicolas SARKOSY à la tête de l’Etat, une opération d’aménagement que ces trois
augmenté son champ de compétence et est méthodes nous semble pertinentes.
devenu le Ministère de l’Ecologie, du
Développement et de l’Aménagement
Durables. Le regroupement ainsi opérer entre 4.1 Les 11 objectifs pour
ministère de l’écologie et ministère de l’aménagement urbain
l’équipement et des transports est sans doute Gilles Olive et Olivier Piron, score 2D (société
l’occasion de voir naître une nouvelle coopérative ouvrière de réalisations pour
dynamique pour le renouveau de l'environnement et le développement durable), 5e
l’aménagement urbain avec pour objectif entretiens de l’aménagement, 02/02/2007.
central une plus grande prise en compte du
développement durable. Le grenelle Cette méthode à pour but de structurer les
gouvernementale sur l’environnement qui aura démarches liées à l’aménagement urbain
lieu à l’automne 2007 est le premier signe durable afin de quitté les actions isolées
extérieur de cette volonté de renouvellement réalisées jusqu'à présent pour créer une
dans la politique de l’état autour de l’écologie dynamique d’ensemble. En préalable à
et du développement durable. Les questions de l’énumération des onze objectifs, il faut
gouvernance et de modification du droit rappeler qu’aucune démarche d’aménagement
ne peut se faire sur un secteur donné sans
41 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
prendre en compte les interactions entre le (CVB) avec son contexte territorial.
territoire en question et les ensembles Regroupe les objectifs assignés à l’opération
territoriaux plus vastes dont il fait parti. (tel qu’accueillir une nouvelle population,
Les dimensions à prendre en compte sont : redonner ses fonctions d’origine à des
1. La dimension environnementale. territoires centraux en crise, etc.).
Evidente. L’acceptation globale du projet, son
2. La dimension politique. Présente adéquation avec les démarches prisent à
partout afin de rendre possible les opérations d’autres échelles sont les critères de validité
et pour répondre au mieux aux demandes des de cette adéquation.
citoyens. • Cohérence économique des espaces
3. La dimension sociale. La prise en et des réseaux. Cette cohérence est évaluée
compte de la diversité des situations permettra par rapport à la faisabilité d’un bilan
de mener des actions comprises par tous. raisonnable pour l’opération. Il est évident que
Les principes d’action en découlant sont : certain réseau ne verront le jour que si la zone
1. Le principe de diversité sociale. Le en cours d’urbanisation est prévue pour
terme de diversité est préféré au terme de recevoir une population importante. C’est
mixité car cette dernière n’a de sens que si notamment le cas des réseaux de transports en
l’on en précise la définition et que l’on indique commun.
la méthode d’évaluation. Le principe de • Adaptabilité économique des
diversité réside dans l’affirmation : « tout « activités libres ». Ces activités sont celles
déséquilibre marqué sur un territoire, sous un qui ne sont pas déterminé par l’économie, hors
aspect quelconque, peut poser des problèmes activité scolaire. Ce sont donc les activités de
directs, et sera de toute façon compensé par un détente, de loisir et les activités
déséquilibre inverse dans d’autres lieux. socioculturelles. Réfléchir à leur adaptabilité
2. Le principe d’adaptabilité. Au vue équivaut à réfléchir à la gestion future des
des divers échelles temporelle entrant en jeux espaces (souvent publics) prévus pour recevoir
dans une opération d’aménagement urbain, au ces activités. Cette réflexion est donc celle de
vue de l’évolution des techniques et en l’adéquation entre un espace et la population
prévision des futurs aléas liés à l’étalement habitant à proximité de cet espace. Puisque
temporel, il est important de conserver des l’âge de la population et le type de population
facultés d’adaptation. résident dans un quartier évolue, il faut
3. Le principe de variabilité envisager dès la création d’un espace ces
économique. L’aménagement urbain doit être modalités de reconversion si besoin, en accord
économiquement gérable à long terme tout en avec les différent types d’usagers concernés et
sachant s’adapter aux variations économique à en tenant compte de leur propre évolution.
cour et moyen terme. • Compatibilité durable des activités
4. Le principe d’expérimentation et humaines. Cet objectif est basé sur le constat
d’innovation. Seule l’expérimentation urbaine que toutes les activités humaines ne sont pas
permet de vérifier la qualité des apports compatibles entre elles. Les nuisances
théoriquement innovant. Permettant ainsi de réciproques de telles ou telles activités
savoir si une innovation est effectivement empêchent leur proximité. Il faut donc prendre
intéressante ou non et donc d’envisager sa ne compte très tôt ces questions pour ne pas
diffusion à grande échelle. La validation in- avoir de conflit d’intérêt à gérer par la suite.
situ par le biais d’analyses engendre une • Accessibilité socialement équitable
démarche en perpétuelle évolution et des réseaux. Cela fait parti de la prise en
dynamique. compte de la dimension sociale du
développement durable. Si le quartier en cour
Les onze objectifs de création ou de renouvellement est amené à
• Adéquation économique, sociétale et avoir une diversité d’usages et de résident, il
environnementale du Cadre de Vie Bâtie faut permettre un diversité d’accès par
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 42
plusieurs type de moyens de transports. Cette etc. Il faut là encore faire en sorte que cet
question ne peut être traité sans celle de la objectif ne soit pas perçu comme une
proximité entre les activités et les points de contrainte mais plutôt comme un point
déserte par les moyens de transports. d’appuis de la réussite économique.
