Les maladies parodontales sont des lésions à composante inflammatoire résultant d’une agression
bactérienne de l’espace gingivodentaire, modulées par les facteurs immunologiques de l’hôte qui en
déterminent l’évolution. Il faut ainsi rechercher lors de l’examen clinique tous les éléments bactériens,
mais aussi généraux et environnementaux, susceptibles d’influencer la maladie parodontale. Cet examen
repose sur un matériel simple, mais il doit être précis et rigoureux pour aboutir à un diagnostic
sémiologique qui sera à confronter aux données actuelles, par le biais des classifications parodontales, et
ainsi pourra-t-on envisager un plan de traitement et un pronostic. Une analyse chronologique est alors
réalisée en commençant par le motif de consultation, puis l’interrogatoire qui permet de déterminer les
facteurs de risques de la maladie mais également d’évaluer son passé buccodentaire ; ils sont réalisés au
cabinet dans un climat de confiance ; l’examen physique, lui, est réalisé au fauteuil en notant d’abord
tous les facteurs environnementaux locaux susceptibles d’induire ou d’aggraver la maladie parodontale,
puis l’examen parodontal précis comportant l’évaluation du parodonte superficiel (inflammation, type de
parodonte...) et l’examen du parodonte profond (sondage, saignement, examen des furcations) est
réalisé pour essayer de déterminer la date de début et la vitesse d’évolution des symptômes.
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Plan
¶ Introduction 1
¶ Interrogatoire 1
Anamnèse et motif de consultation 1
¶ Examen clinique 3
Évaluation de l’hygiène buccodentaire 3
Examen des dents 3
Examen du parodonte marginal 5
Examen du parodonte profond 6
Photographies 7
¶ Conclusion 7
Odontologie 1
23-442-A-10 ¶ Examen clinique des parodontites
Pour instaurer un climat de confiance, cet entretien doit être susceptibilité aux infections parodontales et à la maladie elle-
réalisé sans précipitation en y consacrant tout le temps même. On comprend donc aisément que, pour la détection des
nécessaire. signes de stress psychologique, l’écoute au cours de la consulta-
Il faut également recueillir tous les symptômes perçus par le tion initiale devienne primordiale.
patient : saignements, douleurs et sensibilités, abcès ou suppu-
rations, mobilités, migration, halitose, tassements alimentaires, Tabac
récessions gingivales. L’ensemble des études désigne le tabac comme un facteur de
risque majeur sur le parodonte. [7] Les relations entre le type de
Anamnèse locale tabac, la dose de tabac et la formation de la plaque sont encore
mal connues et son effet sur le tartre est inconnu, mais les effets
L’anamnèse locale permet de déterminer l’état buccal en du tabac sur le système de défense sont les suivants :
fonction de l’histoire de la maladie parodontale ; il faut • le nombre de polynucléaires neutrophiles est diminué ;
déterminer et évaluer : • les fonctions chimiotactique et phagocytaire sont diminuées
• le passé buccodentaire ; in vitro ;
• si un diagnostic parodontal a été réalisé, et à quelle date, et • la réponse inflammatoire est réduite dans son amplitude ;
si des traitements spécifiques ont déjà été prodigués, y • la production d’immunoglobulines A sécrétoires est réduite.
compris un apprentissage du contrôle de plaque ; Plusieurs études montrent une relation dose-réponse entre la
• le nombre de brossages et leur durée ; sévérité de la maladie parodontale et la quantité de tabac
• le type de brosse et la technique appliquée, ainsi que l’utili- consommée : le tabagisme exerce une influence négative sur la
sation éventuelle d’accessoires complémentaires (fil, bâtonnet, progression des maladies parodontales et sur la guérison après
brossette, jet). traitement parodontal. [8]
2 Odontologie
Examen clinique des parodontites ¶ 23-442-A-10
Odontologie 3
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• L’OHI-S (oral hygiene index simplifié) se compose de deux indices : l’indice simplifié de débris (DI-S) et l’indice simplifié de tartre
(CI-S).
• Le DI-S est un indice numérique allant de 0 à 3 :
C 0 : ni débris, ni coloration ;
C 1 : débris mous couvrant jusqu’au tiers de la surface de la dent ;
C 2 : débris mous couvrant entre le tiers et les deux tiers de la surface de la dent ;
C 3 : débris mous couvrant plus des deux tiers de la surface de la dent.
• Le CI-S est aussi un indice numérique allant de 0 à 3 :
C 0 : absence de tartre ;
C 1 : tartre supragingival ne couvrant pas plus du tiers de la surface de la dent ;
C 2 : tartre supragingival couvrant entre le tiers et les deux tiers de la surface de la dent ;
C 3 : tartre supragingival couvrant plus des deux tiers de la surface de la dent ou bande continue de tartre sous-gingival.
• Le principe de l’OHI-S consiste à additionner les scores, à les diviser par le nombre de surfaces examinées, et à combiner l’indice de
débris et l’indice de tartre.
• 0 : pas de plaque.
• 1 : mince film de plaque au contact de la gencive marginale visible seulement après exploration à la sonde.
• 2 : accumulation modérée de plaque au contact de la gencive marginale ; pas de plaque dans les espaces interdentaires ; dépôts
visibles à l’œil nu.
• 3 : grande accumulation de plaque au contact de la gencive marginale ; présence de plaque dans les espaces interdentaires.
Il semble être le plus adapté en pratique quotidienne pour évaluer le niveau général d’hygiène du patient :
• – : absence de plaque dans la région gingivale marginale ;
• + : présence de plaque détectable à la sonde et visible après coloration.
nombre de faces avec plaque/nombre de faces observées × 100 = %.