• Equité sociale et qualité culturelle • Exigences environnementales pour
des activités libres. Cette cible se veut être, les activités libres. Si les objectifs sont les
pour les activités libre, la traduction des même que pour la cible précédente, les
principes concernant la dimension sociale et modalité opérationnels sont tout autres.
démocratique prenant en compte les attentes Puisqu’il est difficile de déterminer les usages
des résidents et de leur diversité. Il faut donc, d’un lieu a priori, il faut s’appuyer sur la
pour parvenir à cette équité sociale, travailler démocratie participative et associer les
en partenariat avec les représentants de ses résidants à la détermination des programmes,
diverses activités. Seul le processus des solutions. Cet objectifs prend toute sa
d’appropriation des espaces dédiés aux mesure si l’objectif 6 à été correctement
activités libres (équipement, espaces publics, réalisé.
espaces commun) par l’ensemble des résidant • Participation active de la population
rendra compte que cette équité est effective. à la définition et à la gestion
• Exigences environnementales pour environnementale du CVB. Tout progrès
les espaces du CVB. Ces exigences sont des environnemental passe par l’implication de la
thèmes proches de ceux mis en avant dans la population. Ce constat débouche sur « des
qualité environnementale du bâtiment. En plus impératifs comportementaux vitaux pour la
des questions liées aux énergies renouvelables. réussite du projet dans le temps. » l’ampleur
Il est important de trouver les moyens du mouvement associatif local montrera la
« d’optimiser la qualité environnementale du réussite de cet objectif.
Cadre de Vie Bâtie. » Tel que la végétalisation
des toitures, la récupération des eaux de pluie, Les onze objectifs se veulent généraliste et
la circulation de l’air, etc. Ce travail est déjà utilisable dans tout projet d’aménagement.
avancé au niveau du bâtiment, mais il faut agir Cette volonté confère au document une
de manière analogue au niveau de certaine prudence qui amène volontairement
l’urbanisme. son auteur à ne formuler aucune préconisation
• Maîtrise environnementale des en matière de densité. Cette méthode est plus
réseaux. Les réseaux, par définition, passent faite pour aidée en terme de management
de l’extérieur à l’intérieur. Du domaine public d ’ o p é r a t i o n que pour être elle même
au domaine privé. Il faut faire un travail opérationnelle comme se veux être la méthode
pédagogique pour que l’ensemble des HQE® au niveau du bâtiment. Pourtant, en
gestionnaires des réseaux agissent de concert mettant en place des critères d’évaluation de
avec des principes innovants. Pour évaluer les chacun des objectifs, les 11 objectifs pour
gains réellement effectuer par ces gestions l’aménagement urbain durable font en sorte
innovantes, il est important de mettre ne place d’être réutilisable lors de la mise en place des
une liste quantitative dans les différents démarches ouvrant la voie à une labélisation
domaines liés aux réseau (eau de pluie, ou une action analogue. En agissant de la
énergie, etc.) sorte, score 2D donne un caractère
• Exigences environnementales pour universalisant à leur démarche.
les activités économiques. En plus des
éléments déjà présent dans la cible7, il faut y
ajouter les optimisations apporter par
l’ensemble des entreprises présentes dans le
quartier. Par exemple, les plans de
déplacements, la gestion des déchets, le
traitements des eaux ayant servie à l’industrie,
43 PUCA – Plan | Urbanisme | Construction | Architecture Vers des villes viables et acceptables | Quartier durables
• des actions menées en faveur des l’importance de leur ancrage dans le local. Si
aptitudes et des investissements méritant dans l’accord de Bristol on trouve une manière
d’être renforcés, de définir les sustainable communities, les
• des réalisations et autres résultats moyens pour parvenir à l’établissement de
positifs obtenus dans chaque lieu, celles-ci semblent être des questions traitées
• du rôle positif joué par les pouvoirs aux niveaux nationaux. Dans cette optique, les
publics au niveau local, régional et national, définitions de certains termes peuvent être
ainsi que par l’UE. interprétées de manière différente en fonction
Toutes ces études de cas doivent être réalisées des politiques nationale étatique.
conformément au modèle de l’European
Urban Knowledge Network (EUKN). » En plus des méthodes permettant de mettre en
place une action d’aménagement urbain
La Banque Européenne d’Investissement durable, on trouve une grande variété d’écrits
(BEI) est elle aussi impliquée dans le projet ayant trait à la recherche et à
des sustainable communities puisqu’elle en l’expérimentation de l’urbanisme durable,
finance une partie. Par le biais de prêt. Une ainsi qu’à la notion de quartier. Regard
commission d’expert dont le but est critique sur la façon d’aborder les questions du
d’augmenter la qualité des projets soutenus développement durable, ces textes ne
par la BEI sera mise en place. permettent pas de mettre en place une action
La question des aptitudes nécessaires durable. Leur pertinence réside dans le fait
pour parvenir à « un bénéfice en qu’ils sont des réflexions à prendre en compte
compétences » est importante dans pour améliorer les futures actions
l’établissement des sustainable communities. d’aménagement durable qui pourront avoir
Les questions liées au problème de lieu en s’appuyant sur l’une ou l’autre des
gouvernance du projet sont misent en avant méthodes précédemment évoquées. Vous
par les états membres de l’UE. Si ces derniers trouverez certain de ses ouvrages en
ont des approches différentes de la question de consultant les diverses actions de veilles ayant
durabilité, ils s’accordent pour dire que « les trait au quartiers durables ou en consultant la
aptitudes de base à la création de lieux de vie bibliographie présente en fin du présent
attrayants et de sustainable communities document.
étaient les mêmes pour tous. » C’est pour cela
que les membres de l’UE mettront en place un
colloque sur ce thème et y travailleront de
concert.
5 Quand on ne sait
pas où l’on va, il faut y
aller et le plus vite
possible. 8
Comme vous pouvez le voir à travers cette
modeste contribution du PUCA aux questions
sur le thème Quartiers Durables, les enjeux
sont de tailles et nous ne sommes qu’aux
premiers balbutiements des réponses
possibles. Pourtant le développement durable
est en marche et aujourd’hui plus personne de
sensé ne se permet de prôner un projet
d’architecture, d’urbanisme, d’aménagement
du territoire, et de société, allant à l’encontre
de cette démarche « qui répond aux besoins du
présent, sans compromettre la capacité des
générations futures de répondre aux leurs »,
pour reprendre les termes de Gro Harlem
Brundtland.
peuvent être porteur de sens et permettre la de l’urbanisme à l’échelle du quartier fait parti
mise en place du développement durable dans du grand tout général des préceptes du
notre société. Au travers du présent ouvrage, popularisé par le rapport de la commission
nous n’avons nullement fait une étude mondial sur l’environnement et le
exhaustive des méthodes et expérimentations développement de 1987 : Our Common
d’aménagement durable. Tel n’est pas notre Future. En cherchant à modifier en profondeur
vocation. Nous avons simplement essayer de les modes de penser le devenir de l’être
faire par, au travers de quelques exemples, de humain et de son écoumène (le quartier ayant
la diversité des approches existantes sur le une place non négligeable dans cette notion),
développement durable à l’échelle urbaine. Au nous sommes amener à faire des choix
milieu des multiples termes comme : engageant notre responsabilité face aux
développement durable, qualité architecturale, générations futures, nos enfants. A nous de
qualité urbaine, qualité environnementale, faire en sorte d’engager les réformes
qualité d’usage, HQE®, cadre de vie, vie de permettant de mettre en place le
quartier, etc. nous devons faire en sorte de développement durable. Nous devons prendre
trouver un langage commun et une conscience de nos erreurs passées ; essayer de
terminologie acceptable par tous et pour tous. ne pas les reproduire ; essayer de laisser la
Cela permettra de positionner le débat sur un porte ouverte aux évolutions. Il faut rester
socle commun de discussion. Au premier humble devant l’ampleur de la tâche à
abord, la qualité semble être le plus petit accomplir et avoir conscience qu’aucune
dénominateur commun. Selon le poncif solution toute faite ne peut émerger. Poser
couramment utilisé par les techniciens en correctement les bonnes questions et chercher
qualité : « la qualité est l’affaire de tous », a à déterminer les bases permettant l’ouverture
partir de ce postulat, il semble dès lors et le dialogue autour du développement
possible de trouver un moyen d’intéresser durable est déjà un début.
l’ensemble de la société autour des concepts C’est ce que le PUCA tente de faire en partant
liés au développement durable. de la question du quartier au travers des
ateliers Quartiers Durables (comme vous
Nous sommes au commencement d’une pouvez le constater à travers la lecture de leur
évolution majeur dans la conception même de compte rendu), au travers du présent
l’architecture, de l’aménagement, et surtout de document ainsi qu’au travers de l’appel à
la société. Depuis l’avènement de « l’homme consultation de recherche « Quartier
moderne », nous n’avons pas connu de tels Durable ». Nous espérons participer à la
changements sociétaux. Travailler sur le promotion de l’amélioration du cadre de vie
développement durable au travers du prisme
Quartiers durables, vous avez dit quartiers durables ? Synthèse contributive 52
Quartiers durables