0 : ankylose.
1 : mobilité physiologique perceptible entre deux doigts.
2 : mobilité transversale visible à l’œil nu inférieure à 1 mm.
3 : mobilité transversale supérieure à 1 mm.
4 : mobilité axiale.
La mobilité ne peut être diagnostiquée en tant que telle ; elle Traumatisme occlusal secondaire
doit être associée à son étiologie, permettant de poser un
diagnostic différentiel mais aussi un pronostic. Il désigne les forces occlusales s’exerçant sur un parodonte
déjà affaibli par une maladie parodontale.
Traumatisme occlusal Toutes les dents atteintes de ce traumatisme occlusal secon-
Traumatisme occlusal primaire daire ont déjà subi un traumatisme occlusal primaire mais la
réciproque n’est pas vraie.
Il est engendré par des forces occlusales anormales s’exerçant
sur des structures parodontales saines. Il entraîne donc un Le traumatisme occlusal à lui seul ne peut pas provoquer une
élargissement du ligament alvéolodentaire sans qu’il ne se parodontite, mais, dans un contexte défavorable, peut accélérer
produise de migration apicale de l’attache épithéliale et sans la formation de poches. Plusieurs symptômes sont alors retrou-
perte osseuse. vés : mobilité, migration, douleur ou inconfort à la mastication,
4 Odontologie
Examen clinique des parodontites ¶ 23-442-A-10
Odontologie 5
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“ Classification de Maynard
gueurs), avec une particularité pour la sonde de Nabers qui est
courbe et qui permet d’évaluer les atteintes interradiculaires. La
sonde CPITN (Organisation mondiale de la santé) est essentiel-
et Wilson [28] lement destinée aux enquêtes épidémiologiques pour mesurer
l’indice du même nom, car l’absence de graduations entre 5,5 et
• Type I : dimension normale de tissu kératinisé (3 à 8,5, et 8,5 et 11,5, rend difficile une utilisation quotidienne.
Sondes manuelles à pression constante. Elles permettent
4 mm : parodonte épais) et épaisseur vestibulolinguale
d’appliquer une force constante de 25 g quelle que soit l’angu-
normale du procès alvéolaire.
lation donnée au manche par l’examinateur.
• Type II : dimension de tissu kératinisé réduite (moins de Sondes électroniques. Elles combinent la force de sondage
2 mm) et épaisseur vestibulolinguale normale du procès constante avec la mesure précise électronique et le stockage par
alvéolaire. ordinateur des données.
• Type III : dimension normale de tissu kératinisé (3 à L’examen se fait en insérant la sonde le long de la racine en
4 mm : parodonte épais) et épaisseur vestibulolinguale du gardant son contact dans le sillon gingival, le plus parallèlement
procès alvéolaire amoindrie. possible au grand axe de la dent : dès qu’une résistance élasti-
• Type IV : dimension de tissu kératinisé réduite et que se perçoit nettement, la pression s’arrête.
épaisseur vestibulolinguale du procès alvéolaire Ces deux derniers types de sondes sont toutefois peu utilisés
en pratique quotidienne.
amoindrie ; il existe un fort potentiel de récessions.
Où sonder ?
Quatre points (vestibulaire, lingual, mésial et distal) sont
mesurés et répertoriés sur un schéma de sondage (charting).
Examen du parodonte profond Nous pouvons considérer qu’un site est sain lorsque la profon-
deur de poches n’excède pas 2,5 à 3 mm.
Sondage
Que sonder ?
Il permet de mettre en évidence deux paramètres importants :
la profondeur de poche et la perte d’attache, qui à la fois nous Le sondage permet d’évaluer deux paramètres importants :
donne une idée sur la gravité des lésions provoquées par la • la profondeur de la poche : bord gingival au fond de la
maladie parodontale mais va également nous servir de guide et poche ;
de repère thérapeutique lors des phases de réévaluation et de • la perte d’attache : jonction amélocémentaire au fond de la
maintenance. poche ;
• l’importance d’une lésion interradiculaire.
Quand sonder ? Il permet aussi d’évaluer l’inflammation objectivée par le
Le sondage déclenche une bactériémie, même en l’absence de saignement après insertion douce puis retrait de la sonde dans
maladie parodontale, sans aucune conséquence néfaste chez un la poche parodontale, voire de visualiser des suppurations, signe
patient sain mais pouvant devenir dangereuse chez un patient tardif d’une infection parodontale.
6 Odontologie
Examen clinique des parodontites ¶ 23-442-A-10
Saignement
Le sondage d’un sulcus sain avec une sonde mousse
n’entraîne pas de saignement. Le saignement au sondage fournit Figure 6. Atteinte de la furcation de classe III.
le meilleur critère diagnostique de l’inflammation gingivale ; s’il
ne prouve pas l’activité d’une lésion, son absence semble en
revanche être significative d’une lésion stable dans le temps. [31]
Cet écoulement sanguin est la conséquence de l’amincissement
de la couche épithéliale tapissant la paroi gingivale de la poche.
La sonde provoque des micro-ulcérations épithéliales et blesse le
“ Classification de Hamp
tissu conjonctif, causant facilement le saignement. et al. [33]
Odontologie 7
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Toute référence à cet article doit porter la mention : Calas-Bennasar I., Bousquet P., Jame O., Orti V., Gibert P. Examen clinique des parodontites. EMC (Elsevier
SAS, Paris), Odontologie, 23-442-A-10, 2005.
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